LE CODE PÉNAL DE 1810

La séance est présidée par Bernard BARBICHE,
professeur émérite de l'Ecole Nationale des Chartes

BERNARD BARBICHE,
président de séance

Je remercie très vivement Monsieur le premier président Lamanda de l'honneur qu'il m'a fait et de la confiance qu'il m'a témoignée en m'invitant à présider cette séance. Une confiance à laquelle je suis d'autant plus sensible que, comme il est notoire, je ne suis pas spécialiste des institutions du Premier Empire. J'ai enseigné à l'école des Chartes l'histoire des institutions de l'Ancien Régime et j'avais l'habitude de parler à mes élèves de l'ordonnance criminelle de 1670 plutôt que du code pénal de 1810. Cela dit, j'ai toujours pris beaucoup d'intérêt à observer les destinées de l'héritage législatif de la monarchie et à suivre jusqu'à nos jours les permanences et les ruptures qui marquent l'histoire de notre droit depuis cinq siècles.

Le bicentenaire du code pénal nous invite à cette réflexion, mais il n'est pas interdit, je pense, de saisir cette occasion pour élargir notre horizon aux quatre autres codes promulgués à partir de 1804. Tous sont à des degrés divers tributaires de l'ancien droit. Tout d'abord parce qu'ils ont été rédigés par des juristes qui ont été formés et qui ont commencé leur carrière avant la Révolution : Bigot de Préameneu, Tronchet, Maleville et Portalis, « le quatuor du code civil », étaient avocats (les deux premiers avaient exercé dans le Nord, aux parlements de Rennes et de Paris, les deux autres dans le Midi, à Bordeaux et à Aix, pays de droit romain). Portalis était dès avant 1789 un éminent spécialiste du droit du mariage. Le code pénal, lui, eut pour principal rédacteur Guy Jean-Baptiste Target, lui aussi ancien avocat, défenseur de Beaumarchais contre Göezmann puis du cardinal de Rohan dans l'affaire du collier de la reine. Ces juristes ont souvent trouvé leur inspiration dans les oeuvres doctrinales de l'Ancien Régime (comme celles de Robert Joseph Pothier) et dans les ordonnances de Louis XIV et de Louis XV. Les méthodes aussi présentent des analogies : le Premier consul a assisté à certaines séances préparatoires du code civil, comme l'avait fait Louis XIV pour l'ordonnance civile de 1667. De même que celle-ci a été dénommée « code Louis », le code civil a pris en 1807 le titre de « code Napoléon ». Les tribunaux ont été consultés. Il y a donc dans certains cas des continuités et des parallélismes évidents. Ainsi, le code de commerce de 1807 s'inspire largement de l'ordonnance de 1673 ou code marchand préparé par Colbert. Mais de tous les codes napoléoniens, le code pénal de 1810 est celui qui innove le plus. Ses auteurs ont cherché une voie médiane entre la sévérité extrême de l'Ancien Régime et l'indulgence du code pénal de 1791. Il en a été de même pour le code d'instruction criminelle de 1808, oeuvre de compromis entre la procédure inquisitoire fixée par l'ordonnance de 1670 et la procédure révolutionnaire à dominante accusatoire inspirée du modèle britannique. Encore ne faut-il pas exagérer ce qu'on a parfois appelé la barbarie des lois royales. Si les lois sont rigoureuses, leur application au XVIII e siècle était plus clémente qu'on ne l'imagine (à l'exception de quelques châtiments atroces mais rares tels que l'écartèlement des régicides), comme l'ont montré les travaux du professeur Benoît Garnot. Par ailleurs, la monarchie elle-même, à la fin du règne de Louis XVI, a sensiblement atténué son dispositif répressif. Quoi qu'il en soit, si l'on s'en tient aux textes, le code pénal se démarque de la législation royale. Il est le fruit d'une réflexion philosophique qui s'est développée à l'époque des Lumières (le grand nom de Cesare Beccaria, mais aussi ceux d'Helvétius, de Montesquieu, de Diderot, de Bentham, viennent immédiatement à l'esprit), et sur ce plan aussi, indépendamment de la technique législative, on trouve dans le dernier siècle de l'Ancien Régime les sources de son inspiration. C'est ce que va nous montrer le professeur Xavier Martin, professeur émérite de l'université d'Angers, historien des idées politiques et spécialiste plus particulièrement de l'époque révolutionnaire. On lui doit une dizaine d'ouvrages parus pour la plupart depuis 2001. Je retiendrai de cette abondante production : Nature humaine et Révolution française : du siècle des Lumières au code Napoléon (2002) ; Mythologie du code Napoléon : aux soubassements de la France moderne (2003) ; Retour sur un itinéraire : du code Napoléon au siècle des Lumières (2010). Sa communication d'aujourd'hui s'intitule « Les arrière-plans philosophiques dans la rhétorique du législateur de 1810 ».

Après avoir analysé les courants philosophiques qui ont influencé les rédacteurs du code pénal, nous allons maintenant voir ce qu'il est advenu de ce texte dans les deux premiers siècles de son existence. On peut résumer cette histoire en disant qu'elle a été la recherche toujours insatisfaite d'un difficile équilibre entre d'un côté la nécessité de punir les coupables, de donner réparation aux victimes et de rétablir l'ordre social troublé par le crime, et d'un autre côté le souci de donner aux criminels la possibilité de s'amender, en utilisant la prison devenue désormais une peine pour les resocialiser. Ce mouvement continu s'est accéléré au XX e siècle, surtout dans sa seconde moitié, avec entre autres cette mesure phare qu'a été l'abolition de la peine de mort en 1981 - une mesure qui avait déjà été débattue en 1791 -, mais aussi plusieurs lois « sécuritaires ». Nul n'est mieux qualifié pour traiter de cette évolution que le professeur Yves Jeanclos, de l'université de Strasbourg, éminent spécialiste de l'histoire du droit pénal et dont les ouvrages sont aujourd'hui ou vont devenir des usuels : La législation pénale de la France du XVI e au XVIII e siècle. Textes principaux (1996, dans la collection « Que sais-je ? ») ; Droit pénal européen : dimension historique (2009) ; et enfin un Dictionnaire du droit criminel et pénal qui vient juste de paraître. Sa communication s'intitule : « De 1810 à 2010 : le code de 1810 en mouvement. »

DU TEMPS DES LUMIÈRES A 1810 :
ANTHROPOLOGIE ET DROIT CRIMINEL

Xavier MARTIN,
professeur émérite de l'Université d'Angers

En 1808 et 1810, le législateur napoléonien se réfère sans cesse à l'antécédent de 1791 : c'est naturellement pour s'en démarquer, - non sans déférence. Or ce dernier emprunte beaucoup à Beccaria 169 ( * ) , lui-même tributaire des Lumières françaises, surtout d'Helvétius, dont Beccaria dit : « C'est lui qui m'a poussé avec force dans le chemin de la vérité » 170 ( * ) . Or Helvétius n'est aucunement criminaliste. Ce qu'il est ? Le vulgarisateur en chef de l' anthropologie du temps. Il est vrai que celle-ci conditionne l' humanisme , enjeu décisif sur le plan pénal aux années en cause. Peut-être est-il donc légitime, dans l'effervescence du droit criminel de 1789 à 1810 171 ( * ) , d' essayer le fil anthropologique.

Or l'anthropologie des Lumières françaises est réductionniste : elle a propension à réifier l'homme. Un état d'esprit dont les retombées, dans un premier temps, sont comme estompées par un optimisme superficiel sur la chose humaine (I), lequel, à l'expérience de la Révolution, s'efface devant un pessimisme résolu, qui donne du tranchant au réductionnisme, et bien sûr incline à la répression (II).

I. RÉDUCTIONNISME ET OPTIMISME D'ATMOSPHÈRE.

A. Beccaria, les Lumières.

1758 : De l'Esprit , d'Helvétius 172 ( * ) . Livre à scandale : le bruit en vient jusqu'à Milan. Beccaria a vingt ans, il publiera son beau traité six ans plus tard, et confessera que sa lecture de De l'Esprit fut décisive 173 ( * ) . Or que fait Helvétius ? Il réduit l'homme à la matière, et sa vie intérieure à une chimie des sensations . « Penser », « vouloir », « juger », c'est uniquement « sentir » : Helvétius le répète 174 ( * ) , qui proprement n'invente rien : il vulgarise du Condillac 175 ( * ) , lequel quant à lui restituait du Locke radicalisé 176 ( * ) ... Au bout du compte ? La négation - ce n'est pas peu - du libre arbitre en l'être humain. Qu'écrit Diderot ? « Il n'y a qu'une seule opération dans l'homme : c'est sentir », une opération « qui n'est jamais libre » 177 ( * ) . Qu'en déduit-il ? Que « le mot liberté est un mot vide de sens » 178 ( * ) . Qu'écrit d'Holbach ? « [L]e libre arbitre est une chimère » 179 ( * ) . Que dit Voltaire ? La liberté est « de toutes façons une belle chimère », il renchérira : « une chimère absurde » 180 ( * ) . Et tout s'enclenche, dans la logique du paradigme newtonien 181 ( * ) : ainsi allégé de son libre arbitre, l'homme se connecte intégralement au mécanisme universel, dont il reçoit son carburant, les sensations 182 ( * ) . Voltaire à nouveau : « Nous sommes de petites roues de la grande machine » 183 ( * ) ... « nous ne sommes que des roues de la machine du monde » 184 ( * ) ...

