Art. additionnels après l'art. 9
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2004
Art. additionnels après l'art. 10

Article 10

I. - L'article 69 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au b du II, la somme : « 274 400 EUR » est remplacée par la somme : « 350 000 EUR » ;

2° Au premier alinéa du III, les mots : « au régime normal d'imposition d'après le bénéfice réel à compter de la première année » sont remplacés par les mots : « au régime réel normal d'imposition à compter du premier exercice ».

II. - Les dispositions du I s'appliquent pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 1er janvier 2004. - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 10

Art. 10
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2004
Art. 11

M. le président. L'amendement n° I-23 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« I. - L'article 63 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont aussi considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, à l'exclusion de ceux provenant des activités du spectacle. »

« II. - Les dispositions du I s'appliquent pour la détermination des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2004.

« III. - La perte de recettes résultant, pour les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties découlant de l'application du I à compter de 2004 est compensée par un prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale.

« La compensation est égale, en 2004, au produit obtenu en multipliant la perte de bases résultant, pour chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de l'exonération par le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties appliqué en 2003 dans la collectivité ou l'établissement.

« Pour les communes qui, au 1er janvier 2003, étaient membres d'un établissement public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit de l'établissement pour 2003.

« Pour les communes qui sont membres d'un établissement public de coopération intercommunale soumis, à compter du 1er janvier 2004, aux dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, le taux appliqué en 2003 dans la commune est majoré du taux voté en 2003 par l'établissement.

« Pour les années 2005 à 2008, la compensation est égale à 80 %, puis 60 %, 40 % et 20 % de la somme perçue en 2004 par chaque collectivité au titre de la compensation mentionnée plus haut. A compter de l'année 2009, aucune compensation ne sera versée au titre de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties visée au I.

« IV. - La perte de recettes résultant, pour les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, de l'exonération de taxe professionnelle découlant de l'application du I à compter de 2004 est compensée par un relèvement, à due concurrence, du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale.

« La compensation est égale, en 2004, au produit obtenu en multipliant la perte de bases résultant, chaque année et pour chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de l'exonération par le taux de taxe professionnelle appliqué en 2003 dans la collectivité ou l'établissement.

« Pour les communes qui, au 1er janvier 2003 étaient membres d'un établissement public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit de l'établissement pour 2003.

« Pour les communes qui sont membres d'un établissement public de coopération intercommunale soumis, à compter du 1er janvier 2004, aux dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, le taux appliqué en 2003 dans la commune est majoré du taux voté en 2003 par l'établissement.

« Pour les années 2005 à 2008, la compensation est égale à 80 %, puis 60 %, 40 % et 20 % de la somme perçue en 2004 par chaque collectivité au titre de la compensation mentionnée plus haut.

« A compter de l'année 2009, aucune compensation ne sera versée au titre de l'exonération de taxe professionnelle visée au I.

« V. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe profesionnelle pour des activités de préparation, d'entraînement et d'exploitation des équidés domestiques, à l'exclusion de ceux provenant des activités du spectacle, est compensée à due concurrence par la création, au profit de l'Etat, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit ici d'un sujet...

M. Michel Moreigne. ... cavalier ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, monsieur Moreigne ! C'est un sujet cavalier, mais ce n'est pas un cavalier ! C'est précisément dans la loi de finances qu'un tel dispositif doit figurer.

Cet amendement concerne la réforme, attendue depuis longtemps, du statut fiscal des entreprises équestres. Cette réforme est prévue dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, que M. Hervé Gaymard présentera au Parlement à une date encore indéterminée. Or, dans ce texte figure un dispositif, de nature strictement fiscale, relatif aux activités équestres, plus précisément aux activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, à l'exclusion de ceux relevant des activités du spectacle.

Il s'agit de soumettre l'ensemble de ces activités au régime des bénéfices agricoles, ce qui est bien, mes chers collègues, une disposition de nature fiscale, qui trouvera mieux sa place dans une loi de finances que dans un texte de portée sectorielle.

Le changement de régime dont il s'agit emporte des conséquences de différentes natures, en particulier en termes de fiscalité locale, puisque les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés ne percevront plus de recettes au titre de la taxe professionnelle et de la taxe foncière sur les propriétés bâties lorsque le régime s'appliquera de manière définitive.

