Avis n° 727 (2009-2010) de M. Jean-Jacques JÉGOU , fait au nom de la commission des finances, déposé le 29 septembre 2010


N° 727

SÉNAT

SECONDE SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 septembre 2010

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, portant réforme des retraites ,

Par M. Jean-Jacques JÉGOU,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

2760 , 2767 , 2768 , 2770 et T.A. 5 27

Sénat :

713 , 721, 733 et 734 (2009-2010)

INTRODUCTION

« La prévision est un art difficile surtout lorsqu'elle concerne l'avenir » (Marc Twain). Mais il est pourtant un domaine où l'avenir semble largement écrit et où rien ne paraît pouvoir infléchir la tendance des prochaines années : nous vieillissons.

Si ce vieillissement n'est que la contrepartie de l'augmentation de l'espérance de vie, il n'en reste pas moins qu'il est source de tensions pour notre système de retraite, durablement fragilisé par la crise. Le présent projet de loi est donc, comme les mesures de gestion de la dette sociale, dicté par l'urgence , ce qui se traduit par la mise à l'écart, pour l'instant, d'une réforme systémique. Le long terme ne doit cependant pas être perdu de vue.

Votre rapporteur pour avis a choisi de construire son rapport autour de quatre thèmes qui sont au coeur des préoccupations de votre commission des finances : l'équilibre financier de la réforme, les régimes de retraite des fonctions publiques et des régimes spéciaux, la politique de l'emploi et l'épargne retraite.

1- La redéfinition du financement de notre système de retraite répond à un impératif. En 2011, le besoin de financement de l'ensemble des régimes devrait s'élever à 32,2 milliards d'euros, soit un montant équivalent à un tiers des prestations légales « vieillesse » versées par le régime général.

La présente crise de financement a conduit le Gouvernement à privilégier une révision paramétrique des modalités traditionnelles de financement, et notamment l'augmentation de la durée d'assurance. Ceci constitue « un premier pas » indispensable.

Les autres éléments du volet financier de la réforme reposent sur une redéfinition de la contribution de l'Etat au financement des retraites, un basculement des cotisations chômage sur les cotisations vieillesse, une augmentation des recettes fiscales affectées à la sécurité sociale et un refinancement des déficits cumulés du système entre 2011 et 2018. Ces aspects ne sont pas concrètement traités par le présent projet de loi : pour certains d'entre eux, ils relèvent prioritairement du projet de loi de finances pour 2011 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 ; pour d'autres, ils dépendent de l'évolution de notre environnement économique. Le retour à l'équilibre des comptes de notre système de retraite à l'horizon 2018 reste donc, aux yeux de votre rapporteur pour avis, un pari particulièrement ambitieux. Il souligne par ailleurs que la recherche de l'équilibre ne permet pas d'éviter des « dépenses connexes », qui, si elles ne concernent pas à proprement parler le système de retraite, touchent les finances publiques.

Le présent projet de loi présente plusieurs mesures de solidarité. Votre rapporteur pour avis se félicite de ces propositions car l'équilibre entre les logiques assurantielle et distributive est plus difficile à atteindre en période de crise. Il souhaite à ce titre que la clarification des dépenses contributives et non contributives soit poursuivie. Le financement de la solidarité est d'autant mieux accepté que le lien contributif est préservé et lisible.

2- La réforme des systèmes de retraite de la fonction publique apparaît aujourd'hui doublement nécessaire :

- d'une part, par mesure d'équité car si la réforme de 2003 a permis une amorce de la convergence entre les secteurs public et privé, des spécificités demeurent encore dans la fonction publique ;

- d'autre part, pour des raisons de soutenabilité financière : les projections actualisées du COR font en effet apparaître un besoin de financement pour les régimes de retraite de la fonction publique de près de 20 milliards d'euros en 2015, soit environ la moitié du besoin de financement total des systèmes de retraites (régime général, fonction publique et indépendants). L'augmentation continue de la part financée par l'Etat ne peut, à elle seule, constituer une réponse soutenable pour les finances publiques.

Les mesures proposées par le titre II (mesures d'âge) et le titre III (mesures de rapprochement entre régimes) du présent projet de loi apportent des éléments de réponse à ces deux problématiques. Cependant, des marges d'amélioration en vue d'une plus grande équité entre assurés demeurent. En particulier, votre rapporteur pour avis regrette, d'une part, que les catégories dites « actives » de la fonction publique ne fassent pas l'objet d'un réexamen et, d'autre part, que la présente réforme ne doive s'appliquer que de façon différée aux régimes spéciaux de retraite.

3- Tout en reconnaissant que le débat sur la pénibilité soulève des questions importantes, votre rapporteur pour avis s'interroge sur son interaction avec le débat sur l'avenir de notre système de retraites. La problématique de la pénibilité ne relève en effet pas prioritairement des systèmes de retraite, mais davantage des conditions de travail. L'orientation des mesures proposées par le présent projet de loi, considérablement enrichies par nos collègues députés, en atteste d'ailleurs indirectement : l'accent est mis sur la prévention et la santé au travail ; la prise en compte de la pénibilité dans le calcul des droits à la retraite est partielle ; son financement sera assuré par la branche accidents du travail - maladies professionnelles, par le biais des cotisations employeurs AT-MP.

4- S'agissant enfin de l'épargne retraite , votre rapporteur pour avis a souhaité poursuivre la démarche de soutien engagée par l'Assemblée nationale en précisant les modalités d'application de certaines dispositions du texte, et en cherchant à « restaurer » un certain équilibre entre les deux branches de l'épargne retraite que sont les produits de type assurantiel d'une part, et ceux de l'épargne salariale, d'autre part. Il est essentiel que le dispositif législatif propose des contrats d'épargne retraite les plus diversifiés possible aux épargnants afin de leur permettre d'arbitrer de manière optimale entre les différents produits existants. Toutefois, votre commission des finances appelle de ses voeux une réflexion globale portant sur l'articulation cohérente des différents produits d'épargne retraite et corrélativement sur leur fiscalité, en soulignant que cette dernière ne devrait en aucun cas constituer l'unique objectif de la souscription de tels produits.

***

Votre commission des finances a souhaité se saisir pour avis des articles 1 ( * ) des titres II (dispositions applicables à l'ensemble des régimes, mesures d'âge), III (mesures de rapprochement entre les régimes), IV (pénibilité du parcours professionnel), V (mesures de solidarité), V bis (emploi des seniors) et V ter (épargne retraite).

Compte tenu du calendrier retenu au Sénat pour l'examen du présent projet de loi, votre rapporteur pour avis n'a pas été en mesure de travailler sur le texte adopté par la commission des affaires sociales du Sénat saisie au fond. Par conséquence, les références, sauf mention expresse, correspondent au texte voté par l'Assemblée nationale.

L'encadré ci-dessous présente les principaux amendements adoptés par la commission des affaires sociales lors d'une réunion concomitante à celle de votre commission sur le présent projet de loi.

Les principales modifications introduites

par la commission des affaires sociales du Sénat

Réunie les 28 et 29 septembre 2010, la commission des affaires sociales a adopté le projet de loi portant réforme des retraites, auquel elle a apporté 113 amendements.


Afin de renforcer les dispositifs de solidarité en faveur des personnes les plus fragiles , elle a :

- élargi l'accès à la retraite anticipée pour handicap, actuellement réservée aux personnes atteintes d'une incapacité permanente au moins égale à 80 % ayant accompli une durée minimale d'activité, à celles reconnues en qualité de travailleurs handicapés ( article 29 sexies ) ;

- permis aux demandeurs d'emploi actuellement titulaires de l'allocation équivalent retraite (AER) d'en conserver le bénéfice jusqu'à l'âge de leur départ en retraite, afin d'éviter que certains d'entre eux se retrouvent sans autres ressources que le RSA dans l'attente de pouvoir liquider leur pension ( article 32 bis B ).


Sur les dispositions relatives à la pénibilité , la commission a :

- réorganisé le dispositif pour distinguer clairement ce qui relève de la prévention et ce qui justifie une réparation ;

- prévu que le président du conseil d'administration du service de santé au travail sera élu alternativement parmi les représentants des employeurs et parmi ceux des salariés ( article 25 sexies ) ;

- institué un lissage du versement des allocations de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ( article 27 sexies A ) afin d'éviter un effet de seuil consécutif au relèvement des bornes d'âge.


Afin de renforcer l'effectivité du projet de loi en matière de pilotage des régimes , la commission a :

- inscrit dans le code de la sécurité sociale les principes essentiels de l'assurance vieillesse, confirmant ainsi son attachement à la retraite par répartition et au droit de tout retraité de bénéficier d'une pension en rapport avec les revenus qu'il a tirés de son activité ( article 1 er A ) ;

- donné au comité de pilotage des régimes de retraite un rôle d'alerte en cas de dérapage des comptes entraînant un risque sérieux pour la pérennité financière du système de retraite ( article 1 er ) ;

- supprimé l' article 1er bis du projet de loi, qui prévoyait le dépôt d'un rapport sur les redéploiements futurs de ressources et de charges entre régimes de retraite.

