ANNEXES

Liste des auditions

1er mars 1994

MM. Alain GUILLOUËT et Jean LAMURE, service de la législation fiscale, M. François ECALLE, direction de la prévision, M. Antoine GLAIZE, direction générale des impôts

MM. Francis MAYER et Thierry FRANCK, direction du Trésor

12 avril 1994

Professeur Michel MOUILLART.

3 mai 1994

M. André THOMAS, Fédération nationale du bâtiment

10 novembre 1994

MM. Xavier JOSSET et Bernard COLOOS, Crédit foncier de France

Cahier des charges

Évaluation de mesures fiscales relatives au logement

AUDITION DE

MM. Alain GUILLOUÊT et Jean LAMURE

Service de la Législation fiscale

François ECALLE Direction de la prévision

Antoine GLAIZE Direction générale des impôts

le 1er mars 1994 105 ( * )

MM. ECALLE, GUILLOUËT, LAMURE et GLAIZE ont exposé les grandes lignes de la méthode permettant à l'administration de mesure le coût et l'impact des dispositions fiscales (sur les ménages) concernant l'immobilier.

Il est procédé par tirages d'un échantillon de 400.000 contribuables, représentatif au niveau national du revenu imposable et de l'impôt (variables de la déclaration n° 2042).

Cet échantillon peut également être représentatif du niveau départemental pour les variables les plus répandues (impôt, revenu, nombre de parts, charge des intérêts d'emprunts...). Il l'est moins pour des variables moins fréquentes (déficits fonciers, certaines dépenses ouvrant droit à réduction d'impôt...).

Les informations sont saisies sur la base des déclarations fiscales. Le processus dure deux ans, mais la grande majorité des éléments est saisie dès la première année.

Deux tirages successifs de l'échantillon sont effectués pour une année de revenu (à compter de 1995) :

- le premier à l'issue de la 7ème émission (qui a lieu en octobre de l'année n + 1 et représente environ 96 % du montant total émis au titre d'une année de revenu) ;

- le second, à l'issue de la 12ème émission (qui a lieu en avril de l'année n + 2 et représente 99 % des contribuables). 106 ( * )

Il existe également un échantillon de 40.000 contribuables, mis à la disposition de la direction de la prévision.

La taille de ces échantillons est croissante avec le délai. Compte tenu du délai de traitement des déclarations d'impôt sur le revenu, plus la situation de référence ayant servi au tirage de l'échantillon tend à être exhaustive, plus le temps écoulé depuis l'année de perception des revenus est important.

On introduit ensuite dans ces échantillons les variables fiscales correspondant aux mesures envisagées. On effectue ensuite une simulation qui permet d'en déterminer le coût à comportement constant.

Il s'agit d'un outil très fiable pour la fiscalité des particuliers. Il est à la disposition de la direction de la prévision, de la direction générale des impôts et du service de la législation fiscale. Des résultats actualisés peuvent être fournis, à partir de cet outil, selon le rythme de ses mises à jour. En effet, les outils de simulation sont actualisés à partir des fichiers de gestion de l'impôt sur le revenu : les résultats actualisés sur une année de revenu donnée peuvent être disponibles à compter de la fin de l'année n + 1.

Cette simulation peut être plus ou moins simple. Par exemple, le relèvement du taux de la déduction forfaitaire entraîne un accroissement de coût mécanique de 330 millions de francs le point. Cette mesure étant structurelle et son impact étant à long terme, on peut estimer que les comportements sont peu modifiés dans l'immédiat (en tous cas sur la prochaine année budgétaire).

D'autres mesures entraînent un calcul plus complexe, comme par exemple l'exonération provisoire des plus-values d'OPCVM réinvestis dans le logement. En effet, il faut mesurer le coût de l'exonération elle-même mais aussi celui de la neutralisation du compteur de cessions.

Au-delà de cette évaluation du coût pour les recettes publiques, trois gestions sont à envisager :

- l'évaluation des changements de comportement induits par la mesure fiscale dans leurs aspects financier et psychologique. Cette évaluation déterminerait le résultat économique de la mesure ;

- la mesure des distorsions introduites par la fiscalité ;

- enfin, l'évaluation du surcroît de recettes généré pour les finances publiques par les effets économiques des mesures fiscales.

L'administration a connaissance, mesure par mesure et globalement de l'existence de ces phénomènes, mais elle ne sait pas les quantifier.

S'agissant des changements de comportement, une étude statistique et économétrique serait nécessaire. Ce qui est réalisé est une conversion des mesures (globalement mais pas mesure par mesure) en équivalent prix de l'immobilier. C'est-à-dire qu'on mesure le gain de pouvoir d'achat en logement réalisé grâce à la mesure fiscale. On évalue ensuite le changement de comportement envisageable en fonction d'une élasticité de la demande par rapport au prix déjà connue.

Cependant, on sait que les éléments de gain de pouvoir d'achat n'interviennent que pour une part, non constante, dans les changements de comportement. Par exemple, il apparaît que les réductions d'impôt pour l'accession à la propriété, d'un coût relativement élevé (10 milliards de francs en 1992 et 9,2 milliards de francs en 1993) n'interviennent pas dans le calcul que font les prêteurs (banquiers) de la solvabilité des clients. Par conséquent, ces aides n'entraîneraient pas de surcroît de crédit, qui demeure l'élément-clé de l'accession à la propriété.

