DEUXIÈME PARTIE : DEUX POLITIQUES DU PROGRAMME « AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE »

I. LES PÔLES DE COMPÉTITIVITÉ : UN LEVIER DÉSORMAIS INCONTOURNABLE DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

A. VERS UNE APPROCHE TERRITORIALISÉE DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

1. Fondements du concept de pôle de compétitivité

Les pôles de compétitivité se définissent comme des espaces géographiques délimités concentrant des entreprises, des unités de recherche et des centres de formation mobilisés et engagés dans des projets coopératifs innovants et disposant d'une taille critique leur garantissant une visibilité internationale.

L'identification de pôles de compétitivité doit permettre de concentrer les moyens de l'Etat et des agences nationales soutenant les entreprises, l'innovation et la recherche, sur les projets les plus porteurs pour la croissance et pour l'emploi , dans un contexte de concurrence internationale intense. Elle est également un moyen d'orienter les concours financiers des collectivités territoriales et de démultiplier ainsi l'effet d'entraînement de telles structures sur le développement local .

Fondamentalement, la stratégie des pôles de compétitivité repose sur l'idée que pour être compétitive, l'industrie française doit miser sur l'innovation et se spécialiser sur des productions à haute valeur ajoutée , comme l'a mis en évidence le rapport de la DATAR de février 2004 sur « La France, puissance industrielle ».

Partant du constat que centres de recherche et industrie sont dispersés sur le territoire, ce rapport propose de regrouper PME, centres de formation et laboratoires de recherche dans des pôles afin de favoriser, dans un souci d'efficacité, une mutualisation des ressources.

De tels réseaux d'entreprises territorialisés (parfois appelés « clusters ») fonctionnent déjà, grâce à une dose plus ou moins forte d'impulsion publique, dans un certain nombre de pays, comme les Etats-Unis (Silicon Valley), l'Italie (où l'on parle de « districts »), le Danemark ou encore l'Allemagne.

En France, les technopôles ont parfois été considérés comme un précédent. A la différence des pôles de compétitivité, ils n'ont eu pourtant eu pour objectif que de rapprocher géographiquement des entreprises et des centres de formation, sans contraindre ces différents acteurs à travailler ensemble, ce qui explique la réussite assez aléatoire de ces structures.

En promouvant une approche territorialisée du développement économique , les pôles de compétitivité contribuent à enrichir la politique d'aménagement du territoire d'une dimension désormais incontournable de politique industrielle. Affirmée par le Gouvernement dès le CIADT du 13 décembre 2002, cette nouvelle orientation a été consacrée par celui du 14 septembre 2004, qui a donné le feu vert au lancement de l'appel à projets.

2. Les étapes et le calendrier

* Piloté par un groupe de travail interministériel (GTI) , réunissant les ministères chargés de l'aménagement du territoire, de l'industrie, de la recherche, de l'agriculture, de la défense et de l'emploi, l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) et la Caisse des Dépôts, et animé conjointement par la DATAR et la direction générale des entreprises du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, l' appel à projets a été lancé par une circulaire du 25 novembre 2004.

Au terme du cahier des charges, les projets présentés devaient répondre à quatre exigences majeures :

- être créateurs de richesses nouvelles à forte valeur ajoutée et d'emplois qualifiés ;

- pouvoir se positionner sur des marchés mondiaux caractérisés par un fort potentiel de croissance ;

- se fonder sur des partenariats approfondis entre les acteurs, se traduisant par un mode de gouvernance structuré et de qualité ;

- définir les objectifs et les moyens d'une stratégie efficace de développement économique et de recherche de l'innovation.

A la clôture de la période d'appel à candidatures, le 28 février 2005, 105 dossiers avaient été déposés.

* Tous ont fait l'objet d'une évaluation en trois étapes , coordonnée par le GTI.

Une première expertise, portant notamment sur la qualité des partenariats noués et sur l'implication des collectivités territoriales, a été réalisée en mars 2005 par les préfets de région.

Une deuxième évaluation, tendant à apprécier la qualité des propositions au regard du cahier des charges de l'appel à projets, a ensuite été menée par les experts des différents ministères concernés.

