N° 34

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 octobre 2006

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur :

- le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, pour le développement de la participation et de l' actionnariat salarié,

- et la proposition de loi de M. Michel MERCIER modifiant l'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l' organisation et à la promotion des activités physiques et sportives ,

Par M. Alain DUFAUT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jean-Marie Bockel, Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Christian Demuynck, Denis Detcheverry, Mme Muguette Dini, MM. Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, MM. François Fillon, Bernard Fournier, Hubert Haenel, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahaddine Ibrahim, Alain Journet, Philippe Labeyrie, Pierre Laffitte, Simon Loueckhote, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Mélot, M. Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, Jacques Siffre, René-Pierre Signé, Robert Tropéano, André Vallet, Jean-François Voguet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3175 , 3337, 3339, 3334, 3340 et T.A. 609

Sénat : 417 (2003-2004) , 15 et 35 (2006-2007)

Actionnariat.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Dans son avis motivé du 13 décembre 2005, la Commission européenne a invité la France à modifier sa législation interdisant aux sociétés anonymes de faire appel public à l'épargne, celle-ci lui apparaissant incompatible avec le droit communautaire, notamment avec la liberté de circulation des capitaux.

La Commission a proposé de surseoir à la saisine de la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) - saisine dont le principe avait été arrêté le 26 juin 2006-, dans l'attente des travaux législatifs en cours.

L'urgence du sujet a conduit le Gouvernement à proposer au Parlement d'abroger cette interdiction. Tel est l'objet de l'article 44 du projet de loi relatif au développement de la participation et de l'actionnariat salarié, dont votre commission s'est saisie pour avis.

Après les lois votées ces dernières années en vue de faire évoluer le droit français en matière de sport, il s'agit là d'un pas supplémentaire dans l'harmonisation du statut des sociétés sportives françaises avec le modèle européen.

Rappelons que le 15 juillet 2004, notre collègue Michel Mercier avait déposé une proposition de loi allant dans le même sens. Elle se trouverait donc satisfaite par l'adoption de cet article.

Pour votre commission, cette nouvelle liberté dans le choix des modes de financement donnée aux dirigeants doit constituer une chance de développement pour les clubs français. L'évolution du sport professionnel qu'elle induit suscite néanmoins des interrogations qui conduisent votre commission à formuler quelques recommandations.

I. LA NÉCESSITÉ DE FAIRE ÉVOLUER LE DROIT EN VIGUEUR

A. LE DROIT EN VIGUEUR : L'INTERDICTION DE L'APPEL PUBLIC À L'ÉPARGNE

1. Les différents statuts juridiques des clubs sportifs français

Le code du sport oblige les clubs sportifs français à créer une société commerciale pour gérer leurs activités professionnelles, dès lors que leurs recettes ou leur masse salariale dépassent un seuil fixé en Conseil d'Etat. Par conséquent, la plupart des clubs professionnels relevant des grandes disciplines sont désormais constitués en sociétés commerciales, liées par convention à une association dite « support », destinée à gérer notamment le secteur amateur.

Le code précise que ces sociétés sportives peuvent prendre trois formes juridiques :

- l'entreprise unipersonnelle sportive à responsabilité limitée ;

- la société anonyme à objet sportif (SAOS). Celle-ci est régie par le code de commerce, sous réserve de dispositions dérogatoires prévues par la loi (interdiction de distribuer des dividendes et de rémunérer les dirigeants). L'association support doit détenir au minimum un tiers du capital social, ce qui constitue une limite à leur financement (en cas d'augmentation de capital notamment). Malgré ses rigidités, ce régime a séduit un certain nombre de clubs dans les grandes disciplines : football (7 clubs de Ligue 2), basket-ball (6 clubs), rugby (11 clubs) ;

- la société anonyme sportive professionnelle (SASP). Créée par la loi du 28 décembre 1999, la SASP est la forme juridique la plus proche du droit commun des sociétés commerciales. Elle présente, en effet, certaines caractéristiques qui la distinguent des autres statuts : elle peut, notamment, distribuer des dividendes et rémunérer ses dirigeants. L'accès au capital des SASP est libre (l'association support n'est pas tenue de détenir un capital minimum), ce qui la rend attractive pour les investisseurs intéressés par des disciplines comme le football (24 clubs en Ligue 1 et Ligue 2) et le rugby (14 clubs), mais qui ne souhaitent pas devoir composer avec une association détentrice d'une minorité de blocage (cas de la SAOS). De fait, la plupart des grands clubs professionnels ont opté pour ce statut, notamment dans le secteur du football.

Il convient d'ajouter l'existence d'un certain nombre de sociétés anonymes d'économie mixte locales sportives (SAEMLS) - en particulier dans le secteur du basket-ball - créées avant la loi de 1999 précitée, qui a rendu impossible le recours à ce statut pour l'avenir.

2. Le principe d'interdiction de l'appel public à l'épargne

En application de l'article L. 122-8 du code du sport, les sociétés anonymes sportives (c'est-à-dire les SAOS et les SASP) ne peuvent pas faire appel publiquement à l'épargne. Ce principe, posé par la loi du 16 juillet 1984, a été confirmé par la loi du 28 décembre 1999.

Il faut souligner que cette interdiction n'empêche pas les sociétés concernées - privées pour l'essentiel - d'explorer d'autres voies pour faire face à leurs besoins en capital. Outre la diversification de leurs actifs, corporels et incorporels, les clubs peuvent procéder à l'introduction en Bourse d'une holding regroupant uniquement les activités non sportives du club (exploitation des marques, magasins du club, exploitation et gestion du stade...) ou d'une holding du club sportif professionnel dans la mesure où elle serait suffisamment diversifiée et ne reposerait pas majoritairement sur l'activité sportive, afin de réduire la volatilité du cours de Bourse. Dans ce dernier cas, l'Autorité des marchés financiers (AMF) serait en tout état de cause amenée à se prononcer, au cas par cas, sur les conditions d'une éventuelle autorisation de cotation en Bourse. Rappelons que, voilà quelques années, la holding de l'Olympique lyonnais a été considérée comme ne remplissant pas ces conditions.

En outre, l'article 4 de la loi n° 2004-1366 du 15 décembre 2004 portant diverses dispositions au sport professionnel facilite l'entrée de nouveaux investisseurs au sein des sociétés sportives en levant la prohibition absolue de la multipropriété.

Par ailleurs, les sociétés sportives peuvent recourir à des placements privés de leurs valeurs mobilières auprès d'investisseurs privés qualifiés ou d'un cercle restreint d'investisseurs, l'article L. 441-2 du code monétaire et financier précisant que ceci ne constitue pas un appel public à l'épargne.

Enfin, il faut rappeler que les clubs peuvent être la propriété de sociétés elles-mêmes cotées (tel est, par exemple, le cas des Girondins de Bordeaux avec M6).

Certaines sociétés sportives souhaitent néanmoins pouvoir faire appel public à l'épargne et la Ligue française de football soutient leur voeu, ainsi que son président, M. Frédéric Thiriez, l'a confirmé à votre commission. En outre, le respect du droit communautaire conduit notre pays à faire évoluer sa législation en la matière.

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