CHAPITRE PREMIER - LA REDÉFINITION DU FINANCEMENT DES RETRAITES PAR RÉPARTITION, UNE URGENCE

I. LE SCHÉMA DE FINANCEMENT CONSERVE UNE FORTE COMPOSANTE CONTRIBUTIVE

A. LES HYPOTHÈSES RELATIVES AUX BESOINS DE FINANCEMENT

1. Les besoins de financement définis par le Conseil d'orientation des retraites (COR)
a) Un besoin de financement annuel compris entre 40 et 48 milliards d'euros en 2020 et entre 71 et 115 milliards d'euros en 2050
(1) Les besoins de financement annuels du système de retraite

L'impact de la crise économique, qui a débuté en 2008 et a contribué à une dégradation plus forte que prévu des comptes des régimes de retraite en 2009 et 2010, a conduit le Conseil d'orientation des retraites à actualiser les projections présentées dans son cinquième rapport de novembre 2007. Ce travail d'actualisation a été présenté au mois d'avril de cette année.

Compte tenu de la difficulté à évaluer les répercussions de la crise sur la croissance et le chômage à long terme, le COR a travaillé sur trois scenarios :

le premier , optimiste, suppose un rattrapage intégral de la perte de production effective et potentielle engendrée par la crise : l'hypothèse de taux de chômage à long terme est de 4,5 % , soit un niveau inférieur à celui qui a été observé en France depuis trente ans. La productivité apparente du travail à long terme est supposée progresser de 1,8 % par an , soit l'évolution moyenne observée sur la période 1991-2007 ;

le deuxième , plus raisonnable, suppose que le taux de chômage à long terme est le même qu'avant la crise mais que le taux de croissance est plus faible : l'hypothèse de taux de chômage à long terme est de 4,5 % ; la productivité apparente du travail à long terme y est supposée progresser de 1,5 % par an , soit l'évolution moyenne observée sur la période 2000-2007. La perte de richesse liée à la crise correspondrait en 2020 à 1,6 année de croissance perdue ;

le troisième , relativement pessimiste, correspond à une hypothèse où le taux de chômage est plus élevé qu'avant la crise et le niveau de production plus faible : le taux de chômage structurel se stabiliserait à 7 % et l'hypothèse de productivité du travail à long terme serait de 1,5 %. La perte de richesse liée à la crise correspondrait en 2020 à 2,8 années de croissance perdue.

Seules les hypothèses économiques ont fait l'objet d'une actualisation ; les hypothèses démographiques comme les hypothèses réglementaires n'ont pas été modifiées. S'agissant de la durée d'assurance, le COR a retenu une durée égale à 41,5 ans en 2020 pour bénéficier d'une retraite à taux plein.

Au total, les projections actualisées du COR sont relativement alarmantes puisqu'elles soulignent que dès 2015 , le déficit annuel du système de retraite sera, suivant le scenario retenu, compris entre 38 et 40 milliards d'euros alors que les projections du COR en 2007 estimaient ce déficit à 15 milliards d'euros. Le besoin annuel de financement serait compris entre 40 et 48 milliards d'euros en 2020, et entre 68 et 115 milliards d'euros en 2050, soit entre 1,7 et 3,2 points de PIB .

A titre de comparaison, les recettes de l'impôt sur les sociétés sont estimées en 2011 à 44,3 milliards d'euros et celles de l'impôt sur le revenu à 59,5 milliards d'euros 2 ( * ) . Le doublement du produit de l'IS ne suffirait pas à absorber le besoin annuel de financement du système de retraite en 2020.

Selon le Conseil d'orientation des retraites, si les besoins de financement cumulés jusqu'en 2050 étaient couverts par une hausse immédiate des prélèvements, la masse de ces derniers au titre de la retraite, estimée en 2008 à 12,8 % du PIB, passerait à 14,7 % du PIB dans le scenario A, à 15 % du PIB dans le scenario B, et 15,3 % du PIB dans le scenario C.

Projection des besoins de financement annuel

(en % du PIB - en milliards d'euros )

2008

2010

2015

2020

2030

2050

Rapport projections COR 2007 (1)

0,7

1

1,6

1,7

-15,1

-24,8

-47,1

-68,8

Scenario A

La crise n'a pas d'impact

0,6

1,7

1,8

1,7

1,9

1,7

-10,9

-32,2

-38,3

-40,7

-56,3

-71,6

Scenario B

La perte de richesse liée à la crise est de 3,2 % du PIB

0,6

1,7

1,8

1,9

2,5

2,8

-10,9

-32,3

-39,4

-45,0

-70,3

-102,6

Scenario C

La perte de richesse liée à la crise est de 4,8 % du PIB

0,6

1,7

1,9

2,1

2,9

3,2

-10,9

-32,2

-40,3

-48,8

-79,9

-114,4

(1) Rapport du COR « Retraites : 20 fiches d'actualisation pour le rendez-vous de 2008 », novembre 2007

Source : à partir du Huitième rapport du Conseil d'orientation des retraites - Avril 2010

(2) La crédibilité des hypothèses économiques retenues par le Conseil d'orientation des retraites

Il convient de souligner que les trois scenarios sur lesquels le Conseil a travaillé sont, à court et moyen terme, cohérents avec les prévisions réalisées par le Gouvernement dans le cadre du programme de stabilité et de croissance 2010-2013 présenté par la France à la Commission européenne, en janvier 2010.

Or, votre rapporteur pour avis souligne que les prévisions associées aux pactes de stabilité et de croissance sont régulièrement révisées . C'est déjà le cas pour 2010. A la suite de nombreuses critiques (de votre commission des finances, de la Cour des comptes, de la Commission européenne, du FMI), le Gouvernement a révisé à la baisse, le 20 août dernier 3 ( * ) , l'hypothèse de croissance pour la seule année 2011. A titre de comparaison, selon le consensus des conjoncturistes 4 ( * ) , la croissance du PIB serait de 1,5 % en 2011 (après 1,4 % en 2010).

Comme le souligne Mireille Elbaum dans un article consacré au pilotage des comptes sociaux 5 ( * ) , les contraintes afférentes au Pacte de stabilité et de croissance « conduisent les gouvernements à afficher des projections de moyen terme à la fois peu réalistes et fortement normées , [ce qui] empêche la tenue d'un réel débat... fondé sur l'expertise comparée de différents scenarios économiques et choix collectifs possibles en matière de politiques économiques et sociales. Le paradoxe veut donc que les efforts d'amélioration de la programmation financière entrepris pour passer du court au moyen terme ne se soient pas traduits par davantage de clarté et de mise en débat, si on les compare aux travaux menés jusqu'à la fin des années 90 . »

b) Les hypothèses retenues par le Gouvernement

Le Gouvernement a choisi, dans le cadre de la présentation du projet de loi de réforme des retraites, de retenir le scenario B du COR. Ainsi le schéma financier qu'il propose a pour objectif de rétablir l'équilibre financier du système de retraite en 2018, date à laquelle le besoin annuel de financement serait de 42,3 milliards d'euros.

Besoin annuel de financement des régimes de retraites

(en milliards d'euros)

2010

2011

2015

2018

2020

Besoin de financement annuel

-32,3

-35,1

-39,4

-42,3

-45,0

Source : dossier de presse - présentation de la réforme des retraites - 16 juin 2010

Toutefois, les besoins de financement annuels du système de retraite entre 2010 et 2020 ont été actualisés au mois de septembre à l'occasion de la présentation des comptes de la sécurité sociale et du projet de loi de finances pour 2011. Le scenario économique de début de période a été revu afin de prendre en compte d'une part, une meilleure croissance en 2009 ainsi qu'en 2010, et d'autre part, l'affinement des projections par régime.

Actualisation des hypothèses économiques

2010

2011

2012

2013

2014

Hypothèses LFSS 2011

PIB Volume

1,5%

2,0%

2,50 %

2,50 %

2,50 %

Masse salariale

2,0%

2,9%

4,50 %

4,50 %

4,50%

Inflation

1,5%

1,5%

1,75 %

1,75 %

1,75 %

Hypothèses Scénario B du COR

PIB Volume

1,4 %

2,5 %

2,5 %

2,50 %

2,40 %

Masse salariale

1,3 %

3,7 %

4,4 %

4,30 %

4,60 %

Inflation

1,4 %

1,5 %

1,75 %

1,75 %

1,75 %

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

Cette révision a conduit à redéfinir les besoins de financement du système de retraite pour la prochaine décennie. Il convient de noter que le solde s'améliore particulièrement entre 2010 et 2015, avant de se dégrader à nouveau de manière sensible, notamment à partir de 2018.

Solde actualisé du système de retraite avant réforme

(en milliards d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde COR

-32,8

-35,0

-36,5

-38

-38,6

-39,2

-40,2

-41,0

-42,2

-43,4

-44,8

Solde actualisé

-29,2

-32,2

-35,1

-37,4

-38,8

-39,7

-41,0

-42,2

-43,8

-45,4

-47,2

Ecart

3,6

2,8

1,4

0,6

-0,2

-0,5

-0,8

-1,2

-1,6

-2,0

-2,4

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

2. La ventilation des besoins de financement par régime

Le tableau ci-dessus détaille le besoin de financement pour le système de retraite entre les trois plus importants régimes :

- le régime général, géré par la Caisse nationale d'assurance -vieillesse (CNAV) ;

- Le régime de la fonction publique d'Etat, géré par le Service des retraites de l'Etat (SRE) ;

- le régime de la fonction publique hospitalière et le régime de la fonction publique territoriale, géré par la CNRACL.

Comme le montre le tableau ci-dessous , l'enjeu budgétaire associé au financement des retraites des fonctionnaires est important à moyen terme : la fonction publique d'Etat doit absorber un choc relativement conséquent résultant à la fois de la décentralisation d'un nombre élevé de fonctionnaires, de l'application de la règle du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux à la retraite et de la réforme du statut de certaines entreprises « publiques ».

