ANNEXES

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ANNEXE N° I Examen du rapport par la commission 95

ANNEXE N° II Lettre du rapporteur au ministre 99

ANNEXE N° III Réponse du ministre au rapporteur 101

ANNEXE N° IV Liste des personnes entendues par
le rapporteur 103

ANNEXE N° V Comptes-rendus des auditions 105

ANNEXE N° VI Liste des personnes rencontrées par le rapporteur lors de ses déplacements 143

ANNEXE N° VII Quelques messages électroniques reçus sur le site Web du Sénat à l'occasion de la consultation mise en place par la mission d'information 145

ANNEXE I

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION

Au cours d'une seconde séance tenue le mardi 10 novembre 1998 dans l'après-midi, sous la présidence de M. Alain Lambert , président , puis de Mme Marie-Claude Beaudeau , vice-président , la commission a entendu la communication de M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial des crédits de l'enseignement supérieur, sur la mission qu'il a menée sur la situation des bibliothèques universitaires françaises.

M. Jean Philippe Lachenaud a tout d'abord expliqué que la mission entreprise avait pour ambition de dresser l'état des lieux des bibliothèques universitaires françaises dix ans après le rapport Miquel, qui avait constitué une prise de conscience de la "misère" des bibliothèques universitaires. Les déplacements qu'il a effectués dans les universités ainsi que les nombreuses rencontres qu'il a eues avec les professionnels lui ont permis de mesurer l'effort accompli par la collectivité nationale en faveur des bibliothèques universitaires. Il a qualifié cet effort d'" exceptionnel ", insistant sur la mutation qui a affecté ces bibliothèques, rappelant toutefois qu'il s'agissait d'une mutation inachevée.

M. Jean-Philippe Lachenaud a expliqué qu'une importante mutation statutaire était intervenue en 1985, transformant les bibliothèques universitaires en services communs de la documentation (SCD). Cette réforme statutaire a renforcé la cohérence de la politique documentaire des universités. Il a fait état des grands indicateurs relatifs aux bibliothèques universitaires, notant qu'elles étaient au nombre de 96, dont 78 SCD, qu'elles disposaient d'un budget de 1,3 milliard de francs, 700 millions rémunérant les 4.100 emplois et 600 millions étant consacrés à la documentation, qu'elles représentaient une surface totale de 728.000 m² et offraient 80.000 places assises, soit 1 place pour 18 étudiants, qu'elles ouvraient en moyenne 50 heures par semaine, qu'elles possédaient 23 millions de volumes, 400.000 titres et périodiques ainsi qu'un nombre croissant de ressources multimédia, qu'elles accueillaient 1.200.000 lecteurs, dont 86 % d'étudiants et qu'elles prêtaient ou communiquaient 16 millions de documents chaque année.

M. Jean-Philippe Lachenaud a noté que cet effort national exceptionnel s'accompagnait d'une meilleure gestion des budgets grâce à la combinaison du "fléchage" des crédits et d'une politique contractuelle. Il a fait état de la considérable amélioration de la formation, initiale et continue, dispensée aux personnels, notamment par l'Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques (ENSSIB). Il a évoqué le rôle essentiel joué par plusieurs établissements chargés de mettre en oeuvre une politique innovante en matière de documentation universitaire. Le Centre technique du livre de l'enseignement supérieur (CTL-ES) est chargé d'une mission de bibliothèque de dépôt, assurant la conservation et le stockage des collections peu usitées des bibliothèques universitaires parisiennes. L'Agence bibliographique de l'enseignement supérieur (ABES), située à Montpellier, a été créée pour mettre en place le système universitaire de documentation (SUD) qui constituera le réseau reliant les fonds documentaires de toutes les bibliothèques universitaires françaises et de nombreuses bibliothèques étrangères. Les centres d'acquisition et de diffusion de l'information scientifique et technique (CADIST), ont quant à eux, vocation à mutualiser les acquisitions documentaires.

M. Jean-Philippe Lachenaud a toutefois estimé que la mutation des bibliothèques universitaires françaises était inachevée. Ainsi, l'ouverture aux étudiants, qui est de 50 heures hebdomadaires en moyenne, est insuffisante, l'objectif affiché tant par les bibliothèques elles-mêmes que par l'administration centrale étant de 60 heures. En matière de locaux et de personnels, il a appelé de ses voeux la poursuite de l'effort engagé, rappelant que l'écart avec les bibliothèques allemandes et britanniques, qui sont considérées comme une référence, était de 1 à 2,5. A cet égard, il a jugé insuffisante la part des crédits consacrés aux bibliothèques universitaires dans l'enveloppe globale du plan université du 3e millénaire (U3M).

Il a souligné les disparités considérables existant entre les universités, au niveau de leurs ressources documentaires notamment, expliquant qu'elles étaient aggravées par un désordre documentaire, dont l'origine était à rechercher moins dans les textes que dans une pratique ayant accordé trop d'importance au fractionnement des sites documentaires. Les bibliothèques universitaires parisiennes connaissent une situation très délicate, souffrant d'une pénurie de locaux mais également de matériels informatiques.

Il a souligné que l'entrée des bibliothèques universitaires dans la société de l'information nécessitait des opérations extrêmement complexes, consistant à identifier les documents qui peuvent être numérisés, à réaliser les opérations de numérisation qui sont extrêmement longues et coûteuses, puis à mettre en place des réseaux de circulation et d'interconnexion des documents électroniques. Actuellement, environ le tiers des notices documentaires est numérisé, mais il ne s'agit là que d'une moyenne, certaines bibliothèques universitaires étant considérablement en retard. Le système universitaire de documentation devrait à cet égard constituer une opportunité tout à fait intéressante, d'autant plus qu'il ne constituera lui-même qu'une partie du Catalogue collectif de France (CCF) qui devrait donner accès à l'ensemble de la documentation française numérisée. Il a également constaté que les postes d'accès à Internet ainsi que les lecteurs de CD-Roms étaient en nombre insuffisant, mais que les universités devaient nécessairement mettre en oeuvre un plan de formation à l'utilisation de ces nouvelles technologies.

M. Jean-Philippe Lachenaud a conclu en rappelant qu'une politique documentaire de haut niveau, rendue possible par les bibliothèques universitaires, constituait la condition de la réussite et de la reconnaissance de l'enseignement supérieur français.

M. Alain Lambert, président, s'est interrogé sur la manière d'établir un équilibre entre la bibliothèque virtuelle, rendue possible par les nouvelles technologies, et les bibliothèques universitaires traditionnelles. Il a également voulu connaître la place qu'occupaient les bibliothèques universitaires françaises par rapport aux bibliothèques européennes, puis a demandé au rapporteur si les travaux sénatoriaux figuraient dans les bibliothèques universitaires. Enfin, il a voulu connaître la perception que les étudiants avaient des bibliothèques dans lesquelles ils travaillaient.

M. Jean-Philippe Lachenaud a expliqué que la direction de la programmation et du développement (DPD) du ministère semblait n'accorder qu'une importance relative à la construction ou à la rénovation des locaux de bibliothèques, donnant en revanche une importance particulière au développement des nouvelles technologies. Il a cependant estimé qu'une part considérable des fonds documentaires des bibliothèques universitaires ne pouvait être numérisée, et que, par conséquent, ils devaient être consultés sur place. Il a ajouté que la formation à la recherche comme au travail en équipe ne pouvait être menée à bien que dans des bibliothèques traditionnelles, les bibliothécaires, mais aussi les moniteurs-étudiants jouant un rôle incontournable de médiateurs, d'autant plus appréciable que les jeunes étudiants arrivant des lycées ont besoin d'être formés et orientés dans la bibliothèque.

M. Jean-Philippe Lachenaud a précisé que le rayonnement international de la France passait également par la numérisation des thèses soutenues dans notre pays. Mais il a reconnu que beaucoup de consultations nationales étaient réalisées hors de nos frontières. Il a ajouté que la France était confrontée, dans le cadre de négociations visant à accéder aux ressources documentaires sous forme électronique, à de puissants éditeurs internationaux, et il a formé le voeu que les universités françaises se groupent en consortium pour conduire de telles négociations.

S'agissant des comparaisons internationales, il a rappelé que, pour un nombre de bibliothèques similaire, la France se distinguait par la faiblesse des moyens dont disposaient ses bibliothèques : elles possèdent 22 millions d'imprimés, tandis que les bibliothèques universitaires britanniques en ont 70 millions et les bibliothèques allemandes 124 millions, les livres acquis dans l'année s'élevant pour la France à 884.000 mais à 2.200.000 pour la Grande-Bretagne et à 3.800.000 pour l'Allemagne, de tels écarts se retrouvant pour les budgets d'acquisition comme pour les personnels.

Il a précisé que les documents émanant du Sénat étaient présents, notamment dans les sections juridiques et économiques des bibliothèques universitaires, mais que la Haute Assemblée avait tout intérêt à diffuser davantage ses travaux auprès de la communauté universitaire.

Il a rappelé qu'une enquête avait été menée, il y a quelques années, auprès des étudiants, de laquelle il ressortait que ces derniers fréquentaient de manière très variable les bibliothèques universitaires, essentiellement en fonction de leur filière et de leur niveau d'études, mais que, d'une manière générale, 40 à 45 % des étudiants n'étaient pas inscrits à la bibliothèque, contre 50 % dix ans auparavant.

M. Jean Clouet a estimé que le développement excessif du virtuel risquait d'avoir de graves conséquences sur la qualité de l'enseignement supérieur. Il s'est, d'autre part, étonné des files d'attente régulières existant devant la bibliothèque Sainte-Geneviève, ainsi que du faible nombre des inscrits dans les bibliothèques.

M. Jean-Philippe Lachenaud a expliqué que de nombreux étudiants de premier cycle ne prenaient effectivement pas la peine de s'inscrire à la bibliothèque, se contentant trop souvent de cours polycopiés et de quelques manuels de base, mais il a estimé que certains enseignants les incitaient à de telles pratiques. Il s'est d'une manière générale déclaré hostile à des bibliothèques universitaires qui seraient réservées aux étudiants de premier cycle.

S'agissant de la bibliothèque Sainte-Geneviève, il a reconnu qu'elle ne pouvait répondre aux objectifs d'une bibliothèque universitaire en raison de sa vocation littéraire et patrimoniale, et s'est interrogé sur l'opportunité de lui redonner son ancien statut de bibliothèque municipale.

M. Yann Gaillard a estimé que les carences dont souffraient les bibliothèques universitaires avaient des répercussions sur la qualité de la lecture publique, un grand nombre d'étudiants fréquentant la bibliothèque publique d'information (BPI) du centre Pompidou comme la Bibliothèque nationale de France. Il s'est également interrogé sur la manière de protéger la propriété intellectuelle dans un environnement électronique.

M. Jean-Philippe Lachenaud a abondé dans le même sens et a expliqué que la fermeture de la BPI avait allongé les files d'attente devant la bibliothèque Sainte-Geneviève, ce qui montre la similitude de leur public. Il a souhaité qu'un rapprochement, notamment en matière de prêt, soit opéré entre les bibliothèques universitaires et les bibliothèques municipales.

Il a précisé que la question des droits de copie et des droits d'auteur était traitée dans le rapport, mais a fait état de son désaccord avec les conclusions du rapport de M. Jean-Marie Borzeix qui propose de faire payer aux étudiants un droit d'auteur acquitté lors du prêt ou de la consultation numérique du document. Il a estimé qu'il était préférable de s'orienter vers la solution d'un droit forfaitaire de bas niveau, de 5 à 10 francs.

La commission a alors donné acte au rapporteur des conclusions de sa communication et a décidé d'autoriser leur publication sous la forme d'un rapport d'information.

ANNEXE II
Lettre du rapporteur au ministre

ANNEXE III
Réponse du Ministre au rapporteur

ANNEXE IV

LISTE DES PERSONNES
ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

 
 

Pages


Mardi 17 mars 1998

- M. Denis Pallier , Doyen de l'Inspection générale des bibliothèques....................


105


Jeudi 19 mars 1998

- M. Bruno Van Dooren , Président de l'association des directeurs de bibliothèques universitaires..............................................



113

 

- Mme Arlette Pailley-Katz , vice-présidente de l'association...........................................


113


Lundi 6 avril 1998

- M. Jean-Claude Groshens , Président du Conseil supérieur des bibliothèques...........


119

 

- M. Dominique Arot, Secrétaire général du Consei........................................................


119


Mardi 7 avril 1998

- M. Claude Jolly , Sous-directeur des bibliothèques et de la documentation au ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie....................




125


Mercredi 6 mai 1998

- M. Bernard Saint-Girons , Premier vice-président de la Conférence des présidents d'université.................................................



131

 

- M. Bernard Raoult , troisième vice-président de la Conférence.........................................