Cette théorie, dont La Mettrie posait les bases dans L'Homme Machine - titre « admirable » pour Voltaire 185 ( * ) - ladite théorie se généralise. Elle détermine, incidemment, l' absence d'un saut qualitatif entre l'humanité et l'animalité : « De l'animal à l'homme, la transition n'est pas violente, les vrais philosophes en conviendront », écrit La Mettrie 186 ( * ) , et Diderot dit même que « [t]out animal est plus ou moins homme » 187 ( * ) . Or « avec force » cette théorie sensationniste pousse Beccaria, entendions-nous, « dans le chemin de la vérité ». Et d'évidence, un tel système nie qu'on puisse être responsable... Le droit pénal régulera-t-il un monde sans faute ? Théoriquement oui... Le marquis de Sade, ce « verre grossissant » de l'esprit du temps, dira sans ambages : « Les crimes sont impossibles à l'homme » 188 ( * ) . Relisons Beccaria : « la vraie, la seule mesure des délits », écrit-il par exemple, n'est pas, « comme certains le pensent par erreur, l'intention du coupable », car elle « dépend de l'impression momentanée causée par les objets [...] » 189 ( * ) - orthodoxie sensationniste assez banale, purement conforme à ce qu'on lit dans De l'Esprit : « Nous sommes uniquement ce que nous font les objets qui nous environnent » 190 ( * ) .

La suite coule de source. Punir n'a plus d'objet. La question pénale se dé- moralise . Son droit s' objectivise , et se voit pour seul but l' utilité sociale . C'est son objet, précisément, chez Beccaria : rectifier le trajet d'un déviant, le remettre sur la voie de l'utilité commune, tout en dissuadant des imitateurs 191 ( * ) . Améliorer l'homme pour le mieux ployer au bonheur social ? Idée majeure des philosophes, épris par postulat d'une perfectibilité de l'étoffe humaine à retravailler. Régénérer les délinquants n'en est qu'un cas particulier : ce à quoi la prison , désormais, pourvoira ; c'est la grande nouveauté 192 ( * ) . Tout au contraire, sont décriées comme inutiles les peines physiques - dont celle qui tue.

Cette mésestime retentissante du suppliciel , chez Beccaria, il est usuel d'en créditer un humanisme effervescent. Or cet « humanisme », en réalité, est hypothéqué par les corollaires du sensationnisme évoqué plus haut, lequel se fait gloire, paradoxalement, de réduire l'homme à l'organique ; intelligence et sentiments (etc.) sont strictement affaire de fibres 193 ( * ) ... Dignité « humaine » ? Une idée douteuse là où fait défaut la nature humaine. « L'homme et l'animal , professait Diderot, ne sont que des machines de chair ou sensibles » 194 ( * ) . L'homme et l'animal, des « machines sensibles » ? Beccaria voit avant tout les hommes en tant qu' « êtres sensibles » 195 ( * ) , ce qui n'est que logique, et suffit sans doute à disqualifier l'horreur des supplices, mais qui concerne, en bonne rigueur, la multitude des animaux, - dont « l'animal bipède qui porte le nom d'homme », comme Diderot l'aimait dire, et Voltaire 196 ( * ) ... Ce qui se croit un sentiment d' « humanité », dans ces conditions, n'est guère autre chose qu'une empathie aiguë de sensibilités, très vulnérable - on l'éprouvera bientôt - aux variations circonstancielles.

Quant à l' utilité , suffit-elle à fonder un abolitionnisme ? Beccaria, tout compte fait, admet la peine de mort assez libéralement : d'une part, dans les circonstances d'anarchie sociale ; d'autre part, quand la mort apparaît comme la seule dissuasion efficace 197 ( * ) ... Critères incertains, sinon élastiques ; peut-on parler vraiment d'un abolitionnisme ?

Même observation sur nos philosophes, qui fortement « objectivisent » la peine de mort, - mais la conservent. Pour La Mettrie, « quoique le crime ne soit rien en soi », et que toute sanction soit inéquitable, « il faut bien enchaîner les fous, tuer les chiens enragés, et écraser les serpents » 198 ( * ) . Il voudrait, ailleurs, « qu'il n'y eût pour juges que d'excellents médecins » ; notable formule : « Eux seuls pourraient distinguer le criminel innocent du coupable » 199 ( * ) . Diderot, qui estime l'homme irresponsable et vilipende un jour sur deux la peine de mort 200 ( * ) , n'en concède pas moins « qu'il faut étouffer les mauvais sujets pour l'exemple » 201 ( * ) . [Identiquement, en notre temps, le biologiste Jean Rostand, si attaché au matérialisme des Lumières, et négateur sans équivoque du libre arbitre donc de la responsabilité 202 ( * ) , concède du moins au corps social « le droit de se protéger contre les protoplasmes antisociaux » 203 ( * ) .] Et quant à Voltaire, lorsqu'il nous explique que la peine de mort « tue inutilement de beaux hommes qui peuvent être utiles » 204 ( * ) , de toute évidence il laisse scintiller des a contrario qui font réfléchir 205 ( * ) . De même, lorsqu'il réprouve la pendaison pour vol d'une fille « d'une rare beauté » 206 ( * ) , il est ici trop clair que s'il se fût agi d'une beauté commune, l'abolitionnisme probablement eût été moins franc.

J'ose à peine le dire : Voltaire ne récuse ni la peine de mort, ni ses cruautés . « Les assassinats prémédités, dit-il, les parricides, les incendiaires méritent une mort dont l'appareil soit effroyable » 207 ( * ) ... ; on est là six ans après le livre de Beccaria. Détail inattendu : Voltaire oeuvra dans l'ombre, et a forgé des faux, pour qu'à Genève Rousseau fût condamné à mort 208 ( * ) , allant jusqu'à écrire, du Conseil compétent, qu' « il aura trop de prudence et de fermeté pour s'amuser seulement à faire brûler un livre à qui la brûlure ne fait aucun mal » 209 ( * ) . L'image contraire dont on le flatte est-elle donc usurpée ? Oui, assez nettement. Prenons l'affaire Calas. La veuve du supplicié ? « une petite huguenote imbécile », écrit-il. C'est d'ailleurs de famille : une nichée de « protestants imbéciles » 210 ( * ) . Les juges de Jean Calas ? « Assassins en robe noire », aime-t-il à marteler. Mais le dossier clos, il confie en douce : « J'ai toujours été convaincu qu'il y avait dans l'affaire des Calas de quoi excuser les juges » 211 ( * ) . Et ce n'est pas le pire. Bref, lui et les siens ont caricaturé la justice criminelle de l'État monarchique, comme au demeurant l'a fait Beccaria, dont les critiques « s'adressent davantage aux maux imaginaires qu'à l'état véritable du droit criminel de son siècle » 212 ( * ) . Non, la barbarie n'en constituait pas le lot quotidien. Pour nous en tenir à ce simple exemple, la présomption d'innocence, que volontiers l'on croit conquête de 1789, est un principe de l'ancien droit, que sans ambages rappelle Louis XVI en 1780 213 ( * ) . On doit savoir, au reste, que la réforme criminelle faisait plus que couver dès avant la Révolution, sur le seuil de laquelle nous voilà parvenus.

B. Le code criminel de la Constituante 214 ( * ) .

Sans doute est-il bon de le préciser : le mécanicisme, en 1789, a comme devant pignon sur rue. Parole de Sieyès : « Jamais on ne comprendra le mécanisme social si on ne prend pas le parti d'analyser la société comme une machine ordinaire » 215 ( * ) ; un type de formule qui, d'une part, n'est pas sans rappeler Beccaria 216 ( * ) , et d'autre part fait bon marché de tout libre arbitre chez les citoyens... Sur ce dernier point, relativisons... Il va de soi qu'au quotidien le réel s'oppose à l'escamotage de la liberté... Les législateurs révolutionnaires, c'est trop évident, ne postulent pas l'individu irresponsable, et « intègrent » bien sûr, dans leur champ conceptuel, la culpabilité. Ils le font d'autant plus, quant au code criminel, qu'ils y viennent un peu tard, après deux années gravement agitées : ce qui limite leur angélisme potentiel, donc par exemple aide au maintien de la peine de mort - que peu ont contestée (mais Robespierre en est 217 ( * ) ) ; une peine de mort qu'ils établissent même contre « [t]outes conspirations ou attentats ayant pour objet d'intervertir l'ordre de la succession au trône » 218 ( * ) . À la tribune, au demeurant, des divergences se font entendre : la rhétorique réactionnaire qui puissamment prédominera après Brumaire, est déjà là dix ans plus tôt, évidemment minoritaire, mais assez vive à l'occasion 219 ( * ) . Ceci étant dit, la part d' « humanisme » idéalisé qui deux ans plus tôt eût été plus forte, favorisant la perspective attendrissante (c'est un exemple) de « rendre l'innocence évidente » 220 ( * ) , ne fait pas défaut en 1791 : dans un pays régénéré, nous indique-t-on, la criminalité deviendra plus légère 221 ( * ) , et d'autant plus, d'ailleurs, - la chose passerait trop facilement inaperçue, - que le contrôle social se voudra plus étroit 222 ( * ) . Cette part d' « humanisme », entre autres aspects on l'identifie dans l'abolition des peines perpétuelles dont la flétrissure , le tout adossé à une thématique philanthropiquement régénératoire.

Mais cet « humanisme », - avions-nous noté, - n'a pas d'armature anthropologique. Étant comme poreux, en réalité il est saturé d'utilitarisme . Les mots efficace , efficacité , ou leurs antonymes, reviennent sans cesse dans le rapport inaugural de Le Pelletier de Saint-Fargeau en 1791 223 ( * ) . Souci légitime, l'efficacité, chez qui légifère ? C'est trop évident. Le tout est de savoir de quoi l'on parle, et de ne pas surestimer l' humanitaire là où domine visiblement l' utilitaire - dont l'omniprésente préoccupation d' exemplarité . L'humanisation des exécutions - par la guillotine ? Entre maints écueils, elle cherche un chenal d'exemplarité... Le tout carcéral , tellement « beccarien »... ? Pour l'exemple, encore... Souvenons-nous : tout est sensation . La peine capitale fait certes impression, mais trop éphémère. Rien ne peut valoir, explique Le Pelletier, « une suite prolongée de privations pénibles » 224 ( * ) . Avec la prison, nous dit-il encore, « l'exemple vivra efficacement avec le coupable » 225 ( * ) . D'où un duo d'impératifs : d'une part, que le jugement ne tarde pas - c'est « beccarien », très typiquement 226 ( * ) ; d'autre part, que la peine se purge près du lieu du crime, - pour faire sensation . Formule éclairante : si les condamnés ne sont pas visibles, « leurs douleurs sont absolument perdues pour l'exemple » 227 ( * ) . D'où l'appareil du pilori , - puis, en cours de peine, est-il proposé, dans la cellule même, ouverte au public, l' ostension mensuelle de l'incarcéré, pour les sensations 228 ( * ) . Si le goutte-à-goutte de l'expiation se distille ainsi près du lieu du crime, s'ensuivront, peut-on lire, de « profondes impressions ». Et l'on explicite : « [L]'affiche d'un jugement produit peu d'effet. On sait que tel coupable subit tel châtiment » plus ou moins loin d'ici, « on le sait ; mais on ne le voit pas ; on ne le sent pas » 229 ( * ) , etc.