Cette perte de recettes résultera non pas de la décision des assemblées délibérantes, mais celle de l'Etat de changer le statut fiscal des entreprises équestres. Il importe dès lors de prévoir une compensation, au moins transitoire. Nous suggérons ici qu'elle prenne une forme dégressive sur cinq ans. Ce serait justice pour les collectivités locales qui concentrent sur leur territoire un nombre important d'activités de cette nature. Beaucoup de communes seront ainsi affectées par le changement de régime projeté, et leur situation est tout à fait digne d'intérêt.

Monsieur le ministre, il convient d'insister sur l'utilité de cette réforme, qui doit être de nature à favoriser le développement des activités équestres. Ces dernières, il faut le rappeler, représentent une activité importante pour les territoires ruraux concernés, ainsi, d'une manière générale, que pour la compétitivité de notre pays, car la filière équestre est loin d'être négligeable en termes d'emploi, en termes d'activités induites et, le cas échéant, en termes d'aménagement du territoire.

Le groupe d'études « cheval » de la Haute Assemblée, qui est présidé par notre collègue Ambroise Dupont, appelle de ses voeux cette réforme depuis un certain temps. L'initiative prise par la commission des finances l'est en complet accord avec ses membres. Nous ne saurions oublier, monsieur le ministre, que cette réforme a été annoncée au haras du Pin il n'y a pas si longtemps et qu'il s'agit là d'une avancée accueillie de façon très positive par l'ensemble des professionnels de la filière.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le rapporteur général, c'est en effet en juillet dernier que M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, M. Jean-François Lamour, ministre des sports, et moi-même avons présenté ensemble la nouvelle politique de promotion de la filière « cheval » dans notre pays, visant à développer des activités qui représentent de très nombreux emplois.

Le texte qui devait porter la disposition fiscale en question devrait être inscrit à l'ordre du jour du Parlement du premier semestre de l'année prochaine, mais nous savons tous que des élections se tiendront en 2004 et que, de ce fait, le calendrier des travaux parlementaires risque d'être très chargé au cours de cette période. Je crains donc que l'examen du projet de loi évoqué par M. le rapporteur général n'intervienne très tardivement.

C'est pourquoi Hervé Gaymard, Jean-François Lamour et moi-même avons pensé que la solution consistait à introduire la disposition fiscale dans le projet de loi de finances.

Cela étant dit, j'aurais naturellement mauvaise grâce à émettre un avis défavorable sur un amendement qui tend à appliquer un principe défendu constamment par la commission des finances, celui de l'inscription des dispositions fiscales exclusivement dans les lois de finances.

Sur un plan plus général, je ne m'étendrai pas sur l'efficacité attendue de cette politique, ce point ayant été très bien développé par M. le rapporteur général. Je me réjouis par avance que le Sénat veuille bien adopter l'amendement n° I-23 rectifié, pour lequel je lève le gage.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-23 rectifié bis.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais remercier M. le ministre de l'avis favorable qu'il vient d'exprimer, et formuler une observation sur la méthode adoptée.

Monsieur le ministre, en prenant cette initiative, la commission des finances replace dans leur cadre institutionnel les dispositions fiscales. Je rappelle en effet que, depuis le début de l'année 2003, nous avons été amenés à plusieurs reprises à voter des dispositions de nature fiscale lors de l'examen de textes tels que le projet de loi relatif au mécénat, aux associations et aux fondations, le projet de loi de programme pour l'outre-mer ou le projet de loi portant réforme des retraites. Je voudrais donc lancer un appel solennel au Gouvernement pour que l'examen du projet de la loi de finances redevienne l'occasion privilégiée des discussions fiscales.

Certes, je sais bien que, lorsque l'on construit un projet de loi, il est nécessaire de prévoir des moyens financiers pour lui donner sa portée et que, à défaut de crédits, le recours à la dépense fiscale est commode, ce qui a dû vous amener à constater, monsieur le ministre, au moment de préparer votre projet de loi de finances pour 2004, qu'il manquait quelques centaines de millions d'euros du fait des engagements ainsi pris en cours d'année.

Je forme donc le voeu que l'examen des projets de loi de finances redevienne le cadre de discussion des dispositions de nature fiscale.

Sur le fond, la disposition dont nous débattons arrive à son heure. C'est vous-même qui l'avez conçue, monsieur le ministre, et annoncée au haras du Pin, lors d'une réunion à laquelle participaient de très nombreux professionnels de la filière équestre.

