N° 309

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 avril 1999

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) à la suite d'une mission effectuée au Mexique du 20 au 28 février 1999 ,

Par MM. Xavier de VILLEPIN, Serge VINÇON, André DULAIT, André BOYER, Jean PUECH, Jean-Luc BÉCART, André ROUVIÈRE et Hubert DURAND-CHASTEL,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Amérique centrale.

Mesdames, Messieurs,

Une importante délégation de votre commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a effectué, du 20 au 28 février 1999 , une mission d'information au Mexique. La délégation était conduite par M. Xavier de Villepin, président, et également composée de MM. Serge Vinçon, André Dulait et André Boyer, vice-présidents de la commission, et de MM. Jean Puech, Jean-Luc Bécart, André Rouvière et Hubert Durand-Chastel.

Ce déplacement, le premier accompli par notre commission sur le continent américain depuis trois ans, avait naturellement pour objet de manifester l'attention permanente portée par notre commission à l'évolution de la situation en Amérique latine dont les mutations récentes, tant sur le plan économique que sur le plan politique, appellent un intérêt d'autant plus constant de la part de la France que ses liens anciens avec les pays latino-américains sur le plan historique et culturel n'ont pas toujours la vigueur et la densité qui devraient être les leurs dans les domaines politiques et économiques.

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Les objectifs de la mission

Le choix particulier du Mexique pour la principale mission d'information de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées en 1999 revêtait de surcroît une triple signification :

- il visait d'abord à s'informer et à apprécier la situation actuelle du Mexique : sur le plan politique , en effet, ce vaste pays de près de 2 millions de km 2 (3,5 fois la France), dont la population approche désormais les 100 millions d'habitants, est entré dans une période de profonde mutation politique, la " normalisation " démocratique et institutionnelle -qui devrait trouver son illustration lors des prochaines élections présidentielles de l'an 2000- allant de pair avec la persistance de foyers de tension, parmi lesquels figure naturellement le conflit du Chiapas ; dans le domaine économique , par ailleurs, le Mexique, s'il a remarquablement surmonté la grave crise financière de 1994-1995 et si la mise en oeuvre de l'ALENA (accord de libre échange nord-américain) a favorisé la reprise économique, n'a pas été épargné par les turbulences internationales liées à la crise asiatique qui ont souligné la fragilité des structures économiques mexicaines ;

- ce déplacement avait ensuite pour objectif de conforter la qualité des relations bilatérales franco-mexicaines , historiquement solides et confiantes, en particulier sur le plan culturel , entre deux partenaires que rapproche naturellement leur héritage latin commun, mais aussi décevantes sur le plan économique , la part de marché française au Mexique oscillant autour de 1 % ; sur le plan politique enfin, la visite de notre délégation s'inscrivait dans le contexte très favorable d'un nouvel essor des relations bilatérales créé par la visite d'Etat du Président de la République au Mexique du 12 au 14 novembre 1998, visite au succès de laquelle le Sénat avait utilement contribué, d'abord en recevant devant notre commission Mme Rosario Green , ministre des relations extérieures du Mexique, le 22 octobre précédent, puis en autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération entre la Communauté européenne et le Mexique le 12 novembre, au moment même de la visite du Chef de l'Etat ;

- notre mission d'information avait enfin pour objet de recueillir des éléments d'information dans le domaine essentiel des relations économiques et commerciales internationales, dans la perspective du prochain sommet Union européenne-Amérique latine qui doit se dérouler en juin prochain et dont le Mexique assurera la coprésidence avec le Brésil, en qualité de président du " groupe de Rio ". Plus généralement, notre souci était d'y voir plus clair dans la diversité des accords économiques et commerciaux noués entre les pays du continent américain et d'apprécier les perspectives de développement des relations économiques entre l'Europe et des pays latino-américains qui, comme le Mexique, sont soucieux de contrebalancer la relation dominante qu'ils entretiennent avec les Etats-Unis par des liens plus denses avec les pays européens.

Le présent rapport d'information, après avoir brièvement rappelé les données essentielles qui caractérisent le Mexique , s'efforcera ainsi de mettre en perspective les riches informations que votre délégation a pu recueillir sur place en envisageant successivement : la situation intérieure du Mexique , tant sur le plan politique qu'économique ; les relations bilatérales franco-mexicaines où notre partenariat privilégié s'inscrit dans le contexte de la prééminence des Etats-Unis ; et enfin les relations internationales entretenues avec le Mexique, en particulier les relations euro-latino-américaines dans le développement desquelles Paris et Mexico peuvent jouer un rôle moteur.

