M. Michel Canevet, rapporteur spécial

PREMIÈRE PARTIE :
LA MISSION «  DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT »

I. APERÇU GÉNÉRAL DES CRÉDITS DE LA MISSION

A. 35 MILLIONS D'EUROS DE HAUSSE DES CRÉDITS POUR FINANCER LA SÉCURITÉ DES SYSTÈMES D'INFORMATION

Les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » (DAG) demandés en 2015 s'élèvent à 1,247 milliard d'euros en crédits de paiement (CP) et à 1,266 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE).

Par rapport à la loi de finances initiale pour 2014 (au périmètre 2015), les crédits de cette mission sont en hausse : + 2,86 % en CP (soit + 35 millions d'euros) et + 0,96 % en AE (soit + 12 millions d'euros).

Cette hausse des crédits s'explique principalement par la nécessité de renforcer la sécurité nationale : des moyens supplémentaires seront donnés au secrétariat général de la défense nationale ( SGDSN ), qui percevra 36 millions d'euros de plus qu'en 2014, afin notamment de financer la montée en puissance de l'Agence nationale pour la sécurité des systèmes d'information (ANSSI).

Dans la perspective de garantir la transparence de la vie publique, le Gouvernement propose une augmentation des crédits de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) créée en 2014. La hausse de 28 % des crédits de cette autorité administrative indépendante (AAI) correspond à 0,8 million d'euros supplémentaires.

S'agissant des économies envisagées, il a été répondu à votre rapporteur spécial que « sur le périmètre de la mission « Direction de l'action du gouvernement », dans le projet de loi de finances 2015, aucune réforme structurelle n'est envisagée 1 ( * ) ».

Les économies réalisées sur cette mission correspondent principalement à la diminution des dépenses de fonctionnement dans les directions départementales interministérielles (DDI) et des loyers et charges des administrations déconcentrées grâce aux opérations de regroupement réalisées .

(en millions d'euros, à structure 2015 et avant transferts, hors fonds de concours et attributions de produits)

Évolution des crédits (AE et CP) de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » entre la LFI 2014 et le PLF 2015

B. UNE MISSION À L'ABRI DES INDISPENSABLES ÉCONOMIES

L'augmentation des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » est à mettre en regard avec l'évolution des crédits de l'État et de ses opérateurs ; selon l'exposé général des motifs du projet de loi de finances (PLF) pour 2015, par rapport à 2014, les dépenses de l'État et de ses opérateurs 2 ( * ) devraient diminuer de 0,57 %.

Évolution des crédits (CP) de la mission et du budget général entre 2014 et 2015

(en millions d'euros, sauf indication contraire)

2014

2015

Évolution

Variation

Dépenses des ministères et contributions au CAS « Pensions »

255 832

254 372

-1 460

-0,57%

Dépenses DAG (périmètre 2015)

1 212

1 247

35

2,86%

Source : commission des finances du Sénat, à partir du programme annuel de performance (PAP) et du projet de loi de finances pour 2015

S'agissant de la programmation pluriannuelle, les crédits de la mission (hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ») devraient augmenter de 3,4 % sur la période 2014-2017, passant ainsi de 1,14 milliard d'euros à 1,18 milliard d'euros , alors que sur la même période, les dépenses de l'État (hors contribution au CAS « Pensions ») diminuent.

La hausse des crédits de la mission est concentrée sur l'année 2015, alors que sur l'ensemble de la période 2015-2017, on observe une stabilisation des crédits.

Évolution des crédits (CP) de la mission et du budget général entre 2014 et 2017

(en millions d'euros)

(échelle de droite : dépenses de la mission ; échelle de gauche : dépenses des ministères)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

C. UNE ÉVOLUTION TRIENNALE DIFFICILE À APPRÉHENDER EN RAISON D'INCESSANTS MOUVEMENTS

Évolution des crédits (exécution et lois de programmation)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Mesures de transfert et mesures de périmètre

« La charte de budgétisation (...) détaille les modalités de prise en compte des modifications de champ dans le calcul de la norme afin de déterminer l'évolution de la dépense à champ constant.

