B. LA MONTÉE EN PUISSANCE ET L'INFORMATISATION DE LA MISE EN ÉTAT

Outre sa capacité d'orientation de l'affaire vers la filière la plus appropriée à sa complexité et aux moyens des parties ainsi que de fixation de la compétence territoriale, le juge, particulièrement dans la fast track , disposera des moyens de faire respecter le calendrier d'examen de l'affaire qu'il établira.

1. La maîtrise du temps par le juge

Ce sera la plus grosse évolution culturelle. Les juges anglais, pour la plupart anciens barristers, n'ont pas en effet de culture de management.

La dernière page du rapport définitif de Lord Woolf présente le calendrier-type qu'il propose pour le traitement d'une affaire par la filière rapide .

CALENDRIER TYPE POUR LA FILIÈRE RAPIDE (FAST TRACK)

Etape de

Juin

Juillet

Août

Septembre

Octobre

Novembre

la procédure

9

16

23

30

7

14

21

28

4

11

18

25

1

8

15

22

29

6

13

20

27

3

10

17

24

Service de l'enregistrement

10/6

Communication des pièces à la partie adverse

28 jours 8/07

Echange des témoignages

49 jours 29/7

Echange des expertises

70 jours 19/08

Envoi aux parties des questionnaires en vue de l'audiencement

19/08

Retour des questionnaires

14 jours 2/09

Audience de mise en état si les questionnaires n'ont pas été retournés

16/09 9 semaines

Notification de la date de l'audience

23/09 8 semaines

Semaine de l'audience

22 semaines 18/11

Délai-limite pour les parties Délai-limite pour le juge Audience

Lord Woolf donne au juge de la mise en état des possibilités de sanction en cas de non-respect de ce calendrier par les parties : si la partie ne peut justifier le retard au regard de conditions strictes, elle ne pourra utiliser les pièces dont elle entendait faire état. En outre, la partie qui retarde sans justification la procédure pourra être condamnée à payer des coûts, des indemnités ou des intérêts supplémentaires quelle que soit l'issue du procès.

Il sera tenu compte de l'attitude de la partie en général pour coopérer à la mise en état et à la solution du litige. Le client sera informé par la Cour des coûts occasionnés par son défenseur.

Pour la multi-track également de jeunes juges seront chargés de la mise en état (" procedural judges "). Ils devront notamment rechercher le traitement le plus approprié, i.e. la filière la moins coûteuse et la plus simple pour traiter équitablement l'affaire.

2. Le rôle central de l'informatique

L'ensemble des interlocuteurs de la mission a estimé que le succès de cette réforme dépendait matériellement de l'informatisation uniforme et simultanée des juridictions et des professions juridiques (61 000 solicitors et 7 700 barristers).

Tentant de tirer profit de son retard en la matière pour éviter les erreurs commises par d'autres pays plus avancés (notamment la France), la Chancellerie britannique étudie actuellement, sous l'égide de Sir Richard Scott, Vice-Chancellor et Head of civil justice , l'équipement et la programmation des outils informatiques (" I.T. " : Information Technology ) nécessaires au pilotage du traitement des dossiers.

L'étude a été confiée à une entreprise privée américaine et l'écriture des programmes de gestion des calendriers des affaires ne devrait pas poser de difficultés techniques. Elle s'inscrit dans le programme Private Finance Initiative lancé à partir de 1992 dont l'objet est de faire prendre en charge par le secteur privé des services traditionnellement publics 25( * ) . Elle prévoit l'extension de l'expérience " Caseman " 26( * ) aux county courts dès 1997. Le contrat n'envisage pas en revanche l'extension aux magistrates courts .

Caseman concerne seulement l'enregistrement des affaires. Pour leur suivi et leur mise en état, l'équipement, l'écriture des programmes informatiques en fonction de règles de procédure non encore rédigées et la formation des juges doivent présenter une fiabilité de laquelle dépend le soutien que les professions juridiques et judiciaires apporteront à la réforme.

Le financement pour les juridictions doit être assuré par le budget, sur le principe de la location de l'équipement ; l'homogénéité du système garantit par ailleurs au fournisseur privé une clientèle captive auprès des professions juridiques.

Le risque de dépendance à l'égard du fournisseur de la technologie n'est pas méconnu et impliquera la mise en place de contrôles.

Les juges devraient bénéficier de judicial assistants pour les aider à appréhender ces nouvelles méthodes.

La date-butoir pour la mise en oeuvre de la réforme, fixée à octobre 1998 , apparaît à chacun très optimiste . En effet, la sous-commission chargée de l'informatisation qui aurait dû être mise en place au sein du Civil Justice Council créé à l'initiative de Lord Woolf n'a pas encore été créée. Les interlocuteurs de la mission ont donc marqué une certaine préoccupation sur la structure de concertation entre l'ensemble des parties concernées par la mise en place de l'informatique (professions juridiques et judiciaires, Chancellerie, Court service, fournisseurs...)

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