Avis n° 95 (2007-2008) de M. Paul BLANC , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 22 novembre 2007

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N° 95

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2007

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2008 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VI

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

Par M. Paul BLANC,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mme Claire-Lise Campion, MM. Bernard Seillier, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Annie David, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Pierre Bernard-Reymond, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, Muguette Dini, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Alain Vasselle, François Vendasi.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 189 , 276 à 281 et T.A. 49

Sénat : 90 et 91 (annexe n° 31 ) (2007-2008)

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2008

Programmes

Crédits de paiement (en euros)

Variation 2008/2007 (en %)

Prévention de l'exclusion et insertion
des personnes vulnérables

992 987 942

- 5,0

Prévention de l'exclusion

57 998 274

- 3,7

Actions en faveur des plus vulnérables

855 789 240

+ 8,5

Conduite et animation de la politique de lutte contre l'exclusion

28 200 428

- 0,7

Rapatriés

51 000 000

- 69,6

Lutte contre la pauvreté : expérimentations

40 000 000

+ 231,9

Expérimentation du revenu de solidarité active

25 000 000

Autres expériences en matière sociale et d'économie sociale

15 000 000

+ 35,7

Actions en faveur des familles vulnérables

1 293 730 000

+ 12,9

Accompagnement des familles dans leur rôle de parents

23 000 000

- 11,1

Soutien en faveur des familles monoparentales

1 020 000 000

+ 12,2

Protection des enfants et des familles

250 730 000

+ 19,3

Handicap et dépendance

8 105 007 175

+ 1,5

Evaluation et orientation personnalisée des personnes handicapées

14 096 351

- 3,9

Incitation à l'activité professionnelle

2 343 159 164

+ 3,2

Ressources d'existence

5 718 000 000

+ 2,0

Compensation des conséquences du handicap

15 751 660

- 81,6

Personnes âgées

8 000 000

+ 76,0

Pilotage du programme

6 000 000

+ 6,7

Protection maladie

513 000 000

- 34,4

Accès à la protection maladie complémentaire

50 000 000

- 56,4

Aide médicale de l'Etat

413 000 000

+ 76,9

Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante

50 000 000

0

Egalité entre les hommes et les femmes

28 502 939

+ 0,8

Accès des femmes aux responsabilités et à la prise de décision

725 000

- 17,7

Egalité professionnelle

5 791 018

+ 3,3

Egalité en droit et en dignité

11 095 140

- 0,5

Articulation des temps de vie

230 000

+ 11,7

Soutien du programme égalité entre les hommes et les femmes

10 661 781

+ 2,1

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

1 071 536 040

+ 1,1

Etat-major de l'administration sanitaire et sociale

56 243 041

- 7,3

Statistiques, études et recherche

34 304 963

+ 4,1

Gestion des politiques sociales

235 065 231

- 4,2

Gestion des politiques sanitaires

322 526 045

+ 6,7

Pilotage de la sécurité sociale

39 276 277

- 4,5

Soutien de l'administration sanitaire et sociale

384 120 483

+ 1,7

Total mission « Solidarité et intégration »

12 044 764 096

+ 3,2

AVANT PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sera dotée en 2008 d'un budget de 12,04 milliards d'euros, consacré, pour l'essentiel, au financement des dépenses relatives à l'allocation aux adultes handicapés (AAH), à l'allocation de parent isolé (API) et à l'aide médicale d'Etat (AME), qui représentent près de 60 % des crédits.

Les prévisions pour 2008 sont marquées par la revalorisation significative des dotations allouées à ces trois prestations, attestant de la volonté réelle de prendre en compte les tendances de fond observées ces dernières années.

Cet effort de sincérité budgétaire s'inscrit également dans la logique d'assainissement des comptes publics, qui a conduit l'Etat à verser à la sécurité sociale plus d'1,5 milliard d'euros au début du mois d'octobre 2007, en remboursement de la dette accumulée jusqu'au 31 décembre 2006, au titre de l'AAH, de l'API, du minimum invalidité et de l'AME.

Malgré la progression soutenue de ces dépenses, les crédits de la mission sont en légère baisse par rapport à 2007. Cela s'explique en premier lieu par la disparition du programme « accueil des étrangers et intégration », transféré vers la mission « Immigration, asile et intégration » et remplacé par un nouveau programme majoritairement consacré à l'expérimentation du revenu de solidarité active (RSA), créé par la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. Cela provient également de l'extinction progressive des crédits accordés aux rapatriés en application de la loi du 23 février 2005 et de la moindre participation de l'Etat au financement de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c).

Ainsi, à périmètre constant, les crédits de la mission ont en réalité augmenté de 3,2 %. Il sera donc possible de financer par redéploiement les deux priorités de la mission pour 2008 : la mise en oeuvre des politiques de solidarité en faveur des personnes les plus démunies et l'application de la loi handicap du 11 février 2005 1 ( * ) .

Les actions déployées en faveur des publics défavorisés s'exercent principalement dans trois domaines : l'accueil des personnes dépourvues de logement, l'amélioration des conditions d'accès aux soins pour les plus démunis et l'incitation au retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux.

La politique menée en faveur de l'hébergement sera marquée, en 2008, par l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 instituant un droit au logement opposable. Pour en permettre l'application effective, la mise en oeuvre du plan d'action renforcé pour les sans abri (Parsa) sera poursuivie : il prévoit le développement de l'offre d'hébergement dans les structures d'urgence et de réinsertion sociale et l'humanisation des conditions d'accueil.

Il convient également de saluer les premiers résultats encourageants des politiques menées en faveur du retour à l'emploi des bénéficiaires du RMI et de l'API. On observe en effet pour la première fois une diminution du nombre des bénéficiaires de ces deux minima sociaux. Cette dynamique devrait se poursuivre en 2008 avec l'expérimentation du nouveau revenu de solidarité active dans près de quarante départements volontaires.

Par ailleurs, les crédits ouverts en 2008 devront permettre d'achever la mise en place de la nouvelle architecture institutionnelle dessinée par la loi du 11 février 2005. Les moyens qui sont alloués aux maisons départementales des personnes handicapées doivent en effet être confortés, notamment pour les personnels qui participent à l'accueil et au traitement des demandes.

Ce n'est qu'à cette condition que le nouveau système de compensation pourra pleinement être mis en oeuvre. Dans ce domaine, l'année 2008 constitue une année de transition : la création envisagée d'une prestation de compensation personnalisée, intégrant la perte d'autonomie liée à la vieillesse et au handicap explique certainement un certain statu quo concernant la mise en place des fonds départementaux de compensation et l'amélioration des ressources d'existence des personnes handicapées.

En revanche, il n'est plus possible de différer le développement des actions en faveur de l'emploi des personnes handicapées. L'Agefiph et le nouveau fonds « fonction publique », désormais en ordre de marche, doivent conjuguer leurs efforts pour améliorer l'employabilité des travailleurs handicapés et favoriser leur insertion dans les entreprises et dans la fonction publique.

Enfin, l'Etat doit se montrer exemplaire dans le domaine de l'accessibilité. L'ampleur des investissements à réaliser nécessite d'anticiper les échéances. C'est pourquoi, les communes assujetties doivent, dès maintenant, mettre en place la commission chargée d'établir, avant la fin de l'année 2008, le diagnostic d'accessibilité des constructions, voiries et moyens de transport.

I. FACILITER L'INSERTION DURABLE DES PERSONNES DÉFAVORISÉES

La mission « Solidarité, insertion, égalité des chances » vise à mettre en oeuvre des politiques en faveur de l'accueil et de l'insertion durable des publics en difficulté. Quatre programmes, d'importance inégale, y contribuent :

Programmes

Crédits de paiements
(en millions d'euros)

Politiques en faveur de l'inclusion sociale

992

Lutte contre la pauvreté : expérimentations

40

Actions en faveur des familles vulnérables

1 293,7

Protection maladie

513

Pour 2008, trois axes sont privilégiés : renforcer les capacités d'hébergement des personnes en grande difficulté, faciliter l'accès aux soins des personnes les plus démunies et favoriser le retour durable à l'activité des allocataires de minima sociaux.

A. L'ACCUEIL DES PUBLICS EN DIFFICULTÉ : DES MOYENS RENFORCÉS

L'application de la loi du 5 mars 2007 instituant un droit au logement opposable, à compter du 1 er janvier 2008, a justifié, dès 2007, la mise en oeuvre rapide de moyens importants pour offrir aux personnes dépourvues de logement des solutions adaptées d'hébergement ou de logement. Les crédits alloués aux « actions en faveur des plus vulnérables », dans le cadre du programme 177 dédié aux politiques en faveur de l'inclusion sociale, visent, en 2008, à renforcer encore les capacités d'accueil des structures d'hébergement d'urgence, temporaire ou durable, en améliorant parallèlement la qualité du suivi et de l'accompagnement social.

1. La mobilisation nécessaire en faveur de l'hébergement d'urgence

Le dispositif d'urgence sociale repose sur deux types de structures : les plates-formes de veille sociale et le dispositif d'hébergement d'urgence. Pour permettre la mise en oeuvre effective du droit au logement opposable , le Gouvernement poursuit les efforts engagés en 2007 : en 2008, les crédits de paiement consacrés au financement de ce dispositif s'élèveront à 190 millions d'euros, soit une hausse de 7 % qui provient des efforts financiers consentis en faveur de l'hébergement d'urgence.

a) La reconduction des crédits de la veille sociale

Les plates-formes de veille sociale assurent l'accueil et l'orientation des personnes sans domicile (numéro vert 115, équipes mobiles, Samu social, services d'accueil et d'orientation - SAO), pour qu'elles puissent accéder à un hébergement et à des services de premiers secours.

L'Etat ne contribue que partiellement à leur fonctionnement, la plupart des structures étant cofinancées par les collectivités territoriales. Pour 2008, sa participation s'élève, comme en 2007, à 41 millions d'euros.

Votre commission s'étonne de la reconduction à l'identique des crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2006 et 2007 , alors que le coût de fonctionnement de l'existant, si l'on se fonde sur l'enquête réalisée en 2005 par la direction générale des affaires sociales (DGAS), est d'ores et déjà estimé à 58,6 millions d'euros. D'ailleurs les crédits consommés en 2006 (66 millions d'euros) ont nécessité un abondement complémentaire de 25 millions d'euros. S'il est vrai qu'une partie de ces crédits a été imputée à tort sur cette dotation (12,3 millions d'euros), il n'en reste pas moins que plus de 12 millions d'euros ont manqué en 2006 pour financer les dépenses de veille sociale. Malgré les efforts consentis en faveur de l'hébergement d'urgence et qui pourrait permettre d'alléger la charge de la veille sociale, cette situation a toutes les chances de se reproduire en 2007.

b) Des moyens amplifiés par la mise en oeuvre du plan en faveur des personnes sans abri

Depuis 2006, le dispositif d'hébergement d'urgence bénéficie de moyens renforcés grâce à la mise en oeuvre du plan triennal pour l'hébergement d'urgence et celle du plan d'action renforcé pour les personnes sans abri (Parsa).

Dès l'hiver 2006, le Gouvernement a mobilisé des moyens importants pour financer le plan triennal de renforcement et d'amélioration du dispositif d'accueil et d'hébergement d'urgence. Doté de 50 millions d'euros, ce plan comportait quatre objectifs :

- l'ouverture à l'année de cinq mille places d'hébergement auparavant accessibles durant la seule période hivernale ;

- l'humanisation des conditions d'hébergement, grâce à l'amélioration des modalités d'accueil et l'élargissement des horaires d'ouverture ;

- le développement d'une offre d'hébergements pérennes afin de favoriser l'insertion des personnes accueillies ;

- le renforcement de la veille sociale et des équipes mobiles.

Prévue pour la période 2007-2009, l'application de ce plan a été anticipée pour répondre à la situation d'urgence créée par le grand froid de l'hiver 2006. Il a été conforté, en 2007, par la présentation du plan d'action renforcé pour les sans-abri (Parsa). Sa mise en place s'inscrit dans la logique de création d'un droit au logement opposable, qui suppose la réalisation d'un parcours résidentiel sans rupture, de l'hébergement au logement. Pour cette raison, sont privilégiées une prise en charge plus longue en centres d'hébergement d'urgence (CHU) et une diversification de l'offre d'hébergement, afin de mieux répondre aux besoins spécifiques des publics accueillis : familles, personnes seules, travailleurs pauvres, personnes âgées ou souffrant de troubles psychiques... Les résidences hôtelières à vocation sociale ou les maisons relais en sont un bon exemple.

Soixante-dix millions d'euros ont été dégagés par décret d'avance pour permettre le financement, dès 2007, de 9 000 places en CHU accessibles sans interruption, de l'ouverture à l'année de 2 821 places hivernales et de la création de 5 471 places de stabilisation et 3 952 places de CHRS par transformation de places d'hébergement d'urgence.

Les objectifs du plan triennal et du Parsa en faveur de l'hébergement d'urgence

Plan triennal

2006 (1)

2007

2008

2009

Total

Places d'urgence ouvertes à l'année

500

2 000

2 000

500

5 000

Humanisation des conditions d'accueil

Ouverture des CHU à l'année, 24h/24

Places de stabilisation

300 places d'« accueil durable »

Places de CHRS

Transformation de 3 000 places d'urgence

ALT

3 000 places financées par l'ALT

Montant des crédits

50 millions d'euros

PARSA

2007

Places d'urgence ouvertes à l'année

Au 31 août, 2 821 places pérennisées

Humanisation des conditions d'accueil

Au 31 août, 9 000 places ouvertes 24h/24

Places de stabilisation

Transformation de 6 000 places en CHU

Places de CHRS

Transformation de 4 000 places en CHU

Logements très sociaux

80 000 logements PLAI et PLUS

Montant des crédits (2)

70 millions d'euros

(1) : la mise en oeuvre du plan a été anticipée pour répondre aux demandes dès l'hiver 2006.
(2) : décret d'avance ouvert dès le premier semestre de 2007.

Source : commission des affaires sociales d'après le projet annuel de performances, 2008

Pour 2008, cela se traduit par le financement de :

- 5 600 places de stabilisation, qui correspondent aux 6 000 places d'urgence à transformer en 2007 dans le cadre du Parsa, le solde devant être converti en places de CHRS ;

- 5 500 places d'urgence ouvertes à l'année, qui comprennent 3 000 places finalement non transformées du fait du lancement du Parsa et 2 500 places hivernales pérennisées grâce au plan triennal ;

- 3 000 places d'hôtel ou d'hébergement d'urgence, modulables selon le contexte (grand froid, sorties de squats, résorption de bidonvilles...).

L'effort consenti représente près de 150 millions d'euros, soit une augmentation d'environ 20 % par rapport aux crédits de paiement inscrits en loi de finances initiale pour 2007.

Votre commission se félicite des mesures nouvelles adoptées, ainsi que de la rapidité de leur mise en oeuvre. En effet, l'inflexion des politiques menées en faveur d'un parcours résidentiel continu et d'un hébergement plus stable va dans le sens des préconisations qu'elle a pu faire dans le passé pour favoriser l'insertion durable des personnes en grande difficulté.

Votre commission redoute néanmoins que les crédits alloués pour 2008 au financement de ce dispositif renforcé ne soient insuffisants . Elle se fonde notamment sur l'écart observé en loi de finances rectificative pour 2006 entre les crédits initialement inscrits (109 millions d'euros) et ceux finalement consommés (185 millions d'euros), qui ont nécessité un abondement en cours d'année de plus de 75 millions d'euros.

De plus, les coûts annuels de référence retenus par l'Etat pour évaluer les crédits nécessaires au financement de chaque type d'hébergement n'ont pas été revalorisés par rapport à 2007. En effet, selon les informations recueillies par votre rapporteur auprès de la DGAS, le coût d'une place de stabilisation est estimé à 38 euros par jour, ce qui, dans le cas d'une ouverture quotidienne et à l'année, correspond à un montant annuel de 13 870 euros et non de 11 700 euros ainsi que l'indique le projet annuel de performance.

Enfin, la transformation des places d'urgence en places de stabilisation et l'ouverture des CHU à l'année et 24 heures sur 24 supposent la réalisation d'aménagements des locaux, tels que la création d'une cuisine ou d'une salle commune. Or, les budgets d'investissement correspondants ne sont pas programmés pour 2008.

Afin d'éviter une dérive importante des dépenses d'hébergement d'urgence et de garantir la création effective des places nouvelles prévues par le Parsa, votre commission vous proposera de transférer au profit de cette action une partie des crédits du programme « égalité entre les hommes et les femmes ».

Cet abondement permettra ainsi de créer environ quatre-vingt-cinq places en hébergement d'urgence, réservées aux femmes en situation de précarité ou victimes de violences conjugales.

2. Des capacités d'accueil renforcées en centres d'hébergement et de réinsertion sociale

a) La création de places nouvelles mais faiblement revalorisées

Les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) sont des dispositifs temporaires, dont la mission principale est de permettre aux personnes ou familles de retrouver à terme leur autonomie sociale. La prise en charge est généralement de plus longue durée (six mois en moyenne) que dans les structures d'hébergement d'urgence et suppose un accompagnement personnalisé défini dans le cadre d'un projet d'insertion.

Le plan de cohésion sociale, qui prévoit la création de 1 800 places en trois ans, a permis une augmentation significative et rapide de leur capacité d'accueil. Ainsi, à la fin de 2007, les CHRS devraient être en mesure d'accueillir 35 178 personnes, grâce à la création de plus de 1 850 places depuis 2005, la transformation en 2007 de 3 113 places d'hébergement d'urgence dans le cadre de la mise en oeuvre du Parsa, ainsi que le transfert des structures et services de lutte contre la prostitution correspondant à 128 places d'hébergement et à l'accompagnement social d'environ 200 personnes.

Par ailleurs, outre les créations de places nouvelles, les crédits engagés pour 2007 ont permis : d'une part, d'augmenter de 1,51 % le coût moyen par place (15 227 euros), pour revaloriser les charges et salaires des personnels ; d'autre part, de contribuer, à hauteur de 2 millions d'euros, à l'assainissement de la situation financière des CHRS.

Evolution des crédits d'aide sociale consacrés aux CHRS depuis 2003

(en euros)

Années

Taux d'évolution

LFI

Dont actualisation
mesures salariales

Dont mesures nouvelles

Places nouvelles

2003

2,59 %

428.385 988

4 528 130

6 400 000

500

2004 (1)

2,08 %

437 310 000

8 924 011

-

0

2005

3,15 %

451 070 000

7 460 000

6 300 000

800 (2)

2006

5,03 %

473 769 859

7 289 859 (3)

5 400 000

500

2007

3,95 %

490 500 000

9 136 335 (4)

4 750 000

600 (5)

2008

11 %

544 484 044

8 463 355

-

-

(1) Pour la LFI 2004, le « rebasage » budgétaire a été privilégié par rapport à la création de places nouvelles.

(2) 800 places dont 500 par transformation de places d'hébergement d'urgence .

(3) Dont 6 millions d'euros consacrés au rebasage budgétaire.

(4) Dont 2 millions d'euros consacrés au rebasage budgétaire.

(5) Dont 500 places sur six mois et 100 sur sept mois dans le cadre du plan de rattrapage pour les Dom.

Source : d'après les projets annuels de performances 2008

Pour 2008, cette revalorisation est fixée à 1,58 %. Bien que légèrement supérieur à l'inflation prévisible, il est probable que ce taux ne permettra pas de couvrir les dépenses liées à l'évolution de la masse salariale (évolution des conventions collectives et de la valeur du point, effets du glissement vieillesse technicité (GVT), etc.), estimée à près de 2,2 %. Pour faire bonne mesure, votre commission propose de porter ce taux à 1,8 %, soit une dépense supplémentaire de 780 000 euros.

Elle déplore, en outre, l'absence de crédits supplémentaires destinés à l'assainissement financier des CHRS . En effet, conformément aux préconisations de la mission d'inspection conjointe conduite en 2005 par l'Igas et l'IGF, le Gouvernement s'était engagé à consacrer 12 millions d'euros au rebasage des CHRS. Or, 6 millions d'euros ont été versés en 2006 et seulement 2 millions en 2007. Restent donc à financer 4 millions d'euros.

Aussi, votre commission présentera un amendement pour honorer cet engagement et porter de 1,58 % à 1,8 % le taux de revalorisation du coût moyen des places en CHRS.

b) Le recentrage des CHRS sur leur mission d'accueil et d'insertion

Constatant l'engorgement des CHRS, votre commission s'était inquiétée de la part importante des demandeurs d'asile accueillis en CHRS, qui peut atteindre plus de 20 % dans certains centres. Cette situation résultait notamment de la saturation des centres d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada), qui leur sont habituellement destinés.

Le Gouvernement a été conduit à prendre plusieurs mesures visant à mieux organiser l'accueil des demandeurs d'asile :

- le nombre de places en Cada, grâce à la mise en oeuvre du plan de cohésion sociale, a été augmenté pour atteindre 20 680 places à la fin de 2007, soit 3 000 places de plus en trois ans ;

- la réforme du statut des Cada 2 ( * ) a permis de les recentrer sur leurs missions d'accueil, d'hébergement et d'accompagnement des demandeurs d'asile pendant la durée d'instruction de leur demande ;

- le décret n° 2007-399 du 23 mars 2007 relatif aux Cada définit des conditions d'admission et de maintien plus strictes et confie au préfet le soin d'orienter les demandeurs d'asile prioritairement vers ces centres et d'en faciliter leur sortie ;

- le remplacement de l'allocation d'insertion par l'allocation temporaire d'attente (Ata) 3 ( * ) , qui ne peut pas être accordée aux personnes ayant refusé un hébergement en Cada, constitue une incitation forte à l'orientation des demandeurs d'asile vers les centres qui leur sont dédiés ;

- enfin, la réduction des délais de traitement des dossiers de demandes d'asile contribue à fluidifier le dispositif national d'accueil.

Votre commission se félicite que l'effet positif de ces mesures, conjugué à la forte réduction du nombre de demandeurs d'asile (47  % en 2006), ait ainsi permis de ramener leur part en CHRS à environ 6 %. Ce pourcentage n'est bien sûr qu'une moyenne, de fortes disparités pouvant être observées d'une région à l'autre. Le rôle de gestion et de contrôle des centres dévolu au préfet devrait permettre de recueillir à ce sujet des données plus précises afin de cibler les efforts sur les départements les plus sollicités.

Les CHRS pourront ainsi se recentrer sur leur vocation première de réinsertion, en réservant la priorité de l'accueil aux personnes auxquelles ils étaient originellement destinés.

3. Le succès des maisons relais

Conçues comme de véritables pensions de famille, les maisons relais constituent un logement durable et adapté, destiné à la prise en charge des personnes ou des familles en situation de grande détresse sociale, qui ne peuvent accéder à un logement autonome. La présence quotidienne d'un hôte favorise notamment la réadaptation à la vie sociale des personnes ayant besoin d'un soutien psychologique.

Ces dispositifs ont acquis une véritable reconnaissance, puisque le plan de cohésion sociale leur consacre un chapitre spécifique 4 ( * ) , qui prévoit la création de 6 000 places à la fin de 2007. Ce chiffre a été porté à 12 000 par le Parsa, la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 ayant été modifiée en conséquence par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, pour poursuivre le financement de ce programme jusqu'en 2009.

Pour 2008, le projet de loi de finances prévoit 36,2 millions d'euros pour les maisons relais , qui sont répartis de la façon suivante :

- 13,9 millions d'euros pour financer, au tarif de 12 euros, les 3 168 places existantes au 31 décembre 2006 ;

- respectivement 13,6 millions et 8,6 millions d'euros pour financer, au tarif de 16 euros, les 2 337 places créées en 2007 et, sur six mois, les 3 000 places ouvertes en 2008.

S'y ajoutent deux nouvelles formes de maisons relais, qui ont fait leur apparition en 2007 :

- les maisons relais adaptées aux personnes sans-abri vieillissantes (100 places créées), pour permettre le maintien des résidents dont l'âge ou l'état de santé ne leur permettent plus de vivre de façon autonome ;

- les maisons relais adaptées aux personnes souffrant de handicap psychique ou « résidences accueil » , qui intègrent systématiquement un accompagnement et un suivi sanitaire et social, en partenariat avec les services sociaux, les centres médicopsychologiques, les équipes mobiles de psychiatrie...

Au total, au 31 décembre 2008, les maisons relais devraient être en mesure d'accueillir 8 505 personnes. Elles font actuellement l'objet d'une étude d'évaluation par la DGAS qui devrait en exposer les conclusions avant la fin de l'année. Les maisons relais adaptées, en cours d'expérimentation, seront pour leur part évaluées en 2008 ou 2009.

B. L'ACCÈS AUX SOINS DES PLUS DÉMUNIS : LA NÉCESSAIRE PARTICIPATION DE L'ÉTAT

1. Le désengagement de l'Etat du financement de la couverture maladie universelle complémentaire

Créée par la loi du 27 juillet 1999, la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) est une protection complémentaire publique, complète et gratuite, attribuée sous conditions de résidence et de ressources. Grâce à la couverture intégrale des soins pris en charge et à la dispense d'avance de frais, elle vise à assurer un haut niveau de protection complémentaire aux personnes disposant de faibles revenus.

Afin de limiter les effets de seuil, elle a été complétée depuis par une aide à l'acquisition d'une complémentaire santé 5 ( * ) (ACS), pour les ménages dont les revenus sont inférieurs au plafond ouvrant droit à la CMU-c majoré de 20 %.

a) La forte diminution de la participation de l'Etat

L'action « accès à la protection maladie complémentaire » contribue au financement du fonds CMU via une subvention d'équilibre versée par l'Etat, qui résulte de la différence entre les prévisions de dépenses et de recettes brutes du fonds.

La dotation prévue pour 2008, de 50 millions d'euros, est en baisse de plus de 56 % par rapport à 2007. Elle traduit la poursuite du désengagement de l'Etat du financement de la CMU-c, engagé depuis 2004.