131


Mercredi 24 juin 1998

- M. Micher Garnier , Directeur de la programmation et du développement au ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.......................




135


Jeudi 24 septembre 1998

- M. Claude Jolly, Sous-Directeur des bibliothèques et de la documentation au ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.......................




139

ANNEXE V

M. Denis PALLIER,
Doyen de l'Inspection Générale des Bibliothèques
- Mardi 17 mars 1998 -

M. Denis Pallier a, dans un premier temps, présenté les activités de l'Inspection générale des bibliothèques (IGB). Il s'agit d'une petite inspection qui ne comporte que huit membres, dont un inspecteur général et six conservateurs généraux des bibliothèques chargés d'une mission d'inspection, le corps des inspecteurs généraux étant appelé à disparaître. Six emplois relèvent du ministère de l'Education nationale, celui de la Culture ayant contribué à la reconstitution du service en mettant à disposition, à partir de 1996, trois conservateurs généraux des bibliothèques.

M. Denis Pallier a, en effet, insisté sur la particularité du statut de l'IGB.

De 1945 à 1975, une direction du ministère de l'Education nationale prenait en charge les bibliothèques publiques, les bibliothèques universitaires et les personnels d'Etat des bibliothèques. En 1975, l'IGB resta sous la tutelle du ministère de l'Education nationale mais fut également appelée à travailler pour le ministère de la Culture. Cette sorte de double tutelle posa dès lors des problèmes d'ordre existentiel à l'IGB, d'autant que l'extinction progressive du corps des inspecteurs généraux des bibliothèques fut programmée au cours des années qui suivirent.

En 1992, Jack Lang devint ministre de l'Education nationale et de la culture, cette situation tendant à rassurer l'IGB sur son existence à long terme, même si ses modalités de fonctionnement ne s'en sont guère trouvées améliorées, du fait notamment de l'établissement d'un double programme de travail, parfois peu complémentaire, par les deux ministères. Cependant, les modalités de fonctionnement de l'inspection devraient être améliorées par la sortie d'un décret organisant le service, ce texte ayant fait l'objet d'un accord entre les deux ministères dès la fin de 1996.

M. Denis Pallier a, ensuite, rappelé que depuis 1995, l'IGB avait effectué un peu moins de quarante inspections de bibliothèques universitaires, ajoutant que, en 1995 et 1996, l'IGB avait contrôlé pour la première fois des unités régionales de formation à l'information scientifique et technique (URFIST), dont la mission est de former les personnels des bibliothèques et les enseignants des troisièmes cycles aux nouvelles technologies.

Les services de documentation dont l'inspection est demandée par les programmes fixés par le ministre de l'Education nationale sont généralement ceux d'universités dont les contrats avec le ministère sont à mi-parcours. S'y ajoutent chaque année l'inspection de quelques-unes des bibliothèques interuniversitaires parisiennes et des cas particuliers (partages de collections, arrivée d'un nouveau directeur dans une bibliothèque, problèmes de personnel...). A ces "photographies" ponctuelles d'organismes documentaires, l'inspection a proposé d'ajouter l'inspection de services communs de la documentation (SCD) d'universités particulièrement concernées par l'organisation de leur documentation : universités nouvelles et universités auparavant desservies à Paris (Paris 2) ou en région par une bibliothèque interuniversitaire (Lyon, Nancy, Strasbourg, Toulouse...). C'est dans les universités qui ont récemment acquis l'autonomie documentaire que l'on trouve quelques-unes des politiques documentaires les plus actives.

Dans ce domaine, l'IGB a axé son travail sur l'organisation documentaire des bibliothèques universitaires, notamment dans les universités nouvelles, sur les bibliothèques interuniversitaires (BIU) parisiennes, puis sur la constitution des centres d'acquisition et de diffusion de l'information scientifique et technique (CADIST).

M. Denis Pallier a, par conséquent, tenu à préciser que le contrôle des bibliothèques universitaires ne constituait qu'une partie de l'activité de l'IGB, cette dernière en raison de sa reconstitution récente, ne pouvant disposer d'une vision complète fondée sur le contrôle de ce sujet.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître la situation des bibliothèques universitaires, près de dix ans après la parution du rapport Miquel.

Il a rappelé que le rapport Miquel appelait la mise en oeuvre de moyens nouveaux considérables en faveur des bibliothèques universitaires, insistait sur le nécessaire développement des technologies nouvelles en leur sein, et souhaitait l'insertion de ces bibliothèques dans l'université, alors qu'elles n'en constituaient à l'époque qu'un service, souvent simplement juxtaposé.

Il a estimé que les bibliothèques universitaires avaient connu, depuis 1989, un mouvement conforme aux préconisations du rapport Miquel, notamment en matière de crédits documentaires.

Un effort notable a notamment été constaté en faveur des locaux, même si la croissance continue des effectifs d'étudiants a contribué à le relativiser : le rapport Miquel préconisait la construction de 370.000 mètres carrés : 173.000 ont été ouverts, soit 47 % des recommandations.

Une insuffisance en matière de personnels des bibliothèques peut également être encore constatée.

M. Denis Pallier a ensuite souligné que l'usage plus répandu des technologies nouvelles et le développement des banques de données étaient indéniables, la mise en oeuvre de moyens documentaires nouveaux, réalisée par voie contractuelle avec les universités, ayant permis l'établissement de meilleures relations entre les bibliothèques universitaires et les enseignants.

Ces nouveaux moyens techniques se sont aujourd'hui largement banalisés, si bien que 95 % des bibliothèques universitaires ont, en matière d'acquisition et de consultation d'ouvrages, un système informatique moderne qui autorise un élargissement considérable du champ documentaire : l'accès aux documents numérisés notamment permet désormais aux bibliothèques universitaires françaises de rivaliser, en la matière, avec les bibliothèques allemandes ou néerlandaises.

M. Denis Pallier a fait valoir que la construction de nouveaux locaux permettait une mise en valeur des moyens techniques, la conjonction d'une rénovation immobilière et d'une rénovation technique ayant nettement amélioré les conditions de travail des étudiants.

Il a en effet souligné le net changement relatif à l'image des bibliothèques universitaires auprès de leurs utilisateurs, notamment les étudiants, qui les fréquentent davantage que par le passé. Il a ajouté que la forte augmentation des acquisitions expliquait largement ce phénomène, le nombre de titres de périodiques ayant doublé et les acquisitions d'ouvrages, triplé. Il a ainsi souligné que 65 % des étudiants, en 1991, étaient inscrits dans une bibliothèque universitaire, au lieu de 50 % en 1987, les consultations sur place ayant crû de 50 %, le prêt entre bibliothèques de 75 %, passant de 400.000 à 700.000, et les entrées dans les bibliothèques universitaires de 100 %, passant de 20 à 42 millions par an.

M. Denis Pallier a indiqué que la politique documentaire des bibliothèques universitaires avait fait l'objet d'une inspection de l'IGB, en 1980, conjointement à l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale, puis en 1992. L'IGB a ainsi pu tirer plusieurs conclusions de ces études menées à douze ans d'intervalle.

La politique documentaire est désormais définie par l'université, ce qui n'était guère le cas auparavant, même si le plus grand désordre découle nécessairement de l'existence de plus de 3.000 pôles documentaires aux statuts très variés, cette situation étant l'objet d'une double préoccupation liée à l'insuffisance de la mutualisation des moyens et à un éparpillement nuisible au développement des nouvelles technologies. En revanche, en France, les modalités de la politique documentaire sont assez souples, à l'inverse de ce qui existe en Allemagne, puisque les bibliothèques universitaires ont privilégié la coopération, en matière de formation ou d'élaboration de catalogues collectifs par exemple, ainsi que le regroupement, voire l'intégration de bibliothèques d'unités de formation et de recherche (UFR), les bibliothèques d'UFR devant, en effet, être réorganisées afin de pouvoir jouer un rôle plus important dans l'université, notamment eu égard aux besoins des utilisateurs concernés, à l'image de ce qu'a fait l'université Louis Pasteur de Strasbourg.

Il a conclu sur le caractère complexe de la politique documentaire des bibliothèques universitaires en France, un modèle unique étant condamné à l'échec mais une impulsion coordinatrice étant nécessaire.

M. Denis Pallier a ensuite évoqué la question de l'intégration de la bibliothèque universitaire au sein même de l'université. Il a, à ce propos, noté un profond changement par rapport au passé, qui s'explique avant tout par une volonté politique illustrée, par exemple, par la grande implication des responsables universitaires (présidents et secrétaires généraux notamment) dans l'importance accordée aux bibliothèques . Les politiques d'intégration des bibliothèques universitaires les plus actives ont été rencontrées à Lyon et à Strasbourg, mais ce travail d'intégration est assez lourd et nécessite d'importants moyens ; il est cependant voué à l'échec si des objectifs structurants, universitaires et pas seulement bibliothécaires, n'ont pas été définis de manière préalable.

Puis, M. Denis Pallier a abordé des points plus précis.

En matière d'offre de nouveaux supports, il a noté que la mise en place de réseaux de CD-Rom était maintenant effective, mais que la mutualisation de ces outils très coûteux était encore insuffisamment réalisée, alors même que la numérisation croissante des documents rend cette mutualisation indispensable, au regard de la problématique coût/efficacité.

L'inspection a constaté que la mise en place de réseaux de CD-Roms accessibles de tous points de l'université s'accompagnait rarement de politiques de cofinancement SCD/bibliothèques de recherche.

La fourniture par les éditeurs de périodiques électroniques, qui commence en sciences et en médecine, devrait poser le problème à plus grande échelle.

Desservant une communauté, la bibliothèque doit lui garantir un dispositif souple, évolutif, adapté à l'utilisation. L'accès aux périodiques électroniques devra répondre à deux types de besoins. Si un titre n'a qu'un intérêt majeur, elle recherchera un abonnement électronique, garantissant un accès itératif au document pour des utilisateurs multiples. Pour le maintien ensuite du contenu des périodiques, un réservoir local ou régional peut être une meilleure solution que le recours à un serveur national ou international.

L'objectif devrait être de dépenser mieux en achetant une fois chaque source utile et en la rendant accessible à l'ensemble d'une communauté universitaire, dans ses différents sites, sur des infrastructures techniques communes. Au vu des coûts, il est intéressant de constituer un consortium, de réfléchir à un partage de ressources entre plusieurs établissements. L'usage de la documentation électronique peut être recherché à la fois pour les périodiques et pour les manuels, parce qu'il permet de résoudre des problèmes graves : augmentation de la population d'étudiants, dispersion de la population universitaire sur plusieurs campus.

C'est sans doute un des secteurs où le service de documentation devrait être la boîte à outils commune des étudiants et des enseignants-chercheurs.

S'agissant de la question des personnels, il a d'abord fait part de ses observations relatives à l'organigramme et à la répartition des tâches entre les différents services, au sein des bibliothèques universitaires.

La caractéristique des bibliothèques universitaires françaises, dans leur grande majorité, est d'être découpées en sections, correspondant aux anciennes facultés (Lettres, Droit, Sciences, Médecine). C'est un choix qui a été fait lors de la consolidation des bibliothèques universitaires, qui a accompagné l'expansion universitaire des années 1960. L'objectif était de décentraliser la bibliothèque universitaire, dans l'espoir de fédérer les bibliothèques d'instituts et de laboratoires. Chaque section a regroupé rapidement à la fois services intérieurs (acquisitions, catalogage...) et services au public. Par là, les bibliothèques universitaires françaises diffèrent de leurs homologues étrangères, où prévaut un schéma encyclopédique et centralisé, moins coûteux en fonctionnement : une bibliothèque centrale organisée par fonctions techniques (acquisitions, catalogage, service public, conservation) avec quelques annexes spécialisées, à fonction de diffusion.

De ce fait, l'organigramme-type était en France : un directeur, chargé de l'administration, du personnel et des programmes, et des chefs de section, en charge des unités fonctionnelles majeures. Cette situation a été fixée par le décret de 1985, qui a officialisé les chefs de section. Les fonctions de directeur et de chef de section sont la base de la répartition des indemnités.

Depuis quelques années, la situation change, dans le cadre des politiques documentaires d'université qu'ont permis le décret de 1985, la contractualisation et les moyens attribués à la suite du rapport Miquel. Les directeurs ont fréquemment auprès d'eux un conservateur-adjoint ou des chargés de mission, pour piloter la mise en place des nouvelles technologies, l'intégration de bibliothèques ou l'organisation de la formation continue des personnels. Le rôle fédérateur des sections est moins évident que les politiques impulsées par les directeurs et ce service central, toujours réduit mais très actif.

