E. RÉDUIRE L'IRRESPONSABILITÉ DES ACTEURS

1. L'interdiction des prêts en dernier ressort est une vue de l'esprit

Le risque d'irresponsabilité des acteurs de marché et la probabilité de crises financières qui en découle est, on l'a mentionné, entretenu par la perspective d'interventions publiques qui, jouant comme une assurance sans primes, introduit un fort risque moral.

Cette situation irritante suscite la tentation de prohiber le recours de telles interventions. La suppression des prêts en dernier ressort ou d'autres formes gratuites d'assurance imposerait davantage de prudence aux acteurs de marché et supprimerait l'impression désagréable d'une socialisation des pertes subies par des intervenants qui savent, au contraire, bénéficier à titre exclusivement privé des bénéfices de leurs imprudences.

Mais, outre qu'une telle mesure ne saurait se décréter universellement 54( * ) , elle apparaît comporter un bilan coûts-avantages défavorable.

Il semble d'abord qu'une prohibition générale de ces interventions, à supposer même qu'elle permette de prévenir les comportements financiers imprudents - concept qui appelle une définition générale introuvable - ne supprimerait pas l'ensemble des occasions de crises qu'appellent par nature l'activité bancaire et le développement économique.

Dès lors, les autorités publiques confrontées à une crise, se trouveraient privées d'un instrument essentiel à leur résolution. Ainsi désarmées, elles ne pourraient que laisser se développer des crises systémiques qui, par contagion, affectent les acteurs dont la responsabilité directe dans des crises est nulle. Il ne s'agirait pas d'autre chose que de " jeter le bébé avec l'eau du bain ".

L'élimination a priori de tout prêteur en dernier ressort doit être écartée comme constituant une mesure inappropriée.

L'existence d'un prêteur en dernier ressort est donc nécessaire pour faire face aux crises systémiques. Mais le problème systémique que le prêteur en dernier ressort engendre doit, quant à lui, être traité.


C'est à partir de ces deux considérations fondamentales qu'il faut aborder les questions essentielles que sont l'identité du prêteur en dernier ressort et les conditions que doit satisfaire son intervention.

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