Une part non négligeable, mais également non mesurée, d'éléments psychologiques intervient dans ces changements de comportement. Il en est ainsi de la taxation des plus-values immobilières, beaucoup plus basse que celle des plus-values financières (2 milliards de francs contre 50 milliards de francs). Le relèvement de 3,33 % à 5 % annuels de l'abattement sur ces plus-values n'a pas entraîné un bénéfice considérable pour le contribuable, mais son impact psychologique a été considéré comme très fort. De même, la mesure ponctuelle sur les OPCVM de court terme a été très bien accueillie par les professionnels comme devant avoir un fort impact psychologique - en suscitant des arbitrages - malgré un avantage objectivement réduit pour les contribuables concernés.

Par ailleurs, les représentants de l'administration ont considéré qu'il est difficile de faire la part dans les comportements de ce qui est de l'avantage fiscal ou de la conjoncture économique, ou de la réglementation (sur les loyers et les rapports locataire-propriétaire pour le logement locatif privé par exemple).

Les distorsions introduites par la fiscalité ne sont pas systématiquement mesurées non plus mais leur existence est néanmoins connue. Il en est ainsi de la faveur qui est faite au logement neuf par rapport au logement ancien, de l'achat par endettement par rapport au financement propre ou de la fiscalité des loyers par rapport à celle des plus-values. On sait ainsi que le marché s'oriente pour des raisons fiscales en des sens qui n'obéissent pas nécessairement à la rationalité économique.

Enfin, s'agissant d'un éventuel retour financier pour la collectivité publique, le calcul est d'autant plus malaisé que les étapes précédentes ne sont pas franchies.

Il semble qu'à l'expérience on n'ait jamais vu que l'État gagne plus à un avantage fiscal qu'il ne perde. Le postulat est que l'effet incitatif de la mesure fiscale est toujours marginal par rapport à l'effet d'aubaine 107 ( * ) (transactions qui auraient eu lieu en l'absence de mesure) ou à l'effet de calendrier. Cependant, ces différents effets ne sont pas calculés mesure par mesure.

AUDITION DE

MM. Francis MAYER et Thierry FRANCK

Direction du Trésor

le 1er mars 1994 108 ( * )

M. MAYER a tout d'abord distingué ce qui, dans la fiscalité du logement, relève du plan conjoncturel, de ce qui relève du plan structurel. En période de crise, la tendance est de prendre des mesures fiscales à courte portée, tandis que les problèmes structurels ne sont pas abordés. C'est pourquoi il faut s'attacher à les examiner.

La fiscalité immobilière souffre de graves incohérences. Elle n'est cependant pas totalement aberrante, et on peut montrer qu'elle n'est pas systématiquement moins favorable que la fiscalité mobilière (exemple : la taxation des plus-values).

Il existe deux biais sérieux :

- l'un au détriment de l'ancien,

- l'autre au détriment du logement locatif privé.

L'investissement locatif privé a été systématiquement défavorisé pendant quinze ans sur deux points :

- l'impossibilité de prendre suffisamment en compte les charges dans la gestion des biens (la déduction forfaitaire ayant été ramenée de 25 % à 8 %),

- l'encadrement des loyers, qui bride la rentabilité des biens.

Cette situation a contribué à la fuite de 60.000 logements du parc privé par an dans les années 80.

La fiscalité de l'accession est favorable et les plus démunis peuvent être logés dans le parc HLM. C'est une frange de la population à revenus moyens, clientèle traditionnelle du parc privé, qui se trouve laissée pour compte. Cela crée une pression anormale sur le parc social que ne parvient pas à alléger le logement intermédiaire financé par le prêt locatif intermédiaire.

Le logement ancien est également défavorisé. La réponse traditionnelle aux situations de crise économique est la construction neuve, en particulier de logement sociaux. En 1993, la moitié des mises en chantier était constituée de tels logements. La réhabilitation et le marché de l'ancien sont insuffisamment soutenus.

Une des causes de cette situation réside dans les taux anormalement élevés des droits de mutation à titre onéreux : de 7 % à 9,3 % pour le logement (18,1 % pour les bureaux) alors qu'ils ne sont que de 1 % au Royaume-Uni. Dans ce dernier pays, le marché de l'ancien est beaucoup plus actif : 5 fois plus de transactions qu'en France, avec une durée moyenne de détention de 7 ans contre 20 ans en France.

M. MAYER a ensuite passé en revue les solutions à envisager pour remédier à ces difficultés.

S'agissant du logement locatif, un dispositif fiscal comme le système Quilès-Méhaignerie est une réponse conjoncturelle et dérogatoire à un problème structurel. Son coût pour les finances publiques est de 1,8 milliard de francs par an. Le Conseil des Impôts a montré qu'il favorisait la construction de petits logements (à cause du plafond de 600.000 francs de la base de réduction d'impôt) en Ile-de-France. Il ne résout pas les difficultés de la détention d'un bien locatif dans la durée.

Il faut une réponse structurelle qui encourage les propriétaires-bailleurs à le rester : une augmentation de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers jusqu'à 20 %. Ce montant comprendrait environ 1 % de frais de gestion directe, 3 % de frais d'assurance et 16 % d'amortissement du gros oeuvre. Il convient également de réfléchir à l'intégration dans cet ensemble d'une assurance pour impayés de loyers.

La déduction forfaitaire au taux de 10 % ne permet pas amortissement du gros oeuvre. Le foncier n'est pas amortissable. Le second oeuvre (réparations) bénéficie d'avantages fiscaux.

Le problème est donc relativement simple. Cependant, un point de déduction forfaitaire représente 330 millions de francs de coût budgétaire. Le relèvement ne peut donc être que progressif.

