B. LES INTERROGATIONS PORTANT SUR LA CONDUITE, LE SUIVI ET L'ÉVALUATION DE L'ACTION DE L'ÉTAT OUTRE-MER

Les développements consacrés au ministère de l'outre-mer par le Rapport public 2005 de la Cour des comptes portent un jugement sévère sur la coordination de l'action de l'Etat outre-mer et sur l'absence d'évaluation de cette action, jugement largement corroboré par les rapports des missions d'audit de modernisation qui ont été menées cette année et par l'avis du Conseil économique et social sur l'évaluation de la loi de programme pour l'outre-mer (LOPOM).

Votre rapporteur pour avis espère obtenir des précisions sur les mesures envisagées pour remédier aux insuffisances constatées, afin de satisfaire aux objectifs de la LOLF et de garantir que soient atteints les résultats en termes de croissance économique et de création d'emplois attendus de l'application de la loi de programme de 2003. Il regrette par ailleurs que la mise en oeuvre de la LOLF ne se soit pas traduite -bien au contraire- par une amélioration de l'information du Parlement.

1. Le constat dressé par la Cour des comptes

La Cour des comptes relève que « jusqu'à présent le ministère de l'outre-mer n'a pas exercé la plénitude de la mission dont il est investi, faute, semble-t-il, d'une réelle volonté politique de le doter des moyens appropriés et d'avoir fait le choix entre une logique de mission et une logique de gestion ». Elle dresse, en trois points, un constat sans appel :

- la mission de coordination du ministère est mal assurée, notamment parce que la plupart des grands ministères disposent, pour leurs interventions hors de la métropole, de structures ou d'opérateurs dotés de crédits propres ;

- l'administration centrale du ministère n'est pas en mesure d'exercer ses missions en raison tant de son « incapacité à maîtriser la fonction juridique », rendue particulièrement importante par la réforme constitutionnelle de 2003, que de l'insuffisance de ses moyens administratifs et humains ;

- cette situation rend « difficile, sinon impossible, d'évaluer les politiques engagées » : la Cour des comptes souligne notamment la nécessité d'une « réflexion approfondie sur les lacunes de la fonction d'information », à défaut de laquelle l'application de la LOLF risque d'être « inopérante », la Cour estimant, ce qui est grave, que le ministère de l'outre-mer n'est pas en mesure de renseigner les indicateurs de performance.

Dans le même sens, le Conseil économique et social juge nécessaire la mise en place de mécanismes d'évaluation de l'application de la loi de 2003, et d'abord d'un appareil statistique plus homogène et adapté aux besoins de cette évaluation. Quant aux missions d'audit de modernisation, elles ont relevé l'insuffisance de pilotage des actions de l'État, la mission chargée de l'évaluation du dispositif d'exonération de charges sociales soulignant en particulier les insuffisances de l'appareil statistique, qui ne tient pas compte des spécificités de la réglementation, le caractère lacunaire des informations relatives aux emplois et « l'inexistence » de la politique de contrôle.

2. Les mesures annoncées par le ministère de l'outre-mer

a) Le projet de réorganisation du ministère

En réponse à une question de votre rapporteur pour avis, le ministère de l'outre-mer a indiqué qu'il étudiait actuellement un projet de réorganisation de son administration centrale, les textes correspondants devant être publiés avant la fin de cette année.

Ce projet porte sur la création d'un secrétariat général qui aura autorité sur les deux directions du ministère, la direction des affaires politiques, administratives et financières (DAPAF) et la direction des affaires économiques, sociales et culturelles (DAESC). Sont en outre prévues la création d'un service juridique et, au sein de la DAPAF, celle d'une sous-direction de l'évaluation, de la synthèse, de la prospective et du contrôle de gestion.

Il est précisé que cette réforme sera effectuée sans création d'emplois. Elle se traduit dans le projet de budget pour 2007 par une prévision de dépense de 200.000 € couvrant les requalifications d'emplois correspondant à la création d'un poste de secrétaire général, d'un poste de chef de service et d'un poste de sous-directeur.

b) L'audit de modernisation sur le pilotage de la dépense de l'État outre-mer

En se référant au rapport public annuel de la Cour des comptes, le ministère de l'économie et des finances a lancé au mois d'octobre 2006 un audit de modernisation sur le pilotage de la dépense de l'État outre-mer.

Relevant l'absence d'un outil de suivi des dépenses de l'État outre-mer adapté au nouveau cadre de la LOLF, il assigne comme objectif à cet audit la mise en place d'un outil spécifique de suivi et de pilotage de l'action de l'État outre-mer, « sous l'angle financier comme sous l'angle de la performance ».

Il est précisé que les travaux de la mission d'audit devront chercher à s'inscrire dans la perspective du projet CHORUS, dont on rappellera que le démarrage est attendu en 2009.

c) La nécessité de veiller aussi à l'information du Parlement

Votre rapporteur pour avis demandera au gouvernement de lui apporter des précisions sur la réorganisation envisagée des services du ministère de l'outre-mer et sur les mesures qui pourront être prises, avant même la mise en oeuvre de CHORUS, pour améliorer le suivi et l'évaluation des actions menées outre-mer.

Mais il souligne que l'application de la LOLF doit aussi permettre d'améliorer l'information et les moyens de contrôle du Parlement. A cet égard, il est regrettable que la loi de finances rectificative pour 2005 ait supprimé, à l'initiative de l'Assemblée nationale, les deux annexes « jaunes » consacrées aux départements et régions et aux collectivités d'outre-mer.

Prévus par la loi de finances pour 1969, ces documents, dont le contenu avait été considérablement enrichi en application de dispositions introduites dans la loi de finances pour 2004 à l'initiative de la commission des Finances du Sénat, comportaient des informations détaillées et extrêmement pertinentes sur l'action des différents ministères et sur l'application des législations spécifiques à l'outre-mer.

Le « document de politique transversale » qui est censé les remplacer a un contenu informatif nettement moins riche, et ne porte au surplus que sur une fraction des missions et programmes concourant à l'action de l'Etat outre-mer.

Votre commission vous proposera donc un amendement tendant à intégrer dans le nouveau document de politique transversale les informations qui figuraient dans les « jaunes » concernant l'outre-mer.

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