Ventilation des besoins de financement

2008

2015

2020

2050

Besoin annuel de financement

En mds d'euros

En mds d'euros

En % du besoin du système (1)

En mds d'euros

En % du besoin du système (1)

En mds d'euros

CNAV

A*

- 1,7

- 12,4

32,4

- 16,6

40,8

- 51,8

B*

- 1,7

- 13,0

33,0

- 18,8

41,8

- 64,4

C*

- 1,7

- 13,1

32,5

- 19

39

- 65

Fonction publique d'Etat

A*

- 11,2

- 19,6

51,2

-20,5

49

- 24,9

B*

- 11,2

- 19,8

50,2

- 21,0

46,6

- 25,2

C*

- 11,2

-19,8

49,1

- 21,0

43

- 25,2

CNRACL

A*

2,5

0,3

-

- 1,1

2,7

- 13,1

B*

2,5

0,3

-

- 1,3

2,9

- 13,6

C*

2,5

0,3

-

- 1,6

3,3

- 13,8

(1) les valeurs sont approximatives car les données comparées ne sont pas issues des mêmes sources. Exercice impossible à faire en 2050, les projections du COR et des différents régimes diffèrent trop.

* A, B, C = scenarii

Source : à partir du Huitième rapport du Conseil d'orientation des retraites - Avril 2010

B. « L'ÉQUILIBRE FINANCIER » DE LA RÉFORME

Le Gouvernement propose un retour à l'équilibre des comptes du système de retraite en 2018.

Entre 2011 et 2018, le besoin de financement cumulé du système sera, selon les dernières hypothèses économiques, de 310 milliards d'euros .

Cette somme devrait être couverte à hauteur de :

- 40 % par l'Etat . Cette part paraît importante mais s'explique par le fait que les calculs du COR s'appuient sur le taux de cotisation de l'Etat en 2000, alors que ce taux a augmenté de 5,34 points entre 2000 et 2010 ;

- 31 % par les « mesures contributives » , c'est-à-dire les mesures tendant à solliciter les capacités contributives traditionnelles des cotisants d'un régime par répartition : modification de la durée d'assurance (mesures d'âge) et des taux de cotisation (mesures de convergences public-privé, basculement des cotisations chômage). L'impact de ces mesures doit toutefois être minoré par la prise en compte des dispositifs de solidarité ;

- 11 % par de nouvelles recettes fiscales et sociales ;

Ces trois blocs de mesures devraient ainsi garantir la couverture de 82 % des besoins de financement d'ici 2018. La dette accumulée entre 2011 et 2018 représenterait 18 % du total, soit 56,7 milliards d'euros 6 ( * ) . Cette somme devrait être reprise par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES)et refinancée grâce à la liquidation progressive du Fonds de réserve des retraites 7 ( * ) (FRR).

Note : Mesures contributives = Mesures d'âge + mesures de convergence + Basculement cotisation chômage - mesures de solidarité

Source : commission des finances

1. La mobilisation des capacités contributives des générations actives
a) Les mesures d'âge, un levier privilégié (titre II du projet de loi)
(1) Age d'ouverture des droits et âge d'annulation de la décote

Le financement des systèmes de retraite par répartition peut être modifié essentiellement par la modification de quatre paramètres : l'âge de départ à la retraite, la durée de cotisation, le taux de cotisation, le niveau de pension.

La durée de cotisation a été au coeur de la réforme des retraites de 2003 . L'objectif de cette dernière a été en partie de stabiliser le ratio entre durée d'assurance et durée de retraite par une règle de partage des gains d'espérance de vie constatés. Selon l'Insee, l'espérance de vie augmente d'une année tous les dix ans. Cette année supplémentaire doit être pour les deux tiers consacrée à l'augmentation de la durée d'assurance. Concrètement cela signifie qu'une personne devrait travailler neuf mois de plus, tous les dix ans. A l'horizon 2020, il faudra donc cotiser 41,5 ans pour profiter d'une retraite à taux plein , si le schéma de la loi Fillon reste en place.

Le niveau de pension a dès le départ été exclu des piste de réflexion, la préservation du pouvoir d'achat des ménages étant une ligne directrice de l'action du Gouvernement actuel.

Compte tenu de ces préalables et du fait que la crise de financement du système de retraite est avant tout d'origine démographique, le présent projet de loi de réforme des retraites repose sur une augmentation de la durée d'assurance via le recul de l'âge de départ à la retraite.

Ainsi, l'âge d'ouverture des droits serait fixé à 62 ans pour les assurés nés à compter du 1 er janvier 1956 . Cette augmentation devrait être progressive à raison de quatre mois par an entre le 1 er juillet 2011 et le 1 er janvier 2016.

Parallèlement, afin d'optimiser les effets du recul de l'âge légal de départ à la retraite, le présent projet de loi prévoit de reculer de deux ans l'âge d'annulation de la décote, c'est-à-dire l'âge qui permet d'obtenir une pension à taux plein . Aujourd'hui fixé à 65 ans, l'âge d'annulation de la décote serait relevé progressivement entre le 1 er juillet 2016 et le 1 er juillet 2023 pour atteindre à cette date 67 ans .

Le tableau ci-dessous présente la montée en charge des deux dispositifs.

Le relèvement de l'âge d'ouverture des droits à la retraite et de l'âge de l'annulation de la décote

Date de naissance

(né après)

Age de départ avant la réforme

Date de départ avant la réforme

Décalage

Age de départ après la réforme

Date de départ après la réforme

Annulation de la décôte

Date d'annulation de la décote

1 er juillet 1951

60 ans

1 er juillet 2011

4 mois

60 ans et 4 mois

1 er novembre 2011

65 ans et 4 mois

1 er novembre 2016

1 er janvier 1952

60 ans

1 er janvier 2012

8 mois

60 ans et 8 mois

1 er septembre 2012

65 ans et 8 mois

1 er septembre 2017

1 er janvier 1953

60 ans

1 er janvier 2013

1 an

61 ans

1 er janvier 2014

66 ans

1 er janvier 2019

1 er janvier 1954

60 ans

1 er janvier 2014

1 an et

4 mois

60 ans et 4 mois

1 er mai

2015

66 ans et 4 mois

1 er mai

2020

1 er janvier 1955

60 ans

1 er janvier 2015

1 an et

8 mois

60 ans et 8 mois

1 er septembre 2016

66 ans et 8 mois

1 er septembre 2021

1 er janvier 1956

60 ans

1 er janvier 2016

2 ans

62 ans

1 er janvier 2018

67 ans

1 er janvier 2023

Générations suivantes

60 ans

2 ans

62 ans

67 ans

Source : dossier de presse précité.

(2) L'impact sur les comptes du système de retraite
(a) Le rendement brut

Selon les chiffrages disponibles, les mesures d'âge permettraient de financer 24 % du besoin annuel de financement du système de retraite en 2015 et 44 % de celui-ci en 2018 . En conséquence, les « bornes d'âge » constituent le point nodal du schéma financier présenté par le Gouvernement.

Dans un contexte marqué par un débat sur le recul de l'âge d'annulation de la décote à 67 ans, votre rapporteur pour avis souligne l'impact de cette mesure sur l'équilibre financier de la réforme.

L'impact financier annuel des mesures d'âge serait le suivant :

Impact financier « tous régimes » des mesures d'âge

(en milliards d'euros 2008)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde avant réforme

-32,8

-35,0

-36,5

-38

-38,6

-39,2

-40,2

-41,0

-42,2

-43,4

-44,8

Impact des mesures d'âge

0,0

1,7

5,0

6,7

7,4

9,5

14,0

17,1

18,6

19,1

20,2

Impact Mesure « 62 ans »

0,0

1,7

5,0

6,7

7,4

9,5

12,8

15,6

16,1

15,8

16,7

Impact Mesure « 67 ans »

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

1,2

1,5

2,5

3,3

3,5

Part des mesures d'âge (%)

0

4,9

13,7

17,6

19,2

24,2

34,8

41,7

44,1

44,0

45,1

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

Il convient de noter que, compte tenu de la montée en charge entre 2016 et 2023 du relèvement de l'âge d'annulation de la décote, les effets financiers de cette mesure sont sensiblement plus élevés après 2020 : ainsi en 2025, sur un impact global de 24 milliards d'euros, 7,5 milliards d'euros sont dus à la « borne » des 67 ans.

Votre rapporteur pour avis souligne la difficulté d'apprécier l'impact financier des mesures d'âge par régime. En effet, les projections par régime reposent sur des méthodes distinctes, ce qui aboutit à des différences qui ne sont pas négligeables à court terme .

En effet, en 2012 par exemple, la méthode projection du COR « tous régimes » indique que les mesures d'âge permettraient d'augmenter les ressources du système de retraite de 5 milliards d'euros, alors que les projections par régime laissent apparaître un surcroît de recettes de l'ordre de 2,8 milliards d'euros, soit un différentiel de plus de deux milliards d'euros. En 2017, soit un an avant le retour à l'équilibre du régime, cet écart serait de 3,5 milliards d'euros. Si votre rapporteur pour avis comprend qu'il puisse exister des différences de méthodologie et de périmètre, l'ampleur des écarts ne lui apparait pas justifiée. En effet, il note que :

- les régimes spéciaux ne sont pas concernés par les mesures d'âge dans un premier temps ;

- et que la CNAV, la fonction publique d'Etat (FPE), la CNRACL, les régimes complémentaires et les régimes agricoles, c'est-à-dire les régimes présentés dans le tableau, représentent plus de 90 % de la population active.