S'agissant des logements anciens, le problème est plus délicat. En effet, un point de droits de mutation à titre onéreux représente 1,7 à 1,8 milliard de francs (pour les bureaux : 200 millions de francs). Leur suppression coûterait 20 milliards de francs. De plus; il s'agit d'impôts locaux, et le problème de la substitution d'une autre recette se pose. On pourrait imaginer un transfert des droits de mutation à titre gratuit ou la compensation partielle des droits en cas de réduction volontaire des taux par une collectivité.

Cet impôt, très sensible à la conjoncture, est relatif et contracyclique : les collectivités ont tendance à remonter les taux quand les transactions se tarissent, ce qui peut accentuer le tarissement.

S'agissant du marché de l'accession à la propriété, la réduction d'impôt pour intérêts d'emprunt, qui coûte 10 milliards de francs par an, est très peu efficace. En effet, le principal problème des accédants est d'obtenir un financement et d'être solvables. Or, les établissements prêteurs ne tiennent pas compte de cet avantage fiscal qui n'améliore ni sensiblement ni durablement la solvabilité des accédants. De plus, cet avantage ne correspond à aucune incitation particulière pour les accédants les plus aisés.

Il n'en est pas de même des 8 milliards de francs de primes d'épargne-logement. Pour un coût analogue, ce dispositif est très efficace car les banques prêtent volontiers aux ménages qui financent partiellement leur acquisition par l'épargne-logement. Celle-ci réduit les risques de solvabilité.

C'est pourquoi il serait bon que les volumes des prêts d'épargne-logement augmentent. Cependant, cela peut poser un problème pour le bilan des banques : le système ne fonctionne que si les ressources restent constamment supérieures aux emplois. C'est pourquoi il n'est pas possible d'admettre la transmissibilité des droits à prêts aux tiers. Par ailleurs, l'épargne-logement ne peut pas résoudre à elle seule le problème du logement dans les grands centres urbains. C'est un problème mondial, qui est celui de l'inflation foncière au centre des villes.

Enfin, s'agissant de la concurrence entre l'épargne mobilière et l'épargne immobilière, M. MAYER a considéré que le problème n'était pas essentiellement fiscal. Il a ainsi fait observer que la taxation des plus-values immobilières ne représente que 2 milliards de francs par an sur un patrimoine de 18.000 milliards de francs, alors que celle des plus-values mobilières représente 50 milliards de francs sur un patrimoine de 9.000 milliards de francs. Il y a sans doute également des phénomènes psychologiques.

En revanche, l'offre proposée par les établissements prescripteurs d'épargne joue un rôle plus important. Le succès du plan d'épargne populaire ou du plan d'épargne en actions peut s'expliquer ainsi : beaucoup de Prescripteurs n'y avaient pas d'intérêt plus grand qu'à l'achat de Sicav d'obligations ou d'actions. Mais la mobilisation des réseaux a fait la différence : il pourrait en être de même pour l'immobilier.

AUDITION DU

Professeur Michel MOUILLART

le mardi 12 avril 1994

À titre préliminaire, le professeur MOUILLART a indiqué que la réflexion sur les incitations fiscales au logement était peu avancée, notamment car les chercheurs n'ont guère accès aux données qui permettraient de les mesurer. Il existe des réflexions sur la fiscalité en général - le taux optimal et la structure optimale des prélèvements - mais pas d'études sur un instrument fiscal particulier.

L'immobilier est davantage considéré comme un domaine de juristes que d'économistes. Une seule étude d'impact a été réalisée dans la période récente : ce fut en 1987, une enquête sur le sentiment des promoteurs vis-à-vis du dispositif "Méhaignerie" voté l'année précédente (Direction des affaires économiques et internationales - INSEE). Cette opération n'a été ni approfondie, ni répétée.

En revanche, la dépense fiscale elle-même commence à être bien connue. Les premiers travaux datent de 1986 (Fédération nationale des promoteurs-constructeurs - Rapport Bloch-Lainé). Le dernier en date est celui de la commission des comptes du logement.

On considère trois types de dépenses fiscales :

- les réductions d'impôt ;

- les exonérations d'impôt sur les intérêts des produits d'épargne finançant le logement ;

- les dispositions dérogatoires allégeant la charge fiscale.

Les réductions d'impôt

Sur 121,5 milliards de francs (1992) représentant l'effort national pour le logement, 98,2 milliards de francs sont des aides directes et 23,3 milliards de francs sont des dépenses fiscales.

Sur ces 23,3 milliards de francs, 13 milliards de francs sont des réductions d'impôt, au titre de trois postes principaux :

- les réductions liées à la résidence principale (acquisition) ;

- les réductions liées au ravalement et aux grosses réparations ;

- les réductions liées à l'investissement locatif.

Cet ensemble est mesuré de façon objective, à quelques incertitudes près.

L'épargne en faveur du logement

Plus incertaine est la mesure de l'exonération des produits d'épargne en faveur du logement : le livret A et l'épargne-logement. L'évaluation se fait en effet par conventions de calcul :

- l'ensemble de cette épargne ne bénéficie pas nécessairement au logement (notamment les fonds excédentaires de l'épargne-logement) ;

- la matière n'étant pas déclarable, il faut faire l'hypothèse d'un taux marginal d'imposition moyen. L'exonération liée au livret A est ainsi évaluée de façon très approximative entre 2,25 et 4,5 milliards de francs.

Les dispositions dérogatoires

Il s'agit pour l'essentiel du traitement des revenus fonciers : déduction forfaitaire, plus-values, déficit foncier.

Tous les documents fiscaux existent pour bien appréhender cet ensemble. Cependant, la dernière enquête d'envergure a eu lieu en 1987.