Evolution de la contribution de l'Etat au fonds CMU

(en millions d'euros)

Années

2004

2005

2006

2007

2008

Mission « Solidarité et intégration » (1)

946, 6

660,6

323,5

92

50

Mission « Outre-mer » (2)

50

34,4

22,7

22,7

0

TOTAL

996,6

695

346,2

114,7

50

(1) Anciennement budget « Santé-solidarité ».
(2) Anciennement budget « Outre-mer ».

Source : commission des affaires sociales, d'après les documents budgétaires

Votre commission désapprouve cette évolution : depuis 2004, la contribution de l'Etat au fonds CMU a diminué de 95 %. Cette baisse résulte de l'abondement du fonds par des recettes prélevées sur les droits tabacs, la taxe sur les alcools et celle due par les organismes complémentaires, dont les taux ont été revalorisés 6 ( * ) en 2006 et 2007.

Recettes du fonds CMU pour 2008

(en millions d'euros)

Taxe de 2,5 % due par les organismes complémentaires sur les primes ou cotisations d'assurance de protection complémentaire santé

742

Taxe sur les alcools de plus de 25°

421

Droits tabacs (fraction de 4,34 %)

397

Excédent prévisionnel cumulé

19

TOTAL ressources propres hors subvention d'équilibre de l'Etat

1.579

Subvention d'équilibre de l'Etat

50

TOTAL des dépenses estimées pour 2008

1.629

Source : Projets annuels de performances 2008

Or, les recettes sont modulées en fonction des dépenses, estimées, pour 2008, à 1 629 millions d'euros. Ce montant dépend essentiellement du nombre de bénéficiaires de la CMU-c et du prix du forfait sur la base duquel le fonds rembourse les différents organismes en charge de l'avance des frais.

En 2006, plus de 4,8 millions de personnes ont bénéficié de la CMU-c, soit 47 000 bénéficiaires supplémentaires . Cette progression demeure relativement limitée, malgré un taux de renouvellement des effectifs d'environ un tiers. Elle paraît d'autant plus modeste que le nombre de bénéficiaires potentiels est estimé à plus de six millions de personnes, soit un taux de non-recours d'environ 20 %, ce qui est significativement élevé.

Plusieurs études ont tenté d'en expliquer les raisons : les principales critiques portent sur la qualité de l'information sur le dispositif (appréhension à résilier un contrat de couverture privée au profit de la CMU-c, barrière linguistique pour les étrangers,...) ou les craintes de refus de soins ou de stigmatisation.

b) Le nécessaire ajustement du remboursement forfaitaire

Jusqu'en 2003, le fonds CMU remboursait les dépenses de CMU-c engagées par les régimes de base de l'assurance maladie à « l'euro près ». Puis la loi de finances pour 2004 a instauré un mode de remboursement forfaitaire, afin d'éviter un dérapage des dépenses en encourageant une politique rigoureuse de gestion du risque.

Ce forfait annuel, fixé initialement à 300 euros par bénéficiaire, a été revalorisé une première fois par la loi de finances pour 2005 à 304,52 euros, puis à 340 euros en loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

Evolution du coût moyen par bénéficiaire et par régime
comparé au montant du remboursement forfaitaire

(en euros)

Années

2004

2005

2006

2007
prévisions

2008
prévisions

RÉGIMES

Coût moyen

Ecart/
forfait

Coût moyen

Ecart/
forfait

Coût moyen

Ecart/
forfait

Coût moyen

Ecart/
forfait

Coût moyen

Ecart/
forfait

Cnam (y.c. SLM) 1

318

- 18

330

- 25,48

349

- 9

394

- 54

413

- 73

CCMSA

273

27

286

18,52

305

35

333

7

349

-9

RSI

272

28

301

3,52

314

26

342

- 2

359

- 19

Autres régimes

285

15

297

7,52

317

23

346

- 6

363

- 23

Organismes complémentaires

282

18

301

3,52

313

27

341

- 1

358

- 18

Moyenne pondérée générale

311

ns

324

ns

342

ns

384

ns

403

ns

1 Section locale mutualiste

Source : commission des affaires sociales d'après les données fournies par la direction de la sécurité sociale

Malgré ces revalorisations successives, ce nouveau mode de remboursement s'est traduit par l'accumulation d'un reste à charge pour le régime général de :

- 87 millions d'euros en 2004 du fait d'une dépense individuelle moyenne réelle supérieure de 18 euros au montant du forfait ;

- 73 millions d'euros en 2005 qui résulte d'un écart moyen par bénéficiaire par rapport au forfait de 25,5 euros malgré la revalorisation du forfait de 1,5 % ;

- 38 millions d'euros seulement en 2006, grâce à une hausse significative du remboursement forfaitaire (11,65 %), qui limite le différentiel par rapport à la dépense réelle constatée à 9 euros par bénéficiaire ;

- près de 200 millions d'euros en 2007, le forfait n'ayant pas été revalorisé tandis que la dépense réelle moyenne par bénéficiaire a continué d'augmenter (estimée à ce jour pour la Cnam à au moins 394 euros) ;

- plus de 210 millions d'euros pour 2008, les prévisions de consommation moyenne par bénéficiaire avoisinant 413 euros, soit un coût unitaire supplémentaire de 73 euros.

Les conséquences financières cumulées pour la Cnam pourraient s'élever au total à plus de 600 millions d'euros à la fin de l'année 2008. Pour les deux tiers, ce manque à gagner s'explique par l'absence de revalorisation du forfait depuis 2006. Pour cette raison, votre commission plaide en faveur de son alignement rapide sur la moyenne pondérée des consommations réelles par bénéficiaire tous régimes confondus, évaluée, pour 2008, à 403 euros. Il est en effet impératif de limiter le manque à gagner pour la branche maladie, déjà fortement déficitaire.

2. Aide médicale d'Etat : des crédits mieux adaptés aux besoins

L'aide médicale d'Etat (AME) offre, sous condition de ressources, pour une durée d'un an renouvelable, une couverture médicale gratuite aux personnes étrangères résidant en France depuis plus de trois mois qui ne peuvent pas bénéficier de la CMU.

En tout premier lieu, il convient de mentionner le versement à la sécurité sociale, au début du mois d'octobre, de 920,24 millions d'euros , qui correspondent au montant de la dette contractée par l'Etat au titre de cette allocation jusqu'en 2006. Cette opération devrait permettre au régime général de diminuer ses charges d'intérêts d'environ 200 millions d'euros dès 2008. Votre commission ne peut que se réjouir de l'apurement de cette dette, qu'elle réclamait depuis plusieurs années en vertu du respect de la répartition des charges entre l'Etat et la sécurité sociale.

Cette dette s'était en effet accumulée au fil des années du fait de la sous-dotation systématique de l'enveloppe allouée au financement de l'AME. Pour 2008, elle sera portée à 413 millions d'euros , soit une augmentation substantielle de 180 millions d'euros.

Votre commission salue le remarquable effort de sincérité budgétaire du Gouvernement, qui contraste avec les prévisions totalement irréalistes des années précédentes. Toutefois, elle a de bonnes raisons de penser que les crédits ne seront cette année encore pas suffisants.

En effet, le Gouvernement table sur un coût prévisionnel de 515 millions d'euros , ainsi que sur 102 millions d'économies réalisées grâce aux mesures qu'il doit prendre en 2008 pour contenir les dépenses.

Elles se décomposent de la façon suivante :

- 450 millions d'euros pour financer les dépenses d'AME dites « de droit commun », correspondant au remboursement des frais couverts par la Cnam. Cette prévision se fonde, à législation constante, sur les dépenses moyennes constatées entre 2003 et 2006, légèrement revalorisées compte tenu de l'évolution observée à la fin de l'année 2006 7 ( * ) . En revanche, il n'est pas tenu compte des dépenses prévisibles pour 2007, estimées à 458 millions, soit un reste à charge d'au moins 270 millions ;

- 40 millions d'euros pour couvrir les dépenses de soins urgents des étrangers en situation irrégulière résidant en France de façon ininterrompue depuis moins de trois mois. Ces dépenses sont remboursées par l'Etat à la Cnam sous la forme d'une dotation budgétaire forfaitaire. Pour 2008, son montant est doublé par rapport à 2007, mais il reste inférieur aux dépenses réelles constatées en 2006 et prévisibles pour 2007, qui avoisinent 60 millions. Cependant, au regard de la loi, l'Etat n'est pas contraint de rembourser intégralement ces dépenses. Cela se traduit néanmoins par un reste à charge pour la Cnam, qui affecte chaque année son résultat comptable : à la fin de 2006, la dette cumulée s'élevait à 92 millions ;

- enfin, 25 millions d'euros consacrés au financement des évacuations sanitaires mahoraises (20 millions) et de l'AME dite « humanitaire » pour couvrir, à titre exceptionnel, les dépenses des personnes françaises ou étrangères ne résidant pas en France.

Par ailleurs, 102 millions d'euros d'économies sont attendus des mesures prises afin de maîtriser les dépenses et rationaliser la gestion de l'AME. Elles comprennent :

- la non-prise en charge à 100 % des médicaments en cas de refus d'une spécialité générique (5 millions d'euros) ;

- la mise en place d'un ticket modérateur ou d'une participation financière aux dépenses de soins (actuellement à l'étude par le Gouvernement) ;

- le développement du contrôle médical (non chiffré) ;

- enfin, le renforcement de la lutte contre les fraudes grâce à la mise en place d'un titre d'admission non falsifiable comportant obligatoirement une photographie du prestataire (non chiffré).

Outre la sous-estimation probable des dépenses, il est vraisemblable que les économies prévues sont plus qu'optimistes. En effet, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, on peut raisonnablement prévoir, pour 2008, une dépense globale d'environ 540 millions d'euros et retenir une hypothèse prudente de 70 millions d'euros d'économies. L'insuffisance des crédits s'élèverait alors à 57 millions d'euros, dont 37 millions au titre de l'AME de « droit commun ».

Votre commission est toutefois bien consciente de l'effort considérable réalisé par le Gouvernement pour apporter les 180 millions d'euros de crédits supplémentaires pour l'exercice 2008. Elle souhaiterait obtenir un chiffrage précis des mesures d'économies prises pour contenir les dépenses et veillera, en loi de finances rectificative, à ce que les crédits soient suffisants.

Par ailleurs, votre commission souhaite que le Gouvernement s'engage dès à présent à prendre les mesures correctrices nécessaires pour combler le déficit, déjà estimé à 270 millions d'euros, pour l'année 2007.

3. Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante : une participation trop modeste de l'Etat

L'activité du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) a continué à se développer en 2006 et au début de l'année 2007. On observe en effet :

- une forte augmentation du nombre mensuel de dossiers déposés (57 % de plus qu'en 2006), qui résulte de l'accroissement des demandes émanant des nouvelles victimes 8 ( * ) ou de nouveaux ayants droit 9 ( * ) ;

- la hausse significative du nombre d'offres formulées par le fonds ;

- la relative stabilité du coût moyen de ces offres.

Ainsi, les dépenses sont estimées respectivement à 454 millions et 507 millions d'euros pour 2007 et 2008 . Les documents budgétaires mentionnent l'existence d'un fonds de roulement d'environ 260 millions d'euros en 2006, ramené pour 2007 à 205 millions d'euros. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, cette réserve devrait s'épuiser dans le courant de l'année 2009.

Pour l'essentiel, la dotation du fonds provient de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) de la sécurité sociale, qui devrait y contribuer à hauteur de 315 millions d'euros. Pour 2008, l'Etat a prévu de maintenir sa contribution à 50 millions d'euros , soit 9,9 % des dépenses du fonds contre 11 % en 2007.

La responsabilité de l'Etat dans le drame de l'amiante, en sa qualité d'employeur et au titre de son rôle dans la politique de santé publique, justifierait pourtant une augmentation de sa contribution pour accompagner la montée en charge des activités du fonds. Votre commission considère que celle-ci devrait être portée au moins à 20 % d'ici à 2010, puis à environ 30 % en 2012, selon l'échéancier qu'elle vous soumet dans le tableau ci-dessous :

Contributions prévisionnelles de l'Etat au Fiva

Années

2008

2009

2010

2011

2012

Contribution de l'Etat

En millions d'euros

50

80

100

125

150

dont crédits supplémentaires

10

30

50

75

100

En % (1)

9,9

15,8

19,7

24,6

29,6

(1) Calcul arrondi réalisé à dépenses constantes par rapport aux prévisions de 2008.

La présence d'un fonds de roulement, encore substantiel en 2008, et la mise en place imminente, par le Gouvernement, d'un groupe de travail, chargé de réfléchir à une éventuelle réforme du Fiva et du Fcaata 10 ( * ) , plaident néanmoins en faveur d'une reconduction à l'identique des crédits en 2008.

C. POUR UN RETOUR DURABLE À L'EMPLOI DES BÉNÉFICIAIRES DE MINIMA SOCIAUX

1. Allocation de parent isolé : des moyens encore insuffisants

L'allocation de parent isolé (API) est une allocation différentielle dont le montant est égal à la différence entre le montant garanti, qui varie selon le nombre d'enfants à charge, et la moyenne des ressources de l'allocataire perçue au cours des trois mois précédents.

On distingue deux types d'API :


l'API longue , réservée aux parents qui élèvent seuls un ou plusieurs enfants âgés de moins de trois ans ;


l'API courte , versée pour une durée d'un an et destinée aux parents séparés, veufs ou divorcés depuis moins d'un an, élevant seuls un ou plusieurs enfants, quel que soit leur âge.

Au 1 er janvier 2007, le montant de l'allocation pour une personne seule et un enfant s'élevait à 748 euros par mois.

a) Les risques d'un nouveau dérapage des dépenses

Depuis 2002, les dépenses liées à l'API connaissent une augmentation régulière et soutenue, qui a atteint, ces trois dernières années, un rythme annuel moyen supérieur à 8 %. Le Gouvernement n'ayant pas pris la mesure de cette évolution, les crédits prévisionnels se sont révélés insuffisants, au fil des ans, pour couvrir la montée en charge rapide des dépenses liées à cette allocation.

Il en est résulté, à la fin de 2006, une dette cumulée de 409,4 millions d'euros que l'Etat a remboursée à la sécurité sociale au début du mois d'octobre dernier.

Dette accumulée par l'Etat au titre de l'API

(en millions d'euros)

2002

2003

2004

2005

2006

2007 (1)

Dépenses constatées

796

833

900

973

1 069

1 065

Dotations budgétaires initiales

740

805

770

863

875

909,5

Ouvertures en LFR

46

36

0

32

0,2

-

Solde annuel

- 10

8

- 130

- 78

- 194

- 155,5

Dette cumulée

10

2

132

210

409,4

155,5 (2)

(1) Prévisions.

(2) Après apurement de la dette constatée au 31 décembre 2006.

En 2007, bien que réévalués (3,9 %), les crédits inscrits en loi de finances seront de nouveau insuffisants pour couvrir les dépenses engagées. Pour faire face à cette situation, le Gouvernement a prévu une augmentation significative des crédits pour 2008, ainsi qu'une série de mesures visant à contenir l'évolution des dépenses.

Votre commission ne peut que se féliciter de cet effort de sincérité budgétaire et de maîtrise des dépenses, tout comme du remboursement de la dette contractée par l'Etat vis-à-vis de la sécurité sociale. Cela régularise une situation que votre commission dénonce depuis plusieurs années et qui a été particulièrement préjudiciable à la branche famille de la sécurité sociale qui a dû en assumer le coût.

Toutefois, il y a tout lieu de penser que cette situation va se reproduire dès 2007. Les prévisions tablent en effet sur une consommation de crédits de 1 065 millions d'euros, soit un déficit estimé à 155,5 millions d'euros.

Pour 2008, l'enveloppe consacrée à l'API s'élève à 1 020 millions d'euros, soit une hausse de 12,1 % par rapport aux crédits inscrits en LFI pour 2007. Cette augmentation permet de financer :

- une revalorisation de l'allocation limitée à 1 %, qui se justifie par la correction à la baisse du taux d'actualisation de 2007 pour tenir compte de la surestimation de l'inflation ;

- une progression du nombre moyen d'allocataires estimée à 1,9 % (225 505 allocataires), malgré l'hypothèse d'une croissance encore soutenue des naissances ; pour 2007, cette progression est évaluée à 4,5 %, mais elle tient compte de l'alignement du montant de l'API dans les Dom sur celui applicable en métropole. En 2008, les effets inflationnistes qui résultent de la plus grande attractivité de la prestation suite à sa revalorisation dans les Dom, ne devraient plus être perceptibles en 2008.

Votre commission juge quelque peu optimiste cette hypothèse de progression, le nombre moyen d'allocataires ayant crû à un rythme annuel supérieur à 4,5 % au cours des trois dernières années. Cette évolution résulte d'une augmentation significative de la part des familles monoparentales et d'une croissance soutenue des naissances qui devrait se poursuivre en 2007 et 2008.

On observe également une modification de la structure des allocataires au profit des titulaires de l'API longue (+ 7 % en 2006), tandis que le nombre de personnes percevant l'API courte décroît sensiblement (- 4 %). Les titulaires de l'API longue ayant vocation à se maintenir dans le dispositif pendant environ trois années, cette évolution devrait peser sur les deux ou trois exercices suivants.

Facteurs d'évolution des dépenses d'API

2003

2004

2005

2006

2007 *

2008 *

Nombre de bénéficiaires

184 900

192 700

201 400

211 600

221 300

225 505

Montant moyen mensuel
de l'allocation (en euros)

375

389

397

418

400

377

Part en % API longue

80

80

80,9

82,2

80

80

Part en % API courte

20

20

19,1

17,8

20

20

Dépenses constatées
(en millions d'euros)

833
4,8 %

900
8,0 %

972
8,0 %

1 064
9,5 %

1 065

1 020

* Prévisions.

Source : d'après les projets annuels de performances - 2008

Enfin, la dotation prévue pour 2008 étant inférieure de 40 millions d'euros aux dépenses constatées en 2006, il est presque certain qu'elle ne suffira pas à couvrir les dépenses d'API.

b) Des efforts significatifs pour contenir les dépenses

Pourtant, votre commission ne néglige pas les effets attendus des mesures prises par le Gouvernement pour contenir les dépenses. Elle craint néanmoins que leur impact pour 2008 ne soit quelque peu surestimé .

Deux de ces mesures visent à réduire le montant moyen mensuel versé aux allocataires :

- 142,5 millions d'euros d'économies sont attendus de l'application du principe de subsidiarité de l'API par rapport aux prestations sociales (allocation de soutien familial notamment) et aux créances d'aliments. Les estimations retenues pour 2007 s'élevaient à 131 millions d'euros, tandis que la commission des comptes de la sécurité sociale tablait plus raisonnablement sur 84 millions d'euros ;

- l'alignement du forfait logement de l'API sur celui applicable aux allocataires du RMI devrait permettre une minoration de la dépense de 7 à 10 millions d'euros, soit un montant sensiblement identique à celui observé en 2007.

Dans le même temps, le Gouvernement espère également contenir l'évolution du nombre de bénéficiaires en renforçant les contrôles et la lutte contre la fraude (22 millions d'euros d'économies) et en favorisant la reprise d'activité.

Une première série de mesures vise à lever les obstacles pratiques à la reprise d'activité, en facilitant l'accès aux modes de garde et en limitant le coût :

- tout d'abord, une disposition de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux prévoit de leur réserver un accès privilégié aux crèches ;

- parallèlement, un avenant à la convention d'objectif et de gestion de la Cnaf prévoit d'accélérer le développement des places d'accueil collectif en portant de 10 000 à 12 000 le nombre de places créées chaque année. L'objectif est d'atteindre 362 000 places en 2012, soit 112 000 places supplémentaires par rapport à 2004 ;

- enfin, la loi de finances pour 2006 a porté le crédit d'impôt pour les frais de garde d'enfants de moins de six ans à 50 % des dépenses engagées dans la limite de 2 300 euros.


La réforme du système d'intéressement au retour à l'activité

La loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 pour le retour à l'emploi et sur les droits et devoirs des bénéficiaires de minima sociaux a rénové le système d'intéressement à la reprise d'une activité professionnelle afin de le rendre plus lisible et plus incitatif pour les allocataires du RMI, de l'API et de l'ASS.

Elle prévoit d'accorder aux personnes reprenant un emploi avec un horaire mensuel d'au moins soixante-dix-huit heures :

- le cumul intégral des minima sociaux et du salaire de l'activité professionnelle pendant trois mois ;

- une prime de retour à l'emploi de 1 000 euros après le quatrième mois de travail ou dès la fin du premier mois, si le contrat est à durée indéterminée ou d'une durée déterminée supérieure à six mois ;

- une prime forfaitaire mensuelle de 150 euros pour les personnes isolées et de 225 euros pour les couples ou familles durant neuf mois, au terme de la période de cumul intégral du revenu d'activité et de l'allocation.

Ces mesures sont ouvertes aux personnes accédant à un emploi aidé, sauf s'il s'agit d'un contrat d'avenir (CA) ou d'un contrat d'insertion-RMA (CI-RMA), pour lesquels la prime de retour à l'emploi de 1 000 euros n'est pas accordée. Ces contrats offrent en effet déjà une forme d'intéressement, qui s'ajoute aux nouvelles primes forfaitaires mensuelles.

Pour leur part, les allocataires de l'API et du RMI travaillant moins de 78 heures par mois bénéficient du système antérieur qui leur permet de cumuler durant neuf mois 50 % de leur revenu d'activité avec leur minimum social.

Parallèlement, le Gouvernement entend récolter les fruits de la mise en place des mesures favorisant le retour à l'emploi des titulaires de l'API, prises dans le cadre de la loi précitée du 23 mars 2006 et de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Les premiers résultats, bien que modestes, sont toutefois encourageants :

- d'après la Cnaf, en 2006, seulement 5,8 % des allocataires de l'API bénéficiaient d'une aide au retour à l'emploi, qu'il s'agisse d'un intéressement ou d'un contrat aidé. Pour 2007, ce pourcentage devrait être doublé et atteindre 10,8 %. Cela explique en partie la diminution des effectifs de l'API courte (4 %), plus sensibles à l'incitation financière que les allocataires de l'API longue, pour lequel l'impact est marginal ;

- on observe également une augmentation significative du nombre de titulaires de l'API bénéficiant d'un contrat aidé (CA ou CI-RMA). En 2005, 435 d'entre eux seulement avaient signé ce type de contrat ; en 2007, 5 636 ont signé un CA et 890 un CI-RMA. En outre, le CA présente l'avantage d'assurer à chaque titulaire un suivi et un bilan de compétences, une formation et un accompagnement individualisé vers l'emploi avec les maisons de l'emploi, l'ANPE ou les missions locales ;

- de plus, la convention d'objectifs et de gestion de la Cnaf pour la période 2005-2008 a prévu de mettre en place un dispositif d'accompagnement renforcé des titulaires de l'API, qui comprend, outre une évaluation personnalisée, des entretiens collectifs et individuels, qui permettent d'identifier les obstacles à la réinsertion et de trouver des solutions adaptées pour les surmonter (garde d'enfants, formation, validation des acquis de l'expérience, ...). Plus de 85 % des Caf ont déjà mis en oeuvre ces dispositifs, et 29 245 bénéficiaires de l'API ont ainsi pu être suivis par des travailleurs sociaux. Près de la moitié des caisses déclarait même avoir mis en oeuvre des actions visant à favoriser l'accueil des enfants de parents isolés en crèche ;

- enfin, suivant les recommandations de l'audit de modernisation 11 ( * ) , la DGAS est en train d'élaborer un plan d'action visant à renforcer et expérimenter une démarche d'insertion des allocataires de l'API.

Si votre commission estime que ces mesures vont dans le bon sens, les résultats que l'on peut en attendre sont plus qu'incertains et il y a fort à parier que les dépenses engagées en 2008 seront au moins équivalentes à celles constatées en 2007, ce qui devrait se traduire par un nouveau déficit. De plus, la dotation pour 2008 ne tient pas compte de la dette contractée par l'Etat vis-à-vis de la sécurité sociale au titre de l'année 2007.

Aussi, votre commission demande au Gouvernement de prendre les mesures correctrices qui s'imposent avant la fin de l'année, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2007. Il n'est en effet pas de bonne gestion que la sécurité sociale assume les conséquences financières de l'imprévision de l'Etat.

2. Revenu minimum d'insertion : la mobilisation payante des départements

La gestion du RMI et du CI-RMA, désormais confiée aux départements par la loi du 18 décembre 2003 12 ( * ) , ne relève plus de la mission « Solidarité, insertion égalité des chances ». Pourtant, le RMI et le CI-RMA participent éminemment à la politique nationale de lutte contre les exclusions, dont les actions sont regroupées dans le programme « prévention de l'exclusion et insertion sociale des personnes vulnérables » de la mission. C'est pourquoi votre commission souhaite dresser un bilan de la décentralisation de ces revenus .

a) Les effets positifs des politiques en faveur du retour à l'emploi

Pour la première fois depuis sa création, le nombre de bénéficiaires du RMI a diminué : au 30 juin 2006, on comptait 1 269 000 allocataires. Un an plus tard, ils sont 1 195 000, soit une diminution de 5,9 %. Cette évolution s'explique en grande partie par l'amélioration de la situation du marché du travail et l'activation des dispositifs d'aide au retour à l'emploi :

- la réduction du chômage a eu pour conséquence directe de diminuer le nombre d'ouvertures de droit au RMI. On observe cette tendance dès le deuxième trimestre 2007, avec environ 15 000 entrées de moins par rapport au premier trimestre ;

- en outre, les effets du nouveau dispositif d'intéressement, réformé par la loi du 23 mars 2006 et applicable depuis le 1 er octobre 2006 sont désormais mesurables. Au 30 juin 2007, 103 000 allocataires bénéficiaient de ce nouveau dispositif, dont 55 000 avec un cumul intégral du RMI et du revenu d'activité. Au total, si l'on ajoute les personnes qui perçoivent une prime d'intéressement dans le cadre de l'ancien système, environ 134 000 personnes ont perçu une incitation financière à la reprise d'activité, soit environ 11 % des titulaires du RMI ;

- à la même date, près de 79 000 personnes ayant un droit ouvert au RMI avaient signé un contrat aidé (66 000 CA et 13 000 CI-RMA). Un an plus tôt, 33 000 CA et 8 000 CI-RMA avaient été signés : les effectifs ont donc presque doublé.

