EXAMEN DES ARTICLES

Article 3 - Interdiction faite aux mineurs de participer à des jeux d'argent et de hasard

I - Le texte de la commission des finances

Le présent article tend à poser le principe de l'interdiction aux mineurs de prendre part aux jeux d'argent et de hasard et à fixer les règles que les opérateurs doivent mettre en place pour en faciliter le respect. Les opérateurs concernés par ce principe sont à la fois les nouveaux entrants, qui proposeront des jeux et paris en ligne, et les opérateurs historiques, que ce soit pour les offres de jeu en « dur » ou en ligne.

L'Assemblée nationale a considérablement renforcé les dispositions relatives à la protection des mineurs, qui étaient cependant très dispersées dans le texte : à l'article 3, mais aussi à l'article 4 bis encadrant la publicité, à l'article 12 sur les modalités d'accès et d'inscription des joueurs en ligne, à l'article 18 sur les règles relatives aux sites Internet des opérateurs et à l'article 20 sur la protection des personnes vulnérables.

La commission des finances du Sénat a souhaité regrouper les dispositions suivantes dans l'article 3 :

- lors de toute connexion aux sites de jeux et paris, un message avertissant que lesdits jeux sont interdits aux mineurs (nouvelle rédaction de l'article 3) ;

- la date de naissance du joueur est exigée à chaque visite (article 18) ;

- les opérateurs sont tenus de faire obstacle à la participation à des activités de jeu ou de pari sur son site de mineurs, même émancipés (article 20) ;

- et, les opérateurs ne peuvent financer l'organisation ou parrainer la tenue d'événements à destination spécifique des mineurs (article 20).

Elle a en outre supprimé la disposition de l'article 18 qui prévoyait que l'opérateur de jeux ou de paris en ligne était également tenu de mettre en place une fenêtre surgissante avant l'entrée sur le site pour avertir que les jeux d'argent et de hasard en ligne sont interdits aux mineurs. Elle a considéré, en effet, que l'efficacité de cette obligation serait réduite dans la mesure où la plupart des logiciels de navigation sur Internet permettent de bloquer les fenêtres surgissantes ou « pops-ups », le plus souvent grâce à un paramétrage par défaut. La disposition de l'article 3 relative au message d'avertissement lui semblait, en outre, constituer une précaution suffisante.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur pour avis est extrêmement favorable à l'ensemble des mesures permettant d'empêcher les mineurs de parier et de jouer au poker en ligne, en raison du caractère très addictif de ces pratiques.

Il considère néanmoins que les dispositions les plus efficaces sont celles prévues par l'article 12 du projet de loi, à savoir :

- l'obligation de fournir une pièce d'identité et un relevé d'identification bancaire au moment de la création du compte joueur, qui devrait constituer un obstacle majeur à l'inscription de joueurs mineurs sur les sites légaux ;

- et l'encadrement des modalités d'approvisionnement des comptes joueurs. A cet égard, votre rapporteur pour avis souligne l'importance de l'obligation d'utiliser des cartes bancaires ou des comptes de paiement du type « paypal » qui permettra naturellement de limiter le jeu des mineurs.

Par ailleurs, des règles qui ne sont pas de nature législative devraient avoir une importance majeure, telles que le référencement des sites de jeu sur les logiciels de contrôle parental ou l'encadrement des cartes de paiement utilisables.

La principale difficulté n'est pas en fait de limiter le jeu des mineurs sur les sites légaux, pour lesquels les règles sont de nature à rendre effective l'interdiction fixée au présent article, mais bien d'interdire les sites illégaux sur lesquels les dispositions précitées ne seront pas appliquées. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur estime qu'il serait néfaste d'introduire des obligations inutilement contraignantes aux opérateurs légalement installés.

A cet égard, la disposition tendant à imposer que la date de naissance du joueur soit exigée au moment de l'inscription , mais également à chacune des visites sur le site de l'opérateur, bien que relevant d'une bonne intention, paraît inefficace et potentiellement pernicieuse :

- s'agissant de l'objectif d'information des mineurs, cette disposition constitue un doublon avec le message d'avertissement obligatoire sur tous les sites agréés (voir infra ) ;

- l'objectif de blocage réel de l'accès aux sites n'est absolument pas assuré par le biais d'une simple demande de date de naissance, et sa mise en oeuvre sera bien davantage favorisée par l'obligation de disposer de coordonnées bancaires et d'un compte unique ;

- elle crée une différence assez importante en matière de confort de navigation pour l'ensemble des utilisateurs : il ne s'agit pas d'un simple « clic » mais bien de porter des indications portant sur le jour, le mois et l'année de naissance de l'internaute, ce qui constitue une contrainte complémentaire pour les sites d'opérateurs disposant d'un agrément au bénéfice de l'offre illégale.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur pour avis, un amendement tendant à supprimer l'obligation d'exigence de la date de naissance du joueur à chacune des visites du joueur sur le site de l'opérateur.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 4 - Prévisibilité du montant de la perte de jeu

I - Le texte de la commission des finances

Cet article tend à interdire les paris dans lesquels le montant de la perte potentielle est supérieur au montant de la mise.

La commission des finances n'a pas modifié cet article en estimant qu'il tendait à :

- exclure le pari à la fourchette ou « spread betting », dans lesquels les parieurs pronostiquent le fait que le nombre total d'actions réalisées au cours d'une rencontre sportive sera inférieur ou supérieur à une fourchette d'actions proposées. En effet ces paris ont la particularité de créer un risque que la perte du joueur soit supérieure à la mise initiale, ce qui paraît particulièrement dangereux dans un contexte d'ouverture d'un nouveau secteur que les parieurs mettront du temps à maîtriser ;

- et à exclure de fait les bourses aux paris ou « betting exchange », dans la mesure où ces paris pourraient entraîner des « pertes supérieures à la mise engagée ».

Pour pertinente qu'elle soit, votre rapporteur s'interroge cependant sur l'exhaustivité de cette analyse dans la mesure où certains modèles de « betting exchange » semblent très bien pouvoir se développer sans que la perte potentielle maximale soit supérieure à la mise engagée (cas de la cote fixée par un tiers par exemple, présentée sur le site d'un opérateur qui ne jouerait que le rôle d'une plate-forme d'accueil).

II - La position de votre commission

Votre rapporteur pour avis est très inquiet du potentiel de développement du « betting exchange », qui aurait des conséquences négatives en termes d'addiction, de développement de fraude et de dévoiement de l'esprit du présent projet de loi.

Comme le souligne la commission des finances, ce type de paris présente :

« - des risques addictifs potentiellement plus élevés que la moyenne des autres paris sportifs. Ainsi, au Royaume-Uni, selon le rapport de 2007 de la Gambling commission, alors que 0,6 % de la population adulte connaît des problèmes d'addiction, 9,8 % des parieurs pratiquant le betting exchange développent des phénomènes de jeu excessif ;

- des risques de fraude plus élevés : la traçabilité des paris et le contrôle des objets de paris sont en effet rendus plus difficiles par la possibilité d'échanges de positions entre joueurs. Plusieurs cas de fraudes ont ainsi été détectés au Royaume-Uni en 2004 et 2006 ;

- un contournement, enfin, des principes posés par le présent projet de loi en ce que, d'une part, la fixation de la cote revient à des personnes non agréées par l'ARJEL et, d'autre part, en ce que le calcul et l'encadrement du taux de retour aux joueurs ou aux parieurs (TRJ ou TRP) deviendrait presqu'impossible. »

Or l'article 2, s'il définit le pari à cote, n'interdit pas la bourse aux paris, et l'article 4, qui prohibe formellement le pari à fourchette, ne paraît pas présenter de garanties suffisantes pour empêcher le développement de certains types de « beting exchange ».