M. Denis Pallier a également relevé que la pyramide des emplois n'était guère adaptée à la situation actuelle et à venir des bibliothèques universitaires. Elle est en effet caractérisée par un encadrement important (24 % de conservateurs, contre 14 % en Allemagne), un encadrement intermédiaire très insuffisant (6 % de bibliothécaires, contre 38 % outre-Rhin) et par la pléthore des personnels de service (46 % contre à peine 6 % en RFA). Or, l'évolution des bibliothèques nécessite un nombre beaucoup plus important de bibliothécaires et bibliothécaires-adjoints, et une reconversion des personnels de service en personnels techniques, afin qu'apparaissent de véritables "techniciens de bibliothèque" comme il existe des techniciens de laboratoire.

En matière de formation continue, celle-ci est assurée, depuis 1992, à trois niveaux :

- au niveau national, des formations ont été proposées par l'Institut de formation des bibliothécaires (IFB) qui devrait fusionner à court terme avec l'Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques (ENSSIB) ;

- au niveau régional, par les centres régionaux de formation aux carrières des bibliothèques, du livre et de la documentation (CFCBLD) ;

- au niveau de l'établissement, par un correspondant formation, dont la tâche est de prendre en considération des éléments pédagogiques comme la réalité de l'ensemble des services.

Abordant la question de la recherche, M. Denis Pallier a rappelé que le rapport Miquel souhaitait favoriser l'accueil documentaire des premiers et deuxièmes cycles dans les bibliothèques.

Il a souligné qu'existaient deux niveaux de service proposables par une bibliothèque universitaire :

les services "de masse" pour les étudiants de premier et deuxième cycles : accueil sur des horaires larges, initiation documentaire, documents acquis en plusieurs exemplaires et mis à disposition en libre accès, catalogues informatisés avec un accès ergonomique, prêt à domicile géré par un système informatique... A ce niveau, l'enjeu actuel est le développement de la formation documentaire des étudiants, enjeu identifié tant par les présidents d'universités que par les directeurs de bibliothèques.

une bibliothèque de recherche, comme la Bibliothèque interuniversitaire de médecine de Paris, où les collections de périodiques sont dominantes, offre d'autres types de service, plus coûteux en personnel, pour un public de spécialistes : conservateurs disponibles pour le renseignement (qu'on intitule service de référence), aide à la recherche documentaire, outils spécifiques (par exemple une base de données dépouillant les congrès médicaux), prêt interbibliothèques...

Toutes les bibliothèques universitaires ne sont pas en mesure d'offrir des services "recherche" aussi développés. Elle constituent cependant ensemble une véritable infrastructure de la recherche française. Au niveau local, elles offrent les principaux outils techniques : catalogues automatisés, réseaux de cédéroms, accès aux bases de données et internet. Respectant les normes internationales de traitement des documents, ce sont elles qui ont constitué les principaux catalogues collectifs nationaux de périodiques et de monographies. Elles gèrent l'essentiel des collections universitaires accessibles. L'accès à distance au document en France repose pour moitié sur le réseau des BU et pour moitié sur l'INIST.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur la bibliothèque de l'université nouvelle de Cergy-Pontoise, eu égard notamment à la construction très controversée d'une bibliothèque centrale.

M. Denis Pallier a jugé très satisfaisant le fonctionnement de cette bibliothèque, qui connaît un taux de fréquentation assez élevé pour une université nouvelle.

M. Jean-Philippe Lachenaud a émis l'idée de réserver, dans le cadre du tutorat mis en place par la réforme dite Bayrou des universités, un certain nombre de tuteurs affectés aux bibliothèques universitaires.

Il a ensuite voulu savoir s'il existait des normes en matière de bibliothèques universitaires.

M. Denis Pallier a considéré qu'il était difficile de parler de normes en France, mais qu'il existait en revanche des objectifs qui étaient déterminés de manière souple et évolutive, afin de tenir compte de phénomènes nouveaux, comme l'introduction des technologies nouvelles.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est demandé si l'Allemagne ne constituait pas, s'agissant des bibliothèques universitaires, une référence en Europe et quelles en étaient les raisons.

M. Denis Pallier a expliqué que le modèle allemand avait été suivi lorsqu'on été créées en France les bibliothèques universitaires centrales, entre 1873 et 1886. Cette création était un des moyens par lesquels le gouvernement préparait la réforme de l'enseignement supérieur. Elle a précédé la création des universités par réunion des facultés (1896).

La référence aux bibliothèques allemandes depuis les années 1970-1980 a eu au moins deux motifs. D'une part, les populations étudiantes étaient comparables en Allemagne et en France. Mais il était visible que le volume des moyens documentaires (acquisitions, personnel, mètres carrés) disponibles en Allemagne, ainsi que le volume des services fournis par les bibliothèques allemandes, étaient bien supérieurs. D'autre part, les universités allemandes, confrontées à un éparpillement documentaire analogue à celui des universités françaises, avaient préconisé et appliqué assez tôt des solutions viables (recommandations de 1964 et 1970). Elles affirmaient l'autorité de l'université sur ses bibliothèques, préconisaient la centralisation des services techniques et la déconcentration des lieux de distribution, modèle repris par les Pays-Bas.

M. Denis Pallier a conclu en regrettant que, contrairement à la situation allemande, les bibliothèques universitaires françaises n'étaient pas considérées comme un outil d'une politique globale de recherche et qu'elles n'étaient réservées qu'aux seuls universitaires, le nombre d'utilisateurs extérieurs étant extrêmement faible (6 à 7 %).

M. Bruno VAN DOOREN,
Président de l'association des directeurs de bibliothèques universitaires et
Mme Arlette PAILLEY-KATZ, Vice-présidente
- Jeudi 19 mars 1998 -

M. Bruno Van Dooren a, dans un premier temps, présenté l'association des directeurs de bibliothèques universitaires (ADBU), rappelant qu'elle regroupait les directeurs mais également les chefs de service responsables de sections documentaires, au sein des bibliothèques universitaires, soit environ 170 membres, sur les 800 que compte le corps des conservateurs de bibliothèques.

Il a exposé la position de l'ADBU sur la situation des bibliothèques universitaires françaises, qui peut être résumée en deux points :

d'une part, cette situation s'est, depuis le rapport Miquel, nettement améliorée, même si elle reste fragile : l'informatisation des bibliothèques universitaires, notamment, a beaucoup progressé ;

d'autre part, le discours récurrent sur "la misère des bibliothèques universitaires" a certes été mobilisateur mais il constitue aujourd'hui un handicap, l'image de bibliothèques dépourvues de tout moyen continuant à être propagée, par la presse notamment : la réalité est actuellement beaucoup plus nuancée eu égard aux fortes disparités existant dans ce domaine.

M. Jean-Philippe Lachenaud a expliqué que la mission qu'il avait entreprise avait justement pour ambition d'exposer la situation des bibliothèques universitaires.

M. Bruno Van Dooren a affirmé que la rhétorique de la pénurie nuisait considérablement au monde universitaire français dans son ensemble. Il a reconnu que les comparaisons avec l'étranger étaient fréquentes, mais a estimé qu'elles n'étaient pas nécessairement pertinentes, en raison des divergences pouvant exister dans les modalités de financement des bibliothèques. Ainsi, en France, les moyens des bibliothèques universitaires sont des moyens de l'Etat, l'université elle-même, malgré l'augmentation de la part des ressources propres dans le budget global, n'y ajoutant rien. En outre, les bibliothèques universitaires ne constituent pas suffisamment un enjeu des négociations contractuelles menées entre l'université et l'Etat, ce qui ne contribue guère à mobiliser les universitaires sur l'attribution de moyens aux bibliothèques. Enfin, de manière à éviter la dispersion documentaire (il existe par exemple plus de 50 bibliothèques de statuts divers à l'université Paris IV) et à encourager la mutualisation des moyens, l'autonomie des universités devrait permettre la mise en oeuvre et la poursuite de remembrements documentaires.

M. Bruno Van Dooren a expliqué que l'ADBU s'était penchée sur le plan Université pour le troisième millénaire (U3m), afin de ne pas renouveler l'erreur du plan Université 2000, qui n'avait accordé qu'une importance toute relative aux locaux de bibliothèques universitaires, ces dernières ayant trop fait l'objet de micro-opérations. L'ADBU rassemble les demandes des directeurs des bibliothèques universitaires parisiennes, pourvu qu'elle soient réalistes, puis les transmet à la sous-direction des bibliothèques et à la direction de la programmation du ministère de l'Education nationale.

M. Jean-Philippe Lachenaud a voulu savoir si le calendrier du plan U3m était déjà connu, et si son coût était évalué .

M. Bruno Van Dooren a expliqué que, selon ses propres informations, les premières échéances de ce programme devraient être connues au mois de juin.

Mme Arlette Pailley-Katz a reconnu que son coût, s'il n'était pas encore déterminé, serait probablement élevé, eu égard au déficit de locaux constaté, et évalué par le rapport Fauroux à 900.000 mètres carrés en France, dont 250.000 en Ile de France.

M. Bruno Van Dooren a, ensuite, fait part des inquiétudes de l'ADBU quant à la place qu'occuperaient les bibliothèques universitaires dans le plan U3m ; elles sont au nombre de trois :

le volet sécurité des locaux, s'il est important, doit être accompagné d'un volet fonctionnel, sans lequel les rénovations réalisées seraient inutiles pour les étudiants comme pour les enseignants-chercheurs ;

le souhait, parfois exprimé, de distinguer bibliothèques universitaires pour les premiers et deuxièmes cycles, d'une part, et bibliothèques pour la recherche, d'autre part, est illusoire : en effet, si la méthodologie documentaire est différente, les réseaux et les matériels informatiques, en revanche, sont les mêmes ; en outre, la thèse de la spécificité de la recherche n'est probablement qu'un prétexte utilisé par certains centres et destiné à leur permettre d'acquérir une documentation propre, sans avoir le souci ni les capacités de l'identifier, de la conserver, et de la diffuser alors que le rôle de la bibliothèque universitaire est exactement inverse : elle est au service de l'ensemble de la communauté universitaire, même si l'absence de politique documentaire des universités françaises, à la différence des universités américaines, britanniques ou allemandes, est patente ; enfin, le concept de bibliothèques de premier cycle est une facilité de l'esprit censée, à tort, régler le problème de l'accueil des nouveaux étudiants, mais qui ne leur offre ni un lieu calme propice aux études, ni l'opportunité de se former à la méthodologie documentaire, notamment l'aptitude à trouver rapidement une information ;

le risque de dispersion documentaire est grand, surtout à l'heure des technologies nouvelles : la priorité doit être donnée à la réalisation, non de bureaux personnalisés, mais de bureaux polyvalents et banalisés.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les besoins en matière de personnels des bibliothèques.

M. Bruno Van Dooren a répondu que les effectifs étaient très insuffisants, estimant qu'ils étaient, en valeur relative, deux fois et demi moindres qu'en Allemagne.

Mme Arlette Pailley-Katz a expliqué que le resserrement des effectifs de catégorie B avait des conséquences très dommageables sur le fonctionnement des établissements, les tâches techniques accaparant les personnels de catégorie A, au détriment de leurs tâches de gestion et d'encadrement.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur une éventuelle modification des textes relatifs aux services communs de documentation.

M. Bruno Van Dooren a rappelé que les services communs de documentation étaient régis par un décret du 4 juillet 1985 modifié en 1991, et qu'il n'était pas complètement appliqué par toutes les universités, certaines bibliothèques n'étant parfois ni "associées" ni "intégrées" selon les termes du décret. Cependant, cette question ne constitue pas une priorité pour l'ADBU, des projets ayant été accomplis dans le sens d'une fédération des moyens par les SCD et les services inter-établissements de coopération documentaire (SICD). Les textes sont un bon outil pour engager et faciliter la coopération.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les modalités de gestion du corps des conservateurs de bibliothèques.

M. Bruno Van Dooren a précisé que le corps des conservateurs, qui est un corps interministériel, était numériquement peu important et qu'il était géré au niveau national, cette situation étant tout à fait convenable, même si la mobilité gagnait à être accrue et la notion de profil d'emploi développée.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur la façon dont les bibliothèques universitaires s'adaptaient aux nouvelles technologies.

M. Bruno Van Dooren a estimé que les bibliothèques géraient convenablement l'évolution des technologies, dix bibliothèques universitaires donnant désormais un accès immédiat à leurs catalogues sur Internet ; le réseau SIBIL sera également bientôt accessible sur le Web. Le projet de catalogue collectif des bibliothèques de l'enseignement supérieur (SUD) doit être réalisé prioritairement.

Puis, il a apporté deux précisions relatives aux documents électroniques :

- les documents en tant que tels sont constitués de revues sur CD-Rom ou sont disponibles en lignes ;

- les catalogues permettent d'identifier les documents, la rétroconversion permettant de les présenter sous forme électronique et non plus seulement sur papier.

