Loi de finances pour 2011 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l'Assemblée nationale.

Défense

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits affectés à la mission « Défense » et l'article 69.

M. François Trucy, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Monsieur le ministre, je vous félicite pour votre nomination, et connais votre passion pour le service de l'État et la défense. (M. Robert del Picchia applaudit)

C'est un encouragement pour les sénateurs qui s'inquiètent de l'avenir des programmes militaires. En la matière, l'intérêt de l'État prévaut toujours sur les considérations partisanes.

Le temps m'étant insupportablement compté, je limiterai mon propos à quelques sujets.

D'abord, la tenue de nos forces qui affrontent un ennemi redoutable sur le théâtre extrêmement difficile qu'est l'Afghanistan. C'est au prix du sang versé que notre pays peut conserver son rang sur la scène internationale et sa place au Conseil de sécurité. Merci à votre prédécesseur d'avoir amélioré les moyens de nos soldats, dont le dévouement force le respect.

La réorganisation des armées est une opération gigantesque, sans précédent pour un grand corps de l'État : il s'agit de concilier baisse drastique des effectifs et maintien de notre capacité opérationnelle (MCO), mutualisation, maintien des objectifs de recrutement, programmation ambitieuse des matériels. Les efforts accomplis sont dignes d'éloges. Nous espérons beaucoup des accords récents -et inespérés-- franco-britanniques : vous nous en direz plus.

Je m'inquiète en revanche des perspectives de ressources de la mission « Défense » d'ici 2014. Les ressources exceptionnelles vont-elles alimenter le budget à la hauteur prévue ? Quid du projet de Pentagone à la française à Balard ? Avec une croissance du PIB inférieure aux hypothèses retenues, il faudra agir sur les dépenses pour réduire les déficits : la mission « Défense » retrouvera-t-elle son rôle habituel de variable d'ajustement ? Et qu'en sera-t-il au-delà de 2014 ?

Les dépenses de fonctionnement risquent de cannibaliser les dépenses d'équipement à hauteur de plusieurs milliards. S'y ajoutent les graves incidents qu'ont connus certains programmes, comme celui du Charles de Gaulle, les retards de l'A 400 M ou du NH 90.

La Cour des comptes a cloué au pilori la gestion des hôpitaux militaires, oubliant les contraintes exorbitantes qui pèsent sur la Direction centrale des services de santé des armées et ses efforts exceptionnels au service de nos forces en Opex comme des populations locales. Un rapport injuste perd son efficacité.

Sur le papier, votre budget est sincère, équilibré et conforme à la LPM. Les inquiétudes portent plutôt sur les investissements à l'horizon 2014 et au-delà. Vos rapporteurs vous proposent d'approuver ces crédits. (Applaudissements à droite)

M. Charles Guené, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La question essentielle est celle des perspectives budgétaires de cette mission dans le contexte actuel de réduction des déficits. Je vais en présenter les grands équilibres. Il faudra faire des choix.

Les crédits de paiement (CP) s'élèvent à 37 milliards d'euros. Ce montant est conforme à la LPM à 50 millions d'euros près ; les crédits de paiement seraient inférieurs de 500 millions, mais 450 millions de ressources exceptionnelles seraient perçues de façon décalée. Le Gouvernement minore toutefois de 30 millions les ressources imposées par la LPM -l'écart est plutôt de 80 millions, mais on reste dans l'épaisseur du trait. C'est en 2012 et en 2013 que les ressources totales seraient nettement inférieures à ce que prévoit la LMP.

Les ressources exceptionnelles s'élèvent à plus d'1 milliard ; le Gouvernement peut toujours compenser le manque à gagner. Mais le fera-t-il, dans une logique non plus de relance mais de réduction du déficit ?

Les montants prévus pour 2011 permettront-ils d'exécuter physiquement la LPM, en termes d'effectifs et d'équipement ? Nous assistons à la cannibalisation des dépenses d'équipement par les dépenses de fonctionnement, à hauteur de 500 millions en 2011. La LPM programme en euros constants l'ensemble des dépenses ; avec une inflation nulle en 2009, le pouvoir d'achat de la mission a baissé tandis que les dépenses de personne dérapent en euros courants ; il a fallu un décret d'avances.

En matière d'effectifs, la LPM définit deux objectifs, un niveau et une évolution ; le second est respecté, pas le premier. Certaines dépenses d'équipement se substituent à d'autres : nous allons devoir acquérir onze Rafale sur 2010-2012 pour compenser l'absence de contrats à l'exportation.

La LPM fixe des objectifs de capacités opérationnelles. Pour la première fois, l'objectif ne sera atteint qu'à 95 %, pour tenir compte, dit-on laconiquement, des contraintes budgétaires. Faute de volonté politique forte, cela pourrait s'accentuer en 2014 et 2020. Des choix importants sont devant nous. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Le programme 146 doit garantir un matériel moderne et performant à nos armées. Il s'agit de gros sous : 13 milliards en autorisations d'engagement (AE), 12 milliards en crédits de paiement. Ces engagements seront-ils respectés, face aux exigences budgétaires qui devraient perdurer ?

Les dépenses de fonctionnement, sous-estimées dans la LPM, empièteront sur les dépenses d'équipement, soumises à une économie de 1,8 milliard d'ici 2013.

Le Livre blanc prévoyait une augmentation en volume de 1 % par an ; cet objectif est hors d'atteinte. Mais je n'ai jamais vu une LPM pleinement tenue... Ce qui impose la réduction ou l'étalement de certains programmes au risque d'une rupture capacitaire. Tout cela a des conséquences sur la place de la France sur la scène mondiale.

Loin des postures politiciennes - j'ai passé l'âge de ces fantaisies- je n'ai en vue que les intérêts de la France. Nous devrions revoir le Livre blanc ; nous interroger sur le retour en clair-obscur de la France dans le commandement intégré de l'Otan auquel j'étais favorable, en socialiste hérétique ; sortir du débat en catimini sur l'Afghanistan ; examiner les conséquences réelles de la réforme de la carte militaire ; repositionner la pensée stratégique de notre pays : un ou deux porte-avions, défense antimissile, relation franco-allemande, politique commune de sécurité et de défense... Que reste-t-il de notre ambition de nation cadre ? Quid du dogme de la souveraineté ? Ces questions s'imposent à nous tous, de droite comme de gauche.

Encore des questions, cette fois sur le programme 146... Il faut y répondre dans la perspective du rendez-vous de 2012. Du point de vue industriel, que souhaitons-nous conserver de notre autonomie, de nos compétences, de nos bureaux d'étude ? Quel rôle pour la DGA ? A quoi pourrions-nous renoncer ? Quelles sont les conséquences industrielles du récent accord franco-britannique ? Quelles sont les réelles motivations des Britanniques ?

À titre personnel, je m'abstiendrai sur ces crédits. François Mitterrand disait que l'on ne devait jamais voter contre les crédits de défense de son pays ! (Applaudissements sur les plupart des bancs)

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - Le programme 144 respecte l'objectif de renforcement des services de renseignement, avec 165 recrutements à la DGSE. Les efforts en matière statutaire et indiciaire sont bienvenus ; la création d'un cadre d'administrateurs est le signe de la volonté de décloisonner et revaloriser le renseignement. L'augmentation des moyens humains et techniques de la DGSE est un rattrapage nécessaire.

À l'inverse, la DPSD doit perdre 15 % de ses effectifs en six ans, au détriment des emplois administratifs, alors que les catégories A doubleront.

En matière de recherche de défense, les crédits d'études amont se tassent ; les dépenses de développement sont en forte baisse. En donnant la primauté à la dissuasion, on risque de négliger d'autres actions. Je déplore la faible coopération européenne en matière de recherche, et le rôle limité de l'Agence européenne...

En matière immobilière, nos inquiétudes étaient fondées... Quelles seront les conséquences du déficit de ressources sur l'entretien immobilier ?

Sous ces réserves, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à gauche et sur certains bancs UMP)

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - Sénateur girondin, je dis mon plaisir, monsieur le ministre d'État, de présenter mon rapport devant vous.

L'année 2010 marque une étape importante de la modernisation de nos forces de dissuasion nucléaire, avec la mise en service de nouveaux missiles dans chacune de nos deux composantes, du lancement du missile balistique M51.2 qui intègre la nouvelle tête nucléaire océanique validée par simulation. C'est le résultat remarquable d'un financement constant comme du travail du ministère.

Dans l'environnement international actuel, la dissuasion doit demeurer un volet fondamental de notre stratégie de défense. La France a une vision réaliste du désarmement nucléaire ; je me félicite que cette approche se retrouve dans le concept stratégique que l'Otan vient de définir à Lisbonne. Le traité franco-britannique du 2 novembre dernier confirme notre détermination à maintenir une capacité crédible et le rôle des forces nucléaires pour la sécurité européenne.

Les procédures nécessaires à la réalisation des recettes exceptionnelles sont enfin lancées. Le renforcement des moyens spatiaux se poursuit, avec un doublement des moyens prévus d'ici 2020. Or nous ne retrouvons pas la trace de l'ambition du Livre blanc dans les derniers budgets, malgré le lancement du successeur du satellite Hélios 2. Nous nous inquiétons en particulier du retard pris par le satellite d'écoute Cérès et le satellite d'alerte avancée. Il ne faudrait pas perdre le bénéfice des expérimentations engagées. Le lancement d'une nouvelle étape du système SCCOA est retardé. Quid de la mise à niveau de nos radars de surveillance ? Sur les drones, il faut prendre une décision rapidement.

Sous le bénéfice des ces opérations, la commission donne un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et à gauche)

M. Daniel Reiner, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - En matière d'équipements conventionnels, la programmation ne sera pas pleinement respectée : il manquera 3,63 milliards sur la période 2011-2013, les budgets 2012 et 2013 étant particulièrement affectés.

Les crédits de paiement affectés à l'équipement des forces diminuent de 5,78 %. Les dépenses militaires redeviennent variable d'ajustement. Cette baisse entraîne le report de programmes importants, rénovation des Mirage 2000D, avion ravitailleur, satellite Cérès.

Le sauvetage du programme A400M était indispensable. La première Fremm a été mise à l'eau en mai, mais le nombre d'unités prévues n'est plus de dix-sept mais de onze. Enfin, nous nous intéressons au successeur du programme Milan en espérant qu'il restera européen.

Les Mirages 2000D sont d'excellents avions. Or, leur rénovation est reportée, à cause du rachat de Rafale. On peut craindre leur obsolescence dès 2014 et la réduction de la flotte à 150 avions de combat ! Les nouveaux ravitailleurs en vol se font aussi attendre. Le remplacement des drones Male n'est pas tranché : nous avons raté la marche. Je relève aussi le report du programme Scorpion.

La commission unanime s'est réjouie de l'amendement adopté à l'Assemblée nationale relatif aux marins-pompiers de Marseille.

Elle recommande l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur la plupart des bancs)

M. André Dulait, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - En matière de ressources humaines, la LPM prévoit la suppression de 54 000 postes : c'est sans précédent. La réforme organisationnelle offre des perspectives de mutualisation et de rationalisation ; elle est surtout le pendant indispensable de la baisse des effectifs.

En 2010, le pilotage de la déflation des effectifs a été satisfaisant, à l'exception de l'objectif de reclassement des militaires dans la fonction publique.

S'agissante du programme 178, la commission se félicite de l'amélioration du titre III. La difficulté tient à la concordance du cadrage financier de l'évolution de la masse salariale et de celle des effectifs, liée par exemple à la pleine réintégration dans l'Otan, à la base d'Abu Dhabi ou aux indemnités chômage. Difficile également de faire coïncider selon les types d'emploi départs naturels et besoins : quelles sont vos perspectives en matière de fidélisation des militaires du rang, de gestion des départs en retraite à la suite de la réforme ?

La budgétisation des Opex, qui font partie du fonctionnement ordinaire de nos armées, n'est plus ponctuelle ; espérons que ces opérations ne seront pas permanentes ! Les réserves, enfin, sont un besoin indispensable, aux dires des militaires eux-mêmes ; les crédits qui y sont affectés sont très inférieurs aux besoins. Monsieur le ministre, tous nos voeux de réussite !

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis.  - Il en a besoin, le pauvre homme !

M. André Dulait, rapporteur pour avis.  - La commission recommande l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Louis Carrère, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. - J'ai plaisir à vous revoir parmi nous, monsieur le ministre d'État. Je vous présente les crédits de fonctionnement courant des armées qui recouvrent la MCO et l'entraînement des personnels. Les crédits de paiement augmentent de 5,7 % ; ceux de l'action « Emploi des forces » augmentent de 22 %, les trois autres décroissent, avec le transfert des crédits de soutien vers les bases de défense. S'il fallait réduire la période de transition pour la mise en place de celles-ci, n'est-on pas allé trop vite ?

Le maintien en condition opérationnelle des matériels n'est devenu un problème qu'à compter des années 90, en raison de la complexité technologique croissante des matériels. Les armées se sont progressivement organisées, à partir de l'année 2000, pour mieux structurer leurs services de maintenance.

Mais les coûts augmentent, tandis que le volume de personnel affecté à la maintenance diminue, ce qui pourrait contribuer à une stabilisation des coûts globaux. Une part importante de la maintenance sera transférée à des structures extérieures, publiques ou privées.

La durée d'entraînement des troupes doit être réduite d'ici à 2013. Le chef d'état-major de l'armée de terre considère que les Opex compensent cette diminution, mais celles-ci requièrent au contraire un entraînement intensif. Ce n'est pas du basket-ball ! Nos forces ont une durée d'entraînement comparable à celle des autres armées occidentales.

Sous le bénéfice de ces observations, la majorité de la commission, dont je ne fais pas partie, a donné un avis favorable aux crédits de la mission. (Applaudissements à gauche)

M. Didier Boulaud.  - Le contexte stratégique est mouvant. Cette discussion budgétaire intervient juste après le sommet de l'Otan à Lisbonne, alors que la crise financière mondiale n'est pas terminée, que la défense européenne est paralysée au point qu'un de vos prédécesseurs à Matignon la voit morte. En outre, le ministre qui nous présente ce budget ne l'a pas préparé -ni même défendu devant l'Assemblée nationale- non plus que la loi de programmation militaire ou le Livre blanc. Il va vous falloir assumer cet héritage, monsieur le ministre d'État.

Tout n'avait pas si mal commencé. Dès son arrivée, le Président de la République avait décidé de remettre à plat les dépenses militaires.

M. François Trucy, rapporteur spécial.  - N'oubliez pas la responsabilité de M. Richard !

M. Didier Boulaud.  - Sur ce budget, certains parlent de tour d'écrou et d'escamotage. Ne vous y trompez pas : le vote de la commission ne reflète que la disposition de la majorité à se montrer bienveillante.

Plus c'est gros, plus ça passe ! Il manque 25 milliards d'euros d'ici 2020 pour l'application du Livre blanc. Ce budget est à l'image d'une politique qui n'a pas tenu ses promesses. La loi de programmation militaire tablait sur des hypothèses irréalistes. Le coût du retour dans l'Otan a été passé sous silence, comme celui de la base d'Abu Dhabi. Les Opex restent sous-budgétées. Les conséquences de la réorganisation territoriale ont été mal évaluées. Ne parlons pas du « Pentagone à la française » ou du « Balardgone », en période de disette budgétaire...

Les Allemands et les Britanniques ont revu leurs programmes dans un esprit de transparence. Le Président de la République se refuse à une telle épreuve de vérité.

