CHAPITRE 1 - INFRASTRUCTURES PORTUAIRES ET ÉCHANGES MARITIMES DANS LES DOM-TOM

Les ports d'outre-mer se trouvent dans une situation spécifique qui est, à bien des égards, différente de celle des ports de métropole. Ils constituaient, avant le développement du transport aérien, dans ces communautés insulaires pour la plupart, le lien unique avec l'extérieur. Aujourd'hui, ils jouent un rôle important dans les échanges. Leur étude implique au préalable le rappel de leur hétérogénéité au plan statutaire, d'où découlent des politiques différentes. On dénombre :

- un port autonome bénéficiant de certaines adaptations propres aux particularités locales, créé en 1975 en Guadeloupe ;

- quatre ports d'intérêt national, dont la tutelle et la direction sont assurées par les directeurs départementaux du ministère de l'Équipement. Dans le cadre de la concession, comme en métropole, les Chambres de Commerce et d'Industrie les gèrent et les exploitent commercialement. Ils sont situés à Saint-Pierre-et- Miquelon, en Martinique à Fort-de-France, en Guyane à Degrad-des-Cannes et au Larivot, enfin à la Réunion, le Port des Galets devenu récemment Port Réunion ;

- deux ports autonomes territoriaux, qui relèvent des domaines de compétence des Territoires d'outre-mer. Ainsi, les ports autonomes de Nouméa en Nouvelle- Calédonie et de Papeete en Polynésie Française 12 ( * ) sont des établissements publics territoriaux dotés de la personnalité civile et de l'autonomie financière. La

- Infrastructures portuaires et échanges maritimes dans les DOM-TOM -

Direction des ports considère que la compétence attribuée aux territoires d'outre- mer en matière portuaire, la dispense de toute intervention financière importante en leur faveur ;

- des installations territoriales de divers types : le port de Longoni, mis en service en fin 1992, est géré par les autorités locales et concédé à la Chambre des Métiers de Mayotte, qui fait office de Chambre de Commerce. La gestion des équipements portuaires de Wallis-et-Futuna est assurée par les services techniques de l'équipement ;

- l'équipement portuaire de Kourou-Pariacabo en Guyane est propriété privée du Centre National des Études Spatiales (CNES), qui l'utilise pour assurer certains de ses approvisionnements sensibles.

1. Les ports sont des outils indispensables aux communautés insulaires

Dans les collectivités d'outre-mer insulaires, les ports constituent les centres vitaux et stratégiques de l'économie et du développement. La libéralisation du trafic aérien n'a que peu affecté les trafics de marchandises, qui continuent de s'effectuer; en quasi totalité, par voie maritime. Les ports sont ainsi considérés comme des points névralgiques dans chaque territoire. Leur paralysie entraîne celle de toute l'économie et par suite celle de la vie locale.

1.1 Les ports sont un des liens des communautés insulaires avec l'extérieur

Les ports d'outre-mer connaissent des situations très différentes de celles de métropole. Elles tiennent, pour l'essentiel, aux caractéristique géographiques des territoires (insularité, exiguïté territoriale, étroitesse des marchés, faiblesses du poids démographique).

Chaque collectivité dispose d'un port principal, chargé d'assurer les relations internationales et transocéaniques 13 ( * ) , trop longtemps restées exclusivement bilatérales. La question du choix des priorités à opérer entre plusieurs installations portuaires situées sur une même façade maritime ne se pose pas outre-mer.

Chaque installation portuaire d'outre-mer se trouve en position de monopole pour l'approvisionnement de l'île : l'insularité limite les détournements de trafic. Ce monopole ne se retrouve pas au niveau régional : dans ce cas, pour la captation des trafics tiers régionaux, les ports français sont soumis à la concurrence et ils n'ont pas, dans les environnements donnés, de rôle dominant.

L'arrière-pays des installations portuaires outre-mer se confond avec la totalité du territoire.

Les fonctions de commandement des territoires sont très fortement concentrées dans la ville-capitale. Le lieu de débarquement, le port, a toujours été considéré comme tête de pont. Il est situé le plus souvent à proximité de l'aéroport et jouxte les centres de décisions des pouvoirs politiques, économiques et sociaux. Cette situation particulière a de nombreuses conséquences sur le fonctionnement de la société et sur la vie locale. Elle pose des problèmes de sécurité. Les mouvements sociaux et revendicatifs en bloquant les équipements portuaires et aéroportuaires, provoquent l'asphyxie et la paralysie de ces "villes-capitales" et par suite celle de la totalité de leur territoire.