M. Bruno Van Dooren a insisté sur la nécessaire production d'outils de formation et d'auto-formation, indispensables pour se retrouver dans le labyrinthe qu'est Internet, beaucoup de ses utilisateurs ne trouvant pas l'information recherchée ou croyant l'avoir trouvée sans qu'elle ait été contrôlée : le rôle de la bibliothèque universitaire est alors de sélectionner les bons sites, c'est-à-dire de construire l'information, fournie sous forme brute.

Mme Arlette Pailley-Katz a ajouté que la formation de l'esprit critique visait à ne pas se laisser illusionner par la pléthore d'informations.

M. Jean-Philippe Lachenaud a relevé que l'adaptation aux technologies nouvelles nécessitait des investissements, notamment en matériels, très importants, et a exprimé sa crainte, dès lors, de voir les budgets exploser.

M. Bruno Van Dooren a reconnu que ce coût serait effectivement élevé, mais a fait part de sa certitude du caractère indispensable de ces investissements, même s'il faut évidemment les réaliser de manière rationnelle : c'est pourquoi l'ADBU milite pour la mutualisation des moyens par la création de "centres de ressources" ou de "consortiums d'utilisateurs" par exemple.

M. Bruno Van Dooren a noté que, en matière d'acquisitions, l'effort avait été considérable, les bibliothèques universitaires ayant acquis 840.000 volumes en 1996, au lieu de 350.000 en 1988, et 100.000 abonnements contre 65.000, même si les coûts des abonnements, notamment scientifiques et médicaux, en provenance des Etats-Unis, fluctuaient à la hausse.

Mme Arlette Pailley-Katz a ajouté que l'augmentation de plus de 50 %, sur deux ans, du coût des abonnements médicaux mettait en péril la continuité de certains abonnements.

M. Jean-Philippe Lachenaud a demandé où en était l'ouverture des bibliothèques universitaires.

M. Bruno Van Dooren a estimé que les bibliothèques universitaires devaient, en priorité, se consacrer à leurs missions de service public universitaire, mais que leur ouverture dépendait avant tout des relations qu'elles sauraient entretenir avec les collectivités territoriales, les élus locaux étant, selon lui, les plus à même de sensibiliser les présidents d'université sur la nécessité de valoriser le patrimoine documentaire.

Mme Arlette Pailley-Katz a ajouté que d'importantes réalisations pouvaient être citées en matière de mise en réseau de bibliothèques universitaires et de bibliothèques municipales, comme à Saint-Etienne ou à Valence.

M. Bruno Van Dooren, abordant des questions de droit, a regretté le poids de multiples droits imposés aux bibliothèques par le syndicat national de l'édition.

Il a précisé que l'ADBU conduisait des négociations visant à parvenir à l'élaboration d'un tarif forfaitaire minimal, et qu'elle estimait que, dans le projet de directive européenne sur la société de l'information, les bibliothèques étaient insuffisamment exemptées de droits d'auteurs. Il a ajouté que la négociation était conduite par le ministère de la culture, qui prenait donc davantage en considération les intérêts des éditeurs que ceux des bibliothécaires ; c'est pourquoi l'ADBU propose, aux côtés des associations de bibliothécaires français et européens, un certain nombre d'amendements au projet de directive.

M. Bruno Van Dooren a conclu en faisant part de trois remarques de l'ADBU :

- une éventuelle loi sur les bibliothèques, dont il est question de manière récurrente, devrait insister sur le caractère professionnel du métier de bibliothécaire et favoriser l'accès des bibliothèques à l'information ;

- le rôle de l'Inspection générale des bibliothèques est considérable, mais son statut manque de clarté juridique ;

- des emplois-jeunes devraient être créés dans les bibliothèques universitaires, essentiellement sur des métiers techniques de développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

M. Jean-Claude GROSHENS,
Président du Conseil supérieur des bibliothèques et
M. Dominique AROT, Secrétaire général
- Lundi 6 avril 1998 -

M. Jean-Claude Groshens a, dans un premier temps, expliqué que le Conseil supérieur des bibliothèques (CSB) avait été créé dans des conditions particulières, à savoir la nécessité de mettre en place un organisme à vocation générale destiné à clarifier une situation particulière liée à la Bibliothèque nationale de France.

La vocation du CSB est extrêmement générale, il est avec l'Inspection générale des bibliothèques, le seul organisme à avoir une vue générale sur l'ensemble des bibliothèques françaises. Il note que de ces deux organismes, l'un n'a pas de statut (l'Inspection générale) et l'autre n'a pas de budget (le CSB).

M. Jean-Claude Groshens a ensuite noté que le CSB s'intéressait à la politique documentaire au sens large. Il a ainsi consacré une partie de ses travaux à la contribution des bibliothèques à l'entrée dans la société de l'information, abordant les thèmes, notamment, de la formation des usagers, de leur accès à l'information et de la validation de l'information.

M. Jean-Claude Groshens a rappelé que les bibliothèques étaient les institutions culturelles les plus décentralisées et qu'elles relevaient de statuts d'une extrême diversité. A l'intérieur d'une même structure, elles peuvent être très diversifiées. Les bibliothèques universitaires sont ainsi plus ou moins éclatées selon les universités entre les composantes de l'établissement selon l'attention que leur portent les présidents d'université.

Les bibliothèques dont le caractère de service interuniversitaire était affirmé, ne suscitaient guère l'intérêt des présidents d'université. Ces derniers ont récemment pris conscience de ce que les bibliothèques universitaires constituaient un élément fondamental de la politique propre à chaque université, et notamment de sa politique scientifique.

M. Jean-Claude Groshens a expliqué que ce regain d'intérêt pour les bibliothèques universitaires avait été fortement encouragé par l'administration centrale de l'Education nationale, les crédits consacrés aux bibliothèques, qu'ils soient fléchés ou proprement universitaires, ayant crû de manière conséquente.

Il a aussi souligné l'enjeu que constituent les bibliothèques dans les négociations existant entre les présidents d'université et leurs composantes.

M. Jean-Claude Groshens a également noté que parallèlement les corps de bibliothécaires avaient eux-mêmes parfaitement compris l'évolution de leur métier en termes d'accès à la documentation et de formation aux supports électroniques.

Enfin, il a conclu sa présentation générale en indiquant que la politique en faveur des bibliothèques universitaires avait été volontariste et s'était traduite par des résultats substantiels, même si les bibliothèques universitaires parisiennes se trouvent dans une situation de " carence absolue " accentuée par le fait que le nombre d'étudiants en région parisienne, contrairement à la tendance nationale, ne paraît pas diminuer.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les méthodes de travail du CSB.

M. Jean-Claude Groshens a rappelé que le CSB tenait trois sessions dans l'année. En 1997, la première a été consacrée à un état des lieux, la deuxième à des questions d'ordre institutionnel , la troisième prenant la forme d'un débat animé par M. Jacques Lesourne sur l'entrée dans la société de l'information et la place que les bibliothèques avaient à y tenir.

M. Jean-Claude Groshens a ensuite abordé la question des personnels des bibliothèques.

Il a relevé que le métier de bibliothécaire avait radicalement changé dans les universités comme dans les autres bibliothèques, le contenu des tâches s'étant diversifié puisque, outre les tâches purement techniques, la formation à la documentation mais aussi le choix des collections relèvent de leurs compétences.

Il a cependant regretté que, dans le même temps, les bibliothécaires aient été appelés à consacrer une part croissante de leur temps à des activités de gestion, ce qui contribue à banaliser leurs fonctions, à tel point qu'ils sont parfois remplacés par des attachés qui n'ont pas reçu de formation idoine. Il a ainsi conclu à la nécessité de réaffirmer la spécificité des bibliothécaires, afin d'assurer leur légitimité professionnelle.

M. Jean-Philippe Lachenaud a demandé si un projet de loi relatif aux bibliothèques était en préparation.

M. Jean-Claude Groshens a rappelé qu'il s'agissait d'une question récurrente mais posant de très nombreux problèmes, en termes de financement notamment, qui échappent à la compétence du CSB. Celui-ci n'a pour l'instant été saisi d'aucune demande d'avis émanant de l'une ou l'autre des administrations concernées.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité savoir si la centralisation de la politique documentaire était souhaitable.

M. Jean-Claude Groshens a expliqué que, selon lui, la création de réseaux d'information, internes comme externes à l'université, constituait la seule voie permettant de répondre à la question. Encore faut-il une cohérence méthodologique entre les uns et les autres.

M. Dominique Arot a relevé la forte augmentation du coût de la documentation, en raison, d'une part, de la hausse importante du prix des abonnements et, d'autre part, du coût de l'information électronique, plus élevé que celui des livres à cause du problème des contrats de licence.

Il a rappelé que les budgets des bibliothèques universitaires françaises ne soutenaient pas les comparaisons internationales, malgré une augmentation substantielle des moyens. Ainsi, entre la France et l'Allemagne, le rapport est de un à trois. Aux Etats-Unis, le budget de l'université de Yale consacré aux acquisitions est de 60 millions de francs par an, celui de Harvard étant de 104 millions : il s'élève à 350 millions de francs par an pour l'ensemble des universités françaises.

M. Dominique Arot a rappelé que l'informatisation des bibliothèques universitaires reposerait désormais sur le système universitaire de documentation (SU), actuellement en cours de réalisation.

L'ancien système, que SU doit remplacer, comportait trois applications informatiques nationales : Pancatalogue, Téléthèses (répertoire des thèses) et CCN-PS (publications en série).

Le prestataire retenu, après procédure d'appel d'offres, pour mettre en oeuvre SU est une société néerlandaise : PICA. La création de l'Agence bibliographique de l'enseignement supérieur (ABES) doit permettre la réalisation technique de SU.

M. Jean-Philippe Lachenaud a alors rappelé que les CD-Rom et l'accès à Internet constitueront les principaux outils d'informatisation de la documentation des bibliothèques universitaires.

M. Dominique Arot a ajouté que les réseaux Intranet propres à chaque université se développaient, mais qu'une telle politique ne pouvait porter ses fruits qu'en formant les étudiants à la recherche documentaire informatisée. Il a cité l'exemple de l'université Lille III qui a mis en place un projet de formation de 2.000 étudiants.

A ce propos, M. Jean-Claude Groshens a souligné l'insuffisante analyse méthodologique présidant à la conception et à la formation des métiers de la documentation.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître l'avis du CSB sur les bibliothèques de premier cycle, rappelant que le débat opposait deux conceptions, celle d'une bibliothèque universitaire simplifiée ou celle d'une bibliothèque abordant la formation à la recherche dès l'entrée à l'université.

M. Dominique Arot a reconnu que ce débat recoupait en fait les clivages disciplinaires, puis a estimé que les bibliothèques de premier cycle n'étaient pas souhaitables, ne donnant de toute façon guère de satisfaction.

M. Jean-Claude Groshens a, quant à lui, affirmé que la "primarisation" des bibliothèques était une erreur et constituait une facilité à laquelle il ne fallait pas céder.

M. Jean-Philippe Lachenaud a voulu savoir si les emplois des différentes catégories de personnels des bibliothèques inscrits au budget 1997 avaient tous été réellement pourvus ou si un écart était apparu entre la prévision budgétaire et la réalité des recrutements.

M. Dominique Arot a affirmé que, selon les informations qu'il détenait, tous les emplois budgétaires avaient été pourvus. Il a ajouté que 350 créations d'emplois avaient été prévues dans le budget pour 1998, la majorité d'entre elles devant toutefois intervenir à la rentrée universitaire 1998.

Il a également rappelé qu'un concours de bibliothécaire-adjoint devait être organisé cette année.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur la structure des emplois.

M. Dominique Arot a tenu à relativiser l'affirmation selon laquelle la structure des emplois de bibliothèques était inadaptée, rappelant que la forte évolution du métier de bibliothécaire nécessitait désormais des compétences relativement pointues, en informatique notamment.

Il a toutefois estimé que le cadre statutaire était très rigide, ce qui ne facilitait guère la résolution de problèmes comme la surqualification qui affecte surtout les personnels de catégorie B.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur la nécessité, pour les universités, de contribuer de manière plus importante au budget des bibliothèques universitaires.

M. Jean-Claude Groshens a noté que cette question devait normalement entrer dans le cadre de la politique de contractualisation entre l'Etat et les universités.

C'est par ce biais que la puissance publique peut conserver le moyen d'orienter les crédits universitaires vers les bibliothèques.

M.  Claude JOLLY,
Sous-directeur des bibliothèques et de la documentation
au ministère de l'Education nationale, de la recherche
et de la technologie
- Mardi 7 avril 1998 -

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître la direction du ministère qui exerçait la tutelle des bibliothèques universitaires.