Impact financier des mesures d'âge par régime

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

CNAV

252

1 113

2 104

3 620

4 519

5 457

6 630

8 379

8 691

9 078

Coût chômage FSV

-4

-38

-71

-152

-181

-204

-239

-317

-304

-306

Fonction Publique d'Etat

71

322

514

705

977

1 370

1 621

1 934

2 417

2 568

CNRACL

40

201

332

453

624

866

1027

1228

1540

1631

AGIRC / ARRCO

270

1 128

2 035

2 360

2 632

3 309

3 985

4 662

5 338

6 015

Salariés agricoles

15

50

83

130

153

183

222

289

317

348

Exploitants agricoles

14

62

104

165

196

224

257

318

321

324

Total

658

2 838

5 101

7 281

8 920

11 205

13 503

16 493

18 320

19 658

Rappel impact « tous régimes »

1 700

5 000

6 700

7 400

9 500

14 000

17 100

18 600

19 100

20 200

Ecart

1 042

2 162

1 599

119

580

2 795

3 597

2 107

780

542

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

(b) Le rendement net

Il convient de noter que certains dispositifs adoptés au titre de la solidarité intra-générationnelle viennent diminuer le rendement brut des deux mesures d'âge proposées. Il s'agit  de :

- l'élargissement du dispositif de départ anticipé pour carrières longues aux personnes ayant commencé à travailler entre 17 et 18 ans . Cette mesure constitue, en termes financiers, la mesure de solidarité la plus importante présentée par cette réforme ;

Coût de l'élargissement du dispositif pour carrières longues *

(en milliards d'euros 2008)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Carrières longues

-0,1

-0,3

-0,5

-0,7

-0,9

-1,1

-1,1

-1,3

-1,4

-1,6

* Le coût présenté intègre l'impact de la mesure de lissage adoptée par l'Assemblée nationale.

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

- l'extension de la période transitoire permettant, pour les agents qui au 1 er janvier 2011 sont à moins de cinq ans de l'âge d'ouverture des droits, de continuer à bénéficier du dispositif de départ anticipé des parents de trois enfants . Selon les informations communiquées, la modification adoptée par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, représenterait un coût cumulé de l'ordre de 4,3 milliards d'euros à l'horizon 2020, et 3,9 milliards d'euros d'ici 2018.

Impact financier annuel de la fermeture du dispositif de départ
anticipé pour les parents de trois enfants ayant quinze années de service

(en milliards d'euros 2008)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Économie liée à la fermeture du dispositif *

0,1

0,2

0,4

0,6

0,6

0,9

0,9

0,9

0,9

0,9

Coût de l'extension de la période transitoire **

-0,2

-0,5

-0,5

-0,6

-0,6

-0,5

-0,3

- 0,3

-0,3

-0,1

Impact financier

-0,1

-0,3

-0,1

0,0

0,0

0,4

0,6

0,6

0,6

0,8

* Mesure proposée dans le projet de loi initial

** Mesure adoptée à l'Assemblée nationale

Source : commission des finances

Les autres mesures, actuellement inscrites dans le texte au titre de la solidarité, susceptibles de remettre en cause l'impact des mesures d'âge n'ont pas d'influence a-priori sur l'équilibre financier de la réforme.

En effet, le coût du nouveau dispositif de départ anticipé au titre de la pénibilité serait financé par les entreprises via une cotisation spécifique des entreprises au titre de la branche AT-MP, y compris la mesure concernant les agriculteurs, dont le coût devrait être de 40 millions d'euros.

Notons enfin que le dispositif concernant les titulaires sans droit n'a pas d'impact financier sur le système de retraite car il s'agit d'un transfert financier entre régimes.

b) L'augmentation de l'effort contributif des fonctionnaires (titre III projet de loi)

L'article 21 du présent projet de loi propose d'aligner le taux de cotisation des fonctionnaires sur celui des salariés. La convergence de l'effort contributif des salariés du secteur privé et de celui des fonctionnaires devrait se traduire par une augmentation progressive du taux de cotisation de ces derniers de 2,7 points, à raison de 0,27 point par an entre 2011 et 2020 .

Une fois la montée en charge de la mesure opérée, soit en 2020, les recettes supplémentaires seraient de l'ordre de trois milliards d'euros par an. Au-delà de cette date, l'évolution de ce montant serait fonction de la masse salariale et des taux de cotisation en vigueur dans le secteur privé . En effet, il convient de souligner que le présent projet de loi ne fixe pas nominalement le taux de cotisation des fonctionnaires mais précise que celui-ci « tient compte » des taux de cotisations des salariés relevant de la CNAV et des régimes complémentaires obligatoires, pour la partie de leur rémunération inférieure au plafond.

Aux termes de l'étude d'impact qui accompagne le présent projet de loi, l'alignement proposé représentera en moyenne, pour une rémunération mensuelle de 2.000 euros, un surcroît de cotisation de six euros par mois et par agent pendant dix ans

A cette mesure symbolique, s'ajoutent notamment la révision des modalités d'attribution du minimum garanti et la suppression du dispositif de départ anticipé des parents de trois enfants après quinze années de service. Ces mesures seront décrites ultérieurement.

Impact financier annuel des mesures de convergence

(en milliards d'euros 2008)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Taux de cotisation

0,3

0,6

0,9

1,1

1,4

1,8

2,1

2,4

2,7

3,0

Départ anticipé *

-0,1

-0,3

-0,1

0,0

0,0

0,4

0,6

0,6

0,6

0,8

Minimum garanti

0,0

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,8

0,9

TOTAL

-0,2

0,5

1,2

1,5

1,9

2,8

3,4

3,8

4,1

4,7

* L'impact présenté intègre l'impact de la mesure adoptée par l'Assemblée nationale.

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

Au total, les mesures de convergence public-privé devraient couvrir 4,8 % des besoins de financement en 2015 et 8,7 % en 2018.

c) Le basculement des cotisations chômage
(1) Un dispositif déjà envisagé en 2003

Le Gouvernement a réaffirmé l'objectif fixé en 2003 d'un basculement dès que possible de cotisations entre la branche vieillesse et le régime d'assurance chômage. Lors de la réforme des retraites adoptée en 2003, la hausse des cotisations vieillesse devrait être compensée à due concurrence par une baisse des cotisations chômage, rendue possible par la diminution du taux de chômage. Le COR avait en effet retenu, dans son scénario de référence, un taux de chômage de 4,5 % à partir de 2010 qui n'était pas spontané, mais supposait que des actions structurelles ainsi qu'une politique de l'emploi volontariste soient menées.

La survenance de la crise économique et financière fin 2008 a empêché la réalisation de ce scénario. En effet, le résultat financier de l'assurance chômage est par définition procyclique : une croissance économique élevée augmente les recettes de l'UNEDIC et diminue les dépenses d'allocation chômage. Inversement, en période de crise, les recettes de l'UNEDIC sont réduites alors que les dépenses de prestation augmentent.

(2) Un pari raisonnable ?

Dans le cadre du scenario retenu par le Gouvernement, le chômage s'établirait à 7,7 % en 2015 et 5,7 % en 2020. Cette diminution du taux de chômage rendrait possible une mobilisation des excédents de l'Unedic. Le niveau de cette mobilisation a toutefois été modifié entre juillet et septembre.

Initialement, le basculement débutait progressivement à raison de 400 millions d'euros en 2015, puis un milliard en 2018 et 1,4 milliard d'euros en 2020. Le scenario actuellement retenu envisage un basculement nettement plus important, puisqu'à l'horizon 2018, serait 6 milliards d'euros qui seraient transférés, au lieu de 2,8 milliards d'euros initialement. Est-ce un pari raisonnable ?

Basculement envisagé des cotisations chômage

(en milliards d'euros)

Basculement Unedic

2011

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Prévisions Juin - Juillet

0,0

0,4

0,6

0,8

1,0

1,2

1,4

Prévisions Septembre

0,0

0,6

1,2

1,8

2,4

3,1

3,3

Source : d'après les données du ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

A la demande du secrétariat du Conseil d'Orientation des Retraites, la direction générale du Trésor a réalisé des projections de la situation financière de l'assurance-chômage à horizon 2050 sur la base des trois scénarios économiques retenus pour les projections financières des retraites. Selon les résultats de l'étude, quel que soit le scenario considéré, le solde de l'assurance-chômage deviendrait excédentaire au milieu des années 2010 et continuerait de s'accroître ensuite pour représenter de 0,2 à 0,7 point de PIB par an à l'horizon 2050.

Selon l'étude, « la situation financière (soldes cumulés) deviendrait créditrice à l'horizon 2020, une fois les déficits cumulés apurés . Cette situation conduirait, dans [la] maquette, à l'accumulation par l'UNEDIC d'un capital important, en l'absence (peu probable) de mesures de baisse de cotisations ou de hausse de dépenses, qui pourrait générer à terme des revenus financiers non négligeables. Le solde primaire (hors revenus financiers) resterait à moyen terme stable en part du PIB, de 0,1 à 0,4 point de PIB par an selon les scénarios. En revanche, le solde total et la situation financière suivent des trajectoires croissantes. Les perspectives financières de l'assurance-chômage d'ici à 2050 dans le cadre des scénarios choisis permettent ainsi, sous les hypothèses retenues, d'envisager un ajustement à la baisse du taux de cotisation chômage. »

Si nul ne souhaite que le taux de chômage actuel reste constant jusqu'en 2020, votre rapporteur pour avis, compte tenu de l'expérience de 2003, reste relativement dubitatif (cf. infra ). Il relève par ailleurs que l'UNEDIC est un organisme paritaire et que les partenaires sociaux jouissent d'une autonomie de gestion. La baisse des cotisations chômage envisagée par le gouvernement pour gager la hausse des cotisations vieillesse nécessitera donc leur accord.