C'est la raison pour laquelle votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur :

- un amendement à l'article 7 du projet de loi prévoyant que seuls les paris à cote tels que définis à l'article 2 sont autorisés ;

- et un amendement au présent article interdisant sans ambigüité les systèmes de bourse ou d'intermédiation de paris.

Sous réserve de la prise en compte des modifications qu'elle a adoptées par voie d'amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 4 ter A - Rapport sur les conséquences du développement de la publicité dans le secteur des jeux en ligne

I - Le texte de la commission des finances

Le présent article tend à imposer au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) qu'il rende un rapport d'évaluation des conséquences de la publicité en faveur des jeux d'argent et de hasard, dans un délai de dix-huit mois à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, « en concertation avec l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité ».

II - La position de votre commission

Votre rapporteur pour avis, s'il soutient pleinement cette initiative, qui permettra de tirer un premier bilan des dispositions de l'article 4 bis qui encadre la communication commerciale sur les différents supports, estime que le CSA doit mener seul cette mission , en s'appuyant, s'il le souhaite, sur l'Autorité de régulation de la publicité (ARP), qu'il auditionnera sans aucun doute dans le cadre de ses travaux.

Par ailleurs, votre commission avait fait adopter un amendement, lors de la discussion sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public, tendant à mentionner dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le rôle des « autorités d'autorégulation mises en place dans le secteur de la publicité » (article 14), ne donnant ainsi aucune prééminence législative à l'actuelle ARP. Il n'apparaît ni cohérent ni légitime de revenir sur cette ligne de conduite et de donner une existence légale à l'ARP.

C'est la raison pour laquelle votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement supprimant la référence à l'ARP dans le présent article.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 6 - Ouverture des paris hippiques en ligne

I - Le texte de la commission des finances

Cet article prévoit que par dérogation à la loi du 2 juin 1891 régissant les courses de chevaux, l'organisation et la prise de paris hippiques en ligne, restreints à la seule forme mutuelle, est ouverte à tout opérateur titulaire d'un agrément spécifique délivré par l'ARJEL.

II - La position de votre commission

Votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement de clarification qui revient à la rédaction initiale du projet de loi, modifiée lors de l'examen à l'Assemblée nationale, pour prévoir l'établissement par voie réglementaire de listes de courses ouvertes aux paris, et non pas de réunions de courses. Une réunion de courses comporte en effet plusieurs courses, mais seules certaines courses au sein d'une même réunion seront désignées comme support pour la prise de paris.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 7 - Autorisation des paris sportifs en ligne

I - Le texte de la commission des finances

Le présent article tend à autoriser les opérateurs agréés à organiser des paris sportifs en ligne.

La commission des finances n'a pas modifié cet article qui ouvre la possibilité aux opérateurs d'organiser des paris sportifs, lesquels :

- ne peuvent porter que sur l'une des catégories de compétition définies par l'ARJEL ;

- et ne peuvent porter que sur certains résultats, ainsi que sur certaines phases de jeux en ligne, déterminés par l'ARJEL, sans préjudice du droit d'exploitation des manifestations sportives détenu par les organisateurs de compétitions qui auront, aux termes de l'article 52, un droit de regard sur les modalités d'organisation des paris sur lesdites compétitions.

Par ailleurs le III du présent article permet aux opérateurs de faire appel à des mécanismes d'abondement de gains, sous réserve que cette pratique demeure ponctuelle et n'ait pas pour effet de dénaturer le caractère mutuel des paris.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve les principes définis au présent article. Elle a cependant adopté un amendement tendant à préciser que les paris autorisés sont bien uniquement les paris à cote et les paris en la forme mutuelle ce qui permettrait :

- d'une part, d'éviter qu'un type nouveau de paris qui ne serait ni à cote ni en la forme mutuelle ne se développe et échappe à la législation sur les jeux en ligne ;

- et d'autre part, de donner une pleine application au dernier alinéa de l'article 2, qui définit les paris à cote, sans que cette notion n'apparaisse ensuite dans le reste du texte de loi.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption du présent article .

Article 8 - Règles applicables à la prise de paris en ligne

Le présent article tend à définir les conditions dans lesquelles les opérateurs peuvent proposer des paris en ligne.

Le II prévoit notamment qu'un décret fixera « la proportion maximale des sommes reversées en moyenne aux joueurs par rapport aux sommes engagées par type d'agrément », c'est-à-dire le taux de retour au parieur. Cette disposition vise notamment à limiter les pratiques de « vente à perte », condition d'une concurrence loyale entre les opérateurs.

Or, telle qu'elle est rédigée, cette disposition est aisément contournable puisqu'elle est limitée à la proportion des sommes reversées aux joueurs et que, dans la pratique, les opérateurs abondent les comptes joueurs au travers d'offres promotionnelles, ou de bonus. Ces bonus peuvent revêtir différentes formes que ce soit en numéraire ou en nature, et ont un impact, de fait, sur le taux effectif de retour aux joueurs (TRJ).

Votre commission a donc adopté un amendement visant à tenir compte des bonus en nature dans la détermination du taux de retour aux joueurs.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption du présent article .

Article 12 - Modalités d'accès et d'inscription à un site de jeux ou de paris

I - Le texte de la commission des finances

Cet article prévoit que les opérateurs de jeux en ligne sollicitant l'agrément de l'ARJEL doivent lui préciser les modalités d'accès et d'inscription, ainsi que les moyens d'identification du joueur et de ses moyens de paiement. Ils devront également apporté la garantie que tout nouveau joueur se voit attribuer un compte joueur avant toute mise ou pari. L'ouverture et l'approvisionnement initial du compte joueur devront être opérés après la date d'agrément de l'opérateur.

Les comptes joueurs devront être adossés à un unique compte de paiement, à partir duquel le compte joueur sera approvisionné et qui pourra seul bénéficier du reversement des avoirs du joueur auprès de l'opérateur.

La commission des finances a précisé que l'opérateur devait s'assurer que le joueur était une personne physique, et non un robot informatique, lors de toutes les sessions de jeu.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve l'encadrement strict de l'accès et de l'inscription des joueurs sur les sites de jeux et de paris en ligne. C'est une mesure essentielle dans la lutte contre l'addiction, la fraude et le blanchiment de capitaux.

Il est tout à fait envisageable qu'un parieur puisse disposer de plusieurs sous-comptes auprès d'un même opérateur au titre de ses différentes activités de pari hippique, de pari sportif ou de jeux de cercle, en fonction notamment de la politique commerciale de l'opérateur. Dans le cas spécifique des opérateurs historiques, la Française des jeux et le PMU, il est probable qu'un même joueur dispose à la fois d'un compte pour le pari « en dur » et d'un compte pour le pari en ligne.