Pour conclure sur la dépense fiscale, M. MOUILLART a fait observer que l'optique de l'administration fiscale est essentiellement budgétaire et ne s'intéresse pas au logement lui-même.

La Direction générale des Impôts utilise un gisement de déclarations de revenu dans lesquelles la totalité des éléments est recensée. C'est le " modèle lourd" de la DGI qui permet d'évaluer les conséquences budgétaires des modifications de la fiscalité en matière de réductions d'impôt et de revenu foncier. En revanche, ce modèle n'appréhende pas, par définition, les exonérations de produit d'épargne.

Cette information est assez accessible. Elle permet d'évaluer les conséquences des modifications par tranche de revenu global et de revenu foncier. En revanche, les conséquences géographiques ne sont pas connues.

La dynamique des dépenses fiscales

M. MOUILLART a ensuite montré comment il était possible d'aborder cette dépense fiscale de façon dynamique, afin d'en comprendre l'évolution.

Cette évolution a été très rapide ces dernières années, pour deux raisons :

- les décisions prises récemment. Par exemple, les avantages fiscaux à l'investissement locatif privé (le dispositif "Quilès-Méhaignerie", les allées et venues de la déduction forfaitaire) ;

- l'évolution même des systèmes dans le temps. Par exemple, les réductions d'impôt pour l'accession à la propriété sont stratifiées en régimes différents en fonction de la date initiale des contrats. Ainsi, en 1992/1993, les régimes de réduction d'impôt d'une durée de dix ans sont arrivés à échéance pour laisser place aux régimes d'une durée de cinq ans. En conséquence, on est passé de 4 millions de foyers fiscaux bénéficiaires à 2,5 millions.

Cette maturation du système fiscal n'est pas étudiée. L'intervention d'une nouvelle décision dans ce type de système évolutif a donc des conséquences mal anticipées. Il faut en effet tenir compte à la fois des effets propres de cette décision, des effets de l'évolution du système existant, et des interactions entre les deux.

Pour illustrer son propos, M. MOUILLART a ensuite commenté une série de tableaux.

Ce tableau montre l'évolution du volume de cette réduction d'impôt. Il fait apparaître deux phénomènes :

- l'évolution par paliers, liée à la stratification des régimes fiscaux ;

- une évolution structurelle mettant en évidence la montée en charge des réductions liées aux grosses réparations.

Tableau n° 2

Ce tableau illustre le pouvoir incitatif d'un dispositif fiscal. On y voit en effet très nettement le nombre d'opérations d'investissement locatif croître très fortement à partir de 1987, première année d'application du régime "Méhaignerie".

Environ 50.000 réductions d'impôt sont ainsi accordées chaque année au titre du seul investissement direct (compte non-tenu des investissements via des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ou sociétés immobilières d'investissement (SII). Deux tiers à trois quarts des ménages investisseurs bénéficient d'une réduction d'impôt.

L'importance de ce flux a contribué à contrebalancer le retrait du marché des anciens propriétaires bailleurs. Il semble en effet que le parc locatif privé se stabilise par rapport à 1988. 109 ( * )

Le tableau n° 3 montre le vieillissement d'un système fiscal, avec deux phénomènes :

- la tendance à la réduction du nombre de ménages bénéficiaires liée au passage de dix années à cinq années de la durée de la réduction d'impôt. Le corollaire est une réduction de la dépense fiscale concernée. En 1993/1994, 2,5 à 2,6 millions de ménages devraient bénéficier de réductions d'impôt contre 4,2 en 1989;

- la montée en charge des avantages liés aux grosses réparations et à l'isolation thermique.

Il faut tenir compte d'un niveau - mal apprécié - d'évaporation de certains ménages qui cessent de faire valoir leurs droits.

Ces observations sont intéressantes pour comprendre l'évolution de la dépense fiscale. Cependant, elles ne permettent pas d'en évaluer l'impact : on ne discerne pas, dans l'évolution du nombre d'opérations et de bénéficiaires, ce qui relève de l'avantage fiscal lui-même (voir tableau n° 2).

Tableau n° 4

Déductions fiscales en faveur des accédants à la propriété : 1978-1992
Déductions fiscales accordées (version compatible avec les sources DGI)
Foyers fiscaux d'accédants à la propriété : imposables et non imposables

Tableau n° 5

Déductions fiscales en faveur des accédants a la propriété : 1978-1992
Déductions fiscales accordées (version compatible avec les sources DG1)
Foyers fiscaux d'accédants à la propriété : imposables et non imposables

Tableau n° 6

Déductions fiscales en faveur des accédants à la propriété : 1978-1992 (mêmes données,

logement (neuf)

Les tableaux n os 4, 5 et 6 mettent en évidence la maturation du système des réductions d'impôt attachées aux intérêts d'emprunts. L'année 1993 marque la fin du régime des dix années, et un nouveau palier à l'issue d'une décrue du nombre de bénéficiaires amorcée en 1988. Cette décrue est d'abord due à l'extinction progressive des droits, puis à la diminution du nombre de transactions (liée à la récession).

Ce dispositif connaît actuellement une phase de réduction de son coût pour les finances publiques. Il se caractérise par une certaine inertie : une économie (respectivement une dépense) réalisée une année produit ses conséquences pendant cinq ans.

