B. UNE PROPOSITION INDISSOCIABLE DE L'AGENDA 2000

1. La question budgétaire

La proposition de cinquième Programme-cadre soumise à l'Assemblée nationale et au Sénat au titre de l'article 88-4 de la Constitution ne contient pas la proposition d'enveloppe financière pour ce programme. Le programme-cadre devant fonctionner jusqu'en 2003, la Commission européenne a estimé qu'elle ne pourrait présenter une proposition qu'après la présentation de l'Agenda 2000, qui concerne notamment les perspectives financières de l'Union européenne à partir de l'an 2000.

Dans le document Agenda 2000, présenté en juillet 1997, la Commission européenne affirme sa volonté de voir l'Union faire des politiques liées à la connaissance une priorité au-delà de l'an 2000 : " Face aux enjeux du développement technologique et de l'innovation et au moment où les concurrents de l'Europe augmentent de façon significative leurs efforts, il est vital de donner une nouvelle impulsion à l'effort communautaire de recherche et de développement technologique. Celle-ci doit apporter une réelle valeur ajoutée par rapport aux programmes nationaux. C'est l'objectif principal du cinquième Programme-cadre, qui devra bénéficier d'un renforcement de sa dotation financière au-delà du programme en cours. L'Union doit concentrer ses activités de recherche sur l'amélioration de la compétitivité de l'économie européenne, favorisant ainsi la création d'emplois nouveaux. Il est dès lors particulièrement important que l'Europe soit capable de transformer les percées scientifiques et technologiques en succès industriels et commerciaux. Dans ce contexte, l'innovation par les PME est un facteur particulièrement porteur. La création de sociétés high-tech innovantes en Europe doit être encouragée. Par ailleurs, l'Union doit surmonter ses retards dans la diffusion des technologies et la propriété intellectuelle de ses découvertes ".

Tirant les conséquences de cette priorité reconnue à la recherche, la Commission estime, dans les pages d'Agenda 2000 consacrées au nouveau cadre financier de l'Union, que la dotation du programme-cadre devrait progresser plus rapidement que le PNB des 15 Etats membres. A propos de la dotation financière des politiques internes (6( * )) de l'Union, la Commission tient en effet le raisonnement suivant :

" Le développement des politiques internes au cours de la prochaine période couverte par les perspectives financières devrait répondre à une double préoccupation, concourant à accroître l'efficacité des actions menées à l'échelle communautaire. Il s'agit, en premier lieu, de concentrer les moyens disponibles au sein des politiques internes, de manière à éviter toute dispersion sur des actions qui ne seraient pas en mesure d'atteindre un impact significatif. En même temps, un certain nombre de programmes, prioritaires en raison de la valeur ajoutée générée par une intervention à l'échelle communautaire, notamment des points de vue de la croissance et de l'emploi ainsi que du développement et de la diffusion de nouvelles technologies, devraient voir leurs dotations progresser plus rapidement que le PNB. Il s'agirait essentiellement des réseaux transeuropéens, de la recherche et de l'innovation, de l'éducation, de la formation, de la mise en oeuvre de technologies respectueuses de l'environnement, des actions en faveur des PME.

Indépendamment de l'élargissement, une telle réorientation des politiques internes pourrait se traduire, au total, par une progression du plafond de la rubrique 3 légèrement supérieure à celle du PNB des quinze Etats membres "
.

Compte tenu de cette orientation formulée dans l'Agenda 2000, la Commission européenne a présenté le 11 août 1997, une proposition d'enveloppe financière par le cinquième Programme-cadre. Dans ce document, elle a estimé nécessaire que l'enveloppe financière du programme-cadre connaisse une croissance significative par rapport au simple maintien du pourcentage du PNB. Elle a donc proposé que cette progression soit de 3 % et que l'enveloppe du programme-cadre soit en conséquence de 16,3 milliards d'Ecus, sur la base des évaluations prévisionnelles du PNB.

Le tableau suivant retrace la manière dont serait répartie cette enveloppe financière :

Cinquième Programme-cadre (1998-2002)

Montants et répartition

Millions d'Ecus

(prix courant)

· Première action (programmes de recherche, de développement technologique et de démonstration)

11775 (1)

· Deuxième action (coopération avec les pays tiers et les organisations internationales)

491 (1)

· Troisième action (diffusion et valorisation des résultats)

350 (1)

· Quatrième action (stimulation de la formation et de la mobilité des chercheurs)

1402 (1)

Montant global maximal

14 833 (2) *

Répartition indicative entre les thèmes de la première action (en millions d'écus) :

- découvrir les ressources du vivant et de l'écosystème

3 925 (1)

- développer une société de l'information conviviale

3 925 (1)

- favoriser une croissance compétitive

et durable

3 925 (1)

11 775 (1)

(1) )Le montant pour les actions du CCR exclu.

(2) Dont 815 millions d'Ecus pour le CCR


* Une somme de 1467 millions d'Ecus serait affectée au cinquième Programme-cadre EURATOM présenté simultanément au programme-cadre de la Communauté européenne.

Les propositions de la Commission européenne pour le budget du cinquième Programme-cadre appellent quelques remarques.

La Commission indique que la recherche doit être l'une des politiques prioritaires de l'Union et qu'il conviendra d'éviter la dispersion des crédits communautaires sur des actions qui ne seraient pas en mesure d'atteindre un impact significatif. L'objectif est louable, mais l'examen des propositions d'actes communautaires présentées au cours des dernières années montre que dans ce domaine, beaucoup de chemin reste à parcourir. La Délégation du Sénat pour l'Union européenne a souvent dû constater que certains programmes présentés par la Commission européenne ne paraissaient guère susceptibles d'obtenir un effet quelconque, compte tenu de la modestie des crédits affectés.