Le projet de loi prévoit que chaque compte joueur ne puisse être approvisionné qu'à partir d'un compte de paiement, sans possibilité de réaliser des opérations de compte joueur à compte joueur. Cette disposition semble un peu trop restrictive et potentiellement porteuse d'effets pervers. Il est à craindre que les parieurs tendront à « sur-créditer » chacun de leurs différents comptes joueurs afin d'être sûr de disposer d'assez de fonds pour pouvoir jouer à tout moment sur l'ensemble des supports. En revanche, s'il était possible de réaliser des opérations de compte à compte chez un même opérateur, on éviterait cet effet indésirable de la multiplication des comptes et sous-comptes étanches, ce qui devrait contribuer à modérer la dépense de jeu.

C'est pourquoi votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement tendant à laisser la possibilité au parieur d'approvisionner un de ses comptes ou sous-compte joueurs à partir d'un autre compte ouvert chez le même opérateur. Un joueur disposant de plusieurs comptes ou sous-comptes chez un même opérateur pourrait ainsi réaliser des opérations de compte à compte. Ce dispositif permettra au joueur d'avoir une vision plus globale et moins morcelée de la gestion de ses mises chez un même opérateur.

En outre, cet amendement répond aux inquiétudes des membres du réseau de proximité du PMU, qui craignent que leur clientèle habituelle ne les délaisse au profit du pari en ligne. En effet, le dispositif proposé permettra aux joueurs de transférer des sommes créditées sur leur compte en ligne PMU vers leur compte « en dur » utilisable pour des paris dans le réseau de proximité et inversement. Il assure ainsi la participation du réseau de proximité, qui contribue à freiner la désertification de certains territoires, au développement des paris en ligne.

La traçabilité des opérations de compte à compte par l'ARJEL est assurée par un amendement adopté à l'article 29.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption du présent article .

Article 25 - Missions de l'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL)

I - Le texte de la commission des finances

Cet article définit l'ARJEL comme une autorité administrative indépendante (AAI) et présente les missions de régulation qui lui sont confiées.

La catégorie des AAI connaît une expansion croissante depuis la création de la Commission nationale de l'Informatique et des libertés (CNIL) par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978. Pour autant, malgré de grandes similitudes entre les différentes autorités et les constructions jurisprudentielles de la Cour de Cassation, du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel, il n'existe aucun cadre juridique commun unifiant leur statut. Chaque autorité dispose d'une organisation et de pouvoirs propres définis par la loi qui l'institue.

En règle générale, à moins d'une disposition expresse contraire, les AAI ne disposent pas de la personnalité morale, à la différence des établissements publics. Quoique détachées de l'Etat, elles agissent pour son compte et engagent sa responsabilité par leur action. L'ARJEL ne déroge pas à ce principe.

L'ARJEL a une compétence générale couvrant toute le secteur des jeux et des paris en ligne. Elle aura pour tâche spécifique d'instruire les demandes d'agrément des opérateurs, de délivrer les agréments et d'exercer la surveillance des opérateurs et de contribuer la lutte contre les sites illégaux. Elle agira également comme conseil du Gouvernement en lui proposant des clauses de cahier des charges pour chaque type de jeux ou de paris, en rendant un avis sur tout projet de loi concernant le secteur des jeux en ligne et en proposant tout modification législative et réglementaire qu'elle jugerait légitime. Elle fixera les caractéristiques techniques des plateformes et des logiciels de jeux et de paris en ligne.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la description des missions de l'autorité adoptée par la commission des finances.

En revanche, conformément à la doctrine qu'elle a élaborée progressivement avec la création de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) et de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI), votre commission estime que le défaut de personnalité morale handicape l'ARJEL.

Le statut d'AAI supprime le contrôle hiérarchique du ministre mais ne confère pas une autonomie juridique complète. Sans personnalité morale, il est en effet impossible de contracter, de disposer d'un patrimoine propre et d'ester en justice. L'article 28 du projet de loi a recours à un artifice pour pallier partiellement cette insuffisance en conférant au président de l'autorité, personne physique, qualité pour agir en justice au nom de l'ARJEL. Cette solution incomplète n'est guère satisfaisante et personnalise à outrance le fonctionnement d'un organisme pourtant collégial.

Seul l'octroi de la personnalité morale, sur le modèle de l'Autorité des marchés financiers, de l'AFLD ou de l'HADOPI, permettrait de donner à l'ARJEL une pleine capacité juridique tout en la rendant en retour pleinement responsable de ses décisions sans le paravent de l'Etat. L'indépendance du régulateur et l'accroissement de sa capacité d'action doivent en effet aller de pair avec l'obligation de rendre compte de ses actes.

Enfin, il est important pour asseoir sa légitimité de rendre clairement manifeste le découplage de l'autorité et des services de l'Etat. Alors que deux opérateurs public ou parapublic en situation de monopole sur le jeu « en dur », la Française des jeux et le PMU, vont prendre position sur le secteur des jeux en ligne, il apparaît en effet sain et légitime de garantir l'indépendance et l'impartialité de la nouvelle autorité de régulation et de prévenir toutes les suspicions qui en décrédibiliseraient par avance l'action.

À l'initiative de son rapporteur pour avis, votre commission a donc adopté un amendement tendant à transformer l'ARJEL en une autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 26 - Composition de l'ARJEL

I - Le texte de la commission des finances

Cet article décrit les organes de l'ARJEL, qui comprendra un collège, une commission des sanctions, et le cas échéant des commissions spécialisées, dans lesquelles seront nommées des personnalités qualifiées.

Les sept membres du collège sont nommés pour deux d'entre eux, par le Président du Sénat, pour deux autres par le Président de l'Assemblée nationale et pour les trois derniers, dont le président, par décret. Leur mandat est de six ans, renouvelable une fois, à l'exclusion de celui du président.

Le projet de loi initial prévoyait la constitution au sein de l'autorité d'une commission consultative, dans laquelle étaient nommés par arrêté des représentants de toutes les parties prenantes (opérateurs, société mères de course, monde du sport, associations familiales et de consommateurs, communes, professionnels de lutte contre les addictions). Cette commission consultative a été supprimée par la commission des finances afin d'éviter la multiplication des structures et de prévenir les conflits de compétences avec le comité consultatif des jeux visé à l'article premier, dont la compétence est générale à la fois pour le jeu « en dur » et le jeu en ligne et qui est placé auprès du Premier ministre.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la suppression de la commission consultative de l'ARJEL dont les importants pouvoirs d'avis risquaient d'interférer avec l'action du collège.

Elle regrette cependant, d'une part, que seuls les membres de l'autorité nommés par les Présidents des assemblées doivent justifier de compétences économique, juridique ou technique, d'autre part, que le mandat des membres de l'autorité soit renouvelable.

Alors que le secteur des jeux d'argent et des paris jouit d'une réputation sulfureuse, due pour partie aux risques bien réels de fraude et de blanchiment de capitaux, il est important de tuer dans l'oeuf tous les soupçons qui viendraient entacher l'indépendance et la crédibilité des membres de l'autorité. Les apparences affichées comptent tout autant que les pratiques suivies : l'indépendance et l'impartialité doivent se donner à voir dès l'acte de création de l'autorité et non simplement s'avérer a posteriori . La loi se doit donc d'être la plus claire et la plus rigoureuse possible et d'offrir le maximum de garanties.

Si l'on considère que la compétence est un critère pertinent de choix des membres de l'autorité, aucune nomination ne doit y échapper. Il n'est pas légitime d'imposer moins de contrainte au gouvernement qu'aux présidents des assemblées dans le choix des membres du collège.

Votre commission a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement visant à ce que tous les membres du collège de l'ARJEL soient nommés à raison de leurs compétences économique, juridique ou technique , y compris les membres nommés par décret et non seulement les membres nommés par le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat.

