B. LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE DE SOUTIEN AUX INDUSTRIES CINÉMATOGRAPHIQUES

1. Le soutien à la production, à la distribution et à l'exploitation

a) L'évolution des crédits

Le tableau suivant détaille l'évolution des crédits du compte de soutien affectés à l'industrie cinématographique entre la loi de finances pour 2004 et le projet de loi de finances pour 2005.

(chiffres exprimés en euros)

LFI 2004

PLF 2005

Variations
en valeur

Variations en %

Article 10 - Subventions et garanties de recettes

41 267 432

43 380 000

2 112 568

+ 5,12 %

Article 20 - Soutien sélectif à la production : avances sur recettes

26 180 000

27 180 000

1 000 000

+ 3,82 %

Article 30 - Subvention et garanties de prêts à la production, la distribution et l'édition sur support vidéographiques de film de long métrage

103 400 000

106 500 000

3 100 000

+ 3 %

Article 40 - Subventions et garanties de prêts à l'exploitation cinématographique

53 000 000

54 000 000

1 000 000

+ 1,88 %

Article 50 - Frais de gestion

11 900 568

12 265 719

365 151

+ 3,06 %

Article 60 - Soutien sélectif à l'exploitation

22 960 000

23 320 341

360 341

+ 1,57 %

Le compte de soutien apporte les aides suivantes :

- les subventions et garanties de recettes, destinées au court métrage, aux industries techniques du cinéma, ainsi que les aides aux actions de promotion et d'expansion. Ceci recouvre les aides sélectives versées au titre de la distribution ou les subventions aux grandes associations chargées de la promotion du cinéma français (tels Unifrance Film International ou le Festival International du Film de Cannes) ;

- les avances sur recettes aux longs métrages (destinées à gager les avances consenties aux producteurs et sélectionnées par une commission spécialisée), l'aide au développement des longs métrages et les aides directes aux films ;

- les subventions et garanties de prêt à la production, la distribution et l'édition sur support vidéo ; il s'agit d'aides automatiques, calculées sur la base de barèmes particuliers en fonction des recettes constatées pour chaque film produit ou distribué ;

- les subventions et garanties de prêt à l'exploitation : subventions automatiques accordées aux exploitants de salles de cinéma, subventions particulières destinées aux salles « art et essai » et primes d'encouragement allouées aux exploitants pour leur action d'animation ;

- les aides sélectives aux exploitants : création et modernisation de salles, soutien aux salles classées « art et essai ».

En 2005 , sur un total de 254 millions d'euros de dotation hors frais de gestion, en hausse de 3,1 % , les aides automatiques devraient représenter une enveloppe estimée à 160,5 millions d'euros. Ce montant inclut les 3,5 millions d'euros du Fonds de garantie de l'Institut de financement des industries culturelles (IFCIC).

- s'agissant du soutien sélectif, les dotations progressent de 4,6 % ;

- les actions « promotion expansion » bénéficient d'une hausse de 0,73 million d'euros ;

- les aides en région se voient consolidées ;

- 1 million d'euros vient, par ailleurs, abonder l'avance sur recettes ;

- les industries techniques bénéficient, quant à elles, d'une hausse de 0,3 million d'euros ;

- enfin, le soutien sélectif à l'exploitation fait l'objet d'une remise à niveau pour tenir compte du développement des salles « art et essai » (+1,57 %).

b) Le bilan du plan d'action en faveur du financement du cinéma

Le 30 avril 2003, le ministre de la culture et de la communication a présenté en Conseil des ministres un plan d'action en faveur du financement du cinéma.

Ce plan, élaboré notamment à la suite du rapport de M. Jean-Pierre Leclerc sur le financement du cinéma, visait pour l'essentiel à moderniser le système d'aide au cinéma dans un double objectif : d'une part, rééquilibrer les ressources du compte de soutien à l'industrie cinématographique en tenant compte de la progression du secteur de la vidéo ; d'autre part, mettre en place de nouveaux outils de financement du cinéma, en particulier des instruments fiscaux, dont les critères d'attribution seraient liés à la localisation des dépenses en France.

La plupart des mesures préconisées dans ce plan d'action sont aujourd'hui entrées en application :

La réforme de la taxation de la vidéo est en vigueur depuis le 1er juillet 2003. Ainsi qu'il a été dit précédemment, le prélèvement de 2 % est désormais effectué sur le prix public des vidéogrammes et non plus sur le chiffre d'affaires des éditeurs vidéo.

La modernisation du soutien à l'édition vidéo a été entreprise, avec d'une part, l'éligibilité des programmes de courts métrages au soutien automatique et, d'autre part, la mise en place d'une commission d'aide sélective à l'édition vidéo présidée par une personnalité extérieure et dotée de moyens budgétaires plus élevés.

Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2004, un dispositif de crédit d'impôt a été créé pour le cinéma. Ce dispositif offre à tout producteur de films de long métrage établi en France, qui réalise l'essentiel des dépenses de tournage et de post-production en France, la possibilité de bénéficier d'un crédit d'impôt à hauteur de 20 % de ces dépenses, plafonné à 500 000 € par film (750 000 € pour les films d'animation). Le coût de ce dispositif est évalué à 25 millions d'euros.

L'objectif consiste également à relocaliser en France les dépenses de tournage et de post-production en privilégiant, en outre, l'emploi permanent à l'intérieur de structures de production grâce à un meilleur financement de la production.

Votre commission est très favorable à ce dispositif, qui permet à la fois de soutenir la création et de contribuer au maintien de l'activité cinématographique et de l'emploi en France. Ceci lui paraît fondamental compte tenu de la baisse inquiétante du nombre de semaines de tournage en France : -12,7 % pour les films d'initiative française entre 2001 et 2003 (soit 879 semaines contre 1 007).

Cette mesure a d'ailleurs déjà commencé à porter ses fruits : entre le 1er janvier et le 31 juillet 2004, 81 tournages de films majoritaires français ont commencé, au titre desquels 56 dossiers de crédit d'impôt ont été ouverts, soit 69 % du nombre des films et 64 % en volume financier.

Compte tenu des résultats positifs enregistrés, le Gouvernement a décidé à la fois d'améliorer cette mesure , en relevant le plafond du crédit d'impôt afin d'intéresser les films français à gros budget dont la relocalisation est essentielle pour l'équilibre de la filière, et d'étendre le dispositif à l'audiovisuel . Ces mesures seront proposées dans le projet de loi de finances rectificative pour 2004.

Le dispositif permettant de soutenir la production en région a été mis en place. Les crédits du compte de soutien à l'industrie cinématographique abondent désormais les fonds régionaux d'aide à la production cinématographique, dans la limite d'un plafond budgétaire global de 10 M€ au niveau national.

Les premières conventions entre le CNC et les collectivités territoriales pour la mise en place de ces fonds destinés à soutenir la production de films de long métrage sont en cours de signature.

Pour soutenir plus efficacement l'exportation du cinéma français, l'IFCIC a mis en place un nouveau programme de garantie destiné à favoriser la contribution des recettes d'exportation au préfinancement des films : désormais l'IFCIC peut garantir jusqu'à hauteur des deux tiers les crédits qui mobiliseront ou anticiperont des recettes d'exportation. Cette mesure a été mise en place à titre expérimental.

Les crédits du compte de soutien destinés aux dispositifs de l'avance sur recettes et de l'aide au développement ont été augmentés : le budget de l'avance sur recettes a été revalorisé de 13,5 % en deux ans (21,2 M€ en 2004), afin de permettre un meilleur financement des films les plus difficiles à produire ; le budget de l'aide au développement a été porté à 3 M€ en 2004 (contre 1,1 M€ en 2003).

Un Observatoire de la production cinématographique , réunissant l'ensemble des professionnels du secteur, a été créé. Il s'est réuni deux fois en 2004 et permet de mieux suivre l'évolution du secteur de la production française.

2. Une action renforcée en faveur du patrimoine

a) Les perspectives et priorités

En 2005 et pour les années à venir, les enjeux majeurs du programme de restauration et de conservation du patrimoine cinématographique sont les suivants :

- la poursuite du plan de restauration des films avec la nouvelle commission du patrimoine récemment mise en place ;

- la mise en ligne sur Internet des deux bases documentaires des Archives françaises du film du CNC et de la Cinémathèque française ;

- l'inventaire national des collections de films conservées par les trois institutions patrimoniales bénéficiant du plan de restauration des films anciens que sont les Archives françaises du film du CNC, la Cinémathèque française et la Cinémathèque de Toulouse ;

- la mise en conformité des installations de conservation des films gérés par le CNC à Bois d'Arcy (3,3 M€ sont inscrits à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2005) et à St Cyr, dans le département des Yvelines (la construction d'un nouveau bâtiment de stockage coûtera 4,3 M€ en 2005) ;

- la valorisation des collections restaurées, avec l'implantation d'une antenne de consultation des collections du CNC sur le site Tolbiac de la Bibliothèque nationale de France ; rappelons que des équipements seront financés à ce titre, en 2005, à hauteur de 0,6 M€ ;

- enfin, l'ouverture au public des collections restaurées de la Cinémathèque française et de la Bibliothèque du film ; ce point mérite un développement spécifique.

b) L'ouverture au public des collections restaurées de la Cinémathèque française et de la Bibliothèque du film

Le projet du 51, rue de Bercy s'est poursuivi en 2003 sous une forme juridique différente, suite à l'arbitrage rendu par le ministre de la culture et de la communication sur la gestion du bâtiment, désormais confiée à la seule Cinémathèque française, qui s'est vue reconnaître son rôle de service public.

Les travaux d'aménagement ont pris quelques mois de retard, compte tenu de la réaffectation des surfaces consacrées aux expositions temporaires et permanentes. La livraison du bâtiment est prévue pour avril 2005 et l'ouverture au public de tous les espaces pour septembre 2005.