2. L'augmentation des recettes fiscales

Afin de répondre aux besoins croissants de financement du système de retraite, le Gouvernement a choisi d'affecter à ce dernier une partie du produit de la révision des niches fiscales et sociales qui devrait être opérée par le projet de loi de finances pour 2011 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Le système de retraite devrait ainsi bénéficier de 3,7 milliards d'euros supplémentaire en 2011 et 4,2 milliards en 2020. Parmi les mesures proposées, toutes ne constituent pas des niches : l'augmentation du taux marginal du barème de l'impôt sur le revenu et la modification des prélèvements proportionnels sur les revenus du capital constituent des augmentations directes d'impôt.

Le tableau ci-dessous présente les différentes mesures annoncées ainsi que leur rendement prévisionnel.

Synthèse des mesures de recettes

(en millions d'euros)

MESURE

Rendement 2011

Rendement 2020

Contributions des hauts revenus

410

630

Augmentation de 40 % à 41 % du taux marginal du barème de l'impôt sur le revenu

230

290

Retraites-chapeaux : suppression de l'abattement de 1.000 euros pour l'imposition des rentes et instauration d'une contribution salariale spécifique de 14 %

110

140

Stock-options : augmentation de la contribution patronale spécifique sur la valeur des options (14 %) et de la contribution salariale sur le gain de levée d'option (8 %)

70

200

Contribution des revenus du capital

1 090

1 340

Hausse des prélèvements proportionnels

- PV de cessions mobilières

90

110

- PV de cessions immobilières

45

50

- PFL sur les dividendes et les intérêts

130

160

Suppression du crédit d'impôt sur les dividendes

645

800

Imposition des PV de cessions mobilières au premier euro

180

220

Total taxe sur les ménages

1 500

1 970

Annualisation des allègements généraux de charges sociales

2 000

2400

Suppression du plafonnement de la quote part pour frais et charges sur les dividendes reçus par une société mère de ses filiales

200

250

Total taxe sur les entreprises

2 200

2 650

TOTAL

3 700

4 600

Source : dossier de presse - présentation de la réforme des retraites - juin 2010.

a) Des nouvelles recettes à hauteur de 3,7 milliards d'euros en 2011

Quatre mesures représentent 81,7 % du montant des nouvelles recettes allouées au système de retraite en 2011. Il s'agit de l'annualisation du calcul des allègements généraux (2 milliards d'euros en 2011), la suppression du crédit d'impôt sur les dividendes (645 millions d'euros), la remise en cause du régime fiscal dit « mère fille » (200 millions d'euros) et l'imposition au premier euro des plus-values de cession mobilière (180 millions d'euros).

(1) La contribution des hauts revenus

La contribution des hauts revenus comprend, outre l'augmentation du taux marginal du barème de l'impôt sur le revenu, qui n'appelle pas de remarques particulières de votre rapporteur pour avis, un alourdissement de la taxation sur des stock-options ainsi qu'une taxation supplémentaire des retraites chapeaux. Ces deux dernières mesures correspondent à des niches sociales particulièrement mal perçues par nos concitoyens du fait du profil de leurs bénéficiaires.

Dans la continuité de son avis sur la loi de financement pour 2010, votre rapporteur tient à souligner deux points :

- d'une part, sur le plan des principes , il est primordial de mettre en oeuvre toutes les mesures qui peuvent garantir une meilleure équité du prélèvement social entre groupes de cotisants : de cette équité découle l'acceptation et la légitimité de notre système de prélèvement et de financement de la protection sociale ;

- d'autre part, au regard de la situation des comptes sociaux, il convient d'exploiter toutes les capacités contributives qui ne sont pas aujourd'hui pleinement sollicitées, compte tenu d'un nombre important d'exemptions d'assiette.

(a) Les retraites chapeaux

Le régime de retraite supplémentaire dit « chapeau » défini à l'article L. 137-11 de la sécurité sociale revêt, les caractéristiques suivantes. Il s'agit :

- d'un régime de retraite supplémentaire ;

- à prestations définies : l'employeur, seul contributeur, au régime s'engage sur un montant donné de prestation ;

- conditionnant le droit à prestations à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise : il existe donc un aléa quant au versement des rentes. Si le salarié n'achève pas sa carrière dans l'entreprise, il ne perçoit pas cette retraite supplémentaire ;

- dont le financement par l'employeur n'est pas individualisable par salarié : l'employeur peut soit constituer des provisions si le régime est géré en interne, ou verser des primes à un organisme tiers qui gère le régime pour son compte, en fonction du montant des primes versées et des primes à verser dans le future si toutes les personnes achevaient leur carrière dans l'entreprise.

En raison de cet aléa sur le versement des primes et de la non individualisation du financement de l'employeur, les contributions de ces derniers sont exonérées, sans limite, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS . Il convient de noter que les autres régimes supplémentaires de retraite, qui relèvent notamment de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ne bénéficient pas d'un tel traitement de faveur : si les contributions des employeurs sont exonérées de cotisations dans le respect d'un certain plafond, elles sont en revanche soumises au forfait social et aux contributions sociales.

Toutefois, la loi du 21 août 2003 sur les retraites a mis en place une contribution spécifique que l'employeur peut acquitter au choix selon plusieurs modalités. La contribution, dont le niveau a été relevé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, peut être assise soit :

- sur les rentes versées aux bénéficiaires pour la partie excédent un tiers du plafond de la sécurité sociale, au taux de 16 % depuis la loi de financement pour 2010 ;

- soit sur les primes versées à un organisme assureur, une institution de prévoyance ou une mutuelle, au taux de 12 % depuis cette année;

- soit sur la partie de la dotation aux provisions gérées en interne à l'entreprise, au taux de 24 % à compter du 1 er janvier 2010 .

A l'initiative de votre rapporteur pour avis, une taxe patronale supplémentaire de 30 % a également été instaurée sur les rentes dont le montant est supérieur à huit plafonds annuels de la sécurité sociale , soit 276 960 euros en 2010. Cette mesure s'applique aux retraites liquidées à compter du 1 er janvier 2010.

Dans le cadre du prochain PLFSS, le Gouvernement devrait proposer d'une part la suppression de l'abattement de 1 000 euros pour le calcul de la contribution spécifique , d'autre part, la création d'une nouvelle contribution salariale de 14 % sur l'ensemble des rentes. Le rendement escompté de cette mesure serait de 110 millions d'euros en 2011.

(b) La modification du régime des stocks options

A l'instar des « retraites chapeaux », l'imposition des stock-options constitue une niche sociale emblématique. Si la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 relative aux revenus du travail a subordonné l'attribution de stock-options aux mandataires sociaux à la distribution de stock-options ou d'actions gratuites à l'ensemble des salariés de l'entreprise ou à la mise en oeuvre d'un dispositif d'intéressement ou de participation volontaire ou dérogatoire, le dispositif reste selon votre rapporteur pour avis encore sujet à de nombreuses critiques, du fait notamment de l'absence de lien contraignant entre l'attribution de ces options et la performance des gestionnaires qui en bénéficient.

S'il reconnaît que le régime social des stocks options est actuellement particulièrement avantageux en ce que ces attributions d'options ou d'actions sont exclues de l'assiette des cotisations sociales, il souhaite souligner que la pression fiscale globale sur ces produits est loin d'être nulle .

En effet, en ce qui concerne les plus-values d'acquisition réalisées au terme du délai d'indisponibilité (quatre ans), le taux de prélèvement fiscal et social est compris entre 44,6 % et 54,6 % ce qui est loin d'être négligeable. Le dispositif proposé conduirait à un taux de prélèvement compris entre 50,1 % et 60,1 %. Le tableau ci-dessous résume le régime fiscal et social actuel des stocks options et les propositions de modification.

Il convient de rappeler que l'imposition des stock-options se déroule en trois temps :

- l'année de l'attribution , l'employeur est tenu, depuis le 1 er octobre 2007, de verser une contribution sociale spécifique ;

- l'année de la levée de l'option , il peut y avoir une imposition au titre du rabais excédentaire (différence entre la valeur de l'option consentie et la valeur réelle de l'action) ;

- l'année de la cession , il existe une imposition sur les gains réalisés au titre de l'avantage tiré de la levée de l'option (plus-value d'acquisition) ainsi qu'au titre de la plus-value dégagée lors de la cession des titres.

Les avantages fiscaux sont par ailleurs étroitement liés à la durée de conservation des options, ou des titres une fois l'option levée. Le régime le plus avantageux s'applique lorsque le bénéficiaire de l'option respecte un délai de quatre années avant de procéder à la levée de son option (délai d'indisponibilité) et conserve ses titres ensuite pendant au moins deux ans avant de les céder (délai de portage).

Le Gouvernement devrait proposer, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, un renforcement de la taxation de stocks options en augmentant :

- de 5,5 points la contribution salariale acquittée par le bénéficiaire lorsque celui-ci réalise une plus-value d'acquisition ;

- de 4 points la contribution patronale due, depuis le 1 er octobre 2007, lors de l'attribution des options ou des actions gratuites.