1.2 Les ports sont aussi essentiels aux échanges intérieurs, qu'il s'agisse de cabotage ou de trafic inter-îles

La caractéristique d'archipel de quelques-unes des collectivités d'outre-mer exige que la desserte inter-îles soit assurée. L'activité maritime interinsulaire en Polynésie revêt une grande importance, qui explique que le transport interinsulaire y soit, depuis 1977, un service public. La desserte inter-îles s'effectue le plus souvent par voie maritime, tant pour le trafic de personnes que celui de marchandises.

En Polynésie, les ports sont relativement nombreux. Ils sont le support des trafics interinsulaires maritimes, qui assurent 99 % du transport de marchandises. Au cours des six dernières années, les trafics ont augmenté de plus de 40 %.

Trafic maritime interinsulaire de marchandises en Polynésie

unité tonnes

1992

1993

1994

1995

1996

Variations 1996/1992

Fret débarqué

86 892

108 727

114 962

113 920

120 845

39,0 %

Fret embarqué à Papeete

182 172

214 338

239 996

251 624

261 542

43,5 %

(Total

269 064

323 065

354 958

365 544

382 000

41,9 %

Source : IEOM.

On constate un net déséquilibre entre les embarquements et les débarquements dans ce trafic. Beaucoup de navires assurant l'approvisionnement des îles retournent « à vide » vers Papeete.

La plupart des lignes ne sont pas rentables. Ainsi, pour desservir les Tuamotu- Gambier, seuls deux des cinq navires assurant la liaison en tirent un bénéfice. Souvent, dans la mesure où le passage d'un archipel à l'autre est toujours coûteux et difficile, les compagnies de navigation interinsulaires négligent les escales intermédiaires, sources de frais et de retard. En revanche, les lignes les plus rentables font l'objet d'une guerre des prix et d'un surinvestissement, qui fait hésiter de nouvelles compagnies à participer à ce trafic.

Pour compenser ces obstacles, le Territoire, avec l'aide de l'État, s'emploie à améliorer les infrastructures portuaires, en accordant la priorité aux îles éloignées et mène une politique active dans ce domaine afin d'atténuer ces contraintes.

Cette politique se traduit par la mise en place d'aides à l'investissement : la Caisse Française de Développement a ainsi consenti un prêt de 5,5 millions de francs à la SNC Ferry Aremiti Investissement pour l'acquisition d'un cargo destiné à assurer la ligne Papeete-Moorea. Les subventions d'exploitation territoriales, par la détaxation du gazole notamment, en font aussi partie. Enfin les concessions de lignes sont attribuées de manière à permettre aux compagnies de compenser la non-rentabilité de certaines dessertes par l'exploitation de lignes à plus fort trafic.

Le trafic maritime interinsulaire de passagers s'intensifie :

- Trafic maritime interinsulaire de passagers en Polynésie

1993

1994

1995

1996

Variation

1996/1993

Nombre de passagers

903 025

1 009 588

1 110 756

1 244 000

37,7 %

Source : IEOM.

Les neufs dixièmes du trafic passagers concernent la liaison entre les îles de Tahiti et Moorea. Le trafic maritime est concurrencé par le trafic aérien qui, pour l'année 1995, a concerné 519 506 passagers. Le transport interinsulaire de passagers est par conséquent pour un tiers aérien et pour deux tiers maritimes. Cette répartition est due à des coûts plus importants de la voie aérienne, qui est malgré tout en progression constante.

En Nouvelle-Calédonie, le port de Nouméa assure la desserte de la province des îles Loyauté, de l'île des Pins, des îles Belep et de quelques communes situées dans le nord de la Grande Terre, ainsi que de quelques territoires avoisinants. Le transport de marchandises par voie maritime au plan local est assuré par trois armateurs, qui bénéficient des subventions du Territoire pour exploiter ces lignes. Ces armateurs se sont récemment regroupés pour créer, en mars 1996, la Compagnie Maritime des Iles (CMI). Le trafic du minerai de nickel brut extrait des quatre mines de la Société Le Nickel jusqu'à son usine de Nouméa- Doniambo constitue plus de 90 % du tonnage total.

Nouméa-Doniambo constitue plus de 90 % du tonnage total.

Fret maritime intérieur en Nouvelle-Calédonie

unité : milliers de tonnes

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Variations 1996/1991

Minerai de nickel

2 004

2 046

2 267

2 497

2 759

2 767

38,0 %

Total du fret intérieur Source : IEOM.

2 171

2 212

2 448

2 647

2 919

2 939

35,3 %

Source : IEOM.

* 12 Le Port Autonome de Papeete n'a compétence que sur les équipements de l'île de Tahiti. Les services techniques territoriaux l'exerce sur la totalité des autres outils et aménagements portuaires répartis dans les archipels du territoire .

* 13 En Guadeloupe, le port de Basse-Terre ne résiste pas à la concurrence que lui inflige celui de Pointe-à-Pitre.

Page mise à jour le

Partager cette page