INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent avis est consacré aux crédits alloués par le projet de loi de finances pour 2005 aux départements et régions d'outre-mer que sont la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et la Réunion. Depuis 2003, cet avis a fortement évolué pour tenir compte des récentes évolutions institutionnelles qu'ont connues les collectivités ultramarines.

Pour prendre acte du changement constitutionnel intervenu à l'égard des collectivités territoriales à statut particulier qui sont désormais rattachées à la catégorie des collectivités d'outre-mer de la République, visée à l'article 74 de la Constitution, tel qu'il résulte des dispositions de la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, le présent avis ne contient plus de développements consacrés à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon. La situation budgétaire de ces deux collectivités est désormais examinée dans le rapport présenté par notre excellent collègue Christian Cointat, au nom de la commission des Lois, relatif aux collectivités d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).

L'évolution du périmètre de cet avis n'est cependant pas terminée. En effet, à la suite du vote positif des électeurs de Saint-Martin et Saint-Barthélémy, ces deux communes de la Guadeloupe devraient, dans un futur proche, devenir des collectivités d'outre-mer au sens de l'article 74 de la Constitution. En conséquence, à terme, ces deux collectivités devraient également sortir du champ d'investigation de votre rapporteur pour avis.

Sur le plan institutionnel, la consultation des populations de Guadeloupe et de Martinique, ainsi que celles de Saint-Martin et Saint-Barthélémy, intervenue le 7 décembre 2003 a constitué un événement majeur et lourd d'incidences pour l'avenir des départements et régions d'outre-mer.

La loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer, grâce à laquelle un effort financier d'ampleur a été décidé en faveur de l'outre-mer français continue de porter ses fruits et a apporté aux départements et régions d'outre-mer des dispositifs nouveaux et efficaces afin de répondre à leurs particularités culturelles, géographiques et sociales.

Enfin, si elle n'est pas encore applicable, en tant que telle, aux crédits prévus pour l'année 2005, la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances produit déjà des effets puisque les crédits consacrés à l'outre-mer sont présentés, à titre seulement indicatif cette année, selon le modèle « mission/programmes/actions » défini par le texte organique. Cette présentation « à double entrée » permet donc d'effectuer d'utiles comparaisons sur les modes de répartition des crédits consacrés par l'Etat aux départements et régions d'outre-mer.

Après une présentation des crédits consacrés aux départements et régions d'outre-mer par le présent projet de loi de finances, et de leur évolution, votre commission a choisi de concentrer son examen sur l'évolution institutionnelle en cours, l'effort budgétaire intervenu dans les domaines de la justice et de la sécurité, ainsi que sur la situation des départements et régions d'outre-mer dans leur environnement régional et leurs relations avec l'Union européenne.

I. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX DÉPARTEMENTS ET RÉGIONS D'OUTRE-MER

Lors de l'examen des crédits consacrés aux départements et régions d'outre-mer dans le projet de loi de finances pour 2004, votre commission avait regretté que les documents budgétaires n'aient pas tiré les conséquences de la révision constitutionnelle opérée par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République. Dans plusieurs hypothèses, la situation de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon n'était pas individualisée par rapport aux départements et régions d'outre-mer, alors même que ces deux collectivités ne relevaient plus, constitutionnellement, de l'article 73 de la Constitution. Elle constate avec satisfaction que les services ministériels ont, désormais, véritablement pris en compte ce changement.

Le projet de loi de finances pour 2005 se caractérise par un maintien de l'effort budgétaire consenti par l'Etat en faveur des départements et régions d'outre-mer, par rapport à la situation résultant du projet de loi de finances pour 2004. Ce maintien transparaît tant de la présentation faite selon la technique actuelle des chapitres budgétaires que selon celle des missions et programmes prévus par la loi organique relative aux lois de finances.

A. LE MAINTIEN DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE EN FAVEUR DES DÉPARTEMENTS ET RÉGIONS D'OUTRE-MER

Le projet de budget du ministère de l'outre-mer pour 2005 pour l'ensemble des collectivités formant l'outre-mer français s'élève à 1,71 milliard d'euros , en hausse de 52,54 % par rapport au projet de budget pour 2004. Si cette hausse peut paraître spectaculaire, elle doit cependant être relativisée.

En effet, l'effort financier en faveur des départements et régions d'outre-mer ne résulte pas du seul budget du ministère de l'outre-mer, mais également des dotations de plusieurs autres ministères qui comportent des lignes de crédits spécifiques en faveur de l'outre-mer. Or, le projet de loi de finances instaure des transferts de crédits importants entre les ministères concernés, pour l'essentiel au profit du ministère de l'outre-mer .

Il y a donc un changement de périmètre qui n'implique pas une croissance aussi considérable du budget de l'outre-mer. Au total, Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, a reconnu, lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale 1 ( * ) puis au cours de son audition devant votre commission, le 17 novembre 2004, que le projet de budget 2005 de son ministère se caractérisait, à périmètre constant, par une baisse de 27 millions d'euros, soit -2,4 %. Outre les restrictions rendues nécessaires par la rigueur budgétaire qu'impose l'état des finances publiques, la baisse des dotations répond à des mesures d'ajustement aux besoins des départements et régions d'outre-mer en ce qui concerne l'emploi et la couverture maladie universelle complémentaire. Le ministre a d'ailleurs insisté sur le fait que les missions dévolues au ministère de l'outre mer, le niveau des prestations versées et le périmètre d'intervention seraient maintenus . 2 ( * )

En tout état de cause, votre commission constate que cette baisse relative n'a pas d'incidence réelle sur la situation des départements et régions d'outre-mer, qui bénéficient des crédits d'autres ministères et dont les dotations connaissent une certaine augmentation.