Le mécanicisme est partie prenante - en filigrane : sous double rapport et d'automatisme, et d'ajustement. Quel ajustement ? Les peines sont voulues, à la Beccaria, « strictement et évidemment nécessaires » (art. 8 de la Déclaration de 1789), ce qui d'une part exclut la marque et les supplices, d'autre part rend les peines strictement personnelles, d'où l'extinction de l'abusive confiscation . Ces options, bien sûr, à titre incident, inclinent à flatter la philanthropie, dont elles font bannière... Mais leur essence profonde ? elle est d'ajustement rationalisateur.

Quant à l'automatisation, deux principes qui convolent, côté peines : leur légalité et leur fixité . Dès lors on peut sans risque établir des jurys . D'une part, et nous le savons, la France régénérée ne sera que peu criminogène - par hypothèse. D'autre part, l'évidence ordinaire des espèces criminelles raréfiées s'imposera au bon sens populaire des jurés, non adultéré par la « science » du droit. Les peines tomberont mécaniquement. Le tout, dans l'idéal, tournera sans à coups, avec en embuscade, au bout du processus, l'impassible couperet, dont la touche à la fois mécanique et « humaine » est un lieu commun chez ses concepteurs 230 ( * ) .

Brochant sur le tout, l'abolition du droit de grâce 231 ( * ) , dont saute aux yeux la dimension anti-royale, relève aussi de cette logique mécaniciste utopisante. Regardons-y. Un point auquel nos « philosophes », tout spécialement, sont allergiques, en ce qu'il offense le modèle cosmique mécanicisé, c'est au fait d'un Dieu qui personnellement vient interférer dans la destinée personnelle des hommes, et qui au demeurant y procède ... par la grâce , dont justement on parlait trop dans les querelles théologiques. Eh bien, le droit de grâce, en quelque sorte, a un statut analogique : dans la machine socio-pénale, il fait bavure - de libre arbitre ; il est normal que l'on déloge cet incongru, lequel au surplus, intempestivement, est la marque avouée d'une imperfection du système pénal : cet aspect précis est déterminant dans le rejet sans concession du droit de grâce par Beccaria 232 ( * ) .

Sur ce mécanicisme réducteur, un vernis d'optimisme sur l'homme ? L'écaillage survient aux premiers déboires révolutionnaires. Place, rapidement, au pessimisme réfléchi.

II. RÉDUCTIONNISME ET PESSIMISME RÉFLÉCHI.

A. Mesure du phénomène

Cette seconde phase ? Une coulée unique du 9 thermidor à 1810... Législativement, un « détricotage » du code initial, presque constant, mais par à-coups circonstanciels 233 ( * ) . Quant à la rhétorique, sur l'homme, un pessimisme : il allègue l' expérience , comprenons l'expérience révolutionnaire, cyclone de violence et de barbarie - et même judiciaires... D' « humanité » guillotinière, on est gavé. Tel grand républicain s'avouera même « tenté de regretter les anciennes tortures, parce qu'il semblait qu'elles eussent été moins dévorantes » 234 ( * ) . L'expérience ? Elle « finit toujours, pourra-t-on entendre en 1808, par soumettre à ses lois les théories et les systèmes exagérés » 235 ( * ) . Particulièrement, elle instruit sur l'homme. On alléguera même, deux années plus tard, à la fois « l'expérience et l'étude du coeur humain » 236 ( * ) . Portalis, déjà, l'avait observé : « [U]ne courte, mais terrible expérience, a mis à découvert toutes les profondeurs du coeur humain » 237 ( * ) . Idée commune, en ces quinze ans : les constituants n'ont pas vu l'homme tel qu'en lui-même, ils l'ont rêvé . Subséquemment, on a trop su de quoi est grosse « la séduisante douceur d'une philosophie abstraite qui voit les hommes comme elle voudrait qu'ils fussent, même dans leurs égarements ». Siméon, qui l'énonce, tient aussitôt, notablement, que « l'expérience [...] est après tout le véritable creuset des principes » 238 ( * ) . La conséquence des illusions originelles ? Un effrayant « débordement » de « scélérats qui ont inondé la France » 239 ( * ) . « Le droit criminel », entend-on maintenant, est « fait pour comprimer les passions des hommes » 240 ( * ) . Légiférer en cette matière, dorénavant, n'est autre chose que « descend(re) dans le coeur humain pour en sonder la perversité et en prévenir la corruption » 241 ( * ) . Si la thématique en est continue, - en 1810, apparaissent encore de bonne référence les rêves éthérés de la Constituante 242 ( * ) , puis « les longues et instructives années qui ont précédé Brumaire » 243 ( * ) , - sans doute culmine-t-elle fin 1801, avec les rapports d'Oudart et Target (tous deux conseillers au Tribunal de cassation) sur le projet du consulat 244 ( * ) , qui, d'ores et déjà contient l'essentiel de 1808 et 1810 245 ( * ) . Le pessimisme, observe-t-on, est déclinable à deux degrés. Côté Target on bestialise le criminel et son milieu ; côté Oudart on se défie des honnêtes gens .

Nicolas Oudart ? Traitant des jurés , d'une certaine manière il « règle des comptes » : en haut magistrat. Non sans politesse. Leur mise en place, dit-il ? « une des plus belles productions du dix-huitième siècle » 246 ( * ) . Compliment pour la forme. Car le constat est là. L'irénique présomption que des gens ordinaires au coeur pur rendraient mieux la justice criminelle que des juges déformés par le droit, la présomption - au minimum - est inversée. Les jurés virtuels présélectionnés ? À l'en croire, « beaucoup plus de mauvais que de bons » 247 ( * ) . Et si à l'occasion il révère leur « droiture », il est trop clair qu'il faut traduire ici candeur 248 ( * ) . Ce qu'on reproche, à ces braves gens ? D'être carencés psychologiquement, intellectuellement... D'ignorer le droit ; on pouvait s'y attendre : c'était étudié pour ; mais parfois c'est fâcheux 249 ( * ) ; fréquemment, note Oudart, euphémique, « les juges, pour se conformer à la loi, se servent d'expressions qui ne sont pas dans le dictionnaire de tous les jurés » 250 ( * ) ... D'être perméables aux pressions locales... D'ignorer, d'aventure, le français : il faut parfois leur expliquer « provocation », « volontairement », « préméditer » ; des quiproquos ont entraîné quelques désastres judiciaires 251 ( * ) . Et puis, également, d'être trop « sensibles » : ne leur advient-il pas de nier des faits constants dans la vue d'esquiver l'automaticité de sanctions qu'ils estiment trop sévères 252 ( * ) ? Il en procède de scandaleuses impunités, sans parler des gênantes distorsions territoriales de la jurisprudence criminelle 253 ( * ) .

La logique du jury, dans l'esprit premier du législateur, c'étaient les justes noces du bon sens populaire et de l'évidence des situations. Or trop fréquemment les jurés, en fait, se sont empêtrés dans l'inextricable 254 ( * ) . La loi de 1791 interdisait qu'on leur posât des questions complexes : chose assez importante (et sans doute utopique) pour qu'en l'an III l'interdiction fût constitutionnalisée 255 ( * ) . Le code pénal de l'an IV répète le principe, dans un article libellé solennellement en italique 256 ( * ) . Mais ce beau précepte simplificateur, qui conduisait en certains cas à diviser à l'infini le questionnement (certain procès nécessita six mille questions), compliquait tout. Un magistrat professionnel s'y fût perdu ; a fortiori, de simples jurés 257 ( * ) , ipso facto poussés à « des déclarations incohérentes ou contradictoires » 258 ( * ) . Couronnant l'affaire, la « question intentionnelle » posée spécifiquement, rendue systématique par la loi du 14 vendémiaire an III 259 ( * ) , en compliquant trop volontiers des données simples, a suscité parfois l'errance, l'aberration 260 ( * ) : tel faux-monnayeur avéré n'a-t-il pas été acquitté, faute d'une intention dûment établie de « nuire à autrui » 261 ( * ) ? Dérive absurde d'une logique irréaliste qui par principe et théorie, tout au contraire, ... niait l'importance de l'intention - voir Beccaria et les Lumières 262 ( * ) !

Le jury, pour tout dire, n'a donc pas fait ses preuves. Le supprimer ? On n'osera pas. Mais constamment on a oeuvré à rétrécir son envergure - pour faire de la place aux « juges éclairés », dit Cambacérès 263 ( * ) : c'est un pléonasme. Une loi de 1806 soustrait-elle aux cours ordinaires la connaissance des menaces d'incendie ? « Des juges courageux, indépendants par état et par caractère, entend-on dans le rapport, peuvent seuls porter, dans ces sortes de matières, des jugements sains et dégagés de tous sentiments contraires à ceux qu'inspirent la conscience et le devoir » 264 ( * ) . Au bout du compte, on escamote le jury d'accusation, et sévèrement on sélectionne (critère social) le « vivier » des jurés de jugement. Le conseiller d'État Ségur dira qu' « on a sagement préféré une réforme salutaire à une abolition dangereuse » 265 ( * ) .