Ces données n'auraient pu être réunies sans la qualité et la densité des entretiens et des visites qui ont été organisées à l'intention de votre délégation durant son séjour au Mexique. C'est pourquoi elle souhaite exprimer ici ses plus vifs remerciements et sa sincère reconnaissance à S. Exc.M. Bruno Delaye, Ambassadeur de France au Mexique , ainsi qu'à ceux de ses collaborateurs qui ont, par leur compétence, leur efficacité et leur disponibilité, grandement favorisé l'excellent déroulement des travaux de la délégation.

Elle se doit aussi d'associer à ces remerciements tous ses hôtes mexicains qui l'ont accueilli avec chaleur et d'exprimer tout particulièrement sa très vive gratitude à S. Exc. Madame Sandra Fuentes-Berain Villenave, Ambassadeur du Mexique en France, et M. le Sénateur Eloy Cantu, président du groupe d'amitié Mexique-France et de la première commission des relations extérieures du Sénat mexicain, chargée des relations avec les pays d'Europe et d'Asie, qui ont bien voulu accompagner notre délégation dans chacun de ses déplacements et dont nous savons la part qu'ils ont prise dans l'élaboration du programme exceptionnel établi à son intention.

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Le programme de la délégation

Ce programme a permis à notre délégation de se voir présenter une image vivante et contrastée du Mexique au cours de chacune des trois étapes de son séjour : à Mexico, avec les plus hauts responsables politiques, à Monterrey, capitale économique au nord du pays, et, au sud, dans l'Etat du Chiapas.

- A Mexico , la délégation a été reçue par les plus hautes autorités du pays :

Le Président Zedillo l'a accueillie avec chaleur ; il a souligné le nouvel essor que la visite du Président avait donné aux relations bilatérales et a mis l'accent sur l'importance que le Mexique attache aux négociations commerciales en cours avec l'Union européenne et plus généralement, à des relations plus approfondies avec les Européens. S'agissant des élections présidentielles de l'an 2000 , il a souligné que -s'il espérait naturellement une nouvelle victoire du PRI- les conditions juridiques, institutionnelles et politiques existaient désormais pour lui permettre de garantir la tenue d'élections " légales, justes et transparentes ".

La délégation a également rencontré deux des personnalités les plus fréquemment citées pour postuler l'an prochain à la présidence du Mexique :

• d'une part, M. Labastida Ochoa , actuel ministre de l'Intérieur, forte personnalité qui fait -selon de nombreux observateurs- figure de favori pour être le candidat du PRI, et qui a longuement exposé à la délégation son analyse de la situation dans le Chiapas ;

• d'autre part, M. Cuauthemoc Cardenas , actuel maire de Mexico, qui est le candidat naturel du P.R.D., parti d'opposition de gauche, à ces mêmes élections.

La délégation a par ailleurs eu des entretiens avec la plupart des autres principales autorités fédérales mexicaines. Parmi les membres du gouvernement , elle a encore rencontré :

Mme Rosario Green , ministre des Affaires étrangères, qui a particulièrement souligné les résultats concrets que Mexico attend du prochain sommet de Rio ;

le ministre de la Défense (qui couvre les armées de terre et de l'air) et le ministre de la Marine ;

• et, enfin, le procureur général de la République (équivalent du ministre de la Justice) avec lequel la délégation a évoqué la lutte contre le narcotrafic et qui a manifesté son intérêt pour une intensification de notre coopération bilatérale dans ce domaine qui constitue l'un des fléaux majeurs auquel est confronté le Mexique.

Notre délégation a enfin eu à Mexico de nombreux contacts et réunions de travail avec des parlementaires mexicains des deux chambres, à commencer bien sûr par le sénateur Cantu .

Elle a également rencontré la Présidente du Sénat et plusieurs parlementaires membres de la " COCOPA ", commission parlementaire pour la concorde et la pacification en charge des négociations dans le Chiapas.

- Deuxième étape de la délégation, son déplacement à Monterrey lui a permis de mieux apprécier le niveau de développement industriel et technologique du nord du Mexique , qui symbolise l'osmose économique croissante entre les Etats-Unis et le Mexique depuis l'entrée en vigueur de l'ALENA en janvier 1994.