Il existe deux procédés pour analyser la maturation d'un régime fiscal :

- repartir du "modèle lourd" de la DGI et faire des projections simulant l'évolution de la dépense fiscale d'année en année. L'administration procède peut-être ainsi. Il n'est cependant pas possible d'affiner l'analyse jusqu'aux zones géographiques et à la taille des ménages concernés ;

- repartir de recueils d'informations statistiques décrivant les ménages et les opérations afin de construire un modèle de prévision. Ce procédé permet de distinguer l'évolution des dépenses fiscales pour le logement neuf et pour le logement ancien.

L'évaluation au service de la décision

Ce type d'évaluation permet de faire des propositions d'amélioration des régimes fiscaux.

S'agissant de l'aide fiscale à l'accession, deux paramètres sont utilisés à la confection de l'aide :

- la proportion d'intérêts donnant droit à la réduction ;

- le plafond de ces intérêts.

Ces deux paramètres n'ont pas la même efficacité selon que le logement est neuf ou ancien.

Ainsi, on peut démontrer que le relèvement du plafond d'intérêt serait inefficace et sans coût pour l'accession neuve : en effet, les charges d'intérêt actuellement déclarées par les ménages n'atteignent pas le plafond. En revanche, un relèvement du pourcentage d'intérêt déductible serait plus significatif (tableau n° 6).

Le problème est symétrique pour l'accession dans l'ancien. Augmenter la proportion d'intérêts déductibles n'aurait guère d'utilité, car en moyenne les ménages saturent leurs droits à déduction. En revanche, il serait plus efficace de relever le plafond des intérêts (tableau n° 5).

Le problème de l'efficacité des incitations fiscales

Le professeur MOUILLART s'est ensuite interrogé sur les moyens de mesurer l'efficacité de ces dépenses fiscales sur le comportement des ménages.

Il a considéré qu'il n'était pas possible de le faire en l'état actuel des connaissances pour l'investissement locatif privé et les grosses réparations.

En revanche, une première approche est possible pour l'accession. En effet, les accédants sont sensibles au taux d'effort qu'ils doivent consentir, et donc à une réduction du taux d'intérêt.

S'agissant du secteur neuf, une baisse d'un point de taux d'intérêt conduit à l'acquisition de 7.000 à 8.000 logements supplémentaires. On a constaté que l'efficacité de la baisse des taux sur le marché du logement neuf s'était récemment réduite pour deux raisons :

d'une part, le taux d'apport personnel s'est fortement accru ;

d'autre part, les ménages à revenu moyen ont quitté ce marché pour celui de l'ancien (qui est égal à deux fois celui du neuf). Or les ménages à revenu moyen sont les plus sensibles au taux d'intérêt. En effet, les ménages modestes sont davantage sensibles au niveau des aides qui leur sont consenties, et les ménages plus aisés ont en général un fort apport personnel.

S'agissant du secteur ancien, une baisse d'un point de taux d'intérêt entraîne l'acquisition de 18.000 à 20.000 logements supplémentaires.

Cette approche par le taux d'effort est intéressante car les dépenses escales en faveur de l'accession peuvent se convertir en équivalent de points de taux d'intérêt. Le régime fiscal de l'accession équivaut à une réduction de 1,5 point dans l'ancien et de 2,5 à 3 points dans le neuf. Les établissements de crédit en tiennent peu compte, car ils préfèrent des systèmes de tiers-payant tels que l'aide personnalisée au logement (APL).

Une mise à parité des dispositifs pour l'ancien et le neuf pourrait entraîner 20.000 transactions supplémentaires dans l'ancien (qui elles-mêmes généraient un certain nombre d'acquisitions neuves).

Il reste cependant difficile de faire la part de l'incitation pure et l'effet d'aubaine.

Cet exemple démontre néanmoins qu'il est possible d'évaluer les conséquences économiques des mesures fiscales, mais cela dépend de la qualité des informations recueillies (enquêtes) et de plus, l'approche retenue pour ce type d'aide n'est pas extrapolable aux autres régimes fiscaux (notamment la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers).

M. MOUILLART a ensuite répondu aux questions des membres du groupe de travail.

Sur le principe même des aides fiscales au logement, il s'est prononcé en faveur d'un traitement fiscal tenant compte de la longue durée de l'investissement en logement. Il a néanmoins concédé que les professionnels admettaient difficilement une remise en cause des avantages acquis, même au profit d'un système globalement plus favorable.

Sur le problème des droits de mutation, M. MOUILLART a considéré que si la pression fiscale est assez bien connue, en revanche ses effets sur les comportements des acteurs sont totalement inconnus. L'existence de ces taxes nuit à la fluidité du marché, mais dans une proportion qui n'est pas mesurée. Cependant, les actes notariaux constituent une source qui pourrait être davantage exploitée.

De façon générale, les interventions des collectivités locales dans le secteur du logement sont très mal évaluées puisqu'on les situe entre 8 et 15 milliards de francs annuels. Ce haut de fourchette correspondrait à un chiffre analogue à l'intervention de l'État en proportion de ses recettes.

À propos du volet fiscal du plan de relance de 1993,

M. MOUILLART a considéré que les statistiques du 1er trimestre 1994 tendent à prouver une grande efficacité sur la partie amélioration-entretien.

En revanche, il est pour le moment assez difficile de se prononcer sur la situation de l'investissement locatif privé.

Le désengagement des propriétaires-bailleurs est un fait : 50.000 à 80.000 cessions par an. Mais il est très ancien et on n'en connaît pas les conditions.

On observe que le parc locatif privé des anciennes générations disparaît : ainsi, depuis 1947, la génération des logements construits avant 1871 se réduit.

