B. 2.3.2. LE POIDS DES SYNDICATS EST PLUS FAIBLE AU SUD DE L'EUROPE

Un indicateur de l'importance des syndicats est le taux de syndicalisation 28 ( * ) (rapport des salariés syndiqués sur la population salariée). Au niveau mondial, celui-ci a connu une tendance à la baisse depuis le début des années 70. Toutefois, en Europe l'évolution n'est pas uniforme. En effet, si le taux de syndicalisation a baissé dans les pays qui avaient au milieu des années 80 un taux de syndicalisation faible, la part des salariés syndiqués a augmenté entre 1985 et 1995 dans les pays à forte tradition syndicaliste. L'Espagne fait exception dans le groupe des pays à faible taux de syndicalisation, puisque ce dernier est en légère hausse sur la période. On peut grossièrement distinguer trois groupes de pays en 1995. Le premier réunit les pays à faible syndicalisation (taux inférieur à 20%) : la France , les Etats-Unis et l'Espagne. Un groupe intermédiaire où la part des travailleurs syndiqués est comprise entre 20 et 50% : le Japon, le reste de l'Europe du Sud (Grèce, Portugal et Italie ), l' Allemagne , les Pays-Bas et l'Autriche, le Royaume-Uni et l'Irlande. Enfin, dans les pays nordiques et la Belgique plus de la moitié des travailleurs est syndiquée.

Graphique 2 : Taux de syndicalisation

Source : BIT, "Le travail dans le monde", 1997-97.

C. 2.3.3. L'ÉTENDUE DES CONVENTIONS COLLECTIVES NE REFLÈTE PAS TOUJOURS LE TAUX DE SYNDICALISATION29 ( * )

Quelles que soient les corrections de mesure apportées, le taux de syndicalisation demeure un indicateur très imparfait du pouvoir des syndicats. Ainsi, la France a le plus bas taux de syndicalisation des pays étudiés, mais il serait hâtif de conclure que les syndicats n'y jouent pas un grand rôle. Dans la plupart des pays d'Europe, la législation donne aux syndicats le droit exclusif de conclure des conventions collectives avec des employeurs ou des associations d'employeurs. Ces conventions collectives peuvent ensuite faire l'objet d'une extension administrative de la part du gouvernement. De fait, les gouvernements utilisent souvent cette possibilité car elle permet de mettre toutes les entreprises, en général d'un même secteur, dans les mêmes conditions de concurrence, et d'éviter ainsi une « concurrence sociale » excessive entre établissements. Elle a également le mérite, notamment dans les pays à faible représentativité syndicale, d'inciter les employeurs à prendre part à la négociation pour ne pas se voir imposer des conditions n'ayant pas intégré leur point de vue. A l'inverse, les salariés, se sachant protégés, sont moins incités à s'impliquer personnellement dans l'action syndicale, ce qui contribue à baisser le taux de syndicalisation dans les pays pratiquant l'extension administrative des conventions.

De fait, beaucoup de pays d'Europe continentale sont caractérisés par des taux de couverture des conventions collectives30 ( * ) très supérieurs aux taux de syndicalisation ; les conventions collectives s'appliquent généralement à l'ensemble des salariés concernés et non aux seuls affiliés des organisations syndicales signataires. A l'inverse, dans les pays à fort taux de syndicalisation comme la Suède et le Danemark, il n'y a pas d'extension administrative des conventions collectives. Le Royaume-Uni et l'Irlande, comme d'ailleurs les Etats-Unis et le Japon, sont différents puisque la syndicalisation est faible et les conventions collectives sont strictement limitées aux entreprises où il y a des syndicats, et souvent applicables aux seules personnes syndiquées.

Enfin, il est important de noter que les conventions collectives ne portent pas seulement sur les salaires, mais également sur les conditions de travail, de licenciement, la formation professionnelle, les systèmes de retraites d'entreprise, l'introduction de nouvelles technologies, les procédures de règlement des conflits, certains groupes de travailleurs (femmes, handicapés, etc...). Il arrive même que les conventions collectives ne traitent que partiellement la question des salaires, le plus souvent en instituant des règles ou augmentations minimales, ou des augmentations moyennes à répartir entre les secteurs ou les catégories de salariés (Finlande, Norvège).

Graphique 3 : Syndicalisation et couverture des conventions collectives

Source : BIT, "Le travail dans le monde", 1997-97, OCDE (1994)

* (9) 28 Les taux de syndicalisation sont publiés par le BIT dans « Le travail dans le monde », 1997-98. Par syndicats, le BIT entend « toute organisation constituée en majorité de salariés, dont les principales activités incluent la négociation des taux de salaire et des conditions d'emploi ». Il s'agit essentiellement des organisations de salariés et des associations professionnelles, mais en sont exclus, les travailleurs indépendants. Parfois, les chômeurs, les retraités ou les travailleurs indépendants peuvent être membres d'un syndicat (46% des syndiqués en Italie, 36% en Belgique, 19% en Suède, 18% aux Pays-Bas et en Autriche, 6% en France). Le BIT s'efforce de corriger les statistiques pour ne conserver que les salariés. Le taux de syndicalisation rapporte les effectifs syndicaux ainsi calculés à la population salariée, même si certaines catégories de salariés peuvent ne pas avoir le droit de se syndiquer (hauts fonctionnaires, militaires, police, enseignants,...).

* (10) 29 Comme le précise le BIT, les données concernant les conventions collectives sont issues de sources très diverses, ce qui rend les comparaisons internationales sujettes à caution. Il est vraisemblable que l'échantillon de pays retenus ici offre plus d'assurance. Il n'en reste pas moins vrai qu'il ne s'agit que d'ordres de grandeur.

* (11) 30 Part des salariés couverts par une convention collective.

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