Si l'on s'amuse à additionner annulations, gels et reports probables, le déficit est plus proche de 6 milliards d'euros que des 3,6 milliards affichés. Votre successeur en 2012 devra affronter une situation détériorée. Nous ne voterons pas ce budget qui ne sert qu'à masquer le désordre. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Chevènement.  - La loi de programmation militaire est mise en cause par la crise et la promesse faite à Bruxelles de réduire notre déficit à 3 % d'ici 2013. La mission « Défense » voit ses crédits amputés de 3,6 milliards, partiellement compensés par des recettes exceptionnelles aléatoires -si bien que la perte effective pourrait atteindre les 5 milliards. Ce n'est pas une petite encoche !

Perte de recettes immobilières, cannibalisation des dépenses d'équipement par le fonctionnement, dérapage des Opex : il manquerait entre 10 et 35 milliards d'euros par rapport à la loi de programmation militaire ! Le risque n'est pas mince que le budget de la défense serve de réserve si l'hypothèse de croissance retenue par le Gouvernement s'avérait trop optimiste. Vous devrez donc défendre bec et ongles vos crédits, monsieur le ministre d'État.

L'argument industriel prime désormais l'argument militaire : on préfère acheter treize Rafale plutôt que de rénover les 77 Mirage 2000-D que le chef d'état-major de l'armée de l'air qualifiait naguère d'élément central. Avec l'obsolescence des Transall et le retard de l'A 400 M, nos capacités de projection sont obérées.

Les effectifs sont inférieurs de 4 000 équivalents temps plein (ETP) aux prévisions. La réforme brutale de la retraite des non-officiers a été très mal vécue. Il ne faudrait pas descendre en-dessous de 600 euros par mois après quinze ans de service. C'est d'un contrat de confiance avec nos soldats qu'il s'agit.

La France a signé le traité d'interdiction des armes à sous-munition, contrairement aux États-Unis, à la Russie, à la Chine, à l'Inde, au Pakistan, à Israël. D'où le nouveau lance-roquettes unitaire, mais celui-ci a pris du retard. Nous n'avons presque plus d'artillerie, d'autant que la livraison de 69 automoteurs à roues Caesar est retardée. Les arbitrages financiers n'ont pas à se substituer aux choix politico-militaires que nous vous demandons d'avoir, monsieur le ministre d'État.

Quelles perspectives stratégiques ? Nous avons réintégré les structures militaires de l'Otan, au prétexte de faire avancer la défense européenne. Bien entendu, il n'est rien résulté de tel et le coût de cette réintégration a été mal évalué. Jamais les dépenses européennes de défense n'ont été aussi faibles : à 1 % du PIB. L'accord franco-britannique est purement bilatéral et motivé par des raisons étroitement budgétaires.

La participation à la force interventionnelle en Afghanistan représente 50 % du coût des Opex. Il faut revoir nos ambitions : nous n'exporterons pas la démocratie occidentale auprès des Afghans, le seul objectif réaliste est de dissocier les Pachtounes d'Al-Qaïda.

À Lisbonne, la France s'est alignée sur les positions américaines et ralliée sans tambour ni trompette à la défense antimissile, à laquelle nous avions marqué nos plus extrêmes réserves depuis 1984. Cette défense ne peut qu'être un complément à la dissuasion, non un substitut à celle-ci. L'orientation définie à Lisbonne est néfaste, car elle met en cause la dissuasion nucléaire. Que seront demain les relations entre les États-Unis et la Russie ? À eux deux, ces pays détiennent 90 % des têtes nucléaires. Nous avons calibré notre dissuasion en fonction du principe de stricte suffisance mais la Chine, l'Inde, le Pakistan, la Corée du Nord continuent de développer leurs arsenaux. L'administration Obama peine à faire ratifier le traité Start. Nous n'avons pas les moyens de mener des guerres conventionnelles à longue distance. Entre le glaive et le bouclier, le glaive l'a toujours emporté : pensez aux limes romain, à la muraille de Chine, au mur de l'Atlantique ou à la ligne Maginot, combien démobilisante !

On ne peut pas refuser ce que tous nos alliés acceptent, dit-on. Mais je ne vous range pas dans la catégorie des suivistes, monsieur le ministre d'État ! (Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. le président.  - L'examen des crédits de la Défense n'autorise pas à exploser les temps de parole ! (Sourires)

Mme Michelle Demessine.  - Ce budget correspond mal au Livre blanc et à la loi de programmation militaire : moins d'effectifs, de crédits de fonctionnement, de commandes. On attend 3,6 milliards d'euros d'économies. Il manquera 2 milliards pour les équipements et les études amont. Les recettes exceptionnelles sont incertaines.

Dans un bel euphémisme, le délégué général à l'armement a parlé d'une « inflexion par rapport à la trajectoire de ressources prévues au titre de la loi de programmation militaire ». Les recettes exceptionnelles sur lesquelles vous comptez ne sont pas acquises. La réforme poursuivie a un coût humain et matériel très lourd. On peut redouter la perte de savoir-faire et la baisse de nos capacités. Le renouvellement des équipements Félin ou des Mirage 2000-D est en péril.

Les crédits affectés à notre force de frappe sont trop élevés : 10 millions d'euros par jour pour l'arme nucléaire, qui consomme 21 % des crédits d'équipement ! Le renouvellement des deux composantes ASMPA et M51 ne garantit pas la crédibilité de notre arsenal et enfreint le traité de non-prolifération.

L'alignement atlantiste coûte cher. L'opération en Afghanistan représente la moitié du budget des Opex. Monsieur le ministre d'État, vous qui parliez de « piège afghan », vous nous demandez aujourd'hui une rallonge !

La réintégration dans l'Otan remet en cause notre autonomie, alors que notre place dans les structures de commandement n'a pas été renforcée, et que l'Europe de la défense piétine. Vous étiez sceptique à ce sujet... La France est mise au service d'une alliance politico-militaire offensive qui prétend intervenir partout pour défendre les intérêts occidentaux et l'économie de marché. Le rôle de la France doit-il se limiter à faire le gendarme dans les pays moins développés ?

Les États-Unis ont fait accepter à leurs alliés le coûteux bouclier antimissiles, au bénéfice de leur industrie d'armement. Ils en seront les seuls maîtres. Ce bouclier ne fera qu'alimenter la course aux armements. Quel revirement, monsieur le ministre, depuis votre tribune dans Le Monde soutenant la proposition du président Obama de désarmement nucléaire ! La perspective de défense européenne s'éloigne d'autant, et ce ne sont pas les accords bilatéraux avec les Britanniques qui la feront progresser.

Le groupe CRC-CRC ne votera pas ce budget. (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Gautier.  - Je salue votre nomination, monsieur le ministre d'État, à ce moment crucial pour nos armées en pleine restructuration.

Le Premier ministre a souhaité que les économies servent à l'amélioration du statut militaire et de l'équipement. Je rends hommage à nos forces, en particulier en Opex. (« Très bien ! » et applaudissements à droite)

L'effort d'équipement est sans précédent. La réduction de 3,6 milliards par rapport à la loi de programmation militaire est compensée par les recettes exceptionnelles.

M. Didier Boulaud.  - C'est la quatrième fois qu'on nous fait le coup !

M. Jacques Gautier.  - Espérons qu'elles seront au rendez-vous. La crise nous contraints à faire des économies. Je crains que le budget de la défense ne devienne un TOTB, un « terrible objet de tentation budgétaire » ! (Sourires)

De nombreux programmes ont pris du retard. Nous courons un risque dramatique de décrochage capacitaire. N'oublions pas les retombées économiques de l'équipement de nos armées : ce sont 165 000 emplois directs et des milliers d'autres chez les sous-traitants !

L'accord franco-britannique garantit la pérennité et l'autonomie de notre dissuasion.

J'espère que l'Italie et l'Espagne nous rejoindront. La brigade franco-britannique devrait être plus opérationnelle que la franco-allemande qui est surtout symbolique. La mutualisation des moyens nous rendra plus efficaces.

Un drone Male nouvelle génération pourrait être en service vers 2020 ; en attendant, il faut répondre aux besoins de nos troupes.

A Lisbonne, la France a obtenu des avancées sur le nouveau concept stratégique, et la diminution des moyens : c'est le résultat de la réintégration dans l'Otan. Mais les États-Unis se tournent aujourd'hui vers l'Asie. Il faudra poursuivre la rationalisation. On ne peut laisser subsister une telle dispersion des forces en Europe !

M. Didier Boulaud.  - Et ce n'est pas fini !

M. Jacques Gautier.  - Votre mission est exaltante, monsieur le ministre d'État, mais les moyens manquent. N'oublions pas nos soldats et leurs sacrifices ! Le groupe UMP vous fait une pleine confiance, et votera le budget. (Applaudissements à droite)

M. Yves Pozzo di Borgo.  - Les crédits de cette mission sont inférieurs aux prévisions de la loi de programmation militaire : le ministère de la défense ne peut s'exonérer de l'effort commun. Cette contrainte peut être une occasion, que nous devons saisir pour renforcer les deux piliers complémentaires que sont la défense européenne et l'Otan. La doctrine centriste, celle de Jean Lecanuet, a été consacrée par le Livre blanc ; j'espère que vous poursuivrez dans cette voie, après M. Morin.

Depuis 2002, les opérations militaires européennes se sont multipliées. La nomination d'un Haut représentant de l'action extérieure est un progrès ; mais je citerai surtout des réalisations complexes : Erasmus militaire, surveillance côtière, centre d'analyse d'images, flottille commune, etc.

Le rapprochement franco-britannique est un pas vers une défense européenne intégrée, mais les coupes budgétaires, dans toute l'Europe, menacent la sécurité du continent. S'y ajoute le manque de coopération.

Un récent article du New York Times faisait apparaître l'énorme retard européen en matière de concentration des industries de défense. Il est urgent de renforcer les coopérations, pour conforter notre place dans le monde, préserver nos capacités et établir une relation équilibrée avec les Américains.

La réintégration dans les structures militaires de l'Otan y accroît notre influence et permet à la défense européenne de se développer sans inquiéter les Britanniques ou les Européens de l'Est. A cet égard, je me réjouis de votre présence à Lisbonne, avec Mme Alliot-Marie. Des journalistes ont vu de l'ironie dans mon constat que les deux ministres d'État de ce Gouvernement étaient deux éminentes personnalités gaullistes ; c'était tout le contraire : je m'en réjouis.

Il faut renforcer la coopération entre l'Otan, l'Union européenne et la Russie : la page de la guerre froide est tournée, la menace a changé de nature et d'origine. Nous attendons des projets communs. Le monde avance vite : la Chine vient de redéfinir ses ambitions et ses capacités industrielles de défense. Il est urgent que l'Europe de la défense se concrétise.

Il y faut une volonté politique forte ; je compte sur vous monsieur le ministre d'État, et sur le Président de la République. Le groupe UC votera votre budget. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Louis Carrère.  - Je commence par une pensée pour le président de Rohan. Il va bien, tant mieux.

Le sommet de Lisbonne n'a pas apporté toute la clarté attendue ; le Parlement, encore une fois, a été laissé à l'écart. On discute à Lisbonne mais pas à Paris. L'Élysée a parlé, tout est dit. Le Parlement n'est qu'informé après coup et prié de suivre en silence.

En Afghanistan, le calendrier de retrait reste flou. Le bouclier antimissiles pourrait avoir des conséquences stratégiques graves ; il fera de nos industriels des sous-traitants. Le nouveau concept stratégique renforce le rôle des États-Unis : exit l'Europe de la défense.

En Afghanistan, échec, confusion, désordre. On change de stratégie tous les six mois. On se proposait naguère de « gagner les coeurs et les esprits ». Quelle est la nouvelle stratégie définie à Lisbonne ? Une stratégie de communication.

Quand nous parlions de retrait du bourbier afghan, c'était abominable, et voici qu'on nous annonce un calendrier de retrait ! Rien n'a changé sur le terrain, mais à Washington, à Londres et à Berlin, on se rend désormais compte que l'Otan n'en mène pas large. Les Américains décideront, les Européens suivront.

Le retrait américain devait commencer en 2011 ; l'Allemagne devrait commencer en 2011 ; l'Allemagne l'a fixé pour 2012, la Grande-Bretagne en 2014. Votre prédécesseur annonçait des transferts aux Afghans en 2011... Qui croire ? Le transfert de responsabilités aux Afghans ne signifie pas le retrait des troupes. L'engagement risque de se prolonger indéfiniment ! On voit mal un État afghan stable émerger d'ici trois ans. Nous sommes venus, nous avons vu, nous n'avons pas vaincu...

Vu l'état de nos finances et de nos forces, comment augmenter encore notre présence sur place ? La stratégie de sortie du conflit est-elle adaptée ?

L'Otan a surtout cherché à rassurer l'opinion publique. Quelle est la stratégie politique pour sortir du conflit ? Le silence est assourdissant sur les négociations avec les talibans, sur les combats aux frontières du Pakistan...

Chacun regarde comment le piège afghan se referme. Quels sont les objectifs de l'intervention ? Lutte contre Al-Qaïda, défaite des talibans, soutien à M. Karzaï, à l'économie afghane ? Cette confusion des objectifs est irresponsable et inefficace. La dérive s'et accentuée après 2007, lorsque le Président de la République a accepté de mettre nos troupes à la remorque de l'Otan, c'est-à-dire à la remorque des États-Unis. Ailleurs, les Parlements discutent de l'engagement en Afghanistan, et appellent un chat un chat !

Monsieur le ministre, cette guerre est un piège : vous l'avez dit vous-même ! Nous demandons une sortie d'Afghanistan progressive, planifiée et débattue. (Applaudissements à gauche)

Mme Dominique Voynet.  - Exercice complexe que de tenter d'évaluer la crédibilité de ce budget, dont on ne connaît pas les priorités...S'agit-il d'assurer la sécurité du territoire ? D'assurer la protection des intérêts français ? De consolider une industrie de la défense en difficulté, au nom de l'amitié ou de l'emploi ? A-t-on changé de planète en changeant de ministre ? La LPM à peine votée, la donne a totalement changé. Après la réintégration dans l'Otan, décidée en conclave restreint, le ralliement au concept de bouclier antimissiles est un bouleversement, mettant à mal notre relation avec l'Allemagne. Quant à la défense européenne, il n'en est plus question.

Le rêve d'une dénucléarisation de l'Europe, que l'on croyait percevoir dans le discours du Président Obama, est mis à mal. Un bouclier est passif ; ici, il s'agit d'armes destinées à être employées !

Les actes d'aujourd'hui démentent les paroles d'hier. Il vaut mieux pouvoir neutraliser un missile avant qu'il ne fasse des dégâts au sol, a dit le Président de la République. C'est évident. (Rires à gauche) La menace, c'est l'Iran, ajoute-t-il in petto. Je ne comprends plus : si ses dirigeants sont virulents, ils ne sont pas irrationnels : frapper un pays doté de l'arme nucléaire serait signer l'arrêt de mort de la dissuasion ! La menace iranienne n'est pas nucléaire, mais se situe du côté du terrorisme, de la biopiraterie.

Si les finances publiques étaient florissantes, nous pourrions nous accommoder de la juxtaposition de programmes couteux à des objectifs fumeux. Mais le moment n'est-il pas venu de faire des choix ?

Vous êtes un esprit libre, monsieur le ministre, vous n'avez plus rien à prouver.

Rassurez nos compatriotes en sortant d'un dispositif qui ne sera pas plus efficace que la ligne Maginot ! (Applaudissements sur plusieurs bancs à gauche)

M. Daniel Reiner.  - Jamais les outils au service d'une hypothétique Europe de la défense n'ont été aussi importants, jamais celle-ci n'a été aussi faible ! Les deux directives du paquet « Défense » fixent quelques règles simples ; c'est la politique des petits pas, pourquoi pas. A condition de ne pas livrer le marché de la défense aux industries non européennes au nom de la concurrence !