M. Claude Jolly a expliqué que les bibliothèques relevaient de la direction des enseignements supérieurs, et cela dès avant la réforme de l'administration centrale réalisée en décembre 1997, mais il a ajouté que les changements de structures étaient très fréquents, trois étant intervenus sur une période de quatre années et quatre directeurs s'étant succédés.

Il a rappelé que la direction de l'information scientifique, des technologies nouvelles et des bibliothèques (DISTNB), qui exerçait précédemment la tutelle des bibliothèques universitaires avait accompli un travail substantiel grâce à des crédits budgétaires en hausse de 75 millions de francs en mesures nouvelles et à la création de 550 emplois, sur une période de deux ans.

M. Jean-Philippe Lachenaud a relevé que le double mouvement affectant l'université depuis plusieurs années -autonomisation et contractualisation- impliquait l'établissement de relations de confiance entre les présidents d'université et l'administration centrale.

M. Claude Jolly a noté que, à cet égard, l'évolution depuis dix ans avait été très positive : les présidents d'université ayant compris qu'un service commun de documentation (SCD) contribuait également à affirmer le pouvoir présidentiel, leur implication dans la prise en charge de la politique documentaire n'a cessé de s'accroître. Il a toutefois nuancé son propos en ce qui concerne les universités de Paris intra-muros, où les présidents sont moins attachés à promouvoir les bibliothèques universitaires, moins encore les bibliothèques inter-universitaires.

M. Claude Jolly a rappelé que la documentation à l'université était répartie de manière encore largement duale, 60 % de la documentation se trouvant dans les SCD et 40 % étant éparpillés dans les bibliothèques des différentes unités. A cet égard, il a mentionné que le comportement des présidents était variable, certains d'entre eux promouvant la rationalisation, d'autres estimant au contraire que les bibliothèques d'UFR présentaient des avantages en termes de proximité.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur la possibilité de combiner la procédure de la contractualisation et le fléchage des crédits.

M. Claude Jolly a expliqué que Mme Francine Demichel, directeur des enseignements supérieurs au ministère, était favorable au fléchage des crédits en faveur des bibliothèques universitaires, ajoutant que cette position était justifiée au regard du retard des bibliothèques. Il a, en effet, estimé que le fléchage des crédits présentait surtout un avantage protecteur, dont l'intérêt est essentiel en période de rattrapage et de modernisation accélérée suscitée par les nouvelles technologies, mais qui pouvait comporter des risques de rigidité une fois le rattrapage terminé.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître l'état du programme Université du troisième millénaire (U3m) relatif aux investissements en locaux dans la région parisienne, et le type de relations que la sous-direction des bibliothèques entretenait avec la direction de la programmation et du développement (DPD).

M. Claude Jolly a expliqué que la sous-direction était chargée de dresser l'inventaire des besoins et de présenter un état des lieux à la DPD à la fin du mois d'avril. Il a ajouté que les besoins en investissements immobiliers des universités, qu'il s'agisse de constructions nouvelles mais surtout de rénovations,étaient de l'ordre de plusieurs dizaines de milliards de francs, sept milliards étant consacrés aux bibliothèques sur l'ensemble de la France. Compte tenu de l'importance considérable de ces estimations, la DPD devra opérer des arbitrages qui sont attendus pour la fin du mois de juin.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur la pertinence de la méthodologie à laquelle ont recours les présidents d'université pour adapter leurs locaux à une politique documentaire cohérente.

M. Claude Jolly a noté que, après la fin du programme Université 2000, le ministère et la communauté universitaire avaient affiché leur volonté d'élaborer un projet global dont la priorité serait, cette fois-ci, axée sur les universités parisiennes, qui avaient été "oubliées" par Université 2000.

S'agissant des bibliothèques universitaires à Paris, M. Claude Jolly a évoqué leur situation paradoxale : la documentation universitaire y est en effet très développée mais les conditions de service aux usagers sont médiocres, alors que la situation en province est bien souvent inverse. Les locaux des bibliothèques parisiennes sont mal conçus et le manque de places est flagrant : la norme idéale serait de une place assise pour cinq étudiants inscrits mais, si la moyenne nationale est de une place pour quinze inscrits, ce ratio s'élève à une place pour trente quatre inscrits à Paris dans les BIU.

M. Claude Jolly a rappelé qu'il existait neuf bibliothèques inter-universitaires à Paris, mais que celles dont on parlait le plus souvent en termes de projets immobiliers, c'est-à-dire la BIU d'Art et d'Archéologie et celle de documentation internationale, étaient également celles qui comptaient le moins d'inscrits.

Il a ajouté que le programme U3m devrait prendre en considération le problème de Jussieu ainsi que celui de la zone d'aménagement concerté (ZAC) de Tolbiac. A cet égard, il a considéré que le problème général de la sécurité dans les établissements d'enseignement supérieur allait probablement constituer la priorité du programme U3m, au risque toutefois de négliger les investissements en direction des bibliothèques universitaires.

M. Jean-Philippe Lachenaud a rappelé que la gestion des postes d'enseignants n'avait pas toujours été optimale, certains postes n'ayant pas été pourvus. Il a donc souhaité savoir ce qu'il en était pour les personnels des bibliothèques.

M. Claude Jolly a affirmé que les postes de bibliothécaires avaient tous été pourvus en 1996 et 1997 et qu'ils le seraient de la même manière en 1998, même si leur gestion était rendue difficile par l'existence de huit corps distincts pour seulement 5.000 agents.

Il a expliqué que le principal problème en matière d'effectifs concernait la structure des emplois, qui se présente en sablier, c'est-à-dire qu'il existe un déficit de personnels de catégorie B, même si le tiers des créations d'emplois en 1998 concernait cette catégorie. Il a ajouté que des conflits sociaux étant apparus au sein de la catégorie B, un deuxième corps de catégorie A, celui des bibliothécaires, avait été créé.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est interrogé sur le niveau des crédits consacrés aux acquisitions documentaires, et s'est demandé si l'inflation des coûts constatée signifiait la poursuite des efforts ou si elle devait être relativisée eu égard aux économies d'échelle que ne manquerait pas d'engendrer la mise en réseau.

M. Claude Jolly a expliqué que le coût des périodiques, notamment étrangers, augmentait plus vite que celui des ouvrages, même si la problématique variait en fonction des disciplines, les sciences et la médecine voyant leur coût croître de manière considérable.

Il a ajouté que les crédits d'acquisition étaient passés de 85 millions de francs en 1987 à 500 millions de francs en 1997, mais que cet effort n'avait pas empêché l'apparition, depuis dix-huit mois de "premiers signaux d'alerte" qui se manifestent, par exemple, par l'arrêt de certains abonnements.

Abordant le sujet des nouvelles technologies, M. Claude Jolly a fait observer que les supports se cumulaient plus qu'ils ne se substituaient les uns aux autres ; ainsi l'abonnement électronique vient souvent compléter l'abonnement classique à une revue. Il a également noté que, en matière de ressources électroniques, un dialogue s'était engagé avec les producteurs de données, mais que l'absence de points de référence, notamment en matière de tarification, ne contribuait guère à clarifier les négociations.

M. Jean-Philippe Lachenaud a voulu savoir si ces phénomènes étaient susceptibles d'engendrer une explosion des budgets.

M. Claude Jolly a affirmé que la tendance était effectivement à la hausse des crédits documentaires, cette augmentation étant favorisée par le développement des nouvelles technologies dans les bibliothèques universitaires. A cet égard, les deux derniers budgets, grâce à des mesures nouvelles à hauteur de 75 millions de francs sur deux années, ont permis de faire face à cette tendance.

Abordant la question des droits d'auteur, M. Jean-Philippe Lachenaud a jugé "peu pertinente" la conduite simultanée de négociations par le ministère de la Culture et celui de l'Education nationale. Il a souhaité connaître l'état de la réflexion menée sur la manière d'honorer les droits d'auteur, le ministère ayant proposé le paiement par chaque étudiant d'un forfait. Il a rappelé que, si cette solution était conforme à la réglementation relative aux droits d'auteur, elle comportait également le risque d'entraîner une augmentation des droits d'inscription à l'université.

M. Claude Jolly a souligné que le problème des droits de copie se posait moins dans les bibliothèques que dans les services de reprographie des universités. Il a rappelé que beaucoup de bibliothèques concédaient leurs photocopieurs à des sociétés ad hoc qui doivent se mettre en conformité avec la loi : les bibliothèques universitaires ne se trouvent donc pas au centre du débat.

M. Claude Jolly a évoqué les trois voies qui pouvaient être explorées sur le thème des droits de copie. La première consiste à gagner du temps. La deuxième consiste à inclure les droits de copie dans les droits de numérisation, comme l'a proposé M. Alain Etchegoyen, conseiller du ministre, dans une interview. La troisième voie passe par l'établissement d'un dialogue entre la conférence des présidents d'université et le centre français de copie, le président de l'université de Limoges ayant été chargé de suivre ce dossier pour le compte de la CPU.

M. Claude Jolly a estimé qu'un forfait de dix francs pouvait constituer une bonne base de négociation. Il a cependant exprimé sa crainte d'entrer dans un cycle de négociations sans fin.

M.  Bernard SAINT-GIRONS,
Premier vice-président
de la Conférence des présidents d'université,
et M. Bernard RAOULT, troisième vice-président
- Mercredi 6 mai 1998 -

M. Bernard Saint-Girons a tout d'abord rappelé que les bibliothèques universitaires constituaient un élément indissociable du service public de l'enseignement supérieur, de par leur participation à son action de formation et de recherche.

Il a estimé que depuis le rapport Miquel en 1989, le contexte avait beaucoup évolué, la dimension documentaire ayant constitué un élément majeur des interventions en direction des étudiants comme des chercheurs. Il a ajouté que cette dimension nouvelle avait considérablement contribué à faire prendre conscience aux présidents d'université de l'importance des bibliothèques, et que la mutualisation des moyens documentaires constituait désormais l'enjeu du développement interuniversitaire.

M. Bernard Saint-Girons a expliqué que la fonction documentaire était affectée par la dimension et l'apport des nouvelles technologies, la mise en réseau étant un investissement lourd et constituant une lutte permanente contre l'obsolescence.

Il a rappelé que la documentation avait été traitée de manière contractuelle, les ressources affectées aux bibliothèques universitaires l'étant dans le cadre du contrat d'université.

M. Bernard Saint-Girons a insisté sur le rôle fondamental qu'a joué M. Bernard Dizambourg qui, lorsqu'il était directeur de l'information scientifique, des technologies nouvelles et des bibliothèques au ministère, a été l'un des artisans du rattrapage et de la modernisation des bibliothèques universitaires. La création de 350 emplois de personnels des bibliothèques dans le budget pour 1998 est la manifestation de cette politique qui a permis de reconnaître le retard des bibliothèques universitaires ainsi que la fonction de la ressource documentaire.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité obtenir des informations relatives au programme Université pour le troisième millénaire (U3m) et à l'évaluation de son coût.

M. Bernard Saint-Girons a expliqué que M. Garnier, directeur de la programmation et du développement au ministère, avait présenté les grandes lignes du programme U3m devant la Conférence des présidents d'université (CPU). Ce programme comporte deux grandes priorités : d'une part, l'accent sera mis sur la rénovation des bâtiments universitaires en région Ile-de-France et, d'autre part, la dimension documentaire sera favorisée, les bibliothèques devant faire l'objet d'une mise à niveau en termes de superficie comme de modernisation.

M. Bernard Saint-Girons a estimé que la fonction documentaire à l'université devait relever trois défis :

- celui de la suffisance des capacités d'accueil ;

- celui de l'articulation des modalités de fonctionnement traditionnelles et des nouvelles technologies, ces dernières suscitant une curiosité pour le document plus grande qu'autrefois ;

- celui du temps d'ouverture.

A cet égard, M. Bernard Saint-Girons a noté que le taux de fréquentation des bibliothèques universitaires dépendait aussi des volumes horaires, et que ce taux augmentait si les établissements organisaient un tutorat documentaire. Il a ajouté que le tutorat donnait ses meilleurs résultats lorsqu'il était appliqué dans les bibliothèques.

Il a également insisté sur le fait qu'une formation documentaire précoce était la meilleure manière de sensibiliser les étudiants à la bonne utilisation des bibliothèques universitaires, les conservateurs devant être étroitement associés à cette pédagogie documentaire afin que la maîtrise des techniques soit apportée autant par les professionnels des bibliothèques que par les enseignants-chercheurs.

M. Bernard Raoult a, quant à lui, constaté que le déficit en locaux était flagrant, relevant que la quantité de documents en Ile-de-France était considérable -puisqu'elle est estimée à 50 % de la richesse documentaire nationale- alors que le nombre de places dans les bibliothèques universitaires était dérisoire, la superficie par étudiant étant comprise entre 0,1 et 0,3 mètre carré pour une moyenne européenne de 2 à 3 mètres carrés par étudiant.

