Avis n° 694 (2009-2010) de M. Jean-Jacques JÉGOU , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 septembre 2010


N° 694

SÉNAT

SECONDE SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 septembre 2010

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale (procédure accélérée),

Par M. Jean-Jacques JÉGOU,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

672 , 690 et 691 (2009-2010)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Marquée par la volonté politique de laisser les dispositifs de protection sociale et les stabilisateurs économiques jouer leur rôle d'amortisseur conjoncturel, la crise a eu pour conséquence de porter la dette sociale à des niveaux historiques. En trois ans (2009-2011), les déficits cumulés du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devraient atteindre près de 87 milliards d'euros, soit un montant proche du montant de la dette qui reste à amortir par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

Le choix du Gouvernement de confier en 2010 à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) le portage de la dette sociale contractée en 2009 et 2010, et de reporter à l'automne 2010 les décisions concernant la gestion de la dette sociale avait suscité en 2009 l'inquiétude de votre rapporteur pour avis. Par souci de responsabilité, il avait proposé, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, d'engager le retraitement de la dette sociale dès cette année en transférant 20 milliards d'euros à la CADES et en affectant à cette dernière 0,15 point supplémentaire de Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

Au terme des travaux de la commission de suivi de la dette sociale 1 ( * ) , le Gouvernement a annoncé son intention de transférer entre 2011 et 2018 près de 130 milliards d'euros de déficits à la CADES. Si votre rapporteur pour avis se félicite de la prise en compte des futurs déficits « Vieillesse » dans le projet gouvernemental, il tient à souligner qu'il n'y a guère de satisfaction à avoir quant au principe de ce transfert. L'ampleur de celui-ci ne fait que témoigner à ce jour de notre incapacité à redéfinir de manière satisfaisante le financement de notre protection sociale.

Les mesures proposées cet automne répondent ainsi à deux impératifs :

- d'une part, faire face à l'impossibilité pour l'ACOSS d'assurer en 2011 la couverture des déficits cumulés du régime général entre 2009 et 2011 ;

- d'autre part, accompagner autant que faire se peut la réforme des retraites en allégeant la contrainte financière de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV).

Le financement de ces mesures reposerait sur un compromis que votre rapporteur pour avis aurait préféré éviter : l'allongement de la durée de vie de la CADES, l'utilisation anticipée du Fonds de réserve des retraites (FRR), la création d'un « panier de recettes » en lieu et place d'une augmentation de la CRDS, impôt qui a pourtant l'avantage de permettre à chacun de matérialiser sa contribution au remboursement des dépenses courantes que sont les dépenses de protection sociale.

L'examen par le Parlement de ce schéma sera fractionné entre différents textes législatifs. A cet égard, il convient de souligner que le présent projet de loi organique ne fait qu'ouvrir des possibilités que le législateur aura à confirmer lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2011 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2011.

Votre commission des finances a souhaité se saisir pour avis de l'article premier du présent projet de loi organique car le traitement de la dette sociale, partie intégrante de la dette publique, participe du travail d'assainissement de nos comptes publics. Les discussions qui ont eu lieu cette année sur la soutenabilité de la dette publique soulignent l'importance des débats budgétaires et financiers de cet automne. Votre commission des finances entend ainsi prendre toutes ses responsabilités dans la définition d'une trajectoire de réduction des déficits publics.

***

A l'issue de l'examen du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale par la commission des affaires sociales du Sénat, le texte comporte cinq articles :

- l'article 1 er prévoit une dérogation exceptionnelle au principe organique de non-allongement de la durée d'amortissement de la dette sociale et permet le transfert d'actifs à la CADES ;

- l'article 2 améliore l'information du Parlement sur la situation patrimoniale de la sécurité sociale ;

- l'article 2 bis , introduit à l'initiative du Gouvernement, modifie la composition du conseil d'administration de la CADES, en l'élargissant à des représentants des organismes de sécurité sociale et du FRR ;

- l'article 3 prévoit un avis de la Cour des comptes sur le tableau patrimonial des différents organismes de la sécurité sociale (article de coordination avec l'article 2) ;

- l'article 4 précise les dates d'entrée en vigueur de la loi, c'est-à-dire dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. La situation patrimoniale des différents organismes de sécurité sociale ne sera toutefois opérée que dans le cadre du PLFSS pour 2012.

I. LA RÉORGANISATION DE LA GESTION DE LA DETTE SOCIALE EST INDISPENSABLE

A. LA DETTE SOCIALE, UNE COMPOSANTE DYNAMIQUE DE LA DETTE PUBLIQUE

La dette publique, ou la dette des administrations publiques au sens du Traité de Maastricht, comprend la dette de l'Etat, la dette des organismes divers d'administration sociale (ODAC), la dette des administrations publiques locales (APUL) et la dette des administrations de sécurité sociale (ASSO).

La dette sociale peut recouvrir essentiellement deux notions : d'une part, au sens large, la dette des organismes sociaux, d'autre part, dans un sens plus strict, la dette du régime général et du FSV.

Quelle que soit son acception, elle est une partie de la dette publique dont le montant a atteint 1 535 milliards d'euros à la fin du premier semestre 2010, soit un peu plus de 80 % du produit intérieur brut (PIB).

1. Les différents périmètres de la « dette sociale »

La « dette sociale » peut recouvrir différents périmètres.

a) La dette des organismes sociaux : 155,8 milliards d'euros en 2009

La dette des organismes sociaux correspond :

- à la dette brute portée par la CADES ;

- et à la dette directement à la charge des ASSO qui comprennent les régimes d'assurance sociale (SECU) et les organismes dépendants des assurances sociales (ODASS), soit essentiellement les hôpitaux.

Le périmètre des administrations de sécurité sociale (ASSO)

Les régimes d'assurance sociale des administrations de sécurité sociale comprennent :

- le régime général de la sécurité sociale ;

- les fonds spéciaux tels que le Fonds de solidarité vieillesse ;

- les régimes spéciaux ;

- les régimes des non salariés ;

- le régime d'indemnisation du chômage (UNEDIC) ;

- les régimes complémentaires d'assurance vieillesse des salariés.

Les organismes dépendant des assurances sociales comprennent :

- les hôpitaux ;

- les oeuvres sociales intégrées aux organismes de sécurité sociale.

Source : INSEE

La dette des organismes sociaux a ainsi atteint 155,8 milliards d'euros en 2009, soit 8,2 % du PIB. Elle était de « seulement » 45,3 milliards d'euros, soit 3,3 % du PIB, en 1999.

Evolution de la dette des organismes sociaux

(en milliards d'euros)

1999

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dette CADES

32,7

29,8

31,3

72,1

73,7

75,4

74,8

84,1

96,5

Dette ASSO

12,6

16,5

32,1

25,6

36,7

44,8

53,3

45,4

59,3

Total

45,3

46,3

63,4

97,7

110,4

120,4

128,1

129,5

155,8

En % du PIB

3,3%

3%

4%

5,9%

6,4%

6,7%

6,8%

6,7%

8,2%

Source : Cour des comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques - juin 2010

La dette supportée par les seules administrations de sécurité sociale s'est élevée à 59,3 milliards d'euros à la fin de l'année 2009, soit un niveau sans précédent.

Si le régime général représente près de 40,5 % de cette dette (24 milliards d'euros), il convient de souligner l'importance :

- de la dette des hôpitaux qui atteint 21,7 milliards d'euros ;

- de la dette de l'UNEDIC qui s'élève fin 2009 à 9,5 milliards d'euros.

b) La dette sociale constituée par les déficits du régime général et du FSV

Dans le cadre de l'examen du présent projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, la « dette sociale » correspond aux déficits cumulés du régime général et du FSV.

Selon les derniers chiffres publiés par la commission des comptes de la sécurité sociale, les déficits cumulés du régime général et du FSV en 2009 et 2010, ainsi que les déficits prévisionnels 2011 s'élèveraient à 86,8 milliards d'euros . Il convient de noter que ce montant est inférieur de plus de 8 milliards d'euros aux prévisions indiquées en loi de financement pour 2010 et qui sont encore susceptibles d'évoluer d'ici la prochaine réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale prévue à la fin du mois de septembre. La composante « Vieillesse » représenterait 44,5 % de ce total, soit 38,8 milliards d'euros.

Evolution des soldes du régime général et du FSV

(en milliards d'euros)

2009

2010

2011

Total

(1) Solde du régime général

-20,3

-26,8

-28,2

-75,3

(2) Solde vieillesse régime général

-7,2

-9,3

-10,8

-27,3

(3) Solde du FSV

-3,2

-4,3

-4,0

-11,5

TOTAL (1) + (3)

-23,5

-31,1

-32,2

-86,8

TOTAL Vieillesse (2) + (3)

-10,4

-13,6

-14,8

-38,8

Source : commission des finances, à partir du rapport de la commission des comptes de la Sécurité sociale de juin 2010

La sécurité sociale enregistrera ainsi en 2009 et 2010 des déficits jamais atteints : même lors de périodes comprises entre 1993 et 1995 et entre 2003 et 2008, pourtant marquées par des déficits particulièrement importants, le solde du régime général s'était stabilisé autour de 10 milliards d'euros comme le montre le graphique suivant.

Solde du régime général, de la CNAMTS et de la CNAVTS (1990-2010)

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - rapport de juin 2010

2. Le dynamisme de la dette sociale, une préoccupation majeure

La dette sociale constitue aujourd'hui une préoccupation majeure à double titre : d'une part, sa progression contribue à l'accroissement de la dette publique, d'autre part, elle n'est pas uniquement conjoncturelle.

a) L'évolution de la dette sociale contribue à remettre en cause la soutenabilité de la dette publique
(1) L'évolution de la dette sociale...

Il convient de souligner le dynamisme de la dette des organismes sociaux : ainsi, entre 2005 et 2010, la dette de ces derniers a augmenté de plus de 41 % alors que parallèlement la dette publique augmentait de 30 %.

Evolution de la dette publique entre 1999 et 2009

(en milliards d'euros)

1999

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

ETAT

634,7

683,1

743,3

806,8

847,0

894,5

892,5

928,7

1036,2

1162,6

ODAC

51,4

49,7

45,1

55,3

91,1

94,5

90,7

97,7

95,5

115,3

APUL

105,9

106,4

105,9

109,8

113,5

120,1

127,3

137,2

148,1

156,8

ASSO

12,6

12,4

16,5

31,5

25,3

36,3

39,5

45,3

35,4

54,3

Total

804,6

851,6

910,8

1003,4

1076,9

1145,4

1150,0

1208,9

1315,2

1489,0

Organismes sociaux (1)

45,3

nd

46,3

63,4

97,7

110,4

120,4

128,1

129,5

155,8

en % du total

5,6

5,1

6,3

9,1

9,6

10,5

10,6

9,8

10,5

(1) la dette des organismes sociaux comprend la dette des ASSO ainsi que celle de la CADES qui est un ODAC.

Source : INSEE, Cour des comptes, commission des finances

(2) ... contribue au dynamisme de la dette publique

Votre rapporteur pour avis, en tant que commissaire de la commission des finances, souhaite souligner la dynamique préoccupante de la dette des administrations publiques et, par conséquent, la nécessité de prendre autant que faire se peut toutes les mesures de nature à réduire cette progression.

Le Gouvernement n'a pas publié, à ce jour, de projection de la dette publique cohérente avec la révision à la baisse, le 20 août dernier, de l'hypothèse de croissance pour 2011, passée de 2,5 % à 2 %.

Cependant, notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, a présenté à l'occasion du débat d'orientation des finances publiques pour 2011 des projections de la dette publique, sur la base d'une hypothèse de croissance des dépenses publiques moins optimiste que celle du Gouvernement (1,3 % par an en volume, contre 0,6 % selon le Gouvernement) et en distinguant plusieurs scénarios. Dans le scénario de croissance du PIB à 2 %, la dette publique pourrait atteindre près de 96 points de PIB en 2015, comme le montre le tableau ci-après.

Quelques scénarios de finances publiques à moyen terme

(hypothèse d'augmentation des dépenses publiques de 1,3 % par an en volume*)

(en points de PIB ; croissance du PIB en %)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Pour mémoire : programme de stabilité 2010-2013

Croissance

-2,25

1,4

2,5

2,5

2,5

Solde

-7,9

-8,2

-6

-4,6

-3

Etat+ODAC

-6,2

-5,9

-3,9

-3

-2

Administrations de sécurité sociale

-1,3

-1,9

-1,7

-1,3

-1

APUL

-0,4

-0,5

-0,4

-0,2

-0,1

Dette

77,4

83,2

86,1

97,1

86,6

A. Scénario de croissance inspiré du programme de stabilité 2010-2013

Croissance

-2,6

1,4

2,5

2,5

2,5

2,5

2,5

Solde

-7,6

-8

-5,7

-4,9

-4,1

-3,4

-2,7

Etat

-6,2

-5,6

-3,7

-3

-2,3

-1,7

-1,1

ODAC

0,1

0

0

0

0

0

0

Administrations de sécurité sociale

-1,3

-2

-1,6

-1,5

-1,4

-1,3

-1,1

APUL

-0,3

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

Dette

78,1

84

86,5

88,1

88,8

88,8

88,1

B. Scénario de croissance inspiré de la variante annexée au

programme de stabilité 2010-2013

Croissance

-2,6

1,4

2,25

2,25

2,25

2,25

2,25

Solde

-7,6

-8

-5,9

-5,4

-4,8

-4,2

-3,7

Etat

-6,2

-5,6

-3,8

-3,2

-2,7

-2,2

-1,7

ODAC

0,1

0

0

0

0

0

0

Administrations de sécurité sociale

-1,3

-2

-1,7

-1,7

-1,6

-1,6

-1,5

APUL

-0,3

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

Dette

78,1

84

86,9

89,1

90,6

91,6

92

C. Scénario de croissance à 2 %

Croissance

-2,6

1,4

2

2

2

2

2

Solde

-7,6

-8

-6,1

-5,8

-5,4

-5,1

-4,7

Etat

-6,2

-5,6

-3,9

-3,5

-3,1

-2,7

-2,3

ODAC

0,1

0

0

0

0

0

0

Administrations de sécurité sociale

-1,3

-2

-1,8

-1,8

-1,9

-1,9

-2

APUL

-0,3

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

-0,5

Dette

78,1

84

87,3

90,1

92,4

94,3

95,9

* Hors dépenses d'indemnisation du chômage, dont l'évolution dépend du taux de croissance du PIB.

Source : Philippe Marini, « Débat d'orientation des finances publiques pour 2011 : en finir avec le double langage », rapport d'information n° 616 (2009-2010)

Cette dynamique est préoccupante du point de vue de la soutenabilité de la dette publique.

Certes, si l'objectif de déficit de 3 points de PIB affiché par le Gouvernement était atteint à moyen terme, avec une croissance annuelle du PIB de 4 % en valeur (soit par exemple une croissance de 2 % en volume et une inflation de 2 %), la dette publique diminuerait progressivement pour se stabiliser à 75 points de PIB.

Cependant, si le déficit se stabilisait à 4 points de PIB, la dette publique augmenterait jusqu'à 100 points de PIB.

Par ailleurs, le déficit pourrait être nettement plus élevé que ces niveaux si la charge de la dette augmentait à la suite d'une hausse des taux d'intérêt. Par exemple, toutes choses égales par ailleurs, un doublement du taux d'intérêt apparent de la dette publique augmenterait à terme le déficit de 3 points de PIB. Pour fixer un ordre de grandeur, une stabilisation du déficit à 6 points de PIB porterait progressivement la dette à 150 points de PIB. La charge d'intérêt serait alors de plus de 10 points de PIB (contre 3 points de PIB actuellement), ce qui ne serait pas soutenable.

Dans deux articles remarqués 2 ( * ) , Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff, économistes du Bureau of Economic Analysis , s'appuyant sur des données historiques longues, soulignent :

- que dans les vingt principaux pays développés, les périodes où l'endettement du Gouvernement central a été supérieur à 90 points de PIB se sont traduites par une croissance nettement inférieure à celles où il a été compris entre 60 et 90 points de PIB (en moyenne, de 1,7 point depuis 1790 et de 4 points depuis 1946) ;

- que lors des quatre grandes crises bancaires traversées par les pays développés depuis la fin du XIX e siècle précédemment à la crise actuelle (qui ont débuté respectivement en 1893, 1907, 1914 et 1931), trois 3 ( * ) ont été accompagnées ou suivies d'une vague de défauts souverains, de 5 % à 25 % des Etats développés ayant alors fait défaut (les défauts des années 1890 et des années 1930 constituant, avec ceux des pays d'Amérique latine dans les années 1980-1990, les trois principales crises de la dette souveraine au niveau mondial).

Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff concluent leur article de février 2010 en suggérant que la crise bancaire actuelle pourrait amener des Etats à faire défaut 4 ( * ) .

Certes, ce point de vue est contesté. Par exemple, les auteurs ne montrent pas que c'est bien la dette qui suscite la faible croissance, et non l'inverse. Par ailleurs, ce n'est pas parce que les crises bancaires mondiales (au demeurant peu nombreuses jusqu'à présent) ont le plus souvent été accompagnées de défauts d'Etats développés que tel sera également le cas cette fois-ci. La France continue d'être bien notée par les agences, et bénéficie d'un spread favorable, en raison en particulier de la profondeur de son marché obligataire.

Ces analyses montrent cependant que la crise a suffisamment dégradé la situation des finances publiques pour que l'on puisse désormais s'interroger sérieusement sur l'éventualité du défaut d'un Etat développé.

Dans le cas de la France, il ne faut pas perdre de vue que son déficit et sa dette publics sont comparables, en termes relatifs, à ceux du Portugal. Si les marchés avaient l'impression que la France ne prévoit pas réellement de réduire son déficit comme annoncé, les conséquences pourraient être très dommageables. En particulier, le risque d'anticipations auto-réalisatrices défavorables (où les craintes sur la soutenabilité de la dette et la hausse des taux d'intérêt s'entretiendraient mutuellement) doit absolument être évité.

Votre rapporteur pour avis tient ainsi à souligner l'importance des mesures qui seront adoptées cet automne, que ce soit pour garantir un remboursement de la dette sociale ou enrayer sa dynamique

b) La nouvelle dette sociale née de la crise s'ajoute à un déficit structurel des régimes de sécurité sociale

Les déficits historiques constatés sur la période 2009-2010 sont, en majeure partie, la conséquence du ralentissement brutal des recettes de la sécurité sociale. La contraction de celles-ci est en effet telle qu'elle masque la relative « maîtrise » des dépenses constatée sur la même période.

