b) Les dispositions relatives au remboursement de certaines spécialités pharmaceutiques

L'article 28 bis adopté par l'Assemblée nationale, à l'initiative du gouvernement, propose, dans son paragraphe I , de permettre aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale de décider du maintien temporaire de la prise en charge de certaines spécialités pharmaceutiques dont le service médical rendu, apprécié par la Commission de la transparence, est insuffisant au regard des autres médicaments ou thérapies disponibles.

Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixerait ainsi la liste des spécialités pharmaceutiques concernées. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale, la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations est fixée à 85 % pour ces spécialités.

Le II de cet article précise également que les spécialités mentionnées au I ne bénéficient pas forcément d'une prise en charge par les organismes d'assurance maladie complémentaires qui peuvent décider à l'encontre de cette prise en charge.

Enfin, le III de cet article prévoit que la radiation des spécialités pharmaceutiques concernées ainsi que celle de leurs génériques de la liste des médicaments pouvant être pris en charge ou donner lieu à remboursement par les caisses d'assurance maladie, intervient au plus tard le 1 er janvier 2008.

Lors de l'examen de ces dispositions à l'Assemblée nationale, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué que le gouvernement avait décidé de « différer la date d'entrée en vigueur pour les veinotoniques » des recommandations des experts de la Commission de la transparence et de la Haute autorité de santé (HAS) sur les déremboursements des médicaments à SMR insuffisant, car les veinotoniques « sont encore très utilisés par nos concitoyens et concitoyennes ». Il a ajouté que la date de déremboursement de ces produits était repoussée au 1 er janvier 2008.

En outre, notre collègue député Jacques Domergue, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, a précisé que ce délai laisserait « le temps aux complémentaires de décider si elles remboursent ou non ces médicaments ».

Votre rapporteur pour avis estime que les dispositions de cet article ne sont pas satisfaisantes, dans la mesure où elles instituent le principe d'une dérogation temporaire aux recommandations émises par la Commission de la transparence et la HAS sur les déremboursements de médicaments à service médical rendu insuffisant. En effet, il ne convient pas de faire « deux poids deux mesures » s'agissant du déremboursement de ces médicaments : l'assurance maladie ne saurait continuer à assurer le remboursement de médicaments jugés peu efficaces alors même que de nouveaux médicaments plus efficaces, mais aussi plus chers, sont mis sur le marché et doivent également faire l'objet d'une prise en charge par les organismes d'assurance maladie.

En outre, le dispositif prévu par l'article 28 bis du présent projet de loi de financement prévoit que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixent par arrêté la liste des spécialités pharmaceutiques concernées par ce dispositif dérogatoire. Dès lors, rien n'interdit aux ministres précités d'inclure dans cette liste des médicaments autres que les veinotoniques.

Pour toutes ces raisons, votre rapporteur pour avis n'approuve pas les dispositions de l'article 28 bis précité et vous proposera de les supprimer .

L'évaluation du service médical rendu

La Commission de la transparence a réévalué, de fin 1998 à mars 2001, le service médical rendu (SMR) des 4.490 spécialités pharmaceutiques remboursables vendues en France. Le service médical rendu prend notamment en compte la gravité de la pathologie à laquelle le médicament est destiné, l'efficacité et les effets indésirables, la place dans la stratégie thérapeutique au regard des autres thérapies disponibles et l'intérêt pour la santé publique. Les travaux de la commission de la Transparence ont ainsi conduit à attribuer, selon les médicaments, un service médical rendu majeur, important, modéré, faible ou insuffisant pour justifier la prise en charge par l'assurance maladie.

Dans 18,6 % des cas, soit pour 835 médicaments, elle a été amenée à le déclarer « insuffisant ». Par ailleurs, elle a considéré que 840 médicaments dont le taux de remboursement était de 65 % présentaient en fait un SMR faible ou modéré, situation justifiant selon la réglementation un remboursement au taux de 35 %.

Des conséquences partielles avaient alors été tirées :

- d'une part, en portant à 35 % le taux de remboursement des spécialités à SMR insuffisant dont le taux de prise en charge était auparavant de 65% : un premier arrêté concernant les vasodilatateurs et nootropes a été pris en août 2000, abrogé et remplacé par un arrêté pris en septembre 2001, et un second concernant les autres spécialités a été pris en décembre 2001 ;

- d'autre part, en demandant au comité économique des produits de santé (CEPS) de rechercher, par la voie conventionnelle, des baisses de prix qui se sont achevées à l'été 2002.

Des mesures ont continué d'être prises en ce domaine. Le gouvernement a ainsi baissé, par arrêté du 18 avril 2003, le taux de remboursement de 616 spécialités pour lesquels la commission de la transparence a jugé que le service médical rendu (SMR) est faible ou modéré et qui, en conséquence, n'ont vocation à être pris en charge par la sécurité sociale qu'au taux de 35 %. Cette mesure représente une économie estimée à 356 millions d'euros pour l'assurance maladie obligatoire en année pleine.

En outre, un arrêté du 24 septembre 2003 a radié de la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, 82 spécialités sur les 835 dont le service médical rendu avait été considéré comme insuffisant par la commission de la transparence lors de leur réévaluation. Cette première vague concerne les médicaments dont la commission de la transparence avait estimé qu'ils n'avaient « pas de place dans la stratégie thérapeutique ». Le montant remboursé par l'assurance maladie de ces spécialités s'élevait à 43 millions d'euros.

Cette politique de réévaluation du taux de prise en charge des spécialités pharmaceutiques en fonction de leur service médical rendu doit être poursuivie. Une deuxième vague de médicaments a fait l'objet d'un réexamen par la Commission de la transparence. Ces médicaments ne sont pas de prescription obligatoire et viendront donc renforcer le marché de l'automédication. La troisième étape concernera les médicaments restants, majoritairement de prescription obligatoire.

Signalons que la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie a confié cette mission de réévaluation à la haute autorité de santé, qui devra se prononcer sur l'évaluation d'une stratégie thérapeutique dans sa globalité, à partir du travail de réévaluation opéré par la Commission de la transparence.

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