Pessimisme sur l'homme ?... Le volet, maintenant, bestialisation de l'homme criminel , comme des bas-fonds criminogènes en général. Qu'y observe Target ? Des « hommes grossiers », « des âmes dures, sèches, farouches, dénuées d'idées morales », en proie exclusivement à « leurs grossières sensations », une « lie » populacière, une « race abâtardie », « des malfaiteurs atroces, qui n'ont que la figure humaine » 266 ( * ) . On l'a dit avant lui : « un loup enragé, dont il faut débarrasser la société » 267 ( * ) . On le dira après : « des bêtes féroces, déguisées en hommes » 268 ( * ) ... Les « théories » diversement humanitaires, autrement dit, ont fait leur temps - thème désormais répétitif. Y compris les droits de l'homme, que voilà rejetés de tout le monde, républicains inclus 269 ( * ) ! Un Portalis ne blâme-t-il pas comme sophistiques « toutes les fausses doctrines qui, dès le début de la Révolution, avaient été consignées dans une déclaration solennelle connue sous le nom de déclaration des droits » 270 ( * ) ? Toutes les fausses doctrines !... En matière criminelle, il s'agit désormais, nous dit-on, de « répandre une terreur salutaire », d' « épouvanter le crime et rassurer les citoyens » (« une terreur salutaire » : c'est ce que vise l'empereur stratège lorsqu'il prescrit de terribles représailles sur les populations civiles 271 ( * ) ). Bref, « à des calamités présentes, il faut opposer des remèdes rapides », qu'inspire trop « l'expérience de la perversité humaine » 272 ( * ) . Réhabilitation ? L'idée, forcément, a du plomb dans l'aile. Target ironisera : « C'est une théorie séduisante, mais vaine, qu'il faut reléguer dans le monde imaginaire, dont les âmes simples et pures aiment quelquefois à s'environner » 273 ( * ) . La maintient-on, résiduellement, pour le principe ? Le même fait mine de s'attendrir: « Si ce n'est là [...] qu'une douce chimère, l'idée en est belle à consacrer par la loi » 274 ( * ) . Place aux choses sérieuses, au tout répressif .

À l'ordre du jour ? Un démantèlement du droit initial... Un retour en fanfare de la perpétuité : la peine de prison ne culminera plus à vingt-quatre années... ce qui répond ipso facto à un souci - maintenant global - de gradation des peines, qui avait manqué chez les constituants. Plus de perpétuité ? c'est tout aussi bien l'amplification de la peine de mort , dont l'image, dit-on, est propre à frapper les êtres « grossiers » ; celle des travaux forcés , décrète ici Target, n' « ébranle » pas si fort leurs « fibres grossières » 275 ( * ) . Simplement annonce-t-il, aux fins d'équilibrage de la peine capitale, un retour au droit de grâce 276 ( * ) , lequel refait surface constitutionnellement dès août 1802, - un gibier royal dans la carnassière du premier consul 277 ( * ) , « un acte de clémence », dira-t-on somptueusement sous l'empire, « qui ne peut émaner que du prince, source de toutes les grâces » 278 ( * ) .

Revient, en outre, un fort symbole du droit ancien, qui implique aussi la perpétuité, mais qui surtout donne consistance à une image de l'homme bétail : la flétrissure , pour crimes de faux, ou incendies, et récidives... Écoutons Target (les huit premiers mots sont pleins d'intérêt) : « Un sentiment vague de la dignité de l'homme inspire de la répugnance pour ce châtiment, qui signale la personne d'une empreinte d'esclavage et d'ignominie, destinée à être ineffaçable » ; à quoi s'opposent résolument, dans son esprit, les évidentes utilités de cette pratique, et l'argument fort cavalier que « la réhabilitation », dont il se moque, « serait d'autant plus honorable, qu'elle succéderait à un plus profond abaissement » 279 ( * ) .

Alors, une question, un peu saugrenue : 1808, 1810 font-ils rupture avec le code des constituants, et les Lumières, et Beccaria ? L'évidence dit oui ? Elle va un peu vite. Faut-il le rappeler ? Des points majeurs demeurent acquis : la légalité des peines, l'égalité pénale des citoyens... ; disons même plus : côté perpétuité et gradation des peines (les deux sont liés), 1810 est plus fidèle à Beccaria que 1791. Tout cela est connu ? Mais il y a plus, et plus délicat, car philosophique, ce qu'essaiera de suggérer un dernier point.

B. Un essai global d'interprétation.

Valeur suprême, pour les Lumières ? L' utilité . Les mots décisifs, en 1791 ? Efficacité , exemplarité . Or, de Thermidor à 1810, quelle intention pénale ? Efficacité , exemplarité . Sous les apparences, où est la rupture ?... La sévérité consulaire veut des peines « aussi douces qu'il sera possible », et refuse les « rigueurs inutiles » 280 ( * ) : c'est tout bonnement du Beccaria, sous la réserve, évidemment, que les curseurs et du possible et de l'utile peuvent bien glisser avec le temps... « Soyons humains, entend-on dès la Convention thermidorienne, autant que les circonstances peuvent le souffrir, ou plutôt autant qu'elles nous ordonnent de l'être » 281 ( * ) . C'est assez clair. Parfois l'on enseigne que 1791, c'est l'humanisme de Beccaria, et 1810 l'utilitarisme de Bentham. Or de qui se réclame Beccaria ? D'Helvétius. De qui Bentham se prévaut-il expressément ? De Beccaria... et d'Helvétius 282 ( * ) ... Disons plus. La formule benthamienne le plus de bonheur possible pour le plus grand nombre , non seulement n'est pas de Bentham (elle est de Hutcheson) mais plus encore elle est citée par Beccaria, en italique , dès l'ouverture de son traité 283 ( * ) ! À la vérité donc, des Lumières à l'Empire, un socle unique, l' utilité , laquelle un jour disqualifie certaines rigueurs, et un autre jour très prosaïquement les remet en selle.

Le code des constituants était moins répressif ? Mais il était conçu - on ne manque pas de le rappeler après Brumaire - en vue d'une société mécaniquement heureuse, donc criminogène accidentellement 284 ( * ) . Utopie banale qui, réalisée, banalement aussi produit son contraire... La délinquance connaît sous peu une progression exponentielle. Le banditisme se déchaîne sous le Directoire, et les « chauffeurs » qui prolifèrent font dire que la torture , déposée par la loi, se trouve relevée , d'une certaine manière, par les malfaiteurs 285 ( * ) . Pour endiguer un tel « torrent dévastateur » 286 ( * ) , pour assurer dans défaillir l'efficacité, l'exemplarité, tout simplement il faut revenir à du sérieux, à des supplices. Beccaria parle d' « inutiles cruautés », de « stérile barbarie », le législateur révolutionnaire, de « supplices stérilement barbares » : les adjectifs, l'adverbe, en vérité sont des variables conjoncturelles, et ça change tout.

Exit, au passage, la philanthropie. Sauf à carrément la juger « cruelle » 287 ( * ) , voilà maintenant qu'à son sujet l'on ironise. À l'ordinaire, on prend des gants 288 ( * ) ! Mais elle n'est pas un bon moteur législatif : on l'a trop vu. La constituante, affirme-t-on, a été « philanthrope en pure perte » 289 ( * ) - et tout est dit là. « C'est humanité de punir un criminel », allèguera même Napoléon en Conseil d'État, non sans tourner en ridicule ce qu'il appelle « l'humanité des Italiens » 290 ( * ) - une allusion trop évidente à Beccaria. Lui-même s'était intéressé à cet auteur. En mai 1789, alors que s'enclenche la Révolution, de quoi est-il curieux ? Du code pénal très « beccarien » de la Toscane. Joseph s'y trouve ; Napoléon supplie : « Parle-moi du code criminel. Je suis bien curieux d'en connaître les détails. Analyse-moi les principes sur lesquels il est fondé. N'y manque pas je t'en prie » (« je t'en prie » souligné par deux fois ) 291 ( * ) .

Il en est revenu ? Mais est-ce de si loin ? L' « humanité » dès l'origine, en cette affaire, prête à soupçon. La peine de la « gêne », qu'ont instaurée les constituants, - isolement sans faille au fil des années dans une maison de force 292 ( * ) , jusqu'à parfois vingt ans, - cette peine est-elle « humaine » ? « Nous avouerons, dit poliment Treilhard, que nous n'avons pas reconnu dans cette occasion les sentiments philanthropiques de l'Assemblée constituante » 293 ( * ) . Une « torture prolongée », surenchérit un orateur autorisé 294 ( * ) . Un « supplice de tous les moments », dit un autre, un « tombeau » où l'on est « enseveli vivant » 295 ( * ) . Remontons plus haut. Lorsque Beccaria vante, contre la peine de mort, « le tourment d'un homme privé de liberté » et « transformé en bête de somme ( bestia di servigio ) » (car voilà l'idéal de progrès) 296 ( * ) , indubitablement on est dans une ambiance de bestialisation . Ce qui n'empêche nullement Diderot d'identifier, chez cet auteur, un « fonds inépuisable d'humanité » 297 ( * ) . Étrange « humanité ». Qu'est-elle exactement, lorsque Voltaire, par un jour d'humeur abolitionniste, suggère que l'incendiaire, au lieu d'être brûlé, soit toute sa vie « chargé de chaînes et de coups de fouet » 298 ( * ) ? Quant à Marmontel, autre humaniste des Lumières, c'est ainsi qu'il approuve Beccaria : « Un dur et cruel esclavage est donc une peine préférable à la peine de mort, uniquement parce que la peine en est plus efficace » 299 ( * ) . Une « humanité » - en réalité - constamment plombée d'utilitarisme .