Afin d'apprécier le respect d'une norme d'évolution de la dépense, il importe de pouvoir comparer entre eux des exercices budgétaires différents . La réalité de la dynamique de la dépense doit donc s'apprécier entre deux lois de finances consécutives, à périmètre (ou champ) constant. (...)

À cette fin, seuls doivent être intégrés au calcul de la norme de dépense les mouvements de dépense et les affectations de recettes ayant pour effet d'accroître ou de diminuer le niveau de la dépense publique.

A contrario , les mouvements constituant une simple réimputation au sein du périmètre de la norme (...), ne doivent pas être comptabilisés dans ce calcul. Ces mouvements, équilibrés en recette et en dépense, sont appelés mesures de transfert quand ils ont lieu au sein du champ de la norme ou mesures de périmètre quand ils ont lieu entre ce même champ de la norme et une autre entité . Leur prise en compte permet de passer du champ constant au champ courant, sur lequel est présenté le projet de loi de finances de l'année (PLF), mais ils sont sans influence sur l'appréciation de la dynamique du budget. »

Source : IV. de l'exposé général des motifs du PLF pour 2015

En 2015, la mission fait l'objet de mesures de périmètre pour un montant de 2,93 millions d'euros . Elles visent à neutraliser les évolutions de crédits résultant d'une modification de la fiscalité.

Ainsi, en raison de son changement de statut (cf. infra ) le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) est désormais assujetti à la taxe sur les salaires tandis que la Grande chancellerie de la Légion d'honneur et le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » voient leur situation régularisée au titre de cette même taxe.

Ces mesures de périmètre, traditionnelles, n'appellent aucune observation particulière.

En raison de son caractère interministériel, cette mission fait l'objet de nombreuses mesures de transferts, en provenance notamment de la mission « Défense » .

En 2014, les mesures de transfert représentaient environ 10 millions d'euros ; en 2015, il est prévu de transférer 208 « équivalent temps plein travaillé » (ETPT) vers la mission « Direction de l'action du Gouvernement », soit environ 9 millions d'euros . Ces transferts concernent exclusivement le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental ».

Mesures de transfert

(en millions d'euros, sauf indication contraire)

Nombre d'ETPT

Provenance des ETPT

Crédits de titre 2 transférés (hors CAS pensions)

Crédits (hors titre 2) transférés

Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires

7

P122 « Soutien de la politique de la Défense »

0,5

0,1

DISIC (réorientation du projet ONP)

12

P128 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières »

0,9

SGDSN (Centre de transmission gouvernemental)

184

P178 « Préparation et emploi des forces »

7,3

Gestion de l'immeuble 55 rue Saint Dominique

0

P155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail »

0

0,7

SGMer

3

P146 « Équipement des forces »

0,1

Mutualisation des fonctions support

2

P112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire »

0,1

Convention Agence France-Presse

P180 « Presse »

0

-0,2

Total

208

8,9

0,6

Source : commission des finances du Sénat

Les transferts vers la mission se justifient notamment par le nécessaire pilotage interministériel des questions de mutualisation et de rationalisation de l'action publique , qui montent en puissance.

Ces transferts peuvent se justifier, mais ils rendent malaisée la comparaison, sur longue période, des crédits de la mission dont le périmètre n'est pas constant.

L'indispensable coordination interministérielle de projets structurants pour l'État : l'exemple de l'opérateur national de paye (ONP)

Le 10 mars 2014, le Gouvernement a annoncé l'abandon du projet de l'ONP, chantier informatique lancé en 2007 dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et qui visait à doter l'État d'un système de paye unifié et harmonisé pour tous ses agents.

Comme le rappelait à votre commission des finances 3 ( * ) Jacques Marzin, directeur de la direction interministérielle des services d'information et de communication (DISIC), créée en 2011 et dont les crédits relèvent de la mission DAG : « L'un des défauts originels du projet est que l'on s'est concentré sur un chiffrage très minutieux de la construction du calculateur, mais que l'on s'est insuffisamment préoccupé de la coordination de l'ensemble des systèmes d'information des ressources humaines (SIRH) ministériels. C'est ce qui a motivé ma mission : alors que l'ONP avait quasiment achevé son calculateur conformément aux spécifications, on constatait que le ministère de l'agriculture, qui était pilote, ne parvenait pas à se raccorder au calculateur pour liquider la paye » .