Cependant, votre rapporteur pour avis insiste sur un point : l'intégralité de ces déficits ne peut être attribuée à la crise. Celle-ci ne doit surtout pas être un prétexte pour perdre de vue la part structurelle de ces derniers qui préexistait à la dégradation de la conjoncture économique .

(1) L'impact de la crise est sensible

La dégradation du déficit du régime général est en effet principalement due à la diminution de ses recettes en 2009 et à leur stagnation en 2010. Devant la commission des comptes de la sécurité sociale, le 1 er octobre 2009, le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat avait ainsi indiqué que les déficits historiques du régime général étaient la conséquence directe de la crise économique qui a affecté les deux principales assiettes sur lesquelles repose le financement de la sécurité sociale, les revenus du travail et les revenus du capital. Il a ainsi précisé qu' en 2009, le déficit lié à la crise représentait près de 65 % du déficit du régime général 5 ( * ) et deux tiers de ce déficit en 2010, hors impact des mesures du projet loi de financement pour 2010.

Solde effectif et solde structurel du régime général

(en milliards d'euros)

2007

2008

2009

2010

Solde effectif

-9,5

- 10,2

-22,7

-33,6

Solde structurel

-9,5

-8,4

-8,1

-11,4

Ecart

-9,5

-1,7

14,6

22,2

Déficit conjoncturel

0

16,6 %

65 %

66 %

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - octobre 2009

S'agissant des dépenses, il convient de noter qu'en raison d'un trop grand « effet de ciseaux » entre l'évolution des recettes et celle des charges, leur relative « maîtrise » en 2009 et 2010 n'a pas permis de compenser le coup d'arrêt porté aux produits du régime général sur la même période.

Comparativement aux années précédentes, les dépenses de sécurité sociale devaient, en effet, être relativement maîtrisées en 2009 et le rester en 2010 .

Or, comme l'indique le tableau ci-dessous, entre 2009 et 2010, les charges du régime général augmentent de près de 8 %, cependant que ses produits n'enregistrent quasiment aucune progression.

Taux de variation des produits et des charges du régime général

( en % )

2006

2007

2008

2009 (prévision)

2010

(prévision)

Produits

5,8

4,3

4,1

- 0,5

0,7

Charges

4,5

4,4

4,2

3,6

4,1

Ecart

1,3

- 0,1

- 0,1

- 4,1

- 3,4

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - rapport d'octobre 2009

Il en résulte une dégradation du taux de couverture des dépenses par les recettes du régime général. Alors que les produits du régime général couvraient 96,6 % des ses charges en 2008, le ratio recettes/dépenses passera à 92,8 % en 2009 et sous la barre des 90 % en 2010, ce qui signifie qu' à compter de 2010, plus de 10 % des dépenses du régime général devraient être financées par l'emprunt.

Taux de couverture des dépenses par les recettes

( en % )

Ratio produits/charges

CNAM

CNAM-AT/MP

CNAF

CNAV

Régime général

2008

96,9

102,2

94,0

99,4

96,6

2009

92,7

94,6

94,9

91,8

92,8

2010

89,2

93,3

92,7

89,0

89,7

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - rapport d'octobre 2009

Cette évolution dissymétrique entre les recettes et les charges du régime général explique la dégradation rapide de son solde. Un point d'écart entre les charges et les produits creuse en effet le déficit du régime général d'environ 3 milliards d'euros 6 ( * ) .

(2) La crise ne doit pas être un prétexte pour oublier les causes structurelles du déficit qui préexistait

Surtout, pour votre rapporteur pour avis, la crise ne doit pas faire perdre de vue les causes structurelles du déficit du régime général qui préexistaient à la dégradation du contexte économique observée depuis 2008. C'est en effet avec un handicap structurel de près de 9,5 milliards d'euros que notre système de protection sociale a dû affronter la crise économique . A n'en pas douter, la situation aurait été différente si les comptes de la sécurité sociale avaient été à l'équilibre.

(a) Un handicap de départ de 9,5 milliards d'euros

L'ampleur de la crise invite en effet à distinguer, entre :

- d'une part, la part conjoncturelle du déficit du régime général qui résulte directement de la dégradation de la situation économique et de la contraction de la masse salariale ;

- d'autre part, la part structurelle de celui-ci, c'est-à-dire la part qui subsiste en période de croissance économique et qui résulte des tendances de fond d'évolution des dépenses et des recettes du régime général.

Raisonner en distinguant ces deux types de déficits permet ainsi d'estimer le niveau de déficit qui aurait été atteint si la croissance avait conservé son rythme tendanciel.

En retenant une croissance tendancielle de 2,25 %, la commission des comptes de la sécurité sociale évalue ainsi le déficit structurel du régime général, avant la crise, à 9,5 milliards d'euros , celui-ci résultant de la stabilisation autour de 10 milliards d'euros du déficit du régime général après le ralentissement économique de 2002 et 2003, et ce en dépit de certaines années de conjoncture favorables.

(b) Un handicap de sortie de crise de 30 milliards d'euros

Cependant, comme le rappelle la commission des comptes de la sécurité sociale, si cette approche « déficit structurel »/« déficit conjoncturel » est utile en temps de crise pour isoler l'effet de la dégradation conjoncturelle, elle perd son sens les années suivantes. La question n'est alors plus de savoir quelle aurait été le solde du régime général si la crise n'avait pas eu lieu, mais la question est d' évaluer l'ampleur de la conjoncture favorable qui sera nécessaire pour permettre un redressement des comptes sociaux .

Or, le régime général abordera la reprise économique avec un handicap, cette fois, de près de 30 milliards d'euros et la reprise économique ne sera pas suffisante pour résorber ces déficits .

B. LA DETTE SOCIALE, UNE COMPOSANTE SPÉCIFIQUE DE LA DETTE PUBLIQUE

La gestion de la dette sociale résultant des déficits du régime général et du FSV est scindée en deux compartiments :

- un compartiment à court terme géré par l'ACOSS ;

- un compartiment à long terme qui correspond au cantonnement d'une partie de la dette sociale dans la CADES.

Chaque compartiment a ses avantages et ses limites.

1. Le recours aux avances de trésorerie de l'ACOSS : un système qui atteint ses limites en 2010
a) Le principe

Aux termes de l'article L. 200-2 du code de la sécurité sociale, « l'équilibre financier de chaque branche est assuré par la caisse chargée de le gérer ». Cette règle détaille les contraintes pesant sur le recours à l'emprunt par les régimes obligatoires de base ou les organismes concourant à leur financement pour couvrir leurs besoins de trésorerie.

La loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, qui reprend les dispositions de la loi organique du 22 juillet 1963, précise ainsi que la loi de financement arrête la liste des entités habilitées à recourir à des ressources non permanentes ainsi que les limites dans lesquelles leurs besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources.

La référence aux besoins de trésorerie montre qu'en principe, ce dispositif doit servir à couvrir les décalages temporaires entre dépenses et encaissements.

Or le dispositif est régulièrement détourné de ses objectifs initiaux. Ainsi, loin de combler un déséquilibre passager des finances sociales, les plafonds d'avances de l'ACOSS sont utilisés pour refinancer à court terme une dette qui fait ensuite l'objet d'un refinancement à long terme opéré par la CADES. Contrairement à cette dernière, l'ACOSS n'amortit pas les déficits mais elle a l'avantage, pour les Gouvernements successifs de permettre de différer les reprises de dette, qui depuis 2005 doivent être financés par de nouvelles ressources.

b) La gestion exceptionnelle de 2010

Les déficits nés de la crise en 2009 et 2010 ont été financés en 2010 par des avances de trésorerie de l'ACOSS et donc par l'emprunt à court terme. La loi de financement pour 2010 a ainsi fixé le plafond d'avances de l'ACOSS pour l'année 2010 à 65 milliards d'euros.

Ce niveau d'avances est historique et correspond au double du plafond 2009 revalorisé de 10 milliards d'euros en cours d'année. Cette situation est d'autant plus exceptionnelle que les plafonds record des années précédentes (notamment en 2004 et 2008) avaient été atteints avant une reprise de déficits par la CADES. Or la fixation du plafond 2009 de l'ACOSS est intervenue juste après une reprise de déficits par la CADES à hauteur de 26,9 milliards d'euros en 2009.

Le plafond des avances de trésorerie au régime général
depuis la création des lois de financement de la sécurité sociale

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données de la commission des comptes de la sécurité sociale - rapport d'octobre 2009

La solution choisie par le Gouvernement en 2010 ne pourra toutefois pas être rééditée en 2011. En effet, que ce soit pour des raisons pratiques ou de principe, le financement par l'ACOSS de tels montants de déficits ne peut être qu'exceptionnel :

- plus aucun bénéfice ne peut être espéré d'une baisse des taux d'intérêt à court terme , ceux-ci ayant atteint un plancher. Au contraire, on pourrait craindre leur remontée, qui se traduirait par un accroissement des frais financiers ;

- le niveau particulièrement élevé du plafond d'avances conduit l'ACOSS à diversifier son financement ou à renégocier des dispositifs existants, ce qui se révèle délicat ;

- la multiplication de sources de financement ne signifie pas pour autant la possibilité de couvrir n'importe quel niveau de besoin de trésorerie . Selon les informations communiquées par l'ACOSS, le niveau maximal d'avances pouvant être consenties par l'agence dans des conditions sécurisées est de 70 milliards d'euros . Or le plafond 2010 a été fixé à hauteur de 65 milliards d'euros : l'ACOSS ne pourra pas assumer une fois de plus en 2011 la couverture les nouveaux déficits de l'année écoulée en sus des déficits cumulés des années 2009 et 2010 ;

- cette augmentation d'activité nécessite au sein de l'agence un investissement humain important qui a posé la question de l'accroissement du risque opérationnel ;

- le portage de la dette par l'ACOSS constitue une dérogation au partage implicite des responsabilités entre la CADES et l'ACOSS . Comme le souligne, à juste titre, la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2010 7 ( * ) : « un traitement de cette dette plus adapté à sa nature structurelle et à son montant doit être rapidement mis en place pour permettre de décharger le régime général de frais financiers croissants. »

2. La Caisse d'amortissement de la dette sociale : un cantonnement efficace
a) Le bilan positif de la CADES : elle a amorti depuis sa création plus de 46 milliards d'euros
(1) Le cantonnement permet un remboursement annuel effectif de la dette

L'accumulation des déficits au milieu des années 1990 a conduit le législateur a créé une structure dédiée à leur refinancement et à leur amortissement en treize ans grâce à l'affectation d'une ressource fiscale ad hoc , la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

Depuis la dernière reprise de dette effectuée en 2009, une fraction de la CSG a également été affectée à la Caisse compte tenu des nouvelles contraintes qui pèsent sur son financement depuis 2005 ( cf. infra ).

Au 31 mars 2009, la CADES avait repris 134,6 milliards d'euros de déficit. Le tableau ci-dessous présente le détail de ces reprises.

Reprises de dettes par la Cades depuis l'origine

(en milliards d'euros)

Année

Vecteur

Nature de la dette reprise

Montant

1996

Ordonnance du 24 janvier 1996

Dette en trésorerie de l'ACOSS correspondant aux déficits cumulés des exercices 1994 et 1995 et déficit prévisionnel 1996 du régime général

20,89

Déficits 1995 et 1996 de la Canam

0,46

Emprunt ACOSS, repris par l'Etat en 1994 (remboursements à l'Etat jusqu'en 2005)

23,38

1998

LFSS pour 1998

Dette en trésorerie de l'ACOSS correspondant aux déficits cumulés du régime général depuis 1996 (après déduction de la fraction déjà prise en charge en 1996) et déficit prévisionnel de 1998

13,26

2003

LFSS pour 2003

Dette du Forec (première moitié régime général et autres régimes)

1,28

2004

LFSS pour 2004

Dette du Forec (deuxième moitié régime général)

1,10

LAAM du 13 août 2004

Déficits cumulés de la branche maladie du régime général au 31 décembre 2003 et déficit prévisionnel 2004

35,00

2005

Déficit prévisionnel de la branche maladie en 2005 (Compte tenu d'une « avance » de 1,69 milliard d'euros prélevée sur la somme de 35 milliards d'euros mentionnée à la ligne précédente)

6,61

2006

Déficit prévisionnel de la branche maladie en 2006 (Compte tenu d'une « avance » de 0,30 milliard d'euros prélevée sur la somme de 6,61 milliards d'euros mentionnée à la ligne précédente)

5,70

2007

Régularisation du déficit définitif 2006

- 0,06

2008

LFSS pour 2009

Déficits cumulés au 31 décembre 2008 de la CNAM, de la CNAV et du FSV (1 ère tranche)

10,00

2009

Déficits cumulés au 31 décembre 2008 de la CNAM, de la CNAV et du FSV (2 nde tranche)

17,00

Total

134,61

Source : Commission de suivi de la dette sociale

A fin 2010 , selon les derniers chiffres publiés par la commission des comptes de la sécurité sociale, la dette amortie par la CADES depuis sa création devrait atteindre 47,8 milliards d'euros . La dette restant à amortir s'élèverait alors à 86,8 milliards d'euros.

Votre rapporteur pour avis souhaite souligner l'importance de ces chiffres qui témoignent de l'avantage du cantonnement d'une partie de la dette sociale : l'amortissement sur une durée limitée de la dette sociale, contrairement à la dette portée par l'Etat non amortie et refinancée sans horizon déterminé a priori .

Amortissement de la dette sociale

(en milliers d'euros)

Année de reprise de dettes

Dette reprise cumulée

Amortissement annuel

Amortissement cumulé

Situation nette de l'année

1996

23 249

2 184

2 184

-21 065

1997

25 145

2 907

5 091

-20 063

1998

40 323

2 444

7 535

-32 788

1999

42 228

2 980

10 515

-31 713

2000

44 134

3 226

13 741

-30 393

2001

45 986

3 021

16 762

-29 224

2002

48 986

3 227

19 989

-28 997

2003

53 269

3 296

23 285

-29 984

2004

92 366

3 345

26 630

-65 736

2005

101 976

2 633

29 263

-72 713

2006

107 676

2 815

32 078

-75 598

2007

107 611

2 578

34 656

-72 955

2008

117 611

2 885

37 541

-80 070

2009

134 611

5 260

42 801

-91 810

2010

134 611

4 997

47 798

-86 813

Source : Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale - juin 2010

(2) Le coût de portage de la dette sociale par la CADES

Le coût de portage de la dette sociale par la CADES mobilise une part importante de ses ressources . Ainsi, en 2010, la charge de la dette représenterait 3,2 milliards d'euros, soit 39 % de ses produits ; l'amortissement annuel s'élèverait à 5 milliards d'euros

Depuis sa création, les intérêts d'emprunt servis par la CADES auraient représenté 29,9 milliards d'euros . La charge de la dette peut enregistrer de fortes variations d'une année sur l'autre : ainsi en 2006 et en 2007, les charges d'intérêt ont représenté respectivement 48,6 % et 54,6 % des ressources de la CADES, alors même que ces dernières avaient augmenté et que le montant de dette reprise était resté inchangé.

Compte tenu du niveau actuel particulièrement bas des taux d'intérêt, votre rapporteur pour avis souhaite attirer l'attention sur l'éventuel impact d'une remontée des taux sur le calendrier d'amortissement de la dette .

Grâce à la forte baisse des taux « courts » constatée depuis le début de l'année 2009, qui s'est rapidement répercutée sur les taux variables, le coût de refinancement de la CADES a substantiellement baissé entre la fin de l'année 2008 et le 31 juillet 2009, passant de 3,89 % à 3,27 % au 31 juillet 2009.

Evolution du coût de refinancement

21/12/2008

31/07/2009

Taux variable

3,68 %

1,09 %

Taux fixe

3,87 %

3,79 %

Taux indexé

4,28 %

4,27 %

Taux global de refinancement

3,89 %

3,27 %

Source : Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale - Octobre 2009

Or, il convient de souligner qu'une part significative de la dette portée par la CADES est sensible à l'évolution des marchés. Ainsi, au 6 mars 2009, la part de la dette à taux variable atteignait 32 % en raison de l'importance des refinancements à court terme mis en place pour permettre la dernière reprise de dette décidé par la LFSS pour 2009. Avant la reprise, cette part représentait 10,9 % de l'endettement total de la Caisse.

Compte tenu des transferts envisagés ( cf. infra ) et de leur ampleur, l'exposition au risque de taux  de la CADES devrait s'intensifier à moyen terme.

b) Un principe vertueux : la préservation des générations futures

Suite aux nouvelles décisions de refinancement adoptées en 1998 et 2004, qui ont remis en cause la date d'extinction de la CADES initialement prévue en 2009, le législateur a souhaité interdire autant que possible toute nouvelle prolongation de la durée de vie de la Caisse, le caractère éphémère de celle-ci ayant été particulièrement affirmé lors de sa création afin de ne pas faire supporter aux générations futures des charges indues.

Ainsi, la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement a, suite à un amendement parlementaire, modifié l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et prévu que « tout nouveau transfert de dette à la CADES serait accompagné d'une augmentation des recettes de la caisse permettant de ne pas accroître la durée d'amortissement de la dette sociale ». Le Conseil constitutionnel a souligné la valeur organique de cette règle dans sa décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005.

La date d'extinction des missions de la CADES n'est plus mentionnée dans l'ordonnance précitée. La durée d'amortissement de la dette sociale est désormais appréciée au vu des éléments présentés par la Caisse dans ses estimations publiques. D'après l'annexe 8 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, la CADES a une chance sur deux d'avoir intégralement amorti en 2021 la dette dont le refinancement lui a été confié. La probabilité que cette dette soit déjà remboursée en 2020 est de 5 % ; le risque qu'elle ne le soit pas dans un délai supérieur à 14 ans, soit en 2023, est également de 5 %.

II. LA PERTINENCE DES COMPROMIS ENVISAGÉS NE POURRA ÊTRE VÉRIFIÉE QUE LORS DE L'EXAMEN DES PROCHAINS PLF ET PLFSS POUR 2011

A. LE SCHÉMA DE REPRISE PRÉSENTÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le Gouvernement propose de transférer à la CADES 130 milliards d'euros de déficits entre 2011 et 2018, soit un montant quasi-équivalent aux sommes reprises entre 1996 et 2010.

