M. Jean-Vincent PLACÉ, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LE PROGRAMME 176 « POLICE NATIONALE »

- Le programme « Police nationale » comporte 9,276 milliards d'euros en autorisations d'engagement, soit une hausse de 1,5 % par rapport à 2011, et 9,21 milliards d'euros en crédits de paiement , soit une augmentation de 1,4 %.

- Le programme connaît une baisse de son plafond d'emploi (- 1 720 ETPT, pour un plafond s'établissant finalement à 143 714 ETPT) et une réduction de ses effectifs à périmètre constant (- 1 682 ETPT) .

- Les dépenses de fonctionnement enregistrent une baisse de 2,3 % et se montent à 743,7 millions d'euros en crédits de paiement. Au regard de la tendance à la baisse continue des crédits de fonctionnement de la police, votre rapporteur spécial estime qu'un seuil a probablement été atteint concernant les moyens de fonctionnement de la police et qu'aller au-delà ferait peser un risque sur le potentiel opérationnel de cette force .

- En 2012, les dépenses d'investissement enregistrent un redémarrage à la hausse. Alors que les crédits de paiement augmentent de 9,1 % (174,5 millions d'euros), les autorisations d'engagement bondissent de 207,9 % (279,9 millions d'euros). Cette évolution des autorisations d'engagement s'explique par la nécessité de couvrir plusieurs projets immobiliers, et notamment celui relatif au relogement de la direction régionale de la police judiciaire de la préfecture de police (DRPJ) sur le site de la zone d'aménagement concertée (ZAC) des Batignolles à Paris (131 millions d'euros).

III. LE PROGRAMME 176 « POLICE NATIONALE »

A. LES ACTIONS DU PROGRAMME « POLICE NATIONALE »

Le tableau ci-après récapitule la part de chacune des actions au sein du programme « Police nationale » 35 ( * ) . Une distinction est faite avant et après ventilation des crédits de l'action n° 6 « Commandement, ressources humaines et logistique » entre les autres pôles du programme. Cette action comporte, notamment, les moyens logistiques nécessaires au présent programme. La ventilation reprend également les crédits de pilotage et de soutien issus ou en provenance d'autres programmes.

Les crédits du programme « Police nationale » par action

(en millions d'euros)

Avant ventilation

Après ventilation

Actions

Crédits de
paiement
pour 2012

Part dans
le programme

Crédits de
paiement pour
2012

Part dans le
programme

1 - Ordre public et protection de la souveraineté

1 179,2

12,8 %

1 408,9

14,9 %

2 - Sécurité et paix publiques

3 033,3

32,9 %

3 607,6

38,0 %

3 - Sécurité routière

608,9

6,6 %

731,0

7,7 %

4 - Police des étrangers et sûreté des transports internationaux

693,2

7,5 %

829,2

8,7 %

5 - Missions de police judiciaire et concours à la justice

2 440,8

26,4 %

2 904,8

30,6 %

6 - Commandement, ressources humaines et logistique

1 277,6

13,8 %

0,0

0,0 %

Ensemble

9 233,0

100,0 %

9 481,5

100,0 %

+ 248,5 millions d'euros*

* Crédits en provenance (+) ou en direction (-) des missions :

- « Administration générale et territoriale de l'Etat » :

-  programme « Administration territoriale » : - 5,4 millions d'euros ;

- programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » : + 242,2 millions d'euros ;

- programme « Vie politique, cultuelle et associative » : - 0,006 million d'euros ;

- « Sécurité civile » :

- programme « Intervention des services opérationnels » : - 0,5 million d'euros ;

- « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » :

-  programme « Entretien des bâtiments de l'Etat » : + 12,2 millions d'euros.

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2012

Au total, le programme « Police nationale » comporte 9,276 milliards d'euros en AE, soit une hausse de 1,5 % par rapport à 2011, et 9,21 milliards d'euros en CP 36 ( * ) , soit une hausse de 1,4 % .

Au regard de cette progression, votre rapporteur spécial tient, toutefois, à rappeler que l'esprit de la LOLF amène à ne plus considérer un budget sous le seul angle de l'augmentation de ses crédits, mais surtout par le niveau de performance qu'il atteint .

