B. LA NÉCESSITÉ D'UN DOUBLE ÉQUILIBRE

Toutes ensemble, les agences de moyens représenteront en 2006 largement moins de 5 % de l'ensemble des dépenses de recherche, contre 37 % aux Etats-Unis et 22 % au Royaume-Uni 11 ( * ) . Toutefois, même avec cette part relativement modeste, les agences sont déjà confrontées à la recherche d'un double équilibre, avec les structures existantes, d'une part, et avec les financements sur projets européens, d'autre part.

1. L'articulation entre les agences et les opérateurs

Il convient en particulier d'assurer la cohérence entre les orientations de l'ANR et la politique scientifique propre des organismes. A ce titre, deux écueils doivent être évités. Le premier serait de réduire strictement les établissements au soutien de base des unités en réservant la définition des priorités à la seule agence.

Le second serait l'existence de doublons, voire de contradictions, entre la stratégie des agences et celle des organismes.

Les expériences étrangères 12 ( * ) ainsi que le recul d'une année de fonctionnement de l'ANR permettent de formuler deux recommandations :

- d'une part, il serait souhaitable qu'à l'intérieur des grandes priorités fixées par l'ANR, il existe un véritable dialogue entre les organismes et le conseil scientifique de l'agence chargée de définir les critères d'éligibilité des projets ;

- d'autre part, il est essentiel que les organismes désignés comme délégataires de l'ANR veillent à une séparation stricte entre leur fonction d'attribution des financements pour le compte de l'agence et leur rôle d'opérateur susceptible d'être candidat à ces ressources. Les dispositifs mis en place à cette fin par l'INRA et par l'INSERM, au cours de l'année 2005, sont encourageants.

2. L'équilibre entre projets français et projets européens

a) Des démarches bilatérales de bon augure

D'emblée l'ANR et l'AII ont inscrit leur action dans le cadre européen. Les quatre premiers programmes de l'AII ont ainsi été arrêtés en conseil des ministres franco-allemand du 26 avril 2005 et associent pour leur réalisation des entreprises situées de part et d'autre du Rhin.

L'ANR, quant à elle, a noué des contacts directs avec les ministères de la recherche britannique (MRC) et allemand (BMBF) ainsi qu'avec la principale agence de moyens allemande, la Deutsche Forschung Gesellschaft (DFG). Les coopérations envisagées portent essentiellement sur la déclinaison, d'un pays à l'autre, des meilleures pratiques nationales et sur le partage des bases de données d'experts. Les conditions semblent réunies pour que des actions communes puissent ultérieurement voir le jour dès lors qu'aura été réglée la question délicate du partage du financement, chaque pays voulant disposer d'un retour sur ses investissements.

b) L'articulation à trouver avec la future agence européenne

Le 7 ème programme-cadre pour la recherche et le développement technologique actuellement en préparation prévoit la création d'une agence de moyens au niveau européen, l'European Research Council (ERC), opérationnelle dès 2007.

La question se pose dès lors de savoir en quels termes s'effectuera l'articulation de l'ANR et de l'ERC. Il est possible d'imaginer que l'agence européenne, dotée d'un budget conséquent 13 ( * ) , aura naturellement vocation à financer des projets importants, laissant aux agences nationales le soin de financer les projets plus modestes. Mais, on peut aussi craindre que l'articulation soit moins lisible et la question de la concurrence entre les différentes agences se poserait alors inévitablement.

Un scénario médian serait celui d'une coopération entre l'ERC et les agences nationales sur le mode de l'échange d'informations permettant le financement à plusieurs niveaux d'un même projet ou l'application d'un principe de subsidiarité selon des modalités définies d'un commun accord par les acteurs en présence. Quoiqu'il en soit, il s'agit d'un enjeu stratégique pour que les efforts financiers importants accomplis au niveau national puissent bénéficier d'un effet de levier européen.

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Quant à l'équilibre qui devra s'établir entre les agences françaises , le risque d'une concurrence semble aujourd'hui faible pour plusieurs raisons.

D'une part, l'ANR et l'AII apparaissent complémentaires, quant à leur champ de compétences. Quant à l'AII et Oséo-Anvar, elles diffèrent profondément quant à la dimension des projets qu'elles financent. D'autre part, les dirigeants des trois agences françaises ont déjà exprimé publiquement leur volonté de travailler en commun afin d'éviter tout empiètement ou doublon. C'est un point auquel le Parlement devra veiller avec une attention particulière.

Enfin, les exemples étrangers, et notamment celui de la Finlande, où existe une division similaire entre une agence chargée du financement de la recherche académique et une agence de l'innovation, montrent que la complémentarité est effectivement possible.

* 11 Source : OCDE

* 12 Notamment celle de la Fondation nationale de la science (NSF) américaine.

* 13 L'agence pourrait être dotée de 35 milliards d'euros par an sur la période d'exécution du programme (2007-2013), soit une moyenne de 5 milliards d'euros par an.

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