1. Le transfert des déficits cumulés du régime général et du FSV entre 2009 et 2011

Dans le cadre de l'examen du présent projet de loi organique, le Gouvernement a choisi d'asseoir sa présentation sur la distinction déficits de crise/ déficits hors crise, ceci afin de justifier l'allongement de la durée de vie de la CADES (cf. infra ).

Il devrait ainsi proposer, dans le PLFSS pour 2011, de transférer à la Caisse 68 milliards d'euros. Ce montant correspond :

- à hauteur de 34 milliards d'euros aux déficits de crise du régime général et du FSV en 2009 et 2010 ;

- à hauteur de 34 milliards d'euros aux déficits hors crise du régime général et du FSV en 2009 et 2010, ainsi qu'au déficit prévisionnel de la branche maladie en 2011.

2. Le transfert programmé des déficits à venir de la branche « Vieillesse » entre 2012 et 2018

Dans le cadre de la réforme des retraites, le Gouvernement a annoncé le transfert à la CADES des déficits de la branche vieillesse entre 2012 et 2018 afin d'alléger la contrainte financière pesant sur le régime général durant la montée en charge de la réforme.

Compte tenu du schéma de financement ci-dessous présenté, 62 millions d'euros de déficit pourraient être transférés entre 2012 et 2018 à la CADES. Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, la reprise progressive des déficits « Vieillesse » à compter de 2012 ne pourrait être faite que par tranche annuelle maximale de 10 milliards d'euros.

B. LES COMPROMIS FINANCIERS ENVISAGÉS

1. La volonté de stabiliser le taux des prélèvements obligatoires...

La crise financière et économique a conforté le Gouvernement dans sa volonté de stabiliser la pression fiscale afin de soutenir la reprise économique.

Ainsi, lors de l'examen du PLFSS pour 2010, le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat avait confirmé devant la commission des comptes de la sécurité sociale, réunie en septembre, la volonté du Gouvernement de ne procéder à aucune augmentation des prélèvements, ce qui de facto a écarté toute hypothèse de reprise de dette supplémentaire par la CADES en 2010 8 ( * ) .

La faiblesse de la reprise économique, qui s'est notamment traduite cet été par la révision à la baisse de l'hypothèse de croissance économique prévue pour 2011, ne permet pas d'envisager le refinancement de la dette sociale née de la crise par la seule augmentation des recettes fiscales de la Caisse.

Selon l'étude d'impact, qui accompagne le présent projet de loi organique, la reprise de 80 milliards d'euros, soit environ le montant des déficits cumulés du régime général entre 2009 et 2011, nécessiterait d'augmenter le taux de la CRDS de 0,7 point en l'absence d'un allongement de la durée d'amortissement de la dette portée par la CADES. Votre rapporteur pour avis reconnaît que cette augmentation n'est pas soutenable dans le contexte actuel, et qu'il est nécessaire de privilégier une solution pragmatique reposant sur la combinaison de plusieurs leviers.

2. ...supposerait un report limité de la dette sur les générations futures et l'utilisation anticipée du FRR

A titre liminaire, il convient de souligner que l'analyse du schéma financier de la reprise de dette est un exercice avant tout pédagogique. Dans les faits, la CADES intégrera dans son modèle de prévision toutes les nouvelles mesures envisagées pour faire face à l'intégralité de la reprise envisagée, soit environ 130 milliards d'euros. Compte tenu de l'allongement de la durée de vie proposée par le projet de loi organique, la nouvelle contrainte organique sera respectée si la trajectoire médiane qui ressort des simulations réalisées par la CADES avec ces nouvelles données prévoit un amortissement total de la dette sociale en 2025 ou avant.

Les reprises de dette prévue entre 2011 et 2018 devraient ainsi reposer sur le compromis suivant :

- l'adossement du Fonds de réserve des retraites (FRR) à la CADES, et par conséquent l'affectation à la CADES des ressources du FRR , correspondant notamment à une partie du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital. Cet adossement, qui sera précisé en PLFSS, est amorcé par l'article 1 er du présent projet de loi organique. La liquidation progressive des actifs du FRR entre 2012 et 2024 permettrait de financer, dans la limite de 62 milliards d'euros, le remboursement des futurs déficits « Vieillesse » transférés à la CADES entre 2012 et 2018 ;

- l'allongement de la durée de vie de la CADES de quatre ans : l'article 1 er du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale organise cette dérogation au principe introduit en 2005 selon lequel tout nouveau transfert de dette ne peut être opéré que par l'apport de ressources nouvelles. Cet allongement a vocation à financer les déficits de crise du régime général et du FSV en 2009 et 2010, évalués à 34 milliards d'euros ;

- l'affectation à la CADES d'environ 3,2 milliards d'euros de recettes supplémentaires résultant de la révision des niches fiscales et sociales . Elles ont vocation à financer, à hauteur de 34 milliards d'euros, le remboursement des déficits structurels du régime général et du FSV en 2009 et 2010, ainsi que le déficit prévisionnel de la branche maladie en 2011.

Le schéma de reprise proposé par le Gouvernement

C. LE PROJET DE LOI ORGANIQUE OUVRE DES POSSIBILITÉS QUE LE LÉGISLATEUR NE PEUT PAS À CE JOUR PLEINEMENT APPRÉCIER

Le présent projet de loi organique ouvre des possibilités dont la pertinence ne pourra être pleinement appréciée qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement pour 2011. En particulier, l'allongement limité à quatre années de la durée d'amortissement de la dette de la CADES, qui permet concrètement de percevoir quatre années de plus la CRDS, n'est acceptable et crédible que si les autres recettes affectées à cette dernière permettent de garantir la nouvelle trajectoire financière de la Caisse. Or, plusieurs interrogations se posent à ce jour.

1. La création d'un « panier de recettes » en faveur de la CADES

L'augmentation de la CRDS étant exclue à court terme, le Gouvernement propose trois mesures de recettes alternatives permettant d'attribuer à la Caisse une somme annuelle de 3,2 milliards d'euros en 2011 et 2012 :

- l'assujettissement des contrats santé « solidaires » et « responsables », aujourd'hui exonérés, à la taxe spécifique sur les conventions d'assurance (TSCA) ;

- l'application des prélèvements sociaux au compartiment euros des contrats d'assurance vie multisupports 9 ( * ) ;

- la taxe de sortie sur les sommes de la réserve de capitalisation des sociétés d'assurance.

Si votre rapporteur pour avis comprend les raisons qui ont conduit le Gouvernement à choisir cette solution, il regrette aussi bien la complexification du financement de la CADES que celle du message adressé à nos concitoyens. La CRDS a le mérite de la simplicité et permet à chacun de matérialiser le remboursement de ses dépenses passées.

a) Le panier de recettes est-il pertinent ?

Votre rapporteur pour avis a souhaité procéder à une première analyse sur le fond des mesures proposées au titre du panier. Il souligne toutefois que ces mesures ne seront débattues que lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2011 et du projet de loi de financement pour 2011. A ce jour, un certain nombre d'éléments sont encore incertains.

(1) L'assujettissement des contrats santé « solidaires » et « responsables », aujourd'hui exonérés, à la taxe spécifique sur les conventions d'assurance (TSCA)
(a) Une exonération qui représente un coût élevé, mais qui a atteint son objectif

L'article 991 du code général des impôts (CGI) prévoit l'assujettissement de toute convention d'assurance à une taxe annuelle, la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA), perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et dont le taux est fixé à 7 %.

Plusieurs exonérations de TSCA sont néanmoins prévues par les articles 995 et suivants du CGI, notamment s'agissant des complémentaires santé. Sont ainsi exonérés les contrats dits « solidaires » et « responsables » , c'est-à-dire les contrats qui :

- d'une part, ne reposent pas sur le recueil préalable d'informations médicales sur le futur adhérent et dont les cotisations ou les primes ne sont pas fixées en fonction de l'état de santé de l'assuré ;

- d'autre part, ne prévoient pas la prise en charge de certaines participations forfaitaires destinées à responsabiliser les assurés (les franchises médicales, par exemple) ou, au contraire, sont tenus de prendre en charge certaines prestations de prévention.

L'objectif de cette exonération est de favoriser le développement de la couverture complémentaire santé de la population tout en incitant les assurés à respecter un parcours de soins vertueux et à optimiser les dépenses de santé.

Aujourd'hui, 93 % 10 ( * ) de la population française déclarent disposer d'une complémentaire santé et 99 % 11 ( * ) des bénéficiaires d'une couverture complémentaire sont couverts par de tels contrats .

Le coût total de cette dépense fiscale est élevé ; il devrait atteindre 2,2 milliards d'euros en 2010 12 ( * ) . A titre de comparaison, ce montant représente près du double des crédits inscrits en 2010 sur la mission « Santé » à laquelle cette dépense fiscale est rattachée.

(b) Le remplacement de l'exonération actuelle par un taux intermédiaire d'imposition de 3,5 %

Dans le cadre de la reprise de la dette sociale par la CADES, le Gouvernement propose de supprimer l'exonération de TSCA dont bénéficient les contrats d'assurance maladie complémentaires « solidaires » et « responsables » et de la remplacer par un taux d'imposition intermédiaire de 3,5 % . Le produit de cette nouvelle recette, évalué à 1,1 milliard d'euros , serait directement affecté à la CADES.

Il est à noter que cette mesure avait été proposée, comme piste de réflexion, par la commission des finances lors de l'examen du projet de loi de règlement et rapport de gestion pour 2009 13 ( * ) .

(c) Un impact de la mesure qui devra être analysé avec attention
(i) Un dispositif qui devrait rester incitatif

Deux principaux éléments permettent de penser que ce dispositif demeurera attractif et que le nombre de contrats « solidaires » et « responsables » continuera à être élevé :

- d'une part, la dépense fiscale dont bénéficient ces contrats n'est pas entièrement supprimée : un taux intermédiaire fixé à 3,5 % demeure incitatif et représentera encore une exonération de près de 1,1 milliard d'euros au profit de ce type de contrats ;

- d'autre part, créée en 2004 14 ( * ) pour amorcer le développement des contrats « solidaires » et « responsables », cette exonération a aujourd'hui atteint son but puisque plus de 99 % des contrats complémentaires santé sont aujourd'hui « solidaires » et « responsables ». Il paraît peu probable que l'ensemble de ces contrats complémentaires santé soient remis en cause immédiatement.

(ii) Mais un risque de répercussion sur les assurés et sur les dispositifs connexes destinés à favoriser l'accès à une complémentaire santé

Plusieurs arguments sont avancés par le Gouvernement pour justifier cette mesure nouvelle et la capacité d'absorption de celle-ci par les mutuelles, les institutions de prévoyance et les compagnies d'assurance - arguments déjà avancés à l'automne 2008 pour expliquer le doublement de la contribution des complémentaires santé au fonds « CMU-c » (cf. infra ) :

- le déport mécanique chaque année, de l'ordre de 600 millions d'euros, des dépenses prises en charge par les assurances complémentaires vers l'assurance maladie , qui s'expliquerait par l'effet combiné du vieillissement de la population et du régime de prise en charge intégrale des patients en affection de longue durée (ALD). Cette analyse est cependant contestée par les organismes complémentaires, qui observent qu'ils doivent également faire face, de leur côté, à certains transferts de charges ;

- la « bonne santé » financière des organismes complémentaires ; votre rapporteur pour avis n'a cependant pas, à ce stade, obtenu de chiffrages fiables pour corroborer cette affirmation ;

- les autres aides fiscales dont bénéficient les organismes complémentaires au titre des contrats collectifs , notamment l'exclusion de l'assiette des cotisations employeurs des contributions versées pour les contrats collectifs et obligatoires, soit une perte de 2 milliards d'euros de cotisations sociales 15 ( * ) .

Si le bilan global du régime fiscal des organismes de complémentaires santé ainsi que leur profitabilité devront être analysés avec précision pour apprécier la légitimité de la mesure, il n'en demeure pas moins qu'un risque de répercussion de cette charge nouvelle sur les adhérents existe , même si la concurrence entre les acteurs du secteur de l'assurance jouera probablement un rôle de frein.

Outre que celle-ci a déjà été annoncée, il convient de rappeler que ce secteur a en effet vu son régime fiscal s'alourdir ces dernières années :

- en 2009, la contribution des complémentaires santé au fond « CMU-c » a ainsi doublé, passant de 2,5 % à 5,9 %, pour un rendement de 1,7 milliard d'euros la première année 16 ( * ) ;

- en 2010, a été créée une contribution exceptionnelle des complémentaires santé aux dépenses liées aux achats de vaccins contre le virus A(H1N1)v, pour un rendement initialement prévu de 300 millions d'euros 17 ( * ) .

Par ailleurs, contrairement au doublement de la contribution des complémentaires au fond « CMU-c » qui avait donné lieu à la co-signature d'une lettre en date du 28 juillet 2008 par Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, Eric Woerth, alors ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et Jean-Pierre Davant, président de la Mutualité française, semblant garantir une stabilité des cotisations demandées par les mutuelles au titre de l'année 2009 18 ( * ) , aucun engagement de la sorte - dont il conviendra de vérifier qu'il a été respecté en 2009 - n'a été signé s'agissant de l'assujettissement des contrats santé « solidaires » et « responsables » à la TSCA.

Aucune estimation de la répercussion possible sur le tarif des contrats santé n'a pu, à ce stade, être transmise à votre commission des finances. Il est en effet difficile de distinguer précisément dans la hausse des tarifs pratiqués ce qui relève de l'augmentation d'une taxe de ce qui relève de l'augmentation naturelle des dépenses de santé financées par les complémentaires santé. Néanmoins, il est à rappeler que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie indiquait, dans son rapport de juillet 2008, qu' un basculement de 3 à 4 milliards d'euros de dépenses sur les organismes complémentaires pourrait conduire à une augmentation des cotisations versées à ces organismes comprise entre 130 et 185 euros par an et par ménage , soit l'équivalent de 0,45 % à 0,6 % du revenu disponible.

Si une telle répercussion avait effectivement lieu, elle serait directement supportée par les adhérents de complémentaires santé qui pourraient choisir soit de conserver leur contrat moyennant une augmentation de son prix, soit de souscrire un contrat garantissant un moindre degré de protection, soit de renoncer à une complémentaire santé. Ces effets sont difficiles à évaluer et dépendront de l'ampleur de la répercussion.

Par ailleurs, l' impact de cette mesure sur des dispositifs connexes destinés à favoriser l'accès à la couverture maladie complémentaire - CMU-complémentaire (CMU-c) et aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS) - devra également être analysé avec précision :

- le dispositif de CMU-c est aujourd'hui financé par les organismes de base de sécurité sociale et les organismes complémentaires qui sont remboursés forfaitairement par le fonds « CMU-c ». Il y a donc un risque pour la caisse nationale d'assurance maladie et les organismes complémentaires de voir leur « manque à gagner » 19 ( * ) augmenter ;

- quant à l'ACS, financée également par le fonds « CMU-c », elle pourrait devoir être revalorisée. Le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat a d'ailleurs annoncé cette revalorisation devant la commission des affaires sociales le 1 er septembre dernier 20 ( * ) . Si la contribution des complémentaires santé au fonds « CMU-c » est aujourd'hui plus que suffisante pour financer le fonds 21 ( * ) , il conviendra de vérifier que la revalorisation de l'ACS - ainsi que sa montée en charge compte tenu notamment de la crise économique - ne nécessitera pas à terme le versement par l'Etat d'une subvention d'équilibre, comme l'y oblige la loi 22 ( * ) . Les dépenses d'ACS se sont élevées à 110 millions d'euros en 2009 23 ( * ) .

Autrement dit, la réduction d'une « niche fiscale » (l'exonération de TSCA) dans le but de financer le remboursement de la dette sociale pourrait conduire indirectement, en fonction de l'ampleur de la répercussion de cette charge nouvelle, d'une part, à accroître les dépenses du régime général ; d'autre part, à accroître une autre « niche fiscale » , l'ASC, qui prend la forme d'un crédit d'impôt.

De façon plus générale, cette mesure conduit à s'interroger de nouveau sur l'architecture de notre système de protection sociale, et notamment sur la répartition des rôles entre l'assurance maladie de base et l'assurance maladie complémentaire .

(2) L'application des prélèvements sociaux au compartiment euros des contrats d'assurance-vie multisupports24 ( * ).

Les contrats d'assurance-vie peuvent prendre soit la forme d'un fonds en euros (majoritairement investi en obligations d'Etat), d'un fonds en unités de compte (UC) plus risquées (fonds d'actions, par exemple) ou enfin d'un panachage des deux, ce qui est le cas des contrats multisupports.

Les produits de ces contrats sont soumis aux prélèvements sociaux d'un montant global de 12,1 %. Cependant, les modalités de prélèvement diffèrent , selon qu'il s'agit d'un contrat monosupport ou multisupports. En effet, la nature différente des deux contrats a conduit techniquement à deux solutions différentes. Dans le cadre du contrat d'assurance-vie monosupport ou « assurance-vie en euros », les prélèvements sociaux s'effectuent sur une base annuelle . Le montant des intérêts est calculé annuellement, puis il est crédité au compte de l'assuré.

En revanche, dans le cadre d'un contrat multisupports (fonds en euros et unités de compte), le prélèvement ne peut être effectué qu'au dénouement du contrat, en cas de rachat partiel ou total, ou, depuis le 1 er janvier 2010, en cas de décès du souscripteur.

Deux raisons techniques s'opposent , en effet, au prélèvement au fil de l'eau, s'agissant des contrats multisupports :

- d'une part, la provision mathématique avant le dénouement du contrat n'appartient pas au souscripteur mais à l'assureur. Il convient, cependant de souligner, que cet argument ne constitue pas un obstacle dirimant puisque les fonds en euros donnent lieu aujourd'hui au prélèvement des cotisations sociales ;

- d'autre part, la provision est constituée du nombre de parts d'unités de comptes et non de la valeur de l'unité de comptes. La valorisation finale suivra à la hausse, mais aussi à la baisse, celle des marchés où les unités de compte sont investies.

La plus-value qui pourrait servir de base aux prélèvements sociaux annuels n'est donc que latente . Prélever les cotisations sociales annuellement conduirait, d'une part, à les imputer sur une plus-value fictive et, d'autre part, à les rembourser l'année suivante, en cas de moins-value fictive, si la valeur de l'unité de compte a diminué. C'est pourquoi, les prélèvements sociaux sont appliqués lors de chaque sortie (rachat partiel ou total) sur le montant total des produits.

