III. QUELLE APPRÉCIATION PORTER SUR CE DISPOSITIF AU REGARD DES DROITS DES FEMMES ET DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES ?

A. ÉLECTIONS AU SCRUTIN PROPORTIONNEL

1. Élections européennes

Les députés européens français sont élus à la proportionnelle intégrale, sur une liste nationale. Même si le taux de féminisation au sein de la délégation française au Parlement européen atteint actuellement 40 %, l'alternance homme-femme pour ces élections ne saurait ni desservir le droit des femmes ni contrevenir à l'égalité des chances entre les femmes et les hommes, quelles que soient les réserves de principe que puisse inspirer à certains l'inscription dans la loi d'une règle aussi strictement paritaire.

2. Élections sénatoriales

Particulièrement minoritaires au Sénat, les femmes verront théoriquement leurs chances d'accéder à la Haute Assemblée renforcées par l'abaissement du seuil d'application du scrutin proportionnel aux départements comportant 3 ou 4 sièges à pourvoir qui résultera de la réforme du mode d'élection des sénateurs en cours d'examen par le Parlement.

Les listes, paritaires, doivent-elles être en outre composées selon la stricte alternance un homme-une femme préconisée par l'Assemblée nationale ?

Une particularité de ce scrutin est le petit nombre de sièges à pourvoir dans chaque département. Les listes comportent donc peu de noms : 7 candidats au maximum, sauf dans les deux départements les plus peuplés (Nord : 11 sénateurs ; Paris : 12 sénateurs). Chaque liste n'obtenant, sauf exception, que 2 ou 3 élus au plus, le risque est fort que les candidates figurent dans bien des cas en position inéligible. La parité par groupe de six candidats ou candidates ne suffit pas à écarter ce risque. L'alternance stricte paraît donc mieux à même de contribuer à féminiser notre assemblée.

3. Élections régionales

S'agissant d'élections au scrutin proportionnel avec prime à la liste majoritaire, à deux tours, l'alternance stricte un homme-une femme pouvait avoir des inconvénients, en particulier lorsqu'il y a fusion de liste pour le second tour.

La parité de candidatures par groupes de 6 personnes devrait, d'après des simulations effectuées, faire passer le taux de féminisation dans les conseils régionaux de 25 % à 42 %, ce qui ne paraît pas irréaliste et ce qui laisse une marge pour la composition de chaque liste et de chaque conseil permettant de tenir compte des situations concrètes.

4. Élections municipales

Les élections municipales dans les communes de 3 500 habitants et plus, auxquelles s'applique le même mode de scrutin qu'aux régionales -scrutin proportionnel avec prime à la liste majoritaire, possibilité de fusion des listes pour le deuxième tour- appellent les mêmes observations et les mêmes solutions : parité par groupe de six personnes sur les listes, avec pour conséquence 42 % de femmes élues.

Il faut rappeler que, sur les 36 679 communes de France, seules 2 701 (regroupant 66,56 % de la population) ont plus de 3 500 habitants, et 33 978 (regroupant 33,44 % de la population) en comptent moins de 3 500.

Sur un total de 500 000 conseillers municipaux, 100 000 seulement sont actuellement élus au scrutin proportionnel.

Le projet de loi gouvernemental laissait donc en dehors du champ de la parité de candidatures la très grande majorité des communes et 400 000 conseillers municipaux élus au scrutin majoritaire.

Pour les élections municipales dans les communes de moins de 3 500 habitants, les bulletins, qui peuvent comporter plusieurs noms, ont la forme d'une liste mais le panachage est possible et les voix sont décomptées candidat par candidat. L'article L. 256 du code électoral distingue, en deçà, de 3 500 habitants, les communes de 2 500 habitants et plus dans lesquelles les candidatures isolées sont interdites et les bulletins distribués aux électeurs doivent comporter autant de noms que de sièges à pourvoir. Les électeurs conservent cependant le droit de déposer dans l'urne des bulletins dont la liste est incomplète.

En décidant d'abaisser le seuil d'application du scrutin proportionnel aux communes de 2 000 habitants, l'Assemblée nationale a inclus dans le champ d'application de la loi 1 924 communes supplémentaires (15,25 % du total) regroupant environ 5 millions d'habitants (8,38 % de la population).

Certes, cette disposition peut sans doute susciter plusieurs critiques : transgression de l'engagement gouvernemental de légiférer à scrutin constant ; méconnaissance par le droit électoral du seuil de 2 000 habitants. Ce seuil est utilisé dans la nomenclature de l'Insee pour distinguer les communes rurales (moins de 2 000 habitants) des communes urbaines (plus de 2 000 habitants).

Cependant, sans se prononcer sur les arguments de nature politique et juridique, ce qui est du ressort de la commission des Lois, il semble que l'extension du champ d'application de la loi à quelque 2 000 communes supplémentaires ne peut avoir que des effets bénéfiques au regard de l'égal accès des femmes et des hommes aux conseils municipaux concernés.

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