1.2 L'impact sanitaire des résidus miniers est difficile à évaluer

1.2.1 Les résidus sont la principale source artificielle d'exposition aux rayonnements due à l'utilisation de l'énergie nucléaire

Plusieurs corps participent au risque d'exposition. En subissant des désintégrations radioactives l'uranium donne naissance à des produits dits « de filiation » (ou « descendants ») qui sont eux mêmes radioactifs, jusqu'à un élément qui, en bout de chaîne, est stable. L'uranium naturel est composé de trois isotopes, selon la répartition suivante (en masse) : 99,2834238 % d'U 238 , 0,7111683 % d'U 235 et 0,0054079 % d'U 234 . La chaîne de désintégration de l'uranium 238 comprend 14 éléments, le bout de chaîne étant le Plomb 210. La chaîne de l'uranium 235 comprend 11 éléments et s'achève sur le plomb 207, élément stable. Parmi les radioéléments présents dans le minerai, deux sont sous forme gazeuse : le radon 222 pour la chaîne de l'U 238 , le radon 219 pour la chaîne de l'U 235 , Enfin les minerais d'uranium renferment également du thorium 232, qui génère lui aussi une chaîne de désintégration radioactive (à laquelle appartiennent en particulier le radium 228 et le radon 220).

Dans la nature, l'uranium naturel est présent avec tous les descendants de chacune de ses chaînes. La période de demi-vie des éléments situés en tête de chaîne étant très importante (4,5 milliards d'années pour l'U 238 , 700 millions d'années pour l'U 235 ), il' s'établit au fil du temps un « équilibre radioactif », situation où, pour chaque radioélément de la chaîne, il se crée autant d'atomes par la désintégration du radioélément précédent qu'il n'en est détruit par la désintégration qui donne naissance au radioélément suivant. Dans ces conditions les activités de tous les éléments d'une même chaîne sont égales :

- l'activité d'un radionucléide de la chaîne de l'U 238 est égale à 12 347 Bq.g -1 ;

- l'activité d'un radionucléide de la chaîne de l'U 235 est égale à 569 Bq.g -1 ;

La chaîne de l'U 238 comprenant 14 radionucléides et la chaîne de l'U 235 comprenant 11 radionucléides, l'activité totale de l'uranium dans la nature est égale à 14 x 12347 + 11 x 569, soit 179 107 Bq par gramme d'uranium contenu. On peut ainsi à partir de simples multiplications dresser un tableau permettant de visualiser rapidement l'activité de quelques matériaux en fonction de leur teneur en uranium (voir page suivante).

Dans les résidus, il ne subsiste plus que les radionucléides non extraits par le traitement. Par ailleurs la courte période de demi-vie des deux premiers descendants de l'U 238 (thorium 234 : 24 jours et protactinium 234 : 1,2 minute) entraîne leur disparition précoce et fait que la radioactivité de la chaîne de l'U 238 est gouvernée après une centaine de jours par l'activité du premier descendant à vie longue, à savoir le thorium 230 (durée de demi-vie : 75 000 ans). De même, pour la chaîne de l'U 235 , le descendant immédiat de l'U 235 disparaît après quelques multiples de sa période de demi-vie (thorium 231 : 25,6 heures) ; la radioactivité de la chaîne est ensuite gouvernée par le premier descendant à vie longue, qui est le protactinium 231 (durée de demi-vie = 33 000 ans). Au total, 4 éléments de la chaîne de l'U 238 et 2 éléments de la chaîne de l'U 235 ont disparu. En supposant un rendement d'extraction de 100 %, l'activité totale a donc été diminuée de 4 x activité de l'U 238 + 2 x activité de l'U 235 , soit environ 50 520 Bq par gramme d'U contenu.