Enfin, une troisième évaluation a été confiée à un groupe de personnalités qualifiées indépendantes, composé d'industriels, de scientifiques et d'experts financiers.

* Le Gouvernement s'est prononcé sur le fondement de ces différentes analyses lors du CIADT du 12 juillet 2005 . A cette occasion, 67 dossiers ont été labellisés, un calendrier resserré de mise en oeuvre a été défini et un engagement de l'Etat portant sur 1,5 milliard d'euros sur trois ans a été acté.

Parmi les 67 pôles labellisés 1 ( * ) , le CIADT a souhaité distinguer entre :

- 6 pôles « mondiaux », correspondant à des projets de grande envergure, parmi lesquels le pôle Minalogic en Rhône-Alpes, spécialisé dans l'activité microélectronique et les nanotechnologies, et le pôle aéronautique en Midi-Pyrénées et Aquitaine ;

- 9 pôles « à vocation mondiale », qui ont un réel potentiel international et devraient rejoindre un jour le premier groupe, à l'image du pôle « i-Trans » dans le Nord Pas-de-Calais, centré sur la construction ferroviaire et le pôle « Végétal spécialisé » de la région Pays de la Loire, qui concerne les semences, l'horticulture et l'arboriculture ;

- 52 pôles « nationaux », dans des domaines également très variés, allant de la plasturgie à l'agroalimentaire, en passant par la vente par correspondance et l'industrie textile.

Selon les informations recueillies par vos rapporteurs pour avis auprès des services de la DATAR, les quinze pôles mondiaux et à vocation mondiale bénéficieront d'un accompagnement renforcé de la part du GTI et de l'intégralité des crédits d'animation versés par l'Agence nationale de la recherche (ANR) aux pôles de compétitivité (soit 3 millions d'euros sur trois ans). Pour le reste, le même dispositif de soutien fiscal, social et financier s'appliquera aux pôles mondiaux et à vocation mondiale et aux autres pôles de compétitivité.

S'agissant des dossiers non retenus , ils devraient être orientés vers d'autres dispositifs de soutien aux réseaux d'entreprises, tels que les systèmes productifs locaux (SPL), les procédures d'actions collectives conduites par les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement ou encore les contrats de progrès. Ils pourront bénéficier, sur proposition des préfets de région, de 4 millions d'euros de crédits d'animation sur l'enveloppe de 1,5 milliard d'euros destinée aux pôles de compétitivité, afin d'affiner leur positionnement et leur stratégie.

* Après un examen en détail par le GTI - portant notamment sur les thématiques retenues, le zonage R&D proposé et l'implication des collectivités territoriales - le comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires 2 ( * ) (CIACT) du 14 octobre 2005 a validé 55 des 66 projets de contrats-cadres reçus (depuis juillet 2005, deux pôles « mécanique » de Rhône-Alpes et d'Auvergne ayant fusionné pour former le VIAMECA).

S'agissant des onze projets non encore validés , tous à vocation nationale, ils devront être approfondis sur certains points et seront réexaminés lors d'une prochaine réunion interministérielle d'aménagement du territoire. Vos rapporteurs pour avis souhaitent que les espoirs qu'a fait naître chez les initiateurs de ces projets la reconnaissance, en juillet dernier, du label de pôles de compétitivité ne soient pas déçus.

Lors de ce CIACT, trois projets de décrets d'application relatifs aux pôles de compétitivité ont par ailleurs été examinés, portant l'un sur les zones de recherche et développement (R&D) prises en compte pour les exonérations fiscales et les allègements de charges sociales, l'autre sur le régime fiscal applicable aux entreprises implantées dans un pôle de compétitivité et participant à un projet de R&D, et le troisième sur les modalités des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale pour ces entreprises.

Les contrats-cadres entre les pôles, l'Etat et les collectivités territoriales devraient être signés d'ici la fin de l'année 2005 et le dispositif de soutien, notamment fiscal et social, entrera en vigueur au 1 er janvier 2006.

Les pôles de compétitivité seront donc opérationnels dès le début de l'année à venir.

* 1 La liste figure en annexe I du présent avis.

* 2 Les CIACT remplacent les CIADT depuis cette date.

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