La nouveauté des années 1980 a été l'effondrement de l'investissement nouvellement réalisé. C'est ce qui a motivé la création du système "Méhaignerie" : celui-ci a relevé le flux, puis stabilisé la taille du parc Cependant, il a occasionné une assez profonde modification des structures du parc locatif privé : on ne sait pas aujourd'hui si les investissements récents vont être durables.

Le risque qui se présente actuellement est de voir une remise excessive sur le marché de logements ayant atteint la fin de la période de blocage, et que leurs propriétaires n'auraient pas été suffisamment incités à conserver malgré la réforme du traitement des revenus fonciers.

On constate que dans la période récente le nombre moyen de logements locatifs par propriétaire s'est réduit : de 1,8 au milieu des années 80 à 1,4 aujourd'hui (enquête logement 1992) 110 ( * ) .

Deux voies sont ouvertes vers un meilleur traitement des propriétaires-bailleurs :

- la parité fiscale entre valeurs mobilières et immobilier. Elle ne sera jamais totalement établie du fait de la nature du bien immobilier, non délocalisable. La faveur fiscale pour les valeurs mobilières couvre en quelque sorte une prime de risque qu'il serait trop difficile et trop coûteux de réduire pour le système fiscal ;

- un traitement des revenus fonciers qui admette une durée réaliste pour l'amortissement du bien. En augmentant la déduction forfaitaire vers 25-30 %, la durée d'amortissement serait ramenée de 86 à 100 ans contre 175 à 220 ans avec une déduction de 10 %. En Allemagne, il existe un système d'amortissement fiscal qui tient compte d'une durée de vie réaliste des logements.

2. Une réduction d'impôt de 10 % du montant de l'acquisition et plafonnée à 60.000 francs sur 3 ans, logement neuf.

Le test consiste à évaluer le remplacement de l'actuelle réduction d'impôt pour intérêts d'emprunt en faveur de l'accession à la propriété d'un logement neuf par une réduction assise sur le prix d'acquisition du bien. Le surcoût budgétaire est évalué, ainsi que l'impact que la mesure devrait avoir pour résorber ce surcoût.

Situation de l"année 1994 (données provisoires)

Nouveau dispositif

Ce dispositif ne change à peu près rien à la situation des accédants sociaux (3 SMIC et moins). Il solvabilise en revanche beaucoup mieux les revenus moyens (3 à 4 SMIC et 4 à 5 SMIC) :

- d'une part, en raison de l'accroissement du montant de la réduction d'impôt accordée ;

- d'autre part, en raison de la réduction de la durée pendant laquelle l'avantage est accordé.

Réduction d'impôt par accédant

Ainsi :

Évidemment, cela aura un effet sur le pilotage budgétaire du dispositif; ceci s'illustrant par le profil des dépenses fiscales associées :

Pour que ce "surcoût" soit couvert par un retour fiscal supplémentaire (TVA essentiellement, hors conséquence des créations d'emplois induites), il faut donc (comme les logements des ménages disposant de 3 SMIC et plus rapportent en moyenne 90 KF de TVA) que la mesure génère 11.000 mises en chantier supplémentaires à l'année 1, 22.000 à l'année 2 et 33.000 à l'année 3.

On peut attendre de l'ordre de 12.500 à 15.000 logements, en rythme annuel, en réponse à la baisse des taux d'effort. Le coût global de la mesure est donc réduit de moitié, au total.

AUDITION DE

M. André THOMAS

Fédération nationale du Bâtiment

le 3 mai 1994

M. André THOMAS a choisi de placer ses réflexions sur la fiscalité du logement dans le prolongement des travaux de la commission des comptes du logement. Le compte du logement établit en effet pour la première fois, Une synthèse des deux aspects de cette fiscalité : les prélèvements spécifiques ou généraux dont le logement fait l'objet d'un côté et les avantages fiscaux de l'autre.

Parmi les impôts généraux, M. THOMAS a considéré qu'il aurait fallu inclure la quote-part d'assiette logement de l'impôt de solidarité sur la fortune, et celle de l'impôt sur le revenu (ce dernier étant classé en impôt spécifique sur le revenu foncier).

Parmi les impôts spécifiques, M. THOMAS aurait inclus la taxe d'habitation.

À propos des avantages fiscaux, M. THOMAS a fait trois remarques :

- il faudrait y inclure les exonérations portant sur l'épargne finançant le logement (livret A, épargne-logement),

- la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers, fixée à une norme de 10 %, est considérée comme neutre. Ne devrait-on pas la considérer comme un désavantage fiscal, en fonction d'une norme d'amortissement à définir ?

- de même, doit-on considérer comme un avantage fiscal la réduction d'impôt pour grosses réparations, si l'on doit admettre un amortissement ?

Plus généralement, M. THOMAS a rappelé le caractère forfaitaire et souvent contestable des évaluations de dépenses fiscales, d'ailleurs souligné par le douzième rapport du conseil des impôts relatif à la fiscalité de l'immobilier urbain.

Ensuite, M. André THOMAS s'est interrogé sur le traitement des propriétaires-bailleurs.

Il a pris acte que le Gouvernement tente d'établir une parité avec les placements en valeurs mobilières. Mais parvenir à cette situation lui a paru extrêmement difficile. D'une part, il pèse sur l'immobilier une contrainte propre d'illiquidité, qui en fait une assiette commode pour les impôts sur la détention (telle que la taxe sur le foncier bâti : 38 milliards de francs en 1992) et aussi sur la mutation (19,5 milliards de francs en 1992 pour les droits à titre onéreux). Or, ces prélèvements renforcent l'illiquidité structurelle de ces biens. D'autre part, les seuils de déclenchement de la fiscalité sur les valeurs mobilières étant très élevés, une grande part de ces biens sont en fait exonérés, ce qu'il est difficile d'envisager pour l'immobilier. 111 ( * )

Il s'agit d'une injustice, car le bail privé procure un service d'intérêt général, assorti de nombreuses contraintes d'ordre public et de risques d'insolvabilité sur longue période.