L'Allemagne regarde à nouveau à l'Est ; pourquoi ? Siemens s'allie à un groupe russe plutôt qu'à Areva. Les dirigeants de Thyssen préfèrent s'associer à Emirate plutôt qu'au français DCNS... Et ce n'est qu'un exemple !

Dans le domaine des blindés, la concurrence intra-européenne joue au profit des Américains et des Israéliens.

Dans le domaine aéronautique, combien de tergiversations avant de réaliser l'A 400 M !

Face à cela, la stratégie française semble changer de pied sans que le Parlement soit consulté : réintégration de l'Otan, accords de Londres, participation à la défense antimissiles de l'Otan. Chaque décision a sa logique propre, certes. Mais tout cela n'annonce-t-il pas la fin de l'Europe de la défense ? (Applaudissements à gauche)

M. Bernard Piras.  - Je rends hommage à nos militaires engagés sur les terrains d'opérations de par le monde. Ce budget est préoccupant. À quoi servent les LPM quand les crédits décrochent à ce point ? Masquée par la hausse de recettes exceptionnelles, la baisse est considérable. Le principe et l'origine de ces recettes exceptionnelles ne risquent-ils pas d'être remis en cause ? Leur réalité est d'ailleurs sujette à caution... Voyez les exercices 2009 et 2010 ! Je rappelle au Gouvernement le principe de sincérité budgétaire !

Les moyens financiers seront inférieurs aux prévisions du Livre blanc ; il manquerait 20 milliards !

Avec un Livre blanc et une LPM obsolète, nous naviguons à vue ! Quelle armée pour 2020 ? C'est d'autant plus préoccupant que la défense européenne est au point mort...

M. Roland Courteau.  - Et oui !

M. Bernard Piras.  - Devant tant d'incohérence, nous ne pourrons voter ce budget.

Quelle est votre position, monsieur le ministre, sur la réintégration dans le commandement militaire de l'Otan, sur l'Afghanistan, sur le bouclier antimissiles, sur la politique nucléaire ? Nous attendons vos réponses ! (Applaudissements à gauche)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Comme je suis heureuse que M. Juppé prenne la tête du ministère de la défense !

Dans un contexte de restriction budgétaire, une plus grande attention devrait être portée aux réserves, quelque peu oubliées dans le Livre blanc.

Nous sommes loin de la Garde nationale américaine. Mais pourquoi le Livre blanc est-il totalement muet sur la réserve citoyenne ?

La réserve militaire, opérationnelle et citoyenne, à laquelle s'ajoutent la réserve civile ou la réserve policière, constitue un vivier précieux. Elle permettrait aux Français de l'étranger de s'investir, et d'améliorer notre réaction en cas de crise. Les journées de formation à la défense sont une occasion de faire passer un message à des jeunes qui n'ont souvent aucun lien avec la France : pourquoi ne pas en profiter ?

La LPM pose l'objectif de 40 000 réservistes opérationnels en 2015 : il faudrait en recruter 1 600 par an. Or en 2009, leur nombre a diminué...

Les dépenses salariales de la réserve opérationnelle s'élevaient à 77,1 millions en 2008 ; le projet de loi pour 2011 prévoit 88 millions. Ces réservistes sont démoralisés : il faut souligner leur importance pour la défense nationale.

Enfin, je me réjouis de l'accord franco-britannique, hautement symbolique, qui peut nous aider à entraîner les Allemands dans une dynamique européenne. (Applaudissements à droite)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Je me réjouis de votre retour au Gouvernement, monsieur le ministre, et forme des voeux pour la réussite de votre action.

Pardonnez-moi d'en venir à des considérations bassement budgétaires. (Sourires) Le Gouvernement nous a transmis un projet de décret d'avances, comportant 930 millions de crédits pour le versement des salaires aux fonctionnaires, dont 231 millions pour votre ministère. Une partie des sommes qui font défaut s'expliquent par le dérapage des Opex, les indemnités chômage, les frais de désamiantage, mais une centaine de millions n'est pas expliquée. En sera-t-il de même en 2011 ? Les dépenses de fonctionnement vampiriseraient-elles les dépenses d'investissement ?

M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre de la défense et des anciens combattants.  - (Applaudissements à droite) J'ai été très sensible à vos paroles aimables.

Je suis conscient de la lourdeur de la tâche qui m'a été confiée. Je salue l'extraordinaire capacité d'adaptation des personnels de la défense, qui mettent en oeuvre les réformes depuis 1995 : nos Armées apportent la preuve que la France est capable de se réformer !

Ce budget, que j'assume totalement, se réfère à la LPM et au Livre blanc.

Dans un monde en plein changement, il nous faut nous adapter en permanence. Le mois de novembre a été riche, avec le sommet de Lisbonne et le traité de Londres.

À Lisbonne, la France a obtenu satisfaction dans nombre de domaines, notamment en ce qui concerne la réforme interne : baisse de 30 % des effectifs des états-majors, réduction de 60 % du nombre des comités, passage de quatorze à trois du nombre des agences spécialisées : bref, une diminution de la bureaucratie. Nous avons donné un nouveau départ à la relation avec la Russie, parlé de l'Afghanistan et de la dissuasion nucléaire.

Je n'ai jamais été hostile à la réintégration de la France dans l'Otan -que nous avions voulu engager dès 1995 à condition que la place des Européens dans l'alliance et l'Europe de la défense fussent renforcées.

Entretemps, il y a eu le sommet de Saint-Malo en 1998, et des progrès significatifs en matière de défense européenne. Ces progrès ont été confirmés. L'un des deux commandements suprêmes de l'Alliance échoit à la France.

M. Didier Boulaud.  - Qu'en restera-t-il ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - La défense européenne n'est pas en reste : le sommet de Lisbonne a d'ailleurs été salué à ce titre. Je prendrai des initiatives pour avancer sur la voie de cette coopération avec nos partenaires, dont la Pologne.

Je rêve d'un monde sans armes nucléaires, bien sûr, mais je n'ai jamais dit que la France devait donner l'exemple avant tous les autres ! Tant que des progrès n'auront pas été faits au niveau mondial, la France ne doit pas baisser la garde.

Il n'y a pas eu de renoncement à Lisbonne : il est écrit noir sur blanc que le but de la défense antimissile est de renforcer la dissuasion, « to bolster deterrence », et que la dissuasion nucléaire française reste totalement sous souveraineté française.

M. Didier Boulaud.  - Il ne suffit pas de l'affirmer pour que ce soit vrai.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Que ferait le général de Gaulle aujourd'hui ? C'est un exercice répandu d'évoquer ses mânes, surtout chez ceux qui n'en furent jamais les zélateurs de son vivant. (Rires à droite)

M. Jean-Louis Carrère.  - Vous nous avez fait le coup avec Mitterrand ! (Rires à gauche)

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Qu'en penserait le général de Gaulle ? Je n'en sais trop rien ! Mais sur la défense antimissile, nous avons une proposition de la Russie de participer au dispositif : ce qui a fait dire au Premier ministre qu'on voit peut-être réémerger le concept d'une défense européenne de l'Atlantique à l'Oural ! (Applaudissements à droite) Je suis donc assez à l'aise.

Je suis à votre disposition pour parler du bouclier antimissiles devant votre commission.

Le Livre blanc et la PLM ont défini une trajectoire de ressources indexées sur l'inflation jusqu'en 2012. La dégradation des comptes publics a imposé un effort de redressement : 3,6 milliards, soit 3,4 % du total. La défense demeure une priorité : les crédits augmenteront de 3 % d'ici 2013 alors que ceux d'autres ministères resteront stables. Le Royaume-Uni diminue son budget de 8 %, l'Allemagne de 14 %...

Les recettes exceptionnelles pour 3,3 milliards sur la période 2011-2013, compensent le manque à 1 milliard près. Nous sommes dans l'épaisseur du trait.

Les hypothèses de croissance du Gouvernement ne me paraissent pas irréalistes. Les recettes exceptionnelles proviennent notamment de cessions immobilières et de la vente de fréquences. Nous sommes très proches du scénario de la LPM, ce qui nous laisse un peu de temps ; les mesures d'économie s'appliqueront surtout en 2012 et 2013.

M. Didier Boulaud.  - Après les élections !

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - S'agissant des dépenses d'équipement, nous nous en tenons à l'objectif de 17 milliards par an, contre 15 milliards dans la précédente LPM, même si les prévisions de 2010 pourront difficilement être vérifiées en raison de certains dysfonctionnements.

Les Opex sont désormais financées sur une ligne budgétaire, avec une provision de 630 millions ; les dépenses devraient être financées à 70 % en loi de finances initiale.

Certains ont parlé de « piège afghan ». Nous défendons dans ce pays nos intérêts contre le terrorisme, mais aussi nos valeurs à commencer par l'égalité entre hommes et femmes. Je ne partage pas le pessimisme de certains ; selon le général Petraeus, des progrès ont été enregistrés : (Mme Demessine le conteste) à Kaboul, dans les infrastructures, mais aussi les institutions ; M. Karzaï nous l'a confirmé.

M. Didier Boulaud.  - Que vaut la parole de M. Karzaï ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - C'est le Président de l'Afghanistan !

Il faudra mener à bien le transfert des responsabilités aux forces afghanes. Nous avons un calendrier de redéploiement. Il y a bien une stratégie en Afghanistan, même si elle n'est pas facile. Un partenariat de longue durée entre l'Afghanistan et l'Otan sera bien sûr nécessaire au-delà de 2014. Je salue nos soldats présents sur ce terrain. (Applaudissements) Je me suis rendu à Percy au chevet de soldats blessés ; ils m'ont impressionné et ému. Ils font honneur à la France. Merci aussi d'avoir souligné l'action des services de santé des armées. En matière d'équipement, un comité ministériel d'investissement se penchera sur le choix entre Harfang et Predator. La rénovation des Mirage 2000-D est en effet retardée du fait du rachat de Rafale, mais nullement annulée.

S'agissant du lance-roquette unitaire, le retard de livraison était prévu.

Les crédits du Grand emprunt, pour 2 milliards d'euros, financeront notamment la recherche sur les lanceurs.

Pour les forces terrestres, citons les programmes Scorpion.

Cet effort d'équipement est rendu possible par les réformes et les économies réalisées sur les dépenses. La masse salariale baissera de 200 à 250 millions d'euros par an entre 2011 et 2013. Nulle cannibalisation des dépenses d'équipement par celles de fonctionnement.

Monsieur le président Arthuis, j'ai ici l'analyse précise des dépassements qui expliquent le dépôt du décret d'avances : indemnisation du chômage des militaires, réintégration dans l'Otan...

M. Didier Boulaud.  - Ça commence !

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - ...point indiciaire non budgétisé, accompagnement des restructurations, indemnités opérationnelles et effets de structures. Je vous communiquerai les chiffres.

S'agissant de la fidélisation des militaires, monsieur Dulait, sont prévues la création d'un centre de formation initiale des nouveaux personnels et une prime d'engagement.

Il n'y a aucune régression de la capacité d'entraînement, monsieur Carrère.

L'ampleur de la réforme impose des efforts considérables aux personnels, qui bénéficient de la moitié des économies réalisées grâce aux suppressions de postes. Nous maîtrisons les dépenses de fonctionnement. Je sais pouvoir compter sur le professionnalisme et la réactivité des personnels. Nous faisons le maximum pour l'accompagnement social des restructurations ; 238 millions sont prévus, dont 52 de mesures nouvelles.

Quant au projet de Balard, le dialogue compétitif est en cours. Le contrat pourra être signé au printemps. Le projet permettra d'importantes économies.

J'ai conscience de la difficulté des échéances de 2012 et 2013. Mais à chaque jour suffit sa peine ! Notre défense doit disposer des moyens dont elle a besoin. J'y mettrai toute mon énergie. J'espère pouvoir compter sur la majorité sénatoriale, et peut-être au-delà... (Applaudissements à droite et sur le banc des commissions)

Les crédits de la mission sont adoptés.

L'article 69 est adopté.

Article additionnel après l'article 69

M. le président.  - Amendement n°II-169, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 69, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À compter du 1er janvier 2011, les dispositions de l'article L. 83 du code des pensions civiles et militaires de retraite bénéficiant aux marins-pompiers de Marseille ayant fait valider leurs droits à la retraite à compter du 13 août 2004 s'appliquent également aux marins-pompiers de Marseille ayant fait valider leurs droits à retraite avant cette même date, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Cet amendement met un terme à une différence de traitement. Il fait bénéficier du supplément de pension les marins-pompiers de Marseille ayant pris leur retraite avant le 14 août 2004.

M. François Trucy, rapporteur spécial.  - La nuit porte conseil : c'est sans doute pourquoi cet amendement nous est parvenu au petit matin... Il n'a pu être soumis à la commission. L'avis des rapporteurs est favorable.

M. Jean-Louis Carrère, rapporteur pour avis.  - Le groupe socialiste pense beaucoup de bien de cet amendement et le votera.

Mme Bernadette Dupont.  - Je m'en réjouis aussi.

L'amendement n°II-169 est adopté et devient un article additionnel.

La séance est suspendue à midi quarante.

présidence de M. Bernard Frimat,vice-président

La séance reprend à 14 heures 45.

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Cette mission connaît une évolution particulière cette année : depuis le passage à l'Assemblée nationale, le secrétariat d'État aux anciens combattants a disparu. Il ne faut pas y voir un quelconque mépris à leur égard. (On le confirme sur divers bancs)

Cette mission connaît une contraction de plus de 3 %, en raison de la diminution des bénéficiaires de la pension militaire d'invalidité (PMP) : moins 16 000 unités.

Le nombre des emplois baisse également : moins 24 %.

Les trois programmes connaissent une évolution divergente.

Le programme 167 voit se poursuivre la réforme de la Direction du service national.

Le programme 169 suit la même pente que l'ensemble de la mission, en raison de la diminution du nombre des anciens combattants, même si les crédits de l'Onac, devenu guichet unique, augmentent.

La délivrance de la carte du combattant a connu des difficultés et des retards à cause d'un nouveau système informatique et de la suppression des commissions départementales.

À l'Assemblée nationale, divers amendements ont été adoptés contre l'avis du Gouvernement, qu'une deuxième délibération a entériné. Le ministre du budget a annoncé une revalorisation de l'indice de la pension pour les anciens combattants, porté à 44 points. Une erreur de procédure en a empêché l'inscription ; elle sera corrigée aujourd'hui. Finalement, seule la pension de réversion a été augmentée.

Le programme 158 est de la compétence du Premier ministre et porte sur l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis durant la dernière guerre mondiale. Ses crédits augmentent de 18 millions, après 13 millions l'an passé. La dépense est difficilement prévisible mais ce n'est pas satisfaisant. Qu'en est-il du décret sur les orphelins de guerre attendu pour la fin de l'année ?

La commission des finances recommande l'adoption de ces crédits. À titre personnel, je suis solidaire de mon groupe. (Applaudissements)

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.  - Le Gouvernement reconnait le sacrifice des anciens combattants, avec la revalorisation des pensions.

Il applique le rapport constant, maintient les déductions d'impôt et épargne à cette mission le coup de rabot fiscal.

L'année 2011 sera marquée par trois mesures importantes.

D'abord la décristallisation intégrale des pensions des anciens combattants de l'ex-empire colonial français. Toutes les pensions sont concernées sans considération de lieu ni de nationalité. Il faudra informer les intéressés de leurs nouveaux droits.

Ensuite l'adaptation des critères d'octroi de la carte d'ancien combattant aux Opex. Il faudrait que les combattants présents en Afrique du Nord, après le 2 juillet 1962, puissent l'obtenir.

Enfin, les victimes d'essais nucléaires seront indemnisées.

Deux points sont préoccupants : la campagne double accordée aux combattants d'Afrique du Nord. L'iniquité subsiste entre les combattants, selon qu'ils étaient fonctionnaires ou qu'ils relèvent du régime général.