De même, votre commission estime que le principe du renouvellement du mandat des membres du collège, à l'exception de celui du président, ne se justifie pas. Dans de nombreuses autres AAI dotées de pouvoirs importants, y compris de sanction, comme le Conseil supérieur de l'audiovisuel, (CSA), l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), la Commission de régulation de l'électricité (CRE) ou la HADOPI, il est au contraire prévu que le mandat des membres ne soit pas renouvelable, afin de les prémunir contre toute pression émanant des autorités de nomination. La non-renouvelabilité apparaît comme une garantie essentielle de l'indépendance des membres de l'autorité vis-à-vis du politique. Parallèlement, il est fréquent que soit expressément consacrée l'inamovibilité des membres de l'AAI par la précision que leur mandat n'est pas révocable.

De plus, s'il convient que le mandat soit suffisamment long pour permettre l'apprentissage de la fonction et la consolidation d'une doctrine guidant l'action de l'autorité - un mandat de six ans paraît suffisant à cet égard, il faut éviter toute capture de l'autorité par les milieux qu'elle doit réguler. À cet égard, des membres restés trop longtemps en fonction risquent de développer une proximité et une familiarité trop grandes avec les opérateurs, qui risquent insensiblement soit de biaiser leur appréhension des dossiers, soit de laisser penser au public que c'est le cas. La crédibilité et l'efficacité de l'action de l'ARJEL s'en trouveront de toute façon amoindries.

La rotation des membres doit donc être suffisamment fréquente pour ne pas laisser de prise aux accusations de capture de l'autorité. Le texte prévoit que le collège soit renouvelé par moitié tous les trois ans, ce que votre commission approuve, tout en remarquant que cette disposition perd de son intérêt si les mandats peuvent être reconduits.

Ces remarques ont conduit votre commission à adopter, à l'initiative de son rapporteur pour avis, un amendement tendant à prévoir que les mandats de tous les membres du collège ne sont ni révocables ni renouvelables.

Votre commission a toutefois maintenu une possibilité de renouvellement dans un cas très spécifique. En cas de vacance de poste au sein du collège, un remplaçant est en effet nommé pour la durée du mandat restant à courir. Il est donc possible que le remplaçant n'exerce qu'un mandat très court de quelques mois. Afin de garantir la continuité et la cohérence de l'action du collège, l'amendement de votre commission prévoit que les mandats exercés pendant moins de deux ans par dérogation à la règle de non-renouvellement puissent être renouvelés une fois.

Sous réserve de la prise en compte de ces amendements, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 27 - Prévention des conflits d'intérêts et respect du secret professionnel au sein de l'ARJEL

I - Le texte de la commission des finances

Cet article, adopté sans modification par la commission des finances, vise à prévenir les conflits d'intérêts, d'une part, en imposant aux membres de l'ARJEL une obligation d'information portant sur les intérêts, les fonctions et les mandats détenus pendant les deux dernières années, d'autre part, en définissant un régime d'incompatibilités. Une interdiction formelle d'exercer un mandat électif national ou une activité en lien avec les jeux et de parier en ligne s'impose aux membres de l'autorité. En outre, les membres et les personnels de l'ARJEL sont soumis au respect du secret professionnel.

II - La position de votre commission

Votre commission se félicite de l'inscription de règles strictes, qui seront ensuite déclinées dans le règlement intérieur de l'ARJEL sous l'autorité du président.

Elle a néanmoins souhaité compléter le dispositif de prévention des conflits d'intérêts en adoptant à l'initiative de son rapporteur pour avis, un amendement qui tend à prévoir un délai de viduité de trois ans à compter de la cessation de leurs fonctions pendant lequel les membres de l'autorité, ainsi que son directeur général, ne pourront prendre ou recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans une entreprise de jeux en ligne.

Il est fait ainsi renvoi aux dispositions générales de l'article 432-13 du code pénal qui punit de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait pour un fonctionnaire ou un agent public qui a eu à connaître d'une entreprise privée dans l'exercice de ses fonctions de la rejoindre ou d'y être intéressé pendant les trois ans suivant la fin de ces fonctions. Cet amendement témoigne à nouveau de la volonté de votre commission de garantir le crédit des membres de l'autorité et d'éviter toute suspicion de capture par le secteur économique qu'elle doit surveiller.

En outre, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement de précision tendant à soumettre explicitement les personnalités qualifiées nommées dans les commissions spécialisées de l'ARJEL au respect du secret professionnel, au même titre que les membres et les personnels de l'autorité.

Sous réserve de la prise en compte de ces amendements, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 28 - Fonctionnement interne et budget de l'ARJEL

I - Le texte de la commission des finances

Cet article règle les grandes lignes du fonctionnement interne de l'ARJEL. Il prévoit notamment que les services de l'ARJEL sont dirigés par un directeur général, qui rend compte de sa gestion devant le collège. L'autorité aura de plus la possibilité de recruter des agents contractuels.

Le budget de l'ARJEL, qui ne dispose pas de l'autonomie financière, est intégré au budget général de l'Etat. Ces crédits donnent lieu chaque année à une proposition de l'autorité au ministre chargé du budget.

La commission des finances du Sénat a, par ailleurs, supprimé la possibilité pour le collège de déléguer sa signature à des commissions spécialisées afin d'éviter la multiplication des entités décisionnaires.

II - La position de votre commission

Dans la mesure où la création de l'ARJEL répond à des impératifs de sécurité et de santé publiques, rien ne laisse présager un sous-financement par l'Etat de son action. Cependant, sans remettre en cause le principe de la dotation budgétaire intégrée au budget général de l'Etat, votre commission veillera à ce que les crédits alloués chaque année en loi de finances à l'ARJEL soient effectivement suffisants pour l'accomplissement de ses missions. De plus, elle souhaite qu'afin de parfaire le statut indépendant de l'ARJEL, soit étudiée pour l'avenir l'opportunité de la doter de ressources propres, ce que l'octroi de la personnalité morale rendrait possible.

Votre commission tient également à souligner l'importance du rôle que les services, et plus particulièrement le directeur général, auront à jouer dans le fonctionnement de l'ARJEL. Trop souvent, leur contribution est laissée dans l'ombre. Entre les réunions du collège, ce sont eux qui assureront la continuité du service. De plus, le directeur aura la haute main sur la préparation technique des dossiers et contribuera ainsi indirectement à la formation des décisions.

L'autonomie de l'ARJEL tant vis-à-vis du politique que des opérateurs économiques, autonomie que votre commission tient à renforcer, passe également par sa capacité à recruter de sa propre initiative des personnels compétents. C'est pourquoi votre commission approuve la faculté laissée à l'ARJEL de recruter des agents contractuels. Il lui semble aussi souhaitable que l'autorité puisse choisir elle-même son directeur général sans qu'il lui soit imposé. Elle a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement prévoyant que le directeur général de l'ARJEL soit nommé par le collège sur proposition du président de l'autorité.

Afin de maintenir une distinction nette entre la préparation des dossiers et la prise de décision, elle a également adopté, à l'initiative de son rapporteur un amendement de précision qui exclut explicitement tout cumul entre les fonctions de membre de l'autorité et de directeur général.

Enfin, elle a adopté un amendement supprimant la disposition donnant qualité au président pour agir en justice, par cohérence avec l'octroi de la personnalité morale à l'ARJEL adopté à l'article 25.