Radioactivité naturelle des minerais d'uranium et autres matériaux

Teneur (g.t -1 )

Activité

massique

totale

(Bq.g -1 )

Activité

massique du

Ra 2 26

(Bq.g -1 )

Granités uranifères

1

0,18

0,012

10

1,8

0,12

15

2,7

0,18

20

3,6

0,25

30

5,4

0,37

50

9

0,61

100

18

1,2

Minerais

300

54

3,7

500

90

6,2

1000

179

12,3

5000

895

61,5

10000 (teneur = 1%)

1791

123

teneur = 10% (Canada)

17910

1234

teneur = 15 % (Canada)

26865

1851

teneur = 20 % (Canada)

35820

2468

Source : COGEMA, La radioactivité naturelle des minerais d'uranium, de leur environnement géologique et des résidus de traitement de minerai, avril 1995

(note préparée à l'intention de l'office parlementaire)

L'activité subsistant dans les résidus une fois l'équilibre radioactif rétabli est ainsi de 128 590 Bq par gramme d'U contenu à l'origine, soit 72 % environ de la radioactivité initiale. Dans la pratique la radioactivité réelle est légèrement supérieure car le rendement de l'extraction n'est jamais égal à 100 % : il subsiste donc une faible activité due à l'U 238 et ses deux premiers descendants ainsi qu'à l'U 235 résiduel et son premier descendant.

Dans ses rapports à l'Assemblée générale des Nations Unies (98 ( * )) , l'UNSCEAR établit périodiquement un bilan des sources d'exposition auxquelles sont soumises les populations. Au sein de l'exposition due à l'ensemble des activités occasionnées par la production d'électricité, celle qui est due aux résidus miniers occupe une place privilégiée. Les radioéléments contenus dans les résidus sont susceptibles d'avoir un impact sur la population selon les trois voies d'exposition traditionnelles :

- exposition externe par rayonnement ã : elle est due au bismuth 214 (chaîne de l'U 238 )à hauteur de 85 % ;

- exposition interne par inhalation : le principal contributeur est le radon 222 ou plus exactement ses descendants à vie courte (Pb 214 et Bi 214 essentiellement) ; ceux-ci, sous forme solide, se fixent sur les poussières et aérosols et peuvent être déposés avec eux dans les bronches et les poumons ; par ailleurs les particules fines composant une partie des résidus peuvent être mises en suspension dans l'air ;

- exposition interne par ingestion : les éléments les plus pertinents pour évaluer le risque radiologique sont les concentrations en uranium et en radium 226 solubles.

L'évaluation du risque sanitaire causé par les résidus de toutes sortes commence par l'évaluation du « terme source », c'est-à-dire des caractéristiques radiologiques pertinentes relatives à la source du rayonnement. Pour l'exposition externe, il m'a été difficile de trouver dans la littérature variée que j'ai pu avoir à ma disposition des indications détaillées sur les débits de dose dus aux divers résidus. Un document de l'IPSN relatif aux résidus de l'usine SIMO de l'Écarpière (Vendée) (99 ( * )) mentionne un débit de dose de 1,5 ì Gy.h -1 à une distance de 1,5 m des résidus. Il mentionne également le calcul théorique d'un débit de dose près d'une masse semi-infinie de résidus SIMO secs, égal à 9 ì Sv.h -1 , utilisé pour des évaluations pratiquées par ailleurs dans le rapport.

L'exposition due au radon est la composante principale de l'exposition totale du fait de l'extraction et du traitement du minerai. L'UNSCEAR lui accorde une place privilégiée dans ses rapports. La grandeur radiologique pertinente est le flux de radon activité radon émise par le matériau pour une surface de 1 m 2 pendant 1 seconde. Peu de renseignements sont disponibles sur les émanations radon dues aux « stériles » de mines. Dans son rapport 1988, l'UNSCEAR estime que l'on peut retenir une valeur "largement applicable" de 10 Bq.m -2 .s -1 pour du minerai à 0,2 % de teneur, à partir de données provenant des États-Unis et d'Australie.