B. LA BAISSE TRÈS MARQUÉE DES EFFECTIFS

Le plafond d'emploi du programme « Police nationale » avait connu en 2009 et en 2010 de fortes réductions (respectivement - 2 383 ETPT et - 1 390 ETPT). Ce mouvement à la baisse s'était interrompu en 2011 avec une progression de 714 ETPT. L'année 2012 sera toutefois marquée par un nouveau changement de tendance puisque le plafond d'emploi diminue à nouveau de 1 720 ETPT pour s'établir à 143 714 ETPT .

Cette évolution résulte de l'impact prévu des schémas d'emploi pour 2011 et pour 2012 sur l'année 2012 (- 1 573 ETPT) et du solde des transferts vers d'autres programmes (- 147 ETPT) 37 ( * ) .

A périmètre constant , la tendance à la baisse présente une plus grande régularité. La police avait vu ses emplois diminuer de 712 ETPT en 2011 et elle enregistrera une nouvelle réduction en 2012 : - 1 682 ETPT .

Parmi les évolutions notables de l'emploi au sein du programme, on peut notamment relever la baisse du plafond des corps d'encadrement et d'application (- 1 866 ETPT) ainsi que de celui des « Hauts fonctionnaires, corps de conception et de direction et corps de commandement » (- 276 ETPT) et des personnels techniques (- 217 ETPT). S'agissant des commissaires et des officiers , ces emplois avait déjà connu au cours des années précédentes une réduction à mettre en relation avec les transformations d'emplois prévues par la réforme des « corps et carrières » de la police nationale 38 ( * ) , impliquant une déflation des effectifs du corps de conception et de direction ainsi que de celui de commandement.

En termes de dépenses de personnel , ces tendances se traduisent par une hausse modérée de 1,7 % , le poste budgétaire passant de 8,118 milliards d'euros en 2011 à 8,253 milliards d'euros en 2012.

Cette augmentation trouve essentiellement son explication dans la progression des contributions aux charges de pensions : 2,593 milliards d'euros en 2012 au lieu de 2,461 milliards d'euros en 2011 (+ 5,4 %) .

Par ailleurs, une enveloppe de 39,7 millions d'euros est consacrée à la poursuite de la réforme des corps et des carrières lancée en 2004 et de l'adaptation de la nouvelle grille de la catégorie B au corps d'encadrement et d'application. Elle permettra notamment :

- la poursuite du repyramidage du corps d'encadrement et d'application (CEA) en faveur de l'encadrement intermédiaire ;

- la revalorisation indiciaire du CEA et du corps de commandement ;

- les mesures d'accompagnement du passage des officiers de police à un régime de cadre en revalorisant les montants de la prime de commandement et en augmentant le nombre des emplois fonctionnels de commandant.

C. LE RECUL CONTINU DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT

En 2012, les crédits de fonctionnement du présent programme enregistreront une nouvelle baisse de 2,3 % , en passant de 761 millions d'euros en 2011 à 743,7 millions d'euros l'année prochaine.

Afin de bien apprécier la trajectoire du budget de fonctionnement de la police, il convient de rappeler que ses crédits de fonctionnement (CP) ont subi un recul au cours des trois dernières années : - 3,6 % en 2009, - 5,7 % en 2010 et - 0,6 % en 2011.

Cette baisse continue des moyens consacrés au fonctionnement de la police ne va pas sans créer des tensions en gestion .

Ainsi, la réserve pour 2011 du programme 176 (soit 40,6 millions d'euros, correspondant à un taux de mise en réserve de 0,5 %) a été levée en quasi intégralité dès le début de la gestion en cours. Ce dégel de la réserve a ainsi permis de couvrir un certain nombre d'impasses budgétaires, dont notamment l'indemnisation des gardiens de fourrière (12 millions d'euros) et le financement de l'organisation des sommets du G8 et du G20 (8 millions d'euros).

Concernant les AE , l'exercice 2011 avait constitué une évolution notable en matière de prise en compte des baux pluriannuels, signés ou renouvelés dans l'année. Une dotation « exceptionnelle » de 161,8 millions d'euros avait ainsi été accordée en 2011 pour couvrir ces dépenses de fonctionnement immobilières. Cet effet comptable étant désormais surmonté, les AE redescendent à 703,8 millions d'euros (contre 884,3 millions d'euros en 2011, soit - 20,4 %).

Au regard de la tendance à la baisse continue des crédits de fonctionnement (CP) de la police, votre rapporteur spécial estime qu'un seuil a probablement été atteint et qu'aller au-delà de ce plancher ferait peser un fort risque sur le potentiel opérationnel de cette force .