La délégation y a en particulier rencontré des chefs d'entreprises importants implantés à Monterrey et a abordé avec eux les questions relatives au développement économique du Mexique, à ses relations avec les Etats-Unis (avec lesquels le Mexique effectue désormais plus de 80 % de ses échanges) et à ses liens avec l'Europe -que Mexico voudrait intensifier mais qui, dans les faits, tendent à se réduire.

Les sénateurs ont également visité à Monterrey plusieurs établissements d' enseignement supérieur , illustrant l'effort accompli par le Mexique dans ce domaine, en particulier " l'Institut technologique d'études supérieures " qui relie par satellite autour de son université virtuelle des étudiants dans tout le Mexique et six pays d'Amérique latine.

- La dernière étape de cette mission a conduit la délégation, pendant deux jours et demi, dans l' Etat du Chiapas , Etat du sud mexicain, peuplé d'une forte minorité indigène et confronté à un mouvement insurrectionnel dirigé par le " sous-commandant Marcos ".

La délégation s'y est rendue non pas évidemment pour prendre parti dans une affaire intérieure très sensible, mais pour s' informer, voir et tenter de mieux comprendre une situation complexe. Les autorités mexicaines ont parfaitement compris et admis le sens de cette démarche et la délégation a ainsi pu, pendant deux jours de réunions et d'entretiens sur place, recueillir d'utiles informations et confronter de nombreux points de vue. Elle a aussi pu débattre :

- avec le Gouverneur (PRI) de l'Etat du Chiapas, M. Albores Guillen ;

- avec des représentants des groupes parlementaires du Congrès du Chiapas , appartenant à tous les partis ;

- avec des représentants des administrations fédérales et locales qui ont présenté les possibilités d'investissements et de développement du Chiapas ;

- et avec les responsables de la 7e région militaire mexicaine, compétente pour le Chiapas, qui nous ont présenté les missions et les actions de l'armée au Chiapas.

La délégation s'est aussi rendue dans des communautés indigènes où elle a été chaleureusement accueillie. Elle a eu aussi des entretiens :

- avec les représentants des organisations civiles et de la commission nationale de droits de l'homme ,

- avec des leaders des " églises évangéliques " ,

- et enfin avec Monseigneur Ruiz , évêque du Chiapas depuis 38 ans, défenseur des communautés indiennes et de leur identité culturelle, considéré comme proche des zapatistes, qui a reçu la délégation avec son coadjuteur, le prêtre dominicain Raul Vera .

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AVANT-PROPOS -

PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU MEXIQUE :
ENTRE POIDS DU PASSÉ ET APPEL DU FUTUR

D'une superficie de 1 972 546 km 2 , le Mexique dispose de 10 000 kms de côtes et de plus de 3 000 kms de frontière commune avec les Etats-Unis qui, plus qu'une limite entre deux pays, est aussi la séparation, de moins en moins étanche, entre deux cultures et deux peuples qui ont eu une histoire profondément différente.

Pays d'altitude, dont près de 30 % du territoire se situe à plus de 1500 mètres d'altitude, le Mexique est un pays riche de transitions et de contrastes , aux nombreuses frontières internes, aussi diversifié géographiquement (montagnes, forêts, déserts...) que culturellement (hétérogénéité des populations et des manières de vivre).

Peuplé aujourd'hui de 97 millions d'habitants , -dont 35 % de moins de 15 ans et 50 % de moins de 20 ans-, le Mexique rassemblera, selon les prévisions, 140 millions de personnes en 2025 ; sa capitale, Mexico , constitue d'ores et déjà une gigantesque agglomération de plus de 20 millions d'habitants.

Figurant parmi les vingt principales puissances économiques mondiales, le Mexique est très étroitement lié au Etats-Unis à l'égard desquels s'exerce un phénomène classique de fascination-répulsion. Mais c'est aussi un très ancien pays, à l'histoire exceptionnellement riche, à la population jeune et métissée, et au système politique, fédéral, en cours de transformation.

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1. Une histoire exceptionnellement riche

Bien qu'il s'agisse du pays des Mayas et des Aztèques, l'histoire du Mexique remonte encore bien plus loin puisque les plus anciens occupants du Mexique sont les chasseurs de Tepexpan et que la culture du maïs y remonte à au moins 2500 avant Jésus-Christ.