1. Une légère amélioration des crédits accordés aux départements et régions d'outre-mer

Par rapport au projet de loi de finances pour 2004, le présent projet de loi marque une légère amélioration des crédits accordés aux départements et régions d'outre-mer. Cette situation est illustrée tant par l'examen des dépenses ordinaires et des crédits de paiement que par celui des autorisations de programme.

Évolution des crédits 2004-2005 (en milliers d'euros)
(hors coûts de gestion métropolitains)

 

Dotations 2004

PLF 2005

Variation en %

Total DO + CP

7.556.642

7.685.426

+1,70 %

dont :
- outre-mer

- intérieur

- justice

809.531

1.560.308

132.368

1.379.508

1.635.079

133.385

+70,40 %

+4,79 %

+ 0,76 %

Total AP

856.555

860.046

+0,40 %

dont :
- outre-mer

- intérieur

- justice

294.526

324.618

17.784

254.725

174.273

17.821

-13,51 %

-46,31 %

-0,20 %

Sources : ministère de l'outre-mer

? L'évolution des dépenses ordinaires et des crédits de paiement

En matière de dépenses ordinaires et de crédits de paiement, l'effort budgétaire consenti au titre du budget pour 2005 pour les départements et régions d'outre-mer est en légère augmentation.

E n tenant compte tant des crédits répartis entre les quatre départements d'outre-mer que des crédits non répartis entre ces collectivités , à l'exception des frais de gestion des services métropolitains , le montant de l'effort budgétaire pour 2005 s'élève à 7,68 milliards d'euros. Or, les crédits répartis comme non répartis consacrés, en 2004, aux quatre départements et régions d'outre-mer ont été de 7,55 milliards d'euros. Dans ces conditions, le projet de loi de finances pour 2005 consacre une légère augmentation de la dotation budgétaire, à hauteur de 1,70 % .

Lors de l'examen du précédent projet de loi de finances, votre commission avait souligné l'importance des crédits non répartis entre les différents départements et régions d'outre-mer, et ce d'autant plus que les chiffres donnés incluaient encore Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, pourtant devenues des collectivités d'outre-mer au sens de l'article 74 de la Constitution. Elle avait critiqué cette pratique qui rendait plus difficile le contrôle du Parlement sur l'allocation des crédits entre collectivités.

Elle constate que le présent projet de loi de finances fait un pas dans la bonne direction en augmentant la part des crédits répartis et identifiés entre les quatre départements d'outre-mer. Ainsi, ces crédits répartis s'élèvent, pour 2005, à 6,22 millions d'euros, représentant 80,99 % des crédits octroyés par le projet de budget à ces collectivités . Par comparaison, en 2004, seuls 69,73 % des crédits avaient fait l'objet d'une répartition par département.

Dépenses ordinaires et crédits de paiement (en milliers d'euros)
(hors coûts de gestion des services métropolitains)

 

Guyane

Réunion

Martinique

Guadeloupe

Crédits non répartis

%

TOTAL

TOTAL
DO-CP

dont :

789.197

2.550.184

1.219.067

1.671.607

1.455.371

100 %

Outre-mer

112.282

534.190

299.926

307.069

126.041

17,94 %

Intérieur

45.300

115.317

90.982

161.366

1.222.074

21,27 %

Justice

20.913

45.905

29.861

36.635

71

1,73 %

Sources : ministère de l'outre-mer

Cet effort n'est cependant pas généralisé. Ainsi, le montant des crédits non répartis dans le budget du ministère de l'intérieur reste stable par rapport à 2004, s'élevant à 1,22 milliard d'euros, ce qui représente 68,31 % des crédits dévolus par ce ministère aux départements et régions d'outre-mer. De même, les crédits non répartis du ministère de la défense connaissent une forte croissance, passant de 464.000 euros à 50 millions d'euros en 2005.

Comme l'an passé, La Réunion est la principale bénéficiaire des crédits consacrés aux départements et régions d'outre-mer, puisque 42 % des crédits lui sont consacrés. La Guadeloupe, la Martinique et la Guyane reçoivent respectivement 25 %, 20 % et 10 % des crédits répartis. Cette situation s'explique essentiellement, comme les années précédentes, par le poids démographique très différent d'une collectivité à l'autre, la population de La Réunion étant estimée, au 1 er janvier 2004, à 764.661 personnes alors que celle de la Guyane n'atteint que 180.186 habitants.

? L'évolution des autorisations de programme

En autorisations de programme et en tenant compte tant des crédits répartis que des crédits non répartis entre les différents départements d'outre-mer, le montant de l'effort budgétaire consacré aux départements et régions d'outre-mer par le projet de loi de finances pour 2005 est stable, s'élevant à 860,04 millions d'euros, en hausse de +0,40 % par rapport aux dotations pour 2004.

L'examen des crédits fait cependant apparaître une situation contrastée, témoignant d'une forte redistribution entre les différents ministères participant au financement des départements et régions d'outre-mer.

Autorisations de programme (en milliers d'euros)
(hors coûts de gestion des services métropolitains)

 

Guyane

Réunion

Martinique

Guadeloupe

Autorisations non réparties

%

TOTAL

TOTAL AP

dont :

170.022

276.726

179.053

147.438


24.958

100 %

Outre-mer

35.570

91.000

39.500

77.000

10.562

29,49 %

Intérieur

18.839

69.027

41.225

45.182

0

20,26 %

Justice

168

609

6.215

10.792

37

2,07 %

* 1 Débats, Assemblée nationale, 2 ème séance du mardi 9 novembre 2004.

* 2 Ibid.

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