Cette remarque s'applique en particulier à certains programmes lancés dans le domaine social (Pauvreté) ou dans le domaine de la santé (programme relatif à la prévention des blessures, programme relatif à la prévention des maladies liées à la pollution...).

Le tableau ci-après retrace, à titre indicatif, la répartition des crédits attribués en 1997 aux politiques internes de l'Union européenne.

Le budget des politiques internes en 1997 (en millions d'écus)

Recherche

3.500

Pêche et mer

46

Réseaux Transeuropéens

481,2

Energie

38,1

Education, formation, jeunesse

380,4

Informations/statistiques

28,2

Marché intérieur

237,0

Autres actions régionales

22

Autres actions sociales

188,9

Transports

21,6

Autres actions agricoles

171,9

Lutte contre la fraude et dépenses d'appui

20,0

Environnement

131,8

Protection des consommateurs

19,1

Audiovisuel et culture

112,9

Sécurité nucléaire Euratom

15,8

Information et communication

110,8

Politique de coopération, Justice et affaires intérieures

13,1

Industrie

84,3

Aides à la reconstruction

3,9

Il est clair qu'un effort de concentration des actions de l'Union sur les domaines dans lesquels elle peut apporteur une valeur ajoutée réelle est désormais indispensable.

La recherche fait partie des politiques pour lesquelles une action communautaire peut avoir des conséquences positives. On peut donc approuver la volonté de la Commission européenne d'en faire une priorité pour les années à venir, à condition que des propositions précises soient faites pour mettre fin à des actions beaucoup moins pertinentes. Ainsi, globalement, les crédits affectés aux politiques internes de l'Union pourraient demeurer stables en pourcentage du PNB dans le cadre des prochaines perspectives financières. Cette orientation ne préjuge naturellement en rien des positions que sera conduite à prendre la délégation du Sénat pour l'Union européenne au cours des prochaines semaines sur les perspectives financières.

Il semble en tout état de cause difficile de déterminer l'enveloppe financière du programme-cadre avant que les discussions sur les perspectives financières aient progressé. Il s'agit d'un facteur susceptible de retarder l'adoption du programme-cadre, mais on perçoit mal comment le budget du programme-cadre pourrait être totalement disjoint des discussions sur les perspectives financières. Il conviendra au minimum que le Conseil de l'Union ait dégagé des orientations sur les futures perspectives avant que le programme-cadre soit définitivement entériné.

2. La perspective de l'élargissement

A l'heure actuelle, les pays d'Europe centrale et orientale sont associés au programme-cadre par l'intermédiaire du programme spécifique INCO (Coopération avec les pays-tiers). L'avenir des relations avec les pays appelés à adhérer à l'Union européenne n'est pas évoqué dans l'exposé des motifs de la proposition de cinquième Programme-cadre. En revanche, dans la présentation de la deuxième action de ce programme-cadre, intitulée : " Affirmer le rôle international de la recherche communautaire ", la Commission indique que l'un des objectifs de cette action est " de préparer l'adhésion des Pays d'Europe Centrale et Orientale (PECO) associés ". Pour ces pays comme pour quelques autres, la Commission européenne propose une " pleine association au programme-cadre : participation et financement par la Communauté des entités de pays tiers dans des conditions similaires à celles des entités des Etats membres (EEE, certains PECO, Israël, Suisse) ".

Le moins qu'on puisse dire est qu'une telle formulation laisse un grand nombre de questions sans réponses. En effet, il est aujourd'hui difficile de mesurer l'importance des problèmes que connaissent les pays d'Europe centrale et orientale appelés à adhérer à l'Union européenne dans le domaine de la recherche et du développement technologique. Dans ses avis sur les demandes d'adhésion de ces pays à l'Union européenne, la Commission ne consacre que quelques lignes à ce sujet. Il apparaît cependant que les dépenses consacrées à la recherche ont diminué de manière importante au cours des dernières années pour atteindre par exemple en 1995 1,21 % du PIB en République tchèque (2,12 % en 1991), 0,8 % en Pologne et 0,78 % en Hongrie (1,07 % en 1991). Il est pour l'heure difficile de savoir si ces pays sont réellement en mesure de participer à de nombreux projets de recherche au niveau communautaire.

On peut, de plus, se demander si les règles de propriété intellectuelle sont suffisamment développées dans ces pays pour éviter l'évasion d'informations sensibles.

Surtout, les modalités de cette " pleine association " de certains pays d'Europe centrale et orientale au programme-cadre ne sont pas précisées. Il paraît difficile de leur demander d'apporter une contribution financière pleine et entière à la conduite de cette politique. D'après les informations que votre Rapporteur a pu recueillir, la Commission européenne envisagerait une formule de financement dégressif, en vertu de laquelle l'Union européenne prendrait en charge une partie substantielle de la contribution des Pays d'Europe Centrale et Orientale en début de période pour confier progressivement à ces pays le soin d'assurer eux-mêmes cette contribution. On peut s'interroger sur la nature des fonds qui seraient consacrés au financement de la contribution des Pays d'Europe Centrale et Orientale. S'agit-il de prélever des crédits attribués au programme PHARE ? D'autres sources de financement sont-elles envisageables ? Votre Rapporteur estime qu'une réflexion approfondie doit encore être conduite sur ce sujet. On peut en effet se demander si une association partielle - dans l'attente de l'adhésion - n'est pas préférable à une formule qui conduirait à retirer des fonds à d'autres actions communautaires en direction des mêmes pays.

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