Pour un résidu « frais » (100 ( * )) , le flux de radon dépend de la concentration en radium 226, précurseur immédiat du radon dans la chaîne de désintégration. Des mesures effectuées sur des stocks de résidus « frais » montrent que le flux de radon est d'environ 1 Bq.m -2 .s -1 pour 1 Bq.g -1 de radium 226 contenu. Par ailleurs un minerai de teneur 1 % en uranium contient environ 100 Bq.g -1 de radium 226. Pour un minerai de teneur en uranium égale à 0,2 % (moyenne mondiale), le flux moyen de radon à partir des résidus « frais » serait donc de 20 Bq.m -2 .s -1 . Sur la base d'informations communiquées par l'Australie, l'ex-RDA, le Canada et l'Argentine, l'UNSCEAR donne également une valeur de 10 Bq.m -2 .s -1 , compatible avec l'estimation précédente.

La protection radiologique contre les effets des résidus passe par la réduction du flux de radon qui s'en échappe. Sur la base d'études conduites sous l'égide de l'Agence pour l'Énergie nucléaire de l'OCDE, l'UNSCEAR estime que ce flux de radon pourrait être réduit par des facteurs allant jusqu'à 10 6 , selon les travaux effectués et le contexte local. Le Comité retient une valeur moyenne de 3 Bq.m -2 .s -I après réaménagement.

C'est à partir de cette valeur qu'est calculée l'estimation présentée dans l'une des lignes du tableau ci-dessous. L'UNSCEAR a également procédé à l'évaluation d'un impact global des résidus miniers. L'indicateur utilisé est une exposition normalisée rapportant la dose collective reçue par le public à la quantité d'électricité produite (exprimée en GW) en une année.

L'UNSCEAR distingue les composantes locales et régionales de l'exposition, reçues par les Personne du public situées au plus près des activités concernées, et la composante globale résultant de la dispersion des radionucléides du fait de certaines opérations, au premier rang desquelles l'élimination des déchets et résidus de toute sorte. Les doses sont estimées pour une durée totale de 10 000 ans car les incertitudes deviennent trop importantes au-delà.

Doses collectives normalisées reçues par le public du fait de la production d'électricité nucléaire

Doses collectives normalisées reçues par le public
du fait de la production d'électricité nucléaire

SOURCE

DOSE NORMALISÉE (b)

Composantes locale et régionale

Extraction, traitement, résidus

1,5

Fabrication de combustible

0,003

Exploitation des réacteurs

1,3

Retraitement

0,25

Transports

0,1

TOTAL (arrondi)

3

Composante globale

Résidus d'extraction et de traitement (a)

150

Déchets issus de l'exploitation des réacteurs

0,5

Radionucléides dispersés

50

TOTAL (arrondi)

200

Source : UNSCEAR. Sources and Effects of lonizing Radiation, 1993
(a) calculé sur une durée de 10 000 ans ; (b) dose exprimée en homme Sievert.GW -1 .an -1

La valeur de 150 H.Sv.GW -1 .an -1 estimée pour les résidus d'extraction résulte du produit de la durée 10 000 ans par la dose normalisée reçue en un an du fait des résidus : 0,015 (H.Sv.GW -1 .an -1 par année de relâchement). Un tel calcul est justifié par la durée de vie du Th 230 qui gouverne la radioactivité effective de son descendant immédiat (Ra 226 ) donc du radon relâché (Rn 222 ). L'UNSCEAR indique cependant que, compte tenu de la variabilité des pratiques de gestion de ces résidus, les estimations peuvent s'étager en fait de 1 à 1000 H.Sv.GW -1 .an -1 .

Ces doses collectives ne sont pas déduites de la collation de mesures effectuées à partir des sites concernés : elles découlent de modélisations mathématiques. Elles n'ont donc qu'une valeur purement indicative, à la fois pour ce qui est des valeurs numériques avancées et pour ce qui touche à la pertinence de l'information au regard du respect des obligations réglementaires. Ce respect ne peut être assuré (et contrôlé) que dans le cadre d'un périmètre déterminé autour d'une installation donnée.