Nous allons ainsi abroger des mesures disparates dont l'application entraînait beaucoup d'arbitraire. Les professionnels concernés pouvaient jusqu'à présent relever du régime des bénéfices industriels et commerciaux, de celui des bénéfices agricoles ou même du régime des bénéfices non commerciaux. En outre, l'interprétation des textes pouvait varier d'un département à l'autre, ce qui engendrait une insécurité juridique et, bien souvent, une crispation des relations entre les contribuables concernés et l'administration. Nous allons donc mettre un terme à cette situation, et je pense que M. Gaymard n'aura pas à se plaindre de notre intervention. En tout cas, le dispositif s'appliquera dès le 1er janvier 2004.

Cela est important, car la filière équestre mobilise de très nombreux professionnels et contribue à l'aménagement du territoire, ainsi qu'à l'agrément de la vie dans le monde rural. Elle peut constituer un bon levier de développement dans beaucoup de nos départements et de nos régions. Nous serons nombreux, dans cet hémicycle, à nous réjouir de l'adoption de ces dispositions qui, pour partie, s'appliquaient déjà, mais sur des bases juridiques implicites, définies par voie d'instructions administratives, sans que les intéressés soient à l'abri de redressements fiscaux. Un sujet d'inquiétude disparaîtra ainsi.

De surcroît, les conséquences en matière de TVA qu'aura l'entrée en vigueur du dispositif permettront certainement à la filière de retrouver sa compétitivité, puisque, dans des régions comme la Basse-Normandie, une rude concurrence venue d'Irlande s'est parfois fait sentir. Il n'est donc pas exclu que certaines activités d'élevage reviennent s'implanter en Basse-Normandie ou dans d'autres régions françaises.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-23 rectifié bis.

M. Thierry Foucaud. Le groupe CRC s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 10.

L'amendement n° I-22, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« A. Le code général des impôts est ainsi modifié :

« I. - L'article 69 D est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les groupements mentionnés à l'article 71, créés à compter du 1er janvier 2004, et dont les résultats sont imposés dans les conditions prévues à l'article 8, sont soumis au régime d'imposition d'après le bénéfice réel. »

« II. - Après l'article 69 D, il est inséré un article 69 E ainsi rédigé :

« Art. 69 E. - Les exploitants agricoles qui s'installent pour la première fois à compter du 1er janvier 2004 sont soumis au régime d'imposition d'après le bénéfice réel. »

« B. La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du A ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette année, la commission des finances a mis en place un groupe de travail relatif à la réforme de la fiscalité agricole. Le président de la commission, M. Jean Arthuis, le rapporteur spécial, M. Joël Bourdin, et moi-même avons consacré un certain nombre de séances à l'examen des questions d'intérêt général relatives aux différents aspects de la fiscalité agricole et aux évolutions de cette dernière en vue de sa modernisation et d'une meilleure lisibilité. C'est donc dans ce cadre, et après avoir auditionné un grand nombre de responsables agricoles, en particulier les dirigeants des grandes institutions, que nous avons élaboré cet amendement.

Le régime du forfait collectif agricole concerne aujourd'hui plus de la moitié de l'effectif total des exploitants agricoles. Ce régime a été mis en place en 1949. Il résulte du fait que, à l'époque, de très nombreuses exploitations agricoles ne disposaient pas d'une réelle comptabilité et n'étaient donc pas susceptibles d'envisager une imposition au bénéfice réel.

La question du maintien d'un tel régime spécifique d'imposition dans le secteur agricole peut se poser aujourd'hui, car cet état des choses constitue sans doute, pour certaines exploitations, un obstacle pour se doter d'une comptabilité précise et fiable. En outre, beaucoup de jeunes agriculteurs choisissent souvent, après leurs deux premières années d'installation, de rester au régime du forfait alors qu'objectivement il serait sans doute plus avantageux pour eux d'opter pour une imposition au bénéfice réel.

L'amendement n° I-22 vise à restreindre de façon progressive le champ d'application du forfait collectif, en soumettant toute nouvelle installation agricole à l'imposition au bénéfice réel, à compter du 1er janvier 2004, cette mesure s'appliquant, par souci d'harmonisation, aux groupements agricoles d'exploitation en commun constitués à partir de la même date.

Il nous paraît utile, en ce domaine comme en d'autres, d'anticiper sur les orientations fiscales de l'avenir. L'examen du projet de loi de finances est un moment plus approprié pour évoquer de telles orientations que la discussion de telle ou telle disposition de circonstance que l'on examinerait à partir de demandes, aussi justifiées soient-elles, émanant des milieux professionnels.