A ces grandes tendances, s'ajoutent les effets positifs des initiatives locales mises en oeuvre par les départements. La décentralisation du RMI les a en effet conduits à redéfinir leurs politiques d'insertion et à s'impliquer davantage dans la démarche d'insertion des bénéficiaires du RMI.

Une enquête de la Drees 13 ( * ) , menée en partenariat avec l'assemblée des départements de France (ADF), révèle que :

- plus de neuf départements sur dix ont élaboré un programme départemental d'insertion (PDI). Ce programme recense les besoins de la population et l'offre locale d'insertion et planifie les actions que le département entend mener dans ce domaine. Il est souvent élaboré en collaboration avec l'ANPE, l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP), les associations et les Caf ;

- trois quarts des départements déclarent également avoir renforcé le contrôle des démarches d'insertion engagées par les bénéficiaires du RMI, ce qui a conduit un tiers d'entre eux à suspendre le versement du RMI en raison du non-respect du contrat d'insertion ou de l'absence de réponse aux convocations par le « référent » en charge de l'accompagnement ;

- six départements sur dix ont aménagé les contrats aidés pour les rendre plus attractifs : amélioration de l'accès à une formation, renforcement de l'accompagnement des bénéficiaires, octroi d'une aide supplémentaire à l'employeur, instauration d'une prime pour prolonger la durée du contrat, modulation de la durée du travail et de la forme juridique des contrats ;

- certains départements ont amélioré les structures d'accueil des allocataires du RMI en créant des plates-formes universelles d'information qui jouent le rôle de guichet unique ;

- enfin, pour favoriser la mobilité des bénéficiaires du RMI vers les bassins d'emplois, quelques conseils généraux ont mis en place des aides spécifiques et développé les liaisons départementales de transport public.

b) Une meilleure compensation des dépenses pour les départements

Conformément à la loi du 18 décembre 2003 précitée, le transfert de la gestion du RMI est compensé par l'attribution aux départements d'une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP), correspondant au montant des dépenses constatées en 2003.

Dès 2004, cette compensation s'est révélée insuffisante pour couvrir les dépenses engagées par les départements. C'est pourquoi le Gouvernement s'était engagé à financer le coût exact de la dépense pour les départements, ce qui a donné lieu à un abondement exceptionnel de 457 millions d'euros voté en loi de finances rectificative pour 2005 et versé en janvier 2006.

Evolution de la charge financière du RMI et du RMA pour les départements

(en millions d'euros)

2004

2005

2006

2007 (1)

2008 (1)

Dépenses liées au RMI - RMA

5 399

5 821

6 106

6 300

5 960

Abondements TIPP

4 942

4 942

4 942

4 942

4 942

Abondements exceptionnels ou FMDI

457

500

500

500

0

Taux de couverture de la dépense

100 %

93,5 %

89,1 %

86,4 %

82,9 %

Solde à la charge des départements

0

- 379

- 664

-858

- 1 018

Solde cumulé

0

- 379

- 1 043

- 1 901

- 2 919

(1) prévisions Source : documents budgétaires et Assemblée des départements de France

Ainsi, les départements sont dépendants d'abondements exceptionnels qui interviennent en complément de la fraction de TIPP qui leur est versée chaque année en vertu de la loi.

L'article 37 de la loi de finances pour 2006 a créé pour deux ans un fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI), doté de 100 millions d'euros en 2006 et de 80 millions d'euros pour 2007 afin de permettre aux départements de mener des projets novateurs en matière d'insertion des allocataires du RMI. En réalité, cette disposition n'a pas été suivie d'effet et le fonds n'a pas été mis en place en 2006.

L'article 14 de la loi de finances rectificative pour 2006 a prévu de prolonger l'existence du FMDI jusqu'en 2008 et de porter sa dotation pour la période 2006-2008, de 100 à 1 500 millions d'euros. Chaque année, 500 millions d'euros seront versés aux départements selon la répartition suivante :

- une part au titre de la compensation , destinée aux départements dont les dépenses de RMI seraient supérieures au droit à compensation qui leur est versé en vertu du transfert du RMI et du RMA ;

- une part au titre de la péréquation, répartie entre les départements, selon la même logique, mais pondérée par un indice synthétique de ressources et de charges, qui intègre le potentiel financier par habitant et la part des bénéficiaires du RMI dans la population ;

- enfin, une part au titre de l'insertion , répartie entre les départements à due proportion du nombre de contrats aidés signés et des primes forfaitaires accordées pour favoriser la reprise d'activité.

Ce dispositif a le mérite de garantir, de 2005 à 2007, un abondement de 500 millions d'euros en complément du versement du produit de la TIPP. De surcroît, il récompense les départements les plus dynamiques dans la mise en oeuvre de politiques actives en faveur de l'insertion. Enfin, il offre une aide supplémentaire aux départements les plus pauvres, particulièrement touchés par les difficultés d'insertion et de chômage, et dont les dépenses de RMI représentent une part importante de leur budget.

Répartition des moyens de financement du FMDI

2006

2007

2008

Part

Montant
(en millions d'euros)

Part

Montant
(en millions d'euros)

Part

Montant
(en millions d'euros)

Part « complément de compensation »

50 %

250

40 %

200

40 %

200

Part « péréquation »

30 %

150

30 %

150

30 %

150

Part « retour à l'emploi »

20 %

100

30 %

150

30 %

150

TOTAL

100 %

500

100 %

500

100 %

500

Toutefois, les comptes administratifs des départements étant généralement adoptés au mois de juin de l'année n+1, il existe un décalage inévitable entre l'engagement des dépenses par les départements et le versement de la compensation correspondante. Il en résulte des difficultés de trésorerie pour les budgets de certains conseils généraux . Ainsi, l'abondement exceptionnel de 457 millions d'euros, accordé au titre de l'année 2004, a été seulement versé au début de l'année 2006. De la même façon, la première tranche de 500 millions d'euros du FMDI couvrant les dépenses de 2005 a été versée au début de l'année 2007. La seconde tranche, afférente aux dépenses de RMI de 2006, a été inscrite dans la loi de finances initiale pour 2007 et sera donc répartie entre les départements d'ici la fin de l'année.

Pour cette raison, l'article 46 de la loi de finances pour 2006 prévoit que la compensation prélevée sur les recettes de la TIPP soit versée mensuellement, à hauteur d'un douzième du montant du droit à compensation de chaque département. Ainsi, les sommes versées ne dépendent plus des fluctuations de recettes de la taxe qui varient en fonction de l'évolution de la consommation de carburants sur le territoire national. Ce même article a créé un compte de concours financier, intitulé « avances aux collectivités territoriales », qui retrace les versements mensuels effectués pour chaque département.

Votre commission ne peut que se féliciter de l'amélioration des modalités de compensation des dépenses liées à la gestion du RMI, qui offrent de nouvelles garanties aux départements, au moins jusqu'en 2008. Après cette date, elle s'interroge sur l'avenir qui sera réservé au FMDI. Sans abondement complémentaire de l'Etat, le taux de couverture des dépenses de RMI sera nettement inférieur à celui constaté les années précédentes. Toutefois, elle reconnaît qu'il est prématuré d'envisager le prolongement du FMDI, dès lors que le Président de la République a annoncé une réforme d'ensemble des minima sociaux en 2008.

Votre commission estime toutefois nécessaire que la répartition des missions et des charges financières entre l'Etat et les départements soit rapidement précisée et clarifiée.

3. Vers un revenu de solidarité active

a) Les espoirs suscités par le revenu de solidarité active expérimental

Les articles 18 à 23 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ont prévu la mise en place expérimentale pour trois ans d'un revenu de solidarité active (RSA).

Ce dispositif a pour objectif d'assurer l'augmentation des ressources d'une personne bénéficiaire d'un minimum social qui prend ou reprend un travail, exerce ou accroît son activité, en garantissant, à chaque foyer, un revenu minimal qui tient compte de ses revenus d'activité et de ses charges de famille.

Outre le retour à l'emploi des personnes bénéficiant de la solidarité nationale, le RSA vise à réduire la pauvreté en offrant à toute personne un revenu supérieur au seuil de pauvreté estimé à environ 830 euros.

Dans un premier temps, cette expérimentation sera ouverte aux seuls bénéficiaires du RMI et de l'API résidant dans la vingtaine de départements volontaires dont la candidature aura été retenue : 50 000 allocataires du RMI et 5 000 bénéficiaires de l'API pourraient être éligibles à ce nouveau dispositif.

Seize conseils généraux ont déjà été habilités à conduire cette expérimentation et l'ont mise en oeuvre depuis le 1 er novembre. Dix autres départements devraient être prochainement sélectionnés parmi les vingt-trois candidatures enregistrées au 31 octobre. En réponse à cette mobilisation inattendue, le Gouvernement a proposé d'accroître le nombre de départements éligibles, en abondant en conséquence les crédits initialement prévus.

Pour financer cette expérimentation, 25 millions d'euros sont prévus pour 2008 dans le cadre du programme « lutte contre la pauvreté : expérimentations ». Ils devraient permettre de couvrir la moitié du surcoût direct versée aux départements au titre des bénéficiaires du RMI, soit 15 à 17 millions, 3,5 à 4 millions pour le versement du RSA aux bénéficiaires de l'API dont l'Etat a la charge et 3 à 5 millions pour l'accompagnement, l'ingénierie et l'évaluation. Le cas échéant, le montant de la compensation prévue par la convention de financement signée par l'Etat avec chaque département pourra être ajusté en fin d'exercice.

Si l'évaluation du dispositif est concluante, il est prévu de le généraliser à l'ensemble du territoire national et de l'étendre à d'autres bénéficiaires de minima sociaux (ASS, AAH) et aux travailleurs pauvres. Son coût pourrait s'élever à plus de 3 milliards d'euros par an.

b) Des précautions à prendre avant toute généralisation

Si votre commission observe avec intérêt la mise en oeuvre expérimentale du RSA, elle est réservée sur une généralisation trop hâtive du dispositif. Elle considère que l'Etat doit laisser aux départements le temps de l'expérimentation, dont la durée est fixée par la loi à trois ans. Ce n'est en effet qu'au terme de cette période que l'évaluation du dispositif expérimenté pourra donner des résultats concluants.

La création du RSA est une opportunité exceptionnelle pour remettre à plat le système des minima sociaux, trop complexe et peu lisible pour ses bénéficiaires. L'expérimentation du dispositif sur trois années doit permettre d'affiner ses modalités de mise en oeuvre, d'en cerner les enjeux en termes de retour à l'activité et de veiller à ne pas créer de nouvelles iniquités entre travailleurs pauvres et titulaires de minima sociaux.

A cet égard, votre commission a eu l'occasion de souligner à plusieurs reprises l'importance de la prise en compte des droits connexes dans cette réflexion d'ensemble. Or, dans le cadre de l'expérimentation actuelle, les départements n'ont aucune obligation de les intégrer au calcul du RSA.

Enfin, votre commission s'interroge sur l'opportunité d'étendre le RSA aux titulaires de l'AAH. Il s'agit en effet de ne pas bouleverser l'équilibre actuel qui permet aux personnes en incapacité de travailler de disposer d'un revenu majoré par les deux nouvelles compensations créées par la loi du 11 février 2005.

II. LEVER LES INCERTITUDES QUI PÈSENT SUR LA DYNAMIQUE ENCLENCHÉE PAR LA LOI « HANDICAP » DU 11 FÉVRIER 2005

Le programme « handicap et dépendance » est composé de six actions, dont quatre consacrées aux personnes handicapées, une aux personnes âgées et une dédiée au pilotage du programme. Les crédits regroupés dans ce programme sont complétés par une très grande diversité de sources de financement, qui contribuent à la mise en oeuvre des politiques en faveur des personnes âgées et handicapées.

Au total, on évalue à plus de 50 milliards d'euros la dépense publique en faveur des personnes handicapées et dépendantes. Y contribuent pour une large part : l'Etat au travers de différentes missions budgétaires, la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), les départements, la sécurité sociale, l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) et le fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP).

A. LA GARANTIE D'UN REVENU D'EXISTENCE POUR LES PERSONNES HANDICAPÉES : DE FORTES ATTENTES DÉÇUES PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2008

Les ressources d'existence visent à assurer aux personnes handicapées un revenu minimum garanti leur permettant de mener une vie autonome et digne. Elles comprennent, outre l'AAH et le minimum invalidité, les revenus tirés de l'activité en établissements et services d'aide par le travail (Esat) ou en entreprise adaptée (EA).

1. Allocation aux adultes handicapés : une revalorisation a minima

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social spécifique, attribué sous conditions de ressources aux personnes reconnues handicapées par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Elle est versée de façon subsidiaire par rapport aux prestations vieillesse ou invalidité et se cumule, le cas échéant, avec des revenus d'activité dans la limite d'un plafond annuel d'environ 7 500 euros.

Peuvent s'y adjoindre : l'ancien complément d'AAH ou le complément de ressources et la majoration pour la vie autonome, créés par la loi du 11 février 2005.


Les nouveaux compléments de l'AAH

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a instauré la garantie de ressources des personnes handicapées (GRPH), qui comprend l'AAH et un complément de ressources, ainsi que la majoration pour la vie autonome définis aux articles
L. 821-1-1 et L. 821-1-2 du code de la sécurité sociale. Ces deux nouveaux compléments à l'AAH ne sont pas cumulables :

La majoration pour la vie autonome (MVA), qui se substitue à l'ancien complément d'AAH, est destinée aux personnes ayant un taux d'incapacité d'au moins 80 %, qui disposent d'un logement indépendant et perçoivent une aide au logement et qui bénéficient d'une AAH versée à taux plein ou en complément d'une pension vieillesse, d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail. Au 1 er janvier 2007, son montant mensuel était de 103,63 euros.

Le complément de ressources (CPR) s'ajoute à l'AAH pour constituer la GRPH. Ce complément s'adresse aux personnes âgées de moins de soixante ans, ayant un taux d'incapacité d'au moins 80 %, qui bénéficient d'une AAH versée à taux plein ou en complément d'une pension vieillesse, d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail, qui disposent d'un logement indépendant, qui n'ont pas perçu de revenus professionnels depuis au moins un an et dont la capacité de travail est inférieure à 5 %. Au 1 er janvier 2007, son montant mensuel était de 179,31 euros.

L'ancien complément d'AAH, dont le montant mensuel, au 1 er janvier 2007, s'élevait à 99,40 euros, subsiste mais est en voie d'extinction progressive. En effet, afin d'éviter toute perte de droits, les personnes bénéficiaires, ne remplissant pas les conditions d'accès au CPR ou à la MVA, sont autorisées à percevoir ce complément dans les mêmes conditions, jusqu'au renouvellement de leur AAH.

a) Des crédits en voie de stabilisation

Pour 2008, l'enveloppe allouée au financement de l'AAH s'élève à 5 406 millions d'euros, soit une augmentation contenue à 2 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2007 14 ( * ) . Ainsi, le ralentissement de la hausse des crédits, observé l'an passé, se confirme. Si votre commission se félicite de cette relative stabilisation des dépenses d'AAH, elle sera toutefois attentive à ce que cette moindre augmentation des crédits ne se traduise pas en fin d'année par un nouveau déficit .

Or il semble que cela soit déjà le cas pour 2007. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les dépenses pour 2007 sont, à ce jour, estimées à 5 369 millions d'euros, soit 65 millions d'euros de plus que les crédits ouverts en LFI pour 2007. Si cette prévision était vérifiée, la hausse des crédits consommés en 2007 se limiterait néanmoins à 2,7 % contre 6,2 % en 2006.

Crédits de paiement alloués à l'AAH

AAH

2004

2005

2006

2007 (1)

2008 (1)

Nombre moyen de bénéficiaires

778 900
2,4 %

793 886
1,9 %

802 200
1,0 %

807 300
0,6 %

811 300
0,5 %

Montant moyen mensuel en euros

512
3,4 %

523
2,1 %

542
3,6 %

557
2,8 %

562
0,9 %

Crédits de paiement LFI
(en millions d'euros)

4 661
3,0 %

4 847
4,0 %

5 187
7,0 %

5 304
2,2 %

5 410
2,0 %

Crédits consommés en millions d'euros

4 762
5,2 %

4 924
3,4 %

5 229
6,2 %

5 369
2,7 %

ns

Transfert de crédits LFR
(en millions d'euros)

101

77

42

65

ns

(1) Prévisions. Source : d'après les projets annuels de performances, 2008

Cette faible hausse est le reflet d'une double tendance : la progression modérée du nombre de bénéficiaires et la croissance maîtrisée du montant mensuel moyen de l'allocation.


Une augmentation ralentie du nombre de bénéficiaires

En 2005, les chiffres définitifs permettent d'observer un ralentissement de l'augmentation du nombre de bénéficiaires de l'AAH (1,9 % contre 2,4 % l'année précédente), alors que l'on constate parallèlement un accroissement du nombre de droits ouverts (5 %). Ce ralentissement provient donc d'une accélération du rythme annuel de sorties du dispositif, du fait de l'arrivée massive à l'âge de soixante ans des prestataires issus des générations du baby-boom. Cette tendance se confirme en 2006 avec une hausse du nombre d'allocataires limitée à 1 %.

Pour 2007, le nombre de titulaires de l'AAH, devrait atteindre 807 300, soit une progression de 0,6 % : 69 % sont atteints d'une incapacité permanente supérieure ou égale à 80 % et respectivement 15 % et 6 % d'entre eux perçoivent la majoration pour la vie autonome (MVA) et le nouveau complément de ressources (CPR).

Pour 2008, les prévisions tablent sur une croissance limitée de l'effectif (0,5 %), soit un nombre de bénéficiaires estimé à 811 300. Cette évolution favorable résulterait :

- de la clarification des conditions d'attribution de l'AAH 15 ( * ) pour les personnes ayant un taux d'invalidité compris entre 50 % et 80 %, en substituant à la notion d'« impossibilité de se procurer un emploi du fait de son handicap » celle de « restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi » ;

- des diverses mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre la fraude, notamment en renforçant les contrôles relatifs à l'application de la subsidiarité par rapport aux avantages vieillesse, que les personnes handicapées âgées de plus de soixante ans doivent faire valoir en priorité sur l'AAH ;

- du maintien des objectifs volontaristes de retour à l'emploi fixés par le Gouvernement.

Les économies attendues de ces mesures sont estimées à 60 millions d'euros.


• La
hausse maîtrisée du montant mensuel moyen de l'allocation

Parallèlement, on observe une hausse contenue du montant moyen servi aux allocataires, malgré les réformes engagées en 2007.

Ce montant correspond à la moyenne des sommes versées par bénéficiaire, chaque mois, au titre de l'AAH et de ses compléments (ancien complément d'AAH, majoration pour la vie autonome ou complément de ressources).

Après une hausse relativement forte en 2006 (3,6 %), sous l'effet conjugué de la revalorisation de l'AAH (1,8 %) et de la montée en charge rapide des nouveaux compléments, les prévisions tablent sur une croissance plus modérée (2,8 %) en 2007. Pour 2008, grâce à une revalorisation a minima de l'AAH et de ses compléments (1,1 % en janvier, puis 1 % au mois de septembre), l'augmentation devrait être limitée à 0,9 %.

Pourtant le montant mensuel moyen tient compte de :

- l'aide accordée à l'employeur lorsqu'il souscrit un contrat d'avenir ou un CI-RMA avec un titulaire de l'AAH ;

- l'amélioration du cumul entre rémunération garantie versée en établissement et service d'aide par le travail (Esat) et l'AAH 16 ( * ) ;

- la montée en charge des nouveaux compléments d'AAH, également ouverts, depuis le 1 er janvier 2007, aux bénéficiaires de l'allocation supplémentaire du fonds spécial d'invalidité.

Evolution des crédits alloués aux compléments de ressources de l'AAH

(en millions d'euros)

Années

2005

2006

2007 (1)

2008 (1)

Effectifs

Crédits

Effectifs

Crédits

Effectifs

Crédits

Effectifs

Crédits

Majoration vie autonome

127 169

ns

115 013

136

118 400

147

124 320

157

Ancien complément AAH

16 006

127

8 634

13,1

7 140

8

4 430

5

Complément de ressources

25 808

ns

48 672

128,5

50 400

125

54 030

135

TOTAL

168 983

127

172 319

277,6

175 940

280

182 780

297

(1) Prévisions Source : d'après la DGAS

Votre commission craint que les prévisions du Gouvernement ne soient fondées encore cette année sur des hypothèses excessivement optimistes. Néanmoins, elle convient que l'infléchissement du nombre de bénéficiaires et les mesures prises pour contenir les dépenses limitent le risque d'une dérive des crédits.

En outre, elle ne peut omettre de mentionner le versement à la sécurité sociale de 94,4 millions d'euros, en remboursement de la dette accumulée au titre de l'AAH jusqu'au 31 décembre 2006. Elle en avait fait la demande à maintes reprises sans obtenir satisfaction. Elle se félicite de cet effort exceptionnel qui concourt à l'assainissement des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

b) Une année de transition

Le Président de la République s'est engagé 17 ( * ) à revaloriser l'AAH de 25 % en cinq ans, afin de permettre aux personnes handicapées de vivre dignement et de s'insérer durablement dans la société. Or, pour 2008, l'augmentation prévue se limite à 2,1 %, et encore celle-ci s'effectue en deux temps, la seconde revalorisation, de 1 %, n'intervenant qu'au quatrième trimestre.

Le Gouvernement a justifié cette prudence par le souci d'éviter trois écueils : une rupture d'égalité entre personnes handicapées titulaires de prestations différentes, une désincitation au retour à l'emploi et la création d'une iniquité entre salariés valides et handicapés.

La revalorisation de l'AAH doit en effet être envisagée dans le cadre d'une réflexion d'ensemble sur les ressources des personnes handicapées et concilier les objectifs de retour à l'activité et d'amélioration des conditions de vie quotidienne. C'est d'ailleurs un des thèmes retenus par le comité de suivi de la loi « handicap » qui s'est mis en place le 23 octobre dernier.

Plusieurs éléments justifient la position attentiste du Gouvernement :

Tout d'abord, le traitement des demandes d'attribution de l'AAH n'est pas encore optimal. Des indicateurs de performance relatifs à la qualité et l'effectivité des décisions prises par les MDPH et les CDAPH ont certes été mis en place, mais ils ne sont pas encore correctement renseignés dans les projets annuels de performance, notamment pour les années 2005 et 2006 .

Il s'agit en outre de trouver un équilibre qui permette d'inciter les bénéficiaires de l'AAH au retour à l'activité sans dégrader leurs conditions d'existence. Cette question s'inscrit dans la perspective de la généralisation du RSA et d'une fusion des minima sociaux, intégrant éventuellement l'AAH. Elle nécessite une réflexion d'ensemble et une concertation avec les associations concernées.

Enfin, la relative lenteur de la mise en place de la nouvelle prestation de compensation du handicap (PCH) ne permet pas encore de porter une appréciation fine sur les ressources globales des personnes handicapées. Or, il ne serait pas pertinent de dissocier la question de la compensation de celle des revenus d'existence. La suppression du droit d'option par exemple, qui permet de choisir entre la nouvelle PCH ou le maintien de l'ancienne allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP), ne peut être envisagée que dans le cadre d'une appréhension globale des revenus des personnes handicapées, qu'il s'agisse des revenus d'activité, du niveau de l'AAH ou des possibilités de cumul.

2. Rémunération garantie : la nécessité de mieux récompenser l'activité des personnes handicapées

Créée par la loi « handicap » du 11 février 2005, la rémunération garantie en établissements et services d'aide par le travail (Esat) remplace, depuis le 1 er janvier 2007, la garantie de ressources des travailleurs handicapés (GRTH), afin d'en corriger les effets pervers. Ce nouveau mécanisme vise à assurer un revenu d'activité décent aux personnes accueillies, malgré leur plus faible productivité.

Il s'agit en effet de simplifier la gestion du dispositif, en passant d'un système de garantie de ressources calculée sur une base horaire à un dispositif d'aide au poste annualisée, et de mieux récompenser l'accroissement d'activité et les efforts de productivité des personnes handicapées travaillant en Esat.

En application du décret n° 2006-703 du 16 juin 2006, la rémunération garantie, désormais versée intégralement par l'établissement ou le service d'accueil, assure aux salariés handicapés un revenu compris entre 55 % et 110 % du Smic. L'aide au poste versée par l'Etat contribue à son financement, mais dans la limite de 50 % du Smic.

Cette aide annuelle doit ainsi couvrir la prise en charge d'une partie de la rémunération de la personne handicapée, des cotisations sociales afférentes, ainsi que les frais engagés par les établissements au titre de la formation professionnelle continue et de la prévoyance.

Modulée en fonction de la quotité horaire de travail du salarié handicapé et de la part financée par l'établissement, l'aide au poste reste toutefois constante, tant que la participation de l'établissement est comprise entre 5 % et 20 % du Smic. Elle ne diminue ensuite que de 0,5 % pour chaque hausse de 1 % de la part versée par l'établissement. Au total, l'effort réalisé par l'Esat doit être répercuté pour moitié sur la rémunération de la personne handicapée. A ce jour, la rémunération directe servie par les Esat avoisine en moyenne 12,5 % du Smic, ce qui est relativement faible. Or, la logique de la réforme voudrait que cette participation augmente progressivement, pour accroître la part que représentent les revenus d'activité dans les ressources des personnes handicapées .

