NOTE DE SYNTHESE

La présente étude analyse les dispositions constitutionnelles et législatives qui régissent le référendum dans quelques pays européens (Allemagne, Danemark, Espagne, Grèce, Irlande, Italie, Portugal et Suisse), et aux Etats-Unis. Elle prend également en compte l'utilisation qui en a été faite au cours des dernières années dans ces 9 pays ainsi qu'au Royaume-Uni.

En effet, l'examen de la pratique référendaire se révèle d'autant plus nécessaire que l'absence de dispositions constitutionnelles sur le référendum n'empêche pas l'organisation de telles consultations : le Royaume-Uni en a fourni plusieurs exemples au cours des vingt dernières années.

Pour l'Allemagne et la Suisse, on a seulement étudié les dispositions fédérales bien que les constitutions de la plupart des Länder allemands et de tous les cantons suisses prévoient le recours au référendum.

En revanche, si les Etats-Unis ignorent le référendum à l'échelon fédéral, les différents Etats, au premier rang desquels la Californie, l'utilisent de plus en plus. En l'absence de dispositions fédérales sur le référendum, on a donc choisi de présenter une synthèse des différentes dispositions étatiques.

Tous les types de référendums ont été analysés :

- les référendums de consultation , qui juridiquement n'ont pas de valeur contraignante;

- les référendums de décision , normatifs ou abrogatifs, selon qu'ils permettent l'entrée en vigueur d'un texte ou l'abrogation totale ou partielle de dispositions pré-existantes.

Parmi les référendums de décision, il faut distinguer, en fonction de leur objet, les référendums constitutionnels des référendums législatifs .

Par ailleurs, l'initiative, qui permet au peuple lui-même de déclencher la procédure d'adoption de nouvelles normes ou de modifier et d'abroger des normes pré-existantes, n'a été prise en compte que dans la mesure où elle donne lieu à un référendum.

On constate que :

- le référendum constitutionnel, obligatoire ou facultatif, existe dans tous les pays étudiés sauf en Allemagne, en Grèce et au Portugal ;

- dans les pays européens, le référendum législatif est essentiellement conçu comme un droit de veto sur les actes votés par le Parlement, le champ des autres référendums étant très limité ;

- le référendum consultatif, prévu par les seules constitutions espagnole et grecque, est parfois utilisé dans d'autres pays.

I - LE REFERENDUM CONSTITUTIONNEL

1) Le référendum constitutionnel n'est prévu ni par la Loi fondamentale allemande ni par les constitutions grecque et portugaise.

Au Portugal, les modifications constitutionnelles sont même exclues explicitement du champ du référendum.

2) Le référendum est obligatoire pour toutes les révisions constitutionnelles au Danemark, en Irlande, en Suisse et dans les Etats américains.

Aux Etats-Unis, cette obligation vaut dans tous les Etats sauf au Delaware, seul Etat qui ignore tout type de référendum.

En Suisse, l'obligation du référendum s'impose notamment pour les initiatives populaires tendant à modifier la constitution. Comme par ailleurs l'initiative populaire ne peut porter sur des projets de loi ordinaire au niveau fédéral, ceci conduit à la multiplication des initiatives constitutionnelles sur les sujets les plus variés.

3) En Espagne, le référendum constitutionnel n'est obligatoire que pour certaines révisions constitutionnelles.

Les seules modifications constitutionnelles qui doivent être soumises à référendum sont les révisions intégrales et celles qui sont considérées comme " fondamentales " parce qu'elles portent sur les droits et principes fondamentaux, les libertés publiques ou concernent la Couronne.

Les autres révisions constitutionnelles partielles ne sont soumises à référendum que si un dixième des membres de l'une des deux Chambres le demande.

4) En Italie, le référendum constitutionnel est facultatif.

La demande doit être faite par un cinquième des membres d'une Chambre, 500 000 électeurs ou 5 conseils régionaux.

En outre, cette possibilité est limitée aux seuls cas où la révision n'a pas obtenu la majorité des deux tiers des membres de chaque Assemblée lors de la deuxième délibération.

II - LE REFERENDUM LEGISLATIF

1) Toutes les formes de référendum législatif existent dans les différents Etats américains.

Selon les cas, le référendum législatif est obligatoire ou facultatif, son champ est circonscrit ou non. Le référendum est abrogatif ou normatif. Il est organisé à la demande du Parlement ou à la suite d'une initiative populaire.

2) Dans les pays européens, le référendum législatif constitue essentiellement une possibilité de veto à l'encontre des actes votés par le Parlement.

a) Au Danemark, en Irlande et en Suisse, le référendum législatif peut empêcher l'entrée en vigueur de projets récemment votés par le Parlement.

Au Danemark, il s'agit d'une prérogative de la minorité parlementaire puisqu'un tiers des membres du Folketing peut demander que tout texte de loi soit, dans les trois jours qui suivent son adoption, soumis à référendum. Depuis 1953, cette possibilité, dont sont exclus certains projets de loi parmi lesquels les projets budgétaires et fiscaux, n'a été utilisée que deux fois.