Quant à la proposition de ne prélever la CSG et la CRDS que sur le compartiment « euros » du contrat multisupports, elle tend à nier le caractère global du contrat et la nature incertaine des plus-values. Elle pourrait alors conduire au prélèvement des cotisations sur le rendement « euros » du contrat, y compris en l'absence de produits in fine , si la performance des unités de compte est mauvaise.

En conséquence, si une telle mesure devait être adoptée, son dispositif devrait prévoir le remboursement à l'assuré des sommes éventuellement acquittées au titre des cotisations sociales si celui-ci enregistre, au dénouement du contrat, une moins-value globale.

Enfin, afin de ne pas déstabiliser le secteur assurantiel, il serait souhaitable que le mécanisme de prélèvement n'entraîne aucune avance de la part des assureurs.

(3) La taxe de sortie sur les sommes de la réserve de capitalisation des sociétés d'assurance

La réserve de capitalisation constitue un élément majeur de la solvabilité des assureurs (vie et non vie) et donc de la sécurité financière des assurés . Elle a, en effet, vocation à lisser les évolutions des taux des obligations à taux fixe. En cas de plus-value sur la vente de telles obligations, celle-ci est obligatoirement affectée à la réserve de capitalisation. En cas de moins-value, il y a reprise sur la réserve de capitalisation.

Ainsi, la réserve permet d'absorber, d'une part, les moins-values en cas de hausse des taux puisque la valeur des obligations détenues diminue.

D'autre part, en cas de baisse des taux, elle vise à préserver les intérêts des assurés contre tout comportement « opportuniste » de la part des assureurs. Ces derniers ne peuvent distribuer la plus-value aux actionnaires et racheter des obligations à un taux inférieur.

Les plus values affectées à la réserve de capitalisation, par le biais de dotations, sont déductibles du résultat . En tant que provision technique, ces dernières ne sont donc pas imposées 25 ( * ) (alors que la création de fonds propres l'est).

Les reprises des sommes versées sur la réserve, soumises à l'impôt sur les sociétés (IS), sont également imputées au résultat . Elles viennent compenser les moins-values obligataires.

La piste de réflexion explorée par le Gouvernement consiste à imposer au taux de 10 % les sommes en réserve des sociétés d'assurance et des mutuelles. La taxation serait étalée sur deux années . Un plafonnement serait également envisagé, s'agissant des petites entreprises d'assurances ayant constitué de très importantes réserves. Les reprises ne seraient pas, en revanche, imposées.

La réserve de capitalisation est estimée globalement à 13 milliards d'euros pour les « assureurs-vie » et à 3 milliards d'euros pour ceux « non vie ». Le gain fiscal potentiel serait donc de 1,6 milliard d'euros.

Cette mesure appelle deux commentaires:

(a) Un système en vigueur avantageux pour les assureurs

Le mécanisme en vigueur tend à neutraliser l'impact fiscal de la réalisation de plus ou moins values de cession d'obligations grâce à la constitution de dotations et de reprises.

En réalité, cette neutralité dépend de l'évolution des taux d'intérêt et du comportement des assureurs .

D'une part, force est de constater que grâce à la baisse des taux d'intérêt ces dernières années , les compagnies d'assurance ont certes pu jusqu'à présent se procurer des fonds propres en « franchise d'impôt » 26 ( * ) . Les dotations de la réserve ont été globalement supérieures aux reprises. La réserve n'a cessé d'augmenter.

D'autre part, il n'existe aucune obligation de céder les obligations dépréciées. L'assureur peut décider de ne pas réaliser de moins-values et conserver le titre obligataire jusqu'à son terme. La reprise des sommes en réserve n'est pas automatique. Leur imposition n'est donc pas acquise.

C'est pourquoi, le Gouvernement propose de taxer immédiatement les sommes de la réserve plutôt que d'attendre une éventuelle reprise des sommes, qui peut ne pas intervenir, si les taux devaient demeurer bas ou si les assureurs préféraient conserver leurs titres dépréciés.

En outre, les réponses au questionnaire adressé par votre rapporteur pour avis au ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat font valoir que : « les entreprises d'assurances ont échappé aux taxes imposées aux banques : taxe sur les bonus (350 millions d'euros), nouvelle taxe de financement de leur supervision (150 millions d'euros, pérenne), taxe à venir sur les actifs bancaires à risques (pérenne également pour plus de 500 millions d'euros). Au regard de cela, cette taxation en une seule fois n'est pas disproportionnée ». Enfin , « l'assurance-vie est le grand gagnant des mesures retraites : c'est le seul produit d'épargne dont la taxation n'est pas majorée de 1 point (à la différence des autres placements immobiliers et financiers) . »

De surcroît, le secteur de l'assurance a résisté à la crise . Son chiffre d'affaires a connu une croissance globale de 9 % en 2009, après une baisse des cotisations de 6,4 % en 2008. L'encours des contrats d'assurance vie devrait atteindre 1 308 milliards d'euros, soit un taux de progression de 8 % sur un an.

L'année 2009 se caractérise par une amélioration globale de la solvabilité du marché , compte tenu du redressement des plus-values latentes (72,7 milliards contre 8,3 milliards d'euros en 2008).

Cependant , dans un contexte économique difficile qui a affecté principalement les sociétés « dommages », les résultats nets comptables des entreprises sont en recul de 34 % . La rentabilité des fonds propres s'établit à 6,8 % (contre 11,3 % en 2008).

(b) Une proposition qui ne doit pas remettre en cause l'engagement prudentiel de solvabilité envers les assurés

Il conviendrait de s'assurer que cette mesure ne remette pas en cause l'engagement prudentiel de solvabilité envers les assurés.

D'un point de vue macroéconomique , selon le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, cette taxe représenterait 2,4 % des fonds propres « en vie » et 0,7 % des autres produits d'assurance.

Cependant, d'un point de vue microéconomique , l'imposition prévue tend à diminuer le résultat de l'entreprise et ses fonds propres. La solvabilité de l'assureur constitue un élément essentiel du bon fonctionnement du système. Le système fiscal ne doit pas peser sur la solvabilité de l'assureur .

Il conviendra également de demeurer vigilant sur les modalités de mise en oeuvre de cette taxe de sortie afin qu'elle n'impacte pas la réserve de capitalisation qui constitue un engagement envers l'assuré et dont l'assureur n'a pas la libre disposition.

Enfin, si une telle taxe devait être instituée, les assureurs font valoir que certaines conséquences devraient être tirées, en contrepartie , dans le cadre de la mise en oeuvre des nouvelles règles issues de la transposition de la directive Solvabilité II .

En effet, la réserve de capitalisation est comptabilisée dans la catégorie des quasi-fonds propres en l'état actuel des règles prudentielles (Solvabilité I).

En revanche, il est possible qu'elle ne soit pas entièrement intégrée dans la marge de solvabilité, dans le cadre de Solvabilité II. Il appartiendra à la France de définir le rôle de cette réserve et donc sa qualification ou non de quasi fonds propres.

b) Les mesures proposées ont-elles les qualités nécessaires pour financer le remboursement de la dette sociale ?
(a) Le « panier de recettes » proposé, un « panier percé » ?

Afin de prévenir tout report de charges sur les générations futures, le législateur a décidé en 2005 de renforcer les contraintes de financement de la CADES en précisant, par la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, que « tout nouveau transfert de dette à la Caisse d'amortissement de la dette sociale est accompagné d'une augmentation des recettes de la caisse permettant de ne pas accroître la durée d'amortissement de la dette sociale ».

Le respect de cette contrainte implique une vigilance particulière sur la nature des ressources affectées à la Caisse. En effet, pour remplir de manière satisfaisante sa mission, la CADES doit pouvoir bénéficier de recettes pérennes et dynamiques, à l'image de la CRDS et de la CSG dont une fraction est depuis 2009 affectée à la Caisse.

Lors de chaque transfert de déficits, la CADES calcule un « tarif » exprimé en points de CRDS. Ainsi, pour reprendre en 2011 les déficits structurels du régime général et du FSV de 2009 et de 2010, soit 34 milliards d'euros, il conviendrait d'affecter, à partir de 2011, à la CADES 0,26 point de CRDS ou son équivalent, soit, par rapport au produit 2011 estimé de la CRDS, une somme de 3,2 milliards d'euros. Il est important de souligner que 0,26 point de CRDS 2011 n'équivaut pas à 0,26 point de CRDS 2015 ou 2020 compte tenu du dynamisme naturel de la contribution . Par exemple, en 2002, 0,26 point de CRDS représentait 2,4 milliards d'euros soit 800 millions de moins qu'en 2010. En moyenne, le produit de la CRDS a augmenté de 3,7 % par an entre 2002 et 2010.

L'augmentation de la CRDS étant exclue à court terme, le Gouvernement propose trois mesures de recettes alternatives permettant d'attribuer à la Caisse une somme annuelle de 3,2 milliards d'euros en 2011 et 2012 (cf. supra ). Aucune des mesures présentées ne possédant les mêmes caractéristiques que la CRDS en termes de pérennité et de dynamisme, le Gouvernement admet qu'il sera nécessaire de revoir le schéma financier dès 2013 . En effet :

- « l'exit taxe » proposée sur la réserve de capitalisation n'aura pas d'impact au delà de 2012 ;

- l'assujettissement annuel aux prélèvements sociaux des compartiments euros des contrats d'assurance vie multisupports devrait connaître un rendement décroissant à partir de 2012 ;

- quant à la TSCA à taux réduit sur les contrats complémentaires santé, si cette recette est effectivement pérenne, son rendement sera au mieux constant (les contrats « solidaires » et « responsables » sont déjà largement répandus et ne peuvent se développer davantage), au pire décroissant, si la mesure entraîne une perte d'assiette, consécutive à un renoncement à une couverture complémentaire.

(b) Cette « fragilité » des recettes proposées est-elle acceptable ?

Si, selon toute évidence, les mesures proposées ne répondent aux exigences de pérennité et de dynamisme souhaitées, notamment par les parlementaires membres de la commission sur la dette sociale, il convient de souligner que le cadre législatif actuel prévoit un mécanisme de correction en cas d'insuffisance des ressources . Ainsi, l'article 7 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale dispose que « si les prévisions de recettes et de dépenses annuelles de la caisse sur la durée restant à courir de la période pour laquelle elle a été créée font apparaître qu'elle ne serait pas en mesure de faire face à l'ensemble de ses engagements, le Gouvernement soumet au Parlement les mesures nécessaires pour assurer le paiement du principal et des intérêts aux dates prévues ».

La commission des affaires sociales du Sénat, compétente sur le fond, a souhaité renforcé cette contrainte . Elle propose de compléter la règle organique de non-prorogation de la durée de vie de la CADES afin de prévoir que chaque année le projet de loi de financement de la sécurité sociale vérifie l'adéquation des ressources de la CADES. Cette clause de garantie organique est elle-même renforcée par une clause de retour à meilleur fortune, qui permet d'avancer le calendrier d'amortissement si la CADES enregistre deux années de suite un accroissement de ses recettes supérieur à 10 % des prévisions initiales.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis note l'engagement du Gouvernement d'inscrire une clause de garantie dans le cadre du PLFSS pour 2011 afin de vérifier que le rendement attendu des mesures relatives aux niches corresponde à 0,26 point de CRDS 27 ( * ) .

(c) La nature des recettes proposées est-elle de nature à entamer la confiance des investisseurs dans la CADES ?

Selon l'agence de notation Fitch France auditionnée par la commission des affaires sociales le 1 er septembre, la nature des recettes proposées ne devrait pas avoir d'impact sur la note de la CADES qui, compte tenu de son statut (établissement public administratif), est considérée comme un « démembrement » de l'Etat.

Par ailleurs, comme mentionné ci-dessus, le législateur a prévu un mécanisme d'ajustement qui, sur proposition de la commission des affaires sociales, pourrait être réaffirmé à l'occasion de la discussion du présent projet de loi organique.

c) Le produit du panier de recettes ne devrait-il pas être affecté à la réduction des déficits de l'Etat ?

Le Gouvernement a fait de la réduction des niches sociales et fiscales son champ de bataille pour 2011. Le rendement des différentes mesures qui seront proposées au cours de l'automne devrait avoisiner 10 milliards d'euros en 2011, dont 6,9 milliards ont d'ores et déjà été fléchés en faveur de la sécurité sociale : 3,7 milliards d'euros sont alloués au financement de la réforme des retraites et 3,2 milliards d'euros sont affectés au financement du remboursement d'une partie de la dette sociale. Seuls 3,1 milliards d'euros pourraient être consacrés à la réduction des déficits de l'Etat, ce que d'aucuns ont pu critiquer.

Toutefois, compte tenu de l'impossibilité pour l'ACOSS de continuer à garantir le financement d'une partie de la dette sociale, l'affectation à la réduction des déficits de l'Etat des 3,2 milliards d'euros qu'il est prévu de flécher vers la CADES dans le schéma du Gouvernement ne pourrait être envisagée qu'à la seule condition d'un relèvement du taux de la CRDS. Or celui-ci, contraint par la fragilité de la reprise économique, souhaite maintenir, plus ou moins, la pression fiscale à son niveau actuel et a rejeté à ce jour l'augmentation de la CRDS. Au demeurant, il convient de rappeler, comme ce l'a été fait ci-dessus, que l'assainissement des comptes sociaux participe à l'assainissement des comptes publics.

2. La question de l'adossement du FRR à la CADES

Le présent projet de loi organique prévoit que la CADES puisse être destinataire d'actifs et non plus simplement de recettes. Si l'adossement du FRR est amorcé par le projet de loi, il n'est pas organisé par ce dernier.

L'utilisation anticipée du FRR a pu soulever de vives réactions car celui-ci devait techniquement participer au financement du système de retraites entre 2020 et 2040.

Votre rapporteur pour avis souligne que si la date d'entrée en jeu du FRR a été modifiée, sa finalité n'est pas a priori détournée puisqu'il contribuera à soutenir à double titre le système de retraites entre 2012 et 2024 :

- la liquidation progressive de ses actifs, ainsi que l'affectation de sa ressource fiscale à la CADES, permettront de refinancer les déficits du régime général et du FSV entre 2012 et 2018 ;

- ce faisant, ce mécanisme permettra d'alléger la contrainte financière pesant sur la CNAV durant la montée en charge de la réforme des retraites.

L'adossement du FRR à la CADES comporte deux volets :

- d'une part, l'attribution de la ressource permanente du FRR à la CADES. Cette proposition n'appellent pas de remarques particulière, dans la mesure où, comme l'a souligné Patrice Ract-Madoux, président du conseil d'administration de la CADES, devant votre commission lors de son audition du 7 septembre 2010 28 ( * ) , le prélèvement social de 2 % sur le capital possède des caractéristiques proches de la CRDS et de la CSG en termes de pérennité et de dynamisme ;

- d'autre part, la liquidation progressive des actifs du FRR à raison de 2,1 milliards d'euros par an entre 2012 et 2024. Cet aspect de l'adossement du FRR devra être étudié avec précision. Si l'on peut considérer que cette somme n'est pas suffisamment conséquente pour modifier le comportement des marchés et leurs anticipations, il convient de noter que l'objectif de résultat qui serait fixé, à savoir le versement de 2,1 milliards d'euros par an à la CADES, représente une contrainte, plus ou moins forte en fonction de l'évolution des marchés, mais aussi du simple fait qu'il sera mécaniquement plus difficile d'atteindre ce « rendement » en fin de période.

3. L'exposition au risque de taux de la CADES, une incertitude majeure

Le schéma proposé par le Gouvernement se double d'une incertitude quant à l'exposition au risque de taux de la CADES qui devrait s'intensifier à moyen terme pour deux raisons :

- d'une part, compte tenu du niveau actuel particulièrement bas des taux d'intérêt, une remontée de ces derniers parait vraisemblable, entraînant par conséquent une augmentation du coût du portage de la dette ;

- d'autre part, cette augmentation risque d'être d'autant plus sensible que la reprise de dette actuellement envisagée induit un changement d'échelle pour la CADES. Ce sont 130 milliards d'euros qui devraient lui être transférés, dont 68 milliards d'euros dès 2011. Or, il convient de noter que l'exposition au risque de taux s'intensifie juste après les reprises de dettes compte tenu de l'importance des refinancements à court terme mis en place pour opérer ces reprises.

L'augmentation sensible du coût du portage de la dette dans les années à venir pourrait contribuer à remettre en cause le niveau de ressources actuellement calculé par la CADES pour refinancer d'ici 2025 l'ensemble des déficits repris. L'extinction de la CADES dépend en effet essentiellement de trois paramètres : le rendement des ressources, l'évolution des taux d'intérêt et le taux d'inflation.

Lors de son audition devant votre commission, Patrice Ract-Madoux, a expliqué que le risque de taux était théoriquement pris en compte par le modèle de gestion « actif-passif » de la CADES, qui permet d'apprécier l'horizon de remboursement en fonction de différentes probabilités de risque.

Il a indiqué, que si les taux d'intérêt devaient remonter à hauteur de plus de 100 ou 200 points de base d'ici deux ou trois ans, il n'était pas exclu que le Gouvernement, pour cette seule raison, soit contraint de redéfinir le niveau de ressources nécessaires de la Caisse afin que cette dernière puisse achever sa mission en 2025.

III. LES MESURES DE GESTION PROPOSÉES NE CONSTITUENT PAS DES RÉPONSES STRUCTURELLES À LA QUESTION DE LA DETTE SOCIALE

A. LES MESURES PROPOSÉES NE CONCERNENT PAS LES DÉFICITS À VENIR DE LA BRANCHE MALADIE

1. L'assurance maladie constitue une composante essentielle de la dette sociale
a) Historiquement, la majeure partie des déficits transférés à la CADES a concerné la branche maladie

Le montant total de la dette reprise par la CADES, depuis sa création, s'élève à près de 135 milliards d'euros. A l'exception de la dernière reprise de déficits prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, la composante « maladie » des déficits transférés a toujours été la plus importante.

En 1996 et 1998, les déficits « maladie » ont ainsi représenté près de 60 % du montant global des déficits du régime général transférés. Quant à la reprise de dette prévue par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie pour les années 2004-2006, elle a concerné exclusivement la branche maladie. En revanche, la composante « vieillesse » (CNAV+FSV) du dernier transfert de déficits à la CADES (2008-2009) a été la plus importante.