Le sort des veuves fait l'objet d'une mesure ponctuelle pour 2011, mais sans vision d'ensemble. Nous attendons le rapport à ce sujet que nous avons demandé l'an passé, attendu au plus tard le 31 décembre...

Je m'étonne de la situation paradoxale du sort fait aux anciens combattants aux revenus les plus modestes qui, à la différence des conjoints survivants, ne bénéficient pas d'une garantie de ressources minimum.

J'en termine par les sujets qui fâchent. Pour la retraite du combattant aucune majoration ne figure dans le budget. C'est un mauvais signe qui compromet l'engagement présidentiel de porter l'indice à 48 points. À l'Assemblée nationale, une hausse de un point a été annoncée, au 1er juillet 2011. Pouvez-vous le confirmer ?

Deuxième problème : la suppression du secrétariat d'État. J'espère que les anciens combattants seront heureux de la nomination de M. Juppé (Applaudissements à droite)

La commission des affaires sociales votera la mission. (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Je me réjouis de voir le Président de Rohan siéger parmi nous. (Applaudissements à droite)

Mme Nathalie Goulet.  - Je regrette l'absence d'un secrétariat d'État aux anciens combattants. Mon mari, ancien d'Indochine, présidait l'association de l'Orne ; élue de Normandie je suis proche de la poche de Chambois, haut lieu de la bataille de Normandie, et de Fleuré où le général Leclerc avait établi son quartier général. Je ne côtoie pas seulement le monde combattant le 6 juin, quand le président américain vient au cimetière de Colleville.

Les plages du débarquement doivent être classées au patrimoine de l'Unesco. Je souhaite que vous puissiez vous libérer le 21 août 2011, monsieur le ministre, d'autant que je connais vos liens avec le Canada ; il serait bon qu'un ministre d'État participe aux cérémonies organisées au cimetière de Cintheaux, dans le Calvados, en mémoire des 6 000 jeunes canadiens morts pour notre libération.

Le devoir de mémoire ensuite. Avec le recteur de la mosquée de Paris, M. Boubaker, nous souhaitions ériger un monument aux morts pour les soldats musulmans.

Il faut que votre administration veille au bon déroulement des cérémonies patriotiques. Les dysfonctionnements sont nombreux. Parfois, la Marseillaise n'est pas jouée !

Il faut remettre de l'ordre dans la maison : ne pourrait-on adresser un dérouleur aux maires ?

J'espère que votre agenda permettra de libérer un peu de temps pour les anciens combattants, à commencer par ceux de Normandie. (Applaudissements à droite)

Mme Gisèle Printz.  - Vous aurez peu de temps à consacrer aux anciens combattants et c'est la première fois depuis 1945 qu'il n'y a pas de ministre ou de secrétaire d'État chargé de ce portefeuille. Une minute de silence s'imposerait... Le Président de la République doit réparer cette faute en vous affectant un secrétaire d'État. Les dernières directions départementales et régionales fermeront en novembre 2011. L'Onac aura un rôle accru pour gérer les dossiers des anciens combattants.

Le budget ne comporte pas de nouvelles mesures. On nous répond que les acquis sont maintenus. C'est la moindre des choses ! La crise a bon dos. Les efforts ne sont pas justement répartis.

Des promesses ont été faites par le Président de la République en 2007. Beaucoup ont été oubliées en chemin...

Nous espérions une augmentation de la retraite des anciens combattants pour 2011. Il n'en sera rien. L'indice devait être porté à 48 points d'ici 2012. Il n'en sera rien. Le Gouvernement doit tenir compte de l'exposition au risque pour l'attribution de la carte de combattant aux anciens d'Algérie.

Le contentieux sur la campagne double en Algérie est connu, mais rien ne change ! Le Gouvernement estime que le bénéfice de la campagne double ne peut être attribué qu'à partir du 18 octobre 1999, date à laquelle l'État a reconnu l'existence de la guerre d'Algérie, avec une condition supplémentaire d'exposition au feu. Il faut abroger le décret du 29 juillet 2010 et le remplacer par un texte plus juste.

Sur les pensions de réversion, le plafond retenu par le Gouvernement est inférieur au seuil de pauvreté ! De plus, les anciens combattants les plus modestes n'entrent pas dans le dispositif proposé.

Depuis les décrets de 2000 et 2004, tous les orphelins de guerre ne sont pas traités de façon égale. C'est choquant. Nous ne comprenons pas pourquoi vous ne mettez pas fin à ces inégalités.

Enfin, les incorporés de force : rien n'est prévu pour ceux qui ont été détenus à l'avant de la ligne Curzon. Les survivants sont moins d'une centaine et ils attendent une juste réparation.

Nous vous demandons de respecter les anciens combattants qui ont répondu à l'appel de la Nation et défendu les valeurs de la République. Il ne s'agit pas d'un budget comme les autres. Pourtant, vous ne répondez pas à leurs attentes. Si rien ne change, nous voterons contre. (Applaudissements à gauche)

M. Robert Tropeano.  - Les engagements pris par le Président de la République ne sont pas tenus.

D'année en année, le budget diminue : 4 % cette année. Il s'agit d'un budget de renoncement, la disparition du secrétariat d'État le confirme. Chacun doit contribuer à l'effort de la Nation, dites-vous. Mais pour certains, l'effort est plus lourd que pour d'autres.

La retraite des anciens combattants est la première reconnaissance de la Nation. Or, nous sommes encore très loin des 48 points. Cette année, la revalorisation d'un point n'aura lieu qu'en juillet.

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

M. Robert Tropeano.  - Comparez cette décision au maintien du bouclier fiscal ! La revalorisation de la pension pour un conjoint survivant n'est pas suffisante.

Je vous ai interrogé sur la campagne double la semaine dernière : votre réponse n'a pas été satisfaisante. Le Conseil d'État estimait que tous les anciens combattants devraient en bénéficier.

Or, en retenant la date du 19 octobre 1999, vous excluez les cheminots, les fonctionnaires de police, les postiers et j'en passe. Ce n'est pas acceptable.

Que dire de l'inégalité entre les pensionnés du public et du régime général ? Il faut y mettre fin. (Mme Janine Rozier le confirme)

Vous n'avez pas informé ceux qui pouvaient bénéficier de la décristallisation. Allez-vous le faire ?

Les associations d'anciens combattants déplorent les réductions d'effectifs de votre ministère. Désormais, les orphelins de guerre sont du domaine du Premier ministre. Les pupilles de la Nation ont le sentiment d'être abandonnés. À quelle date le décret sera-t-il publié ?

Quant à la demi-part fiscale attribuée aux anciens combattants de plus de 75 ans, il faut l'attribuer à partir de 70 ans.

La date du 19 mars doit être retenue pour célébrer la mémoire de la guerre d'Algérie. Le 7 décembre n'a aucune valeur historique. Malgré la baisse de la démographie des anciens combattants vous n'avez apporté aucune réponse satisfaisante. Nous ne voterons pas ce budget. (Applaudissements à gauche)

M. Guy Fischer.  - Je proteste énergiquement contre le sort fait au budget des anciens combattants à l'Assemblée nationale. Nous sommes mieux lotis au Sénat mais sans secrétaire d'État.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Vous avez un ministre d'État !

M. Guy Fischer.  - il y a de quoi s'inquiéter. Nous comptons sur vous, monsieur M. le ministre d'État. (« Ah ! » à droite)

Avec ce budget nous sommes dans le reniement de la parole donnée.

Le projet de loi de programmation des finances publiques a prévu sa diminution régulière.

L'inévitable décroissance démographique devrait permettre de satisfaire les revendications. Les anciens combattants, victimes de la crise que vous avez provoquée, sont ainsi condamnés à une double peine.

M. Falco se targuait d'avoir tenu ses promesses avec le transfert de missions et la fermeture des services déconcentrés. C'est du cynisme ! Il disait qu'aucun droit acquis ne serait remis en cause. Pourtant, la RGPP est passée...

Vous revenez sur la promesse d'une programmation pluriannuelle sur la revalorisation des retraites.

La pension de réversion n'augmente pas. C'est inacceptable. Il faut la réévaluer, surtout pour les veuves les plus démunies.

Mme Janine Rozier.  - Merci d'aller dans mon sens !

M. Guy Fischer.  - La carte d'ancien combattant doit être attribuée aux soldats restés au moins quatre mois en Algérie.

Vous restez au milieu du gué pour la campagne double et la décristallisation. Les inégalités entre les combattants vont demeurer, ce qui est scandaleux. Pour la décristallisation, encore faut-il informer les intéressés ! D'ailleurs, la Cour des comptes vous y invite.

Confirmez-vous que la majoration de 0,5 point de la PMI sera bien appliquée au 1er juillet ? Combien de dossiers sont-ils examinés pour les victimes des essais nucléaires ?

Quid du reclassement des personnels de la DSPRS ?

Pouvez-vous nous dire ce qu'il en sera de l'indemnisation des orphelins de guerre ? Où en est le projet de décret ?

La date du 19 mars 1962 doit être retenue pour honorer la mémoire des militaires tombés au Maroc, en Tunisie et en Algérie. Il faudrait une journée nationale de la Résistance, non chômée, non fériée, le 27 mai, en l'honneur de la première réunion du CNR en 1943 et de Jean Moulin.

Enfin, envisagez-vous de réhabiliter les fusillés pour l'exemple de la Grande guerre ? (Mme Évelyne Didier approuve)

Le groupe CRC votera contre ce budget qui tourne le dos aux valeurs républicaines. (Applaudissements à gauche)

M. Michel Guerry.  - Le budget atteindra 3,3 milliards en 2011 : il permettra de consolider l'existant.

Je veux rendre hommage aux associations d'anciens combattants pour leur dynamisme. Ce sont pour moi des frères d'armes.

La retraite des anciens combattants doit être revalorisée. Nous l'avons fait en 2010. Poursuivons l'effort.

Je regrette que des contraintes budgétaires n'aient pas permis l'attribution de la carte d'ancien combattant au-delà de juillet 1962. Cette demande coûterait 4,6 millions, mais elle est légitime. Nos anciens combattants doivent être égaux au regard de leur retraite.

Nous déplorons que l'attribution de la campagne double soit limitée par la date de 1999. En outre, les anciens combattants du régime général sont exclus de ce dispositif.

Je me félicite de la décristallisation des pensions dès 2011 : promesse tenue.

Le budget prend en charge l'indemnisation des victimes des essais nucléaires. C'est la fin d'un tabou.

Concernant les veuves de guerre, la disparité est grande en fonction de la date de décès de leur époux. Une harmonisation serait la bienvenue.

L'allocation différentielle permet d'atteindre un plafond minimum. Il faut l'appliquer aux veuves de guerre.

Le budget des anciens combattants n'est pas comme les autres : c'est la Nation qui exprime sa gratitude envers ceux qui l'ont défendue.

Quelle est la position du Gouvernement sur les orphelins de la seconde guerre mondiale ? Certains se sont émus de la disparition du secrétariat d'État : je ne doute pas que vous continuerez le travail accompli par M. Falco.

Le travail de mémoire doit se poursuivre, notamment à l'école de la République. Ce doit être l'affaire de tous : il s'agit de transmettre les valeurs républicaines. Votre ministère doit renforcer le lien armée-nation, à l'heure où notre société a du mal à comprendre le sacrifice de ces combattants, anciens et actuels. Leur mémoire doit être honorée. (Applaudissements à droite)

M. Ronan Kerdraon.  - À mon tour de rendre hommage aux associations d'anciens combattants, notamment celles des Côtes-d'Armor.

Ce budget est un budget de reconnaissance. « Cette reconnaissance, c'est tout d'abord la représentation des anciens combattants au niveau du Gouvernement par un interlocuteur privilégié. Il n'est pas dans mon intention de revenir sur cette disposition » disait le candidat Sarkozy en avril 2007. Cet engagement ne sera pas tenu.

M. Guy Fischer.  - Un de plus !

M. Ronan Kerdraon.  - En dépit de votre capacité de travail bien connue, (M. le ministre sourit) comment vous occuper à la fois de votre ministère, de Bordeaux, des dissensions de la majorité -et des anciens combattants ? Peut-être en chargerez-vous un conseiller...

M. Guy Fischer.  - C'est ce que nous craignons !

M. Ronan Kerdraon.  - Les anciens combattants méritent mieux. Nous comptons sur votre implication personnelle.

Ce budget est historiquement le plus mauvais. Tous les amendements adoptés contre l'avis du précédent Gouvernement ont été annulés par une deuxième délibération, au motif que tout le monde devait participer à l'effort. La crise ne peut-être un alibi ! Les efforts doivent certes être répartis équitablement. Les anciens combattants doivent-ils participer à cet effort ? En tant que citoyens, sans doute, mais le leur demander alors qu'ils ont déjà tant donné en tant que combattants, c'est leur infliger une double peine. D'autant que la crise ne vaut pas pour tous : un point d'augmentation de la retraite du combattant coûterait 17 millions, à comparer aux 30 millions de ristourne accordés à Mme Bettencourt au nom du bouclier fiscal ! (Exclamations à droite) S'il n'est pas modifié en profondeur, ce budget 2011 sera un panier vide pour les anciens combattants.

C'est un budget de renoncement et de reniement. Les crédits baissent de 3,9 %, soit 110 millions, et ce n'est pas fini. Aucune avancée réelle : rien, ou si peu, sur la carte du combattant, les retraites, la rente mutualiste, la pension de réversion... Ce budget revient sur les promesses du Gouvernement et du Président de la République, à quoi certes nous devrions être habitués. La retraite devait atteindre les 48 points en 2012, M. Falco l'avait encore confirmé l'an dernier. On n'y sera pas. Le simple maintien du budget au niveau de 2010 aurait permis de satisfaire de nombreuses revendications. L'indexation de la pension militaire d'invalidité ne devrait pas être inférieure au coût de la vie ! La perte de pouvoir d'achat des pensions approche les 7 %.

S'agissant de l'octroi des bonifications de campagne a égalité de droits entre combattants de tous les conflits, le décret du 29 juillet 2010 est pratiquement inopérant car trop restrictif.

Une avancée, toutefois, la décristallisation -imposée par le Conseil d'État !

Que comptez-vous faire pour la mémoire des victimes de l'OAS ? Je souhaite que les cérémonies du 19 mars soient l'occasion de réunir les militaires. Quid enfin des orphelins de la barbarie nazie ?

Les anciens combattants « ont des droits sur nous », disait Clemenceau. Que la nation assume ses devoirs à leur endroit ! Faute de quoi, nous ne voterons pas ce budget. (Applaudissements à gauche)

M. René Vestri.  - L'Onac est désormais l'unique interlocuteur des anciens combattants, en lien avec la Caisse nationale militaire de sécurité sociale. Je regrette que la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale et les directions interdépartementales des anciens combattants et victimes de guerre soient supprimées.

Avec 50 000 associations et 4 millions de Français concernés, le monde combattant s'attache au maintien du souvenir et du lien armée-nation. La promesse du Président de la République de porter la retraite du combattant à 48 points en 2012 sera difficile à tenir, les associations en sont conscientes. Si le budget 2010 avait été reconduit cette année, bien des choses auraient été possibles ! Un amendement de la majorité de l'Assemblée nationale, relevant de deux points la pension a été adopté en commission mais repoussé en séance. J'espère que le Sénat le votera. Le nombre de retraités anciens combattants ayant baissé de 200 000 en trois ans, cette mesure aurait été facilement financée si le budget pour 2011 était resté au niveau de celui de 2008 : 160 millions d'euros auraient été disponibles.

Les efforts pour 2011 sont modestes, 18 millions pour le point de retraite supplémentaire, 10 millions pour les victimes des essais nucléaires -somme qui a vocation à être complétée si nécessaire- et 5 millions pour les orphelins de parents résistants « Morts pour la France ».