En 2007, les crédits destinés à cette aide s'élevaient à 979 millions d'euros, en baisse de 0,2 % par rapport à 2006. Cette diminution intégrait en réalité un excédent de trésorerie de 75 millions d'euros, résultant d'une surestimation des besoins en 2006, qui a permis de couvrir une partie du coût supplémentaire résultant de la réforme de la rémunération garantie.

Pour 2008, l'enveloppe allouée à l'aide au poste représente 1 011,8 millions d'euros, soit une augmentation de 3,3 % par rapport à l'exercice précédent. Cette augmentation permet de financer :

- outre les 114 811 places existantes, 2 000 places nouvelles sur six mois ;

- une hausse de 0,4 % du montant moyen annuel de l'aide au poste, valorisée, en 2008, à 8 806 euros après une baisse de 2,4 % en 2007 (le coût de la place en 2006 s'élevant à 8 986 euros) ;

- la revalorisation du Smic à hauteur de 2,1 % par apport à 2007.

Votre commission se félicite de l'augmentation des capacités d'accueil en Esat pour l'année 2008 . Elle considère en effet que l'exercice d'une activité, même à temps partiel, dans ces établissements constitue un passage obligé du parcours de réinsertion professionnelle des personnes handicapées les plus éloignées du travail.

Elle regrette, toutefois, que le montant de l'aide au poste versée par l'Etat ne permette pas d'améliorer le niveau de la rémunération garantie des personnes handicapées travaillant en Esat, afin de rendre plus attractive l'exercice d'une activité ou l'augmentation du temps de travail hebdomadaire. A cet égard, elle se demande si il ne serait pas temporairement opportun de privilégier la revalorisation de l'aide au poste plutôt que la création de places encore trop souvent inoccupées. Cette revalorisation pourrait être consacrée à la fois à l'augmentation du niveau de rémunération des salariés en Esat et au renforcement de l'encadrement et de la formation professionnelle continue.

3. Minimum invalidité : un assainissement financier inachevé

L'allocation supplémentaire du fonds spécial d'invalidité (FSI), plus communément appelée « minimum invalidité », complète les ressources des bénéficiaires de pensions d'invalidité de très faibles montants : elle est versée lorsque le montant cumulé de la pension d'invalidité et des autres ressources de la personne handicapée est inférieur à un montant égal, au 1 er janvier 2007, à 621,27 euros pour une personne seule et 1 114,51 euros pour un couple.

Le minimum invalidité est versé par l'assurance maladie pour les ressortissants du régime général et par un organisme spécial géré par la Caisse des dépôts et consignations, pour les ressortissants d'autres régimes. Les crédits inscrits en projets de loi de finances visent donc à rembourser ces deux organismes des dépenses qu'ils avancent à ce titre pour le compte de l'Etat.

Conformément aux préconisations de la mission d'audit, menée conjointement en août 2003 par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'inspection générale des finances (IGF), le montant des dépenses prévisionnelles peut être évalué en faisant varier la dernière dépense connue, à savoir celle de 2006, en fonction des revalorisations de l'allocation intervenues depuis cette date (soit 1,8 % en 2007 et 1,1 % prévue en 2008) et de l'évolution du nombre de bénéficiaires évaluée à 0,6 % en moyenne annuelle. En conséquence, le projet de loi de finances prévoit une dotation de 308 millions d'euros pour 2008 .

Evolution des dépenses prévisionnelles et constatées du FSI

(en millions d'euros)

Années

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Crédits ouverts

243

259

264

272

300

303,4

300

Dépenses réelles

276

282

273

292

296

299,9

300

Solde

- 33

- 23

- 9

- 20

4

3,5

0

Comme en témoigne le tableau ci-dessus, l'application de cette méthode a donné des résultats plus que satisfaisants : en 2005 et 2006, la dépense réelle devrait être finalement légèrement inférieure aux crédits ouverts en loi de finances initiale.

En revanche, on observait le phénomène inverse au cours des années antérieures. Ainsi, s'est constituée peu à peu une dette vis-à-vis de la sécurité sociale, estimée au 31 décembre 2006, à 121,6 millions d'euros. Cette dette a été remboursée en même temps que celles accumulées respectivement au titre de l'AME, de l'AAH et de l'API, au début du mois d'octobre.

Toutefois, elle souhaite que le Gouvernement s'engage à couvrir intégralement les dépenses engagées au titre de l'allocation supplémentaire du FSI, en 2007 et 2008. L'Etat ne peut en effet transférer sur la sécurité sociale le coût d'un dispositif qui lui incombe au titre de la solidarité nationale.

B. LA MISE EN oeUVRE DU DROIT À COMPENSATION : DES BESOINS ENCORE MAL ÉVALUÉS

1. La prestation de compensation du handicap : anticiper le financement de besoins encore non exprimés

a) La lente montée en charge de la prestation de compensation du handicap

Créée par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, la prestation de compensation du handicap (PCH) vise à couvrir les surcoûts de toute nature liés au handicap.


Les composantes de la prestation de compensation du handicap

La prestation de compensation du handicap est composée de cinq éléments , pouvant être versés, selon les cas, en nature ou en espèce, mensuellement ou en capital :

- le premier permet la prise en charge des dépenses d'aides humaines, y compris, le cas échéant, l'indemnisation ou la rémunération d'un aidant familial ;

- le deuxième assure le financement des aides techniques, notamment la part du coût des matériels qui reste à la charge des assurés sociaux après remboursement par l'assurance maladie ;

- le troisième couvre les dépenses d'aménagement du logement et du véhicule de la personne handicapée, y compris les éventuels surcoûts résultant de son transport ;

- le quatrième finance les aides spécifiques ou exceptionnelles liées au handicap : relèvent notamment de cet élément les dépenses liées à l'achat de divers produits, tels que protections pour incontinents, sondes gastriques ou urinaires ou piles pour appareils auditifs ;

- le dernier permet l'acquisition et l'entretien d'une aide animalière, qu'il s'agisse d'un chien guide d'aveugle ou d'un chien d'assistance.

A terme, elle a vocation à remplacer l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) et pour frais professionnels (ACFP) financée par les départements. En effet, les personnes handicapées qui la perçoivent actuellement, peuvent en conserver le bénéfice ou opter pour la prestation de compensation. En revanche, ils ne peuvent la cumuler avec la nouvelle PCH. Contrairement à l'ACTP, la nouvelle prestation de compensation est accordée sans condition de ressources et son montant est, non plus forfaitaire, mais calculé en fonction des besoins réels du demandeur.

Pour cette raison, les personnes handicapées ont quelques réticences à adopter le nouveau dispositif. Elles craignent à la fois une diminution du montant de la prestation et son utilisation plus contraignante. Il est en effet malaisé d'apprécier avec exactitude le gain potentiel qu'une personne peut retirer du versement de la nouvelle PCH par rapport à l'ancien système de compensation. Le montant de l'ACTP, parce qu'il est forfaitaire, présente l'avantage d'être connu, ce qui n'est pas le cas de la PCH, dont les différentes composantes en font une prestation à montant variable. De plus, le bénéficiaire de l'ACTP n'est soumis à aucun contrôle de l'affectation des dépenses : il peut dépenser son allocation comme bon lui semble.

Pourtant, l'analyse des décisions d'attributions, sur près de deux ans, montrent que l'avantage financier retiré de la nouvelle PCH est très net dans la plupart des cas. Pour les aides humaines par exemple, le montant moyen accordé au titre de la PCH est deux fois plus important (près de 1 100 euros) que celui versé dans le cadre de l'ancien système forfaitaire (450 euros en moyenne).

Il est ainsi singulier de constater que la montée en charge de la PCH est plutôt lente. Elle tend néanmoins à s'accélérer en 2007 :

- en 2006, sur plus de 70 600 demandes déposées, les CDAPH en ont traité plus de 23 500 et accordé environ 9 300. La dépense correspondante - qui intègre des charges à payer de 24,7 millions d'euros - s'élève à 81,3 millions d'euros ;

- à la fin du premier semestre de 2007, sur 32 326 demandes examinées, 21 400 PCH ont été accordées, pour un montant total de 97,6 millions d'euros ;

- en année pleine, la CNSA estime à 85 200 le nombre de demandes qui pourraient être déposées en 2007 et à environ 55 000, celles qui pourraient faire l'objet d'une décision des CDAPH. Le taux des décisions positives avoisinant 70 %, on peut estimer à environ 37 400 le nombre de prestations versées en 2007, soit une dépense qui pourrait atteindre 300 millions d'euros.

Pour 2008, la CNSA table sur la poursuite de la montée en charge observée en 2007, sans pouvoir établir de prévisions précises. Ses projections la conduisent néanmoins à prévoir une dépense comprise entre 450 et 500 millions d'euros . L'article 60 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, qui ouvre aux parents d'enfants handicapés la possibilité d'opter pour la PCH en remplacement des compléments d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH), devrait entraîner la progression du nombre de bénéficiaires.

Prestations de compensation versées par les départements

2005

2006

1 er semestre
2007 (1)

Prévisions
2007

ACTP (2)

Bénéficiaires de moins de 60 ans

112 538

108 030

Montants en millions d'euros

606

267

550

PCH

Demandes déposées

70 622

42 618

85 200

Décisions prises par les CDAPH

23 514

32 326

55 000

Prestations accordées

9 300

21 400

37 400

Montants en millions d'euros

81,3

97,6

250

ACTP+PCH en millions d'euros

606

862,7

364,6

800

(1) Estimations CNSA

(2) ACTP versée aux personnes handicapées, âgées de plus de 60 ans, à domicile et en établissement

La répartition des composantes de la nouvelle PCH met en évidence la part prépondérante des aides humaines qui sont à l'origine de près de la moitié des prestations accordées. Il est toutefois significatif de voir à quel point les autres composantes représentent une part importante des charges supportées par les personnes handicapées (plus de la moitié).

Cela démontre - s'il en est besoin - la pertinence de la diversification des aides proposées en compensation du handicap : ainsi l'aménagement du logement et du véhicule, qui suppose des investissements lourds, représente plus d'un tiers des dépenses couvertes par la PCH.

Répartition des composantes de la PCH

(en pourcentage)

Répartition par type d'aides demandées

Répartition des composantes selon les montants alloués

Aides humaines

49,3

46,9

Aides techniques

21,7

14,9

Aménagement du logement
et du véhicule

15,8

36,3

Charges spécifiques exceptionnelles

12,8

1,9

Aides animalières

0,4

0,0

Total

100

100

Source : Données CNSA du premier trimestre 2007

b) Un taux de couverture des dépenses favorable aux départements

La PCH est servie par les départements qui sont chargés d'organiser l'instruction de la demande. Une partie de son coût est prise en charge par la CNSA grâce aux recettes prélevées sur la « journée de solidarité », le solde demeurant à la charge des départements.

Pour les années 2006 et 2007, ce solde devrait être largement positif, la CNSA ayant anticipé une montée en charge beaucoup plus rapide de la nouvelle PCH. Cet excédent de trésorerie, bien que plus modeste, pourrait perdurer en 2008, si les prévisions de la CNSA relatives à la montée en charge de la PCH se confirment.

Evolution du taux de couverture des dépenses de PCH

(en euros)

2006

2007
provisoire

2008
provisoire

Dépenses de PCH

81 573 419

260 000 000

470 000 000

Contribution CNSA

523 311 250

513 478 000

552 000 000

Taux de couverture

641,5 %

197,5 %

117,4 %

Solde

441 737 831

253 478 000

82 000 000

Source : caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)

Dans une logique de bonne gestion, votre rapporteur suggère qu'au moins une partie de cet excédent soit utilisée par les départements, dès cette année, pour financer par exemple des aménagements permettant une meilleure accessibilité des bâtiments publics pour les personnes handicapées . Le moment venu, il sera alors possible d'ajuster en tant que de besoin le montant de la compensation versée au titre de la PCH.

2. Les maisons départementales des personnes handicapées : un bilan en demi-teinte

La loi du 11 février 2005 a prévu la création, dans chaque département, d'une maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Elles doivent être un lieu d'accueil, qui fonctionne comme un guichet unique, pour conseiller les personnes handicapées, les orienter, mais aussi recevoir leurs demandes et les transmettre aux équipes pluridisciplinaires et aux commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), qui sont chargées de les instruire. Chaque demande est alors examinée sur la base d'un plan personnalisé de compensation (PPC), qui retrace le projet de vie de la personne handicapée et permet d'évaluer en conséquence ses besoins. A ce titre, les MDPH constituent un maillon central du nouveau système de compensation.

a) Une mise en place rapide dans la majorité des départements

Les MDPH sont organisées en groupement d'intérêt public (GIP), réunissant généralement le conseil général, l'Etat, l'assurance maladie et les caisses d'allocations familiales. Il revient au département d'en assurer la tutelle administrative et financière.

En tant que membre du GIP, l'Etat a largement contribué à leur installation et à leur mise en route. De 2005 à 2007, sa participation a atteint près de 115 millions d'euros (y compris les fonds de concours), à laquelle il faut ajouter les versements de la CNSA, qui se sont élevés à 70 millions d'euros sur la même période.

Contributions de l'Etat et de la CNSA au fonctionnement des MDPH

(en millions d'euros)

2005

2006

Prévisions
2007

Prévisions
2008

TOTAL

Etat

-

14,3

22,3

14,1

50,7

Fonds de concours

50

28.5

-

-

78,5

CNSA

-

20

50

30

100

TOTAL

50

62,8

72,3

44,1

229,2

Source : d'après les rapports d'activité de la CNSA

Pour 2008, les crédits se répartissent de la façon suivante :

- une subvention de fonctionnement , qui, pour la troisième année consécutive, s'élève à environ 14 millions d'euros , soit l'équivalent de ce que l'Etat consacrait jusqu'en 2005 aux sites pour la vie autonome. Ainsi, chaque maison reçoit de l'Etat une dotation annuelle de fonctionnement égale, selon la taille du département, à 110 00 ou 152 449 euros ;

- une subvention destinée à compenser la suppression de 173 équivalents temps plein (ETP) dans les MDPH , inscrite dans le programme « conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » ;

- la mise à disposition des personnels antérieurement affectés aux commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (Cotorep) et aux commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES), qui correspondent, selon les départements, à un nombre d'ETP, qui varient en moyenne de dix à trente. Il est difficile de chiffrer exactement l'effort ainsi consenti par l'Etat, les crédits afférents étant intégrés, sans distinction, au sein du programme « conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales ». En revanche, selon les informations recueillies par votre rapporteur, on peut estimer à plus de 60 % la part du personnel de l'Etat dans les MDPH.

Ainsi, au 1 er janvier 2006, 98 % des départements étaient dotés d'une MDPH , ce qui a permis d'assurer la continuité de l'accueil des personnes handicapées lors du « passage de relais » des Cotorep, des CDES et des services pour la vie autonome (SVA) au 31 décembre 2005.

Les premières conclusions de l'enquête menée auprès des conseils généraux relative à la mise en place des MDPH 18 ( * ) sont plutôt positives :

- la mobilisation de tous les acteurs et intervenants au sein du GIP et de la CDAPH a permis, dans la plupart des cas, de réunir l'ensemble des services contribuant à l'accueil et l'information des personnes handicapées en un lieu unique, correctement équipé et accessible ;

- les MDPH dispose désormais de petites équipes, certes encore peu nombreuses, pour accueillir les personnes handicapées et les orienter ;

- les CDAPH ont pu traiter les premières demandes dès 2006 et statuer sur un plus grand nombre de dossiers en 2007. Les demandes les plus fréquentes concernent l'ouverture du droit à l'AAH, la délivrance d'une carte d'invalidité ou de stationnement et la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).

b) Des missions partiellement remplies

Les premières remontées des conseils généraux mettent en évidence certains dysfonctionnements des MDPH qui ne leur permettent pas, à ce jour, de remplir l'intégralité des objectifs et missions qui leur ont été assignés par la loi du 11 février 2005.

Les critiques les plus sévères portent sur le traitement des demandes adressées aux MDPH :

- faute de personnels en nombre suffisant, l'accueil des personnes handicapées est souvent défaillant , notamment au téléphone. En outre, l'étendue de certains départements justifierait la création d'antennes décentralisées qui n'ont pas encore vu le jour ;

- dans de nombreux départements, le délai moyen de traitement des demandes excède - parfois très largement - la durée maximale de quatre mois fixée par la loi. Certaines MDPH ont en effet hérité du stock de demandes des Cotorep et des CDES, ce qui explique en grande partie l'allongement des délais et l'engorgement des CDAPH. La modernisation du système de traitement informatique et la mise en place de procédures rapides d'instruction des demandes les plus simples (renouvellements notamment), en formation restreinte de la CDAPH, devraient permettre d'accélérer la prise de décision ;

- la CNSA relève également l'insuffisance de la prise en compte des besoins des personnes handicapées lors de la réception des demandes. Dans de nombreuses maisons, l'aide à l'expression du projet de vie, qui constitue pourtant un élément fondamental de la nouvelle démarche de compensation du handicap, n'est pas formellement organisée. Il en résulte un nombre très modeste de plans personnalisés de compensation (PPC), qui devraient pourtant être intégrés à toute demande adressée à la MDPH. En 2006, moins de 10 % des demandes ont fait l'objet de l'élaboration d'un PPC.

Une seconde série de dysfonctionnements est liée à la gestion du personnel :

- les MDPH sont confrontées à des difficultés de recrutement de personnels spécifiques et qualifiés pour constituer les équipes pluridisciplinaires (manque de médecins notamment et d'agents administratifs) ;

- elles subissent également une rotation importante des personnels du fait du retour dans leur corps d'origine de ceux mis à disposition des MDPH par l'Etat. Outre la diminution préjudiciable des effectifs qui en résulte, ce manque de stabilité des personnels compromet la qualité de l'accueil et l'amélioration du traitement et du suivi des demandes ;

- enfin, les enquêtes réalisées confirment le niveau insuffisant de formation du personnel concernant les nouveaux dispositifs (PCH notamment) et la nécessité de renforcer la professionnalisation des équipes.

Votre commission sera attentive à ce que l'ensemble des MDPH soient pleinement opérationnelles dans tous les départements. Cela suppose, d'une part, que les moyens humains soient en adéquation avec les missions et activités de la MDPH , d'autre part, que les procédures d'instruction des demandes soient harmonisées et rationalisées afin que les personnes handicapées bénéficient de la même qualité d'accueil sur l'ensemble du territoire.

c) Une architecture institutionnelle incomplète

L'efficacité du système de compensation du handicap dépend du bon fonctionnement de l'ensemble des acteurs et structures qui composent la nouvelle architecture institutionnelle de la politique du handicap. Or, les premières études de la CNSA ou de la délégation interministérielle aux personnes handicapées mettent en évidence le caractère inopérant des fonds départementaux de compensation (FDC), qui dépendent des MDPH, ainsi que la faible activation des groupes d'entraide mutuelle (Gem).


La création tardive des fonds départementaux de compensation

Lors du vote de la loi du 11 février 2005, le législateur avait prévu la constitution, au sein de chaque MDPH, d'un fonds départemental de compensation, chargé d'aider les personnes handicapées à financer la part des aides restant à leur charge, après déduction des sommes perçues au titre de la PCH.

La non-reconduction l'an prochain des crédits inscrits en loi de finances pour 2007 pour les fonds départementaux de compensation du handicap, constitue un très mauvais signal pour les départements qui n'ont pas encore procédé à leur création. La participation de l'Etat est en effet essentielle, car elle joue un rôle moteur vis-à-vis des autres partenaires financiers du fonds.

Le Gouvernement a indiqué que ces fonds seraient néanmoins alimentés via un fonds de concours de la CNSA d'un montant équivalent aux crédits inscrits en loi de finances pour 2007, soit 14 millions d'euros. Il ne s'agit toutefois pas d'un financement durable. Aussi votre commission souhaiterait savoir quel avenir le Gouvernement entend réserver à ces fonds.


L'insuffisante mobilisation des groupes d'entraides mutuelles

Un groupe d'entraide mutuelle (Gem) est un lieu où les personnes souffrant de troubles psychiques peuvent se rendre, pour rompre l'isolement et partager des activités en commun à un rythme adapté à leur handicap. Des animateurs peuvent les accompagner dans leurs activités pour les faire progresser vers plus d'autonomie.

Plus de 600 000 personnes sont atteintes de troubles psychiques en France. L'existence de lieux d'accueil pour ces personnes, autres que les structures de soins, est essentielle pour favoriser l'insertion dans la cité. Votre commission est très attachée au maintien et au développement des Gem ou clubs d'accueil et d'entraide. Elle souhaiterait connaître les raisons qui ont conduit le Gouvernement à ne pas reconduire en 2008 les crédits qui y étaient consacrés cette année.

3. Améliorer la prise en charge collective des personnes handicapées

La compensation collective se fait également au travers de l'accueil en établissements et services médico-sociaux (ESMS) des personnes dont la situation familiale ou la nature du handicap le justifie.

a) La participation marginale de l'Etat au financement des établissements et services médico-sociaux

Le financement des ESMS dépend pour l'essentiel de l'assurance maladie et de la CNSA, l'Etat ne subventionnant qu'à la marge les projets d'adaptation de ces structures dans le cadre du contrat de plan Etat-région pour la période 2007-2013 suivant un calendrier défini par les programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (les Priac). Pour 2008, cette subvention s'élève à 1,7 million d'euros en crédits de paiements et à 8,3 millions en autorisations d'engagement.

L'ensemble est coordonné par la CNSA, qui en assure le pilotage budgétaire et financier au travers de la gestion de l'objectif global de dépenses (OGD).

La caisse est chargée de la répartition équitable sur le territoire des enveloppes limitatives de dépenses découlant de cet objectif, avec le souci de résorber les disparités existantes. L'OGD est fixé chaque année en fonction de la contribution des régimes d'assurance maladie arrêté au sein de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) médico-social fixé en loi de financement de la sécurité sociale et de l'apport propre de la CNSA.

En 2007, la contribution des régimes au financement des établissements accueillant des personnes handicapées s'élève à environ 7 milliards d'euros, auxquels s'ajoute l'apport de la CNSA, soit 215 millions. Au total, l'OGD - personnes handicapées représente 7,2 milliards, dont 390 millions de mesures nouvelles.

Evolution de l'objectif global de dépenses - personnes handicapées

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Ondam PH (1)

4 838

5 059

5 241

5 855

6 225

6 509

6 607

6 996

7 367

Taux d'évolution Ondam-PH (1)

3,78 %

4,22 %

3,43 %

6,03 %

6,01 %

3,01 %

4,73 %

5,57 %

5,30 %

OGD PH

-

-

-

-

6 659

6 834

7 232

7 644

Taux d'évolution OGD-PH (1)

--

-

-

6,01 %

5,38 %

5,81 %

5,51 %

5,70 %

Contribution CNSA

-

-

-

-

150

227

236

278

Mesures nouvelles

176

205

174

333

353

340

375

378

412

(1) Personnes handicapées Source : CNSA

Pour 2008, la contribution prévisionnelle des régimes d'assurance maladie inscrite dans les comptes de la CNSA s'établit à 7,4 milliards d'euros, soit une hausse de 5,3 %. Avec l'abondement complémentaire de la CNSA (278 millions), l'OGD - personnes handicapées atteindra 7,6 milliards, dont 412 millions au titre des mesures nouvelles.

b) Vers une meilleure programmation des investissements en faveur des établissements sociaux et médicosociaux

L'augmentation des crédits et notamment de ceux consacrés aux mesures nouvelles témoignent de la volonté du Gouvernement de poursuivre l'effort engagée en faveur de l'accroissement des capacités d'accueil des structures adaptées.


Les programmes interdépartementaux
d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie

La loi du 11 février 2005 a modifié les modalités de la programmation financière des investissements en faveur des établissements pour personnes âgées et handicapées, à travers la création des programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (Priac).

Ces nouveaux programmes, établis selon un rythme triennal, ont un triple objectif :

- ils visent à assurer une répartition mieux adaptée des enveloppes régionales et départementales ouvertes dans le cadre de l'OGD, grâce à un meilleur repérage des opérations prioritaires pour satisfaire les besoins les plus urgents ;

- ils doivent favoriser l'émergence d'une méthodologie commune pour évaluer le coût des opérations à financer et, in fine , permettre un rapprochement des tarifs de financement au sein d'une même région et entre régions ;

- ils doivent contribuer, grâce à une remontée régulière des informations concernant les besoins non satisfaits, à l'élaboration annuelle de l'Ondam « personnes handicapées » 19 ( * ) et à la définition des éventuels plans exceptionnels de création de places. Il s'agit de permettre à l'Ondam d'intégrer les priorités issues des régions, en toute connaissance de cause sur le coût de ces opérations.

En effet, le constat fait en 1999 d'un retard important dans la mise en place de structures d'accueil pour les personnes lourdement handicapées a justifié l'établissement, à compter de cette date, de plans pluriannuels de créations de places. Le dernier plan, lancé en 2005, s'est achevé en 2007. Ces plans ont été complétés par des enveloppes supplémentaires spécifiques, dédiées notamment au polyhandicap, aux handicaps rares ou aux traumatisés crâniens.

Installation de places et crédits engagés depuis 1999
(au 30 juin 2006)

Etablissement
ou service

Crédits engagés
(en millions d'euros)

Places autorisées

Places installées

Taux
de réalisation

CAMSP-CMPP

27,6

ns

ns

ns

CRA

1,7

ns

ns

ns

Sessad

130,3

9 043

7 878

87 %

IME, IEM, CEM

115,3

3 493

2 584

74 %

Itep

12,3

366

157

43 %

Accueil temporaire et équipe mobile enfants

0,8

22

2

9 %

Total enfants

287,9

12 924

10 621

82 %

Total Mas-Fam

499,7

14 153

8 741

62 %

Total Samsah et Ssiad

32,1

2 745

1 598

58 %

AJ-HT (Mas-Fam)

2,5

76

70

92 %

CPO-CRP

4,0

102

88

86 %

UEROS et équipe mobile adulte

4,1

84

63

75 %

Total adultes

542,3

17 160

10 560

62 %

TOTAL

830,3

30 084

21 181

70 %

Source : CNSA

Ainsi, pour l'année 2007 , les mesures nouvelles inscrites dans l'Ondam médico-social au titre de la dernière tranche de créations de places s'élevaient globalement à 238,2 millions d'euros 20 ( * ) (61,9 millions pour les enfants et 165,3 millions pour les adultes handicapés).