Pour améliorer cette situation, M. André THOMAS a envisagé trois pistes :

une professionnalisation des propriétaires-bailleurs, selon un système inspiré de l'Allemagne, avec des droits de mutation de 2 %, une absence de taxation des plus-values, et un amortissement fiscal rapide et dégressif,

l'instauration d'un prélèvement libératoire sur le revenu foncier,

une amélioration de la déduction forfaitaire telle qu'elle existe actuellement. M. THOMAS envisage à cet égard de distinguer des niveaux de déduction différents en fonction de critères géographiques et éventuellement d'instaurer un barème progressif.

D'une façon générale, M. THOMAS s'est prononcé pour un renforcement des mesures structurelles, au détriment des mesures conjoncturelles.

Enfin, à propos de l'efficacité des mesures fiscales, M. THOMAS a dit ne pas comprendre que le Gouvernement ne fasse pas de tests (éventuellement par sondage), avant de décider de mesures nouvelles.

AUDITION DE

MM. Xavier JOSSET et Bernard COLOOS

Crédit Foncier de France

le 10 novembre 1994

M. Bernard COLOOS a tout d'abord formulé trois remarques sur la fiscalité du logement, la mesure de ses coûts et de son impact :

l. Les détenteurs de biens immobiliers ont eu l'impression d'être délibérément agressés par la fiscalité alors que le choix des pouvoirs publics dans les années 70 n'était que d'orienter l'épargne vers les entreprises.

2. Les méthodes d'évaluation des dépenses fiscales sont imparfaites et la législation fiscale a tendance à généraliser des mesures pour supprimer les abus de quelques-uns.

Quant aux effets d'aubaine (les opérations bénéficiant d'un avantage fiscal sans avoir été incitées par lui), personne n'est aujourd'hui capable de les cerner sérieusement.

3. La méthode retenue pour la fiscalité immobilière est mauvaise : elle consiste à fixer des règles rigides qui donnent lieu chaque année à des dérogations, ce qui la complique et la rend illisible. Il vaudrait mieux reconnaître aux détenteurs de biens immobiliers un statut économique, avec une imposition, éventuellement optionnelle, de type "bénéfices industriels et commerciaux ou non commerciaux".

À cet égard, le concept de neutralité fiscale n'est pas bon, car il accrédite l'idée que la fiscalité doit neutraliser les écarts de marché entre différents produits de patrimoine, alors qu'elle doit se contenter de taxer également un bénéfice quelle que soit sa provenance.

M. Xavier JOSSET a ajouté que l'immobilier souffrait par contrecoup de la mondialisation des marchés financiers, qui permet la délocalisation des valeurs mobilières, ce que les biens immobiliers ne permettent pas. Mais on aboutit à un monde déséquilibré où coexistent un parc social et des propriétaires occupants, alors que le locatif intermédiaire privé ne trouve pas sa place. Il en a conclu qu'un mixage marché/intervention publique était nécessaire pour aider ce parc intermédiaire.

Sur la question du choix du statut par le bailleur, M. COLOOS a expliqué que les entreprises pouvaient parfois préférer mettre leurs biens immobiliers dans une Société Civile Immobilière à cause de la taxation des plus-values, plus favorable dans un cadre foncier que dans un cadre commercial. C'est le principal trait de cette fiscalité : il y a un déséquilibre entre une surtaxation de la détention et du revenu, et une relative sous-taxation des plus-values.

À propos du coût effectif des dépenses fiscales, M. COLOOS a estimé qu'il était possible de parvenir à un consensus méthodologique, car les moyens techniques existent.

En revanche, il y a un déficit profond de connaissances et de méthodes en matière d'évaluation de l'impact de la fiscalité, car aucune recherche n'a été menée sur ce point. Les collecteurs de données existent (notaires, conservateurs des hypothèques, services fiscaux...) et des avancées seraient possibles, à l'image des travaux effectués aux États-Unis. La volonté d'aboutir manque peut-être par crainte des résultats qui seraient obtenus, et qui pourraient entraîner des transferts de charges et d'avantages.

À propos des aides à la personne, M. COLOOS a considéré qu'elles réduisent d'année en année les marges de manoeuvre du budget du logement. Elles dépassent désormais largement leur fonction d'aide au logement pour exercer une fonction de revenu minimum. Elles réduisent le montant des aides à la pierre mais peuvent résulter d'aides à la pierre consenties antérieurement, et en sont souvent le complémentaire (c'est pourquoi la réforme de 1977 n'a pas abouti à la disparition des aides à la pierre). Elles ne peuvent être remplacées par l'arme fiscale, peu opérante pour les ménages à faible revenu.

La question du coût comparé pour les finances publiques du parc privé et du parc social n'est pas actuellement résolue, mais elle pourrait l'être, notamment sur un instrument utilisé dans les deux cas : le prêt locatif intermédiaire (PLI). MM. JOSSET et COLOOS ont estimé que le parc privé est probablement moins coûteux que le parc public, car les opérateurs supportent dans ce cas le risque de l'opération et doivent en assurer la rentabilité à moyen terme. Cette comparaison pourrait se faire sur le logement intermédiaire, actuellement partagé entre parc privé et parc public.