Faut-il le redire ? Le solide, le sérieux, ce n'est pas l' « humanisme », c'est l' anthropologie , celle, vers 1800, des « idéologues », réunis chez la veuve d'Helvétius à Auteuil, - cet Helvétius dont Beccaria tenait à dire : « C'est lui qui m'a poussé avec force dans le chemin de la vérité ». L'abbé Morellet, son traducteur, a eu longtemps son pied-à-terre chez Mme Helvétius, où Bonaparte a fréquenté avant Brumaire. Leur science de l'homme ? La même, toujours : le tout sensation , l'absence de libre arbitre, et de frontière entre homme et bête... C'est du Diderot (déjà cité), et du d'Holbach, ou du Voltaire, qui par exemple professait : « Le peuple est entre l'homme et la bête », ou qui plaçait les Africains (c'est trop connu) quelque part entre l'homme et le singe (les blancs « sont supérieurs à ces nègres, comme les nègres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux huîtres » 300 ( * ) ), bref, prisait peu, en général, « [l]a multitude des bêtes brutes appelées hommes » 301 ( * ) .

Disons davantage. En lisant Target sur le droit pénal, on croirait Voltaire - le vrai Voltaire, lorsqu'il se livre à ses intimes. La marque , approuve Target, est de ces « châtiments qui font la plus vive impression sur des hommes grossiers » 302 ( * ) . « Il faut, disait Voltaire quelque trente ans plus tôt, un châtiment qui fasse impression sur ces têtes de buffles » 303 ( * ) . Les auteurs de crimes « féroces ou grossiers », expliquait Target, « ne sont guère sensibles à d'autres châtiments que les maux physiques » 304 ( * ) . Pour ces cas-là, disait Voltaire, « il faut une mort dont l'appareil soit effroyable ». Et d'ajouter, pour dissiper toute équivoque : « J'aurais condamné sans regrets Ravaillac à être écartelé » 305 ( * ) .

* * *

Quelques mots d'épilogue... L' « humanisme » réel de Voltaire ? À peu de chose près, c'est bien celui de 1800-1810. La résurgence de l'esclavage (1802) ? Voltaire s'en fût accommodé, on le sait trop... Les carnages militaires ? Il en a approuvés, avec une hystérie quasi pathologique ; son idole Catherine combattait les Turcs ; des mois durant, il a guetté en salivant les statistiques des hécatombes, et craint la paix... Napoléon fit enfermer des écrivains ? Voltaire aussi, positivement, en s'acharnant (c'est peu connu) 306 ( * ) . Son dernier mot à ce sujet ? « Nous avions besoin autrefois qu'on encourageât la littérature, et aujourd'hui il faut avouer que nous avons besoin qu'on la réprime » 307 ( * ) . Et n'allons pas penser qu'il pourrait s'agir là de travaux d'intérêt général : trop de « libellistes », a-t-il exprimé, sont positivement « dignes de la potence » 308 ( * ) . Le rôle de prévention de la religion en matière criminelle, tel qu'on l'escompte du Concordat, et que l'énonçait simultanément un Chateaubriand 309 ( * ) ? C'est, en moins cynique, « du Voltaire » encore, lequel estimait : « [L]a populace est une bête féroce qu'il faut enchaîner par la crainte de la potence et de l'enfer » 310 ( * ) ; on était là dix ans après le traité de Beccaria : conception banalement voltairienne, et spontanément post-thermidorienne 311 ( * ) , et, à l'évidence, assez strictement napoléonienne.

Sans doute faut-il donc relativiser . Target, organe énergique des rigueurs pénales d'après 1800, avait été - on l'oublierait - du comité criminel de la Constituante. C'est même lui qui, avec Adrien Duport, avait rédigé certains articles de la Déclaration de 1789 bourrés de garanties pénales. Peu avant, qui plus est, n'avait-il pas été l'avocat prestigieux de grandes causes des Lumières 312 ( * ) ? Il advint d'ailleurs qu'il y jouxte Voltaire, lequel lui marqua en termes vibrants son admiration 313 ( * ) . Voltaire et Target sont culturellement de la même étoffe. N'est-il pas normal que celui-ci énonce tout haut sous Bonaparte, relativement aux « hommes grossiers » et aux supplices qui leur conviennent, ce que celui-là répétait tout bas trente années plus tôt quant aux « têtes de buffles », quitte à chanter des mélodies très différentes, pour la galerie 314 ( * ) ?

C'est dire assez qu'il ne faut pas exagérer, induite par les hasards de la Révolution, la mutation de l'optimisme - superficiel , redisons-le - en pessimisme. Beccaria, à qui le juriste Bernardi fait reproche, en 1801, d'avoir propagé « une dangereuse sensibilité » 315 ( * ) , n'y est pas réellement pour grand-chose. Son propos ordinaire est technique , et son penchant pour l'homme n'incline guère à l'excès. Un lecteur familier de Voltaire, dont on sait qu'il aime tant à rappeler que « [l]e vulgaire ne mérite pas qu'on pense à l'éclairer » 316 ( * ) , n'est guère dépaysé lorsque d'entrée de jeu le marquis milanais s'emploie à l'avertir que son écriture tiendra à distance « le vulgaire non éclairé » ( uno stilo che allontana il volgo non illuminato ) 317 ( * ) . Un familier de Bonaparte, naturellement, pas davantage dépaysé par ce propos 318 ( * ) . Beccaria, Voltaire, Target, Bonaparte : aucun d'eux quatre n'est suspect d'un penchant à confondre « les esprits supérieurs » et « l'esprit grossier du vulgaire » ( rozze menti volgari ) 319 ( * ) . Sur cet esprit grossier, Beccaria tient que l'idée d'une lourde peine inhumainement interminable (« dans les fers et les chaînes, sous le bâton et sous le joug, dans une cage de fer » 320 ( * ) ) fait plus d'effet que l'instantané de la peine de mort ; Voltaire viscéralement, Target et Bonaparte au moins à l'expérience, estiment l'inverse. Pour l'essentiel, là est l'unique dissentiment. Les codifications napoléoniennes prennent consistance sur l'arrière-fond très pessimiste d'une logique de type « hobbesien » 321 ( * ) , de courbure forcément répressive. Or l'état de nature façon Beccaria (que de grandes plumes disent rousseauiste !) est purement hobbesien - c'est dans la deuxième phrase de son § I : « un état de guerre continuel ( un continuo stato di guerra ) » et « une liberté rendue inutile par l'incertitude de la conserver » 322 ( * ) . Voltaire, au demeurant, s'exprime à l'identique : « N'est-ce pas Hobbes qui a dit que l'homme était né dans un état de guerre ? Je suis fâché que cet Hobbes ait raison » 323 ( * ) . Le dossier n'est-il pas cohérent ? Le fil conducteur anthropologique ne suffit pas sans doute à tout élucider, mais à sa mesure, peut-on estimer, il a quelque chose d'opérationnel.


* 169 C. Beccaria (1738-1794), Dei Delitti e delle Pene (écr. de mars 1763 à début 1764 ; publ. Livorno, été 1764) ; éd. italienne consultée : Rizzoli Editore, Milano, 1950 ; éd. française utilisée : Des Délits et des Peines , publ. F. Venturi, Genève Droz, 1965. - Faute d'assez de temps, nous laissons à ce texte beaucoup de son caractère d'esquisse orale, et espérons en publier un peu plus tard une version étoffée. - Sauf mention contraire, c'est par nos soins que certains mot ou expressions figurent en italique dans les citations.

* 170 Beccaria à Morellet, 26 janvier 1766 : Correspondance générale d'Helvétius , publ. D. Smith et coll., 4 vol., t. 3, Toronto-Buffalo-Oxford, 1991, p. 252, d'après la traduction de Morellet.

* 171 Voir B. Schnapper, « Les systèmes répressifs français de 1789 à 1815 », dans X. Rousseaux, M.-S. Dupont-Bouchat, C. Vael, dir., Revolution and criminal Justice. French Models and National Tradition, 1780-1830 , Paris-Montreal, L'Harmattan, 1999, p. 17-35.

* 172 À Paris, chez Durand ; édition utilisée : « Corpus des OEuvres de Philosophie en Langue française », Paris, Fayard, 1988.

* 173 « Je dois à la lecture de De l'Esprit une grande partie de mes idées » (Beccaria à Morellet, loc. cit. ).

* 174 Voir notre Nature humaine et Révolution française. Du Siècle des Lumières au code Napoléon , 2 e éd., Éditions Dominique Martin Morin, Bouère, 2002, p. 12-15.

* 175 Dont l' Essai sur l'origine des connaissances humaines. Ouvrage où l'on réduit à un seul principe tout ce qui concerne l'entendement humain (1746) et le Traité des Sensations (1749).

* 176 Locke, An Essay concerning Human Understanding (1690).

* 177 Diderot, Observations sur Hemsterhuis , annotations critiques de 1773-1774 sur l'ouvrage de cet auteur néerlandais Lettre sur l'Homme et ses Rapports , 1772 : dans Diderot, OEuvres , publ. L. Versini, t. 1, « Philosophie », [p. 687-770], p. 717.

* 178 Diderot à Landois, 29 juin 1756 : dans sa Correspondance , 16 vol., publ. G. Roth puis J. Varloot, Paris, Éditions de Minuit, 1955-1970, t. 1, p. 213.

* 179 D'Holbach, Le Bon Sens, ou Idées naturelles opposées aux Idées surnaturelles (1772), Paris, 1971, p. 70, titre même d'un chapitre.

* 180 Voltaire à Cideville, 11 novembre 1753 : dans Correspondence and related Documents , publ. Bestermann, Best., D 5567, t. 14, Genève, 1971, p. 309 ; et à « un destinataire inconnu », vers 1770 : Best., D 16478, t. 36, Banbury, 1974, p. 314 (c'est bien expressément le libre arbitre selon les « scolastiques » qui est ainsi disqualifié).

* 181 C'est à bon droit, nous semble-t-il, que G. Gusdorf tient « la fascination newtonienne » pour « la marque caractéristique de l'âge des Lumières » ( Les Origines de l'Herméneutique , Paris, Payot, 1988, p. 424). Voir sur ce point deux gros chapitres en son ouvrage Les Principes de la Pensée au Siècle des Lumières [« Les Sciences humaines et la Pensée occidentale », vol. 4], Paris, Payot, 1971, p. 151-212.