Il a ajouté que l'effort de construction, qu'il s'exprime de manière quantitative ou qualitative, avait été substantiel, alors même qu'une bibliothèque universitaire comporte des exigences architecturales particulières du fait des fonctions et des missions qui sont les siennes.

M. Bernard Raoult a également estimé que l'apparition des nouvelles technologies nécessitait une réflexion sur l'évolution du contenu des emplois dans les bibliothèques, et donc sur la réforme de la formation qui leur est dispensée. Il a noté que les personnels des bibliothèques et les enseignants-chercheurs avaient compris l'intérêt d'un travail en commun, l'amélioration du fonctionnement des bibliothèques universitaires passant par le dialogue entre ces deux catégories de personnels.

M. Bernard Saint-Girons a relevé que l'apparition d'une nouvelle catégorie d'enseignants -les professeurs certifiés en documentation- présentait un double intérêt : d'une part, elle favorise l'établissement d'une passerelle entre la fonction pédagogique et la fonction documentaire et, d'autre part, elle accrédite la thèse selon laquelle les techniques de documentation s'apprennent et peuvent être utilisées de manière rationnelle.

M. Bernard Raoult a ajouté que ces professeurs certifiés avaient acquis leur statut bien davantage par la pratique sur le terrain que par des textes réglementaires.

M. Jean-Philipe Lachenaud a souhaité connaître la position de la CPU sur la question de la numérisation.

M. Bernard Raoult a estimé que le problème posé par la numérisation était celui de son degré de développement, la numérisation permettant une multiplication à l'infini de l'information alors même que la pléthore d'information constitue un handicap à sa bonne analyse. C'est pourquoi la tendance actuelle consiste à ne numériser que les catalogues et les documents résumés.

M. Bernard Saint-Girons a, quant à lui, noté que la bibliothèque avait également une dimension patrimoniale, une de ses missions étant de conserver les documents et informations qui peuvent apporter une aide à la connaissance mais qui ne peuvent être numérisés. La bibliothèque universitaire n'a pas seulement une fonction utilitaire et technologique, elle est également un lieu de mémoire et de culture.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître la position des présidents d'université sur les relations que les universités entretiennent avec l'administration centrale.

M. Bernard Saint-Girons a expliqué que la programmation devait être poursuivie et qu'elle devait également bénéficier à la fonction documentaire des universités. Il a ajouté que le principe budgétaire d'annualité ne favorisait guère une telle programmation, et a estimé que la communauté universitaire était de plus en plus consciente de la nécessaire évaluation des moyens mis en oeuvre.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est dit favorable à la poursuite de l'effort de programmation, jugeant toutefois indispensable de la faire suivre d'une étape d'évaluation.

M. Bernard Raoult a estimé que la programmation n'avait de sens que si elle était accompagnée d'un projet, la mise en réseau des bibliothèques constituant un projet prioritaire dont l'impulsion devait être nationale. Il a ajouté que, dans le cadre d'un tel projet, l'entretien du matériel, dont l'obsolescence est rapide, constituait un véritable défi.

M. Bernard Saint-Girons a complété ces propos en estimant que, quelle que soit l'évolution des effectifs étudiants, les dépenses de documentation ne sont pas appelées à évoluer à la baisse dans un avenir proche, en raison de la logique actuelle, qui est une logique de rattrapage et non d'entretien d'un existant satisfaisant, et du coût suscité par les nouvelles technologies.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les méthodes de travail de la CPU.

M. Bernard Saint-Girons a expliqué que la CPU comportait trois niveaux de réunions. La conférence plénière se réunit chaque mois. La commission permanente réunit dix-sept présidents d'université: c'est à ce niveau qu'ont lieu la plupart des débats. Le bureau anime la conférence plénière et la commission permanente, et pilote une équipe de chargés de mission ; il dirige également l'Agence de modernisation.

M. Jean-Philippe Lachenaud a rappelé l'existence des deux thèses contradictoires qui existaient quant aux relations que les présidents d'université entretiennent avec les responsables d'unité, la première mettant l'accent sur la centralisation et le caractère global de la politique de l'établissement et qui engendre des tensions du fait de velléités autonomistes, la seconde favorisant la décentralisation.

M. Bernard Saint-Girons a fait état d'un " paysage contrasté ", constatant que l'état des relations entre les présidents d'université et les directeurs de composantes ne pouvait être apprécié sur le seul domaine des bibliothèques mais devait l'être de manière générale. Il a estimé qu'un équilibre était à trouver entre la bibliothèque centrale et les bibliothèques de proximité.

M. Bernard Raoult a ajouté que, pour une bibliothèque, la bonne échelle était celle de l'établissement ou de l'inter-établissement mais non celle des UFR, cela n'étant pas incompatible avec l'existence de services de proximité, dont la collaboration avec la bibliothèque centrale devait être encouragée.

M.  Michel GARNIER
Directeur de la programmation et du développement
au ministère de l'éducation nationale,
de la recherche et de la technologie
- Mercredi 24 juin 1998 -

M. Michel Garnier a, en premier lieu, présenté le contexte de l'élaboration du plan Université 2000.

Il a rappelé que ce plan avait été conçu dans un contexte de forte croissance des effectifs étudiants, deux millions d'étudiants étant prévus pour l'an 2000.

M. Michel Garnier a dès lors expliqué que le plan Université 2000 avait poursuivi trois objectifs. Le premier a consisté à satisfaire les besoins pédagogiques, tout en essayant de réduire l'attractivité exercée par les universités parisiennes sur les étudiants. Le deuxième objectif visait à assurer le maillage du territoire dans la perspective d'un accès démocratique aux études, aux premiers cycles notamment. Le dernier objectif, enfin, tendait à encourager la constitution de pôles européens, les universités devant, d'une part, irriguer leur environnement grâce à leurs savoirs et, d'autre part, adapter leurs formations aux besoins de l'économie, des PME-PMI notamment.

M. Michel Garnier a, ensuite, dressé un bilan rapide du plan Université 2000, à l'actif duquel il est possible de porter : la création de huit universités nouvelles, dont quatre en Ile-de-France, qui ont permis d'enrayer la croissance des effectifs des universités du centre de la capitale, mais non de les réduire ; la constitution de sept pôles européens ; la création de 24 instituts universitaires de technologie (IUT) représentant 196 départements disciplinaires. Ces réalisations représentent 3,8 millions de mètres carrés à la fin du contrat de plan, soit des crédits à hauteur de 40,1 milliards de francs, pris en charge à près de 50 % par les collectivités territoriales.

M. Michel Garnier a estimé que ce bilan était positif mais incomplet face à l'ampleur des besoins : les locaux pédagogiques ont été privilégiés au détriment de la recherche, les restructurations et les rénovations ont laissé la place aux constructions nouvelles, et la vie étudiante a été négligée, notamment les résidences, les restaurants et les bibliothèques universitaires.

Il a ajouté que le cas de Paris n'avait guère était traité par le plan Université 2000, puis a énuméré les problèmes spécifiques aux universités parisiennes.

Le premier concerne leurs énormes besoins en matière de sécurité, le plan de sécurité de François Bayrou ayant été doté de 5,1 milliards de francs, dont 2 milliards à la charge de l'Etat et autant financé sur les fonds propres des universités. Le problème de l'amiante, notamment, est considérable puisque, sur 490.000 mètres carrés contaminés, en France, 320.000 se trouvent à Jussieu, les plus grosses opérations de désamiantage devant être réalisées à la tour de Censier, à la Maison des sciences de l'homme, à l'hôpital Necker, à la tour universitaire du centre hospitalo-universitaire Saint-Antoine, à la bibliothèque universitaire de Nanterre ou encore à la faculté de droit de Saint-Maur.

Ensuite, les établissements universitaires parisiens doivent faire l'objet d'un profond remembrement, la forte croissance des effectifs s'étant traduite par des acquisitions immobilières ou des locations opérées dans le plus grand désordre, de telle sorte que les huit universités parisiennes sont aujourd'hui implantées dans 164 sites différents.

Enfin, les universités parisiennes, notamment celles enseignant les sciences de l'homme et de la société, souffrent d'un important déficit de surface estimé à environ 150.000 mètres carrés de locaux pédagogiques -soit 10 % de la superficie actuelle- et 30.000 mètres carrés de locaux de recherche, auxquels il convient d'ajouter des locaux destinés à la vie étudiante, notamment des bibliothèques universitaires. Sachant que 10 % des surfaces utiles seront probablement perdus au cours des opérations de remise aux normes, environ 300.000 mètres carrés de locaux universitaires devraient être construits à Paris en tenant compte des remembrements de locaux.

M. Michel Garnier a ensuite présenté le contexte de réalisation du plan Université du troisième millénaire (U3m). Ce contexte, a-t-il précisé, est marqué par la légère diminution des effectifs étudiants observée depuis deux ans. En outre, le développement de la formation continue permettra une utilisation plus rationnelle des locaux universitaires, en matière de périodes d'ouverture notamment.

M. Michel Garnier a ainsi insisté sur les objectifs qualitatifs du plan U3m.

Il s'agit d'abord de remédier au mauvais état des universités parisiennes, mais également de certaines universités de province, le projet n'étant pas exclusivement parisien contrairement aux allégations de la presse. Les présidents d'université devront notamment assurer la maintenance préventive de leurs locaux. Cette action bénéficie actuellement de 650 millions de francs pour un total de 14 millions de mètres carrés en France, soit un peu plus de 45 francs au mètre carré, alors que 100 francs au mètre carré serait une norme permettant de faire face aux besoins. Cette politique d'entretien du patrimoine sera intégrée aux prochains contrats d'établissement.

U3m devra également permettre aux universités parisiennes de combler leur déficit en locaux, mais également de remodeler ces derniers, l'objectif étant de ramener le nombre de sites universitaires de 164 actuellement à une soixantaine d'implantations.

Les équipements et services destinés aux étudiants, notamment l'aménagement des locaux, constitueront également l'une des priorités du programme U3m.

Enfin, il s'agira d'intégrer des locaux de recherche dans les universités nouvelles existantes.

M. Michel Garnier a expliqué que les universités n'étaient pas des outils d'aménagement du territoire mais qu'il fallait plutôt considérer leur aspect territorial ; ainsi, la construction d'universités nouvelles sera abandonnée et laissera la place à l'organisation de la coopération universitaire régionale, par l'institution de groupements d'intérêt public (GIP) ou "universitaire" (GIU) mais aussi par le recours plus systématique aux nouvelles technologies.

M. Michel Garnier a ensuite abordé le cadrage financier du plan U3m en précisant toutefois que les arbitrages n'étaient pas rendus.

Il a rappelé que, dans les contrats de plan Etat-régions actuels, l'Etat prenait à sa charge (hors équipements) un milliard et demi de francs chaque année, l'objectif pour les prochains contrats étant de porter cette charge à 12,5 milliards de francs sur cinq ans. Cet effort supplémentaire nécessitera probablement la participation des collectivités territoriales qui pourront cependant partager les maîtrises d'ouvrage.

Le plan U3m sera intégré au XIIème plan comme Université 2000 l'avait été dans le XIème plan. Ainsi, le XIIème plan, qui devrait couvrir une période de sept ans, pourrait consacrer 40 milliards de francs aux locaux universitaires, destinés essentiellement aux restructurations et mise aux normes de sécurité, à des constructions nouvelles et opérations de remembrement, et à la vie étudiante.

M. Michel Garnier a rappelé que la loi Pasqua de 1995 relative à l'aménagement et au développement du territoire était en cours de réforme. Elle devrait notamment permettre l'élaboration d'un schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur. Dans un premier temps, l'Etat et les collectivités territoriales définiront, chacun de leur côté, leur politique, puis un croisement des grandes lignes nationales et régionales interviendra en octobre ou novembre 1998, les arbitrages devant être rendus à la fin du mois de novembre : c'est à partir de ces arbitrages que les préfets de régions entameront les négociations devant aboutir aux nouveaux contrats de plan Etat-régions.

M. Michel Garnier a expliqué que les bibliothèques universitaires entreraient dans le volet du plan consacré à la vie étudiante, pour des crédits estimés à 2,9 milliards de francs et destinés, d'une part, à la construction de 300.000 mètres carrés et, d'autre part, au câblage des bâtiments de bibliothèques devant leur permettre de mener une politique documentaire s'appuyant sur les nouvelles technologies.

Il a ajouté que, s'agissant des bibliothèques universitaires, le problème du copyright était actuellement crucial. En effet, tous les documents et ouvrages tombés dans le domaine public peuvent être numérisés sans problème ; de même, les livres les plus récents font l'objet d'une numérisation quasi systématique. En revanche, le problème surgit pour les ouvrages anciens non encore tombés dans le domaine public.