La Cinémathèque et la Bibliothèque du film (BiFi ) se partageront les espaces du 51, rue de Bercy et ces deux associations oeuvrent déjà au rapprochement de leurs activités. Ils leur faudra autant que possible mettre en commun leurs moyens, en vue d'une fusion à l'horizon 2007 .

Les espaces qui seront ouverts au public comprendront :

- 4 salles de cinéma (de 435, 200, 90 et 85 places) ;

- des ateliers pédagogiques et salles de formation (650 m 2 ) ;

- la bibliothèque-médiathèque (1 310 m 2 ) ;

- une salle d'expositions temporaires (650 m 2 ) ;

- les salles d'exposition permanentes des collections muséographiques (1 200 m 2 ) ;

- une cafétéria et une librairie-boutique.

Rappelons qu'en 2003, le CNC avait demandé à la Cinémathèque de prendre des mesures urgentes en vue de résorber le déficit cumulé de l'association, qui s'élevait à 947 698 euros au 31 décembre 2002. Celle-ci s'est donc engagée dans un processus de rationalisation.

Ses statuts ont été modifiés lors de l'assemblée générale extraordinaire du 22 septembre 2003, afin de permettre une plus grande stabilité des organes dirigeants ainsi que la clarification de ses rapports avec l'Etat. Le conseil d'administration a réélu M. Claude Berri en tant que président, pour un mandat de trois ans.

3. L'actualité européenne

a) Le renforcement du programme MEDIA

Le programme MEDIA a pour objectif de renforcer la compétitivité de l'industrie européenne du cinéma et de l'audiovisuel. Créé en 1990 pour cinq ans, il a été renouvelé et restructuré en 1995 pour la période 1996-2000 (MEDIA II), puis en 2000 (MEDIA Plus).

Entré en vigueur en janvier 2001, le programme MEDIA Plus reprend la plupart des mesures de MEDIA II, en les amplifiant selon trois axes :

- un renforcement budgétaire ;

- une prise en compte des nouvelles technologies ;

- une priorité donnée à l'amélioration de la circulation des oeuvres et à leur distribution en Europe.

En 2004, le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne ont adopté la proposition de la Commission de prolonger MEDIA Plus d'une année, sur 2006, afin de négocier le programme suivant dans le cadre des nouvelles perspectives financières de l'Union. Prenant en compte l'année 2006 ainsi que l'élargissement de l'Union, le budget du programme doit être porté à 515 millions d'euros au total pour la période 2001-2006, soit une augmentation de 12 %.

Pour la période s'ouvrant à partir de 2007, la Commission a proposé -dans sa communication du 14 juillet dernier- un budget de 1 055 millions d'euros ; son projet reprend l'architecture et les mécanismes de MEDIA Plus, mais y apporte un nombre significatif d'actions complémentaires, qui correspondent, pour beaucoup d'entre elles, aux observations des autorités françaises émises lors des consultations.

b) La réglementation française interdisant la publicité télévisée pour le cinéma

Un rappel du contexte

Dans le cadre d'un précontentieux, la Commission européenne reproche à la France d'entraver la libre prestation de services, en ayant adopté des mesures disproportionnées (l'interdiction de publicité télévisée) aux objectifs d'intérêt général poursuivis et par ailleurs admis (la diversité culturelle et le pluralisme notamment).

Sur les quatre secteurs concernés (distribution, presse, édition et cinéma), deux ont fait l'objet d'un accord, qui prévoit une ouverture partielle ou progressive (pour la distribution) et totale (pour la presse).

Restent donc le secteur du cinéma, pour lequel l'interdiction reste donc maintenue, et le secteur de l'édition où l'ouverture partielle (aux chaînes câble et satellite seulement) est jugée insuffisante par la Commission. Cette dernière a adressé à la France, le 9 juillet 2004 , un avis motivé portant sur ces deux secteurs.

S'agissant de la demande de la Commission européenne relative au secteur du cinéma

La direction générale « Marché Intérieur » demande, sous peine d'engager contre la France un contentieux dans les semaines à venir, des mesures d'ouverture pour le cinéma.

La demande minimale de la Commission est de :

- permettre la publicité pour les films européens non nationaux (excluant donc les productions françaises -cas de discrimination à rebours- et celles des pays tiers) ;

- permettre aux exploitants européens non nationaux de faire la publicité de leurs salles (au moins sur les chaînes locales, en raison de problèmes liés aux zones frontalières).

Dans ces conditions, la France a procédé à une consultation des organisations professionnelles, qui ont été unanimement réservées sur l'opportunité d'une ouverture encadrée, telle que proposée par la Commission.

Votre commission demande au Gouvernement de défendre avec vigueur les principes de diversité culturelle et de pluralisme qui justifient le régime dérogatoire de la France en matière de publicité télévisée pour le cinéma.

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