1.2.2 Les règles visant à déterminer l'impact sanitaire à des fins réglementaires sont à plusieurs étages

Le texte fondamental en matière de protection contre les rayonnements est, en France, le décret n° 66-450 du 20 juin 1966 (JO du 30 juin 1966) modifié par le décret n° 88-521 du 18 avril 1988 (JO du 6 mai 1988). Ce décret a déjà été largement présenté dans les rapports que j'ai préparés ces dernières années pour l'office parlementaire. Comme tous les textes fondamentaux, il recèle des dispositions d'une grande richesse, et c'est à un aspect encore absent des rapports de l'Office que je dois m'intéresser ici.

Le décret de 1966 pose le principe du cumul de toutes les sources d'exposition pour un individu. Il impose ainsi de prendre en compte tous les radionucléides susceptibles d'être intégrés dans l'organisme, afin d'évaluer l'exposition interne en sus de l'exposition externe. Chaque radionucléide connu est affecté d'une limite annuelle d'incorporation (101 ( * )) . Cette limite est déterminée comme étant la quantité de radionucléide incorporée qui donnerait une exposition équivalente à 5 mSv (102 ( * )) . Dans une situation concrète, la contribution de chaque radionucléide présent est évaluée par rapport à sa limite d'incorporation pertinente ; le respect de la limite de 5 mSv est assuré lorsque la somme de toutes les contributions est inférieure à 1.

Ce texte général nécessite d'être décliné selon les installations industrielles concernées. Les mines relèvent du code minier et du Règlement général des industries extractives, les installations de traitement de minerai et les stockages de résidus associés relèvent de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement.

Pour ces dernières, l'encadrement réglementaire a été confié par la loi au préfet, qui définit les prescriptions applicables aux installations de son département soit par des arrêtés types (pour les installations soumises seulement à déclaration), soit par des arrêtés spécifiques (pour les installations soumises à autorisation). Dans ce dernier cas, il peut être aidé par des arrêtés types ou des circulaires ou des instructions techniques publiées par les services du Ministère de l'Environnement. C'est ainsi que le Ministre de l'Environnement a adressé aux préfets une circulaire du 29 janvier 1986, à laquelle est associée une instruction technique, "relatives aux installations de traitement de minerai d'uranium" (non parues au Journal officiel). Les dispositions retenues en matière d'exposition aux rayonnements sont parcellaires par rapport à la rédaction du décret de 1966 introduite par le décret de 1988 :

- pour l'exposition externe, l'instruction retient la limite générale de 5 mSv par an (art. 7 et art. 16 : "les expositions du fait des installations ne doivent pas excéder 5 mSv/an" ) et introduit la possibilité de fixer des normes d'exposition en divers points de la limite de propriété, sur la base de 8760 heures par an ;

- pour l'exposition aux poussières, aucune limite n'est donnée ; seules sont définies des normes d'émission ; en revanche des moyens de contrôle sont prescrits (dosimètres a de site) ;

- pour l'exposition interne par inhalation, l'arrêté préfectoral doit définir une "norme exprimée en millijoules prenant en compte l'état initial du site" et imposer de mesurer en divers points l'énergie a potentielle des descendants à vie courte du radon (103 ( * )) ; aucune valeur numérique n'est spécifiée ;

- pour l'exposition interne par ingestion (donc la maîtrise de la pollution radioactive des eaux), l'arrêté préfectoral doit imposer des contrôles sur l'uranium, le radium soluble, le radium insoluble non décanté (104 ( * )) et les extraits secs des prélèvements ; il est fait référence aux "normes de potabilité définies dans le décret du 20 juin 1966".

Il existe un certain « télescopage » entre cette instruction technique, destinée à inspirer les arrêtés préfectoraux, et le décret n° 90-222 du 9 mars 1990. Ce décret complète le Règlement général des industries extractives, et plus précisément son titre consacré aux rayonnements ionisants. Il y reproduit en matière de protection de l'environnement (et du public) les principes introduits en matière de protection des travailleurs par le décret n° 89-502 du 13 juillet 1989.