* 182 Cf. notre ouvrage Régénérer l'espèce humaine. Utopie médicale et Lumières, 1750-1850 , Bouère, Éditions Dominique Martin Morin, 2008, notamment p. 37-40. Tel est ce qu'A. Koyré désigne comme « l'alliance impure de Newton et de Locke » : « Sens et portée de la synthèse newtonienne », art. de 1950 consulté dans Koyré, Études newtoniennes , Paris, 1968, [p. 25-49], p. 42.

* 183 Voltaire à Mme du Deffand, 22 mai 1764 : Best. D. 11883, t. 27, Banbury, 1973, p. 710.

* 184 Voltaire, rubrique « Franc arbitre », dans Questions sur l'Encyclopédie (écr. vers 1770), in ses OEuvres , publ. Beuchot, t. 29, Paris, 1829, p. 508.

* 185 Voltaire à Mme du Deffand, 7 août 1769 : Best., D 15805, t. 35, Banbury, 1974, p. 141.

* 186 La Mettrie, L'Homme Machine (1747), dans ses OEuvres philosophiques , J.-P. Jackson, éd. scient., s. l., Coda, 2004, [p. 43-84], p. 55.

* 187 Diderot, Le Rêve de d'Alembert (écr. 1769), Paris, Garnier-Flammarion, 1965, p. 93.

* 188 Sade, La Philosophie dans le Boudoir, ou les Instituteurs immoraux (1795), Paris, 1974, p. 302.

* 189 Beccaria, Des Délits et des Peines (1764), § VII, édition citée, p. 17.

* 190 Helvétius, De l'Esprit , op. cit. , p. 539.

* 191 Le tout, chez lui, sur fond de déconnection des problématiques juridiques de toute idée de transcendance, hors la Raison elle-même du grand réformateur. - Globalement, Beccaria ne fait guère que cristalliser, quant au droit pénal, l'esprit des Lumières, - certes avec talent et ampleur de vues. Quinze ans avant lui, un ami de Voltaire, en vingt lignes au plus d'un simple roman, condense l'essentiel, à divers égards, de ce que dira Des Délits et des Peines : Boyer d'Argens, Thérèse philosophe (1748), Arles, Actes Sud, 1992, p. 70-71.

* 192 La prison jusqu'alors, au moins en principe , n'était pas une peine, mais une mesure « technique ». Voir N. Castan, « Le régime des prisons au XVIIIème siècle », dans J.-G. Petit, dir., La Prison, le Bagne et l'Histoire , Actes du Colloque de Fontevraud (septembre 1982), Genève, Librairie des Méridiens, 1984, p. 31-42 ; et le chapitre 1 er de J.-G. Petit, Ces peines obscures. La prison pénale en France. 1780-1875 , Paris, Fayard, 1990.

* 193 Voir notre ouvrage Régénérer l'espèce humaine... , op. cit. , p. 31-37.

* 194 Diderot, Mémoires pour Catherine II (écr. 1773-1774), publ. P. Vernière, Paris, Garnier, 1966, p. 245.

* 195 Beccaria, Des Délits et des Peines (1764), éd. citée, § XL, p. 73 (« una moltitudine di esseri sensibili »).

* 196 Diderot à Mme de Maux (?), été 1769, dans sa Correspondance , op. cit. , t. 9 (1963), p. 96. Et Voltaire, p. ex., à Mme du Deffand, 10 avril 1772 (« un animal à deux pieds appelé homme ») : Best., D 17688, t. 38, Banbury, 1975, p. 333.

* 197 Beccaria, Traité des Délits et des Peines (1764), § XXVIII, éd. citée, p. 48-49. Le traducteur écrit : « le meilleur ou l'unique moyen ( sic , mais l'original dit : « il vero ed unico freno ») de dissuader les autres de commettre des crimes ».

* 198 La Mettrie, Discours sur le Bonheur (vers 1750), publ. J. Falvey [« Studies on Voltaire », 134], Banbury, 1975, p. 164.

* 199 La Mettrie, L'Homme Machine , op. cit. , p. 64.

* 200 P. ex. : « Quoi donc ! est-ce que la main qui a brisé la serrure d'un coffre-fort, ou même enfoncé un poignard dans le sein d'un citoyen, n'est plus bonne qu'à être coupée ? » : Diderot, contribution à l' Histoire des deux Indes de Raynal, dans Diderot, OEuvres , publ. L. Versini, t. 3, « Politique », Paris, 1995, [p. 579-759], p. 666.

* 201 Rapporté par Mme d'Épinay à Galiani, 5 janvier 1772 : dans leur Correspondance , publ. G. Dulac et D. Maggetti, t. 2, Paris, Desjonquères, 1993, p. 261.

* 202 J. Rostand, Pensées d'un biologiste (1954), rééd. Paris, Stock, 1978, p. 27 (« Nos récompenses et nos châtiments ne vont jamais qu'à la chimie et à la chance »), 29 (« Condamner le coupable, cela est nécessaire. mais cela est odieux, puisqu'il était déterminé »), 209 (« Le plus affreux des coupables n'est pas moins innocent que l'univers »), 236 (« Je disculpe l'homme par la bête »), etc.

* 203 Ibidem , p. 28 ; mais il faut savoir que, quant on « croit châtier un homme », on « ne punit jamais qu'un oeuf ou des circonstances ».

* 204 Voltaire à Pavée de Villevieille, 31 août 1766 : Best., D 13526, t. 30, Banbury, 1973, p. 411. C'est à propos de déserteurs.

* 205 Même chose lorsque Diderot déplore l'exécution d' « un homme sain et vigoureux, de trente ans » (référence de la note 23).

* 206 Voltaire, Prix de la Justice et de l'Humanité (octobre 1777), dans ses OEuvres complètes , Paris, chez Lefèvre et Déterville, t. 18, 1818, [p. 204-272], p. 205.

* 207 Voltaire à Philipon de La Madelaine, 28 décembre 1770 : Best., D 16873, t. 37, Banbury, 1974, p. 167.

* 208 Sur cette piquante affaire, dont on a la pudeur de parler peu en France, qu'on nous permette de renvoyer à notre ouvrage Voltaire méconnu. Aspects cachés de l'humanisme des Lumières (1750-1800) , 2 e éd., Bouère, Éditions Dominique Martin Morin, 2007, p. 270-271.

* 209 Voltaire à F. Tronchin, vers le 27 décembre 1764 : Correspondance complète de Rousseau , publ. R. A. Leigh (qui tient ce texte pour « un des plus épouvantables de la correspondance de Voltaire »), t. 22, Banbury, 1974, p. 303-304 ; et Best., D 12262, t. 28, p. 263-265. Le livre de Rousseau en cause ? Les Lettres écrites de la Montagne , paru en octobre 1764.

* 210 Voir notre Voltaire méconnu... , op. cit. , p. 201-203.

* 211 Voltaire à de Lacroix, 4 septembre 1769 : Best., D 15870, t. 35, Banbury, 1974, p. 210.

* 212 C. Goyard-Fabre, rubrique « Commentaire sur le livre Des Délits et des Peines », dans R. Trousson et J. Vercruysse, dir., Dictionnaire général de Voltaire , Paris, Honoré Champion, 2003, p. 226, col. 2.

* 213 J.-M. Carbasse, Histoire du Droit pénal et de la Justice criminelle , Paris, P.U.F., 2000, p. 367 et 373-374.

* 214 Décret des 25 septembre et 6 octobre 1791 : Bulletin des Lois , t. 7, réimpr., Paris, Imprimerie nationale, 1806, p. 397-434 ; et Archives parlementaires , 1 e série, t. 31, p. 325-339.

* 215 Sieyès, Qu'est-ce que le Tiers État (paru en janvier 1789), Paris, 1982, p. 65.

* 216 Beccaria, Des Délits et des Peines , § XXII, édition citée, p. 40 : « La machine politique ( macchine politiche ) conserve plus longtemps que toute autre le mouvement qui lui a été imprimé (en fait : il moto concepito ) »

* 217 Robespierre à la Constituante, 30 mai 1791: Arch. parlem. 1 e série, t. 26, p. 622-623. Cette apparente contradiction est rationnelle . Pour asseoir la société parfaite, donc sans peine de mort, il s'avérera bientôt techniquement nécessaire d'éliminer d'abord ceux qui l'empêchent de naître.

* 218 code pénal de 1791, II e partie, Titre 1 er , section III, art. 7 : ibid. , t. 31, p. 331, col. 1.

* 219 Voir p. ex. le pugnace discours de Prugnon, 31 mai 1791 : t. 26, p. 618-622.

* 220 Briois de Beaumetz à la Constituante, 29 septembre 1789 : ibid. , t. 9, p. 214, col. 1.

* 221 Le Pelletier de Saint-Fargeau, Rapport sur le projet de code pénal, au nom des comités de constitution et de législation criminelle, lu à l'Assemblée nationale les 23 et 24 mai 1791 : ibid. , t. 26, [p. 319-332], p. 332, col. 1.

* 222 Ibidem , p. 324, col. 2.

* 223 Rapport cité deux notes plus haut.

* 224 Ibidem , p. 322, col. 2.

* 225 Ibidem , p. 328, col. 2.

* 226 Beccaria, Des Délits et des Peines , § XIX, intitulé « Promptitude du jugement », éd. citée, p. 37. « Le procès lui-même doit être terminé dans les plus brefs délais possibles ». Le tribunal révolutionnaire, en cela plus « beccarien » que Beccaria, jugera comme l'éclair, sans même attendre le crime.

* 227 Arch. parlem. , 1 e série, t. 26, p. 324, col. 1.

* 228 Ibidem , p. 329, col. 2, et 332-333, p. ex. projet de code pénal, I e partie, T. II, art. 3 : « Un jour, chaque mois, la porte du cachot sera ouverte. Le condamné sera exposé dans son cachot avec ses chaînes, aux yeux du public, en présence du geôlier ».