M. Jean-Philippe Lachenaud a voulu savoir si le plan U3m résultait, dans ses grandes lignes actuelles, d'une remontée des besoins, et s'est enquis de l'existence d'un programmateur et d'une étude préalable des opérations à mener.

M. Michel Garnier a expliqué que deux milliards de francs avaient déjà été programmés pour la réalisation d'études, d'une part, et pour les premières constructions, d'autre part, qui interviendront dès 2000, les sites de Jussieu et Tolbiac constituant des priorités : 20.000 mètres carrés devraient être construits à Tolbiac en préalable à un désamiantage complet de Jussieu, les locaux ensuite libérés sur ce site devant servir à des opérations de remembrement des implantations universitaires.

Il a ajouté que les universités avaient exprimé des besoins en locaux de bibliothèques universitaires estimés à environ 9 milliards de francs, mais il a jugé que les restructurations étaient parfois plus utiles que la construction de locaux neufs. Il a toutefois tenu à préciser que les crédits individualisés pour les bibliothèques universitaires devraient couvrir à hauteur des deux tiers les besoins de la province. En outre, les besoins du bassin parisien, plutôt que ceux de l'Ile-de-France stricto sensu, seraient pris en considération. Mais un raisonnement en termes de coopération régionale devra absolument prévaloir.

M. Claude JOLLY
Sous-directeur des bibliothèques et de la documentation au ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie
- Jeudi 24 septembre 1998 -

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les moyens financiers dont bénéficiaient les bibliothèques universitaires dans le projet de loi de finances pour 1999.

M. Claude Jolly a expliqué que le chapitre 36-11, article 20, supportait, en grande partie, les crédits alloués aux bibliothèques universitaires, ces crédits s'élevant en 1999 à 535,4 millions de francs, soit 32 millions de francs de plus qu'en 1998 dont 15 millions en mesures nouvelles, le reste résultant de divers transferts. Au cours des cinq dernières années, l'article 36-11 a connu une augmentation de 150 millions de francs.

Il a ajouté que le budget 1999 avait prévu la création de 149 emplois, l'essentiel de ces créations concernant les catégories B et C. Ainsi, plus de 1.000 emplois de personnels de bibliothèques ont été créés depuis cinq ans. En outre, le recours aux emplois-jeunes dans l'enseignement supérieur est désormais possible, à condition que de tels emplois ne concernent pas des activités couvertes par les statuts et que les jeunes recrutés ne soient pas titulaires du baccalauréat.

A propos de l'exécution du budget 1998, M. Claude Jolly a rappelé que 350 emplois avaient été créés cette année, et que sept concours avaient été organisés, les personnels recrutés allant être nommés au 1 er septembre ou au 1 er novembre.

Ces emplois seront répartis selon trois critères : 54 emplois au titre du rattrapage, 127 emplois pour la mise en service des surfaces nouvelles, puis 100 emplois au titre de l'extension des horaires d'ouverture. 37 bibliothèques universitaires sont concernées par ce dernier point, l'objectif du ministre restant de parvenir à une ouverture hebdomadaire moyenne de 60 heures. Ce critère demeurera primordial pour la répartition des emplois créés en 1999. Par ailleurs, pour favoriser encore davantage l'extension des horaires d'ouverture, il serait souhaitable de faciliter le recrutement de moniteurs-étudiants selon un dispositif plus souple que celui des actuelles vacations qui se traduisent par des charges sociales et l'ouverture de droit aux allocations chômage.

M. Claude Jolly a ensuite expliqué que les 506 millions de francs alloués aux bibliothèques universitaires par le budget 1998 avaient été répartis en fonction de plusieurs critères. 263 millions de francs ont été attribués au titre des dotations normées, en prenant en considération le nombre d'étudiants, les niveaux d'études et les disciplines enseignées. 34 millions de francs ont servi à financer les établissements et services de coopération, tandis que la part contractuelle avait bénéficié de 181 millions de francs, et les actions spécifiques, principalement l'informatisation, 26 millions. Au total, l'informatisation des bibliothèques bénéficie de 38 millions de francs, une part de la dotation contractuelle lui étant également allouée.

M. Jean-Philippe Lachenaud a soulevé le paradoxe consistant à négocier les contrats avec les universités de manière centralisée. Il s'est ensuite interrogé sur la suffisance de la prise en compte de la politique documentaire dans le plan Université du troisième millénaire (U3m).

M. Claude Jolly a estimé que les arbitrages concernant le volet documentaire d'U3m devraient être connus en janvier 1999. La sous-direction des bibliothèques a évalué entre 5 et 7,5 milliards de francs les besoins en bibliothèques dans le cadre d'U3m, qui devrait couvrir les années 2000 à 2006.

M. Claude Jolly a jugé "très préoccupante" la situation des locaux universitaires à Paris centre et en proche banlieue. Il conviendrait que les efforts consentis aillent au-delà des projets en cours relatifs à Jussieu, Tolbiac et à l'Institut national de l'histoire de l'art. Il a également estimé que la fermeture de la BPI pendant deux ans ainsi que celle, plus brève, de Cujas étaient compensée par l'ouverture de la BNF, même si cela représentait davantage une opportunité qu' une solution pour les étudiants, en l'absence de déploiement d'une politique leur étant est spécifique.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les évolutions affectant le cadre statutaire et les formations des personnels des bibliothèques.

M. Claude Jolly a estimé excessive l'existence de huit corps pour à peine 5.000 agents, et a fait état du projet de fusion du corps des inspecteurs de magasinage avec celui des bibliothécaires-adjoints. Il a également qualifié la fusion de l'ENSSIB et de l'IFB, au 1er janvier 1999, de "mesure de rationalisation" de l'offre de formation.

M. Jean-Philippe Lachenaud s'est enquis de l'état d'avancement des négociations avec les éditeurs pour l'accès aux ressources électroniques.

M. Claude Jolly a jugé correcte l'avancée de ce dossier, deux journées d'études lui ayant été consacrées, l'une en juin, l'autre en septembre. Il a rappelé que la politique documentaire était du ressort du seul établissement puisqu'elle dépendait de sa politique scientifique, mais que l'établissement se devait d'agir dans un esprit de mutualisation, dans le domaine des négociations avec les éditeurs notamment. Ainsi, des groupements d'universités -ou consortia - se mettent d'accord sur un nombre et une série de revues à acquérir, puis négocient un droit d'accès à ces revues. S'agissant de l'achat de documents électroniques, trois voies peuvent être empruntées : soit l'établissement reste autonome, soit il adhère à un consortium, comme envisagent de le faire une douzaine de bibliothèques universitaires dans le domaine des sciences exactes, soit l'Agence bibliographique de l'enseignement supérieur (ABES) joue un rôle d'intermédiaire en devenant opérateur pour la consultation des documents.

M. Jean-Philippe Lachenaud a enfin voulu connaître l'évolution du débat sur le droit de prêt.

M. Claude Jolly a rappelé que le rapport Borzeix préconisait l'établissement d'un droit de prêt, dont les fondements juridiques sont certains, de 10 à 20 francs par usager chaque année, tout en prévoyant un certain nombre d'exemptions, pour l'enseignement scolaire et l'ensemble des jeunes de moins de 18 ans notamment. Quand il sera saisi du rapport, il est probable que le ministère souhaitera étendre cette exemption à l'enseignement supérieur.

Abordant le droit de copie, il a fait savoir qu'un accord était, semble-t-il , sur le point d'être conclu entre la Conférence des présidents d'université et le Centre français d'exploitation du droit de copie.

ANNEXE VI

LISTE DES PERSONNES
RENCONTRÉES PAR LE RAPPORTEUR
LORS DE SES DÉPLACEMENTS


Jeudi 14 mai 1998 M. Hubert Dupuis , Directeur du Centre technique du livre de l'enseignement supérieur à Bussy-Saint-Georges,


Lundi 8 juin 1998 Mme Madeleine Jullien , Directrice du service commun de la documentation de l'université de Vincennes-Saint-Denis (Paris VIII) à Saint-Denis,


Mardi 9 juin 1998 Mme Frédérique Molliné , Directrice du service commun de la documentation de l'université Jean Moulin (Lyon III) à Lyon,

M. Jean-Claude Migraine-George ,
Secrétaire général de l'Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques à Villeurbanne,


Lundi 15 juin 1998 M. Jean-Claude Annezer , Directeur du service commun de la documentation de l'université Toulouse le Mirail (Toulouse II) à Toulouse,

Mme Marie-Dominique Heusse , Directrice du service commun de la documentation de l'université de Tou-louse I à Toulouse,


Mardi 16 juin 1998 Mme Nathalie Jullian , Directrice de la bibliothèque Sainte-Geneviève à Paris,


Mardi 23 juin 1998 Melle Françoise Roubaud , Directrice du service commun de la documentation de l'université d'Artois à Arras,


Vendredi 25 septembre 1998 Mme Suzanne Santiago , Directrice de l'Agence bibliographique de l'ensei-gnement supérieur à Montpellier,


Mardi 29 septembre 1998 M. Gérard Littler , Administrateur de la bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, à Strasbourg.

ANNEXE VII

QUELQUES MESSAGES ÉLECTRONIQUES REÇUS SUR LE SITE WEB DU SÉNAT, À L'OCCASION DE LA CONSULTATION MISE EN PLACE PAR LA MISSION D'INFORMATION

Un étudiant en doctorat à la faculté de droit d'Aix-en-Provence
(02 juin 1998)


S'agissant tout d'abord des conditions d'accueil dans les bibliothèques, il est regrettable que nous ne puissions pas disposer d'un accès horaire plus important aux fonds documentaires. En effet, le temps de recherche ne correspond pas aux horaires d'ouverture d'une administration de type classique. Or, le fonctionnement des bibliothèques démontre clairement une pratique contraire: faute de personnels, la bibliothèque universitaire est fermée à 19 heures et, à ma connaissance, malgré les propositions qui ont été faites, il n'y a jamais eu d'ouverture au-delà de cette horaire. Il y aurait un important effort à fournir sur ce point. Songeons aux conditions d'accueil des universités américaines...

Notre bibliothèque, de type universitaire, s'est dotée d'un ensemble d'outils multimédia performants et rendant de précieux services. Sur ce point précis, les résultats sont assez satisfaisants et il faut souhaiter que l'évolution positive qui est enclenchée se poursuive.

Cependant, la formation des personnels bibliothécaires nécessiterait certains compléments. Car les personnes directement appelées à manipuler ces outils ne possèdent pas toujours toutes les information requises pour une utilisation optimale.

Enfin, notre faculté a mis en place un service de monitorat, dont les résultats sont assez intéressants. Ceci est à rapprocher directement de la réforme des cycles universitaires qui est en cours: d'une manière générale, on peut constater un désir des nouveaux étudiants d'acquérir une méthodologie plus grande. Néanmoins, et ceci rejoint votre question concernant la nécessité de bibliothèques spécialisées pour les étudiants en premier cycle, il est vrai que ceux-ci sont facilement déroutés lorsqu'il s'agit de trouver dans la masse d'informations disponibles, les renseignements qui les intéressent. Toutefois, à mon sens, s'il y avait une proposition à faire à ce sujet, elle ne devrait pas aller jusqu'à la création de bibliothèques spécialisées. Ou bien il faudrait s'entendre sur le sens de cette idée. Si elle signifiait distinguer plus précisément encore les ouvrages qui sont destinés à ces étudiants, elle serait effectivement bénéfique. Car il y a un risque à "isoler" les ouvrages destinés à ces étudiants. Et celui-ci apparaîtrait lors du changement de cycle de l'étudiant. Il lui faudrait alors découvrir de nouveaux lieux de connaissances, de nouvelles méthodes de classement. Et si cela existe déjà en l'état actuel des choses, on peut légitimement craindre que la création de bibliothèques pour un niveau précis d'études ne fasse qu'accroître cette difficulté.

Un personnel des bibliothèques (02 septembre 1998)

Depuis bientôt dix ans, avez-vous constaté une évolution de la situation des bibliothèques universitaires, et si oui, dans quel sens ?

Oui, il y a, il me semble, une évolution dans le bon sens. C'est à dire des bibliothèques plus conviviales, informatisées et desservant des services plus pertinents (recherches documentaires sur CD-Roms, amélioration de la signalétique...).

La bibliothèque vous paraît-elle un lieu suffisamment ouvert sur le campus, ainsi qu'au public non universitaire ?