Au total, la composante « maladie » des déficits transférés à la CADES , depuis 1996, s'élève à plus de 76 milliards d'euros , soit plus de 56 % des déficits repris jusqu'à aujourd'hui.

Structure des déficits transférés à la CADES depuis 1996

(en milliards d'euros)

Année de reprise

1996

1998

2003

2004

2005

2006

2007

2008-

2009

Total

Base juridique

Ord. 1996

LFSS 1998

LFSS 2003 et 2004 (FOREC)

LFSS 2009

LAAM 13 août 2004

Régime général

20,89

13,26

-

35,00

6,61

5,70

- 0,06 1

27

108,40

Dont branche maladie

12,54

7,74

-

35,00

6,61

5,70

- 0,06 1

9

76,53

Dont branche famille

7,97

2,99

-

-

-

-

-

-

10,96

Dont branche vieillesse

0,38

2,53

-

-

-

-

-

18 2

20,91

Etat

23,38

-

-

-

-

-

-

-

23,38

CANAM

0,46

-

-

-

-

-

-

-

0,46

Champ FOREC

-

-

1,28

1,1

-

-

-

-

2,38

Total

44,73

13,26

1,28

36,1

6,61

5,70

- 0,06

27

134,61

(1) Le montant cumulé des reprises de dettes à la fin 2006 a fait l'objet d'une régulation de 0,06 milliard d'euros opérée en 2007.

(2) En 2008-2009, ont été transférés les déficits cumulés au 31 décembre 2008 de la CNAV (-13,9 milliards d'euros) et du FSV (-3,9 milliards d'euros).

Source : commission des finances, d'après les données de la commission des comptes de la sécurité sociale et des arrêtés du 26 décembre 1996 et du 28 décembre 1998 (pour la ventilation des reprises de dette de 1996 et 1998 entre les différentes branches du régime général)

b) Plus de la moitié des déficits transférés en 2011 sont issus de la branche maladie

Dans le nouveau schéma de reprise de dette envisagé par le Gouvernement, les déficits de la branche maladie 2009-2010 et prévisionnel pour 2011 devraient être transférés à la CADES, soit un montant global d'environ 37 milliards d'euros .

Évolution des soldes du régime général et du FSV

(en milliards d'euros)

2009

2010 (p)

2011 (p)*

Total

CNAM - Maladie

-10,6

- 13,1

-13,6

- 37,3

CNAM - AT-MP

-0,7

- 0,6

-0,5

- 1,8

CNAV

-7,2

- 9,3

-10,8

- 27,3

CNAF

-1,8

- 3,8

-3,4

- 9,0

Régime général

-20,3

- 26,8

-28,3

- 75,4

FSV

- 3,2

- 4,3

-4,0

- 11,5

Régime général + FSV

-23,5

-31,1

-32,3

-86,9

* Avant impact de la réforme des retraites.

Source : commission des finances, d'après les données du rapport de juin 2010 de la commission des comptes de la sécurité sociale et de la commission de suivi de la dette sociale

La composante « maladie » représentera ainsi 55 % environ du montant global des déficits transférés en 2011 à la CADES , soit les déficits 2009-2010 du régime général et du FSV, ainsi que le déficit prévisionnel pour 2011 de la branche maladie.

2. Contrairement aux déficits « Vieillesse », le schéma esquissé n'apporte pas de solution aux déficits à venir de la branche maladie
a) Le présent projet de loi organique laisse entière la question des déficits futurs des branches maladie, famille et accidents du travail-maladies professionnelles

Dans le cadre de la réforme des retraites, le Gouvernement a annoncé le transfert à la CADES des déficits de la branche vieillesse entre 2011 et 2018 afin d'alléger la contrainte financière pesant sur le régime général durant la montée en charge de la réforme.

Compte tenu du schéma présenté, environ 62 milliards d'euros de déficit « vieillesse » pourraient ainsi être transférés entre 2012 et 2018.

Deux mesures devraient permettre de traiter cette composante « vieillesse » de la dette sociale : d'une part, la mobilisation des actifs du FRR et, d'autre part, le transfert des ressources du fonds à la caisse.

En revanche, le schéma proposé n'apporte pas de solution :

- aux déficits 2011 et ultérieurs des branches famille et accidents du travail - maladies professionnelles qui devraient atteindre en 2011, respectivement, 3,4 milliards d'euros et 0,5 milliard d'euros ( cf. tableau précédent) ;

- et, surtout, aux déficits à venir de la branche maladie, qui, sauf mesures effectives sur les dépenses, ne manqueront pas de se reconstituer à partir de 2011 .

b) Une stabilisation du déficit de l'assurance maladie à des niveaux élevés est à craindre

En 2009, la dégradation de la conjoncture économique a frappé de plein fouet l'assurance maladie, branche qui a enregistré la plus forte dégradation de son solde , soit - 6,2 milliards d'euros par rapport à 2008. Elle est ainsi redevenue la branche la plus déficitaire du régime général, interrompant son redressement progressif entrepris depuis 2005. En 2010, son déficit prévisionnel devrait atteindre 13,1 milliards d'euros, soit la moitié du déficit du régime général.

Soldes du régime général, de la Caisse nationale d'assurance maladie et de la Caisse nationale d'assurance vieillesse

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - rapport de juin 2010

Si la crise a joué un rôle important dans la dégradation de la situation de la branche maladie, il n'en demeure pas moins que ce déficit tend aujourd'hui , comme l'a précisé le secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale en juin 2010, à devenir structurel .

Les projections du déficit cumulé de la branche maladie à l'horizon 2018 - date d'achèvement du schéma de reprise de dette proposé cet automne - ne sont pas encore disponibles. L'annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 devrait en présenter les soldes tendanciels à l'horizon 2014.

Néanmoins, quelques éléments permettent d'ores et déjà de prendre la mesure des déficits de la branche maladie qui risquent de se reconstituer.

Dans son rapport sur les charges et produits pour l'année 2011 29 ( * ) , la Caisse nationale d'assurance maladie indique ainsi que sans recettes complémentaires et dans l'hypothèse du respect d'un taux de progression de l'ONDAM de 2,9 % - tel que la France s'y est engagée dans son programme de stabilité 2010-2013 transmis à la Commission européenne - le déficit de la branche maladie se stabiliserait juste au dessus de 13 milliards d'euros en 2011 .

Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2010, la Cour des comptes a, quant à elle, évalué le déficit de l'assurance maladie en 2013 en cas de non respect de l'ONDAM. Selon la Cour, en tenant compte des hypothèses retenues dans le programme de stabilité, il atteindrait ainsi à l'horizon 2013 :

- près de 20 milliards d'euros si la croissance des dépenses d'assurance maladie s'élevait à 4,5 % par an sur la période 2010-2013, soit la croissance tendancielle des dépenses d'assurance maladie ;

- près de 15 milliards d'euros si la croissance des dépenses d'assurance maladie atteignait 3,5 % par an , soit le taux de progression enregistré au cours des dernières années, alors même que de nombreuses mesures de redressement ont été mises en oeuvre.

Comme le souligne la Cour, « le simple maintien d'un déficit d'environ 15 milliards d'euros financé par l'emprunt se traduirait rapidement par un endettement considérable ».

En effet, sans mesure structurelle forte, une stabilisation du déficit annuel de la branche maladie du régime général autour de 13 milliards d'euros sur la période 2012-2018 conduirait à la reconstitution d'un déficit cumulé de près de 90 milliards d'euros à l'horizon 2018 , soit 70 % du transfert de déficits envisagé cet automne par le Gouvernement.

Autrement dit, en l'absence de plan cohérent et efficace visant à encadrer les dépenses d'assurance maladie, la reprise de dette présentée cet automne risque d'être vouée à l'échec et de constituer qu'une étape dans la « fuite en avant » à laquelle nous serons vraisemblablement confrontés si aucune mesure structurelle n'est prise pour rétablir la situation des comptes sociaux.

B. LES MESURES PROPOSÉES SONT NÉCESSAIRES MAIS NE PERMETTENT PAS D'ENRAYER LA DYNAMIQUE DE LA DETTE

1. Le transfert des déficits à la CADES n'est pas une réponse aux questions posées par la dette

Votre rapporteur pour avis rappelle que le transfert des déficits sociaux à la CADES constitue une mesure de gestion et ne prévient en aucun cas la formation de nouveaux déficits.

Par ailleurs, il convient de souligner que si la reprise des dettes du régime de sécurité sociale par la CADES diminue en apparence la dette du régime général et donc des administrations de sécurité sociale, elle ne réduit pas, l'année du transfert, la dette des administrations publiques.

Enfin, recourir de manière régulière à la CADES accroit sensiblement le risque d'opérer un report de charges sur les générations futures, les tarifs de reprise devenant de plus en plus élevés au fur et à mesure que la date d'extinction se rapproche. Or, eu égard aux difficultés soulevés par l'affectation de recettes nouvelles au financement de la dette sociale, il importe plus que jamais de redéfinir les conditions de financement de la sécurité sociale si l'on ne souhaite pas une nouvelle fois déroger, d'ici quelques années, au principe de non-prorogation de la durée d'amortissement de la CADES.

2. L'enrayement de la dette impose une action décisive sur les dépenses

Compte tenu de la probable stabilisation à des niveaux élevés des déficits du régime général, et notamment de la branche maladie, une action vigoureuse sur les dépenses est aujourd'hui indispensable pour faire face notamment au défi majeur auquel notre système de protection sociale est confronté : le vieillissement de la population .

Si la réforme des retraites devrait apporter une solution partielle aux besoins de financement de nos systèmes de pensions, force est de constater qu' aucun programme de redressement de la branche maladie n'est à ce jour prévu. Or des marges de manoeuvre importantes existent encore aujourd'hui. Ces leviers de réforme doivent être activés le plus rapidement possible : plus ces réformes seront différées, plus elles seront difficiles à mettre en place.

a) Les dépenses de retraite : la réforme proposée cet automne sera-t-elle suffisante ?
(1) La réforme présentée par le Gouvernement

Adopté par le Conseil des ministres le 13 juillet dernier, le projet de loi portant réforme des retraites 30 ( * ) est en cours d'examen par l'Assemblée nationale.

Dans le scenario retenu par le Gouvernement, le besoin annuel de financement du système de retraite serait de 32,3 milliards d'euros en 2010, de 35,1 milliards en 2011, de 39,4 milliards en 2015 et de 42,3 milliards en 2018.

Aux termes des annonces gouvernementales, le retour à l'équilibre des régimes de retraites devrait être opéré d'ici 2018 grâce à quatre types de mesures :

- une action sur les paramètres démographiques des régimes de retraite ;

- des mesures de convergence entre le secteur public et le secteur privé ;

- le gel de l'effort financier de l'Etat au financement du régime de retraite des fonctionnaires ;

- l'apport de ressources nouvelles aux régimes de retraite.

Le besoin annuel de financement des régimes de retraite en 2018 serait ainsi couvert à hauteur de :

- 40,9 % par l'impact annuel des mesures d'âge, minoré de l'impact des mesures relatives à la prise en compte de la pénibilité et des dispositifs de solidarité ;

- 36,9 % par le gel de l'effort de l'Etat au financement du régime de retraite des fonctionnaires ;

- 12,7 % par l'affectation de nouvelles recettes ;

- 9,5 % par l'impact des mesures de convergence public-privé.

Les nouvelles recettes affectées aux régimes de retraite

Selon les informations disponibles, sur les 3,7 milliards d'euros de recettes supplémentaires devant être affectées aux régimes de retraite en 2011 :


1,32 milliard d'euros résulteraient de la modification de dispositifs fiscaux :

- augmentation du prélèvement forfaitaire libératoire (130 millions d'euros en 2011) ;

- augmentation du taux d'imposition des plus-values mobilières et disparition du seuil fiscal de cession (270 millions d'euros en 2011) ;

- hausse du prélèvement forfaitaire sur les plus-values de cessions immobilières (45 millions d'euros en 2011) ;

- hausse du taux marginal d'imposition (230 millions d'euros en 2011) ;

- suppression du crédit d'impôt sur les dividendes (645 millions d'euros en 2011).


2,38 milliards d'euros proviendraient notamment :

- de l'annualisation du calcul des allègements généraux (2 milliards d'euros) ;

- de l'augmentation des prélèvements sur les stock-options ;

- de l'augmentation des prélèvements sur les retraites chapeaux.

(2) Les interrogations de votre rapporteur pour avis

Votre rapporteur, également rapporteur pour avis du projet de loi portant réforme des retraites, tient à formuler, à ce stade, deux principales observations quant au « bouclage financier » de la réforme proposé :

- d'une part, les hypothèses macro-économiques retenues n'échappent pas au « biais optimiste » qui caractérise souvent cet exercice : le schéma de financement proposé repose en effet sur les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR) qui se fondent elles-mêmes sur trois scénarios macroéconomiques très optimistes prévoyant un taux de chômage structurel variant entre 4,5 % et 7 % et une productivité apparente du travail variant entre 1,8 % et 1,5 % ;

- d'autre part, « le bouclage financier » proposé fait toujours mention du schéma de financement imaginé lors de la réforme des retraites de 2003, à savoir une hausse des cotisations vieillesse gagée par une baisse des cotisations chômage dans l'hypothèse d'une nette amélioration de l'emploi. Or ce schéma n'a jamais pu être mis en oeuvre. Compte tenu de la situation économique actuelle et de son impact durable sur l'économie, ce mécanisme paraît difficile à appliquer.

Ces deux éléments sont pourtant essentiels, la confiance et la transparence étant des conditions de la réussite du « rendez-vous 2010 ».

b) Les futurs besoins en matière de santé et de dépendance : une priorité encore plus importante ?
(1) Les dépenses de santé liées au vieillissement de la population constituent un des défis majeurs à venir pour notre système de protection sociale

Selon les projections de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) 31 ( * ) , un français sur trois aura plus de soixante ans en 2050 contre un sur cinq en 2005 .

Si les administrations de sécurité sociale devraient être les plus affectées par le vieillissement de la population, l'Etat - en raison du versement des retraites des fonctionnaires - et les collectivités territoriales - qui financent près de 20 % des dépenses liées à la prise en charge de la dépendance - seront également durablement touchés .

Comme le montre le graphique suivant - issue des derniers travaux de juin 2009 de la Commission européenne sur ce sujet - les conséquences budgétaires du vieillissement de la population représenteront un coût supplémentaire d'environ 2,7 points de PIB entre 2007 et 2060.

Coût supplémentaire lié au vieillissement de la population entre 2007 et 2060

Source : Commission européenne juin 2009 - transmis à votre commission des finances par la direction générale du Trésor

Cette hausse des dépenses liées au vieillissement sera certes moins forte en France que dans le reste de l'Union européenne, mais ce point doit être pondéré par deux éléments :

- d'une part, ces travaux ne tiennent pas compte de l'impact de la crise sur les comptes sociaux ;

- d'autre part, le poids des dépenses liées au vieillissement est actuellement plus important en France que dans le reste de l'Union européenne : comme le montre le graphique suivant, la France consacrait déjà, en 2007, environ 28 % de son PIB aux dépenses liées au vieillissement, plaçant ainsi notre pays largement au dessus de la moyenne de l'Union européenne.

Dépenses liées au vieillissement en 2007

( en point de PIB )

Source : commission européenne juin 2009 - transmis à votre commission des finances par la direction générale du Trésor

Les « pressions » à la hausse de ce type de dépenses viendront à la fois des besoins de financement des régimes de retraites et des dépenses de santé et de prise en charge de la dépendance, sans que des gains importants puissent être attendus de la réduction du chômage.

Ventilation des dépenses liées au vieillissement entre 2007 et 2060

(en points de PIB)

Retraites

Santé

Dépendance

Chômage

Education

Total*

Grèce

12,4

1,4

2,2

-0,1

0,0

(9,1) 15,9

Pays-Bas

4,0

1,0

4,7

-0,1

-0,2

(6,9) 9,4

Espagne

6,7

1,6

0,9

-0,4

0,1

(4,3) 9,0

Irlande

6,1

1,8

1,3

0,1

-0,3

(3,7) 8,9

Belgique

4,8

1,2

1,4

-0,4

0,0

(5,6) 6,9

Royaume-Uni

2,7

1,9

0,5

0,0

-0,1

(2,7) 5,1

Allemagne

2,3

1,8

1,4

-0,3

-0,4

(2,6) 4,8

UE 27

2,4

1,5

1,1

-0,2

-0,2

(2,7) 4,7

France

1,0

1,2

0,8

-0,3

0,0

(2,7) 2,7

Danemark

0,1

1,0

1,5

-0,2

0,2

(3,6) 2,6

Suède

-0,1

0,8

2,3

-0,1

-0,3

(1,5) 2,6

Italie

-0,4

1,1

1,3

0,0

-0,3

(2,0) 1,6

* Entre parenthèses, variation entre 2007 et 2035

Source : commission européenne juin 2009 - transmis à votre commission des finances par la direction générale du Trésor

(2) Des marges d'efficience importantes demeurent

Compte tenu à la fois de la situation actuelle des comptes de la sécurité sociale et des défis auxquels notre système de protection sociale est confronté, une action vigoureuse sur les dépenses est nécessaire.

Or des marges de manoeuvre importantes subsistent en la matière, qu'il s'agisse des modes de recours aux soins, de l'organisation du système de soins, de la productivité des offreurs, de la fixation de certains tarifs ou de l'évolution des comportements.

Les seuls écarts de productivité entre établissements de santé , mis en évidence dans un récent rapport de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de l'Assemblée nationale 32 ( * ) , ainsi que les importantes disparités observées notamment par la caisse nationale d'assurance maladie ( cf . encadré suivant) tant dans les pratiques médicales que dans les recours aux soins , laissent entrevoir des pistes de diminution de dépenses importantes.

Votre rapporteur pour avis développera ce point lors de l'examen prochain du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Quatre exemples de disparités dans les pratiques médicales et le recours aux soins

- Les prescriptions de médicaments , avec l'exemple des prescriptions d'inhibiteurs de la pompe à protons IPP (970 millions d'euros en 2009) : les prescriptions d'IPP varient, selon certaines régions, entre 300 et 725 boîtes en moyenne par médecin et par an ; 15 % des prescriptions d'IPP ne seraient pas justifiées, soit 150 millions d'euros ( chiffrage octobre 2009 - Commission des comptes de la sécurité sociale ) ;

- Les dépenses de transport (2,6 milliards d'euros en 2009 ; une contribution à la croissance des dépenses de soins de ville de 9,3 %) : les dépenses de remboursement de transports sanitaires varient de 320 à 852 euros par an sur le territoire ( chiffrage juillet 2009 - CNAMTS ) ;

- Les arrêts maladie (8,3 milliards d'euros en 2009 ; une contribution à la croissance des dépenses de soins de ville de 21,4 %) : les taux d'arrêts de travail longs (plus de 180 jours) pour troubles psychologiques varient de 1 à 4 en excluant les départements les plus extrêmes ( chiffrage juillet 2010 - CNAMTS ) ;

- Les actes de biologie médicale : leur volume a crû de 5,3 % en 2009 ; les mesures prises dans le cadre de la procédure d'alerte de mai 2007 ne modèrent plus leur croissance ( chiffrage juin 2010 - Commission des comptes de la sécurité sociale ).