Telles sont les quelques explications que je souhaitais donner sur cet amendement, qui traduit notre souci de voir évoluer très progressivement la situation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le rapporteur général, vous souhaitez, par cette mesure, réduire progressivement le nombre d'exploitants agricoles aujourd'hui placés sous le régime du forfait, qui, chacun le sait, ne constitue pas le régime d'imposition le plus moderne. Toutefois, comme en matière de bénéfices industriels et commerciaux ou de bénéfices non commerciaux, il serait logique de lier une telle réforme à la création d'un régime de micro-entreprises agricoles. Il est, en effet, important de ne pas traiter les agriculteurs plus sévèrement que l'ensemble des autres professionnels, en les privant, à la différence des entreprises industrielles et commerciales et des exploitations non commerciales, d'un régime déclaratif allégé. A cet égard, vous savez combien le Gouvernement est attentif à l'installation des jeunes en agriculture, et prend garde à ne pas les dissuader de s'installer.

Cela étant dit, votre amendement pose de très bonnes questions, notamment sur le sens d'un régime forfaitaire d'imposition en matière agricole. Permet-il aux agriculteurs de gérer de manière dynamique et performante leur exploitation ? Tient-il compte des réalités actuelles de l'agriculture française ? Autant de questions auxquelles je serais tenté de répondre par la négative, mais on ne saurait conclure définitivement sans une consultation attentive et préalable de l'ensemble des professionnels concernés, et j'y suis, pour ma part, totalement disposé.

En résumé, monsieur le rapporteur général, je vous en donne acte, cet amendement représente une simplification, mais, à ce stade, il pose encore deux types de problème.

Le premier est technique. Il faudrait, par parallélisme avec les BNC, les bénéfices non commerciaux, et les BIC, les bénéfices industriels et commerciaux, mettre en place un régime de micro-entreprises agricoles. Par ailleurs, le traitement des GAEC, les groupements agricoles d'exploitation en commun, qui, à ma connaissance, repose sur la transparence, soulève encore quelques problèmes. Une nouvelle concertation avec les organisations de la profession serait utile pour s'assurer que le nouveau dispositif va dans le sens de leurs préoccupations économiques.

Si vous en étiez d'accord, monsieur le rapporteur général, nous pourrions utilement mettre à profit les semaines à venir pour approfondir la question au plan technique sur les aspects que je viens de vous indiquer, voire pour que, dans la concertation avec les organisations professionnelles concernées, la norme adoptée réunisse le consensus le plus large possible.

Cela me conduit, à ce stade, à suggérer que l'on y travaille quelques semaines pour essayer de trouver un accord, plutôt que d'adopter aujourd'hui un texte qui ne serait pas complètement abouti et qui ne donnerait pas pleinement satisfaction.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, je vous remercie d'accepter d'entrer dans cette démarche. M. le rapporteur général a rappelé que la commission des finances avait constitué un groupe de travail et que celui-ci a rencontré les représentants des professions agricoles. Cette proposition répond à un souci de simplification.

La question est de savoir si le forfait a encore du sens aujourd'hui, en 2003. Comment peut-on périodiquement prétendre que les professionnels perdent de l'argent, alors que le bénéfice forfaitaire est toujours positif ? Comment peut-on créer une entreprise, quelle que soit sa taille, sans avoir quelques indicateurs pour mesurer son bon fonctionnement ? Ce n'est pas donc un bon service à rendre aux entreprises, quelles qu'elles soient, que de les laisser dans un système forfaitaire.

Aujourd'hui, nous devons reconnaître que la tenue d'une comptabilité est un acte simple, qui a été largement facilité par les moyens modernes de traitement des données. A partir du moment où l'on tient une comptabilité, on est capable de le faire qu'il s'agisse d'une petite ou d'une grande entreprise. Jadis, beaucoup d'entreprises commerciales ou artisanales adoptaient la comptabilité pour des raisons fiscales. Paradoxalement, c'est l'administration fiscale qui a fait pénétrer la comptabilité dans les entreprises, au point même, quelquefois, d'assister à des situations un peu extravagantes dans lesquelles la sincérité fiscale transcendait, en quelque sorte, la sincérité des comptes, comme si la norme fiscale s'était imposée à la norme comptable de gestion, celle dont ont besoin les responsables d'entreprise pour y voir clair et conduire leurs opérations le mieux possible.

Sommes-nous d'accord pour dire que la comptabilité est maintenant le moyen de la lucidité pour tous ceux qui entreprennent ? Dans le cadre d'un projet de loi d'orientation fiscale telle que décrite par le rapporteur général dans le débat récent sur les prélèvements obligatoires, une réflexion utile est à conduire sur les notions de micro-entreprise, de régime du forfait, de régime de comptabilité simplifiée et de régime réel. Je vous avoue que je finis par avoir des doutes à propos de l'opportunité de maintenir ces distinctions. Les formalités déclaratives sont sans doute allégées, simplifiées, mais la comptabilité sera toujours la même.