En 2015, 12 ETPT devraient être transférés vers la DISIC, chargée de gérer le redimensionnement du projet d'ONP.

D. LA PERFORMANCE

Dans la mesure où les crédits dédiés à la sécurité des systèmes d'information augmentent de façon importante, votre rapporteur spécial a souhaité s'intéresser plus particulièrement à l'objectif d'amélioration de la sécurité et de la performance des systèmes d'information de l'État .

Un indicateur de la mission mesure la maturité globale des systèmes d'information de l'État par l'attribution d'une note (comprise entre 0 et 5).

La nette détérioration de l'indicateur en 2012 est en trompe l'oeil, puisqu'elle résulte de la révision (à la hausse) du niveau optimal attendu s'agissant de la sécurité des systèmes d'information - ce niveau correspondant à la note 5.

La mesure de la performance de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information se heurte à la nature même de son activité. Comme l'a indiqué le SGDSN à votre rapporteur spécial, « les attaques informatiques contre les administrations et les entreprises traitées ou accompagnées par l'ANSSI sont destinées à rester confidentielles ».

Les cibles fixées sont régulièrement révisées, en fonction des nouveaux risques identifiés, mais elles demeurent ambitieuses. Toutefois, le présent projet de loi de finances prévoit de revoir la cible à la baisse, sans doute de façon plus réaliste, dans la mesure où l'écart entre le niveau effectivement atteint en 2013 et la cible fixée pour 2013 s'avère important.

Évolution de l'indicateur relatif à la maturité globale en sécurité des systèmes d'information de l'État

(note sur cinq)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports et programmes annuels de performance

Un autre indicateur représentatif de la mission concerne le taux de déficit des directives européennes. Votre rapporteur spécial se félicite de sa diminution.

Taux de déficit de transposition des directives européennes

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports et programmes annuels de performance

E. LE SUIVI DU PROJET IMMOBILIER « SÉGUR-FONTENOY »

Certains services du programme 129 et la plupart des autorités indépendantes du programme 308 devraient être regroupées en 2016 et 2017 sur le site de « Ségur-Fontenoy », à Paris.

Notre collègue Philippe Dominati 4 ( * ) s'était étonné du montage juridique choisi et avait alerté sur les risques de retard du projet, alors même que certaines autorités (en particulier le Défenseur des droits, qui occupe actuellement deux sites) doivent emménager en 2016.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, l'avancement du projet est conforme au calendrier prévisionnel.

Ainsi, « fin 2013, des éléments architecturaux et artistiques du bâtiment Fontenoy ont été inscrits à l'inventaire des monuments historiques par le préfet de Paris et de la région Ile de France. La demande d'autorisation du permis de construire a été déposée le 20 mai 2014 par le maître d'ouvrage. Depuis février 2014, le groupement HORIZON réalise les études, les sondages destructifs, les curages et le désamiantage jusqu'en février 2015.

« Sous réserve de la délivrance du permis de construire purgé des recours des tiers avant février 2015, les travaux de restructuration commenceront à compter de cette date pour s'achever mi-2016 pour le bâtiment Fontenoy et mi-2017 pour le bâtiment Ségur ».

Par ailleurs, « une étude d'optimisation des coûts de fonctionnement en cours de lancement permettra de mesurer les économies et de préciser l'organisation ».


* 1 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 2 Il s'agit du total des dépenses des ministères et affectations de recettes plafonnées ainsi que des contributions au CAS « Pensions ».

* 3 Audition conjointe de M. Olivier Bourges, directeur général adjoint à la direction générale des finances publiques (DGFiP), Mme Marie-Anne Lévêque, directrice générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), M. Jacques Marzin, directeur de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication (DISIC) et de Mme Valérie Metrich-Hecquet, secrétaire générale du ministère de l'agriculture, mercredi 21 mai 2014.

* 4 Rapport d'information n° 774 (2012-2013) fait au nom de la commission des finances du Sénat, par Philippe Dominati sur le pilotage du projet de Centre de Gouvernement.