La distribution de stock-options entraîne des pertes de recettes pour la sécurité sociale. Selon la Cour des comptes , les pertes de recettes associées aux exemptions d'assiette dont bénéficient les stock-options seraient de trois milliards d'euros . Cette estimation faite par la Cour lors de son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de 2007 vient d'être confirmée dans son rapport de 2010.

Votre rapporteur pour avis remarque néanmoins que le chiffrage reste particulièrement éloigné de celui de l'annexe 5 du projet de loi de financement pour la sécurité sociale pour 2010, qui estimait la perte d'assiette , et non la perte de recettes, à 2,1 milliards d'euros .

Le rendement annoncé des mesures a priori présentées par le Gouvernement serait de 70 millions d'euros en 2011 et 200 millions d'euros en 2020. En l'absence de certitude sur la perte de réelle de recette de la sécurité sociale, votre rapporteur pour avis ne peut à ce stade apprécier l'ampleur de la réduction de la niche proposée.

Régime fiscal et social des stock-options

Dispositif actuel

Modification proposée

Régime fiscal

Régime social

Régime fiscal

Régime social

Attribution des options

1° Employeur

Contribution sociale patronale spécifique de 10 % depuis octobre 2007

Contribution sociale patronale spécifique de 14 %

2° Bénéficiaire

Rabais = 5 % : zéro imposition

-

-

Rabais excédentaire : régime fiscal des traitements et salaires

charges sociales + contributions sociales

-

-

Plus-value d'acquisition

Cession ou conversion au porteur avant l'expiration de la période d'indisponibilité fiscale de 4 ans

Imposition à l'IR, catégorie traitements et salaires

Charges sociales

+ contributions sociales

-

-

Cession après l'expiration de la période d'indisponibilité fiscale et avant l'expiration du délai de portage de 2 ans

• Si PVA < 152.500 euros, imposition sur PV mobilières au taux de 30 %

• Si PVA >

taux = 40 %

Prélèvements sociaux (12,1 %)

Contribution salariale (2,5 %)

Total : 14,6 %

Imposition au premier euro des plus-values mobilières

Contribution salariale : 8 %

Total : 20,1 %

44,6 % < taxation < 54,6 %

50,1 % < taxation < 60,1 %

Cession après l'expiration de la période d'indisponibilité fiscale et après l'expiration du délai de portage de 2 ans

• Si PVA < 152.500 euros, imposition sur PV mobilières au taux de 18 %

• Si PVA >

taux = 30 %

Prélèvements sociaux (12,1 %)

Contribution salariale (2,5 %)

Total : 14,6 %

Imposition au premier euro des plus-values mobilières

Contribution salariale : 8 %

Total : 20,1 %

32,6 % < taxation < 44,6 %

38,1 % < taxation < 50,1 %

Plus-value de cession

Prélèvement forfaitaire libératoire :

18 %

Prélèvements sociaux  (12,1 %)

• Imposition au 1er euro

• Augmentation du PFL d'un point

-

Taxation = 30,1 %

Taxation = 31,1 %

Source : commission des finances

(2) La mise à contribution des revenus du capital

S'agissant de la contribution des revenus du capital au financement du système de retraites, votre rapporteur souhaite souligner deux éléments.

En premier lieu, la suppression du crédit d'impôt sur les dividendes est particulièrement justifiée puisque ce dispositif n'a pas atteint ses objectifs , à savoir une certaine démocratisation de l'actionnariat individuel.

Actuellement, les dividendes perçues par les actionnaires, ou les sociétaires, bénéficient non seulement de deux abattements, l'un proportionnel (40 %), l'autre forfaitaire (1 525 euros pour une personne seule, le double pour un couple), mais également d'un crédit d'impôts égal à 50 % des dividendes perçus, dans la limite de 115 euros pour une personne seule et de 230 euros pour un couple. Au terme de l'évaluation de ce dispositif, il apparaît que  ce crédit d'impôt se caractérise par un effet de saupoudrage, tout en étant concentré sur les ménages relativement aisés : les 20 % des contribuables les plus aisés concentrent près du tiers du crédit d'impôt, contre 10 % pour les 20 % de contribuables les moins riches.

En second lieu, la mesure consistant à imposer dès le premier euro les plus-values de cession mobilière s'inscrit dans la continuité de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 . aujourd'hui, les plus-values réalisées par un contribuable lors de la vente d'actions ou d'obligations sont exonérées d'impôt sur le revenu, dès lors que leur valeur annuelle ne dépasse pas un seuil fixé en 2010 à 25 830 euros . Cette franchise était également valable avant 2010 pour les prélèvements sociaux.

La mesure fiscale proposée satisfait votre rapporteur puisque qu'elle met fin, pour ce dispositif, à la déconnexion des assiettes fiscale et sociale qui nuit à la lisibilité des prélèvements sociaux. Il convient toutefois d'observer que le régime fiscal pourra rester plus avantageux puisque à partir de 2014, les détenteurs de titres pourront bénéficier, lors de la cession de ces derniers, d'une exonération totale en matière fiscale, compte tenu des premiers effets des dispositions relative aux abattements en fonction de la durée de détention.

(3) Les prélèvements sur les entreprises

Les prélèvements supplémentaires sur les entreprises correspondent à deux mesures très différentes : d'une part, l'annualisation du calcul des allègements généraux, d'autre part, la remise en cause du régime fiscal dit « mère-fille » avec la suppression du plafonnement de la quote-part pour frais et charges sur les dividendes reçus par une société mère de ses filiales

S'agissant des allègements généraux, votre rapporteur pour avis souligne les difficultés de soutenabilité financière posées par ce dispositif. Avons-nous encore les moyens de cette politique ?

En 2011 , les coûts associés aux dispositifs d'exonération à vocation générale devraient atteindre 24,4 milliards d'euros dont 21,4 milliards d'euros pour le seul dispositif d'allègement unique sur les bas salaires mis en place par la loi n°2003-47 du 17 janvier 2003. Cette somme serait en augmentation de plus de 10,3 % par rapport à 2007 représentant ainsi une charge croissante pour le budget de l'Etat, qui compense à la sécurité sociale les pertes de cotisations par l'affectation de plusieurs recettes fiscales. Par ailleurs, il convient de noter que l'Etat compense également une partie des mesures d'exonération dites ciblées, à hauteur de 4,2 milliards d'euros en 2011.

L'ampleur des déficits budgétaires pose la question de l'opportunité de cette « subvention généralisée à l'économie française 8 ( * ) ». La remise en cause du dispositif, que ce soit par une redéfinition des seuils ou par l'annualisation du calcul des allègements, apparaît délicate.

La fonction des exonérations de charges sur les bas salaires est de créer des emplois, en réduisant le coût du travail peu qualifié. Dès lors toute révision du dispositif fait peser un risque sur l'emploi qu'il est toutefois difficile d'évaluer.

Lors de sa conférence de presse mensuelle du 14 septembre 2010, Laurence Parisot a estimé que le Gouvernement prenait un risque en proposant d'annualiser le calcul des allègements généraux : « S'il se confirmait également que, à l'occasion du projet de loi retraites, on adoptait un mécanisme d'annualisation du calcul des allègements de charges, là aussi, on ne peut que regretter la remise en cause d'un mécanisme de simple compensation d'un préjudice que nous avons subit . Et cette remise en cause affecterait des entreprises principalement de main d'oeuvre. Donc, c'est un risque qui serait pris sur l'emploi . »

Ce risque avait également été mentionné par Eric Woerth alors ministre du budget, lors de la discussion des amendements parlementaires portant sur l'annualisation en question : « Il est vrai que, si le chiffrage qui a été réalisé est exact, une telle mesure représenterait une économie de 2 à 3 milliards d'euros pour les finances de l'État , et ce n'est pas le ministre des comptes publics qui s'en plaindrait. Il n'en demeure pas moins qu'une charge équivalente serait facturée aux entreprises, au risque de susciter des licenciements qui, eux, coûteront cher.

« Le ministère de l'économie estime à 85 000 le nombre des emplois qui seraient mis en cause par une telle réforme du dispositif . (...) ».

Votre rapporteur pour avis, auteur d'un des trois amendements discutés au Sénat sur l'annualisation lors du PLFSS pour 2010, avait été particulièrement sensible à la réponse du ministre. Il souhaiterait donc savoir si les études conduites cette année par les services compétents permettent de mieux évaluer l'impact de la mesure proposée.

Rappelons que le montant des exonérations auxquelles ont droit les entreprises est actuellement calculé sur une base mensuelle, ce qui est facteur de distorsion. Deux salariés bénéficiant de la même rémunération annuelle peuvent, suivant la chronique des versements de ces rémunérations, ne pas donner lieu au même montant d'allégements. Ceci peut conduire certaines entreprises à adopter des comportements d'optimisation.

Ainsi, une entreprise peut-elle rémunérer ses salariés au niveau du SMIC sur 11 mois, et bénéficier à plein de l'exonération de la totalité de ses cotisations sociales salariales obligatoires, puis verser, le douzième mois, une prime représentant un treizième, voire un quatorzième mois. La moindre exonération constatée le 12 ème mois est significativement inférieure à la perte qu'aurait connue l'entreprise si le calcul était fondé sur le salaire mensuel moyen sur l'année.