* 229 Ibidem , p. 322, col. 1 ; « cette répression-là, seule, est véritablement exemplaire, qui présente constamment toute la durée de la vengeance des lois » sur les lieux mêmes du crime, « et où des regards toujours connus réveillent sans cesse, dans l'âme du coupable, les sensations actives de l'opprobre et de l'ignominie ».

* 230 Consultation du docteur Louis, secrétaire perpétuel de l'Académie de chirurgie, 7 mars 1792 : « En considérant la structure du col, dont la colonne vertébrale est le centre, composée de plusieurs os dont la connexion forme des enchevauchures [...], il [...] faut nécessairement, pour la certitude du procédé, qu'il dépende de moyens mécaniques invariables, dont on puisse également déterminer et la force et l'effet. [...] - Il est aisé de faire construire une pareille machine, dont l'effet est immanquable. La décapitation sera faite en un instant [...]. Il sera facile d'en faire l'épreuve sur des cadavres, et même sur un mouton vivant » etc. ( Arch. parlem. , 1 e série, t. 39, p. 686, col. 2). - Voir D. Arasse, « La guillotine ou l'inimaginable effet d'une simple mécanique », dans Revue des Sciences humaines , vol. 186-187, « La machine dans l'imaginaire (1650-1800) », 1982-3.

* 231 code pénal de 1791, I e partie, Titre VIII, art. 13 : Arch. parlem. , 1 e série, t. 31, p. 329, col. 2.

* 232 Beccaria, Des Délits et des Peines , § XLVI (le dernier), intitulé « Des grâces », éd. citée, p. 79-80.

* 233 Quant à l'aspect procédural, voir la synthèse de J.-L. Halpérin, « Continuité et rupture dans l'évolution de la procédure pénale en France de 1795 à 1810 », dans Revolution and criminal Justice... , recueil cité note 3, p. 109-130.

* 234 Daunou, Extrait d'un mémoire... destiné à ses commettants... (août 1794) : dans ses Mémoires pour servir à l'histoire de la Convention nationale... , Paris, Firmin Didot, 1848, [p. 425-464], p. 461.

* 235 Bruneau-Beaumetz au Corps législatif, 15 décembre 1808 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 250, col. 2.

* 236 Dhaubersart, président de la commission de législation civile et criminelle, au Corps législatif, 12 février 1810 : ibid. , p. 568, col. 1.

* 237 Portalis au Conseil des Anciens, 9 messidor an V, 27 juin 1797 : Moniteur , n° 286, 16 messidor, 4 juillet, p. 1144, col. 2.

* 238 Siméon (beau-frère de Portalis) au Conseil des Cinq-Cents, 18 germinal an V, 7 avril 1797 : Moniteur , n° 202, 22 germinal, 11 avril, p. 809, col. 2.

* 239 Ludot au Tribunat, 20 floréal an X, 10 mai 1802 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 3, p. 655, col. 2.

* 240 Réal au Corps législatif, 5 décembre 1808 : ibid. , t. 10, p. 198, col. 2.

* 241 Monseignat au Corps législatif, 17 février 1810 : ibid. , p. 608, col. 2.

* 242 Treilhard, ministre d'État, au Corps législatif, 2 février 1810 : « Les intentions philanthropiques de l'Assemblée constituante, quand elle rejeta la confiscation et la marque, étaient certainement louables ; mais, ne craignons pas de le dire, cette assemblée a trop souvent considéré les hommes, non tels qu'ils sont, mais tels qu'il serait à désirer qu'ils fussent ; elle était mue par un espoir de perfectibilité qui malheureusement ne se réalise pas ; et si, dans le mouvement rapide qui l'entraînait, cette erreur fut excusable, nous ne le serions pas, nous, qui, éclairés par l'expérience » etc. ( ibid. , p. 290, col. 1-2).

* 243 Réal au Corps législatif, 12 février 1810 : ibid. , p. 559, col. 1.

* 244 Voir sur ce point les pages nourries de S. Solimano, Verso il code Napoléon. Il progetto di Codice civile di Guy Jean-Baptiste Target (1798-1799) , Milan, A. Giuffrè Ed., 1998, p. 148-157 et 225-229. - Sur Nicolas Oudart, né fin 1750, notre savant collègue a découvert des indications biographiques fragmentaires (p. 148, note 138), et d'autant plus précieuses. Oudart, notamment, a été « commissaire des vainqueurs de la Bastille », puis président du tribunal criminel de Paris à partir de février 1793.

* 245 Voir B. Schnapper, « Compression et répression sous le Consulat et l'Empire », dans Revue historique de Droit français et étranger , vol. 69, 1991/1, p. 17-40.

* 246 Locré, éd., La Législation civile, commerciale et criminelle de la France, ou Commentaire et Compléments des codes français , t. 25, Paris, Treuttel et Würtz, 1831, p. 21.

* 247 Ibidem , p. 25.

* 248 Ibidem , p. 36.

* 249 Ibidem , p. 30. N'arrive-t-il pas qu'interrogés, ils disent au juge : si le problème se posait dans nos propres affaires, ce sont des gens comme vous que nous consulterions...

* 250 Ibidem , p. 34.

* 251 Cf. ibidem , p. 34-35. La tentative « manifestée par des actes extérieurs » étant assimilée au crime, un jury aurait nié l'existence de ceux-ci parce qu'ils avaient eu lieu... à l'intérieur d'une maison...

* 252 Ibidem , 33-35 ; p. 34 : « un tel résultat [...] est arrivé dans des circonstances si éclatantes, qu'enfin il faut qu'il n'arrive plus ».

* 253 Ibidem , p. 9.

* 254 Ibidem , p. 28-31.

* 255 Art. 250 de la constitution du 5 fructidor an III (22 août 1795) : « Les juges ne peuvent proposer aux jurés aucune question complexe ».

* 256 Art. 377 du « code des délits et des peines » (dû à Merlin de Douai ; un titre « beccarien » ?), 3 brumaire an IV, 25 octobre 1795, Bulletin des Lois n° 204, [p. 1-152], p. 72 : « Il ne peut être posé aucune question complexe. (Article 250 de l'acte constitutionnel.) »

* 257 Faure au Corps législatif, 29 novembre 1808 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 176, col. 2.

* 258 Riboud au Corps législatif, 9 décembre 1808 : ibid. , p. 236, col. 1 : « confusion », « inadvertances », « équivoques », « suites fâcheuses »...

* 259 « Loi portant que la question relative à l'intention sera posée à l'avenir dans toutes les affaires soumises à des jurés de jugements », 14 vendémiaire an III, 5 octobre 1794 : Bulletin des Lois n° 87, p. 2-3 ; voir le Moniteur n° 17, 17 vendémiaire, 8 octobre, p. 82, col. 1-2.

* 260 Oudart, citant Grangier, in Locré, t. 25, p. 35-36.

* 261 Le conseiller d'État Faure au Corps législatif, 29 novembre 1808 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 177, col. 1.

* 262 Cf. supra , appels des notes 21 et antérieures.

* 263 Cambacérès au Conseil d'État, 5 juillet 1808 (Locré, t. 25).

* 264 Bertrand de Greuille au Corps législatif, 12 mai 1806 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 9, p. 425, col. 1.

* 265 Ségur au Corps législatif, 31 décembre 1808 : ibid. , t. 10, p. 265, col. 1.

* 266 Target, in Locré, Législation... , op. cit. , t. 29, Paris, 1831, p. 10 et 11.

* 267 Siméon au Conseil des Cinq-Cents, 18 germinal an V, 7 avril 1797 : Moniteur n° 212, 22 germinal, 11 avril, p. 809, col. 2.

* 268 Réal au Corps législatif, 5 décembre 1808: Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 203, col. 2.

* 269 Nous nous permettons de renvoyer à notre analyse « Le code civil à sa naissance et les Droits de l'homme », dans J.-L.Chabot, P. Didier, J. Ferrand, éds, Le code civil et les Droits de l'Homme , Actes du Colloque de Grenoble (décembre 2003), Paris, L'Harmattan, 2005, p. 107-116.

* 270 Portalis, De l'usage et de l'abus de l'Esprit philosophique durant le XVIII e siècle (écr. 1798-1800 ; publ. 1820, 1827), 2 vol. Paris, Moutardier, 1834, t. 2, p. 387. Seule l'expression déclaration des droits est soulignée dans l'original. Cf. aussi p. 308 : « Si l'on n'eût point abandonné l'observation et l'expérience, on ne se fût jamais livré à d'aussi vaines théories ».

* 271 Les illustrations seraient nombreuses, et éloquentes. À titre d'exemple, Napoléon à Eugène, vice-roi d'Italie, 28 juin 1806 : pour calmer les Monténégrins, il leur faut « port[er] la terreur dans l'âme, il faut ravager leur territoire, brûler leurs maisons, et leur imprimer, par de terribles exemples, une terreur salutaire » (Napoléon Bonaparte, Correspondance générale [7 vol. parus], t. 6 [M. Kerautret, dir. scient.], Paris, Fayard, 2009, p. 563).

* 272 Target, in Locré, t. 29, p. 7.

* 273 Target, ibid. , p. 16. Juste auparavant : « nos premiers législateurs » avaient été fourvoyés par « [u]ne idée de perfectibilité, rarement applicable aux hommes en général, plus rarement encore aux âmes qui se sont altérées dans le crime, presque chimérique pour celles qui se sont souillées de crimes atroces, ou dont la profonde corruption s'est manifestée par des récidives ».

* 274 Ibidem , p. 18 : elle sera envisageable après vingt-cinq années de déportation... La « belle idée morale de la réhabilitation » (p. 22) ? Ironie cruelle : « Ne dût-elle avoir d'application qu'une ou deux fois par siècle ( sic ), [...] la moindre utilité d'une institution qui ne peut pas nuire, suffit pour la conserver » (p. 35).

* 275 Target, rapport sur le projet de code criminel, fin 1801 : ibid. , p. 10-11. Foin des « vagues théories » : « Les sociétés auxquelles on donne des lois doivent être considérées telles qu'elles sont, et non telles qu'elles pourraient être » (p. 9).