Sous réserve de la prise en compte de ces amendements, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 29 - Informations transmises à l'ARJEL pour le contrôle des opérateurs

I - Le texte de la commission des finances

Cet article, adopté par la commission des finances moyennant deux clarifications rédactionnelles, précise les données que les opérateurs mettent à la disposition de l'ARJEL afin qu'elle puisse assurer un contrôle permanent de leurs activités.

II - La position de votre commission

Votre commission accueille très favorablement les obligations d'information imposées aux opérateurs de jeux et de paris en ligne, sans lesquelles l'ARJEL se trouverait incapable de mener à bien sa mission de contrôle du secteur.

À l'initiative de son rapporteur, elle a adopté un amendement précisant que les opérateurs devront mettre à la disposition de l'ARJEL l'intégralité des éléments concourant à la formation du solde du compte joueur, afin qu'elle puisse s'assurer de manière optimale de la régularité de l'ensemble des opérations effectuées sur ce compte. Cette disposition assurera la transparence et la traçabilité des opérations de compte à compte, qu'un amendement à l'article 12 a proposé de rendre possible.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 39 - (articles 302 bis ZG à ZN du code général des impôts) - Régime fiscal des jeux de cercle en ligne et des paris hippiques et sportifs

I - Le texte de la commission des finances

Cet article, adopté sans modification par la commission des finances, réforme de fond en comble la fiscalité sur les jeux et les paris, qu'ils soient distribués sur des sites physiques ou en ligne, dans un double souci de simplification et de constitution d'une offre légale compétitive. Les paris hippiques et sportifs sont indifféremment soumis à un prélèvement de 5,7 % des sommes engagées par les joueurs.

Il est également prévu d'affecter une fraction du produit du prélèvement sur les paris hippiques aux communes possédant un hippodrome. Un dispositif similaire portant sur les jeux de cercle en ligne est institué au bénéfice du Centre des monuments nationaux (CMN).

II - La position de votre commission

L'affectation au CMN de 15 % des recettes sur les jeux de cercle en ligne, dans la limite de 10 millions d'euros, ne peut qu'être reçue très favorablement par votre commission, qui s'est notamment inquiétée des modalités de la compensation financière du transfert de la maîtrise d'ouvrage de l'Etat vers cet établissement public. Les ressources affectées représentent cependant un peu moins de 10 % du budget du CMN et votre commission restera vigilante pour s'assurer de la pérennité de son financement global.

Par ailleurs, s'il apparaît économiquement opportun et juridiquement fondé de ne pas différencier la fiscalité sur les paris « en dur » et les paris en ligne, rien ne justifie l'alignement automatique imposé par le projet de loi des taux de taxation des paris hippiques et des paris sportifs. Il s'agit de deux types différents d'épreuves supports (courses de chevaux / performances sportives) et de deux formes de paris (mutuel / à cote) bien distinctes. Votre commission souhaite donc que soient différenciés les taux sur les paris hippiques et sportifs , ce qui permettra à l'avenir un pilotage de la fiscalité sur les jeux plus fin et plus attentif aux besoins propres de chaque filière, équine et sportive.

En outre, votre commission a le souci de préserver la compétitivité et l'attractivité des paris hippiques par rapport aux paris sportifs que l'ouverture à la concurrence ne manquera pas de stimuler. En effet, le PMU est un instrument essentiel de financement de la filière équine , qui représente environ 69 000 emplois directs et 20 000 emplois indirects répartis sur l'ensemble du territoire. En outre, le pari hippique, obligatoirement restreint à la forme mutuelle, entraîne des risques de fraude inférieurs à ceux qui sont associés au pari sportif à cote fixe.

Elle a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement tendant à :

- abaisser de 0,5 % le taux du prélèvement fiscal sur le pari hippique, qui s'établit alors à 5,2 % des mises ;

- augmenter parallèlement de 0,5 % la fiscalité sur le pari sportif, fixée dès lors à 6,2% des mises.

Si l'on tient compte du prélèvement social fixé à 1,8 % des mises par l'article 40 du projet de loi, on obtient ainsi un prélèvement global de 7 % sur les paris hippiques et de 8% sur les paris sportifs. L'avantage fiscal accordé au pari hippique permettrait donc de contrebalancer d'un point l'écart entre la redevance en faveur de la filière équine (entre 7,5 et 9 % des mises d'après l'article 43 bis du texte) et les reversements au sport amateur (1,8 % à partir de 2012 d'après l'article 43 du texte).

Le taux de retour aux joueurs du pari hippique, c'est-à-dire la proportion des sommes reversées aux joueurs par rapport à leurs mises, serait ainsi amélioré pour se rapprocher de celui des paris sportifs. Sous réserve des plafonds imposés pour chaque catégorie de paris par le pouvoir réglementaire sur le fondement de l'article 8 du texte, il serait compris au maximum entre 84 % et 85,5 % des mises hippiques contre 90,2 % pour les paris sportifs à partir de 2012. La réduction de l'écart entre les taux de retour aux joueurs devrait accroître l'attractivité du pari hippique et limiter ainsi les effets sur la filière équine de l'ouverture à la concurrence dont on peut craindre qu'elle n'entraîne une fuite des joueurs vers le pari sportif.

Cette mesure devrait à terme être bénéfique pour le budget de l'Etat, puisqu'il est probable que le surcroît de recettes sur le pari sportif, qui ne manquera pas de se développer très rapidement, sera supérieur à la perte de recettes sur le pari hippique.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 43 - Aménagement du prélèvement au profit du Centre national pour le développement du sport

I - Le texte de la commission des finances

Le présent article vise à créer deux prélèvements nouveaux affectés au Centre national pour le développement du sport (CNDS) :

- l'un sur les mises de la Française des jeux, qui est déjà prévu à l'article 53 de la loi n° 2005-1719 de finances pour 2006, dont le taux n'est pas modifié (1,78 %), mais pour lequel sont exclues de l'assiette les mises sur les paris sportifs enregistrées par la Française des jeux. La recette attendue pour 2010 est évaluée à 154,3 millions d'euros.

- l'autre sur l'ensemble des sommes misées sur les paris sportifs, « en dur » de la Française des Jeux et en ligne, de tous les opérateurs du marché, dont la Française des Jeux. Le taux de ce prélèvement, initialement fixé à 1 %, a été porté par l'Assemblée nationale à 1,3 % en 2010, puis à 1,5 % en 2011 et à 1,8 % à compter de 2012. Cette taxation uniforme des paris sportifs en ligne ou « en dur » est conforme à une concurrence loyale entre les deux marchés. En année pleine, la recette avait été évaluée dans le projet annuel de performance « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances pour 2010, à environ 30 millions d'euros pour 2010.

La commission des finances a choisi de ne pas modifier cet article majeur pour le financement du sport amateur en France.

II - La position de votre commission

Aux termes de l'article R. 411-2 du code du sport, le CNDS a pour missions, dans le cadre des orientations générales fixées par le ministre chargé des sports, de :

- contribuer au développement de la pratique du sport par le plus grand nombre ;

- favoriser l'accès au sport de haut niveau et l'organisation de manifestations sportives ;

- promouvoir la santé par le sport ;

- améliorer la sécurité des pratiques sportives et la protection des sportifs ;

- et renforcer l'encadrement de la pratique sportive.