L'expression « téléscopage » est justifiée par le fait que ce décret 90-222 s'applique "aux travaux, installations de surface et dépendances légales des exploitations de substances radioactives". Or il se trouve que la plupart des usines de traitement de minerai et les stockages de résidus associés sont sur une dépendance légale d'une exploitation de substances radioactives au sens du RGIE. Ils sont donc directement soumis, pour ce qui concerne la protection contre les rayonnements ionisants, aux dispositions introduites par le décret 90-222 et échappent - sur ce point seulement - aux dispositions inscrites dans l'arrêté préfectoral ICPE régissant leur fonctionnement. Par ailleurs, la circulaire d'application annexée au décret précise que les expositions à prendre en compte comprennent également l'exposition pouvant résulter d'activités voisines à l'exploitation considérée, comme par exemple une usine de traitement de minerai n'ayant pas la qualité de dépendance légale. C'est pourquoi COGEMA applique le décret 90-222 à toutes ses usines de traitement, même celles qui, au sens strict, ne relèvent pas du RGIE.

Le décret 90-222 introduit des modalités précises pour calculer l'impact d'une installation liée à une exploitation de substances radioactives. Il exige de calculer un taux annuel d'exposition totale ajoutée (TAETA) défini - comme ci-dessus - par la somme de toutes les contributions à l'exposition rapportées à leur limite respective. Ces contributions sont relatives à l'exposition ajoutée, définie comme la différence entre l'exposition mesurée lorsque l'exploitation de substances radioactives est en activité et l'exposition naturelle. L'exposition naturelle elle-même est définie comme "l'exposition due aux rayons cosmiques et à la présence de substances naturelles radioactives, observable sur le site d'exploitation de telles substances et dans son voisinage, avant le début des travaux."

Les modes d'exposition ont été retenus au nombre de 7 : il a été jugé pertinent de regrouper les contributions de tous les descendants à vie courte du radon 222 et du radon 220 respectivement, ainsi que de tous les émetteurs a à vie longue de la chaîne de l'U 238 (pour les poussières). Deux voies spécifiques d'exposition à l'uranium (tous isotopes) ont cependant été distinguées : l'exposition par ingestion et l'exposition à des poussières d'uranate. Cette dernière ne concerne pas les résidus.

Limites annuelles des expositions ajoutées

Limite

Mode d'exposition

5 mSv

exposition externe

170 Bq

émetteurs á à vie longue de la chaîne de l'U 238 présents dans les poussières en suspension dans l'air et inhalés

2 mJ

énergie á potentielle pour les descendants à vie courte du radon 222 inhalés

6 mJ

énergie á potentielle pour les descendants à vie courte du radon 220 inhalés

3 kBq

émetteurs á à vie longue dans les poussières d'uranate (a)

7 kBq

radium 226 ingéré

2 g

uranium incorporé (b)

(a) la quantité journalière de ces poussières inhalées ne doit pas excéder 2,5 mg
(b) la quantité journalière des composés hexavalents pouvant être ingérée ne doit pas excéder 150 mg

Pour les résidus, COGEMA a déterminé des valeurs guides opérationnelles pour six de ces voies d'exposition, sur la base de considérations touchant au mode de vie d'un « homme standard » supposé inhaler 0,8 m 3 par heure et boire 2,2 1 d'eau par jour.

Valeurs guides opérationnelles

Valeur

Mode d'exposition

570 nGy.h -1

exposition externe

24 m Bq.m -3

émetteurs á à vie longue de la chaîne de l'U 238 présents dans les poussières en suspension dans l'air et inhalés