En Irlande, la majorité des membres du Sénat et le tiers de ceux de la Chambre des députés peuvent demander au Président de la République de refuser de promulguer un projet de loi qui vient d'être adopté par le Parlement, aussi longtemps que les électeurs ne l'ont pas approuvé par référendum. Cette faculté, qui n'est utilisable que si le projet contient une " proposition d'importance nationale " n'a jamais été mise en pratique.

En Suisse, toute loi fédérale et tout arrêté fédéral de portée générale peuvent, dans les trois mois suivant leur publication, faire l'objet d'une demande de référendum émanant de 50 000 citoyens ou de 8 cantons. Le texte incriminé n'entre en vigueur que si le référendum lui est favorable, c'est-à-dire s'il obtient la double majorité des électeurs et des cantons. Cette possibilité est très largement utilisée par les électeurs, notamment en matière fiscale et budgétaire. Ainsi, l'introduction de la T.V.A. a été approuvée par référendum en 1993 après avoir été repoussée trois fois par référendum également.

Les traités les plus importants, mais qui cependant ne contiennent pas d'abandon de souveraineté, peuvent, selon la même procédure, faire l'objet d'une demande de référendum.

b) Le référendum abrogatif italien

Le référendum abrogatif italien permet au cinquième des membres d'une Chambre, à 500 000 électeurs ou à 5 conseils régionaux, de demander l'abrogation, totale ou partielle, d'une loi ou d'un acte ayant valeur législative.

Les lois budgétaires et fiscales, ainsi que les lois de ratification des traités internationaux ne peuvent pas faire l'objet d'un tel référendum.

Le référendum abrogatif a été employé à de nombreuses reprises depuis la publication de la loi du 25 mai 1970 qui fixe la procédure applicable pour tous les référendums prévus par la Constitution. Depuis 1987, la plupart des initiatives proviennent, non plus de l'opposition mais d'une partie de la majorité, désireuse de réformer les institutions. Ainsi, le référendum sur l'élection des sénateurs d'avril 1993 a permis de rejeter la représentation proportionnelle, jugée responsable du mauvais fonctionnement du régime.

c) Le champ des autres référendums législatifs est très circonscrit.

Le référendum obligatoire concerne essentiellement les relations internationales.

Ainsi, au Danemark, les projets de loi autorisant la délégation de pouvoirs à des autorités supranationales sont obligatoirement soumis à référendum s'ils n'obtiennent pas la majorité des 5/6 au Folketing.

En Suisse, l'adhésion à des organes de sécurité collective ou à des communautés supranationales fait obligatoirement l'objet d'un référendum.

A l'opposé, la Constitution portugaise exclut du champ du référendum les projets de loi approuvant des conventions internationales et des traités concernant la participation à des organisations internationales.

• Indépendamment du domaine des relations internationales, des référendums sont obligatoirement organisés :

- au Danemark, pour modifier l'âge de la majorité électorale,

- en Allemagne, pour la réorganisation du territoire fédéral ; en Espagne pour l'approbation et la modification des statuts des communautés autonomes ; en Italie pour la fusion ou la création de régions. Dans ces trois pays, seules les populations concernées participent au référendum.

• Seules les constitutions grecque et portugaise prévoient l'organisation facultative du référendum législatif à l'image de l'article 11 de la Constitution française.

En Grèce, le champ du référendum législatif est limité aux questions sociales importantes, la proposition et la décision de recourir au référendum appartenant à la Chambre des députés.

La révision constitutionnelle portugaise de 1989 a introduit le référendum législatif sur " d'importantes questions d'intérêt national ", tout en excluant du champ du référendum les matières exclusivement réservées au Parlement, parmi lesquelles les questions budgétaires, fiscales et financières. Si la décision de recourir au référendum appartient au Président de la République, l'initiative en revient au Parlement ou au gouvernement.

III - LE REFERENDUM CONSULTATIF

1) Il est explicitement prévu par les constitutions espagnole et grecque.

La constitution espagnole prévoit de soumettre à référendum les " décisions politiques d'une importance particulière ", sur proposition émanant du premier ministre après accord du Congrès des députés à la majorité absolue.

La constitution grecque autorise le Président de la République, sur initiative du Conseil des ministres approuvée par la majorité absolue des membres de la Chambre des députés, à recourir au référendum sur " les questions internationales graves " .

En Espagne, un seul référendum consultatif a eu lieu depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle constitution : en 1986 sur l'adhésion à l'OTAN. En Grèce, cette possibilité n'a pas encore été utilisée.

2) Le référendum consultatif peut être mis en oeuvre indépendamment de toute disposition explicite.

Le Parlement peut, par une loi spéciale, décider de consulter le peuple sur un point qu'il juge essentiel. Au cours des dernières années, cette possibilité a été utilisée :

- au Royaume-Uni, en 1975, pour le maintien dans la C.E.E. ;

- au Danemark, en 1986, pour l'approbation de l'Acte unique européen ;

- en Italie, en 1989, sur l'attribution de pouvoirs constituants au Parlement européen.

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