* 276 Target, ibidem. , p. 12-14.

* 277 Art. 86 du sénatus-consulte organique de la Constitution du 16 thermidor an X (4 août 1802). Cette résurgence n'est pas furtive. L'article en cause est le dernier, et constitue l'unique disposition du Titre X final, expressément intitulé « Droit de faire grâce ».

* 278 Le conseiller d'État Faure au Corps législatif, 10 février 1810 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 556, col. 2.

* 279 Target, in Locré, t. 29, p. 22 et 23.

* 280 Respectivement Target, ibid. , p. 7, et Leroy au Tribunat, 12 nivôse an X, 2 janvier 1802 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 3, p. 374, col. 2.

* 281 Fréron à la Convention, 17 germinal an III, 6 avril 1795 : Moniteur , n° 200, 20 germinal, 9 avril, p. 315, col. 3.

* 282 Cf. notre Mythologie du code Napoléon. Aux soubassements de la France moderne , Bouère, Dominique Martin Morin, 2003, p. 305-306 et 314.

* 283 Beccaria, Des Délits et des Peines (1764), Introduction, éd. citée, p. 7 (« la massima felicità divisa nel maggior numero »).

* 284 Le conseiller d'État Régnier au Corps législatif, à propos de la marque, 3 nivôse an X, 24 décembre 1801 : les législateurs de 1791 « se flattaient alors qu'à l'avenir les crimes seraient moins fréquents, et d'après cette supposition honorable pour l'espèce humaine, ils avaient pu pouvoir se livrer à ce penchant si doux qui » etc. ( Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 236, col. 2). Cf. supra , appels des notes 53 et 54.

* 285 Siméon au Conseil des Cinq-Cents, 18 germinal an V, 7 avril 1797 : « Ainsi un moyen que la justice employait autrefois contre le crime [...], ce moyen que l'humanité a justement proscrit malgré son utilité, le crime lui-même l'a saisi » ( Moniteur n° 201, 21 germinal, 10 avril, p. 806, col. 3).

* 286 Régnier, référence de l'avant-dernière note.

* 287 Les promoteurs du code de 1791 ? « des hommes inexpérimentés, des hommes animés d'une philanthropie cruelle » (Réal au Corps législatif, 5 décembre 1808, qui évoque aussi une « pitié cruelle », et veut insister sur cette « cruauté » : Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 200, col. 1)

* 288 Exemple de précaution verbale : l'Assemblée constituante, « à qui ses principes de philanthropie feront éternellement honneur, quoique on ne puisse pas toujours approuver l'usage qu'elle en a fait »... (Louvet au Corps législatif, 19 février 1810 : ibid. , t. 10, p. 610, col. 1).

* 289 Elle l'a été en supprimant le droit d'aubaine ; Boissy d'Anglas au Tribunat, 29 frimaire an X, 15 décembre 1801 : ibid. , t. 3, p. 196, col. 2.

* 290 Napoléon au Conseil d'État, 23 prairial an XII, 12 juin 1804 : J. Massin, éd., Napoléon Bonaparte. L'OEuvre et l'Histoire , 12 vol., Paris, 1969-1971, t. 7 (1970), p. 292. « La société a besoin d'une justice rigoureuse ; c'est là l'humanité d'État, l'autre est l'humanité d'opéra » (p. 293)

* 291 Napoléon âgé de vingt ans à Joseph, mai 1789 : dans Napoléon, Correspondance... , op. cit. , t. 1 (T. Lentz, dir. scient.), Paris, Fayard, 2004, p. 73. Sur le code criminel de Toscane, voir la contribution du Professeur Solimano au présent volume.

* 292 code pénal de 1791, I e Partie, Titre I er , art. 13 à 19.

* 293 Treilhard au Corps législatif, 2 février 1810 : Arch. parlem. , 2 e série, t. 10, p. 292, col. 1.

* 294 Dhaubersart, président de la commission de législation civile et criminelle, au Corps législatif, 12 février 1810 : ibid. , p. 568, col. 1.

* 295 Son collègue Riboud, le lendemain : ibid. , p. 575, col. 2.

* 296 Beccaria, Des Délits et des Peines , § XXVIII, éd. citée, p. 49.

* 297 Diderot, « Les `Recherches sur le style' de Beccaria » (1771), dans ses OEuvres complètes , publ. H. Dieckmann et J. Varloot, t. 20, Paris, Hermann, 1995, [p. 475-480], p. 476.

* 298 Voltaire, Prix de la Justice et de l'Humanité (Gazette de Berne, n° XIV, 15 février 1777), dans ses OEuvres complètes , t. 18, Paris, chez Lefèvre et Deterville, 1818, [p. 204-272], p. 219.

* 299 « Notes sur le Traité des Délits et des Peines », faussement attribué à Diderot : dans Diderot, OEuvres complètes , t. 20, op. cit. , [p. 421-426], p. 426. Sur l'attribution de ce texte à Marmontel, voir p. 400.

* 300 Voltaire, Traité de Métaphysique [1734], cité de seconde main d'après L. Poliakov, Le Mythe aryen. Essai sur les sources du racisme et des nationalismes , Paris, Calmann-Lévy, 1971, p. 174.

* 301 Voltaire, Questions sur l'Encyclopédie (7 e partie, 1771), dans ses OEuvres , publ. Beuchot, t. 30, Paris, 1829, p. 249, mot souligné dans l'original.

* 302 Target, rapport sur le projet de code criminel de 1801 : Locré, La Législation... , op. cit. , t. 25, p. 23.

* 303 Voltaire à Catherine II, à propos de la populace de Moscou (qu'ailleurs il faut « emmuseler comme des ours »), 18 novembre 1771 : Best., D 17455, t. 37, Banbury, 1974, p. 67.

* 304 Target, loc. cit. , p. 21.

* 305 Voltaire, 28 décembre 1770, lettre citée supra , note 39. Faut-il rappeler que le susdit écartèlement a été corsé par des tortures préliminaires d'un raffinement hallucinant ?

* 306 Sur ces divers thèmes, beaucoup de faits et citations référencées, dans notre Voltaire méconnu... , op. cit.

* 307 Voltaire au duc de Richelieu, 13 juillet 1772 : Best., D 17826, t. 38, Banbury, 1975, p. 458.

* 308 Voltaire, rubrique « Quisquis, Langleviel. Avec quelques observations utiles sur les persécuteurs, les calomniateurs, et les feseurs de libelles », dans ses Questions sur l'Encyclopédie (9 e partie, 1772), in ses OEuvres , publ. Beuchot, t. 32, Paris, 1829, [p. 61-84], p. 80.

* 309 Chateaubriand, Génie du Christianisme ou Beauté de la Religion chrétienne (1802), IV e partie, Livre 6, chap. 13, Coll. Pléiade, Paris, Gallimard, 1978 : « Détruisez le culte évangélique, il vous faudra dans chaque village une police, des prisons et des bourreaux ».

* 310 Note marginale de la main de Voltaire dans un ouvrage de 1774 : cité d'après R. Mortier, « Voltaire et le peuple », dans R. Mortier, Le Coeur et la Raison. Recueil d'études sur le dix-huitième siècle , préf. R. Pomeau, Oxford-Bruxelles-Paris, 1990, [p. 89-103], p. 100, Note 30.

* 311 Remarque de frimaire an VI, octobre ou novembre 2797, du républicain L.-S. Mercier, dans son Nouveau Paris (1800), Paris, 1994, p. 857 : « Tout nécessite dans la refonte du code criminel des mesures plus répressives, plus fermes, plus vigoureuses ; car la perversité humaine, en secouant le frein religieux, s'est montrée sous un jour plus terrible et plus effrayant ».

* 312 Voir notre Mythologie du code Napoléon... , op. cit. , p. 289-291.

* 313 Voltaire à Target, février 1767 (?) : Best., D 13964, t. 31, Banbury, 1974, p. 357, sans doute à propos de l'affaire Sirven..

* 314 De même Merlin de Douai, ci-devant « avocat des Lumières », après avoir soutenu les principes pénaux révolutionnaires, se montre-t-il sous l'Empire « simple utilitariste », exclusivement préoccupé de l' « efficacité de la peine » : H. Leuwers, Un Juriste en Politique. Merlin de Douai , Arras, Artois Presses Université, 1996, p. 265, juge à tort « troublante » cette « évolution ».

* 315 J.-D.-E. de Bernardi, Nouvelle Théorie des Lois civiles, où l'on donne le plan d'un système général de jurisprudencen et la notice des codes les plus fameux , Paris, 1801, p. 189-190, cité de seconde main d'après S. Solimano, Verso il code Napoléon... , op. cit. , p. 150.

* 316 Voltaire à Mme de Bentinck, 23 juin 1752 (?) : Best., D 4921, t. 13, Genève, 1971, p. 86.

* 317 Beccaria, Des Délits et des Peines (1764), avis au lecteur édition citée, p. 3

* 318 « La littérature, disait-il [p. ex.], devenait une nourriture du peuple, lorsqu'elle eût dû demeurer celle des gens délicats » (Las Cases, Mémorial de Sainte-Hélène [1823], Paris, Seuil, 1968, p. 445, col. 2, à la date du 28 août 1816).

* 319 Beccaria, loc. cit. , § XIX, p. 38.

* 320 Ibidem , § XXVIII, p. 50.

* 321 Voir notre Mythologie du code Napoléon... , op. cit. , p. 31-59.

* 322 Beccaria, loc. cit. , § I, p. 8. mais son pacte social ne sacrifie qu' « une partie » de la liberté naturelle. - : à Palissot,

* 323 Voltaire à Palissot, 11 août 1764 : Best., D 12045, t. 28, Banbury, 1973, p. 67. Contrairement à ce qu'on croit encore, la logique de Hobbes est plus que présente chez nos « philosophes » : Y. Glaziou, Hobbes en France au XVIII e siècle , Paris, P.U.F., 1993.

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