865 nJ.m -3

énergie á potentielle pour les descendants à vie courte du radon 222 inhalés

285 nJ.m -3

énergie á potentielle pour les descendants à vie courte du radon 220 inhalés

8,7 Bq.l -1

radium 226 ingéré

2,5 mg.l -1

uranium incorporé

Ces valeurs guides doivent être utilisées avec précaution : 1/ elles sont relatives à des valeurs instantanées (par exemple valeur guide de 570 nGy.h -1 pour le débit de dose), donc un dépassement ponctuel ou sur une durée réduite n'entraîne pas nécessairement un dépassement du TAETA moyenne sur l'année ; 2/ si l'une d'elle est dépassée en moyenne sur l'année on est certain que le TAETA est supérieur à 1, mais si aucune d'entre elle n'est dépassée on n'a pas pour autant de certitude que le TAETA reste inférieur à 1 puisque celui-ci prend en compte la somme de toutes les voies d'exposition. La question de la variabilité temporelle est particulièrement importante pour la voie « radon » et la voie « poussières », car elles sont très dépendantes des conditions météorologiques. Des conclusions à caractère sanitaire fondées sur des mesures effectuées sur une durée réduite sont par nature sujettes à caution.

Enfin, pour le radium et l'uranium, le décret 90-222 est plus sévère que ces valeurs guides : 1/ il impose un traitement d'insolubilisation du radium dès que la concentration en radium dissous dépasse 3,7 Bq.l -1 ; 2/ il permet cependant un rejet sans traitement pour des concentrations comprises entre 0,74 Bq.l -1 et 3,7 Bq.l -1 dès lors que la dilution du rejet par le cours d'eau récepteur est supérieure à 5, sous réserve d'un avis favorable du service chargé de la police des eaux ; 3/ il autorise le rejet sans traitement pour des concentrations en radium dissous inférieures à 0,74 Bq.l -1 , sous réserve d'un avis favorable du service chargé de la police des eaux et compte tenu des caractéristiques du milieu récepteur ; 4/ sa circulaire d'application donne aux préfets la possibilité de fixer des limites plus strictes (0,37 Bq.l -1 pour le radium 226 soluble, 3,7 Bq.l -1 pour le radium 226 insoluble, 1,8 mg.l -1 pour l'uranium 238 soluble).

1.2.3 L'existence de ces règles laisse cependant subsister plusieurs difficultés sérieuses

La Première de ces difficultés touche à l'imprécision des moyens de mesure utilisés aujourd'hui. On estime que les dispositifs de mesure actuels ne permettent pas d'apprécier à mieux que 20 nGy.h -1 près le débit de dose pour l'exposition externe.

Lorsqu'on doit passer du débit de dose horaire à la dose annuelle absorbée, il faut faire intervenir un facteur multiplicateur de 8760 (si l'on prend en compte la durée totale de l'année) ou 7000 (si l'on suppose que la personne n'est présente sur son lieu de vie que pendant 80 % du temps). L'imprécision est donc au minimum de 0,2 mSv environ, valeur qu'il faut en fait doubler puisqu'il faut prendre en compte l'incertitude sur la mesure totale et l'incertitude sur la mesure du niveau naturel.

Des améliorations sont en cours d'étude dans deux directions pour améliorer la mesure de l'exposition externe : 1/ mise au point de détecteurs thermoluminescents plus sensibles ; 2/ quantification séparée des débits de dose liés aux différentes sources (sols, cosmique, influence du Bi 214 ...).

La précision des mesures dans la détermination de l'énergie a potentielle est de #177; 15-20 %. Une meilleure exploitation des données recueillies par l'intermédiaire des dosimètres á est actuellement à l'étude. Elle vise à essayer de restituer, au niveau de chaque station de mesure, la composante naturelle effective du Rn 222 . En revanche les limites de détection pour les analyses de l'U 238 et du Ra 226 dans les eaux sont tout à fait compatibles avec une appréciation fiable de la conformité avec les limites de dose prescrites.

La principale difficulté a trait à la détermination du niveau de l'exposition naturelle. Selon les termes du décret 90-222, "au moment de l'ouverture d'un site d'exploitation, le directeur régional de l'industrie et de la recherche constate les expositions naturelles en se basant sur les éléments fournis par l'étude d'impact ainsi que, le cas échéant, sur les résultats des mesures de l'exposition qu'il a prescrites » l'exploitant. Les constatations effectuées sont notifiées à ce dernier" (art. 5).

