2. Accroître le pouvoir fiscal des collectivités territoriales

Les réformes des impôts locaux opérées sous la présente législature auront eu des effets contrastés sur le pouvoir fiscal des collectivités territoriales.

Plusieurs assouplissements des règles de lien entre les taux de la taxe professionnelle et des impôts locaux pesant sur les ménages ont donné des marges de manoeuvre supplémentaires aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale.

A compter de 2007, les régions auront la possibilité de moduler les tarifs de la fraction de taxe intérieure sur les produits pétroliers qui leur a été transférée. La Haute-Normandie et l'Ile-de-France ont déjà décidé de majorer leurs tarifs. Si l'ensemble des régions utilisaient leurs capacités maximales de modulation à la hausse, elles pourraient espérer, pour l'année 2007, un gain global de l'ordre de 500 millions d'euros.

La modulation régionale de la taxe intérieure sur les produits pétroliers

Le 25 octobre 2005, le Conseil des ministres de l'Union européenne a autorisé la France à appliquer, à compter de 2007, pour une durée de trois ans, des tarifs différenciés au niveau régional pour la TIPP. Dans la mesure où la décision communautaire ne permet qu'une baisse des tarifs, l'octroi du pouvoir de modulation des taux de TIPP par les régions a été rendu effectif selon le mécanisme suivant :

- les tarifs de TIPP ont été majorés à compter du 1 er janvier 2006 ;

- cette majoration a été neutralisée pour le consommateur en 2006, l'Etat ayant réduit les tarifs à hauteur de 1,77 euro par hectolitre pour l'essence sans plomb et de 1,15 euro par hectolitre pour le gazole ;

- à compter de 2007, les régions sont autorisées à renoncer en tout ou partie à cette réduction, pour l'un ou l'autre ou les deux types de carburant.

La délibération du conseil régional fixant le niveau de la TIPP doit être prise avant le 30 novembre de l'année qui précède et doit être notifiée à la Douane, qui procédera à la publication des tarifs de TIPP ainsi modifiés au plus tard à la fin de la première quinzaine du mois de décembre.

En revanche, diverses mesures ont été adoptées dans la loi de finances initiale pour 2006, qui restreignent l'autonomie fiscale des collectivités territoriales.

La taxe professionnelle a ainsi été plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée des entreprises à compter de 2007. Le coût de ce dégrèvement sera réparti entre l'Etat et les collectivités territoriales.

La compensation assurée par l'Etat est plafonnée au taux de taxe professionnelle de l'année 2005, dans la limite du taux de l'année 2004 majoré de 5,5 % pour les communes et EPCI, de 7,3 % pour les départements et de 5,1 % pour les régions, et les hausses de taux intervenues en 2006 ou supérieures à ces limites par catégories de collectivités ne sont pas prises en compte.

D'après les simulations qui ont pu être effectuées par Dexia Crédit Local, le plafonnement aurait pour conséquence une baisse des recettes de taxe professionnelle de l'ordre de :

- 290 millions d'euros pour les régions ;

- 250 millions d'euros pour les départements ;

- 70 millions d'euros pour le secteur communal.

Une étude plus précise commandée par l'Association des maires des grandes villes de France, portant sur les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre membres de l'association 14 ( * ) , met en exergue l'importance des tickets modérateurs subis par certains de ces établissements. Aussi, l'un des effets induits du plafonnement de la taxe professionnelle pourrait être le recours accru à la fiscalité mixte de la part des EPCI à fiscalité propre, afin de disposer de recettes fiscales non plafonnées.

En outre, l'article 74 de la loi de finances pour 2006 a instauré un dispositif dénommé « bouclier fiscal », permettant le plafonnement à 60 % du revenu des impositions suivantes acquittées par le contribuable à compter de l'année 2006 : impôt sur le revenu, impôt de solidarité sur la fortune, taxes foncières et taxe d'habitation afférentes à l'habitation principale. 93.371 redevables, dont 77.077 non assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune, seraient concernés.

Le coût de ce dispositif, qui comprend à la fois des impôts d'État et des impôts locaux, sera pris en charge par les collectivités territoriales à concurrence de la part des impôts locaux dans le montant total des impositions concernées par le plafonnement, pour un montant estimé à 20 millions d'euros. Il sera imputé, chaque année, globalement, sur le montant global de la dotation globale de fonctionnement.

Le pouvoir fiscal des collectivités territoriales s'en trouve amputé. Or l'autonomie fiscale constitue non seulement un facteur d'efficacité de la gestion des collectivités territoriales mais surtout un fondement de la démocratie locale. La réforme de la fiscalité locale constitue donc plus que jamais une nécessité.

Comme l'a souligné la mission d'information du Sénat sur la décentralisation, elle suppose, tout d'abord, de réviser les bases des impôts . L'assiette de l'impôt local a vieilli ; elle est à l'origine de nombreuses inégalités, entre les citoyens comme entre les collectivités, et fausse les mécanismes de la péréquation dont elle détermine largement les critères. L'existence de bases d'imposition justes et régulièrement actualisées permettrait, au contraire, de maintenir durablement une fiscalité locale vivante et de réduire les charges incompressibles pesant sur le budget de l'Etat. En la matière, si l'hypothèse du transfert aux communes de la possibilité de réviser les bases locatives paraît séduisante, il convient d'en mesurer toute la complexité, dès lors que les impôts locaux sont partagés entre plusieurs niveaux de collectivités locales.

La simplification des impôts semble également une nécessité . La fiscalité locale est caractérisée par une grande complexité, en raison notamment du partage du produit des impositions entre plusieurs niveaux de collectivités.

L'idée d'une spécialisation des impôts locaux, reprise à son compte par la Commission pour l'avenir de la décentralisation, doit être examinée avec prudence. Appliquée de manière stricte, elle ferait dépendre les ressources d'un niveau de collectivité d'une seule base fiscale, ce qui pourrait compromettre leur stabilité. Par ailleurs, les propositions généralement avancées de répartition des impôts existants entre niveaux de collectivités ne semblent pas compatibles avec le maintien de leurs ressources actuelles.

La spécialisation « de fait », par le biais de mécanismes tels que la taxe professionnelle unique, sur la base de l'adhésion libre des communes, semble à la fois plus souple et plus opérationnelle. De même, l'affectation au profit de certaines collectivités d'impôts spécifiques pourrait les conduire à ne plus souhaiter percevoir l'un des impôts existants.

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Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « avances aux collectivités territoriales » figurant dans le projet de loi de finances pour 2007.

* 14 Premières simulations de l'impact de la réforme de la taxe professionnelle sur les groupements membres de l'Association des Maires des Grandes Villes de France, avril 2006.

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