N° 185

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 30 janvier 2008

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur le projet de loi, MODIFIÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux ,

Par M. Dominique BRAYE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Jean Pépin, Bruno Sido, Daniel Soulage, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Raymond Couderc, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Charles Josselin, Mme Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Gérard Larcher, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jacques Muller, Mme Jacqueline Panis, MM. Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Yannick Texier.

Voir les numéros :

Sénat : 1 ère lecture : 29 , 50 , 58 et T.A. 20 (2007-2008)

2 ème lecture : 110 , 184 (2007-2008)

Assemblée nationale (13 ème législ.) : 398 , 418 et T.A. 58

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Votre commission des affaires économiques a souhaité présenter un avis en deuxième lecture sur le projet de loi renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux.

Si elle a fait ce choix, qui n'est pas habituel, ce n'est pas, on s'en doute, pour le seul agrément de prolonger la collaboration aussi cordiale que fructueuse qui s'était établie, en première lecture, entre la commission des lois, saisie au fond, et votre commission et entre leurs deux rapporteurs, et qui a permis, dans le cadre d'un dialogue très ouvert avec le gouvernement, de renforcer la cohérence et l'équilibre du dispositif proposé pour améliorer la prévention des agressions canines.

Lorsqu'elle a examiné à son tour le projet de loi en première lecture, le 28 novembre 2007, l'Assemblée nationale a, sur de nombreux points, suivi les positions du Sénat et s'est également attachée à amender et à compléter les dispositions du projet de loi. Votre rapporteur pour avis tient d'ailleurs à saluer le remarquable travail accompli à cet égard par Mme Catherine Vautrin, rapporteur de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.

Cependant, votre commission, instruite par les insuffisances de la loi du 6 janvier 1999 1 ( * ) et par le bilan mitigé de son application, estime que le texte issu du Sénat prenait mieux en compte les exigences de la prévention des accidents causés par les chiens « non classés » et de la responsabilisation de leurs propriétaires, que n'a guère favorisée la « catégorisation ». Elle s'inquiète également des nouveaux effets pervers que pourrait engendrer l'aggravation des contraintes imposées aux détenteurs de chiens de première et deuxième catégories.

Il lui paraît par ailleurs nécessaire de poursuivre, en accord avec la commission saisie au fond, le travail accompli en première lecture en modifiant ou précisant sur certains points les dispositions du projet de loi restant en discussion.

Après avoir brièvement rappelé les principales modifications apportées en première lecture par le Sénat, votre rapporteur pour avis présentera donc les observations de votre commission sur le texte issu de l'Assemblée nationale.

Le présent avis ne portera pas sur les six articles additionnels introduits par l'Assemblée nationale pour étendre l'application du projet de loi aux collectivités d'Outre-mer, qui sont du ressort exclusif de la commission saisie au fond. En ce qui concerne celles des autres dispositions restant en discussion qui relèvent essentiellement de la compétence de la commission des lois, votre commission, comme elle l'avait fait en première lecture, vous proposera, au bénéfice des observations qu'elle sera conduite à présenter, de suivre les propositions de son éminent rapporteur, M. Jean-Patrick Courtois.

*

* *

I. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES AU PROJET DE LOI PAR LE SÉNAT

Saisi en premier lieu du projet de loi, le Sénat en a approuvé les orientations et a partagé la volonté du gouvernement de développer la prévention des accidents -essentiellement domestiques- causés par des agressions canines en favorisant le « dépistage » des animaux à risque ainsi que la formation et la responsabilisation des propriétaires ou détenteurs de chiens.

Il s'est en particulier attaché à renforcer, de manière très pragmatique, l'efficacité du dispositif proposé, notamment en imposant une évaluation comportementale des chiens potentiellement dangereux en raison de leur poids et de leur force ; à le compléter en posant la « première pierre » d'une obligation de formation des personnels utilisant des chiens dans le cadre d'activités privées de surveillance et de gardiennage, assortie d'une responsabilisation de leurs employeurs ; à apporter une réponse à la fois réaliste et humaine à la question de l'impossible « éradication » des chiens de première catégorie.

1. Le renforcement du dispositif de prévention prévu par le projet de loi

a) Le recours à l'évaluation comportementale

Le Sénat a considéré qu'il fallait permettre de tirer le meilleur parti de cet outil, qui doit être un élément fondamental de la politique de prévention des morsures canines.

* A cette fin, il a imposé que l'évaluation soit communiquée à l'autorité compétente pour prendre les décisions que ses résultats pouvaient faire apparaître comme nécessaires ( article 1 er ).

* Surtout, il a également prévu de soumettre à une évaluation comportementale , lorsqu'ils arrivent à l'âge adulte, tous les chiens non « classés » que leur force peut rendre potentiellement plus dangereux que d'autres , sur le fondement de critères de poids dont la fixation était renvoyée à un arrêté des ministres de l'intérieur et de l'agriculture ( article 4 bis ).