Il exerce ces missions par l'attribution de concours financiers, sous forme de subventions d'équipement ou de fonctionnement, au Comité national olympique et sportif français, aux associations sportives, aux collectivités territoriales ou à leurs groupements, aux organismes assurant le fonctionnement des antennes médicales de prévention du dopage mentionnées à l'article L. 232-1 du code du sport, ainsi qu'aux associations et groupements d'intérêt public qui interviennent dans le domaine des activités physiques et sportives.

Il s'agit ainsi d'un opérateur majeur de l'État , qui finance la quasi-intégralité des mesures prises au niveau national en faveur du sport amateur, que ce soit en termes de subventions d'équipement ou de fonctionnement. Son budget représente ainsi plus du quart du financement consacré par l'État à la politique sportive.

Au vu de la vétusté des équipements sportifs français, de l'incertitude sur les mises sur les paris sportifs en ligne et de la légitimité d'un financement du sport amateur via les paris sportifs, votre commission est très favorable au maintien du dispositif adopté à l'Assemblée nationale, qui devrait permettre d'assurer un financement au minimum constant du sport amateur français.

Mais, par ailleurs, elle souhaite, dans la droite ligne des travaux qu'elle mène depuis plusieurs années, que cette nouvelle ressource issue de la libéralisation du secteur des paris sportifs puisse bénéficier à l'ensemble de la filière sportive à travers une dotation à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) .

En effet, l'Agence a clairement besoin d'une ressource propre. Ce principe avait au demeurant été proposé par le Gouvernement lors de la discussion de l'article 60 du projet de loi de finances pour 2010, qui tendait à augmenter le taux de la contribution sur la cession des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives (dite taxe « Buffet ») de 5 % à 5,5 %, et à lui affecter, dans la limite de 4 millions d'euros.

Très favorable au principe de cette affectation de taxe, qui renforcerait l'indépendance de l'AFLD et la pérennité de son financement , le Sénat avait toutefois supprimé cet article afin de prendre en compte les difficultés du sport professionnel, notamment après la suppression du dispositif du droit à l'image collective dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

Il apparaît que le prélèvement sur les mises des paris sportifs est un support plus adapté, notamment parce que l'assiette est beaucoup plus large (le double ou le triple de la taxe Buffet), et que le taux appliqué pourrait ainsi être beaucoup plus faible.

Dans un contexte où le financement de l'Agence est loin d'être assuré, votre commission a adopté, à l'unanimité, un amendement prévoyant un prélèvement complémentaire sur les sommes misées sur les paris sportifs, dont le taux serait de 0,3 % . Serait appliqué à son montant un plafond de 4 millions d'euros, soit environ la moitié de l'actuelle dotation de l'AFLD.

Ce taux pourrait bien évidemment être amené à évoluer en loi de finances en fonction de l'évolution de l'assiette du prélèvement et des besoins de l'agence française de lutte contre le dopage.

Sous réserve de la prise en compte de cet amendement, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 50 - Blocage de l'accès à un site illégal de paris ou de jeux

I - Le texte de la commission des finances

Cet article définit les conditions de blocage de l'accès aux sites de jeux et de paris des opérateurs dépourvus d'agrément. Après une mise en demeure de l'ARJEL enjoignant aux opérateurs de respecter l'interdiction d'exercer leur activité, en cas d'inexécution, le président de l'autorité peut saisir le juge des référés aux fins d'ordonner aux fournisseurs d'accès à Internet, les fournisseurs d'hébergement, les moteurs de recherche et les gestionnaires de forums ou de blogs l'arrêt de l'accès aux sites illégaux.

La commission des finances du Sénat a également donné au président de l'ARJEL le pouvoir de saisir le juge des référés aux fins de voir prescrire toute mesure destinée à faire cesser le référencement du site de l'opérateur illicite par un moteur de recherche ou un annuaire. Elle a, par ailleurs, supprimé la disposition prévoyant la publication des décisions de l'ARJEL dans la mesure où celle-ci ne rend pas de sanction, laissant ce soin au juge des référés.

II - La position de votre commission

Votre commission estime que la lutte contre les sites illégaux doit être menée avec la plus grande vigueur, eu égard au risque que les opérateurs dépourvus d'agrément font peser sur l'ordre public et social. L'architecture du projet de loi vise à élaborer une offre légale attractive. La sanction de l'offre illégale est un corollaire nécessaire. C'est pourquoi, dans un souci d'efficacité, il convient de permettre à l'ARJEL d'intervenir rapidement et directement sans passer par le filtre du juge des référés.

Aux termes de l'article 808 du code de procédure civile, « dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. » Or, il est fort possible que le juge des référés saisi par le président de l'ARJEL refuse de se prononcer et renvoie l'affaire au juge du fond, soit parce qu'il considérera que l'urgence n'est pas avérée, soit parce qu'il estimera la matière techniquement trop complexe et par là-même soumise à contestation.

En effet, il ne sera pas demandé au juge des référés de constater simplement l'absence d'agrément de l'opérateur mais bien l'existence d'une activité illégale à destination des joueurs français. Le défaut d'agrément ne suffit pas à prouver l'activité illégale. Il faudra utiliser la méthode du faisceau d'indices pour démontrer que le site sans agrément cible des clients français, en s'appuyant par exemple sur les détails caractéristiques de la politique commerciale de l'opérateur. M. Jean-François Villotte, responsable de l'autorité de préfiguration de l'ARJEL, en a lui-même convenu devant la commission des finances lors de son audition du 13 janvier 2010. Dès lors qu'il faut croiser plusieurs indices pour caractériser l'activité illégale, sans que le défaut d'agrément suffise, toute mesure de blocage pourra se heurter à une contestation sérieuse au sens du code de procédure civile.

Il est à craindre, qu'en conséquence, le juge des référés renvoie l'affaire au juge du fond. La procédure en sera considérablement ralentie, si bien que les sites illégaux persisteront à proposer des services dont on sait qu'ils seront particulièrement dommageables pour la santé et la sécurité publiques.

Votre commission a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement tendant à conférer à la commission des sanctions de l'ARJEL composée de magistrats, le pouvoir d'ordonner directement l'arrêt de l'accès aux sites illégaux . Ce pouvoir est néanmoins strictement encadré : la durée de l'arrêt ne pourra excéder un an, le trouble sanctionné doit être grave, les droits de la défense (consultation du dossier, présentation d'observations, possibilité de recours) sont respectés par la procédure, reprise de l'article 36 du projet de loi.

La décision du Conseil Constitutionnel du 10 juin 2009 sur la loi relative à la diffusion et à la protection de la création sur Internet a été invoquée à l'Assemblée nationale, contre le rapporteur de la commission des finances, M. Jean-François Lamour, pour justifier le recours à une décision de justice. L'analogie entre les pouvoirs conférés à l'ARJEL par l'amendement de votre commission et le dispositif censuré par le Conseil Constitutionnel est fallacieuse.

La censure venait du motif que la commission de protection des droits de la HADOPI était dotée d'un pouvoir de coupure de l'accès à l'internet, qui, d'une part, s'étendait à la totalité de la population et non à une catégorie particulière de personnes, d'autre part, menaçait l'exercice de la liberté d'expression et de communication. Conférer à l'ARJEL la faculté d'ordonner directement l'arrêt de l'accès aux sites illégaux ne touche en rien la capacité des internautes à accéder au réseau et ne restreint en aucune mesure leur droit de s'exprimer et de communiquer librement. Il s'agit seulement de faire cesser une illégalité pour préserver l'ordre public.