L'annualisation permettrait d'éviter certains comportements d'optimisation et de garantir une certaine équité entre entreprises.

b) Des mesures non « restreintes » par le bouclier fiscal

Aux termes des annonces du Gouvernement, quatre mesures ne devraient pas être prises en compte dans le calcul du droit à restitution au titre du « bouclier fiscal ». Il s'agit de :

- l'augmentation du prélèvement forfaitaire libératoire sur les plus-values de cession mobilières ;

- l'augmentation du taux d'imposition des plus-values mobilières et la disparition du seuil fiscal d'imposition ;

- la hausse du prélèvement forfaitaire sur les plus-values de cession immobilière ;

- le relèvement du taux marginal d'imposition du barème de l'impôt sur le revenu.

Votre rapporteur pour avis se félicite de la non-application du bouclier fiscal à des mesures qui s'inscrivent dans le cadre de l'intensification de l'effort contributif de chacun pour financer un volet primordial de notre système de protection sociale. Il serait paradoxal que les foyers les plus aisés bénéficient d'un traitement de faveur.

c) Quelles modalités d'affectation ?

Les mesures de recettes proposées permettront notamment d'accroître les moyens du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) afin de conforter le financement des éléments de solidarité du système d'assurance vieillesse. Toutefois, ces mesures ne seront pas toutes directement affectées à ce dernier.

Plusieurs cas de figure existent selon les recettes.

Certaines recettes concernent des « grands » impôts revenant traditionnellement à l'Etat , comme l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés.

Mesure

Impôt de référence

- Hausse du taux marginal de l'IR

Impôt sur le revenu

- Hausse des prélèvements forfaitaires libératoires

Impôt sur le revenu

- Imposition au 1 er euro des PV de cessions mobilières

Impôt sur le revenu

- Suppression du crédit d'impôt sur les dividendes

Impôt sur le revenu

- Suppression du plafonnement de la quote-part pour frais et charges sur les dividendes reçus par une société mère de ses filiales

Impôt sur les sociétés

Pour ces mesures, il ne s'agit pas d'affecter une fraction de l'IS ou l'IR à la sécurité sociale. Une autre recette d'un montant équivalent au rendement de ces différentes mesures devrait donc fléchée vers le financement des retraites. Selon les informations communiquées, le PLFSS pour 2011 proposerait d'affecter des segments de TVA , et notamment de la TVA sur certaines dépenses de maladie.

En ce qui concerne la hausse des contributions sur les retraites chapeau déjà affectées au FSV, il n'existe pas de difficulté car ce sont déjà des recettes qui sont placées dans la sphère de la sécurité sociale.

S'agissant de l'augmentation des contributions sur les stock options affectées à la CNAM, il conviendra de transférer une partie de recettes perçues par l'assurance maladie au FSV. Le PLFSS pourrait proposer la majoration de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et l''affectation d'une fraction du forfait social.

Enfin, la mesure d'annualisation des allègements généraux permettrait de réduire le montant des exonérations de charge financé par le panier de recettes fiscales créé à cet effet. Une recette en provenance de ce panier, a priori la taxe sur les salaires, serait donc transférée au FSV à hauteur de deux milliards d'euros.

3. L'importance de la participation de l'Etat

Dans le cadre du nouveau schéma financier retenu par le Gouvernement, la participation de l'Etat à la couverture des besoins de financement du système de retraite s'élèverait, en somme cumulée, à 125,5 milliards d'euros entre 2011 et 2018 . Dans le précédent scenario, présenté en juin, cet effort était légèrement inférieur (124,8 milliards d'euros).

Comment parvient-on à de tels montants ? L'importance de la participation de l'Etat résulte tout d'abord d'un retraitement des calculs du Conseil d'orientation des retraites. En effet, par convention , le COR utilise le taux de cotisation de l'Etat employeur figé à son niveau de 2000, soit 56,8 %.

Or, entre 2000 et 2010, le taux de cotisation de l'Etat au CAS « Pensions » a fortement évolué afin de garantir l'équilibre actuariel de ce dernier. Ainsi, pour 2010, le taux de cotisation de l'Etat est de 62,14 %, ce qui signifie que depuis dix ans l'Etat a réalisé un « effort » qui n'a pas été pris en compte par le COR dans le cadre de ses projections sur les besoins de financement.

La participation de l'Etat au CAS « Pensions » pesant directement sur le budget général, le Gouvernement a choisi pour les années à venir de « geler cet effort », d'abord au niveau de 2010 (soit 15,6 milliards d'euros par an) ; puis au niveau de 2013, soit 15,9 milliards d'euros par an. L'année 2013 correspond à un pic de charges.

En retenant dans son nouveau scenario le point haut de l'effort de l'Etat comme référence de la participation de celui-ci au financement du système de retraite entre 2013 et 2020, le Gouvernement s'offre des marges de manoeuvre . En effet, le solde du service de retraite de l'Etat, après réforme, devrait être inférieur au montant de l'effort de principe fixé à 15,9 milliards d'euros annuels à compter de 2013.

Pourquoi ? L'écart constaté résulterait de l'évolution des charges de compensation démographique qui pèsent sur le CAS « Pensions » au titre de la compensation généralisée vieillesse. Ces charges connaissent dans leur ensemble une décroissance depuis 2000, qui s'est accélérée avec le transfert de nombreux effectifs de la fonction publique d'Etat vers la fonction publique territoriale 9 ( * ) (décentralisation des agents techniques, ouvriers et de service) et le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Ainsi, le montant de la compensation généralisée vieillesse versée par les fonctionnaires civils devrait passer de 1 079 millions d'euros en 2008 à 847 millions d'euros en 2011, selon les derniers chiffres publié par la commission des comptes de la sécurité sociale. Cette baisse devrait continuer d'être observée jusqu'en 2020.

Ces deux effets (révision à la hausse de l'effort de l'Etat et prise en compte de l'évolution structurelle des charges démographiques) permettent de dégager « un excédent » qui pourrait alimenter le système de retraites . Compte tenu de l'origine de ce financement, il serait logique que celui-ci soutienne notamment des mesures non contributives qui restent aujourd'hui encore à la charge des différentes caisses de retraite (cf. infra ). Entre 2011 et 2018, cet excédent pourrait s'élever, en somme cumulée, à 5,9 milliards d'euros .

Participation de l'Etat

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde avant réforme

- 14,9

- 16,0

- 16,9

- 17,3

- 17,2

- 17,3

- 17,3

- 17,5

- 17,8

- 18,1

Solde après réforme

- 14,7

- 15,4

- 15,9

- 15,8

- 15,2

- 14,6

- 14,2

- 13,8

- 13,4

- 13,3

« Effort » Etat fixé

- 14,7

- 15,4

- 15,9

- 15,9

- 15,9

- 15,9

- 15,9

- 15,9

- 15,9

- 15,9

Ecart

0,0

0,0

0,0

0,1

0,7

1,3

1,7

2,1

2,5

2,6

Source : Ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

II. QUEL RETOUR À L'ÉQUILIBRE ?

A. UN ÉQUILIBRE GLOBAL, ATTEINT AU PLUS TÔT EN 2018 ET MAINTENU AU PLUS TARD JUSQU'EN 2020 ?

1. Un équilibre au mieux global et ponctuel

L'équilibre financier ne pourra être au mieux que ponctuel . A partir de 2020, la question du financement de notre système de retraite par répartition devrait à nouveau se poser car les besoins de financement devraient sensiblement augmenter. Si l'on reprend les hypothèses du COR, les besoins de financement annuels s'élèveraient en 2030 à 70,3 milliards d'euros, soit une progression de 56,2 % par rapport à 2020, contre 39,3 % entre 2010 et 2020.

Compte tenu de ces prévisions, votre rapporteur pour avis estime qu'il serait opportun de réfléchir à une évolution systémique de notre régime par répartition. Ce dernier aura, en effet, des difficultés à faire face aux futurs besoins de financement dans sa configuration actuelle . Ceci semble d'autant plus vraisemblable que certaines marges de manoeuvre ont d'ores et déjà été préemptées :

- afin de refinancer les déficits cumulés de la branche vieillesse durant la prochaine décennie, il est prévu de liquider progressivement les actifs du Fonds de réserve des retraites à compter de 2012. Or ce fonds devait permettre initialement de lisser les déficits du système de retraite à partir de 2020 ;

- l'augmentation de la durée de cotisation semble également limitée compte tenu de l'entrée de plus en plus tardive des jeunes sur le marché du travail.

Le retour à l'équilibre ne signifie pas par ailleurs que tous les régimes de retraite seront excédentaires.

Ainsi, il convient de souligner que le principal régime de base, le régime général, devrait encore enregistrer, hors transferts, un déficit de près de 4,4 milliards d'euros en 2018 et de 5 milliards d'euros en 2020.

Solde de la CNAV après réforme

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde CNAV avant réforme

-9,7

-11,2

-12,4

-13,7

-14,9

-16,2

-17,4

-18,6

-19,7

-21,0

Impact âge

0,2

1,1

1,9

3,5

4,3

5,1

6,1

7,8

8,2

8,6

Impact autres mesures

3,1

3,1

3,2

3,3

3,5

3,7

3,9

4,0

4,1

4,2

Vote AN

0,0

0,0

0,0

-0,1

-0,1

-0,1

0,0

0,0

0,0

0,0

Basculement UNEDIC

0,0

0,0

0,0

0,0

0,6

1,2

1,8

2,4

3,1

3,3

Solde après réforme

-6,5

-6,9

-7,3

-6,9

-6,6

-6,2

-5,5

-4,4

-4,2

-5,0

Source : d'après le ministère du travail, de l'emploi et de la solidarité

Les excédents des uns devraient-ils alors compenser les déficits des autres ? Quels transferts peuvent-ils être envisagés ?