Cette rédaction est parfaite mais ne s'applique bien qu'aux sites dont l'ouverture est projetée. Or il s'agit plutôt aujourd'hui de gérer, voire de fermer, les sites existants ! La détermination de l'exposition due aux substances radioactives naturelles présentes sur le site avant le début des travaux est impossible dans la quasi totalité des cas. Il faut alors se reporter vers des méthodes dérivées, c'est-à-dire évaluer le niveau d'exposition existant auparavant sur le site à partir des niveaux d'exposition mesurés aujourd'hui dans l'environnement du site.

Quel point faut-il retenir pour déterminer le niveau naturel d'exposition externe ? Le schéma ci-dessus montre que selon le choix effectué, il serait possible de montrer que le site a un impact ou n'en a pas du tout, voire réduit la radioactivité observable dans l'environnement !

Les mêmes difficultés sont rencontrées pour l'exposition au radon : suivant la nature du terrain, le flux de radon sortant du sol peut être extrêmement variable. On peut s'affranchir des variations temporelles en effectuant les mesures pendant une durée suffisamment longue (105 ( * )) . En revanche la valeur au point de référence à partir de laquelle on souhaite mesurer la radioactivité ajoutée par l'exploitation des installations reste éminemment sensible à la localisation géographique. Par exemple une faille dans le massif granitique procure une voie de transfert privilégiée vers l'atmosphère pour le radon produit dans les profondeurs de la roche.

Le choix des stations de référence, laissé à la seule volonté de l'exploitant, ouvre ainsi la voie à des discussions et des polémiques dont la résolution nécessite une mise à plat collective.

* 98 Voir par ailleurs dans ce rapport le chapitre consacré à la révision des normes de radioprotection.

* 99 A. M CHAPUIS, D. HARISTOY, Avis de l'IPSN sur la demande d'extension d'autorisation pour le conditionnement et le stockage des résidus RHÔNE POULENC présentée par l'usine SIMO de l'Écarpière. IPSN/9l/l869, septembre 1991.

* 100 C'est-à-dire alimenté en continu à partir d'usines de traitement en activité.

* 101 En fait plusieurs limites sont déterminées, en fonction du mode d'incorporation du radionucléide. Il en existe au moins deux, correspondant aux deux modes fondamentaux d'inhalation et d'ingestion. Dans chacun de ces deux grands domaines, plusieurs limites peuvent être établies en fonction des formes physico-chimiques sous lesquelles se présentent les radionucléides considères. Par exemple il existe pour chaque isotope de l'uranium 2 limites annuelles d'ingestion (composés solubles, composés insolubles) et trois limites annuelles d'inhalation. En revanche il n'existe qu'une limite « inhalation » et une limite « ingestion » pour chacun des isotopes du césium.

* 102 Cette valeur de 5 mSv est valable pour l'exposition au corps entier. Dans le cas du radon, qui contribue essentiellement à l'exposition du poumon, il faut considérer la limite à l'organe irradié, qui est de 50 mSv.

* 103 L'énergie a potentielle est l'énergie des rayonnements a susceptibles d'être émis dans les poumons après inhalation de radionucléides présents dans l'air. Ces radionucléides sont principalement les descendants à vie courte du radon 222 et du radon 220. L'énergie á potentielle est exprimée en millijoules (mJ), compte tenu du débit d'inhalation pris égal à 0,8 m 3 .h -1 pour une personne du public « standard ».

* 104 Le radium soluble est celui qui peut passer au travers d'un filtre normalisé d'une porosité égale à 0,45 ìm. Le radium insoluble est celui qui reste déposé sur le filtre.

* 105 COGEMA m'a cependant indiqué que des moyennes annuelles peuvent se révéler insuffisantes, car on observe parfois - pour un même point - des variations supérieures à 1 mSv entre deux années différentes.

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