Cependant une action vigoureuse sur les dépenses serait incomplète sans une amélioration du pilotage des comptes sociaux . De ce point de vue, les propositions des groupes de travail animés respectivement par Raoul Briet, sur le pilotage des dépenses d'assurance maladie et, Michel Camdessus, sur l'élaboration d'une règle constitutionnelle d'équilibre des finances publiques, devraient apporter des éléments de réponse.

3. L'efficacité de l'action sur les dépenses nécessite un meilleur pilotage des comptes sociaux

En 1996, les enjeux financiers de la sécurité sociale ont fait leur apparition dans le débat parlementaire grâce à la réforme de la Constitution et à « l'organicisation » de dispositions relatives aux lois de financement de la sécurité sociale. Ce nouvel outil législatif devait permettre de placer le pilotage financier de la sécurité sociale au coeur du débat public et de rationaliser la prise de décision politique dans le domaine sanitaire et social.

Toutefois, quatorze ans après le vote de la première loi de financement de la sécurité sociale, force est de constater que le cadre organique des lois de financement défini en 1996, puis en 2005, n'est pas satisfaisant en termes de programmation des dépense sociales. Pour la seule branche maladie, la somme des dépassements cumulés depuis 1997 s'élève à 19,4 milliards d'euros. A titre de comparaison, le déficit de la branche devrait atteindre 13,1 milliards d'euros en 2010 pour le seul régime général.

Cette situation résulte aussi bien de la spécificité des lois de financement par rapport aux lois de finances, que des limites de plusieurs instruments destinés à piloter les dépenses d'assurance maladie : la programmation pluriannuelle, l'ONDAM et la procédure d'alerte.

a) De la différence irréductible entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale

Comme le rappelait votre rapporteur dans son avis sur le projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale en 2005 33 ( * ) , il existe une « différence irréductible entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale . La limite principale des lois de financement de la sécurité sociale réside dans l'absence de contrainte juridique forte s'agissant du respect des objectifs de dépenses fixés chaque année par le Parlement, notamment de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) à la différence par exemple de ce qui existe avec la loi de finances : le Parlement autorise un plafond de dépenses, qui ne constitue en aucun cas une obligation de dépenses. En revanche, ce plafond de dépenses ne peut être dépassé et diverses procédures sont prévues pour permettre de respecter l'autorisation parlementaire (virements de crédits, transferts, gels, annulations) ».

Dans la continuité de ce raisonnement, notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, soulignait, à l'occasion du débat d'orientation budgétaire pour 2008 34 ( * ) , les règles budgétaires différentes qui président à l'élaboration des lois de finances et de financement de la sécurité sociale . Citant un rapport conjoint de l'inspection générale des affaires sociales et de l'inspection générale des finances, il notait ainsi que :

« - pour l'Etat, le principe de l'élaboration du projet de loi de finances est celui d'une norme a priori d'évolution des dépenses en volume, indépendante de la prévision de recettes fiscales . L'évolution spontanée des recettes influe, le cas échéant, sur les décisions prises en matière d'allégements fiscaux mais n'a pas d'impact sur les arbitrages en dépenses ;

« - pour les différentes branches de la sécurité sociale, les cibles définies à moyen terme portent sur le solde (objectif de retour progressif à l'équilibre). Les objectifs de dépenses figurant en projet de loi de financement de la sécurité sociale sont en partie déterminés en fonction des recettes prévisibles et d'un rythme de redressement du solde. Dès lors, les prévisions retenues en matière de recettes dans le PLFSS ont un impact déterminant sur le choix des mesures d'économies en dépense ou de hausse des prélèvements » .

Or l'application de cette logique présente un effet pervers : elle conduit à se concentrer sur un pilotage du solde qui peut être défavorable en termes d'évolution des dépenses . S'agissant de la branche famille, par exemple, le raisonnement en termes de solde, plutôt favorable jusqu'à une période récente puisque cette branche enregistrait des excédents, a conduit à la création de nouvelles dépenses.

b) La programmation pluriannuelle instaurée en 2005, un exercice à ce jour peu concluant

Conformément à la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale 35 ( * ) , tous les projets de loi de financement présentent des projections pluriannuelles .

Chaque année, la loi de financement laisse ainsi entrevoir une réduction des déficits, voire un retour à l'équilibre, des régimes obligatoires de base. Mais, cet exercice s'avère en réalité très formel puisque d'année en année, ces horizons sont repoussés .

Le cas de la branche maladie du régime général est, de ce point de vue, le plus remarquable. Alors que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 évoquait un retour à l'équilibre financier de la branche en 2007 grâce à la loi précitée du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie, celui-ci a ensuite été systématiquement reporté :

- à 2009, en loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 ;

- à 2010, dans l'hypothèse macroéconomique haute proposée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ;

- à 2012, dans l'hypothèse macroéconomique haute proposée par loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, après la révision des hypothèses macroéconomiques apportée par le Gouvernement au cours de l'examen du texte par le Parlement, a finalement fait apparaître un déficit prévisionnel de la branche de 2 milliards d'euros en 2012.

Enfin, pour la première fois lors de l'examen du projet de loi de financement pour 2010, tout retour à l'équilibre a été durablement perdu de vue : le dernier PLFSS ne prévoit en effet qu'une stabilisation du déficit de la branche maladie autour de 11,6 milliards d'euros à l'horizon 2013.

Projections pluriannuelles de l'évolution du déficit des régimes de base et du FSV

( en milliards d'euros )

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

LFSS pour 2006

Maladie

-11,6

-8,3

-6,1

-3,5

-1,7

0,6

AT-MP

-0,2

-0,5

-0,2

-0,1

0,1

0,1

Famille

-0,4

-1,1

-1,2

-1,2

-0,8

-0,3

Vieillesse

0,3

-2,0

-1,4

-1,7

-1,8

-2,2

Régime général

-11,9

-11,9

-8,9

-6,5

-4,2

-1,8

Régimes de base

-11,5

-12,9

-10,1

-7,9

-5,8

-3,5

FSV

-0,6

-2,0

-1,5

-1,4

-1,1

-0,5

LFSS pour 2007 - Hypothèse haute

Maladie

-8,0

-6,1

-3,9

-1,5

1,4

3,9

AT-MP

-0,4

0,0

0,1

0,2

0,5

0,9

Famille

-1,3

-1,3

-0,8

0,3

1,6

2,9

Vieillesse

-1,9

-2,4

-3,5

-4,1

-3,8

-3,3

Régime général

-11,6

-9,7

-8,0

-5,0

-0,3

4,5

Régimes de base

-11,4

-8,8

-7,5

-5,0

-0,4

4,2

FSV

-2,0

-1,2

-0,6

-0,4

0,0

0,0

LFSS pour 2008 - Hypothèse haute

Maladie

-5,9

-6,2

-4,2

-4,0

-2,8

-1,4

0,0

AT-MP

-0,1

-0,4

0,3

0,5

0,7

0,9

1,2

Famille

-0,9

-0,5

0,3

1,7

3,2

4,6

6,0

Vieillesse

-1,9

-4,6

-5,2

-6,0

-6,8

-7,9

-8,8

Régime général

-8,7

-11,7

-8,8

-7,9

-5,8

-3,8

-1,6

Régimes de base

-7,8

-11,4

-7,7

-7,9

-6,1

-4,3

-2,2

FSV

-1,3

-0,3

0,6

0,9

1,4

1,9

2,4

PLFSS pour 2009 avant modifications des hypothèses macroéconomiques apportées par le Gouvernement

Maladie

-4,6

-4

-3,4

-2,2

-1,1

0,2

AT-MP

-0,5

0,4

0

0,4

0,7

1,1

Famille

0,2

0,4

-0,2

0,2

0,6

1,7

Vieillesse

-4,6

-5,7

-5

-3,6

-1,7

-2,3

Régime général

-9,5

-8,9

-8,5

-5,3

-1,4

0,8

Régimes de base

-9,1

-8,7

-9,5

-7,3

-3,9

-1,6

FSV

0,2

0,9

-0,8

-0,8

-0,4

0,0

LFSS pour 2009

Maladie

-4,6

-4,2

-4,6

-4,2

-3,2

-2,0

AT-MP

-0,5

0,3

-0,1

0,2

0,5

0,9

Famille

0,2

0,3

-0,5

-0,3

0,1

1,1

Vieillesse

-4,6

-5,77

-5,3

-4,2

-2,5

-3,1

Régime général

-9,5

-9,3

-10,5

-8,6

-5,0

-3,1

Régimes de base

-9,1

-9,0

-11,4

-10,4

-7,4

-5,4

FSV

0,2

0,8

-1,0

-1,0

-0,6

-0,2

PLFSS pour 2010

Maladie

- 4,6

- 4,4

- 11,5

- 14,6

- 13,7

- 12,5

- 11,6

AT-MP

- 0,5

0,2

- 0,6

- 0,8

- 0,5

- 0,2

0,0

Famille

0,2

- 0,3

- 3,1

- 4,4

- 4,3

- 3,7

- 3,1

Vieillesse

- 4,6

- 5,6

- 8,2

- 10,7

- 11,6

- 13,0

- 14,5

Régime général

- 9,5

- 10,2

- 23,5

- 30,6

- 30,1

- 29,4

- 29,2

Régimes de base

-9,1

-9,7

-24,7

-31,5

-31,4

-30,6

-30,3

FSV

0,2

0,8

-3,0

-4,5

-4,0

-3,7

-3,1

Source : commission des finances, d'après les lois et projets de loi de financement de la sécurité sociale

c) L'ONDAM, un objectif une seule fois respecté depuis sa création

Depuis 1997, le Parlement est amené à voter, chaque année, en loi de financement de la sécurité sociale, un objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM). Or, à l'exception de 1997, première année d'application du cadre organique défini en 1996, l'ONDAM n'a jamais été respecté ( cf. graphique).

Deux principaux éléments expliquent cette tendance : d'une part, l'évaluation peu réaliste des mesures d'économies qui sous-tendent la construction de l'ONDAM et donc son respect et, d'autre part, les phénomènes dits de « rebasage » qui contribuent à consolider les dépassements au lieu d'appeler un effort de maîtrise supplémentaire des dépenses.

Réalisation et dépassements de l'ONDAM depuis 1997

(en milliards d'euros)

Source : direction de la sécurité sociale, graphique cité dans le rapport du groupe de travail, présidé par Raoul Briet, sur le pilotage des dépenses d'assurance maladie, avril 2010

Note de lecture : en abscisses figure le niveau de dépenses constaté et en ordonnées le taux d'évolution associé ; la taille des bulles représente l'ampleur du dépassement ou de la sous-consommation. Ainsi, en 2007, les dépenses dans le champ de l'ONDAM ont atteint 147,7 milliards d'euros compte tenu d'un dépassement de 2,8 milliards d'euros, soit un taux d'évolution à périmètre constant de 4,2 %.

(1) Une construction peu transparente de l'ONDAM

Le respect de l'ONDAM repose en effet tout autant sur la sincérité de sa construction que sur la rigueur de son exécution.

Or, comme le rappelait votre rapporteur dans son avis sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 36 ( * ) , la fiabilité des chiffrages sur lesquels repose la construction de l'ONDAM doit être améliorée. Si l'évaluation de l'évolution tendancielle des dépenses apparaît meilleure, tel n'est en revanche pas le cas des mesures d'économies qui sous-tendent le respect de l'objectif de dépenses.

La Cour des comptes indiquait à cet égard, dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007 qu' en 2006, les économies réalisées n'ont représenté que 58 % du montant attendu.

(2) L'effet cliquet du « rebasage »

A ce manque de sincérité s'ajoute ensuite l'effet cliquet de la technique dite du « rebasage ». Le processus de détermination de l'ONDAM consiste en effet chaque année à appliquer à une base, après prise en compte du ou des changements de périmètre de l'ONDAM, un taux d'évolution prévisionnel qui synthétise les effets contraires de l'évolution tendancielle des dépenses et des économies attendues.

Or une difficulté permanente pour la fixation de l'ONDAM réside dans la détermination des bases auxquelles sont appliqués les taux d'évolution . Ces bases sont définies en fonction :

- d'une part, des réalisations prévues pour l'année en cours, puisqu'elles ne peuvent pas être connues exactement au moment du vote de la loi de financement. Les prévisions utilisées s'avèrent donc plus ou moins éloignées de la réalité constatée ensuite dans les comptes ;

- d'autre part, du choix des pouvoirs publics de prendre en compte en tout ou partie le dépassement prévu de l'ONDAM de l'année qui se termine.

Cette technique du « rebasage » fausse l'appréciation de l'évolution des dépenses d'assurance maladie d'une année sur l'autre et peut ainsi conduire à neutraliser les dépassements en les incluant dans la base de l'ONDAM de l'année suivante, créant un effet cliquet par rapport aux dépenses constatées.

Le dépassement de l'ONDAM 2007 - 2,8 milliards d'euros - s'explique ainsi en partie par cet effet « base » : dès la fin mars 2007, la direction de la sécurité sociale évaluait à 700 millions d'euros l'effet de base ce qui rendait impossible, dès cette date, le respect de l'objectif de dépenses fixé pour 2007.

Les effets de base perturbent également l'appréciation du respect ou non des taux des différents sous-objectifs de l'ONDAM . Ainsi, par exemple, le dépassement de l'ONDAM hospitalier 2008 à hauteur de 150 millions d'euros était-il « sous-estimé ». En effet, ce dépassement a été constaté en dépit d'une surévaluation de la base retenue pour la construction de l'ONDAM 2008 de 200 millions d'euros et d'un gel de crédits destinés au fonds de modernisation des établissements publics et privés (FMESPP) de 100 millions d'euros. Ces deux éléments n'auraient dû rendre que plus aisé le respect du sous-objectif relatif aux établissements de santé.

Concrètement, les dépenses de l'assurance maladie augmentent chaque année dans une proportion plus importante que la programmation votée par le Parlement, non seulement en raison de l'évolution des dépenses réelles, plus élevée que la prévision , mais aussi en raison de la variation annuelle des bases de l'ONDAM. Cela conduit à consolider les dérapages et à ne jamais les remettre en cause.

d) Une procédure d'alerte bienvenue mais qui peut être améliorée

La loi précitée du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie a créé une procédure d'alerte en cas de risque de dépassement de l'ONDAM. Bien que constituant un progrès significatif, la mise en place de ce comité d'alerte a montré ses limites :

- il n'a pas répondu à son objectif en 2007, première année de mise en oeuvre de la procédure . Les mesures de redressement sont en effet intervenues trop tardivement et ont eu un effet très limité puisqu'elles ont eu un impact de 250 millions d'euros en 2007 - avec un effet report de 700 millions d'euros en 2008 - pour un dépassement effectif de 2,8 milliards d'euros ;

- effet pervers du système, la référence à la « bonne gestion » s'est ensuite en quelque sorte déplacée du strict respect de l'ONDAM vers le non-franchissement du seuil d'alerte qui représente une marge de dépassement de près de 1,2 milliard d'euros 37 ( * ) ;

- enfin, le Gouvernement peut être tenté d'exclure certaines dépenses du champ de la procédure d'alerte . Ainsi, en dépit des initiatives de votre rapporteur pour avis, la loi de financement pour 2010 prévoit qu'à titre exceptionnel, les dépenses supplémentaires liées à la grippe A (H1N1)v ne sont pas prises en compte pour l'évaluation du risque de dépassement de l'ONDAM 2010 par le comité d'alerte. Cette mesure a créé un précédent préjudiciable pour la crédibilité de cet outil de régulation.

La procédure d'alerte en cas de risque de dépassement de l'ONDAM

Pour éviter les dépassements de l'ONDAM voté, la loi précitée du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie a créé un comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie , chargé d'alerter le Parlement, le Gouvernement et les caisses nationales d'assurance maladie en cas d'évolution des dépenses d'assurance maladie incompatible avec le respect de l'ONDAM.

Le risque de dépassement est jugé sérieux si son ampleur prévisible est supérieure à un seuil, fixé par décret, de 0,75 % de l'ONDAM. Le risque est alors notifié au Parlement, au Gouvernement et aux caisses nationales d'assurance maladie. Celles-ci proposent des mesures de redressement. Le comité rend un avis sur l'impact financier de ces mesures et, le cas échéant, de celles que l'Etat entend prendre pour sa part.

Le groupe de travail présidé par Raoult Briet sur le pilotage des dépenses d'assurance maladie 38 ( * ) a analysé ces faiblesses et a formulé une dizaine de propositions que votre rapporteur pour avis soutient :

- organiser, via le comité d'alerte, une expertise externe sur les hypothèses techniques sous-tendant la construction de l'ONDAM ;

- insérer davantage le vote de l'ONDAM dans une perspective pluriannuelle ;

- augmenter la fréquence des avis obligatoires du comité d'alerte ;

- abaisser progressivement le seuil d'alerte à 0,50 %, ce que votre rapporteur pour avis avait déjà proposé lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 ;

- conditionner la mise en oeuvre de tout ou partie des mesures nouvelles contenues dans la loi de financement au respect de l'ONDAM ;

- instaurer des mécanismes systématiques de mise en réserve en début d'année de dotations s'apparentant à des crédits budgétaires, les décisions de dégel total ou partiel, ou d'annulation, étant prises en cours d'année par le comité de pilotage.

Reprenant la proposition n° 2 du rapport précité, la commission des affaires sociales a adopté, à l'initiative de notre collègue Alain Vasselle, rapporteur du projet de loi organique, deux amendements à l'article 2 du présent projet de loi, tendant à prévoir :

- que la prévision de l'ONDAM pour les quatre années à venir repose sur des hypothèses de construction explicitées prenant en compte les perspectives d'évolution des dépenses et les mesures nouvelles identifiées ;

- que les annexes du projet de loi de financement de la sécurité sociale fournissent des éléments précis sur l'exécution de l'objectif national au cours de l'exercice clos et de l'exercice en cours ainsi que sur les modalités de construction de l'objectif pour l'année à venir en détaillant, le cas échéant, les mesures correctrices envisagées.

