B. LE FONCTIONNEMENT : LES ATOUTS DE LA GESTION MIXTE

Les crédits de fonctionnement : une variable d'ajustement pour les régulations budgétaires ?

Les crédits de fonctionnement augmentent de 3 % (soit + 15,5 millions d'euros contre + 35,5 millions d'euros en 2005).

Les mesures nouvelles permettent notamment (à hauteur de 1,58 million d'euros) de renforcer la sécurité des établissements par la poursuite de l'installation de tunnels d'inspection à rayons X et de sas sécurisés ainsi que par des dispositifs de brouillage des téléphones portables.

La progression limitée des crédits de fonctionnement se comprend dès lors que le taux d'exécution de la loi de programmation en matière de fonctionnement atteint 77 %. Néanmoins, ce bon résultat doit être tempéré par deux observations :

- la loi de programme a été construite sur l'hypothèse d'une population pénale stabilisée autour de 50.000 personnes ; or, elle a augmenté depuis lors de 20 % ;

- ensuite, les crédits de fonctionnement ont systématiquement fait l'objet depuis trois ans de régulations budgétaires.

Les annulations ont porté sur 6 millions d'euros en 2003 et 26 millions d'euros en 2004 -montant qu'il convient de rapprocher des augmentations initialement prévues en loi de finances pour le fonctionnement, respectivement de 14 millions d'euros et 36 millions d'euros. En 2005, le gel a porté sur 40 millions d'euros (l'augmentation des crédits de fonctionnement prévue en loi de finances initiale représentait 35,5 millions d'euros). Sur ce montant, selon les informations données par le garde des sceaux lors de son audition par votre commission, 10 millions d'euros ont été annulés, 10 millions d'euros ont été rétablis au profit de l'administration pénitentiaire et 20 millions d'euros reventilés sur les lignes déficitaires du ministère.

Ces mesures se sont traduites par d'importantes économies sur les dépenses d'entretien des bâtiments (-25 % sur les quatre dernières années). Le coût de la journée de détention tend d'ailleurs à se stabiliser.

Il convient de relever que ces régulations ne concernent pas les engagements contractualisés de l'Etat vis-à-vis de partenaires privés dans le cadre de la gestion déléguée 3 ( * ) .

Les établissements en gestion mixte : un fonctionnement sanctuarisé ?

Les établissements pénitentiaires en gestion mixte 4 ( * ) sont au nombre de 27 (14.973 places en détention soit 32 % des places en France métropolitaine).

Les tâches participant au fonctionnement courant peuvent y être confiées à une personne autre que l'Etat sous la forme d'un marché de fonctionnement 5 ( * ) .

Les marchés de fonctionnement actuels (période 2002-2009), confiés à 3 groupements d'entreprises couvrant chacun une zone géographique (Nord, Est, Ouest, Île de France, Sud) représentent un marché prévisionnel d'un montant de 900 millions d'euros sur une durée de huit ans, financé sur les crédits de fonctionnement 6 ( * ) .

Il est possible de dresser un bilan globalement positif de la gestion mixte : les fonctions confiées aux titulaires des marchés ont été remplies conformément aux objectifs. Seule la fonction « travail » est restée en deçà des engagements pris donnant lieu à l'application des pénalités prévues. Il est vrai que, tous établissements confondus, l'emploi des détenus, soumis à de nombreuses contraintes, tend à baisser. Cependant, le montant global des rémunérations dans les établissements en gestion mixte a progressé de 4 % malgré la baisse du nombre de journées travaillées (alors qu'il a baissé de 3 % dans le parc public).

Selon, M. Pascal Clément, ministre de la justice, les coûts d'une journée de détention en gestion mixte et publique sont très proches (respectivement 52,96 euros et 52,59 euros) mais toute comparaison doit rester prudente compte tenu des contraintes particulières des établissements en gestion publique dont certains, contrairement aux structures en gestion mixte, présentent un caractère très vétuste.

A l'occasion de la visite des maisons d'arrêt de Liancourt et Lille-Sequedin, votre rapporteur pour avis a pu s'entretenir avec les responsables de l'administration pénitentiaire et les représentants des titulaires du marché de fonctionnement des implications de la gestion mixte sur le fonctionnement d'un établissement pénitentiaire.

La gestion mixte s'accompagne d'une modernisation des méthodes .

S'agissant de la fonction restauration, il convient de noter le passage aux barquettes individuelles qui, si elles ne permettent plus, en principe, la distribution de rations supplémentaires, répondent aux exigences de l'hygiène. Dans les domaines de la formation et de l'emploi, des équipes commerciales sont chargées de la prospection de nouveaux marchés.

Les partenaires ont souligné plus particulièrement que la gestion mixte garantissait une bonne maintenance opérationnelle des établissements. Selon M. Alain François, directeur général de la société SIGES (filiale de la société SODHEXO) -titulaire du marché de fonctionnement des établissements en gestion mixte dans la zone Nord-, l'externalisation s'accompagne également d'un transfert de risque lié à la prise en charge d'une structure conçue et réalisée par un autre opérateur. A ses yeux, le développement du partenariat public-privé dans le cadre duquel un même intervenant assume l'investissement et la maintenance marquera, à cet égard, un progrès.

Il est vrai cependant que la contractualisation des dotations versées aux groupements privés les prémunit contre les régulations budgétaires et leur permet d'assurer leurs missions sans défaillance. Ils sont à cet égard placés dans une position plus favorable que les établissements publics classiques.

Le risque d'un service public « à deux vitesses », évoqué par certains, semble néanmoins devoir être conjuré. En effet, les futurs établissements pénitentiaires seront tous placés en gestion mixte.

La garantie de pérennité des engagements financiers contractualisés de l'Etat constitue, en tout état de cause, le meilleur argument en faveur de la gestion mixte.

* 3 Sur l'augmentation de 15,5 millions d'euros des dépenses de fonctionnement, près de 12 millions sont réservés à l'augmentation des coûts de la gestion déléguée liée à la prise en charge en année pleine des nouveaux établissements du programme « 4.000 » (Meaux-Chauconin et Lille-Sequedin).

* 4 La gestion mixte a pour fondement légal la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire.

* 5 La livraison et la mise en service de cuisines et de buanderies de grande capacité au sein des établissements en gestion mixte permet d'envisager de leur confier à titre expérimental, dans le cadre d'une délégation de service, les fonctions restauration et blanchisserie des établissements en gestion classique implantés à proximité des nouvelles structures. Une expérience en ce sens est menée à Toulouse et à Lille.

* 6 L'administration pénitentiaire a versé aux groupements privés :

- 91,8 millions d'euros en 2002, taux d'occupation moyen : 96 % soit 3.895.445 journées de détention facturées ;

- 103,7 millions d'euros en 2003, taux d'occupation moyen : 104 % soit 4.684.205 journées de détention facturées ;

- 115 millions d'euros en 2004, taux d'occupation moyen : 105,55 % soit 5.150.271 journées de détention facturées.

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