F. UNE FORTE PRESSION MIGRATOIRE MAL ENDIGUÉE

L'année 1999 a connu un net accroissement de la pression migratoire, essentiellement liée à la situation dans les Balkans ayant généré une migration d'origine kurde kosovare.

Alors que le nombre des non-admissions (24 220) est resté stable, celui des réadmissions (22 782) 2 ( * ) est en hausse de près de 38% par rapport à 1998 et les interpellations pour séjour irrégulier (27 293) sont en hausse de 22,36%.

L'augmentation importante des placements en zones d'attente a provoqué un véritable engorgement des ces zones , principalement à l'aéroport de Roissy, où a dû être engagé un programme d'agrandissement 3 ( * ) . Ont été en effet enregistrés 9 302 placements en zones d'attentes, soit une hausse de 30% par rapport à l'année précédente. Corrélativement, le nombre des demandes d'asile est en progression de 78% s'établissant à 5 565.

La découverte le 19 juin 2000 à Douvres, par les services britanniques de l'immigration, de 58 clandestins chinois décédés par asphyxie dans un camion immatriculé aux Pays-Bas, a révélé que la France devenait de plus en plus un pays d'immigration de transit . Les interpellations d'étrangers en situation irrégulière ont notablement progressé dans la région frontalière.

L'office central pour la répression de l'immigration irrégulière et l'emploi d'étrangers sans titre (OCRIEST) a identifié plusieurs filières principales d'immigration très structurées ayant chacune un mode opératoire spécifique, à savoir les filières chinoises, indo-pakistanaises, skri-lankaises, turco et irako-kurdes, roumaines, kosovares et sénégalaises.

Cet office a démantelé 27 filières en 1999, chiffre comparable à celui de l'année 1998, et déjà 19 filières sur les six premiers mois de l'année 2000.

Sur 39 855 mesures d'éloignement prononcées par voie judiciaire ou par arrêté préfectoral, 7 821, ont été effectivement exécutées, soit un taux d'exécution de 19,6%, toujours trop bas mais en amélioration par rapport à celui excessivement mauvais de l'année 1998.

S'agissant du bilan au 31 décembre 1999 de l'opération de régularisation initiée par la circulaire du 24 juin 1997, sur 144 008 demandes, 80 457 (55,9%) ont été acceptées et 62 998 (43,7%) ont été rejetées. Seuls 35 984 arrêtés de reconduite à la frontière ont pourtant été prononcés .

Plusieurs dizaine de milliers de personnes ont donc eu vocation à devenir des " clandestins officiels ", confirmant les conclusions du rapport établi par notre collègue José Balarello en 1998 au nom de la commission d'enquête du Sénat sur les régularisations, présidée par notre collègue Paul Masson 4 ( * ) .

Votre commission ne peut que souhaiter un éloignement effectif des personnes n'ayant pas droit au séjour dans notre pays .

Lors de son audition par la commission des Lois, le 28 novembre 2000, le ministre de l'intérieur a présenté le projet de décret relatif aux centres de rétention administrative , faisant ressortir que ce texte doterait ces structures d'un cadre juridique précis et renforcerait notablement les droits des étrangers, notamment grâce à une convention avec une association à caractère national ayant pour objet la défense des droits des étrangers, qui disposerait de locaux adaptés dans les centres. Il a rappelé à cette occasion que le ministère avait engagé depuis 1998 un programme de rénovation des centres de rétention, 160 millions de francs ayant déjà été dépensés à cet effet, permettant la rénovation de 8 des 16 centres gérés par le ministère de l'intérieur en métropole, alors que 3 autres centres seraient prochainement mis aux normes et que six nouveaux sites seraient livrés d'ici 2004 (Versailles, Palaiseau, Nantes, Marseille, Bobigny et Bordeaux).

A l'occasion de la présidence française de l'Union européenne , le ministère de l'intérieur a organisé à Paris, les 20 et 21 juillet 2000, un séminaire permettant de définir les bases d'un nécessaire plan d'action européen en matière de lutte contre les filières d'immigration clandestine.

Cette action doit s'inscrire dans la ligne des orientations définies par le premier Conseil européen consacré aux affaires intérieures et à la justice s'étant tenu à Tampere le 15 octobre 1999, dans le cadre du Traité d'Amsterdam entré en vigueur le 1 er mai 1999. Avaient été esquissés à cette occasion les contours d'une politique commune d'asile et d'immigration mettant l'accent sur la nécessité d'une politique de co-développement avec les pays d'origine et d'une maîtrise des flux migratoires associée à un souci d'intégration des étrangers en situation régulière.

* 2 Remise d'un étranger aux autorités du pays par lequel il est entré dans l'espace Schengen ou avec lequel la France est lié par un accord bilatéral.

* 3 Lors de son audition par la commission des Lois, le 28 novembre 2000, le ministre de l'intérieur a annoncé que les nouveaux locaux seraient livrés en janvier 2001.

* 4 De la non régularisation au non éloignement, un risque majeur pour l'intégration et la cohésion sociale : les " clandestins officiels ".- Rapport n° 470 (1997-1998).

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