D. UN NOUVEAU CHAPITRE DU « STOP AND GO » DE LA POLITIQUE D'INVESTISSEMENT

Depuis plusieurs années, le programme « Police nationale » subi une évolution plutôt heurtée de ses crédits d'investissement.

En 2009 , ses CP baissaient de 3,6 % et ses AE chutaient de 22,2 %. Rappelant le bilan de l'application de la LOPSI 1, votre rapporteur spécial, alors notre collègue Aymeri de Montesquiou, avait déploré un déséquilibre dans la mise en oeuvre de cette loi, le fonctionnement ayant été privilégié par rapport à l'investissement au cours de l'exécution de la programmation 39 ( * ) . Il avait souhaité que les arbitrages nécessaires entre le fonctionnement et l'investissement ne mettent pas en péril la dynamique de modernisation de la police nationale 40 ( * ) .

En 2010, l'effort d'investissement au sein du présent programme repartait avec une majoration de 5,8 % des CP et une très forte hausse de 88,2 % 41 ( * ) des AE. Ce bond résultait de l'ouverture de la tranche de la LOPPSI 2 pour l'exercice 2010 et favorisait notamment les dépenses relatives à la modernisation technologique de la police.

En 2011 , les dépenses d'investissement ont connu à nouveau un recul, avec une chute de 28,3 % pour les CP et de 77,5 % pour les AE . Votre commission des finances s'était donc à nouveau inquiétée des arbitrages rendus au détriment de l'effort d'investissement 42 ( * ) . Au sein du programme, les marges de manoeuvre en matière d'investissement sont d'ailleurs d'autant plus limitées que la LOPPSI 2 « flèche » de manière impérative un certain nombre de dépenses, contribuant à restreindre encore un peu plus le champ des possibles offert au responsable de programme.

En 2012 , l'investissement enregistre un redémarrage à la hausse. Alors que les CP augmentent de 9,1 % (174,5 millions d'euros en 2012), les AE bondissent de 207,9 % (279,9 millions d'euros en 2012).

L'évolution des AE s'explique par la nécessité de couvrir plusieurs projets immobiliers en faveur de la police, et notamment celui relatif au relogement de la direction régionale de la police judiciaire de la préfecture de police (DRPJ) sur le site de la zone d'aménagement concertée (ZAC) des Batignolles à Paris (17 ème arrondissement) . L'installation des services de la DRPJ de la préfecture de police sur le site des Batignolles s'inscrit, d'une part, dans la dynamique souhaitée par le Gouvernement pour le « Grand Paris » et, d'autre part, dans la mise en oeuvre de la RGPP (en rationalisant les transfèrements des personnes gardées à vue et en recherchant les synergies entre les services de police et de justice). A lui seul, ce projet mobilise 131 millions d'euros en AE.


* 35 Y compris fonds de concours et attributions de produits.

* 36 Dont 22,7 millions d'euros de fonds de concours, provenant essentiellement de « services d'ordre indemnisés », c'est-à-dire d'interventions « hors service public » facturées à des entreprises privées, notamment à l'occasion de compétitions sportives.

* 37 Le présent programme contribue à un redéploiement interne au sein du plafond d'emploi du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration au profit du programme 307 « Administration territoriale » de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » à hauteur de 122 ETPT afin de doter en emplois le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) et de renforcer les effectifs de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité.

* 38 La réforme des « corps et carrières » de la police nationale a été lancée en 2003 et s'est traduite dans un protocole d'accord signé, le 17 juin 2004, entre le ministre de l'intérieur et la quasi-totalité des organisations représentatives des personnels. Ce protocole fixe cinq objectifs : rendre plus efficace l'organisation hiérarchique, renforcer les compétences et l'encadrement quotidien, mieux motiver les personnels en reconnaissant les professionnalismes, les mérites et en redonnant des perspectives de carrière, récupérer du potentiel par une gestion du temps plus rigoureuse, et moderniser la gestion des ressources humaines.

* 39 Rapport spécial n° 91 (2007-2008), tome III - annexe 28 : « Sécurité ».

* 40 Rapport spécial n° 99 (2008-2009), tome III - annexe 27 : « Sécurité ».

* 41 Rapport spécial n° 101 (2009-2010), tome III - annexe 28 : « Sécurité ».

* 42 Rapport spécial n° 111 (2010-2011), tome III - annexe 27 : « Sécurité ».