La dernière modification concernant la Croix du combattant parue au journal officiel le 12 novembre 2010 devrait permettre à 75 000 jeunes français qui ont fait les campagnes d'Irak, d'Afghanistan, d'ex-Yougoslavie et d'autres opérations extérieures de postuler aux avantages qui sont attachés à cette distinction. Augmenter le nombre des ayants droit à ces prestations et diminuer le budget général est contradictoire ; cela semble annoncer un décret d'application qui rendra inopérante une disposition votée par la représentation nationale...

En tant qu'ancien d'Algérie, je me réjouis que le bénéfice de la campagne double soit ouvert à ces combattants.

Devant la représentation nationale, le 20 novembre 1917, Clemenceau déclarait à propos des vétérans de la Grande Guerre : « Les Français que nous fûmes contraints de jeter dans la bataille, ils ont des droits sur nous ». La reconnaissance de la nation envers ceux qui l'ont servie, qui ont tout risqué pour elle, jusqu'à leur propre vie, telle est la requête légitime des survivants et des ayants droit. (Applaudissements à droite)

Mme Janine Rozier.  - J'ai souhaité prendre la parole à la fin de cette discussion générale pour revenir sur certaines contre-vérités.

Ce grand budget social s'élève à 3,7 milliards. Les manques, les oublis, les insuffisances sont dénoncés par les associations. La baisse de la démographie fait baisser le périmètre des crédits. Avec la RGPP, pas d'actions nouvelles, mais pas non plus de coupes claires. Pas question de supprimer des droits acquis !

L'augmentation annuelle du plafond majorable de la rente mutualiste est une revendication constante ; il atteint 1 715 euros au 1er janvier 2010. Cette retraite mutualiste est abondée par l'État à hauteur du versement effectué par eux jusqu'à concurrence de 1 715 euros ; elle est exonérée de tout impôt et l'abondement de l'État sera de 8 millions en 2011. Voilà une niche qui coûte 35 millions chaque année, et qui n'est nullement remise en cause ! Et je ne mentionne pas tout ce qui est exclu de l'assiette de l'impôt sur le revenu pour les anciens combattants. Non, ceux-ci ne sont pas maltraités : nous les aimons et nous le prouvons.

Une panne informatique est cause des dysfonctionnements à l'Onac. Des excuses ont été présentées, tout rentre dans l'ordre.

La pension de réversion pour les veuves est très inégale selon les cas : il faut approfondir cette question.

La revendication, souvent évoquée par nos collègues d'Alsace et de Lorraine, est l'éventuelle extension de la notion de « camp annexe de Tambow » et qui concerne les incorporés de force dans les camps soviétiques à l'est et à l'ouest de la ligne Curzon ; justice pourrait sans doute aussi être rendue à ces anciens prisonniers très âgés et peu nombreux.

M. Guy Fischer.  - Le raccourci est rapide.

Mme Janine Rozier.  - La campagne double pour les anciens d'Algérie ne bénéficiera qu'aux seuls fonctionnaires ; c'est une injustice pour les autres !

Avec la suppression de la DSPRS et la disparition de 663 ETP qui en découle, de nombreux transferts sont opérés vers la mission « Défense », vers la Caisse nationale de sécurité sociale militaire et surtout vers l'Onac que M. Jospin voulait supprimer, que nous avons remis sur pied et dont nous abondons largement les crédits sociaux depuis 2007.

M. le président.  - Il faut conclure !

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Ce n'est qu'une fois par an ! (Sourires)

Mme Janine Rozier.  - Monsieur Fischer, le 19 mars 1962 est une date extraordinaire : c'est le jour de mon mariage. Mais ce n'est pas une victoire pour la France ! (Rires)

Nos pères ont répondu à l'appel de la France. Nous devons transmettre leur mémoire. (Applaudissements à droite)

M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre de la défense et des anciens combattants.  - (Applaudissements à droite)

Ce budget n'est pas comme les autres : il traduit la reconnaissance de la nation envers ceux qui ont versé leur sang pour elle, et assure la transmission de ses valeurs à nos enfants.

Le monde combattant irrigue notre territoire ; je rends hommage à ses associations, qui défendent la solidarité, l'attachement à la patrie, la fraternité des compagnons d'arme. Tous ces héros, souvent anonymes, suscitent chez nous tous une intense émotion à l'heure des cérémonies patriotiques auxquelles j'attache moi aussi la plus grande importance, madame Goulet, au bon déroulé des cérémonies patriotiques. Une plaquette est en cours de réalisation.

Je ne sais si la présence d'un ministre d'État à la défense et aux anciens combattants est un signe de désintérêt...

M. Jacques Blanc.  - Au contraire !

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - J'y consacrerai toute mon énergie.

Nous avons mené de grandes restructurations. L'accès à l'Onac, désormais interlocuteur unique, est facilité. Je salue la mobilisation des agents pour relever ces défis ; je rends hommage aux responsables des services déconcentrés de la DSPRS pour leur détermination à accompagner chacun de ceux qui auront été touchés par ces restructurations. La proportion de ceux qui ont été reclassés atteint 71 % ont été reclassés, les autres sont mis à disposition d'un service de l'État. Personne n'est laissé au bord de la route.

La Journée d'appel et de préparation à la défense devient Journée « défense et citoyenneté » (JDC), avec une pédagogie revue et modernisée dans laquelle le volet citoyenneté est renforcé tandis que l'accompagnement des jeunes illettrés est amélioré. La JDC sera bientôt généralisée. Divers amendements des groupes socialiste et CRC-CRC prennent des gages sur les crédits de cette JDC, or il n'y a aucune marge de manoeuvre. Les adopter reviendrait à reporter la mise en oeuvre de cette journée, or celle-ci est une obligation légale et concerne 800 000 jeunes chaque année.

Ce budget est juste. Tous les droits acquis sont préservés. C'est vrai en matière fiscale, c'est vrai du rapport constant. Depuis 2010, les modalités de fixation de l'indice de la pension militaire d'invalidité ont évolué, mais rien n'a changé quant au fond. Un arrêté de revalorisation sera pris, comme chaque fois, dans les plus brefs délais.

S'agissant de l'allocation différentielle en faveur des conjoints survivants, la dotation de 5 millions est reconduite et sanctuarisée dans le budget de l'Onac. Cette allocation, dont le montant atteint 817 euros, a progressé de 48 % depuis 2007 ; elle sera relevée à 834 euros courant 2011.

L'indemnisation des victimes des essais nucléaires est opérationnelle ; un décret en décline les modalités. Un comité d'indemnisation traite les dossiers déposés : environ 400 à ce jour.

Ce budget ouvre également des droits nouveaux. L'article 100 du PLF institue la décristallisation totale des pensions des anciens tirailleurs, comme promis par le Président de la République ; 32 000 personnes sont concernées, pour un coût de 100 millions en 2012. Un décret sera pris bientôt, j'y serai très attentif. L'attribution de la carte du combattant ne peut être étendue, faute de crédits. Je veillerai à ce que l'on aille de l'avant dès que possible.

Le bénéfice de la campagne double découle de la qualification des événements d'Algérie comme « guerre » ; le Conseil d'État a donc demandé une harmonisation.

Le Gouvernement a souhaité voir améliorer la situation des veuves des plus grands invalides de guerre, ces femmes qui ont renoncé à une activité professionnelle pour s'occuper de leur conjoint gravement blessé. Il a donc donné un avis favorable à l'amendement déposé par les députés qui institue un supplément de pension de 360 points aux conjoints des invalides dont le taux de pension est le plus élevé.

À la demande du Premier ministre et pour améliorer la cohérence d'un dispositif juridique qui excluait injustement du droit à réparation certains orphelins de victimes de la barbarie nazie, le ministère de la défense a rédigé un projet de décret unique tendant à l'unification des dispositifs existants.

En réponse à la demande de Mme Rozier, une étude sera réalisée dans 18 départements pour recenser les anciens combattants les plus démunis qui seraient susceptibles de bénéficier d'une allocation différentielle sur le modèle de l'allocation existante pour les conjoints survivants.

Ce budget est responsable, compte tenu de notre objectif de réduction des déficits. Dans ce contexte, la hausse du plafond de la rente mutualiste, l'avantage de la demi-part fiscale dès 70 ans, le relèvement de 2 points de la retraite du combattant ne sont pas envisageables, ce que je suis le premier à déplorer. Le Gouvernement porte la retraite du combattant à 44 points.

Responsable, le budget 2011 des anciens combattants l'est également à travers sa volonté de préparer l'avenir, et donc remplir notre devoir de mémoire.

Nous commençons ainsi à préparer le centenaire du déclenchement de la Grande Guerre.

Le nombre de bénéficiaires nouveaux de la carte du combattant augmentera de 25 à 50 %, avec l'ouverture aux anciens des Opex. Le Gouvernement exprime ainsi son engagement sans faille envers le monde combattant et sa détermination à entretenir la flamme du souvenir. (Applaudissements à droite)

La discussion générale est close.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Je demande la priorité sur les amendements n°sII-61 et II-170 portant articles additionnels.

Acceptée par le Gouvernement, la priorité est de droit.

Article additionnel après l'article 68 ter

M. le président.  - Amendement n°II-61, présenté par Mme Rozier, au nom de la commission des affaires sociales.

L'Office national des anciens combattants transmet au Parlement, au plus tard le 30 juin 2011, les résultats de l'étude menée par ses services dans douze départements visant à dénombrer les anciens combattants les plus démunis susceptibles de bénéficier d'une allocation différentielle sur le modèle de l'allocation existante pour les conjoints survivants.

Sur la base de cette étude, le Gouvernement présente au Parlement, avant le 30 septembre 2011, un rapport évaluant l'intérêt de créer une telle allocation différentielle pour les anciens combattants ressortissants de l'Office national des anciens combattants.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis.  - Le ministre a déjà donné son accord à cet amendement.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Favorable.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - L'amendement évoque douze départements, le ministre a parlé de dix-huit.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - L'étude porte sur dix-huit départements. Qui peut le plus peut le moins...

L'amendement n°II-61 est adoptéet devient article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°II-170, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 68 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Aux deuxième et cinquième alinéas de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, le nombre : « 43 » est remplacé par le nombre : « 44 ».

II. - Les dispositions du I ci-dessus entrent en vigueur à compter du 1er juillet 2011.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Nous accordons un point de hausse aux pensions des anciens combattants.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - Le Gouvernement traduit l'engagement du ministre du budget à l'Assemblée nationale. Qu'en sera-t-il toutefois pour les années 2012-2014 ?

M. Guy Fischer.  - Nous ne voterons bien sûr pas contre cet amendement minimal, en regrettant que les engagements de vos prédécesseurs ne soient pas tenus...

M. Ronan Kerdraon.  - Nous voterons également cet amendement pour vous aider à tenir une petite part de vos promesses. (Sourires)

L'amendement n°II-170 est adopté et devient article additionnel.

Article 48

M. le président.  - Amendement n°II-62, présenté par Mme Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

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36 000 000

36 000 000

36 000 000

36 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

36 000 000

36 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

TOTAL

36 000 000

36 000 000

36 000 000

36 000 000

SOLDE

0

0

M. Ronan Kerdraon.  - L'Assemblée nationale avait porté la retraite à 45 points, mais la deuxième délibération est revenue sur cette avancée...

Il faut aller vite : la fin de la législature approche et nous sommes encore loin des 48 points promis par le Président de la République.

M. le président.  - Amendement n°II-95, présenté par Mme Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

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(en euros)

Cf. tableau

M. Ronan Kerdraon.  - Amendement de repli.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - Le Président de la République avait en effet promis ces points en 2012, mais ces amendements amputent les crédits de la JDC de 30 %...

La commission préférait l'amendement du Gouvernement qui vient d'être voté. Retrait, sinon rejet.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Défavorable.

L'amendement n°II-62 n'est pas adopté, non plus que le n°II-45.

M. le président.  - Amendement n°II-100, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

14 100 000

14 100 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

14 100 000

14 100 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2

TOTAL

14 100 000

14 100 000

14 100 000

14 100 000

SOLDE

0

0

M. Guy Fischer.  - Cet amendement revalorise de deux points la retraite du combattant au 1er janvier 2011 plutôt que d'un point au 1er juillet 2011. Nous dénonçons votre pratique des tout petits pas : depuis 2002, les bénéficiaires auront gagné 11 euros de plus par mois ! Notre amendement est mesuré, compte tenu des engagements du Président de la République et du Gouvernement !

Il ne savait pas à l'époque que le monde combattant n'aurait plus de représentant l'année suivante ! Le monde combattant est meurtri. M. Juppé a beaucoup de qualités, mais il n'aura pas suffisamment de temps pour le monde combattant !

M. Paul Blanc.  - Démagogie !

M. le président.  - Amendement n°II-101, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

4 700 000

4 700 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

4 700000

4 700 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2

TOTAL

4 700 000

4 700 000

4 700 000

4 700 000

SOLDE

0

0

M. Guy Fischer.  - Amendement de repli : un point à partir du 1er janvier et non pas du 1er juillet. Ce serait un geste d'apaisement...

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - Avis défavorable sur les amendements n°sII-100 et II-101. Le second coûterait en réalité 13,8 millions...

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Défavorable. Il est en effet un peu caricatural de dire que s'il y avait un secrétaire d'État au lieu d'un ministre d'État, vous auriez obtenu deux points...

Les amendements n°sII-100 et II-101 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-65, présenté par Mme Printz et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

5 000 000

5 000 000

Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

5 000 000

5 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

Mme Gisèle Printz.  - Il s'agit de préserver le pouvoir d'achat des anciens combattants. Les primes ne sont pas prises en compte dans le calcul du point de retraite. Il faut évoluer sur ce point.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - L'indice des traitements de la fonction publique, qui servait au calcul de la valeur du point PMI, a été remplacé au 1er janvier 2010 par l'indice de traitement brut-grille indiciaire. Engagement a été pris pour qu'en cas d'évolution de cet indice, un arrêté puisse revaloriser à due concurrence la valeur du point PMI. Le ministre pourrait peut-être rassurer les sénateurs sur ce point. J'ajoute que l'ensemble du programme 169 est concerné par la revalorisation du point PMI.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Je confirme l'analyse de M. le rapporteur.

L'amendement n°II-65 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-63 rectifié, présenté par Mme Printz et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

10 000 000

10 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

10 000 000

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

M. Ronan Kerdraon.  - Le droit à indemnisation des orphelins de parents victimes de la barbarie nazie a été justement reconnu en 2001. Les travaux de la commission Dechartre ont conduit au décret de 2004, qui a étendu le champ de l'indemnisation. Une catégorie reste cependant encore au bord du chemin, celle des orphelins de parents de résistants morts les armes à la main et reconnus « morts pour la France ».

M. le président.  - Amendement identique n°II-105, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

M. Guy Fischer.  - Il s'agit de solder un douloureux contentieux et d'étendre le droit à indemnisation aux orphelins de parents résistants morts les armes à la main et reconnus « morts pour la France », ceux du Vercors, des Glières et d'ailleurs. C'est affaire d'équité. M. le ministre d'État nous en dira peut-être davantage sur le décret en préparation.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - Ces amendements ne permettraient plus d'organiser la JDC. Attendons la sortie du décret annoncé. En outre, le collectif abondera le programme 158 de 13 millions supplémentaires. Avis défavorable.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Même analyse. Le décret est en préparation, dont le périmètre n'est pas complètement arrêté. La notion d'acte de barbarie devrait être étendue aux résistants et civils abattus sommairement et aux déportés morts dans les deux ans de leur retour des camps. Défavorable.