Et peut-être pourrions-nous simplifier considérablement notre législation en faisant l'économie de toutes ces ségrégations déclaratives qui sont suspectes de répondre à un souci de gesticulation. Devant un parterre nombreux, revendicatif, il faut pouvoir dire que l'on fait quelque chose d'hyper-simplifié. Je ne suis pas sûr que le résultat soit toujours à la hauteur de la proclamation.

Nous aurions donc intérêt à conduire une réflexion au nom de la sincérité et de la simplification, pour voir s'il y a encore matière à maintenir autant de régimes différents. Or si nous le faisons pour l'agriculture, il faudra également le faire pour les commerçants et pour les industriels ainsi que pour les professions non commerciales. Les colonnes du temple risquent d'être mises à l'épreuve, car un certain nombre d'officines ou d'institutions représentatives de représentation des professions aiment bien avoir leur régime particulier. Mais s'agit-il d'une simplification ? D'autant qu'en agriculture, on se livre volontiers à des actes commerciaux, dans le cadre d'une pluriactivité, ce qui va dans le sens de l'amélioration de la rentabilité des entreprises agricoles.

Aussi, dans la réflexion qui va s'engager, je souhaite, monsieur le ministre, que nous puissions adopter la même démarche pour l'ensemble des secteurs : BNC, BIC et bénéfices agricoles. Aurons-nous aussi l'audace d'émettre l'hypothèse que BNC, BIC et bénéfices agricoles relèvent des mêmes problématiques d'entreprise et qu'une vraie simplification consisterait à harmoniser ces différents régimes ? Cela ne nuirait en aucune façon aux exigences de gestion pour conduire un cabinet libéral, une entreprise artisanale, un commerçant, quelle que soit la dimension de l'entreprise, ou une exploitation agricole. Sortons de ces vieux schémas si nous voulons réformer résolument, intelligemment et positivement !

Voilà le souhait que je me permets d'exprimer à ce stade du débat. Sans doute M. le rapporteur général va-t-il envisager le retrait de notre amendement. Nous devons reprendre la discussion avec nos interlocuteurs le plus rapidement possible. S'agissant des GAEC, certes un problème pose si un jeune s'installe en optant pour le bénéfice réel alors que ses associés sont imposés au forfait. Mais qu'est-ce qui empêcherait ces associés de passer au bénéfice réel ? Ne pourrait-on pas dédramatiser ces questions et sortir d'un rituel quelque peu corporatiste ? Comment peut-on être associé, dans un GAEC ou dans toute autre structure sociétaire, sans rendre des comptes, sans tenir une comptabilité ?

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

M. Philippe Adnot. Cet après-midi, la profession agricole m'a saisi en catastrophe, car elle a été surprise de la rapidité des propositions de M. le rapporteur général. Selon elle, ces propositions représentent une catastrophe, plus aucun jeune ne pourra s'installer, plus aucun GAEC ne pourra exister.

M. Jean Arthuis, président de la commssion des finances. C'est absurde !

M. Philippe Adnot. J'ai expliqué à mes interlocuteurs qu'ils n'étaient pas tombés sur le bon « client ».

En effet, je crois très sincèrement que le fait d'être au réel n'empêche pas un jeune de s'installer.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, et M. Roland du Luart. Bien au contraire !

M. Philippe Adnot. Aujourd'hui, quand un jeune qui a passé un BTS devient agriculteur, il me paraît assez rationnel qu'il mette en pratique les techniques qu'il a apprises, qu'il soit capable de faire correctement des analyses financières. Je ne vois donc pas en quoi cela empêcherait un jeune de s'installer.

Par ailleurs, je ne vois pas comment on pourrait faire cohabiter dans un GAEC des agriculteurs qui seraient au réel et des agriculteurs qui seraient au forfait au forfait. Si, dans un GAEC, on veut que le partage soit fait correctement, il me paraît nécessaire que la comptabilité soit établie globalement, complétement et sereinement. Ainsi, personne ne pourra prétendre que le partage a été fait au désavantage des uns ou des autres, ou que les textes n'ont pas été respectés.

Monsieur le ministre, cette disposition mérite en effet un examen complémentaire, notamment en ce qui concerne les micro-entreprises. Les arguments de la commission sont bons. L'agriculture ne doit pas craindre d'avoir à se plier à des gestes économiques normaux et légitimes.