L'effort se poursuit en 2008 avec une enveloppe de 267 millions d'euros, augmentée de 12 % (dont 79 millions pour les enfants et 153 millions pour les adultes handicapés, le solde étant consacré au rebasage de certains établissements).

Les données fournies par la CNSA permettent d'avoir une information détaillée sur la répartition des créations de places par catégorie d'établissements. Elles sont retracées dans le tableau ci-après :

Création de places en établissements et services médicosociaux
pour personnes handicapées

(en nombre de places)

2007

2008

Places enfants

1 884

2 200

Itep

157

300

Sessad

1 238

1 250

Polyhandicapés

184

150

Autistes

305

300

Déficients intellectuels

-

200

Places adultes

4 938

5 425

Mas

964

910

Fam

1 663

1 690

Accueil temporaire

102

225

Ssiad - Samsah

2 209

2 100

Médicalisation foyers de vie

-

500

Source : d'après la CNSA

Ainsi, on observe la diversité des réponses apportées aux besoins exprimés dans le cadre des Priac pour la période 2008-2011, au travers de quatre tendances pour 2008 :

- le relèvement du nombre de places pour les enfants , notamment pour ceux présentant des troubles du caractère et du comportement (instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques[Itep]), pour les enfants autistes et pour leur accueil dans les services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad). Les taux de couverture des besoins exprimés sont, pour chaque structure, respectivement de 83 % (contre 25 % en 2007), 77 % (au lieu de 37 %) et 64 % (36 % en 2007) ;

- la diminution du nombre de places en services de soins destinés aux adultes en services d'accompagnement médico-social pour adulte handicapé (Samsah) et services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), qui apparaît plus en phase avec les besoins recensés dans le Priac, le taux de couverture atteignant 90 % ;

- l'augmentation des places d'accueil dans des structures spécialisées pour les enfants polyhandicapés, qui permet de couvrir les besoins exprimés dans les Priac à hauteur de 80 % ;

- enfin, les demandes exprimées pour un renforcement de l'accueil en maison d'accueil spécialisé (Mas) ou en foyer d'accueil médicalisé (Fam) sont satisfaites à 100 % si l'on intègre les cinq cents places nouvelles prévues en 2008 en foyers de vie médicalisés pour adultes.

Votre commission considère que la programmation des investissements en fonction des besoins exprimés localement, dans le cadre des Priac, est une bonne méthode. La CNSA, qui en assure le pilotage, est désormais en mesure de transmettre des informations plus précises sur les résultats de la mise en oeuvre de ces programmes, ce qui permet de mieux en apprécier l'opportunité et l'efficacité. Votre commission encourage la caisse à poursuivre cet effort d'évaluation et de contrôle des investissements ainsi réalisés et à retranscrire les données dans son rapport d'activité.

4. La protection des majeurs : une année de transition

Parce qu'elle vise à améliorer l'autonomie des personnes handicapées psychiques et mentales, la protection juridique des majeurs constitue un des éléments du droit à compensation.

Dans la plupart des cas, les mesures de tutelle et de curatelle sont confiées à la famille. Toutefois, si celle-ci ne peut en assumer la charge, leur gestion est déléguée à l'Etat, qui en confie l'exercice à des associations tutélaires qui se rémunèrent par prélèvement sur les ressources des majeurs, et à titre subsidiaire, par financement de l'Etat.

a) Des dépenses encore en forte hausse

En 2008, 244 millions d'euros seront consacrés au financement de ces mesures, soit une augmentation de plus de 20 % par rapport à 2007.

Cette hausse tient compte :

- d'un rythme de progression soutenu du nombre de mesures, estimé à un peu plus de 9 % en 2006 et 2007 et à 7,3 % pour 2008 : ainsi de 203 841 mesures en 2006 et 222 424 prévues pour 2007, le nombre de mesures de tutelle et curatelle d'Etat devrait atteindre 238 655 en 2008 ;

- de la revalorisation annuelle de la rémunération applicable aux mesures de tutelle, fixée, pour 2008, à 1 % ;

- de la structure de répartition des mesures : en 2006, les « mesures en établissement » représentaient environ un tiers des mesures déférées à l'Etat. Or, leur prix est de 60 % inférieur aux « mesures à domicile » ;

- de l'expérimentation du financement des services tutélaires par une dotation globale.

Votre commission se félicite de l'augmentation substantielle des crédits alloués aux mesures de protection des majeurs, dont elle déplorait la sous-évaluation depuis plusieurs années. Tel a été le cas en 2006 et il est très probable que les dépenses constatées, cette année, en fin d'exercice, soient supérieures aux crédits inscrits pour 2007.

Or, les prévisions pour 2008 s'appuient sur une hypothèse de croissance du nombre de mesures de 7 %, soit un taux inférieur aux hausses constatées les années précédentes qui avoisinent 9 %. En l'absence de réelles mesures d'économies, une nouvelle dérive du coût global des tutelles et curatelles de l'Etat est donc à prévoir en 2008.

b) Vers un système plus juste et plus efficace

La loi du 5 mars 2007, qui a modifié en profondeur le fonctionnement du système de protection juridique des majeurs, n'entrera en vigueur qu'à compter du 1 er janvier 2009. L'année 2008 sera ainsi consacrée à la préparation de sa mise en oeuvre.

Cette loi vise à la fois à :

- mieux adapter les mesures de protection aux besoins de la personne majeure protégée ;

- favoriser l'intervention d'une personne proche de la personne protégée ;

- professionnaliser et encadrer l'activité des différents intervenants extérieurs à la famille en les regroupant sous une nouvelle appellation commune de « mandataires judiciaires à la protection des majeurs » ;

- réformer le financement de la protection des majeurs, en généralisant le système expérimental de dotation globale et la participation des majeurs protégés au financement des mesures de protection.

Le système, ainsi réformé, devrait être à la fois plus juste et plus efficace :

- le recentrage des mesures de protection juridique sur l'altération des facultés mentales, l'intervention privilégiée d'une personne proche et la création de mesures subsidiaires moins contraignantes, telles que la mesure d'accompagnement social personnalisé (Masp), devraient permettre de ralentir la progression du nombre de mesures déléguées à l'Etat ;

- la généralisation du système de dotation globale à tous les services tutélaires, en consacrant l'abandon du système du « mois mesure », financé en fonction du nombre de mesures gérées, permettra à la fois de privilégier la qualité du service rendu et de garantir une juste rémunération de l'activité du service.

L'ensemble des acteurs s'accorde pour reconnaître à ce nouveau système l'intérêt de rompre avec la spirale inflationniste actuelle. Les économies attendues de cette réforme sont estimées à 76,7 millions d'euros en 2009, date de son entrée en vigueur, et pourrait atteindre, en 2013 , près de 150 millions .

Le financement du nouveau dispositif nécessitera le concours de l'Etat, des départements et des organismes de sécurité sociale, selon une clé de répartition qui avantage visiblement les départements. Mais il s'agit d'une juste compensation, compte tenu du coût probable de la mise en place de la mesure d'accompagnement social personnalisé.

C. CRÉER LES CONDITIONS D'UNE RÉELLE ÉGALITÉ DES CHANCES POUR LES PERSONNES HANDICAPÉES

1. Poursuivre l'effort en faveur de la scolarisation des enfants handicapés

La loi du 11 février 2005 pose le principe de l'inscription de droit des enfants handicapés dans l'établissement scolaire ordinaire de leur secteur, qui devient à ce titre leur « établissement de référence ». Toutefois, si l'école ordinaire n'est pas en mesure de répondre aux besoins spécifiques d'un enfant handicapé, l'équipe pluridisciplinaire et la CDAPH peuvent décider de l'orienter vers un établissement spécialisé, sur la base du projet personnalisé de scolarisation établi en concertation avec les parents, les enseignants et les personnes intervenant auprès de l'enfant.

a) Améliorer l'accueil des enfants handicapés dans l'école ordinaire

Cette inscription administrative quasi automatique a eu pour effet immédiat d'accroître le nombre d'enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire.

Nombre d'enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire

2003-2004

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008 (1)

Nombre d'enfants scolarisés

106 897

133 838

151 523

155 563

160 000

Progression

+ 24 %

+ 25 %

+ 13 %

+ 2,7 %

+ 2,8 %

(1) Estimation

A la rentrée 2006-2007, dans le premier degré , 71 399 élèves ont été accueillis individuellement dans une classe ordinaire et 39 684 élèves au titre d'une intégration collective dans une classe d'intégration scolaire (Clis). Dans le second degré , 33 919 élèves ont été accueillis individuellement en collège ou en lycée, 9 380 élèves au titre d'une intégration collective dans une unité pédagogique d'intégration (Upi) et 1 181 au sein d'un établissement régional d'enseignement adapté (Erea). Pour la rentrée scolaire de 2007-2008, le nombre total d'enfants handicapés accueillis est estimé à 160 000.

On observe également une nette augmentation de la durée hebdomadaire de scolarisation des élèves en milieu ordinaire . En effet, le nombre de scolarisations à temps très partiel, contestées à juste titre par les familles, est devenu marginal en 2007, dans la mesure où les CDAPH refusent désormais de valider des projets personnalisés de scolarisation prévoyant un accueil à l'école inférieur à un mi-temps.

Ces progrès ont pu être réalisés grâce au développement des moyens d'accompagnement des élèves handicapés et notamment grâce à :

- l'intensification du recrutement des auxiliaires de vie scolaire (AVS), dont le statut devrait progressivement évoluer vers celui d'assistant éducatif. Lors de la rentrée de 2006-2007, les effectifs cumulés des assistants d'éducation et des AVS représentaient 11 800 ETP et intervenaient auprès de 28 000 élèves handicapés ;

- l'augmentation du nombre d'interventions dans le cadre des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad), qui apportent à l'enfant handicapé une aide spécifique pendant ou en dehors du temps scolaire, en complément de l'enseignement dispensé par les professeurs de son établissement de référence ;

- la mobilisation de plus de deux cents enseignants itinérants spécialisés, qui, en l'absence de Sessad, rayonnent sur un secteur géographique déterminé, pour assurer le soutien pédagogique des élèves et le suivi de leur intégration, ainsi qu'un relais pédagogique spécialisé auprès des enseignants des classes ordinaires ;

- le développement des réseaux d'aide spécialisée aux élèves en difficulté (RASED) : créés depuis 1990, ils sont constitués d'enseignants spécialisés et de psychologues scolaires, qui travaillent, en coordination avec l'équipe pédagogique, à la création des conditions de réussite du cursus scolaire des élèves en difficultés ;

Ces efforts devraient être poursuivis en 2008, pour répondre aux demandes croissantes d'AVS. En effet, sous l'impulsion des mesures introduites par la loi du 11 février 2005, le nombre de décisions des CDAPH ouvrant droit à un accompagnement a considérablement augmenté.

C'est pourquoi, dans un précédent rapport 21 ( * ) , votre rapporteur a plaidé en faveur d'un renforcement des effectifs d'AVS et d'une réelle professionnalisation de ces métiers. Invitant les pouvoirs publics à anticiper l'afflux de demandes, votre commission a recommandé, d'une part, de développer ces filières en orientant dès maintenant les candidats potentiels, d'autre part, de mobiliser les possibilités offertes par la validation des acquis de l'expérience.

Il en va de même pour les enseignants, qui devraient être davantage préparés à l'accueil d'élèves handicapés. L'intégration d'un module spécifique durant la formation initiale à l'institut universitaire de formation des maîtres (IUFM), mais aussi dans le cadre de la formation continue est aujourd'hui indispensable pour permettre une meilleure intégration scolaire des enfants handicapés.

b) Favoriser la scolarisation des enfants accueillis en établissements

Pour les enfants dont les besoins ne peuvent être pris en compte de façon satisfaisante dans l'école ordinaire, la loi maintient la possibilité d'un accueil dans les établissements d'éducation spéciale.

A ce jour, plus de 119 000 familles ont adopté cette solution pour leur enfant. Parmi eux, la moitié est effectivement scolarisée dans l'établissement, un quart est scolarisé à temps plein ou partiel dans une école ordinaire avec laquelle l'établissement a passé une convention, tandis qu'un quart n'est pas scolarisé du tout.

Cette dernière situation s'explique le plus souvent par la lourdeur du handicap : 94 % des enfants polyhandicapés et 78 % de ceux qui sont affectés par un retard mental profond ne sont pas scolarisés.

Répartition des enfants accueillis en établissements d'éducation spéciale
en fonction de leur mode de scolarisation

Nombre d'enfants

Proportion

Enfants scolarisés

91 000

76 %

- dont enfants scolarisés à l'école ordinaire

31 850

26 %

- dont enfants scolarisés dans un établissement d'éducation spéciale

59 150

50 %

Enfants non scolarisés

28 000

24 %

Total des enfants accueillis

119 000

100 %

La part importante des enfants non scolarisés en établissement pose la question cruciale de l'intégration de ces structures dans le système éducatif .

Il est vrai que le développement des prises en charge mixtes, qui offrent une réponse équilibrée et satisfaisante pour les enfants scolarisés, permet de développer les partenariats entre les établissements médico-sociaux et l'école.

En outre, la scolarisation d'un plus grand nombre d'enfants handicapés accueillis en établissements, même à temps partiel, devraient favoriser une plus grande disponibilité des personnels et un accompagnement renforcé des enfants lourdement handicapés.

Enfin, la loi du 11 février 2005 a prévu d'intégrer au service public de l'éducation les enseignants spécialisés intervenant en établissements et services médico-sociaux. Cela doit se traduire par la création d'unités d'enseignements au sein des établissements, pilotées par le ministère de l'éducation nationale. L'installation de ces unités a subi un retard important du fait d'un désaccord de fond entre les associations et l'Etat sur les conditions de fonctionnement de ces unités. Votre commission souhaite que la recherche d'une solution médiane permette rapidement de remédier à cette situation, afin que ces unités puissent voir le jour dans tous les établissements concernés.

2. Mobilier tous les acteurs en faveur de l'emploi des personnes handicapées

L'incitation à l'activité professionnelle des personnes handicapées constitue une des priorités du projet de loi de finances pour 2008. En augmentation de 3,1 % par rapport à 2007, les crédits consacrés au financement de cette action représentent près de 29 % du programme « handicap et dépendance », soit au total 2 343,3 millions d'euros. Les politiques mises en oeuvre ont une triple finalité :

- développer les capacités d'accueil dans le secteur protégé ;

- favoriser l'accès des personnes handicapées à l'emploi en milieu ordinaire ;

- mettre en place des parcours d'insertion durable dans l'emploi pour les travailleurs handicapés.

a) Le développement des capacités d'embauches en milieu protégé

Pour certains travailleurs handicapés, le milieu protégé constitue l'unique possibilité d'exercer une activité professionnelle, alors que d'autres salariés conçoivent ces structures comme une étape de transition avant une insertion durable dans le milieu ordinaire.

Aussi, l'augmentation du nombre de places offertes en établissements et services d'aide par le travail (Esat) ou dans les nouvelles entreprises adaptées (EA) constitue un des pivots des politiques menées en faveur de l'emploi des personnes handicapées.


La poursuite du programme de création de places en Esat

Les Esat ont une vocation à la fois économique, éducative et médico-sociale. Leur objectif est de permettre aux personnes handicapées ayant une capacité de travail inférieure à un tiers de la capacité normale d'exercer une activité professionnelle grâce à un soutien médico-social et éducatif personnalisé.

Il revient à la CDAPH d'établir l'incapacité durable ou momentanée de ces personnes à exercer une activité professionnelle en milieu ordinaire et d'apprécier l'opportunité d'une orientation vers ce type d'établissement.

Evolution du nombre de places financées en Esat

(en millions d'euros)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Nombre de places

98 811

101 811

104 811

107 811

110 811

112 811

114 811

Crédits

1 051

1 096

1 125,7

1 188,7

1 249,6

1 293,8

1 331,4

Pour 2008, 1,33 milliard d'euros seront consacrés aux Esat, soit une progression de 2,9 % par rapport aux crédits ouverts en 2007. Cette augmentation permet de financer :

- la création de 2 000 places supplémentaires, dont 1 000 places expérimentales dites « d'Esat hors les murs » destinées à des salariés handicapés souhaitant travailler en milieu ordinaire tout en continuant à bénéficier de l'accompagnement de l'Esat ;

- la revalorisation du coût moyen annuel par place, qui s'élève, pour 2008, à 11 698 euros, grâce à une augmentation de 0,8 % des dépenses consacrées aux personnels (environ 75 % du coût global), qui encadrent les travailleurs handicapés.

Cela porte ainsi à 114 811 places la capacité d'accueil de ces structures, dont 10 000 places créées depuis 2005 . Si votre commission ne peut que se réjouir de l'accroissement des capacités d'accueil des nouveaux Esat, elle s'inquiète toutefois de leur fragilité économique et financière et du faible taux d'occupation des places offertes dans certains établissements.

Il conviendrait, d'une part, de renforcer l'accès privilégié des Esat aux marchés publics pour favoriser le développement économique de ces établissements, d'autre part, d'accélérer le traitement des demandes de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) par la CDAPH.


Un budget contraint pour les entreprises adaptées

Depuis la loi du 11 février 2005, les entreprises adaptées (EA) sont considérées comme une des composantes du milieu ordinaire de travail bien qu'il demeure protégé. En effet, les EA conservent leur mission sociale, qui est d'employer majoritairement des personnes handicapées à efficacité réduite et en difficulté pour l'accès à l'emploi. Le statut la personne handicapée est toutefois celui d'un salarié de droit commun : il perçoit une rémunération, à la charge de l'employeur, au moins égale au Smic.

Cependant, pour aider les EA dans leur mission et tenir compte de leur spécificité, l'Etat leur accorent deux types d'aides : une aide au poste et une subvention spécifique. Ces aides sont financées dans le cadre du programme 102 de la mission « Travail et emploi ».

Places financées en entreprises adaptées

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Entreprises adaptées

547

559

559

586

586

586

586

Travailleurs handicapés

18 760

19 444

19 681

20 055

19 225

20 012

19 625

Source : documents budgétaires

Pour 2008, les crédits demandés s'élèvent au total à 285,6 millions d'euros :

- 42 millions d'euros au titre de la subvention spécifique, soit une diminution de 9,4 % par rapport à 2007. Votre commission s'étonne de cette diminution alors qu'un plan de soutien aux entreprises adaptées a été lancé en 2006 ;

- 243,6 millions d'euros pour financer 19 625 aides au poste, soit une suppression de 387 postes . En effet, compte tenu de la revalorisation du Smic, le maintien de la dotation au même niveau qu'en 2007 aboutit à la suppression de près de 2 % des postes en EA.

Selon le Gouvernement, l'absence de revalorisation de l'enveloppe consacrée à ces aides par rapport à 2007 résulterait d'une consommation partielle des crédits les années précédentes. Pour leur part, les associations expliquent cette non-consommation par le blocage systématique des projets de développement économique des EA, ce qui, par voie de conséquence, les place dans l'impossibilité de procéder à de nouvelles embauches. Le Gouvernement, questionné par votre rapporteur sur ces dysfonctionnements, a déclaré travailler avec les EA pour améliorer la présentation de leurs projets de développement, afin qu'ils soient conformes aux exigences requises pour l'obtention d'une subvention.

Votre commission déplore néanmoins cette diminution de crédits qui place les entreprises adaptées dans une situation économique et financière fragilisée. Pourtant, ces entreprises sont un des maillons essentiels du parcours d'intégration des travailleurs handicapés en milieu ordinaire. Leur rôle doit à l'avenir être conforté . Votre commission souhaite que les blocages évoqués par les associations et l'administration elle-même soient rapidement surmontés en 2008 et que, le cas échéant, les projets aboutis des EA puissent être financés, si nécessaire, par l'abondement de crédits supplémentaires en cours d'année.

b) Poursuivre l'intégration des personnes handicapées en milieu ordinaire

La loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés a mis en place une obligation d'emploi des travailleurs handicapés et assimilés pour tous les établissements de vingt salariés et plus dans la proportion de 6 % de l'effectif total de leurs salariés. En cas de non respect de cette obligation, les entreprises assujetties doivent acquitter une contribution à l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph), qui constitue désormais un rouage essentiel de la politique d'insertion professionnelle des personnes handicapées.

En 2004 (derniers chiffres connus), 244 800 personnes handicapées étaient employés dans les établissements assujettis à l'obligation d'emploi. Jusqu'au 31 décembre 2005, l'obligation d'emploi était définie en référence à un taux d'emploi de 6 % des effectifs salariés (au sens de l'article L. 620-10 du code du travail), après déduction des catégories d'emploi exigeant des conditions d'aptitude particulières.


• L'extension du champ de l'obligation d'emploi

La loi du 11 février 2005, tout en conservant les principes et le quota de 6 % posés par la loi précitée de 1987, a opéré plusieurs aménagements, notamment en ce qui concerne les bases de calcul du taux d'emploi des travailleurs handicapés :

- les bénéficiaires de l'obligation d'emploi comprennent désormais les titulaires d'une carte d'invalidité et ceux de l'AAH et sont comptabilisés pour une unité dès lors qu'ils ont été présents au moins six mois au cours des douze derniers mois écoulés. Toutefois, pour les salariés sous contrat de travail temporaire ou mis à disposition par une entreprise extérieure, la prise en compte s'effectue au prorata de leur temps de présence ;

- les catégories d'emplois exigeant des conditions d'aptitude particulières sont réintégrées dans le calcul de l'effectif total des salariés concernés par l'obligation d'emploi ;

- la loi ouvre, en outre, la possibilité de moduler la contribution des entreprises à l'Agefiph, pour tenir compte des efforts réalisés par l'employeur pour embaucher des travailleurs lourdement handicapés, les maintenir dans l'emploi, aménager leur poste de travail ou leur offrir des postes exigeant des aptitudes particulières. Ces efforts peuvent également être récompensés par le versement d'une aide à l'emploi ;

- par ailleurs, un établissement peut remplir son obligation d'emploi, en appliquant un accord de branche ou de groupe, qui crée les conditions d'une insertion durable des personnes handicapées dans le milieu ordinaire ;

- enfin, l'obligation d'emploi est étendue à la fonction publique et s'accompagne de la création d'un fonds dédié, le fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), pour collecter les contributions des employeurs publics ne respectant pas l'obligation d'emploi de personnes handicapées.

Pour inciter les employeurs à mieux respecter leur obligation d'emploi à l'égard des travailleurs handicapés, la loi a également augmenté le plafond de la contribution pour les entreprises qui n'ont embauché aucun travailleur handicapé, n'ont passé aucun contrat avec le secteur protégé ou n'appliquent aucun accord de branche ou de groupe pendant une période supérieure à trois ans. Ce délai permet aux entreprises de monter en charge progressivement pour appréhender et appliquer la législation sur l'obligation d'emploi.

L'impact de ces mesures, qui ne sont entrées en vigueur qu'en 2007, au titre de la déclaration d'emploi pour 2006, n'est pas encore connu. On sait toutefois que, pour 2004, le taux moyen d'emploi des personnes handicapées était de 4,38 %. Avec le nouveau mode de calcul institué par la loi du 11 février 2005, ce taux est ramené à 2,67 %.

Il en résulte un taux de chômage très élevé pour les personnes handicapées (19 %), plus de deux fois supérieur à celui de la population active valide. Cette situation s'explique en partie par la faible employabilité des travailleurs handicapés, liée à leur bas niveau de qualification et à une durée moyenne de chômage supérieure à un an.


• Les nouvelles mesures envisagées par le Gouvernement pour favoriser l'insertion professionnelle des personnes handicapées

Afin de créer les conditions d'un meilleur accès des personnes handicapés au marché du travail, le Gouvernement a proposé d'agir dans quatre directions :

- étendre les missions de l'Agefiph à l'amélioration de l'accessibilité des locaux professionnels, qui conditionne très largement l'accès à l'emploi ;

- inciter les PME, pour l'heure non soumises à l'obligation d'emploi, à recruter des personnes handicapées ;

- mobiliser tous les acteurs de la formation professionnelle (Afpa, régions, Agefiph, FIPHFP, centres nationaux de la fonction publique territoriale, etc.) pour mettre en place des plans d'accès à la formation pour les travailleurs handicapés ;

- renforcer l'accompagnement vers l'emploi des personnes handicapées, notamment grâce à la réalisation de bilans d'employabilité par les MDPH et les réseaux « Cap emploi ».

La mise en oeuvre de ces quatre priorités suppose la mobilisation de tous les acteurs et en premier lieu de l'Agefiph et du FIPHFP.


• Le dynamisme exemplaire de l'Agefiph

En 2007, l'Agefiph a voté un budget initial de 486 millions d'euros en ressources, qui correspond au montant estimé des sommes collectées au titre de l'obligation d'emploi, et de 469,4 millions d'euros en dépenses, dont environ 435,8 millions d'euros pour l'intervention.

En réalité, la collecte s'est avérée beaucoup plus élevée que la prévision initiale : près de 600 millions d'euros ont été versées par les entreprises, en raison du très fort impact des modifications législatives relatives au calcul de la contribution, en vigueur à partir du 1 er janvier 2006.

Le différentiel entre la collecte réelle et le budget initial a conduit le conseil d'administration de l'Agefiph à proposer la mise en oeuvre d'actions complémentaires innovantes.