Le tableau ci-après rappelle les principales dates de l'histoire du Mexique, qui distingue quatre périodes essentielles :

Les grandes dates de l'histoire du Mexique

- L'ère précolombienne :

vers 2500 avant Jésus-Christ : premières traces de sédentarisation, découverte de la culture du maïs

civilisation Olmèque (300 av. JC - 300 après JC)

civilisation Toltèque (300 avant JC - 600 après JC)

civilisation Maya (400-1300)

civilisation Aztèque (1325 - 1529)

- La conquête espagnole

1519

arrivée de Herman Cortes au Mexique

1520

assassinat de Moctezuma II, roi aztèque

1525 :

pendaison de Cuauhtémoc Tlatoani, dernier roi aztèque

1535

fondation de la vice-royauté espagnole

- L'indépendance

1810

guerre d'indépendance, menée par le curé Miguel Hildago (" grito ", qui est à l'origine de la fête nationale, le 16 septembre)

1821

indépendance

1823-1835

dictature militaire du Général Santa Anna

1836

les Etats-Unis annexent le Texas

1848

le Mexique cède aux Etats-Unis le Nouveau-Mexique, l'Arizona et le nord de la Californie (traité de Guadalupe Hidalgo)

1858-1861

guerre des trois ans. Les Libéraux (Benito Juarez) prennent le pouvoir

1864-1867

Maximilien, Empereur

1867

retrait des troupes françaises et proclamation de la République (Benito Juarez)

1876-1910

Général Porfirio Diaz

- Le XXème siècle

1910

révolution (Pancho Villa, Emiliano Zapata)

1917

nouvelle Constitution, toujours en vigueur

1924-1928

Plutarco Elias Calles, Président

1929

Calles fonde le Parti National Révolutionnaire (PNR)

1934-1940

Lazaro Cardenas (" le Père de la Nation "), Président

1938

nationalisation du pétrole

1939

fondation du parti d'Action nationale (PAN)

1946

le PNR devient le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI)

1946-1952

Miguel Aleman, premier président civil

1958-1964

Adolpho Lopez Matéos, Président

1964

voyage du Général de Gaulle

1964-1970

Gustavo Diaz Ordas, Président

2 octobre 1968

massacre de la place des Trois Cultures

1970-1976

Luis Echeverria, Président

1976-1982

José Lopez Portillo, Président

1982-1988

Miguel de la Madrid, Président

Septembre 1985

tremblement de terre de Mexico

1988-1994

Carlos Salinas de Gortari, Président

1989

fondation du Parti de la Révolution Démocratique

1990

Octavio Paz, Prix Nobel de littérature

1992

révision de la Constitution (statut de l'ejido, reconnaissance de l'Eglise catholique)

1 er janvier 1994

insurrection de l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN) dans le Chiapas

1 er janvier 1994

entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange nord américain (ALENA)

Décembre 1994

dévaluation du Peso

1994-2000

Ernesto Zedillo, Président

6 juillet 1997

élections législatives : le PRI perd la majorité à la Chambre des députés

- Le Mexique précolombien , si fascinant, est d'abord marqué par la civilisation olmèque à laquelle on attribue notamment, au préclassique moyen, l'invention du calendrier, de l'écriture hiéroglyphique, du jeu de balle, et l'édification des premiers temples architecturés. Mais c'est sans doute dans la période classique que s'épanouissent les civilisations les plus spectaculaires, notamment celles de Teotihuacan et des Zapotèques qui construisent plus de 200 centres urbains.

La civilisation maya connaît également à l'époque classique une expansion remarquable qui repose sur des cités-Etats.

Enfin, l'époque post-classique est marquée par l'instabilité due aux invasions des tribus nomades chichimèques , venues du nord ; la dernière vague est celle des Aztèques qui étendent leur influence sur la plus grande partie du territoire mexicain et créent une civilisation originale, rassemblant diverses cultures méso-américaines.

- Cette civilisation ne résistera cependant pas à la conquête espagnole . L'arrivée de Cortès au Mexique, en 1519 , marque le début de la période coloniale avec l'exécution en 1525 du dernier roi aztèque, tandis que les Mayas seront soumis en 1546.

Après la mise en place de l'administration de la " Nouvelle Espagne " et la fondation, en 1535, de la vice-royauté espagnole, l'évangélisation des Indiens s'accompagne d'épidémies et du travail forcé. Mais la colonie connaît, grâce aux mines d'argent du Zacatecas, un développement économique rapide. Le XVIIè siècle -au cours duquel les " haciendas " se développent à côté des communautés indigènes- apparaît cependant comme une période de marasme avant la reprise économique -fondée sur la production minière- et démographique du XVIIIè siècle, au cours duquel les Bourbons imposent une administration " éclairée " (libéralisation du commerce, création des intendances...).