Cela étant dit, une petite négociation complémentaire me semble utile pour parfaire le dossier. (M. le président de la commission des finances opine.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais tout d'abord remercier Philippe Adnot de son intervention très précise, très concrète et très utile.

Sur ces sujets, notre assemblée doit exercer toutes ses responsabilités, mes chers collègues. Notre rôle n'est pas de reprendre et de mettre en débat des propositions élaborées ailleurs. Notre rôle consiste à nous forger nos propres idées et à être capables d'en discuter avec les milieux professionnels concernés et avec le Gouvernement, pour faire avancer les choses.

L'agriculture est une grande force pour la France - nous aurons bientôt l'occasion, monsieur le ministre, de parler des biocarburants, qui illustrent la capacité d'innovation de l'agriculture française -, mais, à l'évidence, nous ne sommes plus à l'époque où le forfait est né. Notre agriculture a engendré et engendre de nombreuses entreprises, avec toutes leurs difficultés mais avec leur vie propre. L'option évoquée par le président Arthuis, qui vise à identifier, pour ces entreprises, des orientations de réforme fiscale de nature à les conforter, à leur permettre de disposer de tous les outils de gestion nécessaires, paraît servir l'intérêt général. Elle devrait rencontrer l'assentiment des professionnels. En tout cas, nous sommes prêts à en prendre le pari et à faire avancer ces sujets en étroite concertation avec eux. Monsieur le ministre, je terminerai en évoquant les régimes spécifiques de caractère intermédiaire.

Il faudra que l'on nous explique de manière précise à quelle nécessité correspond un régime spécifique de micro-entreprise agricole. En effet, il existe déjà un régime de bénéfice réel simplifié, qui vise les mêmes objectifs d'allégement des obligations déclaratives. Même si l'on veut aboutir à des systèmes d'application souples et simples, il n'en reste pas moins que des comptes sont des comptes, et qu'en deçà d'un certain niveau ce ne sont plus des comptes. Que ce soit pour les professionnels qui gèrent ces entreprises ou pour l'Etat, s'agissant de l'accomplissement des formalités fiscales, il faudra certainement trouver le juste milieu, un juste compromis entre les préoccupations légitimes qui peuvent s'exprimer.

Cela étant dit, en attendant de poursuivre le travail sur ces thèmes en concertation avec les professionnels, la commission retire l'amendement.

M. le président. L'amendement n° I-22 est retiré.

L'amendement n° I-220, présenté par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :

« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« I. - Dans l'article L. 731-19 du code rural, après les mots : "chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole", sont insérés les mots : "relevant d'un régime forfaitaire."

« II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ceux relevant d'un régime réel d'imposition peuvent, dans des conditions fixées par décret, opter pour une assiette de cotisations constituée de leurs revenus professionnels tels que définis à l'article L. 731-14 et afférents à l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues. »

« III. - Les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole relevant d'une régime réel d'imposition ayant exercé l'option prévue à l'article 13 de la loi n° 91-1407 du 31 décembre 1991 modifiant et complétant les dispositions du code rural et de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 relatives aux cotisations sociales agricoles et créant un régime de préretraite agricole ou à l'article 35 de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social ou à l'article 32 de la loi n° 94-114 du 10 février 1994 portant diverses dispositions concernant l'agriculture ou à l'article 9-II de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001 perdent le bénéfice de ladite option le 1er janvier 2001. L'assiette de leurs cotisations est déterminée selon les modalités prévues à l'article L. 731-15 du code rural.

« Pour 2004, à titre exceptionnel, les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole relevant d'un régime réel d'imposition peuvent exercer l'option prévue à l'article L. 731-19 du code rural jusqu'au 31 mars 2004.

« IV. - Le second alinéa du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Les revenus pris en compte sont constitués par la moyenne des revenus se rapportant aux trois années antérieures à celle au titre de laquelle la contribution est due. Lorsque le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole a exercé l'option prévue à l'article L. 731-19 du code rural, les revenus pris en compte sont constitués par les revenus afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle la contribution est due s'il relève d'un régime d'imposition forfaitaire et par les revenus afférents à l'année au titre de laquelle la contribution est due s'il relève d'un régime réel d'imposition ».

La parole est à M. Denis Badré.

M. Denis Badré. Le groupe de travail qui a été évoqué par le président et par le rapporteur général de la commission des finances avait précisément pour objet d'organiser notre débat et d'éviter une dispersion des amendements relatifs à la fiscalité agricole. Aussi, j'ai quelques scrupules à intervenir. Je le fais néanmoins, car les amendements n°s I-220 et I-221 posent de vrais questions.

