10. Jeunesse

Proposition E 774

Com (96) 610 final


(Réunion de la délégation du 11 juin 1997)

Présentation du texte par M. Nicolas ABOUT :

Le 23 décembre 1996, la Commission européenne a présenté un programme d'action communautaire visant à instituer un " Service volontaire européen pour les jeunes ". Cette proposition fait suite aux conclusions des Conseils européens d'Essen (1994) et de Cannes (1995) qui avaient souligné la nécessité d'entreprendre de nouvelles actions afin de favoriser l'intégration sociale et professionnelle des jeunes en Europe. C'est le Conseil européen de Florence, en juin 1996, qui a retenu l'idée du service volontaire européen.

Quel est l'objet de ce programme ?

Il a pour objectif de soutenir des activités de service volontaire européen à l'intérieur de la Communauté et dans les pays tiers, des projets de suivi de ces activités ainsi que des actions de coopération européenne visant à développer leur qualité et leur dimension européenne. Parmi les domaines dans lesquels interviendront les activités concernées, la Commission européenne cite l'aide aux personnes, les services sociaux, la protection de l'environnement, la conservation et la mise en valeur du patrimoine, la lutte contre la drogue, la lutte contre le racisme et la xénophobie, les activités artistiques, sportives ou culturelles.

Ce programme comporte cinq volets, les deux plus importants étant :

- d'une part, le soutien de projets transnationaux de longue durée (6 mois à un an) et de courte durée (3 semaines à 3 mois) à l'intérieur de la Communauté ;

- d'autre part, le soutien de projets transnationaux dans des pays tiers pour des jeunes résidant dans un Etat membre de l'Union européenne.

Les autres actions prévues dans ce programme devraient permettre de valoriser l'expérience acquise par les jeunes dans le cadre du service volontaire européen et de favoriser leur intégration dans la vie active. Par ailleurs, des mesures complémentaires comportant des actions de préparation et d'encadrement des intervenants pédagogiques seront mises en oeuvre.

Pour la gestion du programme, chaque Etat membre devra désigner des structures décentralisées qui travailleront en étroite coopération avec les autorités nationales responsables en matière de jeunesse.

La Commission européenne propose que ce programme se déroule sur une période de cinq ans et qu'il soit doté de 60 millions d'écus pour les deux premières années de sa mise en oeuvre (1998-1999). L'enveloppe financière pour les années suivantes sera fixée à partir de l'évaluation continue du programme. Le principe de base proposé en matière de financement est celui d'un cofinancement communautaire ne pouvant, en principe, excéder 50% du coût total du projet. Le coût total pour un jeune, exécutant un service volontaire dans un Etat de l'Union pour une période de longue durée est évalué à 10 400 Ecus, ce montant prenant en compte l'indemnité du volontaire estimée à 2 200 Ecus.

Le texte prévoit l'ouverture du programme aux pays associés d'Europe centrale et orientale ainsi qu'à Chypre et Malte. Par ailleurs, des activités de service volontaire européen pourront être effectuées par des jeunes de la Communauté dans des pays tiers.

La Commission suggère de valoriser le service volontaire européen en remettant aux jeunes ayant réalisé un tel service une attestation précisant les expériences et compétences qu'ils ont acquises durant cette période.

Enfin, un projet de résolution du Conseil est annexé au programme. Il tend à inciter les Etats membres à prendre les mesures nécessaires pour faciliter la réalisation effective du programme, en particulier en matière de droit de séjour, de protection sociale et de fiscalité.

Que penser de ce programme ?

Le principe de ce programme me paraît tout à fait positif, dans la mesure où il devrait favoriser utilement la mobilité des jeunes européens au sein de l'Union. Face à ce genre de programme, nous nous interrogeons souvent sur le respect du principe de subsidiarité. En l'occurrence, il me semble que la Communauté est la mieux placée pour mettre en oeuvre ce programme, qui a un caractère transnational évident. Toutefois, il est clair aussi qu'un tel programme ne peut réussir qu'avec le concours des Etats et des autorités locales de chacun d'entre eux.

En fait, le principal problème que pourrait poser le programme " Service volontaire européen " est un problème de coordination. Il existe en effet plusieurs autres programmes communautaires susceptibles de favoriser des actions recoupant celles prévues par le programme " Service volontaire européen ".

C'est le cas par exemple du programme Jeunesse pour l'Europe III. Il existe également un programme consacré aux échanges d'étudiants, le programme SOCRATES, et il conviendra de veiller à ce que le service volontaire exclue ce type d'actions. Il existe en outre des interventions communautaires en faveur de la formation et de l'accès à l'emploi des jeunes soutenues par le Fonds social européen. La Commission européenne évoque d'ailleurs explicitement dans le projet de programme " Service volontaire européen " la nécessité de renforcer les liens entre les deux programmes.

Dans son rapport sur la proposition de la Commission, le Parlement européen a insisté sur cet aspect en estimant que " la création d'un service volontaire européen doit être conduite en cohérence avec les autres actions communautaires en faveur de la jeunesse développées notamment dans le cadre du programme Jeunesse pour l'Europe ".

De son côté, la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, dans son appréciation sur le service volontaire européen, a insisté sur la nécessité d'une bonne articulation des financements des divers programmes visant la jeunesse.