Sur cette somme, 64 millions d'euros ont été consacrés au financement du réseau « Cap emploi », auxquels se sont ajoutés 22,1 millions de subvention de l'Unedic, qui a ainsi doublé sa participation par rapport à la convention précédente. Pour 2008, l'effort en faveur du réseau des « Cap emploi » sera poursuivi à un niveau au moins équivalent.


La nouvelle convention « Cap emploi » de 2007 - 2008

La loi du 11 février 2005 a reconnu l'existence juridique des organismes de placement spécialisés regroupés sous le label « Cap emploi ».

Elle a également instauré le principe de conventionnement préalable de ces organismes de placement spécialisés et celui de leur financement par l'Agefiph et le FIPHFP. Elle définit précisément leur mission et indique les modalités du pilotage du réseau « Cap emploi » conjointement par l'Etat, le service public de l'emploi, l'Agefiph, le FIPHFP et les représentants du réseau (Unith et Ohé-Prométhée).

La renégociation de la convention 2004-2006, a eu lieu au cours du dernier trimestre 2006, en lien avec les évolutions entraînées par les dispositions de la loi du 11 février 2005 : cette nouvelle convention révise le périmètre des bénéficiaires, organise la relation avec les MDPH, précise les modalités d'intervention du FIPHFP et établit un nouveau cadre de coopération avec le service public de l'emploi.

Elle a abouti à un protocole d'accord le 26 janvier 2007 actant les termes de la nouvelle convention « Cap emploi » pour 2007-2008 et les modalités de suivi de son application sur le plan national. L'ensemble des Cap emploi ont signé cette convention.

Dans le même temps, la relation avec l'ANPE a été également renégociée. La nouvelle convention « ANPE - Agefiph » pour 2007-2008, signée le 15 novembre 2006, est marquée par des évolutions substantielles, qui se traduisent par les objectifs suivant :

- l'augmentation de 10% du taux de sorties vers l'emploi des personnes handicapées ;

- l'accroissement de la part des reprises d'emploi réalisées au moyen d'un contrat de travail de durée égale ou supérieure à six mois ;

- la hausse de 50 % l'effort de formation en faveur des demandeurs d'emploi handicapés ;

- la diminution de la durée moyenne des parcours de retour à l'activité ;

- la réduction de la part des offres d'emploi non satisfaites.

Au total, 64 000 demandeurs d'emploi handicapés (dont 4 000 très éloignés de l'emploi) devront faire l'objet d'un projet personnalisé d'accès à l'emploi.

Dans le cadre du renouvellement de la convention « Cap emploi », l'Agefiph a décidé de mettre en oeuvre plusieurs actions à la fois ponctuelles et ciblées :

- des plans d'action régionaux ont été signés avec l'Afpa et les conseils régionaux, afin de faciliter l'accès des personnes handicapées à l'offre de formation de droit commun ;

- parallèlement, l'opération «  Handicompétence », lancée pour deux ans afin de développer une offre de formation adaptée dans les secteurs d'activité les plus porteurs pour le recrutement des personnes handicapées, a donné lieu à la mise en place de formations en entreprise préalables à l'embauche (Fepe), destinées à des demandeurs d'emploi orientés vers un poste préalablement identifié ;

- enfin, l'expérimentation, au cours du dernier trimestre de 2007, d'une prime initiative emploi (PIE), versée à toute entreprise qui embauche en CDD ou en CDI un travailleur handicapé pour une durée minimale d'un an. Son montant varie de 3 000 à 6 000 euros en fonction de la durée hebdomadaire moyenne de l'emploi proposé (celle-ci ne pouvant être inférieure à seize heures par semaine en moyenne annuelle). Cette mesure devrait favoriser l'emploi durable des personnes handicapées confrontées à des difficultés particulières d'insertion sociale ou professionnelle. Les personnes concernées doivent remplir en effet plusieurs critères attestant de leur faible employabilité. Elles doivent être soit à la recherche d'un emploi depuis au moins douze mois, soit âgées de quarante-cinq ans et plus, soit bénéficier d'un minimum social (RMI, ASS, AAH, API), soit encore rencontrer des difficultés spécifiques du fait de la nature de leur handicap.

Votre commission salue le travail exemplaire réalisé par l'Agefiph : le nombre de personnes handicapées en emploi a en effet augmenté d'environ 4 % et le nombre de chômeurs handicapés a baissé de plus de 8 %, pour la première fois, à un rythme quasi équivalent à celui de l'ensemble des demandeurs d'emploi. On observe également un changement de l'attitude des entreprises, qui laisse augurer une nette amélioration de la situation de l'emploi pour les personnes handicapées dans les prochaines années.


• L'inertie inquiétante du fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique

La situation est bien différente s'agissant de la fonction publique. Créé par la loi du 11 février 2005, le FIPHFP a connu un démarrage difficile.

Ainsi, à la fin du premier semestre de 2007, les sommes versées par les employeurs représentaient au total près de 130 millions d'euros : 54,8 millions d'euros en 2006 et 74,2 millions d'euros au titre de l'année 2007.

A la même date, la plate-forme chargée d'étudier les dossiers et d'attribuer les aides n'avait reçu au total que 166 demandes et seules 145 d'entre elles avaient donné lieu à paiement, pour un montant d'environ 343 700 euros . L'aménagement des postes de travail représente la plus grande partie des aides accordées ainsi que le financement de prothèses auditives. Viennent ensuite les aides versées pour couvrir la prise en charge des services d'auxiliaires de vie.

Au 30 juin 2007, la trésorerie cumulée du fonds s'élevait à environ 130 millions d'euros.

Votre commission souhaite que le FIPHFP mette rapidement en oeuvre les actions de nature à assurer le respect des obligations d'emploi dans la fonction publique . Il pourra s'inspirer en la matière des initiatives fructueuses de l'Agefiph. Il serait par exemple opportun qu'il participe dès à présent au financement du réseau des « Cap emploi » qui a déjà démontré son efficacité.

3. Anticiper la mise en oeuvre de l'obligation d'accessibilité

Les articles 41, 45 et 46 de la loi « handicap » ont consacré des avancées majeures en termes de mise en accessibilité du cadre bâti, de la voirie et des transports en retenant le principe selon lequel, « la chaîne du déplacement, qui comporte le cadre bâti, la voirie, les aménagements des espaces publics, les systèmes de transport et leur intermodalité, est organisée pour permettre son accessibilité dans sa totalité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite ».

L'obligation d'accessibilité doit prendre en compte tous les types de handicap (moteur, sensoriel, psychique, mental et cognitif) et s'applique à l'ensemble des constructions (maisons individuelles, commerces, établissements publics...) et modes de transports.

Le délai de mise en conformité, variable selon les types de construction, ne peut toutefois excéder dix ans à compter de la promulgation de la loi, soit 2015. Cela suppose donc en amont de dresser, dès que possible, un bilan global d'accessibilité, pour pouvoir programmer les investissements nécessaires à la réalisation des aménagements et travaux de mise en conformité.

Une délégation ministérielle à l'accessibilité, placée sous l'autorité du ministre en charge de l'équipement et des transports, a été mise en place pour engager la mise en oeuvre des actions à mener dans ce domaine et en assurer la cohérence et l'effectivité.

Au niveau local, la loi a prévu la création, dans toutes les communes de plus de 5 000 habitants, d'une commission communale pour l'accessibilité chargée d'établir un diagnostic sur l'accessibilité du cadre bâti existant, de la voirie, des espaces publics et des transports et de faire des propositions pour en améliorer l'effectivité. Si la répartition des compétences l'exige ou si l'intercommunalité regroupe plus de 5 000 habitants, une commission intercommunale doit être mise en place. Dans les cas où l'intercommunalité ne couvre qu'une partie du champ concerné par l'obligation de mise en conformité (voirie et transports par exemple), les commissions communales et intercommunales doivent coexister et établir un diagnostic dans les domaines de compétences qui les concernent.

A ce jour, peu de communes ont encore avancé sur ce dossier. Or l'ampleur des travaux à réaliser justifierait une anticipation des échéances et une programmation des chantiers et investissements à mettre en oeuvre. Pour cette raison, votre commission a souhaité que les audits d'accessibilité établis par les communes ou les communautés de communes soient remis avant le 31 décembre 2008 22 ( * ) , et non en 2011 comme les textes l'ont prévu initialement. Le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité s'est engagé à donner satisfaction à cette demande 23 ( * ) .

A cet égard, votre commission regrette que l'Etat ne se donne pas les moyens d'être exemplaire. En effet, le projet de loi de finances pour 2008 n'a prévu aucun crédit pour alimenter le fonds interministériel pour l'accessibilité des personnes handicapées (Fiah), mis en place en 1995 pour accélérer les travaux de mise en conformité des bâtiments ministériels. Le Fiah a pourtant contribué au financement de plus de 580 opérations depuis sa création, dont environ 180 projets au titre de l'année 2007, grâce à un abondement exceptionnel de 25 millions d'euros apporté par le biais d'un fonds de concours de la CNSA.

Concernant les maisons individuelles et les commerces , votre commission, consciente des résistances fortes qui subsistent sur ce sujet, suggère d'étudier l'opportunité de la mise en place d'aides fiscales incitatives pour les commerçants et les particuliers.

*

* *

Considérant que les crédits consacrés aux politiques de solidarité et aux actions en faveur des personnes handicapées et dépendantes sont de nature à permettre la mise en oeuvre des priorités fixées dans ces domaines, au vu des observations formulées dans le présent avis et sous réserve des amendements qu'elle vous propose, votre commission s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits de la mission interministérielle « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2008 et des articles 49 à 51 bis qui lui sont rattachés.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 49 (art. L. 861-2 code de la sécurité sociale) - Unification des conditions d'accès à la couverture maladie universelle complémentaire

Objet : Cet article harmonise les modalités de calcul des ressources prises en compte lors de l'ouverture du droit à la couverture maladie universelle complémentaire et lors de son renouvellement.

I - Le dispositif proposé

Selon les termes de l'article L. 861-1 du code de la sécurité sociale, la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) est ouverte aux personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond défini par décret 24 ( * ) , qui varie selon le nombre de personnes à charge.

L'ensemble des ressources du foyer sont prises en compte, y compris les allocations logement, à raison d'un forfait qui varie en fonction de la composition du foyer.

L'article 155 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 a prévu que, à compter du 1 er janvier 2006, ce forfait soit équivalent à celui pris en compte pour les allocataires du RMI et ce, pour les seules nouvelles demandes d'attribution de la CMU-c. Actuellement, les prestataires qui font une demande de renouvellement bénéficient donc encore du régime ancien pour lequel le forfait logement est légèrement inférieur à celui fixé pour le RMI. Ainsi, les ressources prises en compte pour l'ouverture du droit à la CMU-c et celles requises pour l'obtention de son renouvellement ne sont pas exactement identiques :

Montant du forfait logement pris en compte selon la composition du foyer

Composition du foyer

Montant du forfait
lors de l'ouverture du droit

Montant du forfait
lors du renouvellement

Une personne

12 % du montant mensuel du RMI*

12 % du montant mensuel du RMI*

Deux personnes

16 % du montant mensuel du RMI fixé pour deux personnes

14 % du montant mensuel du RMI fixé pour deux personnes

Trois personnes et plus

16,5 % du montant mensuel du RMI fixé pour trois personnes

14 % du montant mensuel du RMI fixé pour trois personnes

* Le RMI s'élève à 440,86 euros par mois pour une personne seule, 661,29 euros pour deux personnes et 132,26 par personne supplémentaire (forfait logement inclus) .

Source : d'après l'article R. 861-7 du code de la sécurité sociale
et l'article R. 262-7 du code de l'action sociale et des familles

Le présent article vise à corriger cette iniquité, en alignant les conditions de prises en compte des allocations de logement pour un renouvellement de CMU-c sur celles qui sont en vigueur pour une première demande.

Cette mesure, applicable à partir du 1 er janvier 2008, devrait entraîner une réduction du nombre de bénéficiaires potentiels de la CMU-c et permettre ainsi d'économiser 14 millions d'euros .

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve l'alignement des conditions d'octroi de la CMU-c lors de son renouvellement sur celles qui prévalent pour une première demande.

Il est en effet anormal qu'un barème différent soit appliqué selon qu'il s'agit d'une première demande ou d'un renouvellement. Il en résulte une rupture d'égalité singulière entre des personnes qui disposent pourtant de ressources identiques.

Il est vrai que, pour des raisons d'économies, le Gouvernement a fait le choix d'un alignement sur le montant de forfait logement le plus élevé, ce qui pénalise les personnes disposant d'un niveau de ressources inférieur au nouveau plafond, forfait de logement déduit, soit 553,10 euros.

Par ailleurs, cette mesure permettra de simplifier les procédures d'instruction des dossiers par l'assurance maladie. En effet, l'application de conditions d'accès différentes, selon qu'il s'agit d'une première demande ou d'un renouvellement, a occasionné des difficultés et parfois des retards dans le traitement des demandes.

Votre commission vous propose donc d'adopter cet article sans modification.

Article 50 (art. L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles) - Conditions de prise en charge par l'Etat du coût des médicaments des bénéficiaires de l'aide médicale de l'Etat

Objet : Cet article conditionne la prise en charge à 100 % des médicaments pour les bénéficiaires de l'aide médicale d'Etat à l'acceptation des spécialités génériques si elles existent.

I - Le dispositif proposé

Selon les termes de l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles, les dépenses prises en charge dans le cadre de l'aide médicale d'Etat (AME) comprennent les consultations médicales à l'hôpital ou en ville, les frais de transport afférents aux soins prodigués, les prescriptions médicales et le forfait hospitalier.


L'aide médicale d'Etat

Instaurée par la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle, l'AME est un dispositif d'accès aux soins gratuit pour les personnes qui ne peuvent bénéficier d'aucune autre protection sociale (couverture maladie universelle complémentaire ou sécurité sociale).

Pour bénéficier de cette aide, les personnes doivent remplir les conditions énoncées à l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles. On distingue trois cas :

- les personnes de nationalité étrangère, qui résident en France de façon ininterrompue depuis plus de trois mois, ne disposent pas d'un titre de séjour et justifient de ressources annuelles inférieures ou égales au plafond fixé pour l'accès à la CMU-c ;

- les personnes gardées à vue sur le territoire français, qu'elles résident ou non en France, si leur état de santé le justifie ;

- les personnes présentes sur le territoire français, ne résidant pas en France et qui font l'objet d'une décision individuelle de prise en charge de leurs dépenses de soins du ministre en charge de l'action sociale, si leur état de santé le justifie. Dans ce cas, la couverture peut n'être que partielle.

Attribuée pour un an, l'AME peut être reconduite, sur demande, deux mois avant le terme de l'année d'admission, dès lors que le bénéficiaire continue de remplir les conditions requises.

Comme pour la CMU-c, cette couverture totale est assortie d'une dispense d'avance des frais. Celle-ci vaut également pour les médicaments : contrairement aux autres assurés sociaux (bénéficiaires de l'assurance maladie et de la CMU-c), les titulaires de l'AME ont en effet la possibilité de refuser le médicament générique proposé par le pharmacien en remplacement de la prescription médicale, sans subir aucune conséquence financière, ni être privés de la dispense d'avance de frais prévue à l'article L. 251-2 précité.


Le médicament générique

Un médicament générique est la stricte copie d'un médicament original dont le brevet est tombé dans le domaine public. Les concepteurs de nouvelles molécules en déposent le brevet auprès de l'institut national de la propriété industrielle (INPI), qui leur assure l'exclusivité de leur commercialisation pendant vingt ans, ce qui leur permet d'amortir les coûts de recherche et de développement.

Lorsque le brevet expire, le médicament tombe dans le domaine public. Un médicament générique, copie conforme du médicament de référence (ou princeps), peut alors être fabriquée et commercialisée sous un nom différent par des laboratoires pharmaceutiques agréés.

Celui-ci doit répondre aux mêmes critères de qualité et de sécurité que le produit de référence. Il fait l'objet d'un contrôle par l'Afssaps qui vérifie qu'il ait :

- la même composition en principes actifs ;

- des modes d'administration identiques.

L'article L. 601-6 du code de la santé publique définit la spécialité comme « celle qui a la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même forme pharmaceutique et dont la bioéquivalence avec la spécialité de référence est démontrée par les études de biodisponibilité appropriée. »

Depuis juin 1999, tout médicament peut être remplacé par son générique s'il existe grâce à l'accord conclu entre les pharmaciens et le gouvernement et qui prévoit que les pharmaciens peuvent proposer des médicaments génériques en remplacement des médicaments prescrits. Ils doivent alors indiquer sur l'ordonnance le nom du médicament délivré et la posologie proposée. Toutefois, le médecin prescripteur peut refuser la substitution.

Le médicament générique est généralement vendu à un prix entre 30 % et 50 % inférieur au prix d'origine.

Or, l'article 56 de la loi n° 2006-1640 de financement de la sécurité sociale pour 2007 comporte une disposition, votée à l'initiative de votre commission, réservant le bénéfice du tiers payant en pharmacie aux assurés qui acceptent la délivrance d'un médicament générique, sauf si la substitution au médicament prescrit est susceptible de causer des problèmes de santé particuliers. En outre, elle prévoit que les zones géographiques ayant atteint le taux de substitution des génériques fixé par les partenaires conventionnels peuvent maintenir le bénéfice du tiers payant aux assurés sociaux. Ainsi, la mesure, incitative mais non contraignante, n'a pas pour objet de pénaliser les assurés qui bénéficieront toujours du remboursement de leurs médicaments.

Tel n'est pas le cas de la mesure proposée par cet article pour les bénéficiaires de l'AME. En effet, il s'agit ici de conditionner la prise en charge complète des médicaments, et non la simple dispense d'avance de frais, à l'acceptation par le patient de la spécialité générique, lorsqu'elle existe. Toutefois, cette disposition ne s'applique pas lorsque :

- le médicament prescrit appartient à un groupe générique soumis au tarif forfaitaire de responsabilité défini à l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ;

- dans le groupe, il existe des génériques dont le prix est supérieur ou égal à celui du princeps ;

- le prescripteur a exclu cette possibilité, pour des raisons particulières tenant au patient, par une mention expresse portée sur la prescription, et sous réserve, en ce qui concerne les spécialités figurant sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, que cette substitution s'effectue dans les conditions prévues par l'article L. 162-16 de ce code (troisième alinéa de l'article L. 5125-23 du code de la santé publique).

Les économies attendues de cette mesure sont limitées à environ 5 millions d'euros.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements d'ordre rédactionnel.

III - La position de votre commission

Votre commission convient de la nécessité de contenir les dépenses d'AME qui ont connu une croissance significative depuis la création de cette aide. Les crédits qui lui sont consacrés sont passés de 139 millions d'euros en 2000 à 413 millions d'euros au titre du présent projet de loi de finances pour 2008, accompagnant ainsi l'augmentation du nombre de bénéficiaires.

Cette mesure s'inscrit en outre dans un contexte de responsabilisation des assurés et de maîtrise médicalisée des dépenses de santé : mise en place de tickets modérateurs, participation forfaitaire des assurés aux actes médicaux ou aux consultations, avances de frais conditionnelles ou, plus récemment, instauration de nouvelles franchises médicales et d'un contrôle médical renforcé.

Le présent article vise donc à responsabiliser également les prestataires de l'AME, sans remettre en cause leur accès gratuit aux soins, ceux-ci étant intégralement couverts. S'agissant des médicaments, leur prise en charge est assurée dès lors qu'ils ne refusent pas les médicaments génériques.

En conséquence, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 51 (art. L. 524-1 et art. L. 821-1 du code de la sécurité sociale ; article 25 de la loi n° 90-86 du 23 janvier 1990) - Encadrement des conditions d'accès des ressortissants communautaires à l'allocation de parent isolé et à l'allocation aux adultes handicapés

Objet : Cet article subordonne l'accès des ressortissants communautaires et de l'espace économique européen à l'allocation de parent isolé et à l'allocation aux adultes handicapés à une condition de présence en France de trois mois.

I - Le dispositif proposé

Aux termes des articles L. 512-1, L. 512-2 et L. 524-1 du code de la sécurité sociale, l'API est accordée aux étrangers, qu'ils soient ressortissants de l'Union européenne ou non, s'ils sont titulaires d'un titre de séjour ou s'ils remplissent des conditions de durée de résidence en France fixées par décret. Ces conditions s'appliquent sous réserve des traités et accords internationaux ratifiés par la France. En outre, l'enfant (ou les enfants) au titre duquel l'allocation est demandée doit être : soit né en France, soit entré régulièrement sur le territoire dans le cadre de la procédure de regroupement familial, soit membre de la famille d'un réfugié ou enfant d'un étranger titulaire d'une carte de séjour.

Pour sa part, l'AAH est accordée aux étrangers non ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, à condition qu'ils séjournent de façon régulière en France.

Or, la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, dispose que les ressortissants communautaires et ceux de l'espace économique européen ne sont plus tenus de détenir un titre de séjour, depuis la disparition des frontières intérieures de l'Union.

Il résulte de cette évolution que tout citoyen de l'UE peut désormais prétendre à l'API.

En revanche, pour obtenir un droit de séjour supérieur à trois mois , il doit, conformément aux dispositions de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, remplir l'une des quatre conditions suivantes :

- être un travailleur salarié ou non salarié ;

- disposer de ressources suffisantes et d'une couverture maladie complète ;

- avoir le statut d'étudiant et disposer de ressources suffisantes et d'une couverture maladie complète ;

- être membre de la famille d'un citoyen de l'UE remplissant l'une de ces trois conditions.

S'agissant de l'AAH , la condition posée d'un simple séjour régulier laisse supposer qu'une durée de séjour inférieure à trois mois ne fait pas obstacle à l'ouverture du droit à prestation.

A l'inverse, l'article L. 262-9-1 du code de l'action sociale et des familles 25 ( * ) dispose que l'ouverture du droit au RMI est subordonnée, pour les ressortissants communautaires, au respect des conditions d'octroi d'un droit de séjour assorties d'une obligation de résidence de plus de trois mois.

La loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable a en outre exclu du bénéfice du RMI et de l'API les ressortissants communautaires entrés en France pour y chercher un emploi et s'y maintenir à ce titre.

Par ailleurs, pour prétendre aux prestations familiales , l'article 61 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 prévoit de substituer à l'obligation de détenir un titre de séjour celle de séjourner régulièrement en France dans les conditions définies à l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Les paragraphes I et le II du présent article prévoient d'appliquer les mêmes conditions de résidence en France - régulière et de trois mois - à l'API et à l'AAH. Toutefois, la rédaction du présent article n'est pas restrictive, cette condition de résidence n'étant pas opposable aux personnes exerçant une activité professionnelle déclarée, qui sont en incapacité temporaire de travailler pour des raisons médicales, ou qui suivent une formation professionnelle, ou encore aux ascendants, descendants et conjoints de ces personnes. Le paragraphe I ajoute une exception supplémentaire pour l'API : la qualité d'« ex-conjoint ».

Enfin, s'inspirant de la rédaction retenue par la loi du 5 mars 2007 précitée pour le RMI et l'API, le présent article exclut du bénéfice de l'AAH les ressortissants communautaires entrés en France pour y chercher un emploi et s'y maintenir à ce titre.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a réécrit cet article, notamment pour préciser la notion de « résidence régulière » et supprimer la référence à celle d'« ex-conjoint » sans réelle valeur juridique.

III - La position de votre commission

Votre commission a déjà eu l'occasion de se prononcer sur l'opportunité d'exclure du bénéfice du RMI et de l'API les « ressortissants communautaires entrés en France pour y chercher un emploi et s'y maintenir » dans le cadre de la loi du 5 mars 2007 instituant un droit au logement opposable. Elle avait approuvé ce dispositif qui ne fait que traduire en droit interne les dispositions de la directive 2004/38.

Il s'agit en effet d'éviter que l'arrivée, éventuellement en nombre, de ressortissants des nouveaux Etats membres ne pèse trop lourdement sur notre système d'aide sociale et que se créent des mouvements de population liés à ces seuls effets d'aubaine.

Aussi, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 51 bis (nouveau) (article 21 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat) - Extension à de nouveaux départements de l'expérimentation du revenu de solidarité active

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, a pour objet de d'étendre à treize nouveaux départements la possibilité d'expérimenter le revenu de solidarité active.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article 21 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat précise les conditions d'entrée en vigueur de l'expérimentation du RSA et détermine les critères qui permettront de sélectionner les départements habilités à la conduire.

Il distingue deux cas de figure :

- celui des départements qui s'étaient déjà portés volontaires pour expérimenter différents dispositifs d'insertion en application de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 et dont le dossier complet a été remis au préfet avant le 30 juin 2007 : seize conseils généraux ont déjà été autorisés à conduire l'expérimentation du RSA au titre de cette première vague 26 ( * ) et la candidature de la Meurthe-et-Moselle est en cours d'étude ;

- celui des départements dont la candidature n'a pas été déclarée dans le cadre de la procédure d'expérimentation prévue par l'article 142 précité, mais qui souhaitent le faire dans les conditions définies par le projet de loi. Or, le II de cet article limite à dix le nombre de départements supplémentaires habilités à expérimenter le nouveau dispositif du RSA . Sur les vingt-trois candidatures dûment enregistrées avant le 31 octobre 2007 27 ( * ) , dix devront être ainsi sélectionnées selon les modalités prévues aux trois derniers alinéas du II de l'article 21 précité. Les critères de sélection qui ont été retenus sont le potentiel fiscal le plus faible et la part la plus forte d'allocataires du RMI dans la population totale du département.

Face à cet engouement, le présent article entend lever les contraintes posées par la loi afin de permettre à d'autres départements de participer à cette expérimentation , soit treize départements supplémentaires :

- ainsi, le deuxième alinéa qui limite à dix le nombre de départements éligibles à l'expérimentation est supprimé ;

- par voie de conséquence, les deux alinéas qui précisent les critères de sélection qui doivent s'appliquer pour sélectionner les candidats éligibles sont également supprimés.

