NOTE DE SYNTHÈSE

En France, les propriétaires privés d'immeubles anciens peuvent déduire de leurs revenus les dépenses d'entretien de leurs biens. Cette déduction constitue la principale mesure fiscale qui les encourage à préserver leur patrimoine immobilier ancien.

Elle obéit à des règles différentes selon que :

- les immeubles sont classés monuments historiques, inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, ou ont fait l'objet d'un agrément ministériel spécial en raison de leur caractère historique ou artistique , l'agrément ne pouvant être accordé que si l'immeuble est ouvert au public ;

- les immeubles sont, conformément à la loi Malraux du 4 août 1962 , inclus dans un secteur sauvegardé , lorsqu'ils « présentent un intérêt historique, esthétique ou de nature à justifier [leur] conservation, [leur] restauration et [leur] mise en valeur » ;

- les immeubles bénéficient du label de la Fondation du patrimoine . Créée par la loi n° 96-590 du 2 juillet 1996, la Fondation du patrimoine s'attache à préserver le patrimoine qui n'est ni classé ni inscrit. L'attribution de son label peut être pris en compte pour l'octroi ultérieur de l'agrément.

Les propriétaires des immeubles classés, inscrits ou agréés peuvent déduire non seulement les dépenses engagées pour la restauration, l'entretien et les réparations, mais également les intérêts des emprunts souscrits tant pour l'acquisition que pour l'exécution de travaux. Les modalités de la déduction dépendent du statut de l'immeuble et de la façon dont son propriétaire l'utilise.

Lorsque le propriétaire occupe lui-même ses locaux, il peut déduire de son revenu imposable les charges foncières afférentes à cet immeuble (part des dépenses restant à sa charge sur les travaux subventionnés, intérêts d'emprunt, taxe foncière...) à concurrence de :

- 100 % pour les immeubles classés ou inscrits, à condition qu'ils soient ouverts à la visite ;

- 50 % pour les immeubles classés ou inscrits qui ne sont pas ouverts au public ;

- 50 % pour les immeubles agréés, par définition ouverts au public.

Lorsque le propriétaire loue son immeuble , il peut imputer la totalité de ses charges sur le montant des loyers qu'il perçoit. S'il en résulte un déficit foncier , celui-ci peut être imputé sur son revenu imposable, sans limitation , alors que le régime de droit commun n'autorise l'imputation des déficits fonciers hors intérêts d'emprunt que sur les revenus fonciers, pendant dix ans et dans la limite de 10 700 € par an.

Lorsque le propriétaire n'occupe pas son immeuble , mais que celui-ci est ouvert au public moyennant le paiement d'un droit d'entrée, les charges déductibles des revenus fonciers comprennent également celles résultant de l'ouverture au public. À ce titre, le propriétaire peut déduire, sans justification, une somme forfaitaire de 1 525 €, portée à 2 290 € s'il y a un parc ou un jardin, sans toutefois pouvoir créer un déficit foncier.

• Le dispositif créé par la loi Malraux est destiné à encourager les opérations groupées de restructuration immobilière. Le propriétaire d'un immeuble situé dans un secteur sauvegardé au titre de la loi Malraux peut déduire de ses revenus fonciers non seulement les intérêts d'emprunt et les dépenses effectuées pour des travaux d'entretien, de réparation et d'amélioration, telles qu'elles sont déterminées par le régime de droit commun, mais aussi celles concernant des travaux de démolition, de reconstitution de toiture ou de murs extérieurs, ainsi que de transformation en logement, dans la mesure où ces travaux sont prévus par le plan de sauvegarde. Les frais d'adhésion à des associations foncières, dans le cadre des opérations de restauration immobilière, sont également déductibles des revenus fonciers.

Lorsque le propriétaire dégage ainsi un déficit foncier , celui-ci est déductible de son revenu global , sans limitation, à l'exclusion de la fraction du déficit concernant les intérêts d'emprunt, qui ne peut être déduite que des revenus fonciers des dix années suivantes. Pour bénéficier de cet avantage, le propriétaire doit, dans les douze mois suivant l'achèvement des travaux, louer non meublé le logement restauré comme résidence principale du locataire pour une durée de six ans.

• Les propriétaires d'immeubles bénéficiant du label de la Fondation du patrimoine peuvent déduire de leurs revenus imposables une partie des dépenses qu'ils ont engagées pour la sauvegarde ou la restauration de leurs biens.

Ces travaux doivent concerner les parties de bâtiments visibles de la voie publique (toitures, façades, pignons) à l'exclusion des aménagements intérieurs, sauf si l'immeuble, non habitable, est ouvert au public.

La déduction est de :

- 50 % du montant restant à la charge du propriétaire si les subventions recueillies représentent moins de 20 % du total des travaux ;

- 100 % du montant restant à la charge du propriétaire si les subventions recueillies correspondent au moins à 20 % du total des travaux.