Les amendements n°s II-63 rectifié et II-105 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-68, présenté par Mme Printz et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

5 500 000

5 500 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

5 500 000

5 500 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

TOTAL

5 500 000

5 500 000

5 500 000

5 500 000

SOLDE

0

0

Mme Gisèle Printz.  - Cet amendement renforce de 5,5 millions les possibilités d'intervention du programme 169, afin de financer une hausse du plafond majorable de la rente mutualiste, qui n'a pas augmenté depuis le 1er janvier 2007. La promesse du Président de la République n'a pas été tenue.

M. le président.  - Amendement n°II-102, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

1 800 000

1 800 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

1 800 000

1 800 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2

TOTAL

1 800 000

1 800 000

1 800 000

1800 000

SOLDE

0

0

M. Guy Fischer.  - Il faut revaloriser le plafond majorable de la rente mutualiste et solder d'ici 2012 une ancienne revendication du monde combattant. A l'initiative de tous les groupes parlementaires, l'objectif de porter le plafond à 130 points a été décidé en 1996. Il a été relevé chaque année et porté à 125 points en 2007. Le Président de la République disait en avril 2007 qu'on pouvait compter sur sa détermination...

M. Roland Courteau.  - Je m'en souviens très bien !

M. Guy Fischer.  - Compte tenu du nombre de promesses non tenues par le Président de la République, nous ne nous faisons guère d'illusion.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - La dotation consacrée à la majoration de la rente mutualiste est l'une des seules sous-actions qui augmente en 2011. La majorité de la commission a considéré qu'on ne pouvait aller au-delà.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Défavorable. Entre 2007 et aujourd'hui, monsieur Fischer, s'est passé un événement non négligeable qui a conduit de nombreux gouvernements à revoir leur politique...

L'amendement n°II-68 n'est pas adopté, non plus l'amendement n°II-102.

M. le président.  - Amendement n°II-104, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

5 000 000

5 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

5 000 000

5 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. Guy Fischer.  - Une allocation différentielle destinée aux anciens combattants les plus démunis doit être créée. De plus en plus d'anciens combattants en couple ou isolés vivent dans des conditions désastreuses, souvent en dessous du seuil de pauvreté. Il faut leur venir en aide.

M. le président.  - Amendement n°II-66, présenté par Mme Printz et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

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Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

4 000 000

4 000 000

Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

4  000 000

4 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

TOTAL

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

0

Mme Gisèle Printz.  - Il faut relever le montant de l'allocation différentielle au-dessus du seuil de pauvreté européen, soit 817 euros. Cette mesure donnerait satisfaction au monde combattant. L'Assemblée nationale l'avait votée, mais le Gouvernement a obtenu son retrait après une seconde délibération.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - Cet objectif est louable, mais je vous propose de vous rallier à l'amendement n°II-61 qui vient d'être voté.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Même avis.

L'amendement n°II-104 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°II-66.

M. le président.  - Amendement n°II-103, présenté par M. Fischer et les membres du groupe Crc-SPG.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Liens entre la nation et son arméeDont Titre 2

5 000 000

5 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattantDont Titre 2

5 000 000

5 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondialeDont Titre 2

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. Guy Fischer.  - Il faut porter l'allocation différentielle versée au conjoint survivant au niveau du seuil européen de pauvreté, soit 940 euros. Vous pratiquez la politique des petits pas, mais ce n'est pas suffisant. Nous vous demandons un effort symbolique, d'autant que des crédits ne sont pas consommés. Faites droit aux légitimes revendications des anciens combattants.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial.  - Une telle augmentation n'est pas acceptable avec un budget aussi contraint. Engagement a été pris le 10 novembre devant les députés de majorer l'allocation de 17 euros. Défavorable.

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Je comprends les motivations de l'auteur de l'amendement. Je confirme l'engagement de porter l'allocation à 834 euros.

L'amendement n°II-103 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission sont adoptés.

Article 68 ter

Mme Gisèle Printz.  - Pourquoi M. le ministre ne m'a-t-il pas répondu au sujet de la ligne Curzon ?

M. Alain Juppé, ministre d'État.  - Je confirme la position de mon prédécesseur et me pencherai sur cette question le plus rapidement possible.

L'article 68 ter est adopté.

La séance, suspendue à 17 heures 10, reprend à 17 heures 20.

Ecologie, développement et aménagement durables

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits affectés à la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances.  - je vous félicite, madame la ministre, pour votre nomination et vous souhaite plein succès.

Nous allons présenter ce rapport à quatre voix. Les crédits de la mission atteignent 10 milliards d'euros en autorisations et 9,5 en CP, en diminution respectivement de 2,7% et 6% ; mais la mission ne retrace pas la totalité de l'effort de l'État en faveur de l'environnement et des transports : il faut prendre en compte les 5 milliards de recettes extrabudgétaires des opérateurs, dont l'AFITF et les 2,8 milliards de dépense fiscale.

Malgré la baisse des crédits, les moyens affectés au Grenelle sont préservés : 163 millions en autorisations et 154 millions en crédits de paiement.

Le programme 113 voit ses crédits reconduits. Son action s'appuie sur des opérateurs puissants, qui disposent de 2,5 milliards de recettes extrabudgétaires. Ce programme est marqué par la mise en oeuvre du Grenelle ; la RGPP s'y poursuit. Pouvons-nous avoir le sentiment du Gouvernement sur les contrôles qu'a effectués la Cour des comptes sur les parcs nationaux et la police de l'eau ?

Les crédits du programme 181 diminuent de 1,1 %. Les moyens en faveur de la prévention des risques hydrauliques augmentent, pour tirer les conséquences de la tempête Xynthia, avec notamment un financement du fonds Barnier -à force, ne l'affaiblit-on pas ?

La mise en oeuvre des PPRT demeure insuffisante : seuls 44 plans ont été approuvés. Que compte faire le Gouvernement pour accélérer le mouvement ? AZF, c'était il y a dix ans...

Plusieurs objectifs du deuxième plan santé environnement ont été réalisés en 2010. La Cour des comptes a jugé satisfaisant le bilan de l'Ademe ; reste à améliorer le financement et la gouvernance.

Nous nous sommes aussi interrogés sur les investissements d'avenir, dont le dispositif comptable était critiqué. A-t-il été revu ?

J'en viens au programme 174, qui comprend les dispositifs de gestion de l'après-mines ; les crédits baissent de 11 %. Un nouvel objectif relatif à l'amélioration de l'efficience du crédit d'impôt en faveur des économies d'énergie et du développement durable a été créé, ce qui est bien au regard de l'importance de la dépense fiscale -2,6 milliards d'euros en 2010. Des mesures ont été prises en 2009 pour en réduire le coût. Quelles en ont été les conséquences en 2010 ?

La Cour des comptes a enquêté sur l'Agence nationale des déchets radioactifs. Il en ressort la nécessité de faire aboutir dès que possible le choix d'un site susceptible d'accueillir le centre de stockage des déchets radifères, dont la mise en service est prévue dès 2013, et le besoin de réfléchir aux modalités de financement de la construction du futur centre de stockage profond. Pourriez-vous faire le point ?

S'agissant du programme 217, plusieurs transferts ont eu lieu, dont le plus important, d'un montant de 1,9 milliard d'euros, au profit du programme « Fonctionnement des directions départementales interministérielles », géré par les services du Premier ministre. L'accent est mis sur le développement durable et le travail interministériel, privilégié. L'outil est ici la stratégie nationale de développement durable adoptée en 2007. Le premier bilan du plan « Administration exemplaire » est plutôt satisfaisant.

La RGPP a permis de rationaliser les fonctions logistiques et les services généraux ; 1 287 ETPT ont été supprimés.

Que peut nous dire le Gouvernement sur les objectifs de transposition des directives ?

Le système « bonus-malus » est victime de son succès. Les critères doivent être resserrés.

Je me réjouis de votre engagement personnel et de celui du Gouvernement en faveur du développement durable. L'écologie doit rester une priorité absolue du Gouvernement !

M. Roland Courteau.  - Ce n'est pas évident !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les transports terrestres concernent tous les Français. Les crédits baissent de 5 %, pour l'essentiel à cause de la baisse du concours de l'État à RFF. La deuxième vague de RGPP a un effet relativement limité.

Il faut aussi considérer les crédits extrabudgétaires et le plan de relance sur 2009 et 2010.

La politique des transports s'inscrit dans la continuité du Grenelle de l'environnement ; mais le transport combiné est peu mis en valeur. Je m'interroge sur le financement des 170 milliards d'investissements annoncés.

Le financement de l'Afitf est encore incertain à moyen terme. Sa gestion en 2009 a été tendue, la subvention de l'État a été reconduite -elle devient un provisoire qui dure. L'écotaxe « poids lourd » ne prendra le relais qu'en 2012, voire 2013. Pouvez-vous nous donner des précisions sur les ressources propres de l'Agence ?

La situation financière de VNF est satisfaisante. L'opérateur doit poursuivre ses investissements de modernisation et de développement du réseau magistral. Le nouveau contrat de performance a pris du retard. Où en est-on ?

Le secteur ferroviaire est fragile. Son endettement augmente rapidement, tant pour la SNCF, RFF, que la RATP. Si la tendance se poursuit, la dette de RFF pourrait être requalifiée au sens de Maastricht... La crise a eu un impact certain, notamment sur le fret qui s'enfonce un peu plus. Les marges de manoeuvre sont étroites. Le modèle économique de RFF, particulièrement menacé, appelle des éclaircissements. Les péages augmenteront de 160 millions d'euros en 2011, mais les subventions de l'État relatives aux activités non couvertes par les recettes commerciales diminueront de 6,5 %. RFF considère que cette dotation ne respecte pas la trajectoire fixée dans le contrat de performance. Le manque à gagner serait de 1 milliard pour 2011-2013. Une baisse de la subvention se conçoit dans le contexte actuel, mais il y a peu de leviers pour rectifier la situation, baisser les coûts d'exploitation et de maintenance de la SNCF et réduire la voilure pour les investissements dans les lignes à grande vitesse.

J'en viens au programme 205, dont les crédits baissent de 2 %. Les restructurations administratives se poursuivent. Un nouvel établissement supérieur de formation maritime a été créé. Le budget de l'enseignement maritime et gens de mer progresse de 20 %.

Je conclus avec la présentation du nouveau compte d'affectation spéciale qui externalise la péréquation assurant le financement des trains d'équilibre du territoire (TET). Cette réforme accompagne la mise en place d'une convention de service public pour l'exploitation de ces lignes déficitaires. Ce compte sera alimenté par trois recettes et non plus deux. La commission des finances en approuve la création. La convention de service public entre l'État et la SNCF n'est pas encore connue ; j'aimerais que vous nous en disiez plus, madame le ministre.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La dernière décennie a été marquée par d'excellents résultats en matière de sécurité routière, mais l'année 2009 n'a enregistré aucune amélioration. Les résultats sur les dix premiers mois de 2010 montrent cependant une nouvelle baisse de la mortalité de 7 %. Reste que la mortalité des conducteurs de deux roues continue à progresser.

Quelle est l'utilité du Conseil national de la sécurité routière, qui ne s'est pas réuni depuis avril 2008 ? Quel sort lui réservez-vous ?

La réforme du permis de conduire se poursuit avec pour objectif un permis moins long, moins cher et plus sûr. De nouveaux inspecteurs ont été recrutés en 2010. Le mécanisme de cautionnement public des prêts dans le cadre du permis à un euro par jour a pris du retard ; mais l'enveloppe budgétaire 2011 me paraît reposer sur des hypothèses plus réalistes que celles envisagées en 2009.

Le nouveau compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routier », regroupe les amendes autres que celles affectées à l'Afitf. Les modalités d'affectation des amendes forfaitaires demeurent inchangées : 150 millions pour les collectivités locales, dont seulement 32 millions pour les départements : c'est très insuffisant pour entretenir les routes ! Avec 469 millions prévus, le produit des amendes forfaitaires au radar est surestimé.

La commission des finances espère que l'affectation sera plus lisible, grâce à une structuration en deux sections.

La justification au premier euro des programmes est limitée, mais il s'agit d'un compte de transit.

Les indicateurs de performance évoluent peu. Le taux de paiement a progressé de 10 %. Le PV électronique est une avancée. L'intensification des contrôles radar se poursuit. Le rythme de déploiement, trop lent en 2008 et 2009, a entraîné des reports. Les dotations sont-elles sincères ?

Le coût de fonctionnement du Centre national de traitement des amendes est stable et les dépenses de développement diminuent fortement, des investissements importants ayant eu lieu de 2008 à 2010.

Le financement du projet Faeton relève de l'Agence nationale des titres sécurisés. L'échéance de 2013 sera-t-elle respectée ?

M. François Fortassin, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Le programme 170 « Météorologie » est doté de 198 millions, en progression d'environ 5 %. En 2010, l'exécution a été conforme aux prévisions, avec 40 millions de recettes, et le non-remplacement d'un départ sur deux. Des opérations immobilières importantes ont été lancées. Les dépenses de personnel de Météo France sont maîtrisées, avec pour objectif un exercice équilibré. La mise en oeuvre du contrat d'objectif et de performance pour 2010-2013 est satisfaisante.

Les résultats commerciaux de l'IGN ont progressé. La situation est satisfaisante. 2011 devrait voir les charges de fonctionnement baisser.

Le budget 2011 s'inscrit dans le cadre du nouveau contrat. Autre motif de satisfaction : la bonne gestion de l'IGN.

Le budget annexe « Contrôle d'exploitation aérien » est en situation délicate. Le trafic aérien a reculé ; Air France redresse ses comptes après de lourdes pertes. L'équilibre repose sur une hypothèse de progression du trafic de 2 %. Notons le rapatriement de crédits et d'effectifs.

La fusion de l'Enac et du CFA se traduit par une hausse des crédits de l'Enac.

Les charges de personnels sont maîtrisées en apparence, mais le coût unitaire augmenterait d'ici 2013.

La prévision d'équilibre pour 2011 est plus crédible que celle de l'année dernière, avec en outre le passage d'un mécanisme d'incitation à la performance.

L'endettement a augmenté de 20 % en 2009. (M. Roland Courteau s'en émeut)

Nous avions d'ailleurs émis un avis défavorable à un décret d'avances de 75 millions. Le désendettement exigera de nouvelles marges de manoeuvre.

La réforme de la DGAC se poursuit. La conclusion du contrat d'objectif et de performance avec ADP a pris du retard. La réduction des effectifs se poursuit, les investissements sont stables.

Les critiques de la Cour des comptes n'ont été que partiellement prises en compte. Des contreparties financières importantes sont accordées aux personnels. Ces mesures peu lisibles entretiennent le doute, d'autant que la présence effective sur le lieu de travail n'est pas assurée. Je ne parle pas des grèves perlées ou sauvages des contrôleurs aériens, qui prennent les voyageurs en otage...

M. Paul Blanc.  - C'est vrai !

M. François Fortassin, rapporteur spécial.  - ...d'autant que certaines revendications sont indécentes : les contrôleurs aériens ne sont pas des pilotes ! (Sourires et « très bien ! » à droite) Et il y a une exigence de compétitivité.

M. Bruno Sido, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Dans un contexte contraint, l'État a maintenu son engagement envers l'environnement, et plus particulièrement le Grenelle. Trois ans après son lancement, les réticences des élus -de tous bords- vont croissant, face aux normes imposées par les services déconcentrés de l'État, perçues comme des freins. Pouvez-vous vous engager à associer les élus à la conception des décrets, et inciter vos services à ne pas appliquer de façon tatillonne les normes ?

Entre le produit de la TGAP et les besoins de l'Ademe, l'écart est de 40 millions, il sera de 50 millions demain. Quel est votre sentiment sur ce sujet ?

En matière de biodiversité, la complexité est redoutable. Faut-il créer un organisme nouveau, une agence de la nature ? Envisagez-vous un projet de loi sur le sujet ? La fonction de pilotage relève de l'État, en association avec les élus locaux.