Cela porte donc à trente-neuf, voire quarante, - si la candidature de la Meurthe-et-Moselle est finalement retenue - le nombre de départements susceptibles d'expérimenter le RSA.

En conséquence, le Gouvernement a augmenté de 5 millions d'euros les crédits du programme « expérimentations, lutte contre les exclusions », affectés à la couverture du coût des expérimentations conduites dans les départements supplémentaires.

II - La position de votre commission

La mobilisation des départements en faveur de cette expérimentation confirment leur volonté de s'engager dans une démarche active d'insertion des bénéficiaires du RMI. Celle-ci s'est déjà traduite dans les faits par des résultats significatifs qui ont permis une réduction du nombre de bénéficiaires de ce minimum social.

Aussi votre commission ne peut qu'encourager la poursuite des efforts engagés par les conseils généraux volontaires en autorisant ceux qui le souhaitent à participer à cette expérimentation.

Toutefois, votre rapporteur s'interroge sur le surcoût qui en résultera pour les départements. En effet, l'abondement complémentaire proposé par le Gouvernement est, toutes proportions gardées, en deçà des crédits prévisionnels accordés initialement aux vingt-sept départements prévus. Il conviendra donc, conformément à l'engagement pris par le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté lors de son audition 28 ( * ) , de prévoir, dans la convention qui lie l'Etat à chaque département, une clause de rendez-vous en fin d'exercice pour procéder, le cas échéant, aux ajustements nécessaires.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

SIGLES UTILISÉS

AAH Allocation aux adultes handicapés

ACTP Allocation compensatrice pour tierce personne

Afpa Association nationale pour la formation professionnelle des adultes

Agefiph Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés

AME Aide médicale d'Etat

API Allocation de parent isolé

ASI Allocation supplémentaire d'invalidité

AVS-I Auxiliaire de vie scolaire individuel

AVS-Co Auxiliaire de vie collectif

CAMSP Centres d'action médico-sociale précoce

CDAPH Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées

CDES Commissions départementales de l'éducation spéciale

CHRS Centres d'hébergement et de réinsertion sociale

Clis Intégration collective en classe d'intégration scolaire

CMU-c Couverture maladie universelle complémentaire

CNSA Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

Cog Convention d'objectif et de gestion

Cotorep Commission technique d'orientation et de reclassement professionnel

DDTEFP Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle

ETP Equivalent temps plein

Erea Etablissement régional d'enseignement adapté

Esat Etablissement et services d'aide par le travail

Fam Foyer d'accueil médicalisé

FDC Fonds départementaux de compensation

Fiva Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante

FSI Fonds spécial d'invalidité

FIPHFP Insertion des personnes handicapées dans la fonction publique

Gem Groupe d'entraide mutuelle

GIP Groupement d'intérêt public

IGF Inspection générale des finances

Igas Inspection générale des affaires sociales

Itep Instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques

Mas Maison d'accueil spécialisé

MDPH Maison départementale des personnes handicapées

Odas Observatoire national de l'action sociale décentralisée

OGD Objectif global de dépenses

Ondam Objectif national de dépenses d'assurance maladie

PCH Prestation de compensation du handicap

PPC Plan personnalisé de compensation

Priac Programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie

RSA Revenu de solidarité active

Samsah Services d'accompagnement médico-social pour adulte handicapé

Ssiad services de soins infirmiers à domicile

Sessad Services d'éducation spéciale et de soins à domicile

SVA Sites pour la vie autonome

TIPP Taxe intérieure sur les produits pétroliers

UPI Unité pédagogique d'intégration

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DES MINISTRES

A. AUDITION DE M. XAVIER BERTRAND, MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITÉ, MME VALÉRIE LÉTARD, SECRÉTAIRE D'ETAT CHARGÉE DE LA SOLIDARITÉ, ET M. MARTIN HIRSCH, HAUT COMMISSAIRE AUX SOLIDARITÉS ACTIVES CONTRE LA PAUVRETÉ

Réunie le mardi 30 octobre 2007 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l' audition de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité sur le projet de budget de son ministère pour 2008 (mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »).

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, a présenté les crédits relevant de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui est subdivisée en trois programmes.

Le premier, consacré à l'« action en faveur des familles vulnérables », finance essentiellement l'allocation parent isolé (API) ; 150 millions d'euros supplémentaires lui seront affectés l'an prochain, ce qui permettra de freiner l'augmentation de la dette de l'Etat vis-à-vis de la branche famille de la sécurité sociale. Le ministre a insisté sur sa volonté d'intensifier la lutte contre la fraude à cette prestation, par exemple en renforçant le contrôle de l'absence de vie maritale.

Les crédits consacrés aux tutelles et curatelles augmenteront de 20 % afin de faire face à la progression continue du nombre de mesures de protection prescrites. Les textes d'application de la loi du 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs, seront publiés en 2008.

Des crédits seront également consacrés aux partenaires associatifs qui contribuent à la médiation familiale et à l'insertion des jeunes, avec un effort particulier en direction des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents.

Le deuxième programme, dédié à l'« égalité entre les hommes et les femmes », constitue une priorité du Président de la République et sera doté de 28,5 millions d'euros l'année prochaine. Ces crédits permettront de conforter les initiatives déjà lancées dans le domaine des violences faites aux femmes et de renforcer les actions d'insertion professionnelle, notamment par la signature de contrats de mixité conclus avec des petites et moyennes entreprises dans des secteurs d'activité qui emploient traditionnellement peu de femmes. Une conférence tripartite sur l'égalité professionnelle se réunira le 26 novembre prochain pour élaborer de nouvelles propositions en matière d'égalité salariale et de carrière.

Le troisième programme, intitulé « conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », rassemble les crédits de fonctionnement des Ddass et des Drass. Ces administrations verront leurs effectifs diminuer, en raison du non-remplacement d'un agent sur deux partant en retraite, mais aussi du transfert de moyens de la direction des populations et des migrations vers le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et de la coopération.

Enfin, le ministre a souligné la montée en puissance du programme de validation des acquis de l'expérience (VAE) des professions sanitaires et sociales, avec une prévision de 60 000 dossiers traités en 2008, ce qui devrait permettre de répondre aux importants besoins de recrutement dans ces secteurs.

Puis Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, a présenté les crédits du programme « Handicap et dépendance » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Sur un montant total de 8,1 milliards d'euros, 5,4 milliards sont destinés au financement de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), dont le nombre de bénéficiaires a connu, en 2007, une progression limitée à 0,6 %. Pour 2008, le projet de loi de finances prévoit une hausse de 0,5 %.

Par ailleurs, conformément à la promesse du Président de la République, une première revalorisation de l'AAH devrait intervenir dès 2008. Sa faible ampleur est justifiée par le souci d'éviter une rupture d'égalité entre personnes handicapées titulaires de prestations différentes, une désincitation au retour à l'emploi et la création d'une iniquité entre salariés valides et handicapés. Pour ces raisons, une approche globale de la question des ressources des personnes handicapées et une démarche progressive seront privilégiées. Il s'agit d'abord de revaloriser l'AAH à un niveau supérieur à celui de l'inflation grâce à une hausse en deux temps, en janvier et en septembre 2008. Une réflexion d'ensemble sera parallèlement engagée dans le cadre du comité de suivi qui s'est mis en place le 23 octobre.

Une seconde priorité sera accordée à l'accès à l'emploi des personnes handicapées grâce à trois types de mesures :

- l'expérimentation d'un parcours d'insertion pour les allocataires de l'AAH, qui comprend un bilan d'employabilité, un accompagnement vers l'emploi et l'accès à des formations adaptées ;

- l'extension des compétences de l'Agefiph et du FIPHFP à la mise en accessibilité des locaux professionnels et au développement d'aides au recrutement dans les petites entreprises ou collectivités ;

- l'amélioration de l'accueil en établissements et services d'aide par le travail (Esat), auxquels le projet de loi de finances pour 2008 consacrera plus de 2,3 milliards d'euros, qui permettront notamment de financer deux mille places nouvelles, dont mille places expérimentales « d'Esat hors les murs » destinées à favoriser l'insertion des personnes handicapées, ainsi que la réforme de la rémunération garantie qui ouvre la possibilité aux salariés des Esat d'accéder aux dispositifs de formation professionnelle et à la prévoyance.

Enfin, Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, a assuré que le comité de suivi de la réforme de la politique du handicap qu'elle préside et que pilotent conjointement le délégué interministériel aux personnes handicapées et un représentant de l'assemblée des départements de France, veillera à l'application pleine et entière de la loi du 11 février 2005.

Des groupes de travail thématiques travailleront à la recherche de solutions pragmatiques pour surmonter les dysfonctionnements identifiés dans les domaines de l'accessibilité, de la scolarisation des enfants handicapés, des établissements spécialisés, des ressources et de l'accès à l'emploi des personnes handicapées et, enfin, des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Le bon fonctionnement de ces nouveaux guichets uniques conditionne les progrès dans un grand nombre d'autres domaines. Outre les personnels mis à leur disposition pour 2008, les MDPH bénéficieront d'une enveloppe de 60 millions d'euros financée à parité par l'Etat et la CNSA. Mais il faudra aussi résoudre les difficultés liées à la gestion du personnel, notamment le problème posé par les mises à disposition.

En ce qui concerne la politique en faveur des personnes âgées, les principales mesures sont inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Toutefois, le projet de loi de finances consacre 17 millions d'euros à la reconversion de structures hospitalières en établissements de moyen et long séjour pour personnes âgées, au financement des associations têtes de réseau et à la politique de lutte contre la maltraitance, notamment le développement du réseau Alma (Allo maltraitance personnes âgées) et la mise en place d'un dispositif de prévention et d'accompagnement des institutions et des professionnels.

Enfin, Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, a précisé que le programme relatif à l'égalité entre les hommes et les femmes consacrera en 2008 trois millions d'euros à un plan triennal de lutte contre les violences faites aux femmes au sein du couple, qui comprend notamment la mise en place du « 39.19 », numéro national unique d'aide et de secours aux victimes.

Puis M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a exposé les actions conduites en faveur de l'expérimentation de politiques sociales innovantes dans le cadre du programme qui relève de sa compétence au sein de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

L'expérimentation du revenu de solidarité active (RSA) en constitue le coeur : 25 millions d'euros y sont consacrés en 2008 pour financer son versement aux bénéficiaires de l'API dont l'Etat a la charge, la moitié du surcoût qui résulte, pour les départements volontaires, de son versement aux allocataires du RMI, ainsi que les dépenses d'accompagnement et d'animation nécessaires à sa mise en oeuvre et à son évaluation. Une clause de rendez-vous permettra d'ajuster, le cas échéant, le montant de la compensation prévue par la convention de financement signée par l'Etat avec chaque département.

Dix-sept conseils généraux, déjà autorisés à conduire cette expérimentation, en commenceront la mise en oeuvre dès le 1 er novembre. Dix autres départements devraient être prochainement sélectionnés parmi les vingt et une candidatures dûment enregistrées au 31 octobre. Pour répondre à cet engouement, le Gouvernement étudie actuellement la possibilité d'accroître le nombre de départements éligibles.

Le RSA expérimental fera l'objet d'une évaluation approfondie portant à la fois sur le nombre de bénéficiaires, la durée hebdomadaire de travail, le niveau de salaire horaire moyen, le type et la longueur des contrats. Grâce aux résultats obtenus, il sera ainsi possible d'ajuster le dispositif avant de le généraliser.

Enfin, M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a indiqué que plusieurs appels à projet ont été lancés auprès des collectivités territoriales, des associations et de divers opérateurs publics pour préparer la mise en place de nouveaux programmes expérimentaux relatifs à l'insertion et à la lutte contre la pauvreté, la formation ou la santé, mobilisant chercheurs et acteurs de terrains.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, s'est dit convaincu que la résorption de la pauvreté ne se résume pas à l'octroi d'une allocation financière (le RSA), mais qu'elle suppose de trouver un ensemble de solutions (garde d'enfant, mobilité, logement,...) permettant l'insertion durable des personnes concernées. D'où l'intérêt des programmes locaux qui permettent de trouver des solutions adaptées aux réalités du terrain.

Concernant la fraude, les difficultés financières extrêmes que rencontrent certaines familles peuvent effectivement expliquer quelques abus. Il en a toutefois relativisé la portée, rappelant que le RSA, précisément destiné à sécuriser le niveau de revenus des titulaires de minima sociaux, pourrait limiter les tentations de fraude. Au-delà des économies qui pourraient résulter de contrôles plus fréquents, il a défendu l'idée d'un meilleur suivi des bénéficiaires de l'API par l'Etat afin de favoriser leur insertion avant qu'ils ne basculent dans le RMI. Il s'est félicité de la multiplication des initiatives locales en ce sens, qu'il s'agisse de la création de pôles de compétitivité ou du développement de réseaux de transports plus efficaces pour garantir l'accès aux zones riches en emplois.

Puis M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a rappelé les différentes étapes de l'expérimentation du RSA : un quart des départements, ruraux ou urbains, de droite ou de gauche, mettront en oeuvre le RSA dès le mois de janvier de 2008. Au terme de cette expérimentation, le comité de suivi et d'évaluation appréciera l'efficacité du dispositif, et notamment la qualité des emplois créés.

Mme Isabelle Debré a souhaité connaître la proportion de départements urbains dans l'échantillon retenu.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a indiqué que sur les dix-sept départements sélectionnés, on constate un relatif équilibre entre départements urbains et ruraux. Il faut d'ailleurs surtout considérer ceux qui comportent à la fois des zones urbanisées et rurales, le Rhône ou la Côte-d'or par exemple.

Il s'est enfin félicité de l'intérêt suscité par le RSA lors de la réunion de lancement de la concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux le 23 octobre dernier. Un premier projet de réforme sera présenté au début de l'année 2008, qui servira de base au projet final à soumettre au Parlement au troisième trimestre de 2008.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », s'est étonné de ce que les prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale et celles de l'Etat diffèrent sur le montant des crédits nécessaires au financement de l'API pour 2008.

Mme Isabelle Debré a souligné les difficultés que rencontrent les communes pour recruter et fidéliser des personnels compétents dans le domaine de la petite enfance. Outre les normes contraignantes qui s'appliquent aux crèches, des blocages excessifs freinent la validation des acquis de l'expérience (VAE) dans ce secteur.

M. Guy Fischer s'est félicité de l'apurement de la dette contractée par l'Etat vis-à-vis de la branche famille au titre de l'API et a souhaité que les crédits alloués à cette prestation pour 2008 soient suffisants pour ne pas reconstituer cette créance. Il a par ailleurs souhaité savoir quels sont les ministres compétents en ce qui concerne la lutte contre la perception frauduleuse de minima sociaux.

Mme Raymonde Le Texier a insisté sur l'absence de lien entre les inégalités salariales observées entre hommes et femmes à niveau équivalent de compétence et le problème que pose, pour les familles, la garde des enfants lorsque les deux parents travaillent. Ces inégalités traduisent, selon elle, une forme de discrimination persistante vis-à-vis des femmes dans le domaine professionnel.

En réponse à Mme Raymonde Le Texier, M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, a précisé qu'il convient de distinguer trois sujets, sans forcément les relier entre eux : l'objectif d'égalité salariale entre hommes et femmes à niveau de compétence équivalent, dont l'échéance, fixée à 2010, devrait être anticipée grâce à la mise en place d'une démarche plus volontariste assortie d'indicateurs fiables ; l'ouverture aux femmes de certaines formations jusque-là réservée aux hommes  et la création, d'ici à la fin du quinquennat, d'un droit opposable à la garde d'enfants qui suppose une réflexion de fond sur le coût et la diversité des modes de garde. Regrettant l'excès parfois coûteux des réglementations dans ce domaine, il a souhaité que les parlementaires travaillent à la recherche de solutions innovantes, s'inspirant éventuellement de modèles étrangers.

Concernant la lutte contre la fraude, il a confirmé la mobilisation de son ministère et de celui de la santé, ainsi que de l'ensemble des caisses primaires d'assurance maladie et d'allocations familiales, l'articulation étant faite par M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Le plan mis en oeuvre prévoit le renforcement des contrôles grâce aux échanges d'informations et à une meilleure coordination. Les sommes détournées pourront ainsi être redistribuées aux personnes qui en ont réellement besoin.

Concernant la VAE, M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, a convenu qu'au-delà de l'insuffisance des crédits, qui crée dans certains domaines des goulets d'étranglements, des réticences persistent au sein de certaines professions qui craignent de s'en trouver déclassées. L'objectif du Gouvernement est de traiter 60 000 dossiers de VAE en 2008, soit 20 000 de plus qu'en 2007.

En réponse à M. Paul Blanc , il a indiqué que les prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale n'intègrent pas les mesures d'économies prises par le Gouvernement contre la fraude et en faveur du retour à l'emploi des bénéficiaires de l'API.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », s'est étonné de l'absence de crédits, en 2008, pour les fonds départementaux de compensation du handicap, les services d'auxiliaire de vie et le fonds interministériel pour l'accessibilité des personnes handicapées (FIAH). Par ailleurs, quelles sont les solutions envisagées par le Gouvernement pour financer la prise en charge de la dépendance ?

Mme Gisèle Printz s'est félicitée de la mise en place d'un plan de lutte contre les violences faites aux femmes. Ne doit-on toutefois pas craindre que les fermetures annoncées de tribunaux dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire allongent le délai de traitement des plaintes ?

Mme Annie Jarraud-Vergnolle a souligné les difficultés particulières que rencontrent les travailleurs dont le handicap est compris entre 50 % et 80 %, pour bénéficier des parcours d'insertion réservés aux personnes inscrites à l'ANPE depuis plus d'un an. Ces salariés qui, le plus souvent, occupent un emploi à temps partiel subi mais souhaitent accroître leur niveau de qualification, n'ont pas accès à ces dispositifs.

Mme Sylvie Desmarescaux a demandé le soutien du Gouvernement pour surmonter les obstacles qui empêchent l'ouverture d'un établissement d'accueil temporaire pour personnes handicapées dans son département.

En réponse à M. Paul Blanc, Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, a indiqué que, du fait de la mise en place de la nouvelle prestation de compensation du handicap (PCH), le nombre résiduel de forfaits d'auxiliaires de vie serait financé sur des fonds de concours de 15 millions d'euros. De même, les fonds départementaux de compensation du handicap et le FIAH seront abondés par l'Etat via des fonds de concours, respectivement à hauteur de 14 millions et 4 millions d'euros. Pour le FIAH, cet abondement viendra en complément des 7 millions d'euros non consommés en 2007, malgré le financement de 171 opérations.

Concernant la prise en charge de la dépendance, elle a mis en évidence l'enjeu que représente la création d'un droit universel à la compensation de la perte d'autonomie, sachant que la population française comptera près de 2 millions de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans à très court terme. Il s'agit d'améliorer à la fois la prise en charge à domicile et l'accueil en maison de retraite, en limitant le reste à charge pour les personnes âgées. Le Président de la République a plaidé en faveur d'un financement mixte alliant prévoyance individuelle et collective et solidarité nationale. Une concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux et associatifs sera ouverte le 5 novembre lors de la remise officielle du rapport de la CNSA consacré à ce sujet.

En réponse à Mme Gisèle Printz, Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, a fait valoir que la sensibilisation des juges et des policiers et la mise en réseau des différents intervenants devraient faciliter le parcours des victimes et accélérer le traitement des dossiers de plaintes des femmes victimes de violences conjugales.

Souscrivant aux propos de Mme Annie Jarraud-Vergnolle, elle a convenu que la revalorisation de l'AAH doit être coordonnée avec la logique de retour à l'emploi.

Concernant la création d'un établissement d'accueil temporaire pour les personnes handicapées dans le département du Nord, elle en a reconnu l'initiative, rappelant que son existence permet d'accorder un répit aux familles, mais aussi de les accompagner et les soutenir.

M. Marc Laménie s'est inquiété de l'effet de ciseaux qui résulte du transfert de charges importantes vers les départements et de la disparition des recettes afférentes à la vignette automobile. L'augmentation rapide du nombre de bénéficiaires de l'Apa, notamment, pose avec acuité le problème de la compensation financière par l'Etat de ces transferts.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, a indiqué qu'un des enjeux de la réforme de la prise en charge de la dépendance est la définition claire des responsabilités de l'Etat et des autres intervenants pour aboutir à un financement équilibré. Le Gouvernement, pleinement conscient de l'urgence à trouver une solution, s'est engagé à traiter cette question dès 2008.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » , a souhaité connaître le calendrier de l'expérimentation du RSA et de sa généralisation et les modalités d'une éventuelle fusion des minima sociaux.

Mme Raymonde Le Texier s'est inquiétée des difficultés de retour à l'emploi des bénéficiaires du RMI et de l'API éligibles au RSA, du fait de leur faible niveau de formation. Concernant l'API, elle a fait valoir que les difficultés d'accès aux dispositifs de garde des enfants et leur coût peuvent expliquer que certaines familles démunies perçoivent frauduleusement cette allocation, quitte à retarder de trois ans la reconnaissance de l'enfant par son père.

Souscrivant à l'analyse de Mme Raymonde Le Texier, M. Guy Fischer a convenu des problèmes que pose le retour à l'emploi de personnes ayant un faible niveau de qualification. En outre, ces populations sont souvent concentrées dans les mêmes quartiers, ce qui accentue leur difficulté à accéder à un emploi pérenne. Il a craint que les conseils généraux, qui supportent de lourdes charges financières, ne soient tentés d'offrir des emplois précaires aux titulaires du RMI, pour en réduire le nombre. Enfin, il a souhaité connaître les étapes de mise en oeuvre du RSA expérimental et de sa généralisation, ainsi que les grands axes de la réforme annoncée des minima sociaux.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, s'est dit convaincu que la résorption de la pauvreté ne se résume pas à l'octroi d'une allocation financière (le RSA), mais qu'elle suppose de trouver un ensemble de solutions (garde d'enfant, mobilité, logement,...) permettant l'insertion durable des personnes concernées. D'où l'intérêt des programmes locaux qui permettent de trouver des solutions adaptées aux réalités du terrain.

Concernant la fraude, les difficultés financières extrêmes que rencontrent certaines familles peuvent effectivement expliquer quelques abus. Il en a toutefois relativisé la portée, rappelant que le RSA, précisément destiné à sécuriser le niveau de revenus des titulaires de minima sociaux, pourrait limiter les tentations de fraude. Au-delà des économies qui pourraient résulter de contrôles plus fréquents, il a défendu l'idée d'un meilleur suivi des bénéficiaires de l'API par l'Etat afin de favoriser leur insertion avant qu'ils ne basculent dans le RMI. Il s'est félicité de la multiplication des initiatives locales en ce sens, qu'il s'agisse de la création de pôles de compétitivité ou du développement de réseaux de transports plus efficaces pour garantir l'accès aux zones riches en emplois.

Puis M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a rappelé les différentes étapes de l'expérimentation du RSA : un quart des départements, ruraux ou urbains, de droite ou de gauche, mettront en oeuvre le RSA dès le mois de janvier de 2008. Au terme de cette expérimentation, le comité de suivi et d'évaluation appréciera l'efficacité du dispositif, et notamment la qualité des emplois créés.

Mme Isabelle Debré a souhaité connaître la proportion de départements urbains dans l'échantillon retenu.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a indiqué que sur les dix-sept départements sélectionnés, on constate un relatif équilibre entre départements urbains et ruraux. Il faut d'ailleurs surtout considérer ceux qui comportent à la fois des zones urbanisées et rurales, le Rhône ou la Côte-d'or par exemple.

Il s'est enfin félicité de l'intérêt suscité par le RSA lors de la réunion de lancement de la concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux le 23 octobre dernier. Un premier projet de réforme sera présenté au début de l'année 2008, qui servira de base au projet final à soumettre au Parlement au troisième trimestre de 2008.

B. AUDITION DE MME ROSELYNE BACHELOT-NARQUIN, MINISTRE DE LA SANTÉ, DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS

Réunie le mercredi 7 novembre 2007 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'audition de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports , sur le programme « protection maladie » (183) de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », s'est demandé dans quelle mesure il est envisageable de créer de nouveaux postes de médecins scolaires alors qu'on observe une pénurie de médecins.

Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur les crédits du programme « protection maladie » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et notamment sur :

- les raisons du désengagement de l'Etat du financement de la CMU-c et de la non-revalorisation du forfait sur la base duquel le fonds CMU rembourse la Cnam ;

- le niveau prévisible de la dette de l'Etat vis-à-vis de la sécurité sociale au titre de l'aide médicale d'Etat pour 2007 ainsi que les mesures correctrices envisagées ;

- la portée de l'article 50 du projet de loi de finances pour 2008 qui prévoit le non remboursement des médicaments si le bénéficiaire de l'AME refuse les médicaments génériques : la suppression du tiers payant ne serait-elle pas suffisante pour atteindre l'objectif visé par cette mesure ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, a tout d'abord rappelé que le remboursement forfaitaire par le fonds CMU permet d'éviter une dérive des dépenses engagées au titre de l'AME par la Cnam. Ce forfait a été revalorisé chaque année entre 2003 et 2006, la dernière augmentation s'élevant à 11,7 %.

Puis elle a souligné la hausse substantielle des crédits consacrés à l'AME, portés de 233 millions à 413 millions d'euros en 2008 et rappelé le remboursement récent de la dette contractée à ce titre par l'Etat vis-à-vis de la sécurité sociale jusqu'en 2006. Ceci étant, les dépenses étant supérieures aux crédits votés en loi de finances initiale, l'année 2007 devrait se solder par un nouveau déficit de 225 millions d'euros. Des mesures sont prises pour limiter la dérive des dépenses de l'AME : développement du contrôle médical et renforcement de la lutte contre les fraudes grâce à la mise en place d'un titre d'admission non falsifiable comportant obligatoirement une photographie du prestataire. Par ailleurs, une participation des titulaires de l'AME à la dépense de soins, sous la forme d'un ticket modérateur ou d'un forfait, est actuellement à l'étude. Elle a justifié le non-remboursement des médicaments en cas de refus d'une spécialité générique par la nécessité d'aligner les droits et devoirs des bénéficiaires de l'AME sur ceux des autres assurés sociaux, suivant ainsi une recommandation du rapport d'audit et de modernisation de l'Igas.