Cette mesure avait un double objet :

- d'abord, déceler la dangerosité éventuelle d'animaux qui sont à l'origine de la très grande majorité des accidents mortels recensés depuis une trentaine d'années ;

- ensuite, responsabiliser leurs maîtres, entretenus dans l'illusion que ces animaux, n'étant pas classés par la loi parmi les chiens « dangereux » et appartenant souvent à des races jouissant de la sympathie du public, ne peuvent présenter aucun danger.

* Enfin, pour assurer qu'elle donne des indications fiables et pour éviter des examens inutiles, le Sénat a prévu que la première évaluation des chiens de première et deuxième catégories aurait lieu lorsque ces animaux atteindraient l'âge de la puberté ( article 2 ).

b) Le contenu et le bon usage de la formation

* En ce qui concerne l'obligation de formation ( article 2 ) que le projet de loi prévoit d'imposer à tous les détenteurs de chiens de première et de deuxième catégories, mais qui pourra aussi l'être aux maîtres de chiens « mordeurs » ou présentant un danger du fait des modalités de leur garde, le Sénat a prévu, à l'initiative de votre commission :

- que le contenu de la formation dispensée devrait inclure une initiation au comportement canin ;

- que seraient définis par voie réglementaire le contenu de la formation, les modalités d'obtention de l'attestation d'aptitude, les conditions d'agrément et de contrôle des personnes dispensant la formation et délivrant l'attestation d'aptitude.

* Il a, par ailleurs, estimé logique que l'obligation de formation soit imposée en fonction des résultats de l'évaluation qui, en permettant d'apprécier les relations maître-chien et le contrôle du maître sur son animal, permettra aussi de juger de la nécessité de lui imposer une formation ( articles 1 er et 4 ).

En revanche, le Sénat a également jugé nécessaire que, comme les maîtres de chiens « classés », les détenteurs de chiens mordeurs ou présentant un danger puissent aussi se voir imposer d'obtenir l'attestation d'aptitude, dès lors que l'évaluation ferait apparaître que le chien doit être confié à la garde d'une personne possédant une certaine compétence.

2. La formation des agents de surveillance et de gardiennage

Compte tenu du danger que peut présenter l'utilisation, par des personnes non formées, de chiens qui sont de surcroît trop souvent « employés » et gardés dans les conditions les mieux faites pour les rendre instables et agressifs, le Sénat a adopté un dispositif imposant aux gardiens cynophiles privés de suivre la formation et d'obtenir l'attestation d'aptitude prévues par le projet de loi, les frais correspondants étant mis à la charge de leurs employeurs ( article 5 ter ).

Ce dispositif prévoyait également des sanctions pénales à l'encontre des personnes employant des agents ne répondant pas à ces conditions minimales de formation.

3. Le sort des chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000

Afin de parvenir à « l'éradication » des chiens de première catégorie voulue -de manière parfaitement irréaliste- par le législateur de 1999, le projet de loi proposait d'interdire la détention de chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000, date d'entrée en vigueur de l'obligation de stérilisation de ces animaux ( article 5 ).

Votre commission et la commission des lois avaient proposé des amendements de suppression de cette mesure. Elles avaient en effet fait valoir que l'éradication des chiens de première catégorie était une vue de l'esprit et que la mesure proposée, au demeurant vouée à l'inefficacité, aurait surtout atteint les propriétaires de bonne foi d'animaux nés dans des condition parfaitement « légales » et qu'elle aurait aussi conduit à éliminer sans aucune justification de très nombreux chiens ne présentant aucune dangerosité particulière.

En adoptant ces amendements de suppression, puis un amendement présenté par Mme Isabelle Debré et plusieurs de nos collègues ( article 5 bis ), le Sénat a fait prévaloir une solution beaucoup plus satisfaisante, qui autorisait la déclaration et la « régularisation » des animaux détenus sans violation des interdictions de reproduction et d'importation prévues par la loi du 6 janvier 1999, à condition qu'une évaluation comportementale préalable ait permis de conclure qu'ils ne présentaient pas de danger particulier.

4. La répression des atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité des personnes résultant d'agressions canines

En adoptant un amendement du gouvernement judicieusement sous amendé par la commission des lois, le Sénat a introduit dans le projet de loi un dispositif réprimant les atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité des personnes résultant d'agressions canines, inspiré des dispositions applicables aux homicides ou blessures par imprudence commis à l'occasion de la conduite des véhicules ( article 8 bis ).

5. Les autres modifications introduites par le Sénat

- Le Sénat a prévu, à l'initiative des membres du groupe socialiste, la création d'un Observatoire national du comportement canin ( article 1 er A ).

- Il a en revanche repoussé, jugeant sa rédaction peu satisfaisante, un article du projet de loi dont le lien avec le reste du dispositif était assez ténu et qui avait pour objet de faciliter l'acquisition des médicaments vétérinaires utilisés par les « dispensaires » gérés par des associations ou fondations, dont la création a été autorisée par la loi du 6 janvier 1999 ( article 12 ).

* 1 Loi n° 99-5 du 6 janvier 1999 relative aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux.

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