B. L'ÉVALUATION DES PRODUITS PHYTOPHARMACEUTIQUES, MATIÈRES FERTILISANTES ET SUPPORTS DE CULTURE

L'article 70 de la LOA a complété le dispositif national de sécurité sanitaire des aliments en transférant du ministère chargé de l'agriculture à l'AFSSA l'évaluation du risque lié aux produits phytopharmaceutiques ( i.e. pesticides), matières fertilisantes et supports de culture (tous produits qualifiés d'intrants agricoles), ainsi qu'en codifiant dans la partie législative du code rural un certain nombre de dispositions relatives aux produits phytosanitaires figurant actuellement dans sa partie règlementaire, afin de les sécuriser juridiquement .

1. Le droit antérieur à la LOA et le contenu de la réforme

Jusqu'à l'an dernier, le système français d'homologation des intrants avait pour caractéristique que le ministère de l'agriculture et de la pêche était tout à la fois chargé d'évaluer les produits (19 ( * )) et de leur délivrer l'autorisation de mise sur le marché (AMM). Cette double compétence n'était pas sans soulever de sérieuses interrogations au regard du principe de séparation de l'évaluation et de la gestion du risque , recommandé par les principales organisations internationales compétentes en matière de sécurité alimentaire (20 ( * )). Du reste, l'exposé des motifs du projet de loi d'orientation agricole soulignait « la difficulté croissante pour le ministère chargé de l'agriculture d'exercer ses prérogatives en intégrant l'approche nécessaire bénéfice/risque dans le domaine des intrants sans s'exposer à une suspicion de privilégier les intérêts socioéconomiques au détriment de la santé publique » .

C'est donc pour lever toute ambiguïté quant au rôle des pouvoirs publics et conférer une réelle légitimité au dispositif national d'homologation des intrants que l'article 70 de la LOA a complété l'article L. 1323-1 du code de la santé publique afin d' attribuer la mission d'évaluer les produits phytopharmaceutiques, les adjuvants, les matières fertilisantes et les supports de culture à l'AFSSA , établissement public de l'Etat à caractère administratif placé sous la triple tutelle des ministères de la santé, de l'agriculture et de la consommation, dont les qualités d'expertise sont unanimement reconnues, notamment dans le domaine des produits phytosanitaires (21 ( * )), le ministère chargé de l'agriculture conservant quant à lui la responsabilité d'accorder l'AMM pour chacun des produits évalués.

A cet égard, relevant que les délais d'examen des dossiers d'AMM sont particulièrement longs en France , puisqu'ils s'y élèvent à trois ans en moyenne contre deux dans la plupart des autres Etats membres de l'Union , et même 32 semaines seulement au Royaume-Uni , le Parlement a prévu qu'un décret en Conseil d'Etat fixerait la durée des différentes phases d'instruction des dossiers et les délais maximums pour chacune de ces phases. En effet, la durée excessive d'instruction pénalise les agriculteurs, puisqu'ils doivent attendre plus longtemps que leurs concurrents étrangers la mise sur le marché des nouveaux produits phytopharmaceutiques, et n'incite pas au développement de la recherche et de l'innovation agronomiques. En outre, à l'initiative du Sénat et toujours dans l'optique de favoriser la souplesse du dispositif, il a rendu possible l'absence de nouvelle AMM lorsque la composition physique, chimique ou biologique d'une produit bénéficiant d'une AMM est modifiée de manière mineure.

Le décret n° 2006-1177 du 22 septembre 2006 relatif à l'évaluation par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments des produits phytopharmaceutiques, matières fertilisantes et supports de culture est venu apporter les précisions nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme en matière de procédure d'instruction de l'AMM, de durée de celle-ci, de modalité de publicité des AMM et de dispositions propres aux adjuvants. En outre, son article 12 prévoit la dévolution à l'AFSSA des biens meubles affectés, au 23 septembre 2006, à l'évaluation des produits phytopharmaceutiques, de leurs adjuvants, des matières fertilisantes et des supports de culture, c'est-à-dire les moyens matériels dont disposait jusqu'à présent la Commission d'étude de la toxicité des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés .

* (19) Travaux assurés par les experts de la Commission d'étude de la toxicité des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés .

* (20) Principe rappelé par notre collègue Claude Saunier dans son rapport n° 185 (2004-2005) fait, au nom de l' Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques , sur l'application de la loi n° 98-535 du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme.

* (21) L'article L. 1323-1 du code de la santé publique confère déjà à l'agence le soin d'évaluer « les risques sanitaires et nutritionnels que peuvent présenter les aliments destinés à l'alimentation ou aux animaux, y compris ceux pouvant provenir (...) de l'utilisation (...) de produits phytosanitaires » .

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