- Après 1800, le mécontentement des créoles mexicains, écartés des responsabilités, et les difficultés économiques alimentent le désir d'autonomie et l'invasion de l'Espagne par Napoléon fournit l'occasion de la guerre d'indépendance . Le soulèvement du curé Hidalgo tourne, en 1810, à la révolution sociale avant que les créoles conservateurs n'obtiennent finalement l'indépendance en 1821 sous la direction du général Iturbide .

L'élaboration en 1823 d'une Constitution sur le modèle nord-américain n'empêche pas l'ouverture d'une ère d'instabilité. Avec la banqueroute financière, le Mexique perd en 1836 le Texas puis, après la guerre avec les Etats-Unis, leur cède en 1848 ( traité de Guadalupe Hidalgo ) l'Arizona, le Nouveau-Mexique et la Californie du nord, pour 18 millions de dollars...

Après la prise de pouvoir par les libéraux de Benito Juarez (1861), l'intervention étrangère conduit Napoléon III à imposer en 1864, avec l'accord des conservateurs mexicains, Maximilien comme Empereur du Mexique (fusillé en 1867 par les libéraux peu après le départ des troupes françaises). L'ère d'instabilité qui suit la proclamation de la République prend fin en 1876 avec le coup d'Etat du Général Profirio Diaz , qui se maintiendra au pouvoir jusqu'en 1911, imposant une dictature éclairée, influencée par le positivisme français. Pacifiant le pays, mettant l'armée au pas, faisant appel aux capitaux étrangers, Porfirio Diaz modernise le pays mais, incapable de se démocratiser et indifférent à l'inégalité sociale, se heurte à partir de 1900 à une opposition croissante.

- Son renversement marque le début de la révolution mexicaine , déclenchant au nord les soulèvements des constitutionnalistes et de Pancho Villa , tandis qu'au sud s'étend la révolution agraire prônée par Emiliano Zapata .

Après avoir vaincu Pancho Villa, les constitutionnalistes font adopter en 1917 la Constitution de Querétaro, qui est encore en vigueur de nos jours. A la fondation du PNR (Parti national révolutionnaire) en 1929 succède en 1946 le PRI (Parti révolutionnaire institutionnel), qui vient de fêter son 70è anniversaire.

Elu en 1934, le président Cardenas -père de l'actuel maire de Mexico- incarne aussi l'esprit révolutionnaire en étendant la réforme agraire et en nationalisant la production pétrolière. Après lui, se succèdent tour à tour à la tête de l'Etat mexicain, pour des mandats de six ans non renouvelables :

- de 1940 à 1946, Manuel Avila Camacho,

- de 1946 à 1952, Miguel Aleman, premier président civil,

- de 1952 à 1958, Ruiz Cortines,

- de 1958 à 1964, Adolfo Lopez Mateos, le général de Gaulle effectuant en 1964 son célèbre voyage au Mexique,

- de 1964 à 1970 ; Gustavo Diaz Ordas, qui relança la réforme agraire mais réprima très durement en 1968 les manifestations étudiantes au moment où Mexico accueillait les Jeux Olympiques,

- de 1970 à 1976, Luis Echeverria Alvarez,

- de 1976 à 1982, José Lopez Portillo, sous la présidence duquel la découverte d'immenses réserves pétrolières permet une brève relance qui se solde par une crise majeure,

- de 1982 à 1988, Miguel de la Madrid, puis, de 1988 à 1994, Carlos Salinas de Gortari se trouvent confrontés à la chute des revenus pétroliers et au problème du remboursement de la dette extérieure. Le début de l'année 1994 est marqué à la fois par l' entrée en vigueur de l'ALENA et par l' insurrection de l'EZLN (armée zapatiste de libération nationale) dans le Chiapas ,

- enfin, depuis 1994 et jusqu'en l'an 2000, Ernesto Zedillo est chef de l'Etat : après avoir surmonté grâce à l'aide internationale, essentiellement américaine, la grave crise économique et financière de décembre 1994, il demeure confronté à une situation économique fragile tandis que la scène politique intérieure connaît des évolutions historiques dans le sens d'une démocratisation réelle du régime (cf. première partie ci-dessous).

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