Au cours de leurs auditions, les fournisseurs d'accès à Internet ont sensibilisé votre rapporteur aux difficultés techniques qu'ils risquaient de rencontrer lors de la mise en oeuvre de l'interdiction d'accès à un site illégal de jeux ou de paris. Ils ont déjà été confrontés à des sites conçus pour résister aux différents types de blocage techniquement envisageables comme le blocage DNS ou le blocage de l'adresse IP. Il apparaît néanmoins souhaitable de maintenir une obligation de résultats qui stimulera l'invention de nouvelles méthodes plus efficaces et qui témoigne de la volonté politique du législateur de ne pas transiger sur la lutte contre les sites illégaux.

Les mesures de blocage ne pouvant être efficaces qu'avec le plein engagement des FAI, il est nécessaire de sécuriser juridiquement leur action. En effet, le blocage de l'accès aux sites illégaux par les fournisseurs d'accès comporte certains risques collatéraux de blocage d'autres sites parfaitement licites. Les dommages éventuellement occasionnés ne devraient pas être à la charge des opérateurs agissant de bonne foi, dans la mesure où les mesures mises en oeuvre sont requises par l'autorité publique. Dans un domaine similaire, l'article L. 563-4 du code monétaire et financier dégage déjà la responsabilité des établissements bancaires mettant en oeuvre, sur prescription des ministres de l'intérieur et des finances, le blocage des mouvements et des transferts de fonds provenant d'opérateurs illégaux de paris, de jeux ou de loteries prohibés.

C'est pourquoi votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement dégageant la responsabilité des personnes mettant en oeuvre de bonne foi la décision de blocage des sites illégaux prise par l'ARJEL en cas de conséquence dommageable .

En outre, si le projet de loi impose des obligations de blocage de sites aux fournisseurs d'accès à Internet, il est légitime et conforme à la jurisprudence du Conseil Constitutionnel (DC n° 2000-441 du 28 décembre 2000 relative aux dispositifs d'interceptions judiciaires) de prévoir une compensation financière, dans la mesure où les opérateurs réquisitionnés agissent pour le compte de la puissance publique. La nature même des dépenses entraînées par le blocage des sites illégaux justifie que leur prise en charge n'incombe pas directement et intégralement aux fournisseurs d'accès. Votre commission a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement qui précise l' état du droit en renvoyant au décret le soin de fixer les modalités de compensation financière des surcoûts entrainés par le blocage des sites illégaux .

Sous réserve de la prise en compte de ces amendements, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article 52 (article L. 333-1-1 à L. 333-1-3 nouveaux du code du sport) - Encadrement de l'utilisation commerciale des éléments caractéristiques des manifestations ou compétitions sportives

I - Le texte de la commission des finances

Le présent article tend à préciser que le droit d'exploitation que détiennent les organisateurs de compétitions et manifestations sportives en vertu de l'article L. 333-1 du code du sport inclut le droit de consentir à l'organisation de paris sur ces épreuves.

L'arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 octobre 2009 « Unibet c/ Fédération française de tennis », avait déjà reconnu que l'organisation de paris sportifs, dans la mesure où elle consiste en une activité économique destinée à générer des profits, portait atteinte au droit d'exploitation reconnu par l'article L. 333-1 du code du sport.

Le présent article, reprenant cette analyse sur le fond, a pour objet :

- d'une part, d'affirmer clairement dans la loi que le droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives inclut le droit de permettre l'organisation de paris sur ces manifestations ou compétitions ;

- et d'autre part, de définir les modalités pratiques de cession de ce « droit au pari » . Celle-ci s'exercerait sous la forme d'une contractualisation entre les organisateurs et les opérateurs de paris en ligne selon les principes suivants : transmission du contrat à l'ARJEL et avis de l'autorité, non-exclusivité du droit d'organisation de paris, non-discrimination entre les opérateurs, rémunération de l'organisateur de la manifestation, et motivation du refus de conclure un contrat d'organisation de paris pour le détenteur du droit d'exploitation.

Par ailleurs, à l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a introduit un nouvel article L. 333-1-3 du code du sport, qui consacre un droit de propriété des clubs sportifs (neuvième alinéa), d'une part, et des fédérations et organisateurs de compétitions sportives (dixième alinéa), d'autre part, sur les « actifs incorporels » dont ils sont titulaires, et leur permet de concéder des droits sur ces actifs aux opérateurs de paris en ligne.

La commission des finances du Sénat n'a pas modifié sur le fond ces dispositions très importantes pour les organisateurs de manifestations sportives. Elle a, cependant, resserré le champ du nouvel article L. 333-1-3 du code du sport aux seules relations de ces acteurs avec les opérateurs de paris sportifs, et a renvoyé à un décret la définition des « actifs incorporels », soulignant que ces termes ne renvoyaient pas « à des notions utilisés en droit des sociétés ».

II - La position de votre commission

A. UN DROIT D'EXPLOITATION UTILEMENT RECONNU AUX ORGANISATEURS DE COMPÉTITIONS ET MANIFESTATIONS SPORTIVES

Votre commission est extrêmement favorable au principe d'inclusion explicite du droit de consentir à l'organisation de paris sur les manifestations ou compétitions sportives dans le droit d'exploitation défini à l'article L. 333-1 du code du sport.

En effet, il est légitime que le propriétaire d'un évènement sportif dispose des droits sur l'utilisation commerciale qui en est faite. Il sera en outre utile que les organisateurs puissent avoir la maîtrise des épreuves sur lesquelles sont organisées des paris, les scandales et problèmes liés aux paris sportifs pouvant avoir des conséquences très néfastes sur la crédibilité d'un sport.

Elle considère ainsi que l'équilibre est pertinent entre, d'une part, le droit des organisateurs de manifestations sportives à consentir à l'organisation des paris et, d'autre part, la capacité des opérateurs à accéder au droit d'organiser des paris sur ces manifestations.

B. LE DÉBAT SUR LES DROITS DES CLUBS ET SOCIÉTÉS SPORTIVES

Si le droit d'exploitation des manifestations et compétitions sportives est un enjeu important de l'éthique sportive, la question des droits reconnus aux clubs qui participent à ces manifestations se place exclusivement sur le terrain commercial.

Votre rapporteur reconnaît que les clubs sportifs ont des droits sur un certain nombre de biens incorporels, tels que leurs noms par exemple. Ainsi un éditeur de jeux vidéo doit-il acquérir des droits auprès des clubs pour pouvoir utiliser leurs noms et logos dans les logiciels ludiques de simulation sportive.

Toutefois, l'article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle précise bien que « l'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme :

(...)

b) référence nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service , notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée, à condition qu'il n'y ait pas de confusion dans leur origine ».

Ainsi le tribunal de grande instance de Paris (TGI Paris, 30 janv. 2008, Sté Juventus Football Club c/ Sté Unibet Limited) a considéré que la reproduction de la marque d'un club par les sites de paris était nécessaire pour identifier le pari que les internautes peuvent réaliser .

Les sites de paris ont en fait été condamnés pour contrefaçon lorsqu'ils ne s'étaient pas contentés d'utiliser le nom du club pour identifier les paris proposés, mais également dans des slogans publicitaires visant à promouvoir leur activité de paris en ligne. Or, une telle utilisation ne ressort plus de l'exception précédemment citée puisqu'elle n'est pas nécessaire pour porter à la connaissance du public le pari sur la manifestation sportive à laquelle participe le club.