Je le fais aussi avec scrupules, puisqu'il je suis un urbain et pas un rural mais sous le contrôle attentif de Marcel Deneux.

L'amendement n° I-220 vise à rétablir, à compter de 2003, la possibilité, pour les exploitants imposés au réel, d'opter pour le calcul de la cotisation sociale sur leur revenu de l'année n, cette option s'étendant également au calcul de la CSG.

Cette disposition a été supprimée en 2001, ce qui a eu des conséquences tout à fait négatives.

En effet, dans un régime réel, les charges sociales sont déductibles des résultats de l'exercice au titre duquel elles sont dues. Si les revenus sont irréguliers, la possibilité de réduire les charges générées par le résultat d'une année donnée constitue un impératif d'équité.

Si des charges élevées générées par un résultat élevé sont déduites de ce résultat élevé et que des charges faibles générées par un résultat faible sont déduites de ce résultat faible, l'équité fiscale est respectée.

Si, au contraire, les charges élevées sont déduites d'un résultat faible et que des charges faibles sont déduites d'un résultat élevé, l'exploitant est fiscalement pénalisé puisqu'il ne bénéficie pas d'une diminution de l'impôt sur son revenu en rapport avec les charges générées par ce revenu.

Je ne développe pas ces remarques. Je rappelle simplement qu'un certain nombre de dispositions prenant en compte ces difficultés avaient à un moment permis de progresser mais qu'elles ont été régulièrement gommées depuis.

Nous proposons de revenir à ces dispositions pour essayer d'aller vers plus d'équité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est quelque peu perplexe parce que le sujet est très technique, très complexe et a déjà été traité dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

J'ai cru comprendre que le dispositif ancien avait été adopté au nom de la simplification et que vous souhaitez revenir sur cette simplification.

M. Denis Badré. Pour des raisons d'équité !

M. Philippe Marini, rapporteur général. L'équité s'oppose à la simplicité, c'est une question d'arbitrage et de juste mesure !

Par ailleurs, est-ce bien en loi de finances et non en loi de financement de la sécurité sociale que ce problème d'assiette des cotisations sociales doit être traité ?

Etant assez partagé sur l'examen de ce dispositif complexe, au nom de la commission, je demande à M. le ministre délégué de bien vouloir nous livrer son avis.

M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le rapporteur général, cet amendement vise - je parle sous le contrôle de son auteur, M. Denis Badré - à substituer à l'année n - 1 pour le calcul des cotisations sociales et de la CSG.

Réintroduire une nouvelle assiette pour la CSG va à l'encontre de la démarche de simplification recherchée au travers de l'harmonisation des assiettes de la contribution et des cotisations sociales en agriculture. Revenir au système précédent alourdirait le calcul, par les caisses de mutualité sociale agricole, des cotisations sociales.

Par ailleurs - je parle toujours sous votre contrôle, monsieur Badré -, la profession agricole peut bénéficier d'un lissage des revenus, si besoin est, en recourant au calcul des cotisations sur une assiette triennale, laquelle constitue la réponse adaptée aux secteurs agricoles soumis périodiquement à des situations de crise.

Au total, le Gouvernement considère que l'amendement pourrait introduire une certaine complexité dans le traitement de situations qui peuvent déjà être prises en compte dans le droit actuel. Cela me conduit à solliciter le retrait de cet amendement pour éviter d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle suit l'avis du Gouvernement .

M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° I-220 est-il maintenu ?

M. Denis Badré. Je me range à l'avis de la commission du Gouvernement : je le retire.

Comme l'a dit M. le rapporteur général, il faut toujours trouver la bonne mesure entre équité et complexité. Il existe toutefois un vrai problème sur lequel il faut être attentif.

M. le président. L'amendement n° I-220 est retiré.

L'amendement n° I-221, présenté par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :

« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 732-59 du code rural est complétée par les mots suivants : ", ni supérieure à une fois le plafond prévu de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale."

« Ces dispositions s'appliquent à compter du 1er janvier 2004. »

« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Denis Badré.

M. Denis Badré. Cet amendement vise la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles. Il tend à établir un plafond de cotisations égal à une fois le plafond de la sécurité sociale et à plafonner les prestations, parce que l'agriculture est le seul secteur d'activité à ne pas disposer d'un plafond de cotisations, ce qui est tout à fait injuste.

M. le président. Quel est donc l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Le nouveau régime de retraite complémentaire obligatoire, mis en place par la loi du 4 mars 2002, est un régime par points dans lequel les prestations sont strictement proportionnelles aux cotisations.