La planification urbaine n'est-elle pas surestimée, sachant que les schémas de cohérence territoriale sont lents à se mettre en place alors que le Grenelle en a prévu la généralisation ?

Sous réserve de ces observations, la commission de l'économie a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite)

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Le programme « Énergie, climat » est déséquilibré puisque l'action 4 représente à elle seule 94 % du total des autorisations d'engagement.

L'action de « Politique de l'énergie », est divisée par dix, résultat pour partie d'un transfert de crédits. L'essentiel est consacré à l'Agence de traitement des déchets radioactifs.

Le plus gros des dépenses fiscales est constitué par le crédit d'impôt pour l'équipement des résidences principales, chiffré à 2,1 milliards, en baisse de 21 % sur trois ans. Le PLF propose de réduire de 50 à 25 % son taux pour les panneaux photovoltaïque en métropole. Certes l'énergie photovoltaïque progresse ; l'annonce d'ajustement des tarifs a entraîné une bulle spéculative. Le Gouvernement a réagi en réduisant l'avantage fiscal !

Cette décision risque toutefois d'être contreproductive, faute de lisibilité.

Je sais que vous n'avez plus compétence sur le secteur de l'énergie rattachée à l'industrie.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.  - Sur les énergies renouvelables, si !

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis.  - Quid donc des équipements photovoltaïques en cours d'installation ? Quelle perspective pour l'évolution du tarif de rachat ?

Je désapprouve la politique énergétique du Gouvernement : à titre personnel, je ne donne pas un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à gauche)

M. Charles Revet, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Les crédits du programme 105 sont en légère baisse. J'aurais souhaité la traduction du Grenelle de la mer dans ce budget...

Je me félicite de la réforme de l'enseignement supérieur maritime. Nous aurons une grande école qui délivrera des titres d'ingénieurs : où sera-t-elle localisée ? Quid de la nouvelle école ?

Nos grands ports maritimes n'arrivent pas à enrayer leur déclin : Anvers est devenu le premier port français ! Rotterdam fait plus de tonnage que tous nos ports ! (On le déplore à droite)

La loi sur les grands ports, dont j'étais rapporteur, est difficile à mettre en oeuvre sur le terrain. Où en sommes-nous de la cession des outillages ? Réussirons-nous à transférer les personnels avant avril 2011 comme nous l'impose la loi ?

Il faudra faire évoluer le statut des établissements qui géreront les grands ports. Le statut d'Épic n'est pas satisfaisant ; il faudrait un statut de SA ou un rattachement aux collectivités comme à Anvers ou Hambourg.

Je regrette le manque de soutien au programme « Développement portuaire » : rien de comparable avec les sommes investies à Anvers, Barcelone ou Rotterdam. Pour le projet Port 2000 du Havre, j'avais demandé des études d'aménagement autour du pont de Tancarville : où en sommes-nous ?

Le devenir de nos ports me préoccupe. Les grèves récentes jouent en faveur de nos concurrents. Il faut profiter des atouts que sont nos grands ports : à nous de relever le défi. (Applaudissements à droite)

M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Le programme 203 « Infrastructures des transports collectifs et ferroviaires » voit ses crédits augmenter de 6,2 à 6,3 milliards. L'effort de l'État en faveur des infrastructures de transports ferroviaire et routier reste important.

Mme Nathalie Goulet.  - Et le Paris-Grandville ?

M. Francis Grignon, rapporteur pour avis.  - Que pouvez-vous nous dire sur la taxe poids lourds ? Chaque année de retard nous prive d'un milliard de recettes. Allez-vous augmenter les redevances domaniales payées par les sociétés d'autoroutes, qui bénéficieront d'un report de trafic puisque la taxe ne s'y appliquera pas? Un amendement de notre commission augmente la subvention de RFF de 150 millions d'euros ; pouvez-vous nous rassurer sur le respect des engagements pris par l'État envers RFF et sur l'action des services déconcentrés de l'État dans les territoires en matière d'urbanisme et d'environnement ?

Je me réjouis de la création du nouveau compte d'affectation spéciale pour les trains Corail ; ne pourrait-on en faire autant pour les lignes de fret déficitaires nécessaires à l'aménagement du territoire ? Dès lors que les entreprises s'engageraient, ne pourrait-on envisager un effort de l'État ?

Il ne s'agit pas de se substituer au programme multi-lot-multiclients de la SNCF, ni aux opérateurs de proximité. (Applaudissements à droite)

M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Je salue la nomination de Mme la ministre, responsable du cadre de vie des hommes -et du secrétaire d'État, responsable de ce qui relie les hommes !

La taxe d'aviation civile a progressé : pourquoi ne pas l'affecter totalement au budget annexe ?

Le ciel unique européen est loin d'être une réalité : comparons au ciel américain ! Il y a là un enjeu important ; c'est 800 millions en taxes de navigation pour Air France, dont 250 millions pour l'Europe ! Il faut organiser ce ciel européen, et dépasser les situations figées dénoncées par M. Fortassin.

M. Thierry Mariani, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports.  - Tout à fait !

M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Où en est-on de l'évolution du Favec ? Le rapport Savary penchait pour une organisation hybride, peu satisfaisante.

Les grands aéroports français sont les aéroports régionaux. Ils ont besoin d'éclaircissement sur l'évolution possible de la part de l'État dans leur capital.

La traduction en français, réclamée par une organisation syndicale, des documents techniques pour les pilotes serait une aberration.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur spécial.  - Effectivement !

M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis.  - Un pilote qui ne parle pas anglais n'a pas sa place dans un avion !

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis.  - Je lève le suspens : la commission recommande l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - A mon tour de féliciter Mme le ministre.

Je suis pour ma part chargé du programme 113.

La commission de la culture s'inquiète de la baisse des crédits consacrés aux parcs nationaux sous prétexte qu'ils ne relèvent pas du Grenelle. La création d'une Agence de la nature est intéressante, mais la mutualisation ne doit pas se faire au détriment d'autres structures, comme le Conservatoire du littoral.

Mon rapport sur le patrimoine de l'Unesco s'inquiète de la possible mise à l'écart de certains sites inscrits ; c'est le cas pour la ville de Provins, à cause d'une zone de protection du patrimoine, ou de la baie du Mont Saint-Michel, s'agissant de l'implantation d'éoliennes.

L'État est responsable des sites classés -35 en France- or il n'en a plus les moyens !

Difficile pour les collectivités de prendre le relais, d'autant que la notion de patrimoine mondial ne figure pas dans le code du patrimoine. Cas emblématique : seuls 5 % du Val-de-Loire est inscrit, alors que la zone s'étend sur 280 kilomètres, deux régions, quatre départements !

L'État doit retrouver sa place pour assurer le respect de ces sites, tout en respectant la libre administration des collectivités.

La commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

M. François Fortassin.  - Le Premier ministre a parlé au Sénat d'écologie créatrice et non punitive.

L'Onema, pour sa part, est constituée de cerbères galonnés, prenant les maires pour des délinquants au motif qu'ils négligeraient le bien-être des crapauds accoucheurs ou des écrevisses à pattes blanches ! (Marques d'approbation)

Mme Gisèle Printz.  - N'oubliez pas les chauves-souris !

M. François Fortassin.  - Je souhaite qu'on sache exactement l'influence des ondes sur la santé, ou des OGM. D'accord si cela permet de nourrir des millions de personnes, à condition qu'il n'y ait pas d'effet néfastes...

Je vous propose une mesure qui ne coûterait rien : couvrir les parkings des grandes surfaces de panneaux photovoltaïques ? Les profits iraient aux commerces de proximité. Il y a là moyen de rendre service aux ménagères et de redonner vie aux centres-villes.

M. Roland Ries.  - L'horizon du Grenelle s'est assombri. Outre le démantèlement du ministère de l'écologie, les conclusions des rapports d'étape montrent qu'en dépit d'objectifs ambitieux, le Grenelle aura été une occasion manquée.

Ce budget traduit le désengagement de l'État. Le Grenelle 1, adopté à la quasi-unanimité, prévoyait pourtant des orientations nouvelles bénéfiques à la fois à l'environnement et à l'économie : emplois non délocalisables, report modal et donc réduction des émissions de gaz à effet de serre...

Le volet « Transport » de ce budget accumule les mauvais signaux pour le report sur les transports modaux. Sur 210 millions financés pour les trains d'équilibre du territoire, 35 sont apportés par les entrants et le reste par les usagers du rail. Bel exemple d'une politique incitative sur le report modal !

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis.  - Exact !

M. Roland Ries.  - L'éco-taxe poids lourds est reportée, une fois de plus. Les projets routiers restent prioritaires.

Le vrai motif de satisfaction a failli venir de l'Assemblée nationale, avec un amendement socialiste -identique à un amendement UMP- permettant aux agglomérations de moins de 100 000 habitants de relever le versement transport de 0,6 à 0,9 % Cet amendement corrigeait l'écart considérable avec les agglomérations de plus de 100 000 habitants, qui peuvent imposer un versement transport de 1,8 %. M. Carrez avait soutenu cet amendement pour donner à ces collectivités les moyens de développer leurs transports en commun. L'Assemblée nationale l'a voté à l'unanimité -et, dès le lendemain, le Gouvernement l'a supprimé par une deuxième délibération !

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis.  - Et voilà !

M. Roland Ries.  - Ses arguments ne sont pas pertinents. Il prétend que cette disposition alourdirait la fiscalité des entreprises, oubliant que la charge reposerait tout autant sur les administrations. Et cette augmentation resterait très limitée : à supposer que toutes les agglomérations de moins de 100 000 habitants augmentent dans cette proportion leur versement transport, le produit supplémentaire serait de 100 millions. Si l'on ne tient compte que des seules agglomérations ayant déposé un projet de TCSP dans le cadre du second appel, le produit escompté n'excèderait pas 13 millions par an.

J'ai donc déposé cet amendement une nouvelle fois. M. Nègre, vice-président du Gart est sur la même position. J'en appelle à la sagesse des sénateurs pour soutenir les collectivités territoriales.

Je ne suis pas non plus convaincu par l'argument selon lequel l'État subventionnerait la construction de nouveaux TCSP à hauteur de 2,5 milliards d'ici 2020. La première enveloppe gouvernementale était d'environ 800 millions ; dans le cadre du nouvel appel lancé cette année, 83 projets ont été recensés, pour un montant global d'investissement dépassant les 8 milliards. La somme des demandes de subventions dépasse dès lors 1,1 milliard et les chiffres annoncés par le ministère oscillent entre 4 et 500 millions !

Le groupe socialiste votera contre le volet « Transport » de ce budget. Néanmoins, je souhaite que notre amendement soit adopté. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Louis Nègre.  - Comme l'a dit le Premier ministre, avec une dette de 1 600 milliards, la France ne dispose pas de trésor caché.

Nous ne pouvons qu'approuver la détermination du Gouvernement de lutter contre les déficits publics. Le déficit n'est qu'un simple mot. Qui l'a rencontré ? Depuis des décennies, la France va de déficit annuel en déficit annuel, sans que le ciel nous tombe sur la tête ! Cette vision est désastreuse. Certains pays européens perdent leur indépendance financière et les simples citoyens sont pénalisés. Nous devons sortir par le haut de cette spirale dramatique. Il faut dire la vérité aux Français sur les comptes publics : la France est en surendettement. Elle doit réduire les déficits. C'est la priorité des priorités.

Je soutiendrai ce choix de la vertu budgétaire contre les promesses fallacieuses des démagogues de tout bord. (Rires à gauche)

M. Jacques Blanc.  - C'est bien !

M. Louis Nègre.  - Le budget des transports s'inscrit dans cette perspective. Pourtant, il augmente de 0,4 % et les crédits de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France de 15 %. Malheureusement, à l'intérieur de cette enveloppe, la situation est plus hétérogène si bien que ces chiffres globaux satisfaisants masquent le fait que le budget des transports pris stricto sensu baisse de 6 %. L'Afitf est censée avoir 13,4 milliards d'euros de dépenses d'ci 2014, avec seulement 11 milliards d'euros de recettes. Pourquoi ne pas vendre une partie des ses participations dans les aéroports régionaux ?

Le schéma national des infrastructures de transport, actuellement en concertation, prévoit 170 milliards de dépenses dont on ignore précisément comment elles seront financées. Bien que ce document définisse plutôt une stratégie de l'État qui s'inscrit dans le droit fil du Grenelle, et ne soit donc pas une loi de programmation budgétaire, nous restons sur notre faim quant au financement de ces travaux. Je m'en préoccupe en tant que président du groupe de suivi institué par la commission de l'économie.

Autre sujet de préoccupation : les comptes 2009 de la SNCF sont déficitaires, en particulier pour le fret. La situation est critique. Les transports en commun régionaux, notamment en Île-de-France, sont particulièrement atteints. La Cour des comptes s'en est émue. Comment faire pour investir maintenant ? Ne faut-il pas aussi augmenter le versement transports perçue par les agglomérations de moins de 100 000 habitants ?

RFF va rénover des milliers de kilomètres de voies ferrées, pour 7 milliards. La situation reste précaire, d'autant que les subventions de l'État diminuent. Les choix sont déchirants.

Je souhaite voir se poursuivre les travaux de la commission que votre prédécesseur avait créée et que j'ai l'honneur de présider, sur la dépénalisation -décentralisation du stationnement, dossier sur lequel le candidat Sarkozy s'était formellement engagé.

En tant que parlementaire en mission ayant en charge le livre vert sur les infrastructures de recharge pour les véhicules décarbonés, je sollicite votre soutien pour que soit tenu l'engagement pris par le Président de la République au Mondial de l'automobile.

De profondes réformes de structure s'imposaient. Il va falloir faire plus avec moins, pour donner à la France les infrastructures dont elle a besoin. (Applaudissements à droite)

M. Marcel Deneux.  - Après deux années de forte mobilisation des crédits pour financer le Grenelle, ce budget reste essentiel, malgré les restrictions du périmètre de votre ministère, ce que je regrette. La fiscalité écologique s'érode, on peut même parler de glissement de terrain ! La filière du photovoltaïque paie les frais de ces errements. Il semble toutefois que la situation ait quelque peu évolué ces dernières 24 heures...C'est que nous avons besoin des investisseurs pour prendre le « deuxième train » de l'énergie, qu'il concerne le stockage de l'électricité ou les réseaux intelligents.

Concernant le contenu même des programmes, je remarque la faible ambition du Gouvernement sur des investissements pourtant essentiels. Le fret ferroviaire aurait dû représenter cette année 17,5 % du fret global ; il s'effondre à 12 %. Des efforts d'investissements sont nécessaires. Pourquoi reporter à 2012 la taxe sur les poids lourds ?

Où en est votre réflexion sur la taxe carbone ? La France dispose d'une vaste façade maritime mais sa politique en matière de transport maritime manque d'ambition. Il est vrai que l'on avance sur la gestion du fluvial. L'élu de la Somme que je suis est très attaché au canal Seine-Nord : les travaux doivent être engagés.

Je salue l'utilisation du fonds Barnier pour la tempête Xynthia. Encore faudra-t-il qu'il soit alimenté pour d'autres occasions. La filière de biocarburants s'est dégradée depuis un an. Il faut un niveau de défiscalisation qui permette d'atteindre l'équilibre et que l'on puisse passer aux biocarburants de deuxième génération. S'agissant de la biodiversité, la création d'une Agence de la nature, voulue par M. Borloo, est une bonne idée dont j'espère voir bientôt la concrétisation.

Depuis 2007, beaucoup de choses ont changé. L'opinion française a pris conscience des problèmes écologiques. Mais la France n'est pas devenue écologiste, surtout que la crise a frappé. Il faut trouver un bon équilibre en matière de développement durable.