Si votre rapporteur pour avis accueille favorablement ces deux mesures qui devraient permettre un enrichissement de l'information dont dispose le Parlement quant à l'élaboration de l'ONDAM, il souhaite que l'examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale puisse permettre de franchir une étape supplémentaire , en proposant des mesures améliorant le suivi infra-annuel et la gestion en continu du risque de dépassement de l'ONDAM , ainsi que la procédure d'alerte.

Quant aux propositions du groupe de travail sur la recherche d'une règle d'équilibre des finances publiques animé par Michel Camdessus 39 ( * ) , elles devront également être analysées avec attention. Sur cette question, votre rapporteur pour avis renvoie aux travaux de notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, présentés lors du débat d'orientation des finances publiques pour 2011 40 ( * ) .

Principale mesure proposée par le groupe de travail sur la recherche d'une règle d'équilibre des finances publiques

Le groupe de travail sur la recherche d'une règle d'équilibre des finances publiques a formalisé un dispositif relevant de cette logique, en suggérant que le support de la programmation soit une loi-cadre pluriannuelle :

« Ce texte de nature pluriannuelle fixerait, en euros constants, pour chaque année de la période de programmation considérée :

« - le plafond du niveau des dépenses de l'État entrant dans le champ de la loi de finances (LF) et le plafond du niveau des dépenses de la sécurité sociale entrant dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) ;

« - le plancher des recettes de l'État et de la sécurité sociale (dans le champ de la LFSS) résultant de facteurs autres que l'évolution spontanée des produits, notamment les mesures nouvelles concernant les prélèvements obligatoires au sens de l'évaluation des voies et moyens annexée à la loi de finances ».

* *

*

En conclusion, votre commission des finances a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 1 er du présent projet loi organique dans la rédaction proposée par la commission des affaires sociales.

Celui-ci n'ouvre que des possibilités. Il conviendra d'apprécier, lors de l'examen du PLFSS et du PLF pour 2011, la pertinence du compromis proposé par le Gouvernement, et d'évaluer le degré de « provisoire » qu'il est possible d'accepter compte tenu du contexte actuel des finances publiques . Ce dernier requiert en effet un délicat arbitrage entre le soutien à la reprise de la croissance économique et le nécessaire assainissement de nos déficits.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. PATRICE RACT-MADOUX, PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA CAISSE D'AMORTISSEMENT DE LA DETTE SOCIALE (CADES)

Réunie le mardi 7 septembre sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Patrice Ract-Madoux, président de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

M. Jean Arthuis , président . - L'heure est à la réforme des retraites, mais n'oublions pas les exigences de financement de la dette sociale, et plus généralement de la sphère publique... Le Gouvernement va nous soumettre dans quelques jours un scénario de reprise de la dette de la sécurité sociale. Outre le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances pour 2011 traiteront également de cette question.

La nouvelle reprise de dette envisagée est d'une ampleur sans précédent. Seront transférés, entre 2011 et 2018, environ 130 milliards d'euros, soit l'équivalent des déficits transférés depuis la création de la CADES. Cette reprise repose sur le compromis suivant. Tout d'abord, l'adossement du Fonds de réserve pour les retraites (FRR) à la CADES, qui se voit ainsi affecter 1,5 milliard d'euros correspondant notamment à une partie du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital. La liquidation des actifs du FRR entre 2012 et 2024, à hauteur de 2,1 milliards d'euros par an, permettra de financer, dans la limite de 62 milliards d'euros, le remboursement des futurs déficits vieillesse transférés à la CADES entre 2012 et 2018.

Ensuite, l'allongement de la durée de vie de la CADES de quatre ans, dérogation au principe introduit en 2005 selon lequel tout nouveau transfert de dette doit être compensé par des ressources nouvelles, afin de financer les déficits de crise du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) en 2009 et 2010, évalués à 34 milliards.

Enfin, l'affectation à la CADES de 3,2 milliards de recettes supplémentaires résultant de la révision des niches fiscales et sociales, à ne pas confondre avec les 3,7 milliards de recettes nouvelles affectées à la réforme des retraites. Ces 3,2 milliards d'euros, qui correspondent en 2010 à 0,26 point de CRDS, ont vocation à financer, à hauteur de 34 milliards, le remboursement des déficits structurels du régime général et du FSV en 2009 et 2010, ainsi que le déficit prévisionnel de la branche maladie en 2011.

Ce schéma soulève de nombreuses questions ; c'est pourquoi nous avons souhaité que M. Ract-Madoux nous éclaire sur ces sujets.

M. Patrice Ract-Madoux, président de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) . - Depuis sa création par ordonnance en 1996, la CADES a vu sa protection améliorée par diverses lois de financement de la sécurité sociale et par la loi organique de 2005. Depuis 2005, la CADES calcule sa date probable d'extinction, que son président est tenu de présenter à son conseil d'administration, ainsi qu'au comité de surveillance, actuellement présidé par M. Jégou. Il y a aujourd'hui une chance sur deux que l'amortissement de la dette sociale soit achevé en 2021, comme le prévoit la loi organique de 2005 ; cinq chances sur cent que la fin de la CADES intervienne dès 2020, cinq chances sur cent qu'elle n'ait pas achevé sa tâche en 2022.

De nouveaux transferts de déficits à la Caisse ont été opérés l'année dernière ; respectant l'esprit de la loi organique, le Gouvernement, au lieu d'augmenter la CRDS, avait attribué à la CADES 0,2 point de CSG - quitte à assécher les ressources du FSV. La CADES émet aujourd'hui un emprunt arrivant à maturité en 2021, pour un milliard d'euros, profitant de taux d'intérêt exceptionnellement bas, à 2,86%.

Si le schéma de reprise de dette proposé par le Gouvernement est adopté en l'état, la Caisse reprendrait une dette totale de 130 milliards d'euros sur six ans. Une hypothèse serait de reprendre 68 milliards en 2011, puis 10 milliards par an de 2012 à 2018, au titre de la réforme des retraites, pour combler le déficit prévisionnel de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV). On aboutirait à une reprise de dette totale de 260 milliards, soit le double des transferts de dette intervenus depuis 1996 ! L'hypothèse optimiste est celle d'un amortissement total des dettes sociales en 2025, comme le prévoit la loi organique, sachant que la dette restante dépasse aujourd'hui les 90 milliards.

Plusieurs ressources nouvelles sont affectées à la Caisse pour financer ce transfert. Tout d'abord, 3,2 milliards d'euros, équivalent à 0,26 point de base de CRDS, dont M. Baroin a promis la pérennité - mais la question n'est pas tranchée... Deuxièmement, la mobilisation des actifs du FRR à hauteur de 2,1 milliards d'euros par an de 2012 à 2024. Troisième ressource : le transfert à la Caisse d'une partie du prélèvement de 2 % sur le capital, pour 1,5 milliard par an, qui devrait croître comme la CRDS. Enfin, la durée de vie de la Caisse est allongée de quatre ans.

Dans ce nouveau cadre, la CADES a une chance sur deux d'avoir amorti la dette en 2025 ; une sur cinq d'avoir terminé dès 2023 ; une sur cinq de n'avoir pas fini avant 2027-2028. Son portefeuille est pour une partie constitué d'emprunts à taux fixe à long terme. La nouvelle dette sera financée avec des taux courts, les conditions étant actuellement favorables. Mais il faudra la transformer ensuite en dette à plus long terme dans des conditions que nous ignorons.

M. Jean Arthuis , président . - Il nous reste à espérer que les autres régimes de protection sociale seront à l'équilibre à compter de 2012...

M. Patrice Ract-Madoux . - Le Gouvernement ne propose que la reprise des déficits des branches maladie et vieillesse pour 2009, 2010 et 2011. D'éventuels déficits de l'assurance maladie en 2012, 2013 ou 2014 se reconstitueront sans doute. S'ils sont transférés à la CADES, de nouvelles recettes devront lui être affectées.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je remercie M. Ract-Madoux, qui a toujours tenu le comité de surveillance informé.

Je m'inquiète de la fragilité du panier de recettes affectées à la CADES. La loi organique prévoit que la reprise de tout déficit soit compensée par des recettes correspondantes, traduites en « points CRDS ». Ainsi, les 3,2 milliards d'euros correspondent à 0,26 point de CRDS 2011, mais ce rapport peut changer... Aujourd'hui, le produit de la CRDS représente 6 milliards d'euros : large assiette et faible taux, c'est l'impôt idéal !

Je m'interroge également sur les modalités de l'adossement du FRR à la CADES. La ressource procurée par la fraction du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital est certes relativement liquide, mais il faudra organiser avec soin les décaissements annuels correspondant à la vente des actifs du Fonds : la CADES ne veut pas avoir à gérer les actifs du FRR ! Une parfaite cohésion entre les deux organismes sera nécessaire.

Nous profitons actuellement de taux d'intérêt extrêmement bas. Vos calculs prennent-ils en compte une éventuelle remontée des taux ?

Avec l'entrée des partenaires sociaux dans le conseil d'administration de la Caisse, souhaitée par la Cour des comptes, l'État se retrouverait minoritaire. Est-ce envisageable ?

Enfin, avez-vous calculé les économies qu'aurait permises la reprise de 20 milliards d'euros de dette dès l'an dernier ?

M. Patrice Ract-Madoux . - Comme Édith Piaf, je ne regrette rien : de tels calculs ne serviraient qu'à alimenter d'inutiles regrets !

Nos évaluations prennent en compte une éventuelle dégradation des conditions de marché : c'est pourquoi certaines simulations repoussent l'amortissement de la dette à 2027, voire 2028. En tout état de cause, le président de la CADES est tenu de présenter au Parlement la situation de la Caisse ; si les taux augmentent, il faudra s'assurer que la CADES dispose bien des ressources nécessaires pour remplir sa tâche.

M. Jean-Pierre Fourcade . - Je félicite M. Ract-Madoux pour la clarté de son exposé. La totalité de la dette aujourd'hui portée par l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (ACOSS) est-elle incluse dans les 130 milliards de dette reprise ?

M. Patrice Ract-Madoux . - Les 68 milliards d'euros repris en 2011 incluent le découvert de l'ACOSS fin 2010, qui devrait s'élever à 55 milliards, moins que le plafond de 65 milliards voté par le Parlement. Les 13 milliards restants correspondent à la reprise anticipée d'une partie du découvert pour 2011. Le déficit de l'assurance maladie avoisinant les 20 milliards, l'ACOSS aura sans doute à nouveau un léger découvert fin 2011.

M. Yann Gaillard . - La dette totale de la France comprend-elle les dettes sociales ?

M. Jean Arthuis , président . - Absolument !

Je remercie M. Ract-Madoux : nous pourrons désormais arrêter nos positions en toute lucidité.

II. EXAMEN DU RAPPORT POUR AVIS

La commission a ensuite le rapport pour avis de M. Jean-Jacques Jégou sur le projet de loi organique n° 672 (2009-2010) relatif à la gestion de la dette sociale, dans le texte n° 691 (2009-2010) établi par la commission des affaires sociales.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Nous savions qu'il nous faudrait légiférer cet automne sur la gestion de la dette de la sécurité sociale, mais nous ignorions qu'il nous faudrait repousser la date d'extinction de la CADES et anticiper l'entrée en jeu du FRR dès 2012.

L'année dernière, je dénonçais l'attentisme du Gouvernement et notre manque de responsabilité collective vis-à-vis des générations futures. Toutefois, la crise a « pipé » les dés et les décisions que le Gouvernement propose aujourd'hui sont malheureusement inévitables.

La dette sociale correspond à la dette des organismes sociaux, soit la dette brute portée par la CADES additionnée à celle prise en charge par les administrations de sécurité sociale (ASSO), régimes d'assurance sociale et organismes dépendant des assurances sociales. En 2009, la dette des organismes sociaux a atteint 155,8 milliards d'euros, soit 8,2 % du PIB : cinq points de plus qu'en 1999. La dette du régime général représente 15 % de ce montant, celle des hôpitaux 14%, l'UNEDIC près de 6%.

Dans le contexte du projet de loi organique, la « dette sociale » correspond aux déficits du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Elle a explosé avec la diminution des recettes induite par la crise financière, alors que les dépenses ne diminuaient pas. Le déficit annuel du régime général, d'une dizaine de milliards d'euros par an entre 2005 et 2008, a atteint 20,3 milliards en 2009 et devrait s'élever à 26,8 milliards en 2010.

Le dynamisme de la dette publique, qui atteint 80 % du PIB, pose la question de sa soutenabilité, le risque qu'un État développé fasse défaut n'étant plus aujourd'hui une hypothèse d'école.

La crise a également souligné les limites d'un système de protection sociale structurellement déficitaire. Entré dans la crise avec un handicap de 10 milliards d'euros, c'est avec un handicap de près de 30 milliards qu'il en sortira... Si les marchés avaient l'impression que la France ne compte pas réellement réduire sa dette, les conséquences pourraient être fort dommageables. Ceci doit nous inviter à prendre toutes nos responsabilités.

Les déficits du régime général et du FSV constituent une composante spécifique de la dette publique. En principe, l'équilibre financier de chaque branche est assuré par sa caisse, ce qui justifie, d'une part, le recours limité aux emprunts pour couvrir des besoins de court terme, d'autre part, le caractère exceptionnel de la CADES.

La gestion de la dette sociale est ainsi scindée en deux compartiments : un à court terme et un à long terme. Chaque compartiment a ses contraintes et ses avantages. Le financement à court terme, via l'ACOSS, ne peut être indéfiniment détourné de ses objectifs : le relèvement du plafond d'avances de l'ACOSS proposé l'an dernier, à hauteur de 65 milliards, ne pouvait être réitéré. Au-delà de la dérogation implicite au partage de responsabilités entre la CADES et l'ACOSS, cette dernière ne peut financer n'importe quels besoins de trésorerie. Le Gouvernement doit donc organiser cette année la reprise de la dette du régime général et du FSV. Ce n'est pas une décision courageuse, mais contrainte et forcée !

Depuis 2005, les conditions de reprise ont été durcies afin de garantir le caractère exceptionnel et provisoire de la CADES. Désormais, toute reprise de dette ne peut être opérée que si la Caisse perçoit des ressources nouvelles de manière à ne pas prolonger sa durée de vie au-delà de 2021, afin d'éviter de reporter sur les générations futures des charges correspondant à des dépenses courantes. Cette règle, dont le Conseil constitutionnel a souligné la nature organique, constitue aujourd'hui un obstacle pour un Gouvernement qui ne souhaite pas augmenter les impôts, et notamment la CRDS.

Le cantonnement de la dette sociale au sein de la CADES a l'avantage de permettre l'amortissement de la dette sociale : 46 milliards d'euros depuis 1996. Le déficit est amorti sur une durée limitée, alors que la dette portée par l'État est refinancée sans horizon déterminé. Dotée d'une ressource dédiée, la dette sociale a été conçue pour s'éteindre. Contrairement à la CADES, 1'ACOSS n'amortit pas les déficits. Elle finance le découvert par des emprunts de court terme, eux-mêmes remboursés par de nouvelles ressources de court terme. Ce dispositif permet aux différents gouvernements de différer les reprises de dette.

La reprise de la dette préparée par le présent projet de loi organique se révèle particulièrement complexe compte tenu des montants de transferts envisagés en 2011, puis entre 2012 et 2018 : en sept ans, la CADES devrait en effet reprendre 130 milliards d'euros, soit l'équivalent des déficits transférés en quatorze ans. L'importance des déficits transférés a suscité un débat sur l'opportunité d'une reprise de la dette par l'État ou par une caisse spécifique. Pour reprendre 80 milliards d'euros sans allonger la durée de vie de la Caisse, il faudrait doubler le taux actuel de CRDS ! Il devient difficile de maintenir le dogme présidentiel de non augmentation des impôts alors même qu'on envisage de réduire les niches fiscales et sociales... Au total, la reprise de dette proposée cette année nécessite l'adoption de trois textes législatifs, dont une loi organique, afin de proroger la durée de vie de la CADES.

Le schéma financier du Gouvernement mobilise trois leviers afin d'éviter une hausse trop brutale des prélèvements obligatoires. La CADES serait destinataire de 3,2 milliards de recettes supplémentaires résultant de la révision des niches fiscales et sociales, ce qui correspond en 2010 à 0,26 point de CRDS. Elles ont vocation à financer, à hauteur de 34 milliards d'euros, le remboursement des déficits structurels du régime général et du FSV en 2009 et 2010, ainsi que le déficit prévisionnel de la branche maladie en 2011.

La durée de vie de la CADES serait prolongée de quatre ans. Cet allongement, qui sera organisé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, a vocation à financer les déficits de crise du régime général et du FSV en 2009 et 2010, évalués également à 34 milliards.

Le FRR serait adossé à la CADES qui se verrait donc affecter les ressources du Fonds, soit 1,5 milliard d'euros correspondant notamment à une partie du produit du prélèvement de 2% sur les revenus du capital ; cet adossement sera précisé en PLFSS. La liquidation progressive des actifs du FRR entre 2012 et 2024 financera, dans la limite de 62 milliards, le remboursement des futurs déficits vieillesse transférés à la CADES entre 2012 et 2018.

Le projet de loi organique n'ouvre que des possibilités qui devront être confirmées lors du PLFSS pour 2011 ou du PLF pour 2011. Principal sujet d'inquiétude, les ressources affectées à la CADES s'éloignent des fondamentaux ayant présidé à sa création.

La création d'un panier de recettes et la liquidation progressive des recettes du FRR constituent -elles des mesures pertinentes et opportunes ? Sont-elles de nature à garantir le financement du remboursement de la dette sociale ? Le produit des mesures concernant les niches ne devrait-il pas être affecté à la réduction des déficits de l'État ?

L'exonération de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance (TSCA), dont bénéficient aujourd'hui les contrats complémentaires santé dits « solidaires » et « responsables » serait supprimée et remplacée par une taxation à un taux intermédiaire de 3,5 %, pour un rendement attendu de 1,1 milliard d'euros. Si le dispositif devrait demeurer attractif pour les complémentaires, cette charge nouvelle risque d'être répercutée sur les assurés, d'autant que les complémentaires ont déjà vu leur régime fiscal s'alourdir ces dernières années. L'impact de cette mesure sur la CMU-complémentaire ou aide à l'acquisition d'une complémentaire devra être analysé avec attention.