CAHIER DES CHARGES

EVALUATION DE MESURES FISCALES RELATIVES AU LOGEMENT

10 JANVIER 1995

LES OBJECTIFS

Le but de la présente recherche est une évaluation des mesures fiscales relatives au logement aux quatre niveaux de propagation de l'impulsion provoquée par ces mesures :

1. Leur coût ex ante pour les finances publiques. Le premier objectif est d'établir la perte de recettes induite pour les finances de l'État et pour les finances locales d'une baisse de taux ou d'assiette des prélèvements.

2. Leur impact sur les comportements des contribuables. Le second objectif est d'apprécier le caractère plus ou moins incitatif de la mesure. Cette incitation est-elle forte ou faible, est-elle ou non durable, immédiate ou différée, le ciblage de le mesure est-il ou non pertinent ? Ceci suppose une approche des effets d'aubaine, afin d'établir l'efficience d'une mesure, à savoir son rapport coût/efficacité.

3. Leurs retombées économiques. Quelle est la quantité de richesse supplémentaire générée par la mesure ? Sur quel segment de marché portera son impact ?

4. Leur retour éventuel pour les finances publiques et sociales. Quel surcroît de recettes peut-on attendre ex post de la mesure ?

LES DISPOSITIFS À MESURER

I COÛT COMPARÉ POUR LA COLLECTIVITÉ DU LOGEMENT LOCATIF SOCIAL ET DU LOGEMENT LOCATIF PRIVÉ

Quel est le coût comparé (tous éléments confondus : budgétaires, fiscaux et sociaux) du parc locatif public et du parc locatif privé pour la collectivité ? Pour être pertinente, cette comparaison devra porter sur des logements de niveaux de loyers équivalents, par exemple le parc locatif intermédiaire et le parc social de fait.

Le tout devra être rapporté à un nombre égal de logements, ou de familles logées.

II-EVALUATION DES MESURES FISCALES

Les mesures fiscales à tester peuvent être scindées en trois groupes, Selon la nature de l'assiette : la mutation ou transaction, la détention, les revenus.

1. Mesures concernant la mutation ou la transaction

- Abaissement à 2 % des droits de mutation à titre onéreux, toutes collectivités confondues, chacune d'elles voyant ses taux baisser proportionnellement. Peut-on évaluer leur caractère dissuasif à leur niveau actuel ?

- Abaissement des droits de mutation à titre gratuit (État et collectivités territoriales) alternativement :

suppression des taux supérieurs à 40 %,

exonération des logements anciens, lors de leur première transmission à titre gratuit depuis le 1er janvier, à concurrence des trois quarts de leur valeur, à condition que le bien soit versé ou maintenu dans le parc locatif. Cette exonération pourrait être plafonnée à 500.000 francs par part reçue par chacun des donataires, héritiers ou légataires.

- Relèvement à 7,5 % du taux d'abattement sur les plus-values immobilières à partir de la troisième année de détention.

- Substitution, à coût budgétaire "ex ante" constant, à l'actuelle réduction d'impôt portant sur les intérêts d'emprunt en cas d'acquisition de la résidence principale, d'une réduction d'impôt portant sur la valeur du bien, de même durée (cinq ans).

Peut-on évaluer l'efficacité (ou l'inefficacité) de l'actuelle réduction d'impôt, dont personne (ni les professionnels, ni les services fiscaux, ni les organismes de crédit) ne semble souhaiter le maintien ?

- Pour le régime fiscal Quilès-Méhaignerie, tester :

les effets de sa suppression éventuelle,

les effets d'une extension du système au logement ancien, avec un abaissement des plafonds à 200.000 et 400.000 francs.

- Abaissement à 5,5 % du taux de la TVA sur les terrains à bâtir.

2. Mesures concernant la détention

- Substitution à l'actuelle réduction d'impôt pour grosses réparations d'une réduction de 50 % du montant des travaux, plafonnée à 90.000 francs sur une période de 5 ans, pour la résidence principale ou secondaire.

- Application de la taxe d'habitation aux logements vacants.

- Substitution, à produit constant, d'une taxe sur les terrains constructibles non bâtis ou insuffisamment bâtis aux actuelles taxes pour dépassement du plafond légal de densité ou du coefficient d'occupation des sols.

- Sur l'impôt de solidarité sur la fortune :

abattement de 2 millions de francs pour la résidence principale,

abattement de 1 million de francs pour les logements locatifs.

3. Mesures concernant les revenus

- Relèvement à 15 % de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers.

- Exonération d'impôt des 8.000 premiers francs (16.000 francs pour un couple) de revenus fonciers annuels provenant de logements locatifs.

-

* 105 Audition mise à jour avec M. Marc WOLF. chef du bureau C 2-2 du SLF, le 22 mars 1995.

* 106 Avant 1995, avaient lieu trois tirages successifs : anticipé (à l'automne n + 1), intermédiaire définitif.

* 107 L'étude réalisée par la direction de la prévision sur les PAP tendrait à accréditer cette idée (voir chapitre premier -Il-B-1). Cependant, elle reste à démontrer, car une extrapolation à la dépense fiscale serait hasardeuse.

* 108

* 109 Note du rapporteur : Cette estimation a été confirmée par l'enquête logement de 1992.

* 110 Note du rapporteur : l'enquête de l'INSEE sur le patrimoine des ménages publiée en mai 1996 a montré que ce nombre était, depuis, légèrement remonté.

* 111 Note du rapporteur : cet aspect a été corrigé, en défaveur de l'épargne mobilière par les mesures fiscales volées en loi de finances pour 1996

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