On assiste à des coupes budgétaires. Vous avez le profil intellectuel parfait, madame la ministre. (Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre, se montre flattée) Vous pouvez concilier écologie et économie. Mettez vos compétences en valeur ! Vous nous trouverez toujours à vos côtés pour vous aider en ce domaine. (Applaudissements à droite)

Mme Nathalie Goulet. - Très bien !

Mme Évelyne Didier.  - Je salue moi aussi votre retour à ce ministère.

Le changement de périmètre de votre ministère est un accroc au Grenelle. Les subventions aux associations vont diminuer, nous dit-on. Est-ce vrai ? Permettez-moi de citer Bruno Genty, président de France nature environnement : « le budget 2011 manque de souffle écologique. Pire, il entame une marche arrière. Nous appelons le Parlement à regarder vers l'avenir, qui sera écologique ou d'une couleur bien sombre. Nous ne pouvons plus vivre au dessus des moyens de la planète. »

Ce budget s'inscrit dans le cadre de la RGPP. Le ministère l'écologie a perdu plus de 12 000 postes. Moins d'agents publics, c'est moins d'expertises. Il n'y aura bientôt plus de savoir-faire. Et quand ce sera le cas, on nous dira qu'il faut passer au privé !

L'engagement d'un « urbanisme de projet » marque une reprise en main par l'État de certains territoires clefs, comme en témoigne le projet de loi sur le Grand Paris. Au nom de la RGPP, les préfectures n'arrivent plus à répondre aux demandes d'aide technique des communes. La baisse des subventions de l'Ademe est compensée, me dit-on, par un transfert de la TGAP. C'est encore à voir... Notre politique de l'énergie est erratique : EDF va devoir vendre son électricité à prix coûtant à ses concurrents ! Quand la taxe poids lourd va-t-elle être mise en oeuvre ?

Nous ne pouvons approuver les crédits de cette mission. Et je vous suggère, madame la ministre, d'organiser une formation sur la biodiversité, à destination de certains parlementaires que je ne nommerai pas ! (Sourires) (Applaudissements à gauche)

Mme Mireille Schurch.  - Les crédits baissent. Des secteurs clefs sont directement concernés. Alors que vous promettiez il y a deux ans d'investir massivement dans le transport et le fret, tous les programmes baissent. Les concours de l'État à RFF diminuent aussi, au point que sa viabilité est menacée, au dire de la commission des finances elle-même. Nous sommes loin des 500 millions supplémentaires recommandés par l'École polytechnique de Lausanne pour que le réseau reste à un niveau étal.

Alors que le fret doit être une priorité nationale, la subvention diminue de 200 millions, 50 millions après un amendement de l'Assemblée nationale. Le financement du réseau national est amputé de 27 % ! L'Afitf voit ses revenus augmenter de 15 % mais en raison de l'augmentation ou de la création de taxes et redevances : la taxe d'aménagement du territoire, des redevances d'occupation du domaine public payées par les sociétés d'autoroutes, d'une fraction des amendes radars, de 400 millions provenant de la mise en service de l'A63 qui figuraient déjà dans le budget 2010 de l'Agence. La subvention de l'État compense le report à 2012 de la taxe poids lourds. C'était le seul engagement concret du Grenelle pour prendre en compte le coût réel du fret routier ! Et avec cela il manquera encore 2 milliards à l'Afift.

À ces restrictions budgétaires, vous avez ajouté les suppressions de postes qui rendent impossible la mise en oeuvre de la réorientation annoncée du système de transport. Il en est ainsi pour l'action « Sécurité et affaires maritimes », l'enveloppe reste identique, mais des emplois sont supprimés, comme pour l'aviation civile, d'ailleurs.

Ce budget ne répond pas aux attentes de nos concitoyens, nous ne pouvons donc le voter. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jacques Blanc.  - Les parcs nationaux ont fêté leurs 50 ans cette année, à Florac, et celui des Cévennes a fêté ses 40 ans, et c'est le seul qui ait encore des habitants permanents. On aurait pu croire que les parcs nationaux étaient au coeur des préoccupations du Grenelle. Ce n'est pas le cas, même si trois nouveaux ont été prévus.

Les parcs sont l'exemple même du développement durable. Ils sont loin d'être en tabernacle. Ils ne doivent donc pas être fondus dans une Agence de la nature. Ils perdraient leur âme. Le rapport de la Cour des comptes a été un peu dur. Il serait déraisonnable de couper les ailes de l'Agence de la nature. Nous comprenons les impératifs financiers, mais il faut laisser aux parcs le temps de réussir la préparation des chartes.

Si demain, il y a des extensions, ou de nouveaux parcs, des moyens devront être mis en place, de manière équitable. Or le parc des Cévennes subit la double peine : lui qui est des plus vertueux en matière de personnel subit la plus forte diminution de crédits !

M. Ambroise Dupont s'est interrogé sur le classement à l'Unesco. Je souhaiterais que vous nous confirmiez votre soutien au classement des Causses et des Cévennes à ce patrimoine, au titre du pastoralisme.

Reprenez-vous à votre compte les engagements de votre prédécesseur sur la N 88 ? On m'a dit qu'il n'y avait pas de problème. J'aimerais des certitudes.

Le développement durable, c'est une affaire qui marche, qui doit imprégner toutes les actions locales et nationales. Nous comptons sur vous, madame la ministre, pour que nous soyons exemplaires en Europe et dans le monde. (Applaudissements à droite)

M. Ambroise Dupont. - Quel talent !

M. Michel Teston.  - Ces dernières années, les investissements sur les infrastructures ferroviaires ont fait l'objet d'un grand battage médiatique. Au-delà des annonces, quel est l'engagement réel ? En apparence, une légère hausse de ce budget : 0,4 % ; en pratique, le budget des transports baisse de 6 %. Ce que nous voyons augmenter, ce sont les ressources extrabudgétaires : amendes-radar, contribution des voyageurs par rail.

Les concours de l'État à RFF sont désormais tributaires de l'utilisation du réseau par les différents usagers. Les crédits affectés à la gestion de l'infrastructure diminuent, en totale contradiction avec le Grenelle. Heureusement que les régions sont là pour financer le renouvellement des voies sur lesquelles faire circuler les TER. Compte tenu de la baisse des concours de l'État à RFF, le maintien de l'effort de régénération -pour environ 1 000 kilomètres de lignes par an- proviendra donc de la hausse des péages acquittés par les opérateurs, principalement la SNCF, qui devra augmenter ses tarifs. En définitive, c'est l'usager qui paiera !

Pour le fret, seuls 200 millions sont affectés à la future autoroute ferroviaire ouest. L'État ne respecte donc pas ses engagements.

Les ressources de l'Afitf progressent de 15 % mais les subventions de l'État restent au même niveau. La progression des ressources provient d'une dotation exceptionnelle.

En ce qui concerne les trains Corail intercités, 175 millions sont essentiellement supportés par la SNCF. Les tarifs vont donc augmenter.

J'en viens au nouveau schéma d'infrastructure : les engagements pris doivent être respectés. L'État doit préciser ses engagements auprès de chaque partie prenante. Après la privatisation des autoroutes voulue par M. de Villepin -privatisation qui a constitué une faute politique majeure, en privant l'Afitf de ressources pérennes- c'est l'épargne populaire qui va être appelée à financer davantage les infrastructures de transports.

La majorité de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a constaté que l'esprit et l'ambition du Grenelle ont définitivement disparu. Si les sénateurs socialistes ont, eux aussi, dénoncé certaines lourdeurs administratives, ils ont aussi rappelé que la plupart des difficultés rencontrées par les élus étaient les conséquences directes de la RGPP. Ils ne voteront pas ces crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. René Vestri.  - Les questions environnementales concernent tous les citoyens. Le Président de la République a fait de la lutte contre le réchauffement climatique une priorité. Il y a urgence à agir en la matière, comme en matière de biodiversité.

Le budget de la mission se stabilise après les deux années de dotations exceptionnelles dues aux investissements du plan de relance ; les crédits seront stables également en 2012 et 2013.

Les autorisations d'engagement augmentent de 8 % en matière de prévention des risques. Je félicite l'Ademe pour son soutien aux projets de chaleur renouvelable et de dépollution des sites, mais m'interroge sur la mise en oeuvre des trames verte et bleue et surtout sur leur financement ; les acteurs impliqués doivent disposer des moyens nécessaires. Il faut investir -la protection de l'environnement a un coût- mais nous devons laisser un héritage durable aux générations futures.

Les crédits consacrés à la biodiversité n'ont pas augmenté. C'est pourtant un enjeu capital. Déclarer 2010 l'année internationale de la biodiversité témoigne d'une prise de conscience. La biodiversité s'écroule mille à dix mille fois plus vite que son rythme naturel ; un quart des espèces de mammifères est menacé d'extinction. L'accord international de Nagoya sur la biodiversité contient certaines mesures décisives. Élu du littoral méditerranéen, fondateur de SOS Grand Bleu et co-acteur du projet Pélagos, je m'en réjouis. La France, avec ses DOM-TOM, présente une biodiversité exceptionnelle. Dois-je rappeler le rôle majeur des océans ? L'exploitation des richesses de la mer, essentielle pour l'homme, doit s'effectuer dans une perspective de gestion durable. Le Premier ministre a prôné l'écologie créative, et non punitive, source d'emplois. En tant que défenseur des mammifères marins, je ne peux conclure sans m'insurger contre le massacre des baleines, ni m'inquiéter du devenir du thon rouge en Méditerranée, aujourd'hui menacé d'extinction.

« Lorsque l'homme aura coupé le dernier arbre, pollué la dernière goutte d'eau, tué le dernier animal, pêché le dernier poisson, il se rendra compte que l'argent n'est pas comestible », disait le chef amérindien Seattle. C'était en 1854.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.  - Notre volonté, celle du Président de la République, est la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, dans un contexte économique difficile. Les premiers résultats attestent du bien-fondé de choix inscrits dans la durée : le Grenelle est créateur d'emplois, de compétitivité. Nous créons un nouveau modèle économique. L'heure n'est plus à la dépense publique aveugle, mais à l'innovation.

Aux 19 milliards programmés, se sont ajoutés les 5 du plan de relance et les 10 du grand emprunt. Pour autant, ce budget est construit dans un esprit de responsabilité : économies sur les niches fiscales -nous avions déjà réduit le coût du CIDD de 200 millions en 2010, sans réduire son efficacité ; baisse des effectifs et réorganisation, maîtrise de la dépense, la baisse des crédits budgétaires étant compensée par une légère augmentation des ressources extrabudgétaires.

Notre politique des transports privilégie les modes de transport durables, l'entretien des réseaux, le soutien aux acteurs de la mobilité durable dans un contexte d'ouverture à la concurrence. L'État relance sa politique de soutien aux transports collectifs. L'Afitf est l'acteur privilégié ; son équilibre financier n'est pas menacé, avec 2,2 milliards en crédits de paiement. Je vous confirme que la taxe poids lourds viendra prendre le relais de la subvention d'équilibre en 2012. (M. Roland Courteau se montre dubitatif) Le financement des grandes opérations d'infrastructure est consolidé.

Nous poursuivons le grand engagement national pour le fret ferroviaire et le soutien aux autoroutes de la mer. L'interface maritime bénéficiera de la réforme des grands ports. Le schéma national des infrastructures de transport sera un document précieux.

Les 170 milliards d'euros, répartis sur 25 ans, sont au niveau des investissements de nos partenaires.

Le budget poursuit les actions en matière de maintenance et d'entretien des réseaux ; VNF voit ses ressources croître de 70 millions, et celles de RFF, de 200 millions. Le plan de rénovation ferroviaire est poursuivi -1 000 kilomètres de voies en 2011 grâce à un concours de l'État de 2,6 milliards d'euros.

La création du compte d'affectation spécial « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs » consacre la place des TET.

La nouvelle Araf, créée en 2010, assurera la mise en oeuvre des modalités de régulation ferroviaire. Dans le domaine maritime, le soutien au pavillon français, à l'emploi et à la formation maritime, reste une priorité, de même que la sécurité en mer ; la modernisation des Cross se poursuit.

La stratégie en matière aérienne vise à faciliter le trafic, et à construire le ciel unique européen. Nous préparons pour 2012 la création d'un bloc fonctionnel avec l'Allemagne, le Benelux et la Suisse. Le budget annexe -2 milliards- s'appuie sur la reprise progressive du trafic. Le recours à l'emprunt reste nécessaire mais diminue. Nous avons voulu aider les compagnies durant la crise, en maintenant ces redevances au minimum. À cet égard, je salue les efforts de la DGAC. La grève du zèle, inacceptable, a été limitée au sud-est. Les capacités d'investissement de la DGAC sont maintenues à 186 millions.

La sécurité routière relève désormais du ministère de l'intérieur. Le compte d'affectation spéciale « Radar » est en cours de refonte. Nous serons vigilants sur le respect des échéances du programme Faeton. La protection contre les risques est une priorité : les autorisations d'engagements augmentent à hauteur de 373 millions.

Xynthia a montré la nécessité d'améliorer nos dispositifs de vigilance et d'alerte. Le plan « Digues » sera essentiellement financé sur le fonds Barnier : 1 200 kilomètres seront rénovés pour un coût de 500 millions d'ici 2016. Les délocalisations en Vendée et Charente-Maritime seront financées, la caisse centrale de réassurance contribuant à hauteur de 100 millions. Le plan « Séisme Antilles », le plan « Grands fleuves », la participation de l'État aux opérations dans le cadre des Papi relèvent de la même logique.

Les PPRT entrent en phase opérationnelle, avec un objectif de 60 % de plans approuvés fin 2011. Sur la prise en charge des travaux obligatoires à la charge des propriétaires, je partage les préoccupations de Mme Keller. Les risques sanitaires, enfin, font l'objet de mesures, avec le deuxième plan « Santé environnement » ; 2011 verra l'application du règlement Reach.

Le volet urbanisme, paysages, eau et biodiversité est au coeur du Grenelle. Les crédits permettent d'accompagner les projets de collectivités territoriales, de financer la démarche « urbanisme de projets » lancée en 2010. Les directives européennes, les exigences communautaires en matière de bon état écologique des eaux y concourent.

Nous faisons preuve d'une vigilance particulière aux remarques de la Cour des comptes relatives à la gestion des établissements publics. Faut-il créer une Agence de la nature ? Je vais procéder à de nouvelles consultations.

Grâce aux lois Grenelle I et II, la France s'est dotée d'une politique énergétique moderne qui intègre les enjeux du changement climatique. Le succès du bonus-malus traduit une réelle prise de conscience écologique ; il faut adapter les curseurs en 2011 et 2012 ; idem pour le photovoltaïque.

Les ressources de l'Ademe s'élèvent à 590 millions. La totalité des nouvelles taxes sur l'incinération des déchets et de l'augmentation de la taxe sur la mise en décharge sera redistribuée aux collectivités pour accompagner leurs projets. (Marques de satisfaction)

M. Bruno Sido, rapporteur pour avis.  - Très bien !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Le ministère peut s'appuyer sur des personnels passionnés et motivés -parfois un peu trop, à en croire MM. Sido et Grignon. Je plaide pour la simplification et la lisibilité de notre arsenal réglementaire -complexité n'est pas synonyme d'efficacité- et la concertation. (M. Bruno Sido, rapporteur pour avis, applaudit) Je suis maire moi-même !

La mission du ministère n'est ni d'élaborer ni de mettre en oeuvre une réglementation tatillonne, mais bien d'aider à l'éclosion de projets respectueux du développement durable, d'aider les élus à concrétiser le Grenelle sur le terrain. C'est l'état d'esprit que je demande aux 62 371 agents du ministère. (Applaudissements à droite)