2. La délivrance des passeports biométriques

Ce dossier soulève plusieurs questions :

- en premier lieu, celle de l'habilitation législative des maires, en leur qualité d'agents de l'Etat, pour l'instruction des demandes, l'Etat étant légalement compétent pour délivrer les passeports.

Or, comme il le sera précisé plus loin 11 ( * ) , le transfert de compétence a été posé par un décret du 26 février 2001 , annulé par le Conseil d'Etat en 2005.

Le Gouvernement envisage donc de soumettre au Parlement un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2008 visant à valider rétroactivement le décret de 2001 et à donner ainsi un fondement légal à la mission exercée par les communes en matière de gestion des cartes nationales d'identité et des passeports par les communes, quel que soit leur niveau de sécurisation.

Reste la question de l'indemnisation des communes équipées pour les frais engagés dans l'enregistrement des demandes et la remise des titres.

Précisons que l'équipement (y compris la maintenance et son remplacement), le réseau sécurisé (raccordement, câblage nécessaire et abonnement informatique) sont pris en charge par l'Etat.

Par ailleurs, des stations mobiles, au nombre d'au moins une par département, pourront être mises à disposition des maires pour les cas de personnes à mobilité réduite.

Sur l'intervention de l'AMF, l'Etat a prévu une dotation forfaitaire d'un montant annuel de 3.200 euros par station d'enregistrement (créée par l'article 58 du projet de loi de finances). Le montant de cette « dotation pour les titres sécurisés » évoluerait chaque année en fonction du taux d'évolution de la DGF (dotation globale de fonctionnement). Pour 2009, la dotation couvrant les stations installées entre le 1 er janvier et le 28 juin 2009 est curieusement proratisée à compter du 1 er juillet et s'établit à 1.600 euros (le montant total des crédits inscrits à ce titre s'élève à 6,34 millions d'euros).

Cette indemnisation ne couvre que l'activité générée par les demandes de titres émanant de citoyens ne résidant pas dans la commune d'implantation.

Elle est évaluée forfaitairement à 30 % de l'activité annuelle de la station, sur la base de 2.500 titres (passeports et CNIe) et correspond donc à 800 dossiers, soit un taux unitaire d'indemnisation de 4 euros. Les communes sont donc dédommagées à raison de 16 euros l'heure. Le délai évalué pour chaque traitement de dossier a, en effet, été fixé à un quart d'heure selon les précisions apportées par la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités locales, lors de son audition par votre commission des lois le 18 novembre 2008.

Ce dispositif soulève plusieurs questions à commencer par celle du montant de la dotation, auquel, d'ailleurs, l'AMF n'a pas donné son accord.

Les modalités de calcul du Gouvernement sont contestées par de nombreuses communes (temps passé par les agents affectés aux stations sous-estimé 12 ( * ) , quotité de titres traités par chaque station).

Notre commission des finances sur proposition de son rapporteur spécial, Mme Michèle André, a adopté un amendement visant à doubler quasiment le montant de cette dotation, de 6,34 millions d'euros à 12 millions d'euros. Au vu du caractère aléatoire de la détermination de l'indemnité allouée pour chaque commune, votre commission des lois a décidé de soutenir la démarche de la commission des finances.

A terme, les stations traiteront également des demandes de CNIe qui intègreront également des données biométriques (cette nouvelle génération de carte d'identité devrait faire l'objet d'un projet de loi sur la protection de l'identité, que le Gouvernement envisage de déposer sur le bureau du Parlement dans les mois à venir) 13 ( * ) .

Il est prévu d'expérimenter, dès l'automne 2008, ce dispositif dans une douzaine de communes situées dans six départements, pour évaluer les aspects techniques et fonctionnels de la station.

Par ailleurs, la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités locales, a, lors de son audition par votre commission des lois le 18 novembre 2008, précisé qu'un bilan de l'exercice de cette nouvelle compétence par les communes, serait établi au terme d'un an d'exploitation, en juin 2010, et qu'il serait procédé aux ajustements nécessaires. Il serait effectué un audit sur le coût réel de fonctionnement des stations pour les communes. La ministre a précisé que le montant de l'indemnité serait « révisé, à la hausse ou à la baisse, si un écart significatif portant sur un nombre important de communes est constaté » ( cf . question écrite de M. Michel Sergent - JO Sénat du 20 novembre 2008, p. 8058).

Il va sans dire que votre rapporteur, très soucieux de la plus juste indemnisation des communes pour cette nouvelle charge , se livrera à un suivi attentif de ce dossier. Il soutient l'amendement adopté par la commission des finances pour doubler le montant de la dotation.

Il tient à rapporter l'expérience à laquelle il s'est livré pour expérimenter ce nouveau dispositif. Votre rapporteur a suivi personnellement la procédure d'accueil et de délivrance d'un passeport biométrique dans la station de la ville de Mérignac dont il est un élu. Il a constaté que la durée théorique de quinze minutes ne tenait pas compte de nécessaires vérifications,  corrections ou assistance sollicitée par l'administré. Par exemple, une fois numérisées, les données manuscrites inscrites sur l'imprimé comportent des erreurs dues à une fiabilité relative de la reconnaissance de caractères. L'agent municipal doit dès lors examiner les données affichées à l'écran (nom, prénom, adresse, ville de naissance...) avec attention et souvent les modifier. En outre, la plupart des personnes viennent en mairie sans l'imprimé administratif ou avec un imprimé non rempli ou encore mal rempli, sollicitant l'aide de l'employé. De même, un travail complémentaire (lecture optique du passeport, vérification des empreintes, remise d'un nouveau récépissé) est fourni lors de la remise du passeport. Au total, les premières indications dès lors qu'elles intègrent la totalité des opérations, mais aussi l'assistance du public ou les corrections à apporter donnent un temps de suivi de l'ordre d'au moins vingt à vingt-cinq minutes, différent des huit minutes constatées par la Ministre lors de la délivrance du premier passeport biométrique.

En outre, il faut tenir compte des coûts indirects induits par le transfert de cette compétence comme la nécessité, pour certaines petites communes, de réorganiser leurs services. Il devra donc être nécessairement procédé, avant le terme du prochain exercice, à une évaluation de l'ensemble des charges en résultant.

* 11 La question du contentieux est traitée dans le IV de cet avis.

* 12 Les premières communes à avoir expérimenté la nouvelle procédure, font état d'un temps de traitement de 30 minutes.

* 13 Sous réserve de l'adoption du projet de loi de finances, l'ANTS serait en mesure de déployer les deux titres -passeport et carte d'identité- pour l'été 2009.

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