L'assujettissement annuel aux prélèvements sociaux de la partie « euros » des contrats d'assurance-vie multisupports pose des difficultés techniques et nie le caractère global de ce type contrat et la nature incertaine des plus values. Ce dispositif, dont on attend un rendement de 1,6 milliard d'euros, pourrait conduire à prélever les cotisations sur le rendement « euros» du contrat, y compris en l'absence in fine de produits, si la performance des unités de compte est mauvaise.

Enfin, la création d'une taxe de sortie sur les sommes de la réserve de capitalisation des sociétés d'assurance, qui devrait rapporter 1,4 milliard d'euros, ne doit pas remettre en cause l'engagement prudentiel de solvabilité envers les assurés. Il faudrait en tirer les conséquences dans l'application des nouvelles règles issues de la transposition de la directive Solvabilité II. En l'état actuel des règles prudentielles, la réserve de capitalisation est comptabilisée dans la catégorie des quasi-fonds propres, mais pourrait ne pas être entièrement intégrée dans la marge de solvabilité dans le cadre de Solvabilité II. Il appartiendra à la France de définir le rôle de cette réserve et donc sa qualification ou non de quasi fonds propres.

Trois incertitudes demeurent quant à l'adéquation des nouvelles recettes aux besoins de la CADES. Premièrement, l'exposition de la Caisse au risque de taux s'intensifiera : leur remontée, qui paraît vraisemblable, aurait, selon M. Ract-Madoux, été prise en compte par le rallongement de la durée de la caisse ; la reprise de dette induit un changement d'échelle de la CADES, de sorte que l'augmentation du coût du portage pourrait affecter le calcul du niveau de ressources nécessaires pour refinancer l'ensemble des déficits repris. Le Parlement devra vérifier annuellement qu'on est dans l'épure.

Deuxièmement, dans quelles conditions les actifs du FRR seront-ils mobilisés ? Le Gouvernement souhaite que la vente soit progressive. La somme de 2,1 milliards d'euros n'est pas de nature à perturber les cours. Cependant, l'objectif de résultat représente une contrainte, surtout en fin de période.

Troisièmement, le panier de recettes ressemble à un « panier percé ». Il faut des recettes pérennes et dynamiques. Lors de chaque transfert, la CADES calcule un tarif en points de CRDS. C'est ainsi que pour reprendre en 2011 les 34 milliards de déficit structurel, il conviendrait de lui affecter 0,26 points de CRDS au tarif 2011, soit 3,2 milliards d'euros. Or de même que 0,26 point 2002 représentait 2,4 milliards d'euros, soit 800 millions d'euros de moins qu'en 2010, de même, 0,26 point de CRDS 2011 n'équivaut pas à 0,26 point 2020. Le produit de la CRDS a augmenté en moyenne de 3,7 % par an entre 2002 et 2010.

L'une des trois mesures de recettes alternatives étant « à un coup », on devra revoir le panier de recettes. Cela a fait l'objet d'une polémique récente à l'occasion de la reprise par la presse d'une lettre envoyée par le ministre aux membres de la commission de suivi de la dette sociale.

L'exit tax sur la réserve de capitalisation n'aura pas d'impact au-delà de 2012 et l'assujettissement des compartiments euros aux prélèvements sociaux aura un rendement décroissant à partir de 2012 ; la TSCA à taux réduit sur les complémentaires-santé aura un rendement au mieux constant car ces contrats sont déjà très répandus, et au pire décroissant, en cas de perte d'assiette.

Cette fragilité des recettes est-elle acceptable ? Les mesures proposées ne possèdent pas la pérennité et le dynamisme souhaités. Toutefois, l'article 7 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 prévoit un mécanisme de correction, le Gouvernement devant soumettre au Parlement « les mesures nécessaires pour assurer le paiement du principal et des intérêts aux dates prévues ». Le mécanisme pourrait être réaffirmé par le présent projet qui modifie les règles organiques applicables à la Caisse. La commission des affaires sociales a proposé que chaque année, le projet de loi de financement de la sécurité sociale vérifie l'adéquation des ressources de la CADES afin d'éviter une nouvelle prorogation de sa durée de vie. Elle a également adopté un amendement permettant d'avancer la dernière échéance de remboursement de la dette sociale si ses recettes sont deux années de suite supérieures de 10% aux prévisions.

La confiance des investisseurs devrait ne pas être affectée, a assuré l'agence de notation Fitch France lors de son audition par la commission des affaires sociales. En tant qu'établissement public administratif, la CADES est, en effet, considérée comme un « démembrement de l'Etat » et donc à ce jour parfaitement solvable

Est-il opportun d'affecter 3,2 milliards d'euros de recettes nouvelles au refinancement de la dette sociale ? Sur 10 milliards attendus de la réduction des niches fiscales et sociales...

Mme Nicole Bricq . - Le Gouvernement ne les a pas trouvés !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - ... 6,9 milliards sont fléchés en faveur de la sécurité sociale et certains ont critiqué le fait qu'on ne consacre que 3,1 milliards à la réduction du déficit de l'Etat. L'ACOSS ne pouvant continuer à garantir le financement de la dette sociale, l'affectation au budget de l'Etat des 3,2 milliards d'euros que le Gouvernement veut attribuer à la CADES ne pourrait être envisagée qu'à condition de relever en contrepartie le taux de la CRDS. Or celui-ci ne souhaite pas relever nominalement les impôts.

M. Philippe Marini, rapporteur général . - La réduction des niches fiscales tend à garantir les recettes.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Les mesures proposées ne traitent pas les déficits au-delà de 2012. Et je ne parle pas de la dépendance. Les projections du dernier PLFSS prévoyaient 12,5 milliards de déficit en 2012 et 11,6 milliards en 2013. Le transfert de déficit à la CADES ne constitue pas une réponse optimale, et il y a un risque de report sur les générations futures. Des réformes de fond, permettant de faire face au vieillissement de la population, sont nécessaires. Vu l'ampleur des transferts proposés, l'enjeu ne réside pas seulement dans le choix du schéma du financement jusqu'en 2012, mais aussi dans la révision du panier de recettes à partir de 2013, ainsi que dans le début de liquidation progressive des actifs de FRR. Enfin, une remontée des taux d'intérêt pourrait à elle seule requérir un ajustement.

Je vous propose de donner un avis favorable au projet de loi organique dans la rédaction de la commission des affaires sociales. Il ouvre en effet des possibilités. Il nous appartiendra en PLFSS, comme en PLF, d'apprécier pleinement la pertinence du compromis proposé, d'évaluer le degré de bricolage ou de provisoire acceptable. Le contexte actuel des finances publiques requiert un délicat arbitrage entre soutien à la reprise et assainissement des déficits.

M. Jean Arthuis, président . - Le projet propose de prolonger de quatre ans la durée de la CADES et de permettre le transfert d'actifs du FRR vers la CADES. Il est bien dommage de ne pouvoir rassembler en un article d'équilibre la protection sociale et l'Etat car il y a une part d'arbitraire dans les transferts - le législateur constitutionnel y reviendra peut-être.

Vous indiquez que 3,7 milliards vont à la réforme des retraites et 3,2 milliards à la dette sociale. Mais le refinancement de la dette sociale à compter de 2012 fait également partie de la réforme des retraites.

M. Philippe Marini, rapporteur général . - L'analyse de M. Jégou est complète et argumentée, les questions sont bonnes et sa conclusion équilibrée. J'y souscris. Le risque de première grandeur est celui d'une remontée des taux d'intérêt, le reste n'est que détail. Comment se prémunir ? Par une gestion sérieuse : tout ce qui conduit à un doute accélère la réalisation du risque. Nous en sommes tous responsables. Nous verrons si l'on progresse vers une réelle maîtrise des finances publiques car c'est la seule question.

S'agissant du partage des mesures entre PLFSS et PLF, il est préférable que la fiscalité de l'assurance-vie soit traitée en loi de finances et que la fiscalité de l'épargne relève de notre commission.

M. Jean Arthuis, président . - Il faudrait modifier l'article d'équilibre afin de prévoir toutes les recettes de l'Etat et trois lignes de transfert au budget européen, aux collectivités locales et à la protection sociale.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Vous avez parfaitement raison. Je n'ose dire que la situation est burlesque...

M. Jean Arthuis, président . - Deux textes traiteront de l'assurance-vie !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - La situation n'est pas convenable. Ne peut-on alerter le Gouvernement sur les risques d'une discussion éclatée ?

M. Jean Arthuis, président . - Vous pouvez compter sur moi.

M. Roland du Luart . - Je remercie le rapporteur pour avis de cet exposé clair et convaincant. Je souhaiterais avoir des précisions sur l'adossement du FRR à la CADES.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - D'une part, on transfère les ressources du FRR à la CADES, soit 1,5 milliard d'euros par an. D'autre part, s'agissant des actifs, M. Ract-Madoux m'a rassuré : il y aura un partenariat entre la Caisse et le FRR qui continuera de gérer ses actifs tout en procédant chaque année à la vente d'une partie d'entre eux afin de verser 2,1 milliards d'euros à la Caisse.

Mme Nicole Bricq . - Ce sera commode !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Voilà pourquoi j'ai posé tout à l'heure la question du marché. A compter de 2012, la CADES percevra annuellement, d'une part 1,5 milliard d'euros que l'Etat versait précédemment au FRR afin que celui-ci augmente ses actifs, et d'autre part, 2,1 milliards d'euros résultant de la vente progressive des actifs de ce dernier.

M. Jean Arthuis, président . - Le FRR ne percevra plus de recettes.

M. Roland du Luart . - C'est une extinction à terme.

Mme Nicole Bricq . - Un siphonage !

M. Roland du Luart . - Il conviendra d'attirer l'attention du Gouvernement sur le danger de déstabilisation de l'assurance vie provoquée par les mesures qu'il envisage de prendre. C'est un sujet majeur !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - L'objectivité m'oblige à dire qu'il y avait matière à prélever des impôts. Il s'agissait en effet de réserves. Ce que demande l'Etat à travers l'exit tax, soit 1,4 milliard, ne semble pas infondé.

M. Jean Arthuis, président . - C'est une réserve destinée à lisser les ressources des contrats d'assurance-vie.

M. Roland du Luart . - Voilà pourquoi je dis que c'est dangereux ! Il faut préserver la confiance !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Le paysage n'est pas encore stabilisé.

M. Jean Arthuis, président . - On demande aux compagnies d'assurances de recapitaliser...

M. Serge Dassault . - Je suis inquiet. La dette sociale augmente alors même que l'Etat compense à la sécurité sociale le coût croissant des allègements sociaux. Où la charge de la dette se trouve-t-elle ? Cette opération ne me paraît pas très saine parce qu'elle revient à cacher de la dette et de l'emprunt. Le budget finance tout cela, soit par emprunts, soit par augmentations d'impôts qui touchent l'ensemble de la population. Que va-t-il se passer après 2011 ? La situation financière, déjà difficile, pourrait s'aggraver.

M. Jean Arthuis, président . - M. Jégou préside le comité de surveillance de la CADES.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - La dette de l'Etat envers la sécurité sociale a été largement apurée. Je n'en partage pas moins vos préoccupations : les 20 milliards d'allègements de charges ne sont pas payés par les entreprises.

M. Jean Arthuis, président . - C'est tout l'inconvénient d'avoir deux discussions, l'une sur le PLFSS et l'autre sur le PLF.

Mme Nicole Bricq . - Nous sommes d'accord pour ne pas transférer la dette sur les générations futures et pour ne pas transformer le déficit conjoncturel en déficit structurel ; nous convenons aussi que l'ACOSS n'a pas à gérer le déficit social. Cependant, la dette est bel et bien transférée à nos petits-enfants puisqu'on prolonge la CADES tout en siphonnant le FRR. On nous propose un unique scénario sans rien nous dire des impasses. On parle des niches fiscales alors que porter la TVA sur la restauration à 8 % dégagerait 535 millions. Où trouver l'argent ? On sait faire, mais on ne veut pas ! La CRDS à 1 %, c'est 6 milliards supplémentaires. De même, on ne veut pas évoquer la CSG sur le patrimoine. Alors on continue comme avant... On ne peut pas donner un avis favorable.

M. Jean Arthuis, président . - Vous êtes plutôt réservée...

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Je suis d'accord sur votre analyse. Le projet de loi organique propose une ouverture, il nous sera possible de contester les modalités exactes du refinancement des transferts de dettes envisagés, notamment en ce qui concerne le panier de recettes et le choix de ne pas procéder à une augmentation de la CRDS.

M. Jean Arthuis, président . - Un amendement de la commission avait proposé l'an dernier de l'augmenter de 0,15 point.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis . - Je rappelle que les générations futures rembourseront dans les années 2020 des feuilles maladie des années 1990.

M. Jean Arthuis, président . - Ce texte organique porte uniquement sur la prolongation de quatre années de la CADES afin de digérer la dette née de la crise et pour permettre un transfert de ressources entre le FRR et la Caisse. M. Jégou, qui sera le garant de la transparence, propose de donner un avis favorable.

La commission des finances émet un avis favorable à l'adoption de l'article premier du projet de loi organique dans le texte élaboré par la commission des affaires sociales.


* 1 Dont votre rapporteur pour avis était membre.

* 2 Carmen M. Reinhart, Kenneth S. Rogoff, « The Aftermath of Financial Crises », 19 décembre 2008 ; « Growth in a Time of Debt », 7 janvier 2010 ; « From Financial Crash to Debt Crisis », 24 février 2010.

* 3 L'exception concerne celle de 1907.

* 4 « Les crises bancaires (même celles d'une origine purement privée) augmentent directement la probabilité d'un défaut souverain, par elles-mêmes (conformément à nos résultats) et indirectement alors que les dettes publiques augmentent fortement. Peu d'éléments suggèrent dans cette analyse que ces cycles de dette et leurs liens avec les crises économiques aient changé de manière appréciable au cours du temps » (traduction de la commission des finances).

* 5 Intervention d'Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, devant la commission des comptes de la sécurité sociale - 1 er octobre 2009.

* 6 Commission des comptes de la sécurité sociale - rapport d'octobre 2009.

* 7 Cour des comptes, rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques - juin 2010.

* 8 « Pour faciliter le retour de la croissance, le Gouvernement écarte toute hausse massive des prélèvements. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons exclu durant cette crise une reprise de dette du régime général par la CADES. Un transfert de dette aurait en effet nécessité une hausse de la CRDS qui aurait pesé sur le pouvoir d'achat et la croissance. En 2010, l'ACOSS continuera donc à porter le déficit de la sécurité sociale. Quand la situation économique sera complètement rétablie, nous nous poserons sereinement la question du traitement de la dette et des déficits. » Discours de M. Eric Woerth prononcé à l'occasion de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2009.

* 9 Il convient de rappeler que ce type de contrat est garanti par l'assureur du contrat. L'épargne accumulée est disponible à tout moment, sans risque de perte de capital et avec un rendement minimum garanti.

* 10 Selon l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), Enquête Santé Protection sociale 2006.

* 11 Source : ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

* 12 Selon le projet annuel de performances pour 2010 de la mission « Santé ».

* 13 Cf. Audition de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, devant la commission des finances le 16 juin 2010, dans le cadre de l'examen du projet de loi de règlement et rapport de gestion pour 2009 .

* 14 Depuis le 1 er octobre 2002, le code général des impôts prévoyait une exonération de TSCA pour les contrats d'assurance maladie complémentaire dits « solidaires ». L'article 57 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie a restreint le champ d'application de cette exonération aux seuls contrats « solidaires » et « responsables ».

* 15 Chiffrage du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

* 16 Article 12 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

* 17 Article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 .

* 18 « Les mutuelles feront les meilleurs efforts, dans le contexte européen actuel, pour ne pas répercuter cette contribution dans les cotisations de leurs adhérents, dès lors qu'elles seront associées plus étroitement à la gestion du risque santé et que les règles du système de soins évolueront ».

* 19 Les dépenses liées à la CMU-C sont remboursées par le fonds à titre forfaitaire, soit 370 euros par bénéficiaire alors que la dépense moyenne supportée par l'assurance maladie s'élève à 420 euros, soit « un manque à gagner » de 170 millions d'euros en 2009.

* 20 Le compte-rendu de l'audition est disponible à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/affaires-sociales.html .

* 21 Le fonds a enregistré un excédent de 100 millions d'euros en 2009.

* 22 Article L. 862-3 du code de la sécurité sociale.

* 23 Rapport annuel de performances pour 2009 de la mission « Santé ».

* 24 Il convient de souligner que ce type de contrat est garanti par l'assureur du contrat. L'épargne accumulée est disponible à tout moment, sans risque de perte de capital et avec un rendement minimum garanti.

* 25 Décision ministérielle du 21 septembre 1973.

* 26 Les sommes distribuées ou mises en réserve sont en principe imposées à l'IS.

* 27 Le compte-rendu de l'audition de M. François Baroin devant la commission des affaires sociales le 1 er septembre 2010 est disponible à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/affaires-sociales.html .

* 28 Audition reproduite en annexe au présent rapport (travaux de la commission).

* 29 CNAMTS, Propositions de l'assurance maladie sur les charges et produits pour l'année 2011, juillet 2010.

* 30 Texte n° 2760 (2009-2010).

* 31 INSEE première n° 1092 - juillet 2006.

* 32 Assemblée nationale - Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale - Rapport n° 2556 - XIII e législature , « Le fonctionnement de l'hôpital ».

* 33 Rapport pour avis n° 256 (2004-2005).

* 34 Rapport d'information n° 400 (2006-2007), « DOB 2008, les chemins de l'équilibre ».

* 35 Article LO-111-4 du code de la sécurité sociale « Le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année est accompagné d'un rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les quatre années à venir ».

* 36 Rapport pour avis n° 73 (2007-2008).

* 37 Estimation sur la base de l'ONDAM voté pour 2010.

* 38 Rapport du groupe de travail sur le pilotage des dépenses d'assurance maladie - avril 2010.

* 39 « Réaliser l'objectif constitutionnel d'équilibre des finances publiques » - 21 juin 2010.

* 40 Rapport d'information n° 616 (2009-2010), « Débat d'orientation des finances publiques pour 2011 : en finir avec le double langage ».

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page