C. QUELLES PERSPECTIVES ? LES APPORTS DU « GRENELLE DE L'ENVIRONNEMENT »

1. L'idée d'une « trame verte » : renforcer la cohérence des actions en faveur de la protection de la biodiversité

A l'occasion de la préparation du présent avis, votre rapporteur a entendu le président et les rapporteurs 14 ( * ) du groupe n° 2 du « Grenelle de l'environnement » , qui a présenté, le 27 septembre dernier, des propositions en vue de « préserver la biodiversité et les ressources naturelles » .

Comme l'a souligné notre collègue Jean-François Legrand, sénateur de la Manche, qui a assuré, aux côtés de Mme Marie-Christine Blandin, sénatrice du Nord, la présidence de ce groupe : si l'érosion de la biodiversité a des conséquences aussi graves pour la planète que celles liées aux changements climatiques, celles-ci restent toutefois moins connues .

La prise de conscience de l'urgence d'agir n'est pas encore si largement partagée dans l'opinion publique. Néanmoins, la France s'est dotée en 2005 d'une stratégie nationale pour la biodiversité, afin de répondre à l'engagement des pays de l'Union européenne de stopper la perte de biodiversité d'ici 2010.

En effet, la perte de biodiversité est irréversible et irrémédiable : nombre des espèces répertoriées par Buffon au 18è siècle dans les volumes de son Histoire naturelle ont déjà disparu.

La convention de Rio a identifié cinq facteurs à ce phénomène : la fragmentation des espaces, sur laquelle reviendra votre rapporteur dans la partie suivante ; la surexploitation des espèces ; les pollutions ; les espèces invasives ; le changement climatique.

Les réflexions conduites sur la biodiversité lors du « Grenelle » ont abouti à mettre en avant les principales mesures suivantes :


Mieux connaître et faire connaître la biodiversité .

Il s'agit de consolider, de l'école primaire à l'enseignement supérieur, un volet formation actuellement déficitaire, afin d'améliorer, d'une part, la connaissance scientifique et l'expertise publique sur la biodiversité, et, d'autre part, d'en assurer la diffusion et la vulgarisation.


Compléter les dispositifs existants en matière de protection de la nature et des espèces menacées, par la mise en oeuvre d'une « trame verte nationale » .

Cette idée reprend le principe d'une mise en réseau des espaces naturels, inscrit notamment dans le « Pacte écologique » de Nicolas Hulot.

L'objectif est de protéger la biodiversité dite « ordinaire », en assurant, par des « corridors écologiques », les continuités et proximités entre milieux naturels permettant aux espèces de circuler et aux écosystèmes de fonctionner.

L'organisation type d'un réseau écologique

L'ambition est de construire une vision cohérente de l'espace en intégrant la prise en compte de la sauvegarde de la biodiversité dans les politiques publiques et les documents de planification . Les membres du groupe 2 du Grenelle ont précisé que les grandes lignes de cette trame verte seraient définies au niveau national puis affinées au niveau local. Celle-ci pourrait être rendue opposable, dans le cadre d'une contractualisation portée par les collectivités territoriales, plutôt que par la contrainte.

Le coût de mise en oeuvre est évalué entre 0,5 et quelques millions d'euros par région. Si le travail ne part pas de rien, puisque cette approche fait d'ores et déjà l'objet de plusieurs réflexions et expériences (notamment de la part des parcs naturels régionaux ou de certaines régions, comme le Nord-Pas-de-Calais, l'Alsace, ou Rhône-Alpes, qui travaillent à l'identification de trames « vertes » et « bleues »), un nouveau mode de financement serait à construire, en vue d'affiner la définition de cette trame : votre rapporteur suggère, à cet égard, de réfléchir à un élargissement du champ d'utilisation de la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS) ; environ 80 départements l'ont adoptée ; les recettes générées sont évaluées à 160 millions d'euros en 2006.


Assurer, enfin, la cohérence des actions menées en faveur de la biodiversité par la création d'une « Agence nationale de la nature » .

Le groupe du travail du « Grenelle » propose que l'opportunité de mettre en place une telle agence, de même que, le cas échéant, la définition de ses missions, de son périmètre, de la méthode, etc., soient précisées dans le cadre d'une mission parlementaire.

Cette agence servirait notamment de « tête de réseau » pour la trentaine d'opérateurs intervenant en matière de protection de la nature. Elle serait ainsi le support de la mise en oeuvre d'une gestion intégrée de l'espace. Enfin, elle serait chargée d' organiser une expertise et d'en assurer la diffusion, notamment en la mettant à disposition des décideurs.

Votre rapporteur considère que ces missions pourraient revenir au ministère en charge de l'écologie, afin de consolider, ainsi, son rôle régalien en matière de protection de l'environnement.

Il souligne, en outre, que les sénateurs Pierre Laffitte et Claude Saunier ont réalisé, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, un important travail sur la biodiversité. Leurs propositions, qui devraient être rendues publiques prochainement, apporteront une contribution également essentielle afin de nourrir cette réflexion.

* 14 MM. Vincent Graffin, conseiller « développement durable et expertise », direction générale du Museum national d'histoire naturelle, et Gilles Kleitz, chargé de mission « biodiversité » auprès du directeur de la nature et des paysages du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

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