Par ailleurs, seuls les immeubles classés ou inscrits bénéficient de l'exonération des droits de donation et de succession, dans la mesure où ils sont ouverts au public et à condition que les héritiers, donataires ou légataires souscrivent avec l'État une convention à durée indéterminée prévoyant le maintien de leur ouverture au public.

La présente étude analyse les principales dispositions fiscales prises par les pays voisins pour encourager la préservation du patrimoine immobilier ancien par des particuliers, que ce patrimoine fasse ou non l'objet d'une mesure de classement.

Trois questions ont donc été successivement examinées pour chacun des pays retenus, c'est-à-dire pour l'Allemagne, l'Angleterre et le Pays de Galles, l'Espagne, l'Italie et la Suisse .

- Au moment de l'acquisition , à titre onéreux ou à titre gratuit, l'acquéreur d'un immeuble ancien est-il exempté, totalement ou partiellement, des droits d'enregistrement, de succession ou de donation ?

- Pendant la période de détention , le propriétaire a-t-il la possibilité de déduire ses dépenses d'entretien ? Ses revenus locatifs sont-ils soumis à un régime particulier ? Paie-t-il l'impôt sur la fortune ou l'impôt foncier annuel à un taux réduit ?

- Lors de la revente , bénéficie-t-il de mesures dérogatoires, relatives aux plus-values par exemple ?

Cet examen fait apparaître que, à la différence de l'Angleterre et du Pays de Galles ainsi que de la Suisse, l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie ont mis en place un dispositif fiscal assez varié au bénéfice des propriétaires d'immeubles anciens.

1) En Angleterre et au Pays de Galles, tout comme en Suisse, les mesures fiscales favorables aux propriétaires d'immeubles anciens sont peu nombreuses


Si par exemple la loi anglaise prévoit l'application de la TVA au taux zéro à certains travaux effectués sur les immeubles classés ou inscrits, cette mesure ne peut pas s'appliquer aux simples travaux d'entretien ou de réparation. Quant à l'exemption de l'impôt sur les successions, elle est accordée de façon discrétionnaire par l'administration en fonction de l'importance que représente le bien pour le patrimoine national.

En Suisse, pour les immeubles classés, les frais d'entretien sont déductibles du revenu. En revanche, dans le cas des immeubles non classés, la déduction n'est admise que si les frais engagés n'augmentent pas la valeur de l'immeuble. Certes, les dépenses non déductibles peuvent être réintégrées au prix de revient au moment de la revente et donc diminuer d'autant la plus-value, mais la non-déductibilité d'une partie des frais d'entretien dissuade les particuliers d'acquérir des immeubles anciens en mauvais état.

2) Les mesures fiscales favorables aux propriétaires d'immeubles anciens sont beaucoup plus variées en Allemagne, en Espagne et en Italie

Les textes relatifs aux différents impôts comportent des mesures dérogatoires favorables aux propriétaires d'immeubles anciens. Le bénéfice de ces mesures est généralement réservé aux propriétaires d'immeubles classés.

Dans ces trois pays, les frais d'entretien sont déductibles , mais selon des modalités différentes. En Allemagne, ils sont déductibles du revenu, sur 10 ans à raison de 10 % par an. En Espagne et en Italie, ils ouvrent droit à une réduction d'impôt, respectivement limitée à 15 % et à 19 % de leur montant. En outre, en Espagne, les frais susceptibles d'être pris en compte à ce titre sont plafonnés à 10 % du revenu imposable. Par ailleurs, en Espagne, les investissements réalisés pour l'acquisition d'immeubles classés sont soumis au même régime fiscal que les frais d'entretien.

Ces trois pays prévoient aussi l'exemption, totale ou partielle, de plusieurs impôts ou retiennent une assiette réduite pour leur calcul.

Ainsi, les biens classés sont exclus de l'assiette de l'impôt sur les successions en Italie. En Allemagne, certains en sont également exonérés totalement, tandis que d'autres le sont à hauteur de 60 %. En Espagne, tous font l'objet d'un abattement de 95 %.

Pour l'impôt sur les donations , l'Allemagne et l'Espagne retiennent les mêmes règles que pour l'impôt sur les successions, tandis que l'Italie prévoit une imposition forfaitaire d'un montant négligeable (130 €).

En Allemagne et en Espagne, les immeubles classés sont exemptés de l'impôt foncier annuel , perçu au profit des communes. En Italie, où les immeubles classés ne sont pas exemptés de cet impôt, une assiette favorable est toutefois retenue : la valeur cadastrale la plus faible de la zone cadastrale où ils se trouvent.

En Espagne, les immeubles classés sont exemptés de l'impôt annuel sur le patrimoine , qui n'existe ni en Allemagne ni en Italie.

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Les mesures fiscales prises en faveur des particuliers propriétaires d'immeubles anciens sont très diverses d'un pays à l'autre et sont complétées par des aides directes apportées sous forme de subventions. En effet, l'absence de mesures fiscales dérogatoires constitue souvent la contrepartie de la préférence accordée aux aides directes.

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