Pas encore assez. Je pense que le facteur humain est primordial. L'utilisateur, quand il arrive à la bibliothèque, se sent souvent perdu et ne sent pas que le personnel travaille pour mieux l'aider dans ses recherches. L'utilisateur n'est pas assez pris en charge. Toutefois, il me semble aussi que le "campus" n'intègre pas assez la bibliothèque. L'étudiant n'est pas assez encouragé à aller à la bibliothèque. Des cours de recherches documentaires en début du cursus devraient être proposés aux étudiants (avec examens en fin d'année) pour que ceux ci prennent l'habitude d'aller à la bibliothèque et, surtout, connaissent les services mis en place dans les unités documentaires de l'enseignement supérieur. Autre remarque : le taux de fréquentation des professeurs est bas. Cet état de fait n'encourage pas les étudiants à aller à la bibliothèque.

Comment jugez-vous les conditions d'accueil dans les bibliothèques universitaires (locaux, horaires et jours d'ouverture, système de prêt...) ?

La formulation de la question illustre bien, à mon humble avis, un des problèmes majeurs des bibliothèques universitaires. Vous nous demander de qualifier l'accueil sans notifier le facteur humain dans les paramètres pris en compte (locaux, horaires et jours d'ouverture, système de prêt). Or, il me semble que là où le service doit s'améliorer, c'est bien dans l'accueil. Dans chaque grande BU, seul un poste de "renseignement" et les personnes s'occupant du prêt sont là pour renseigner les utilisateurs. Pourquoi ne pas imaginer une configuration des grandes BU identique à celle des grandes librairies types FNAC. C'est-à-dire mise en place d' une équipe (on pourrait imaginer que celle-ci soit composée d'un bibliothécaire, d'un bibliothécaire-adjoint et d'un magasinier, ce qui permettrait en plus aux magasiniers et bibliothécaires de travailler ensemble) responsable d'une matière (pour une BU de lettres et sciences humaines on aurait donc une équipe pour la sociologie, une pour l'histoire, une autre pour l'anglais...) qui gérerait les acquisitions, le catalogage, le prêt, l'organisation du rayon.... Et qui accomplirait tout son travail dans la salle de lecture. Chaque équipe serait plus en relation avec les utilisateurs, connaîtrait mieux les demandes de ceux-ci, et, pourrait donc les renseigner de manière plus pertinente sur le fond (ex : "Vous cherchez ce livre? Je viens de le commander, il devrait arriver dans une semaine . Si vous voulez, vous pouvez le réserver pour pouvoir l'emprunter dès qu'il arrivera" ). Pouvant se déplacer pour aider à rechercher avec l'utilisateur dans les rayons, pouvant orienter l'utilisateur vers d'autre rayons. Travaillant avec les étudiants, il serait plus au courant des attentes des utilisateurs. Il faut que le personnel de la bibliothèque travaille aux côtés des utilisateurs.

Travaillant à l'heure actuelle à la bibliothèque du Laboratoire de géographie urbaine, j'ai pu constater à quel point les étudiants se sentaient perdus dans les grandes BU. Lors de ma formation , en 1996, j'ai été stagiaire dans une BU. Chaque bibliothécaire était responsable d'une matière (responsable des acquisitions et du catalogage), mais à aucun moment, celui ci travaillait dans son rayon. Quel dommage!!! Le bibliothécaire travaille donc pour des gens qu'il ne côtoie pas et l'étudiant ne peut faire part de ses attentes à quiconque. Imaginez quelqu'un responsable de la géographie dans une grande BU. Il connaîtrait les utilisateurs assidus, devancerait leurs attentes.... De l'autre côté, l'utilisateur, à force de fréquenter la BU et de côtoyer la même personne, n'hésiterait pas à faire appel à lui.

Excusez moi d'être un peu long, mais c'est un sujet qui me tient très à coeur. Je pense qu'il faut à tout prix humaniser les services développés dans les grande BU. Bien-sûr, cela demanderait plus de personnels (au lieu de cataloguer 20 livres dans une journée, le bibliothécaire constamment sollicité ne pourrait en cataloguer que 10), et cela va à l'encontre des lois bibliothéconomiques qui demandent que l'utilisateur soit autonome dans une bibliothèque. Pour les jeunes étudiants qui arrivent du lycée, il est à l'heure actuelle impossible pour eux d'être autonomes dès la première année. Mais en travaillant côte à côte, le bibliothécaire, disponible, doit apprendre à l'utilisateur à être autonome.

Dans les grandes BU, c'est le facteur humain qui est déficient, alors que dans les bibliothèques d'UFR ou des laboratoires de recherche, c'est l'aspect matériel qui est à améliorer (bibliothèques peu connues, avec peu de moyens, vieux mobilier...).

Comment jugez-vous l'évolution des crédits destinés aux bibliothèques universitaires ? Doivent-ils continuer d'être fléchés ?

Depuis le rapport Miquel, certaines BU ont vu leurs crédits augmenter de manière non négligeable et dans le bon sens. Je pense maintenant que l'on devrait soutenir le développement des bibliothèques d'UFR et desbibliothèques des laboratoires de recherche. Il faut aussi signaler les trop grandes inégalités entre les bibliothèques suivant l'unité dans laquelle elles sont intégrées. J'ai travaillé en tant que CES à la bibliothèque de l'ENSIGC (Ecole Nationale Supérieure de l'Institut Génie Chimique) à Toulouse qui dépendait de l'INP (Institut National Polytechnique). Maintenant, je travaille à l'université Paris X Nanterre. Et, je pense qu'il y a une trop grande différence de moyens entre la bibliothèque de l'ENSIGC et une bibliothèque d'UFR de lettres et sciences humaines.

La formation que vous avez reçue vous paraît-elle à même de remplir efficacement vos fonctions ?

Titulaire d'un DEUST archives et médiathèque, obtenu à Toulouse, j'ai, tout de suite après cette formation, réussi le concours de Technicien BAP 12 option bibliothèque. Responsable de la bibliothèque du laboratoire de Géographie Urbaine à l'université Paris X Nanterre, je suis en fonction depuis décembre1996. Il s'agissait d'une création de poste, il y avait donc tout à faire. Il me semble que ma formation m'a permis de faire un travail efficace. Mon expérience professionnelle (1an et demi employé en tant que CES à la bibliothèque de l'ENSIGC) m'a aussi beaucoup apporté.

Comment cette formation pourrait-elle, selon vous, évoluer, eu égard aux exigences nouvelles en matière de nouvelles technologies ?

La formation continue doit permettre aux bibliothécaires d'évoluer en même temps que les nouvelles technologies. Ici, à l'université Paris X Nanterre, nous sommes bien lotis car Médiadix propose des formations qui me semblent bien répondre à l'attente des bibliothécaires qui voudraient mieux appréhender les nouvelles technologies (recherche d'informations sur Internet, élaboration d'un site web...). Mais lorsque l'on gère seul une bibliothèque, une absence de plusieurs jours est mal comprise par les étudiants et, pour ma part, par la professeur responsable du laboratoire. Toutefois voilà 2 ans que j'ai fini ma formation et je me sens déjà un peu dépassé .

Comment pourrait, selon vous, évoluer le contenu de votre emploi ?

Alors qu'auparavant les bibliothécaires/documentalistes avaient surtout pour mission d'orienter les utilisateurs vers les documents qu'ils cherchaient (livre, article, thèse, rapport....), il semblerait que de nouvelles missions apparaissent pour le personnel des unités documentaires :

- dispenser aux utilisateurs l'apprentissage des nouveaux outils de recherche d'informations (utilisation du web, des divers CD-Roms) ;

- mettre en place de l'OPAC de l'unité documentaire sur le Web ;

- mettre en relation les personnes ayant des sujets de recherche similaires (grâce à la navigation sur le Net et les services de messagerie).

Il y a certainement beaucoup d'autres choses à mettre en place, car il est indéniable que la révolution technologique a véritablement bouleversé les missions des bibliothèques et des unités documentaires de l'enseignement supérieur.

L'organisation documentaire des universités vous paraît-elle rationnelle ?

L'organisation en SCD me parait une bonne chose. En tant que bibliothèque de laboratoire, elle ne peut y être intégrée. Et, je le regrette car les changements qu'entraîne la révolution technologique sont parfois mal compris par les professeurs de l'ancienne génération qui sont responsables de laboratoires de recherche. La mise en place de nouveaux services serait plus facile si toutes les unités dépendaient d'une même tutelle.

Etes-vous satisfait de la documentation disponible dans les bibliothèques universitaires ?

Oui.

Comment jugez-vous l'accès aux ouvrages dans les bibliothèques universitaires ?

Correct.

Comment jugez-vous l'équipement informatique des bibliothèques universitaires ?

En progrès. Toutefois, le public n'est pas assez aidé pour utiliser les OPAC mis en place dans les diverses BU.

Vous sentez-vous suffisamment formé à la bonne utilisation des nouvelles technologies ?

Non. La formation continue devrait être plus soutenue pour pouvoir suivre la rapide évolution des nouvelles technologies.

Un étudiant en troisième cycle à la faculté de droit de l'université de Nice Sophia Antipolis (03 novembre 1998)

La bibliothèque que je fréquente est exiguë; elle est insuffisante pour les 7000 étudiants inscrits à la faculté. Les étudiants n'ont plus de place pour s'installer et consulter les documents mis à leur disposition. A ce propos, lorsque par miracle, la faculté est abonnée aux revues recherchées par les étudiants, ce qui nous oblige le plus souvent à commander directement à l'éditeur de nombreuses revues de droit pour les feuilleter à loisir, il faut prendre patience pour les trouver dans les rayons. En effet, la bibliothèque ne commande chaque revue qu'en un seul exemplaire, sauf à ce qu'elle soit fameuse ( comme le Recueil Dalloz ou le JCP). Bien-sûr, nous pourrions les faire venir d'autres bibliothèques. Mais c'est une fausse bonne idée : c'est long, temporaire, et stupide, puisque cela rend le document indisponible dans la bibliothèque où il devrait être...

Que dire des conditions de travail des employés? Ils sont si peu nombreux, si mal rémunérés, qu'ils ne peuvent pas être motivés. Quand vous avez 200 à 300 étudiants qui, dans la même journée, veulent la même revue, citée en référence par un professeur, revue qui n'est disponible qu'à la banque de prêt, et que vous devez, a chacun, dire qu'elle est empruntée par un étudiant, vous ne pouvez être que blasé, et cela se comprend. Non seulement vous en avez assez, mais les étudiants aussi de ne JAMAIS trouver LE document souhaité. C'est cependant un peu moins vrai pour les étudiants de troisième cycle. Moins nombreux, ils ne cherchent pas l'indisponible temporairement, mais l'introuvable ( définitivement...).

L'outil informatique a certes fait son apparition; mais, sauf à être particulièrement matinal, et s'en saisir, non sans heurts, dès l'ouverture de la bibliothèque, il faut faire preuve de beaucoup de patience et avoir du temps à perdre ( ce qui est le comble) pour espérer s'asseoir devant les quelques écrans mis à la disposition des étudiants; ils se comptent sur les doigts des deux mains, mais pas plus de cinq sont utilisés : ils sont en panne, ou alors, ce qui revient presque au même, leurs imprimantes sont en panne... comme les photocopieuses, d'ailleurs. Faites les comptes :

*  1 Dalloz pour 3500 étudiants

*  1 Revue des Sociétés pour 7000 étudiants

*  1 ordinateur et 1 photocopieuse en état de marche pour 1400 étudiants.

BIBLIOTHÈQUES UNIVERSITAIRES :
LE TEMPS DES MUTATIONS

Ce rapport est le résultat d'une mission de contrôle budgétaire sur pièces et sur place effectuée par M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial des crédits de l'enseignement supérieur.

Cette mission visait à dresser le constat de la situation des bibliothèques universitaires françaises, dix ans après le rapport Miquel qui fut à l'origine de la prise de conscience de la "misère des B.U.". Il apparaît que les recommandations du rapport Miquel ont été largement mises en oeuvre. Alors qu'un effort considérable a été accompli en faveur des bibliothèques universitaires, elles sont toutefois confrontées, aujourd'hui, à un nouveau défi : celui de leur intégration dans la société de l'information.

Les nouvelles technologies induisent en effet de profonds changements dans l'agencement des locaux, dans la formation des personnels et des usagers, dans l'offre documentaire et dans la perception du rôle même que les bibliothèques universitaires sont appelées à remplir dans l'enseignement supérieur et la recherche.

Ce rapport, après avoir rappelé les principales mesures dont ont bénéficié, tant sur le plan quantitatif que qualitatif, les bibliothèques universitaires françaises, examine la politique documentaire des universités, notamment la façon dont les nouvelles technologies peuvent la valoriser, puis s'interroge sur les conséquences du formidable développement de la documentation électronique sur le respect des droits d'auteur. Enfin, il formule un certain nombre d'observations résultant des nombreux entretiens et des visites qu'il a effectuées dans les universités.

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