SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Février 2005)

BELGIQUE

Depuis 1997, deux lois ont été consacrées explicitement à la lutte contre les violences conjugales :

- la loi du 24 novembre 1997 visant à combattre la violence au sein du couple ;

- la loi du 28 janvier 2003 visant à l'attribution du logement familial au conjoint ou au cohabitant légal victime d'actes de violence physique de son partenaire .

En mai 2001, le gouvernement a adopté un plan national d'action contre la violence à l'égard des femmes pour la période 2001-2003 , dont les objectifs consistaient à améliorer l'accueil et l'accompagnement des victimes, à éviter le classement sans suite des plaintes et à développer la coordination entre les différentes instances concernées, tant au niveau fédéral qu'au niveau régional et communautaire.

La faible application de ce dispositif a suscité un nouveau plan, qui a été élaboré en mars 2004 pour la période 2004-2007. Il vise à améliorer la sensibilisation de la société dans son ensemble, la formation des professionnels concernés (magistrats, policiers, médecins...), la prévention, notamment à l'intention des jeunes, l'accueil et la protection des victimes, ainsi que la suite pénale réservée aux faits de violences conjugales.

1) La qualification pénale des violences conjugales

Les violences conjugales ne font pas l'objet d'une infraction spécifique. Elles sont généralement qualifiées de coups et blessures.

Cependant, la loi du 24 novembre 1997 a alourdi les peines applicables aux auteurs des diverses « lésions corporelles volontaires » lorsque les coups sont infligés par l'époux ou par la personne avec qui la victime « cohabite ou a cohabité et entretient ou a entretenu une relation affective et sexuelle durable ». Le lien entre l'agresseur et la victime constitue donc une circonstance aggravante .

Les violences conjugales peuvent également tomber sous le coup de l'article 442bis du code pénal, qui vise le harcèlement.

2) Le déclenchement de la procédure pénale

Si le harcèlement ne peut être poursuivi que sur plainte de la victime, les autres infractions peuvent être poursuivies à la suite d'une dénonciation par un tiers. De plus, le retrait de la plainte par la victime n'entraîne pas l'arrêt de la procédure.

On estime généralement que 90 % des plaintes concernant les violences conjugales sont classées sans suite, bien que les magistrats reçoivent une formation spécifique en matière de violence à l'égard des femmes depuis 1997.

3) Les mesures d'éloignement

a) Les mesures judiciaires


• Dans le cadre d'une procédure pénale engagée pour coups et blessures, le juge peut placer l'agresseur en détention provisoire, permettant ainsi d'éloigner ce dernier de la victime. Il peut également laisser l'agresseur en liberté sous conditions, avec l'interdiction, pendant au maximum trois mois, d'entrer en contact avec la victime et de fréquenter certains lieux. Si l'agresseur ne respecte pas les conditions qui lui sont imposées, il peut faire l'objet d'un mandat d'arrêt.

Depuis le 5 septembre 2004, le parquet de la ville de Liège a mis en place une politique de « tolérance zéro » en matière de violences conjugales. Toute intervention policière à la suite d'un appel pour violences conjugales donne lieu à la rédaction d'un procès-verbal détaillé où figure la mention « violences conjugales » et les agresseurs sont éloignés de la résidence familiale. Selon la gravité des faits, ils sont placés en garde à vue ou dirigés vers un refuge. Dans le cas de violences légères et répétées, ils sont placés pendant quinze jours dans un refuge pour personnes déshéritées. S'ils ne respectent pas la mesure d'éloignement, ils sont appelés à comparaître devant le tribunal.


• Par ailleurs, la loi du 28 janvier 2003 permet au juge civil d'accorder à la victime de violences conjugales la jouissance de la résidence familiale . Il suffit que la victime le demande et qu'il existe des « indices sérieux » de la violence du partenaire, qu'il s'agisse de l'époux ou du cohabitant (4 ( * )) . Pour renforcer l'efficacité de cette mesure, une proposition de loi déposée au Sénat au cours de l'année 2004 vise à mettre en place un jugement accéléré permettant au juge de statuer dans les 24 heures de la requête.

b) Les mesures policières

Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 24 novembre 1997, les services de police appelés par la victime de violences conjugales ont le droit de pénétrer dans le logement familial pour établir un procès-verbal. Précédemment, seul le « chef de maison » pouvait faire appel à la police. La police peut ensuite contraindre l'agresseur à quitter la résidence commune ou lui interdire d'approcher la victime. Elle peut aussi l'arrêter pour une durée de 24 heures. Ce délai paraît toutefois trop bref pour permettre à la victime d'obtenir du juge civil la jouissance du domicile familial. C'est pourquoi une proposition de loi déposée au Sénat au cours de l'année 2004 vise à autoriser les forces de police à contraindre immédiatement l'agresseur à quitter le logement et à ne pas s'approcher de la victime.

4) Les autres dispositions


• D'après la circulaire du 27 novembre 1997 relative à l'intervention financière pour l'aménagement dans les commissariats de police de locaux d'accueil pour les victimes de violences physiques et sexuelles ainsi qu'à la procédure de sélection au sein des corps de police de candidats à la formation « Accueil des victimes d'actes de violence physique et sexuelle » et celle du 9 juillet 1999 concernant l'assistance policière aux victimes, les victimes de violences conjugales sont, dans la mesure du possible, reçues dans des locaux spécialement aménagés par un agent féminin formé à cet effet . Lorsque, pour des raisons de sécurité, la victime ne peut plus rester dans son logement, le fonctionnaire de police la met en contact avec un refuge.

Les services de police peuvent être sollicités pour assurer la protection de la victime si celle-ci est menacée physiquement.


Les parquets ont créé des services d'accueil aux victimes . Celles-ci peuvent y recevoir des informations sur la procédure judiciaire et sur l'état de leur dossier. Si l'agresseur a été condamné à une peine de prison et doit bénéficier d'une libération conditionnelle, les victimes peuvent indiquer à ces services les conditions qu'elle souhaiterait lui voir imposer. Ces mesures s'appliquent dans le cas particulier des victimes de violences conjugales.


• L'aide aux victimes relève de la compétence des communautés. La communauté française a toutefois transféré cette compétence à la région wallonne. Des accords de coopération ont été signés entre l'État, la communauté flamande et la région wallonne afin de coordonner l'action des différents intervenants en matière de violences conjugales. Les services d'aide aux victimes, financés par la communauté flamande et la région wallonne, peuvent apporter une aide psychologique et sociale aux victimes et à leurs proches.

* (4) La cohabitation légale constitue l'équivalent du PACS.

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