Un autre jugement du TGI de Paris du 17 juin 2008 (PSG c/ Unibet, Bwin et al.) illustre ce contentieux opposant les clubs et les sociétés de paris en ligne. En l'espèce, plusieurs sites Internet de paris sportifs en ligne avaient reproduit la marque PSG, et utilisé les signes Paris Saint-Germain et Paris SG pour la présentation au public de paris organisés sur les matchs joués par l'équipe professionnelle exploitée par la société anonyme Paris Saint-Germain football. Cette dernière reprochait aux sociétés administrant lesdits sites, d'une part, des actes de contrefaçon par reproduction servile, d'autre part, des actes de contrefaçon par imitation, et enfin, des agissements parasitaires.

Selon le tribunal, la désignation du club Paris Saint-Germain football, pour annoncer des rencontres et proposer des paris, ne peut se faire en utilisant des périphrases et nécessite l'utilisation du nom du club , au même titre que d'autres équipes dont les noms apparaissent également sur les sites Internet litigieux.

Ces analyses entraînent un certain nombre de conséquences sur l'interprétation à donner aux neuvième et dixième alinéas du présent article.

Les dispositions du neuvième alinéa tendent en effet à créer un nouvel article L. 333-1-3 dans code du sport, au sein duquel est introduite la notion d'actifs incorporels , jusqu'ici absente du code du sport, voire de notre corpus juridique.

Or force est de constater que cette notion n'apparaît pas opérante dans la mesure où l'ensemble des contentieux jusqu'ici soulevés portaient sur l'utilisation des marques ou des signes distinctifs .

Par ailleurs, la possibilité de concéder ces droits, ouverte par l'article L. 333-1-3 du code du sport, ne résout pas véritablement la question des modalités de leur usage par les opérateurs de jeux en ligne qui pourront continuer à considérer qu'ils peuvent continuer à les utiliser gratuitement comme référence nécessaire pour indiquer la destination de leurs paris. En d'autres termes, la question des relations entre les dispositions de l'article L. 333-1-3 et celles de l'article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle n'est pas clairement résolue.

S'agissant enfin des « actifs incorporels », qui ne seraient ni des dénominations ni des signes distinctifs, on peut considérer que c'est le juge qui sera amené à considérer, au cas par cas, la nature des droits dont disposent les clubs. Mais, là encore, les dispositions de l'article L. 333-1-3 ne semblent pas apporter un éclairage complémentaire.

Bref, il apparaît à votre rapporteur que les dispositions du neuvième alinéa n'apportent pas d'éléments nouveaux sur la nature des droits dont les clubs sportifs professionnels disposent et qu'au mieux, ils prévoient que les opérateurs de paris en ligne doivent entamer une négociation relative aux modalités d'usage de ces droits.

Par ailleurs, le fait de ne pas renvoyer, dans l'article L. 333-1-3, à l'article L. 333-1 du code du sport qui pose le principe de reconnaissance du droit de propriété à l'organisateur de la compétition (fédérations et ligues professionnelles par délégation), laisse à penser que l'objectif de l'article est d'opposer les droits des clubs, d'une part, et ceux des fédérations, d'autre part, ce qui n'est pas l'objectif affiché de M. Jean-François Lamour, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, qui a proposé l'introduction de l'article L. 333-1-3.

C'est la raison pour laquelle votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur :

- un amendement tendant à substituer à la notion d'actifs incorporels , qui jette le trouble sur toute analyse qu'on pourrait faire du dispositif sans apporter de sécurité supplémentaire pour les clubs professionnels, les termes de marques et signes distinctifs , qui constituent des notions juridiques connues. En corollaire, cet amendement tend à supprimer le dixième alinéa du présent article, qui n'apporte rien au droit existant, et une partie du onzième alinéa, introduite par la commission des finances, qui renvoie à un décret le soin de préciser la notion d'actif incorporel ;

- et un amendement renvoyant dans l'article L. 333-1-3 à l'article L. 333-1 du code du sport, afin de bien différencier les droits de propriété des clubs sur leurs marques et signes distinctifs du droit clairement conféré aux fédérations de permettre l'organisation de paris sur les épreuves qu'elles organisent.

Sous réserve de la prise en compte de ces amendements, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

Article additionnel après l'article 57 - Régime transitoire pour les opérateurs installés légalement en Europe

Votre commission a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 57 qui vise à permettre aux opérateurs de paris régulièrement installés en Europe de proposer des paris dès la promulgation de la loi et avant la décision d'agrément de l'ARJEL.

Plusieurs conditions encadrent cependant strictement cette possibilité :

- l'opérateur doit avoir fait une demande d'agrément auprès de l'ARJEL, ce qui suppose que le décret instituant l'ARJEL ait été publié ;

- l'opérateur doit respecter l'ensemble des obligations prévues dans la présente loi (site en « .fr », protection des mineurs...) et, donc dans les décrets au fur et à mesure de leur publication ;

- il ne peut pas faire de la publicité, quel que soit le support utilisé ;

- cette faculté est limitée aux opérateurs de paris sportifs et hippiques, à l'exclusion de ceux qui proposent du poker en ligne. Il suffit cependant qu'ils exercent l'une des deux activités pour pouvoir proposer une offre de paris hippiques ou sportifs.

Enfin, dès que l'ARJEL rend sa décision sur l'agrément demandé, il est mis fin à cette faculté.

Cette disposition transitoire, qui s'inspire de celle proposée à l'article 57 pour les opérateurs historiques a pour objet d'assurer une pleine application de la loi, même si un retard devait être pris dans la publication des décrets et dans la procédure de délivrance d'agréments de l'ARJEL.

En effet, la coupe du monde de football organisée à partir du 11 juin prochain sera l'occasion pour de très nombreux Français de s'initier à la prise de paris.

Si la loi n'était pas pleinement applicable à cette date, que pourrait-il se passer ? Deux types d'opérateurs pourront en fait organiser des paris : la Française des Jeux, d'une part, et l'ensemble des opérateurs illégaux déjà installés, d'autre part. Ainsi, ces derniers continueraient leur activité sans être soumis à aucune obligation de protection des mineurs et en gardant leur site avec une terminaison en « .com ». De facto, de très nombreux Français risqueraient de prendre de mauvaises habitudes, incitant les opérateurs à rester dans l'illégalité, ce qui rendrait caduque la loi avant même son application.

Le présent article apporte une réponse simple et sans risque à cet écueil majeur . En effet, si les décisions d'agrément étaient prises avant la coupe du monde, le présent article ne serait jamais applicable. Si, au contraire, les décisions d'agrément n'étaient pas prises avant la coupe du monde, les sites « clandestins » entreraient de fait dans la légalité, tout en étant incités à instituer un site en « .fr » afin de gagner en notoriété et à respecter les principales règles fixées par la loi, ce qui permettrait de donner de bonnes habitudes de jeux aux nouveaux parieurs français avant l'entrée en vigueur de l'ensemble des dispositions de la loi.

Sous réserve de la prise en compte de ces amendements, votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article .

* *

*

Réunie le jeudi 28 janvier 2010, votre commission a adopté vingt-quatre amendements à l'initiative de son rapporteur et donné un avis favorable à l'adoption du projet de loi d'ouverture à la concurrence et de régulation des jeux d'argent et de hasard en ligne .

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