Enfin, le fonds CMU est alimenté par quatre types de ressources : les droits tabacs, la taxe sur les alcools forts et la taxe de 2,5 % sur les primes ou cotisations d'assurance de protection complémentaire santé, la participation de l'Etat, soit 50 millions d'euros, n'intervenant qu'en complément pour garantir l'équilibre du fonds.

II. EXAMEN DE L'AVIS

Réunie le mercredi 21 novembre 2007 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Paul Blanc sur le projet de loi de finances pour 2008 (mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et articles 49 à 51 bis rattachés).

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a tout d'abord indiqué que les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s'élèvent pour 2008 à environ 12 milliards d'euros, dont 60 % consacrés à l'allocation de parent isolé (API), l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et l'aide médicale d'Etat (AME), qui devraient à nouveau connaître une forte progression.

Ces crédits sont en légère baisse par rapport à 2007, en raison de la diminution des crédits alloués aux rapatriés, de la moindre participation de l'Etat au financement de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) et du remplacement du programme « accueil des étrangers et intégration » par un nouveau programme majoritairement consacré à l'expérimentation du revenu de solidarité active (RSA).

Les priorités de la mission portent cette année sur les politiques de solidarité en faveur des personnes les plus démunies et sur la mise en oeuvre de la loi « Handicap ».

Les politiques de solidarité en faveur des personnes défavorisées s'articulent autour de trois axes : l'accueil des personnes dépourvues de logement, l'amélioration des conditions d'accès aux soins et l'incitation au retour à l'emploi.

Sur les questions d'hébergement, l'objectif pour 2008 est de permettre l'application effective du droit au logement opposable institué par la loi du 5 mars 2007, qui s'applique en premier lieu aux personnes sans abri.

Le plan triennal en faveur de l'hébergement d'urgence, conforté par la mise en oeuvre du plan d'action renforcé pour les sans abri (Parsa), doit y contribuer en permettant une prise en charge plus longue en centres d'hébergement d'urgence et une diversification de l'offre d'hébergement, afin de mieux répondre aux besoins spécifiques des publics accueillis. Ainsi, les centres d'hébergement seront désormais ouverts toute l'année, et non plus durant la seule période hivernale. Estimant que le surcoût qui en résultera ne sera que partiellement couvert, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a proposé de compléter ces crédits par voie d'amendement.

Se félicitant par ailleurs de la forte augmentation de la dotation consacrée au financement des places ouvertes en centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), il a déploré, en revanche, qu'aucun crédit ne soit prévu pour assainir leur situation financière. Il a annoncé qu'il présenterait un amendement visant à assurer leur rebasage.

Enfin, il convient de signaler la création de trois mille places en maisons relais, dont une centaine ouvertes à titre expérimental pour permettre la prise en charge adaptée de personnes vieillissantes ou souffrant de handicaps psychiques.

Concernant les crédits destinés à améliorer les conditions d'accès aux soins, la diminution de 56 % de la contribution de l'Etat au fonds CMU s'explique par l'augmentation des recettes affectées au fonds CMU - taxe sur les alcools, fraction de droits tabacs - qui ont permis à l'Etat de réduire d'autant sa subvention d'équilibre. Toutefois, le forfait sur la base duquel le fonds rembourse la Cnam n'a pas été revalorisé depuis 2006, soit un manque à gagner pour la sécurité sociale qui atteindra plus de 400 millions d'euros en 2008.

On constate en revanche une nette amélioration dans le financement de l'AME, l'Etat ayant remboursé sa dette à la sécurité sociale, soit 920 millions d'euros dus au 31 décembre 2006. L'augmentation des crédits, portés de 233 millions à 413 millions d'euros en 2008, atteste également de la volonté du Gouvernement d'établir des prévisions de dépenses plus sincères. Mais il faudra aussi qu'il s'engage à combler, en loi de finances rectificative, le déficit déjà estimé à 270 millions d'euros pour l'année 2007.

S'agissant du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a regretté que la participation de l'Etat pour 2008 soit limitée à moins de 10 % des recettes. A partir du moment où le fonds de roulement sera épuisé, il faudra l'augmenter progressivement jusqu'à 30 %, au minimum.

Enfin, l'incitation au retour à l'emploi des titulaires de minima sociaux constitue un axe fort des politiques menées. L'expérimentation, dans une vingtaine de départements, du RSA pour les titulaires du RMI et de l'API en est un bon exemple. Elle prolonge les mesures prises dans la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux, qui ont permis la diminution du nombre de titulaires de « l'API courte » (4 %) et du RMI (6 %).

Cette amélioration bénéficie en premier lieu aux départements qui se sont vu confier la gestion du RMI depuis 2004. Leur implication active dans la démarche d'insertion des bénéficiaires des minima sociaux sera désormais récompensée par le versement d'enveloppes prélevées sur le nouveau fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI). Doté d'1,5 milliard d'euros pour la période 2006-2008, il a une triple vocation de compensation, de péréquation et de valorisation des actions menées en faveur de l'insertion. Ainsi, plus de 90 % des dépenses engagées par les départements seront compensées par cet abondement complémentaire annuel de 500 millions d'euros, qui s'ajoute à la fraction des recettes de TIPP désormais versée mensuellement aux départements.

S'agissant du financement de l'API, plus d'un milliard d'euros y sera consacré en 2008, soit une hausse de 12,1 % par rapport à 2007, qui fait suite au remboursement de sa dette par l'Etat. Il s'agira toutefois de veiller à ce que le déficit prévisible de 2007 soit résorbé en loi de finances rectificative et que les mesures d'économies prises par le Gouvernement permettent de contenir les dépenses en 2008.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a ensuite abordé les crédits relatifs à la politique du handicap, soit 8,1 milliards d'euros en 2008. Il a rappelé que la politique en faveur des personnes handicapées et dépendantes a mobilisé en 2007 près de 50 milliards d'euros.

Les ressources d'existence des personnes handicapées sont le premier poste de dépense pour l'Etat : l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) représentent plus de 70 % du programme et, outre l'apurement de la dette contractée au titre de ces deux minima jusqu'en 2006, plus de 5,7 milliards d'euros y seront consacrés en 2008.

Pourtant, le ralentissement de la hausse des dépenses se confirme, en raison notamment de l'arrivée à soixante ans d'un grand nombre de bénéficiaires qui basculent dans le système de retraite. Cette tendance est confortée par la mise en place de mesures de contrôle permettant de veiller à la stricte application de la subsidiarité de l'AAH par rapport aux avantages vieillesse.

La seconde priorité de la politique du handicap en 2008 est d'améliorer la compensation des conséquences du handicap, sachant toutefois que l'Etat n'a pas vocation à participer au financement de la prestation de compensation du handicap (PCH), qui relève des départements et de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). La montée en charge de cette PCH est plutôt lente, mais elle s'est accélérée : 37 400 prestations pourraient être versées en 2007, contre 9 300 un an plus tôt, soit une dépense de 300 millions d'euros en 2007, alors qu'elle était de 81 millions en 2006. Pour 2008, la CNSA table sur la poursuite de cette tendance et sur une dépense comprise entre 450 et 500 millions d'euros. Il résulte de cette situation un excédent de trésorerie pour les départements qui disposent, depuis 2006, de recettes prélevées sur la « Journée de solidarité » en compensation des dépenses prévisionnelles liées à la PCH. M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a envisagé le redéploiement de cette somme inutilisée, qui pourrait atteindre, en 2007, près de 700 millions d'euros.

Parmi les pistes à explorer, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a évoqué plusieurs éléments de la compensation collective sous-dotés ou privés de crédits en 2008, tels que les fonds départementaux de compensation du handicap ou le fonds interministériel pour l'accessibilité des personnes handicapées (Fiah), qui ne sont toujours pas en mesure d'assumer pleinement leurs missions. Ils devraient néanmoins être alimentés via un fonds de concours de la CNSA, mais il ne s'agit pas d'un financement durable.

Pourtant, l'ampleur des investissements à financer en application de la loi du 11 février 2005 nécessiterait que les communes se préoccupent dès maintenant de cette question, en mettant en place la commission chargée d'établir, avant la fin de l'année 2008, leur diagnostic d'accessibilité des constructions, voiries et moyens de transport.

En outre, les crédits finançant les forfaits d'auxiliaire de vie n'ont pas été reconduits. Certes, la PCH a vocation à couvrir l'intégralité du coût de ces services, mais elle n'est pas encore très répandue et cela justifierait le maintien, au moins transitoire, de cette aide forfaitaire d'autant que le tarif de remboursement laisse souvent subsister un reste à charge pour la personne handicapée.

Enfin, la compensation collective se fait également à travers l'accueil en établissements et services médico-sociaux financés par l'assurance et à la marge par l'Etat dans le cadre du contrat de plan Etat-région pour la période 2007-2013, suivant un calendrier défini par les programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (les Priac).

Par ailleurs, l'Etat contribuera en 2008 à hauteur de 244 millions d'euros au financement des mesures de protection des majeurs placés sous tutelle ou curatelle, soit une augmentation de plus de 20 % par rapport à 2007. Cette hausse se justifie par l'augmentation des mesures de protection du vieillissement de la population et d'une moindre implication des familles. Toutefois, la réforme prévue par la loi du 5 mars 2007, qui doit entrer en vigueur en 2009, devrait aboutir à un système de protection plus juste et moins coûteux.

Abordant enfin la question de l'emploi des personnes handicapées, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a rappelé que les politiques mises en oeuvre ont une double finalité :

- développer les capacités d'accueil dans le secteur protégé, en établissement et service d'aide par le travail (Esat) et en entreprises adaptées, en augmentant le nombre d'emplois disponibles dans ces structures et en offrant une rémunération plus incitative (2,6 milliards d'euros en 2008) ;

- favoriser l'accès des personnes handicapées à l'emploi en milieu ordinaire, que ce soit dans la fonction publique ou dans les entreprises privées grâce au financement par l'Agefiph et le fonds « fonction publique » (FIPHFP) de primes d'incitation à l'embauche ou d'aides à l'aménagement des postes de travail.

Saluant les actions menées par l'Agefiph, qui ont déjà donné des résultats encourageants, il a regretté en revanche que celles mises en oeuvre par le FIPHFP demeurent embryonnaires, ce qui se traduit par un excédent de trésorerie « dormant » qui atteint 130 millions d'euros à la fin du troisième trimestre de 2007. Il a émis le voeu que ce nouveau fonds, doté depuis peu d'un nouveau président, prenne la mesure de sa mission et s'inspire des actions développées par l'Agefiph, afin que les employeurs publics deviennent exemplaires dans ce domaine.

En conclusion, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a proposé d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2008 et aux articles 49 à 51 bis qui lui sont rattachés, sous réserve des amendements qu'il présentera.

M. Nicolas About, président , a rappelé que la commission des affaires sociales avait initialement demandé la fusion de l'Agefiph et du FIPHFP afin d'accroître l'efficacité des politiques d'emploi en faveur des personnes handicapées.

M. Claude Domeizel s'est interrogé sur les crédits qui concourent à la politique du handicap à hauteur des 50 milliards d'euros annoncés par le rapporteur.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a indiqué que les dépenses consacrées à la politique en faveur des personnes handicapées et dépendantes comprennent non seulement les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », mais aussi ceux d'autres missions - « Travail et emploi », « Anciens combattants », « Enseignement scolaire » - qui totalisent 10,5 milliards d'euros. A ces crédits s'ajoutent ceux consacrés par la sécurité sociale et la CNSA au financement des établissements et services médicosociaux et de différentes prestations pour un montant d'environ 29 milliards d'euros, ainsi que la participation des départements, supérieure à 7,6 milliards d'euros, et celle de l'Agefiph et du FIPHFP, qui s'élèvent à environ 450 millions d'euros. Il convient également d'ajouter plus de 10 milliards d'euros de dépenses fiscales, au titre des exonérations et déductions accordées aux personnes handicapées et dépendantes.

M. Guy Fischer s'est dit préoccupé par le désengagement financier de l'Etat des politiques de solidarité et d'insertion, ainsi que par l'évolution d'un certain nombre de prestations dont la revalorisation a été insuffisante pour maintenir le pouvoir d'achat des bénéficiaires. Il a mentionné le cas de l'AAH dont la revalorisation en deux temps sera limitée à 2,1 % en 2008. Il s'est enfin inquiété de l'engouement des départements pour le RSA qui n'offre pourtant aucune garantie de réduction de la précarité qu'on serait en droit d'en attendre.

M. Gérard Dériot a précisé que l'expérimentation du RSA s'applique dans les départements sur une zone ciblée de leur territoire.

M. Guy Fischer a déploré par ailleurs l'absence de revalorisation du forfait qui sert de base de remboursement des dépenses engagées par la Cnam et qui se traduit pour celle-ci par un manque à gagner important. Le groupe CRC sera opposé à l'adoption des crédits de la mission pour toutes ces raisons.

A M. Alain Vasselle , qui demandait si certains redéploiements de crédits pourraient être opérés en faveur de la Cnam, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a expliqué que la plupart des dépenses de la mission étant consacrés au financement de prestations, les marges de manoeuvre sont réduites pour mobiliser des crédits et les transférer d'un programme à l'autre.

M. Nicolas About, président , a fait observer que le redéploiement proposé par voie d'amendement par le rapporteur pour avis ne porte que sur de faibles montants, bien inférieurs aux 400 millions d'euros nécessaires pour combler le manque à gagner de la sécurité sociale.

M. Alain Vasselle a demandé comment sont financés les fonds départementaux de compensation et comment pourrait être redéployé l'excédent de 700 millions d'euros dont disposent les départements pour financer la PCH. En outre, il a souhaité savoir vers quels dispositifs basculent les bénéficiaires de l'AAH âgés de plus de soixante ans, afin d'en anticiper l'impact sur le fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la caisse nationale d'assurance vieillesse.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a rappelé que l'Etat, les caisses de sécurité sociale, la CNSA et les départements sont membres de droit des fonds départementaux de compensation et participent à ce titre à leur financement. Il a en outre indiqué que les titulaires de l'AAH ont parfois cotisé au régime d'assurance vieillesse durant leur période d'activité, même si celle-ci est souvent limitée ; mais dans leur grande majorité, ils sont appelés à bénéficier du minimum vieillesse, financé par le FSV. En ce qui concerne l'excédent de trésorerie dont bénéficient temporairement les départements au titre de la PCH, cette situation est transitoire, car la PCH montera en charge rapidement et résorbera l'excédent cumulé. Néanmoins, il convient de réfléchir pour 2008 au redéploiement de ces sommes qui pourraient être utilement affectées à des opérations de mise en accessibilité.

M. Gérard Dériot a convenu qu'au regard des dernières statistiques concernant la PCH, la progression des dépenses est plus que certaine.

M. Alain Vasselle a souhaité connaître la portée de l'obligation de mise en accessibilité des bâtiments publics.

M. Nicolas About, président , a rappelé que les aménagements doivent être réalisés de telle façon que le service puisse être rendu dans les meilleures conditions pour les personnes handicapées. Par exemple, l'accès des personnes handicapées aux étages supérieurs d'un bâtiment municipal n'est pas nécessaire si l'organisation du service rend possible la satisfaction de leurs demandes.

Mme Isabelle Debré s'est étonnée des délais relativement courts qui sont imposés aux communes pour réaliser le diagnostic d'accessibilité, alors que l'obligation de mise en conformité n'entre en vigueur qu'en 2015.

M. Nicolas About, président , a expliqué qu'il s'agit d'anticiper les échéances afin que les communes puissent programmer sur plusieurs années les investissements nécessaires à la réalisation des travaux de mise en accessibilité et tenir les délais imposés par la loi.

M. Gérard Dériot s'est dit favorable à une programmation en amont des investissements réalisés par les communes, car elle permet une meilleure mobilisation des concours financiers.

M. Nicolas About, président , a précisé qu'il s'agit surtout de rechercher des solutions qui permettent de faciliter les démarches pour les personnes handicapées, en allant au devant d'elles et en privilégiant une organisation en « guichet unique ».

M. Alain Vasselle a souhaité savoir si toutes les communes sont assujetties à cette obligation de mise en accessibilité.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a rappelé que seules les communes et les intercommunalités de plus de cinq mille habitants sont concernées.

M. Alain Vasselle s'est inquiété de l'interprétation abusive des règles applicables à la présidence des conseils de la vie sociale institués dans les foyers occupationnels par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale. Il en résulte que, parfois, ce sont des personnes handicapées mentales qui sont amenées à présider ces structures. Il demande depuis plusieurs années que des mesures de clarification du décret du 25 mars 2004 soient prises pour remédier à cette situation, mais en vain.

Par ailleurs, il a souhaité savoir si les allocations de logement sont prises en compte au même titre que l'AAH dans le décompte des ressources qui permettent d'évaluer le reste à vivre des personnes handicapées.

M. Jean-Pierre Godefroy a regretté que les sociétés de transport public n'aient pas pris la mesure des efforts à réaliser pour permettre l'accès des personnes handicapées aux gares et stations de métro, ainsi qu'aux moyens de transport eux-mêmes. Il a en outre proposé d'augmenter la participation de l'Etat au Fiva par voie d'amendement. Il a enfin indiqué que son groupe serait défavorable à l'adoption des crédits de la mission.

M. Gérard Dériot a indiqué la création imminente, par le Gouvernement, d'un groupe de travail sur la réforme du Fiva et du Fcaata. Il est donc préférable de ne pas bouleverser ses modalités de financement en 2008, d'autant plus que subsiste un fonds de roulement dont on ne prévoit l'épuisement qu'en 2009.

Mme Annie David a souhaité avoir des précisions statistiques sur les composantes de la population handicapée, et notamment la part des femmes parmi les bénéficiaires de l'AAH et du minimum vieillesse. Enfin, elle s'est étonnée que le transfert de crédits proposé par le rapporteur se fasse au détriment du programme « égalité entre les hommes et les femmes », fût-ce pour favoriser l'accueil en centres d'hébergement des femmes victimes de violences conjugales.

Mme Anne-Marie Payet a proposé l'extension aux départements d'outre-mer de l'aide personnalisée au logement-foyer.

Mme Isabelle Debré a souhaité avoir des précisions sur les conditions d'obtention de l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI).

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a indiqué que l'ASI ou « minimum invalidité », est accordée en complément d'une pension d'invalidité ou d'une assurance vieillesse lorsque le montant cumulé des ressources du demandeur est inférieur à 627,21 euros. Elle est versée par l'assurance maladie, qui est ensuite remboursée par l'Etat des sommes avancées.

En réponse à M. Jean-Pierre Godefroy , il a convenu de la nécessité d'accroître les efforts en faveur de l'aménagement des matériels roulants. Il a souhaité en particulier que tout nouveau matériel remplisse les conditions d'accessibilité. Il a par ailleurs précisé que le Fiva disposera encore d'un fonds de roulement élevé en 2008, ce qui permet d'attendre 2009 pour envisager une revalorisation de la participation de l'Etat.

M. Nicolas About, président, s'est étonné que les entreprises françaises livrent pour les pays étrangers des moyens de transport accessibles, alors que les nouveaux matériels roulants qui sont produits pour la France ne sont souvent pas conformes.

M. Alain Vasselle a suggéré que les départements financent une partie de ces aménagements sur les fonds excédentaires récoltés au titre de la PCH.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a également émis le voeu que tout permis de construire soit désormais subordonné au respect des normes d'accessibilité, notamment pour les logements sociaux. La mobilisation par les départements des crédits excédentaires de la PCH au profit des communes pourrait permettre de progresser dans ce domaine.

Concernant le fonds CMU, il a indiqué que la solution passe par une revalorisation du forfait sur la base duquel le fonds CMU rembourse la Cnam, de 340 à 403 euros, soit au niveau des dépenses moyennes prévisibles pour 2008.

Evoquant la généralisation annoncée du RSA, il a souhaité que l'expérimentation, prévue pour une durée de trois ans, soit conduite jusqu'à son terme afin d'en évaluer correctement les résultats.

Par ailleurs, il s'est engagé à évoquer les dysfonctionnements des conseils de la vie sociale créés dans les foyers occupationnels lors de la prochaine réunion du comité de suivi de l'application de la loi « handicap » du 11 février 2005.

Enfin, en réponse à Mme Anne-Marie Payet , M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a indiqué que l'allocation personnalisée de logement-foyer ne dépend pas de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », mais plutôt de la mission « Ville et logement ».

M. Nicolas About, président , a rappelé que l'augmentation des crédits d'un programme au sein d'une mission ne peut se faire que par transfert de crédits en provenance d'un autre programme de la même mission. Cela suppose donc un arbitrage entre différentes priorités à financer.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis , a ensuite présenté deux amendements, l'un visant à transférer 4,78 millions d'euros du programme « conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » vers le programme « prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » afin de permettre d'assainir la situation financière des CHRS ; l'autre visant à transférer 1 million du programme « égalité entre les hommes et les femmes » vers le programme « prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » pour financer une soixantaine de places réservées aux femmes en situation de précarité ou victimes de violences conjugales. Il a précisé à l'intention de Mme Annie David que les crédits redéployés seraient ainsi plus sûrement utilisés, car on observe depuis plusieurs années une sous-consommation de la dotation allouée au programme « égalité entre les hommes et les femmes ».

La commission a adopté sans modification les articles 49 (unification des conditions d'accès à la couverture maladie universelle complémentaire), 50 (conditions de prise en charge par l'Etat du coût des médicaments des bénéficiaires de l'aide médicale de l'Etat), 51 (encadrement des conditions d'accès des ressortissants communautaires à l'allocation de parent isolé et à l'allocation aux adultes handicapés) et 51 bis (extension à de nouveaux départements de l'expérimentation du revenu de solidarité active).

Elle a enfin adopté les amendements et émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2008 ainsi modifiés .

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

ARTICLE 33

ÉTAT B

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

4 780 000

4 780 000

Lutte contre la pauvreté : expérimentations

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Protection maladie

Égalité entre les hommes et les femmes
Dont Titre 2

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales
Dont Titre 2

4 780 000

4 780 000

TOTAL

4 780 000

4 780 000

4 780 000

4 780 000

SOLDE

0

0

ARTICLE 33

ÉTAT B

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 000 000

1 000 000

Lutte contre la pauvreté : expérimentations

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Protection maladie

Égalité entre les hommes et les femmes
Dont Titre 2

1 000 000

1 000 000

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales
Dont Titre 2

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

* 1 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

* 2 Loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration.

* 3 Article 154 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 et décret n° 2006-1380 du 13 novembre 2006 relatif à l'allocation temporaire d'attente.

* 4 « Plan pour un habitat adapté ».

* 5 Article 56 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

* 6 - Droits sur les tabacs : la loi de finances pour 2007 en a porté le taux de 1,88 % à 4,34 %.

- Taxe due par les organismes complémentaires : l'article 53 de la LFSS pour 2006 en a porté le taux de 1,75 % à 2,5 %.

* 7 Voir rapport de la mission conjointe d'audit de modernisation Igas-IGF relatif à la gestion de l'aide médicale d'Etat - 2007.

* 8 1 093 pour les sept premiers mois de 2007 contre 746 sur la même période en 2006.

* 9 805 pour les sept premiers mois de 2007 contre 470 sur la même période en 2006.

* 10 Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

* 11 Rapport d'audit et de modernisation API décembre 2006.

* 12 Loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

* 13 Drees, « Les politiques d'insertion des conseils généraux en direction des bénéficiaires du RMI » - Etudes et résultats - n° 582 - juillet 2007.

* 14 5,304 milliards d'euros.

* 15 Article 131 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 16 Décret n° 2006-1752 du 23 décembre 2006.

* 17 Allocution du 9 juin 2007 à l'occasion du 47 e congrès de l'union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei).

* 18 « Les maisons départementales des personnes handicapées en 2006 » - Synthèse des analyses élaborées et transmises par les présidents de conseils généraux - CNSA - octobre 2007.

* 19 La même démarche est adoptée pour la programmation des créations de places en maisons de retraite et pour la construction de l'Ondam « personnes âgées ».

* 20 Hors mesures nouvelles dites « de reconduction » destinées aux équipements et capacités d'accueil déjà installés.

* 21 Rapport d'information n° 359 (2006-2007) de Paul Blanc au nom de la commission des affaires sociales, « Loi « handicap » : pour suivre la réforme... ».

* 22 Rapport d'information n° 359 (2006-2007), précité, juillet 2007.

* 23 Discours prononcé le 3 août 2007 à la Cité des Sciences de la Villette.

* 24 Selon les termes de l'article D. 861-1 du code de la sécurité sociale, le plafond annuel est fixé à 7 272,1 euros pour une personne seule - Décret n° 2007-1084 du 10 juillet 2007.

* 25 Article 9 de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et devoirs des bénéficiaires de minima sociaux.

* 26 Charente, Côte d'Or, Eure, Loire-Atlantique, Loir-et-Cher, Oise, Val d'Oise, Vienne par décret du 28 septembre 2007 et, par décret du 31 octobre 2007, Aisne, Bouches-du-Rhône, Côtes d'Armor, Haute-Saône, Hérault, Ille-et-Vilaine, Marne, Nord.

* 27 Allier, Alpes-Maritimes, Ardèche, Calvados, Charente-Maritime, Cher, Creuse, Deux-Sèvres, Dordogne, Doubs, Gard, Gers, Haute-Corse, Haute-Marne, Mayenne, Morbihan, Pas-de-Calais, Réunion, Rhône, Saône-et-loire, Seine-Maritime, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne.

* 28 Cf. audition de Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, du 30 octobre 200, p. 86.

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