B. LES MODIFICATIONS INTRODUITES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le dispositif proposé par le Gouvernement a été substantiellement modifié et complété par l'Assemblée nationale.

Le texte établi par la commission de la défense

La commission de la défense prenant en compte plusieurs des amendements de la commission des lois, saisie pour avis sur les articles 12 à 14, a amélioré le texte sur deux points principaux.

Elle a d'abord mieux encadré la définition de la première catégorie des lieux mentionnés par le nouvel article 56-4 du code de procédure pénale : elle a ainsi substitué à la notion très extensive de lieux « susceptibles d'abriter » des secrets de la défense nationale celle, plus rigoureuse, de lieux « abritant » de tels secrets. En outre, il lui est apparu indispensable de préciser l'autorité responsable du choix de ces lieux et les formes que devait revêtir cette décision :

- le choix de lieu serait pris sous la forme d'un arrêté du Premier ministre ;

- cet arrêté fixerait une liste établie de façon précise et limitative ;

- la liste serait régulièrement actualisée et communiquée à la CCSDN et au ministère de la justice qui la rendraient accessible aux magistrats de façon sécurisée ;

- les conditions de délimitation des lieux seraient déterminées par décret en Conseil d'Etat.

En outre, la commission de la défense, d'un commun accord avec la commission des lois, a considéré que la suspension de la perquisition en cas de découverte fortuite d'éléments classifiés, constituerait une grave entrave au déroulement d'une procédure judiciaire. Elle a, en conséquence, substitué au mécanisme prévu par le Gouvernement, un dispositif selon lequel les éléments classifiés sont placés sous scellés par le magistrat ou l'officier de police judiciaire qui les a découverts puis remis au président de la Commission consultative afin qu'il en assure la garde.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a cependant estimé que le texte établi par la commission de la défense ne permettait pas de répondre à cinq motifs de préoccupation rappelés par son président, M. Jean-Luc Warsmann, lors de son intervention dans la discussion générale sur ce texte à l'Assemblée nationale :

- l'effet de surprise , indispensable en matière de perquisition, pourrait être entamé dès lors que le président de la commission consultative est informé en amont de la décision du magistrat.

- le régime spécifique de perquisition pour les lieux abritant des secrets de la défense nationale pourrait conduire à dissimuler dans ces lieux des documents qui ne relèvent aucunement du secret de la défense nationale ;

- l'insuffisance des effectifs de la CCSDN pourrait en pratique limiter la possibilité de perquisitions simultanées dans des lieux différents dans le cadre d'enquêtes importantes ;

- la loi devrait préciser clairement que le président de la Commission n'exerce aucune appréciation sur l'opportunité d'une perquisition dans un lieu abritant un secret de la défense nationale et qu'il est en conséquence automatiquement présent dès lors qu'il est informé de la décision du magistrat ;

- il y aurait, enfin, un « immense danger » à « définir sur notre territoire [sous la forme de lieux classifiés] des lieux où les magistrats ne pourraient plus se rendre ».

Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Au cours de l'examen du projet de loi en séance publique, la commission de la défense, la commission des lois et le Gouvernement ont pu rapprocher leurs points de vue. Les députés ont ainsi adopté quatre amendements identiques de la commission de la défense et de la commission des lois visant :

- la faculté pour le président de la CCSDN de désigner, en dehors de la Commission, des délégués dûment habilités au secret de la défense nationale , selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'Etat ;

- la création d'un délit de dissimulation dans les lieux abritant un secret de la défense nationale des éléments non classifiés en tentant de les faire bénéficier de la protection attachée au secret de la défense nationale ;

- une nouvelle organisation de l'information du président de la CCSDN en cas de perquisition dans un lieu abritant un secret de la défense nationale : en amont, le président de la Commission consultative ne serait informé que des « informations utiles à l'accomplissement de sa mission » ; il devrait se transporter « sans délai » sur les lieux ; il prendrait connaissance, au commencement de la perquisition -au même moment que le chef d'établissement- des raisons justifiant la perquisition, de son objet et des lieux qu'elle vise ;

- la décision de classification des lieux serait prise pour une durée de cinq ans par arrêté du Premier ministre, publié au Journal Officiel , après avis de la Commission consultative .

Les procédures de perquisition telles qu'elles résultent
du texte adopté par l'Assemblée nationale

Conditions de la perquisition

Lieu classifié

Lieu abritant un secret
de la défense nationale

Lieu neutre

* décision écrite
et motivée du magistrat transmise au président de la CCSDN

* déclassification préalable

* au commencement
de la perquisition communication
de la décision de perquisition au chef d'établissement

* décision écrite du magistrat transmise au président de
la CCSDN et comportant les « informations utiles »
à l'accomplissement
de sa mission

* au commencement de la perquisition, communication au président de la CCSDN
et du chef d'établissement
de la nature de l'infraction, des raisons justifiant
la perquisition, de son objet et des lieux visés

* en cas de découverte d'éléments classifiés, information immédiate
du président de
la CCSDN

* présence obligatoire du magistrat et du président
de la Commission consultative ou de son représentant (qui pourrait être un délégué non membre
de la commission dans le cas des lieux abritant
un secret de la défense nationale)

Déroulement de la perquisition

* seul le président de la CCSDN -ou son représentant- peut prendre connaissance d'éléments classifiés découverts sur les lieux

* les éléments classifiés sont, après inventaire
par le président de la CCSDN, placés sous scellés
dont le président de la CCSDN devient le gardien

* éléments classifiés placés sous scellés par le magistrat -qui n'en prend pas connaissance- puis renvoyés au président de la CCSDN qui en assure
la garde

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