Par ailleurs, on peut se demander s'il est opportun de prévoir la réalisation d'actions de service civil européen dans des pays n'appartenant pas à la Communauté. La participation au programme des pays associés d'Europe centrale et orientale est tout à fait compréhensible, dans la mesure où ces pays ont vocation à devenir membres de l'Union. En revanche, la réalisation d'actions dans les pays tiers paraît déborder l'objet du programme.

Dans ces conditions, je vous propose que notre délégation adopte des conclusions demandant au Gouvernement de veiller à la coordination entre les différents programmes communautaires relatifs à la jeunesse et exprimant le souhait que les actions de service civil à l'extérieur de l'Union soient limitées aux pays associés d'Europe centrale et orientale. "

*

* *

M. Christian de La Malène s'est déclaré très réservé à l'égard de ce programme. Il a souligné la multiplicité et la diversité des domaines dans lesquels interviendraient les actions de service civil et a exprimé la crainte que ce programme n'ait aucune cohérence. Il s'est en outre inquiété de l'importance de l'enveloppe financière proposée par la Commission européenne, observant que les Etats membres de l'Union connaissaient des difficultés financières importantes. Il a enfin fait valoir qu'une telle initiative paraissait inopportune au moment où la France est en train de mettre en place un service volontaire au niveau national.

M. Nicolas About s'est déclaré en accord avec M. de La Malène pour estimer que les domaines concernés par les actions de service civil paraissaient beaucoup trop nombreux. Il a estimé que ces actions devraient se limiter aux services sociaux, à la protection de l'environnement et aux activités artistiques, sportives et culturelles. Il a en revanche souligné qu'un tel programme offrirait l'opportunité aux jeunes européens de découvrir d'autres réalités et d'acquérir une expérience précieuse.

Mme Danielle Bidart-Reydet a observé que les lignes de force de ce programme n'apparaissaient pas clairement du fait de la multiplicité des domaines dans lesquels pouvaient intervenir les actions de service civil. Elle a exprimé la crainte que ce programme soit trop ambitieux et a estimé qu'il serait préférable de mobiliser les jeunes français pour résoudre les problèmes de notre pays.

M. Paul Masson a rappelé que l'opinion publique s'interrogeait sur le bien-fondé d'un système communautaire jugé trop complexe et qu'elle critiquait désormais la prolifération dramatique d'une administration lointaine. Il a exprimé la crainte qu'un programme de ce type soit inefficace et coûteux et s'est interrogé sur l'opportunité d'une telle initiative.

M. Pierre Fauchon a estimé qu'on ne pouvait à la fois reprocher à la construction européenne d'être technocratique et refuser toute initiative visant à lui donner une dimension humaine. Il a souligné que la nécessité de développer cette dimension humaine impliquait la mise en oeuvre d'actions destinées aux jeunes européens. Il a observé qu'il paraissait difficile de faire fonctionner un tel programme sans structures administratives et que, si le risque d'inefficacité était réel, il était inhérent à toute action administrative et non seulement à celle de la Commission européenne.

M. Pierre Fauchon a ensuite estimé que les actions de service civil conduites en dehors de l'Union devraient être limitées aux pays Associés d'Europe centrale et orientale et a souligné la nécessité de réduire le nombre de domaines dans lesquels pourraient se dérouler les actions de service civil.

M. James Bordas a tout d'abord observé que le dialogue national sur l'Europe avait récemment permis à de nombreux jeunes de découvrir la réalité de la construction communautaire. Il a approuvé le principe du programme relatif au service civil, soulignant qu'il était indispensable d'associer la jeunesse à l'aventure européenne. Il a en revanche estimé que ce programme ne devait pas perturber la mise en place du service volontaire français et s'est prononcé pour une réduction du champ d'application du programme.

M. Nicolas About a souligné l'intérêt que pourraient présenter les échanges de jeunes effectués dans le cadre de ce programme. Il a rappelé que les communes s'efforçaient d'ores et déjà, à travers le jumelage, de développer ce type d'échanges et qu'une aide communautaire pourrait faciliter ces actions. Il a rappelé que le programme avait été proposé par la Commission européenne à la demande du Conseil européen réuni à Florence en 1996 et qu'une action pilote était actuellement en cours. Il a enfin proposé de compléter son projet de conclusions pour prendre en considération les remarques formulées au cours du débat.

Sous réserve de ces modifications, la délégation a alors adopté les conclusions proposées par M. Nicolas About, Mme Danielle Bidard-Reydet s'abstenant (voir texte ci-après).

CONCLUSIONS ADOPTEES PAR LA DELEGATION

La délégation du Sénat pour l'Union européenne :

- approuve la mise en oeuvre du programme d'action communautaire " Service volontaire européen " ;

- souhaite, compte tenu de la situation financière difficile que connaissent les Etats membres de l'Union européenne, que l'enveloppe financière allouée à ce programme soit substantiellement inférieure à la somme proposée par la Commission européenne ;

- demande au Gouvernement de veiller à la nécessaire coordination entre les différents programmes communautaires relatifs à la jeunesse ;

- estime indispensable, pour des raisons d'efficacité, d'éviter la dispersion des actions conduites dans le cadre du programme " service volontaire " et considère que le champ du programme devrait être limité aux activités artistiques, sportives et culturelles, à la protection de l'environnement et aux services sociaux ;

- souhaite qu'une priorité soit donnée aux actions de service civil à l'intérieur de l'Union européenne et que les actions conduites à l'extérieur de l'Union soient limitées aux pays associés d'Europe centrale et orientale.

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