Instaurer un plafonnement des cotisations aurait pour effet de diminuer et les cotisations des exploitants et le niveau de leur retraite, ce qui ne semble pas souhaitable dans la mesure où le nouveau régime a été créé en particulier pour augmenter les petites retraites agricoles.

En outre, il semblerait que ce plafonnement induise une perte de cotisations de plus de 20 millions d'euros pour le régime complémentaire agricole.

Compte tenu de ces indications, la commission est réservée et souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. Je vais citer des chiffres encore plus élevés que ceux du rapporteur général, mais qui vont tout à fait dans le sens de ses propos.

L'équilibre du financement du régime complémentaire des exploitants agricoles ne pourra être obtenu, en 2004, que moyennant une participation financière de l'Etat de 142 millions d'euros.

Dans ce contexte, votre amendement, cher Denis Badré, aboutit à réduire de 63 millions d'euros, dès 2004, le financement tiré des cotisations versées par les exploitants en activité. Vous comprenez dès lors qu'il soit impossible de l'accepter.

J'ajoute aux raisons données par M. le rapporteur général, auxquelles je souscris complètement, que l'équilibre financier du régime complémentaire obligatoire ne pourrait être obtenu que par un effort supplémentaire de la solidarité nationale. Or celle-ci a déjà été appelée à hauteur de 142 millions d'euros.

Ma dernière observation porte plus globalement sur le financement des retraites.

Dans le contexte de la réforme récemment votée, il n'est pas envisageable d'accepter que le seul régime complémentaire recevant une participation financière de l'Etat puisse fragiliser sa situation en se privant de ressources. Personne ne le comprendrait. Cela me conduit à solliciter le retrait de cet amendement, afin de m'éviter d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je partage l'avis de M. le ministre.

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

M. Philippe Adnot. Je souhaite soutenir l'amendement de mon collègue M. Denis Badré.

Les exploitants agricoles appartiennent à la seule profession pour laquelle on mélange le revenu de la personne et celui de l'entreprise et dont on taxe le revenu de l'entreprise avec des cotisations sociales.

Cette situation peut entraîner certains exploitants à payer des cotisations d'un niveau extraordinairement élevé, alors même que cet argent leur est nécessaire pour investir dans leur entreprise.

La bonne solution serait peut-être de ne pas retenir aujourd'hui cet amendement et de le présenter lorsque la commission aura fait progresser l'inscription de tous les exploitants au régime réel.

Finalement, la surcotisation des uns n'existe aujourd'hui que parce que les autres ne paient pas suffisamment par rapport à leurs revenus réels.

Lorsque ce travail de réflexion aura été fait, on pourra y ajouter la réflexion de Denis Badré et proposer une mesure plus juste.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ceci n'est pas spécifique aux agriculteurs, monsieur Adnot. C'est vrai pour toutes les professions indépendantes, qu'il s'agisse des commerçants, des artisans et des professions non commerciales exercées non en société mais à titre personnel.

L'une des réponses juridiques possibles est la mise en société pour distinguer la fraction du résultat qui correspond à un salaire. Mais cela suppose d'opter pour le régime des salariés et de payer des cotisations en conséquence, l'autre fraction du résultat étant, s'il y a un excédent, le bénéfice.

Il faudrait aussi que certaines institutions collectant les cotisations sociales revoient les bases d'assiettes. Prenons l'exemple d'une société dont les responsables avaient un certain niveau de rémunération. Après avoir investi, à un moment, l'affaire connaissant des difficultés, les responsables ont baissé leurs salaires. La MSA a alors procédé à des redressements, au motif que les prélèvements opérés sur le compte courant devaient être inclus dans les assiettes de cotisations des responsables.

Il serait bon de mettre à plat tous ces régimes, parce qu'il ne faut pas traiter différemment un commerçant, un artisan ou un agriculteur. Il y a des régimes particuliers dans l'évaluation des éléments d'actifs, s'agissant notamment des provisions et des amortissements. Cela étant, les principes généraux devraient être les mêmes pour tout le monde.

M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.

M. Denis Badré. Je remercie M. Philippe Adnot du soutien qu'il vient de m'apporter. Compte tenu de la qualité du débat, qui n'a fait que s'esquisser et qu'il faudra prolonger, je ne regrette ni d'avoir déposé cet amendement ni de ne pas l'avoir retiré tout de suite.

Cela dit, je le retire maintenant.

M. le président. L'amendement n° I-221 est retiré.