Le nouveau « bouclage financier » fait apparaître la possibilité d'un « transfert » de l'Etat au profit de la CNAV, via le FSV qui se verrait confier la charge de certaines prestations non contributives, aujourd'hui assurées par le régime général. Ce transfert serait financé par le budget de l'Etat grâce à la révision à la hausse de l'effort de l'Etat au financement du système de retraite (cf. supra ). Il permettrait par exemple de ramener le solde du régime général à - 2,3 milliards d'euros en 2018, au lieu de - 4,4 milliards d'euros en l'absence de révision du financement des prestations non contributives.

D'autres transferts inter-régimes pourraient être décidés. Lors de son audition devant la commission des affaires sociales le 16 septembre 10 ( * ) , Eric Woerth, ministre du travail, de l'emploi de la solidarité a expliqué qu' : « il n'est pas choquant de constater que l'AGIRC et l'ARRCO ont d'importantes réserves. Mettons les choses sur la table : les mesures d'âge profitent bien à l'AGIRC et à l'ARRCO, même si c'est le Gouvernement qui assume la responsabilité politique de la réforme. Un dialogue doit avoir lieu. »

Votre rapporteur pour avis estime en effet que l'ensemble des transferts existants, ou potentiels, doit faire l'objet d'un réexamen à moyen terme afin d'équilibrer autant que possible les comptes de chaque régime. Toutefois, les différences de gouvernance doivent être prises en compte. Si l'Etat peut aisément décider de l'emploi de ses propres « excédents », il est contraint de respecter les choix des partenaires sociaux pour ce qui est des excédents des autres régimes.

2. Un retour à l'équilibre hypothétique

Le Gouvernement, dans le cadre de la réforme des retraites, prévoit un taux de chômage de 7,7 % en 2015, 5,7 % en 2020, puis 4,25 % à partir de 2024. Cette diminution « spectaculaire » conditionne en partie l'équilibre financier de la réforme car elle augmente le niveau des cotisations, diminue les charges du FSV et de l'UNEDIC, ce qui permettrait en retour une augmentation des cotisations vieillesse grâce à la diminution des cotisations chômage.

Les hypothèses relatives à l'évolution du taux de chômage appellent plusieurs remarques de la part de votre rapporteur pour avis.

Les trois scénarios du COR correspondent à un taux de chômage de 4,5 % (scénarios A et B) ou 7 % (scénario C) à partir de 2020-2025, comme le montre le graphique ci-après.

Les hypothèses de taux de chômage retenues par le COR

(en % de la population active)

Source : DG Trésor, « Projections de la situation financière de l'UNEDIC à long terme », document de travail n°5, 11 mai 2010

On rappelle que le scénario de base du COR en 2007 supposait un retour au plein emploi en 2015, avec un taux de chômage de 4,5 %.

Le taux de chômage fluctue depuis 1985 autour de 9 %, comme l'indique le graphique ci-après. Le maximum et le minimum ont été atteints en 1997 et en 2008, avec respectivement 10,8 % et 7,4 %, mais du fait de la crise Ce taux est remonté à 9,1 % en 2009.

Le taux de chômage de 1975 à 2009

(en % de la population active)

Source : Insee

Les scénarios du Gouvernement peuvent être critiqués pour plusieurs raisons.

a) Un taux ce chômage de 4,25 % impliquerait une forte diminution du taux de chômage structurel

Tout d'abord, on rappelle qu'il existe, dans toute économie, un taux de chômage dit « structurel », généralement évalué dans le cas de la France à environ 8 %.

Ce taux de chômage correspond aux personnes dont la recherche d'emploi aboutit rapidement (chômage frictionnel), qui ne trouvent pas d'emploi à cause d'une employabilité trop faible aux salaires en vigueur (chômage classique) ou qui refusent les emplois proposés (chômage volontaire). Il est souvent mesuré par le taux de chômage non inflationniste, désigné par le sigle anglo-saxon NAIRU ( non-accelerating inflation rate of unemployment ).

Certes, ce taux de chômage structurel ne peut être évalué avec précision, mais le taux de 4,5 % est clairement en dessous des estimations couramment admises. Cela conduit à un certain scepticisme sur le réalisme des scénarios A et B, dans la mesure où l'on voit mal ce qui pourrait susciter une telle diminution du taux de chômage structurel.

En tout état de cause, si le Gouvernement considère que des politiques économiques tendant à réduire le taux de chômage structurel seront menées d'ici 2020 (réduction du coût du travail peu qualifié...), il conviendrait de le préciser.

L'évolution du taux de chômage structurel selon le Gouvernement

(croissance en %)

Scenario

A

B

C

2014-2020

2021-2050

2014-2020

2021-2050

2014-2020

2021-2050

Taux de chômage structurel (en %)

6,7

4,5

6,7

4,5

7,7

7

Source : d'après le huitième rapport du COR, 14 avril 2010

b) Un taux de chômage de 7 % paraît réaliste mais probablement pas d'ici 2022

Le scénario C, qui suppose un taux de chômage de 7 %, paraît donc le seul à pouvoir servir de base à une projection réaliste. La question est cependant de savoir si ce taux de chômage peut bien être attendu dès 2022.

Il est possible d'apporter des éléments de réponse grâce à quelques calculs économétriques simples. En effet, il existe un lien fort entre croissance du PIB et évolution du taux de chômage, comme le montre le graphique ci-après.

Croissance du PIB et évolution du taux de chômage (1990-2009)

(en % et en points)

Source : d'après les données de l'Insee

Ce graphique permet de constater qu'en règle générale, le taux de chômage ne diminue que si la croissance du PIB est supérieure à 2 %. Au-dessus il diminue, en dessous il augmente.

Ce résultat résulte de ce que les économistes appellent la « loi d'Okun », fréquemment utilisée pour modéliser, de manière simple et robuste, le lien entre croissance du PIB et évolution du taux de chômage. Selon cette loi, la variation du taux de chômage est égale à l'écart entre la croissance structurelle de l'économie (de l'ordre de 2 % en France) et la croissance observée, multipliée par un certain coefficient, variable selon les pays.

Il résulte des données du graphique ci-avant que, dans le cas de la France, le coefficient d'Okun est habituellement de l'ordre de 0,35. Ainsi, quand la croissance du PIB est de - 2 %, le taux de chômage augmente de 4 0,35=1,4 point. Inversement, quand elle est de 3 %, le taux de chômage diminue de 1 0,35 = 0,35 point.

Le Gouvernement prévoit que d'ici 2020 la croissance du PIB sera significativement supérieure à son potentiel. Dans le cas du scénario C, qui nous intéresse ici, l'écart serait de 0,4 point, comme le montre le tableau ci-après.

Les trois scénarios de croissance du Gouvernement

(croissance en %)

Scenario

A

B

C

2014-2020

2021-2050

2014-2020

2021-2050

2014-2020

2021-2050

Croissance potentielle

2,1

1,9

1,9

1,6

1,6

1,6

PIB volume

2,4

1,9

2,2

1,6

2

1,6

Source : d'après le huitième rapport du COR, 14 avril 2010

Avec un coefficient d'Okun de 0,35, une telle hypothèse de croissance implique une diminution du taux de chômage de 0,14 point par an, ce qui, en partant d'un taux de l'ordre de 9,3 % en 2010, correspond à un taux d'encore 8 % en 2020. Même si l'hypothèse de croissance du Gouvernement était vérifiée, il serait donc possible que le chômage diminue moins que prévu.

Il n'est même pas évident que le taux de chômage diminue significativement d'ici 2020. En effet, rien ne garantit que la croissance du PIB soit d'ici là supérieure à son niveau structurel. En particulier, la perte de PIB résultant de la récente récession pourrait ne jamais être rattrapée. En effet, comme cela a été maintes fois souligné par la commission des finances et par son rapporteur général, notre collègue Philippe Marini, les crises financières ne sont pas des crises « normales », après lesquelles le PIB rattrape son seuil potentiel de progression antérieur. Par ailleurs, si la croissance peut s'élever temporairement au-dessus de son niveau structurel pour d'autres raisons (politique budgétaire ou monétaire expansionniste, dépréciation de la monnaie, « bulle » de crédit, croissance mondiale supérieure à son niveau potentiel...), ces phénomènes ne sont par nature pas durables. Enfin, le désendettement des ménages et des entreprises et la réduction du déficit des Etats risquent de susciter à moyen terme une croissance inférieure à son potentiel.

B. LES QUESTIONS CONNEXES

1. La question de la « dette vieillesse » entre 2011 et 2018
a) Le montant des déficits cumulés entre 2011 et 2018 serait de 62,4 milliards d'euros

Le bouclage financier présenté avant les débats à l'Assemblée nationale indiquait que l'impact de la réforme permettait de réduire à l'horizon 2018 les déficits cumulés prévisionnels à hauteur de 58,2 milliards d'euros 2008 constants ou 64,3 milliards d'euros courants. Ce dernier chiffre était supérieur à 2,3 milliards d'euros au montant de la reprise annoncée par la CADES.

La réactualisation des soldes avant réforme, l'augmentation de l'effort de l'Etat et l'intensification du basculement de l'UNEDIC ont permis d'augmenter de 5,4 milliards d'euros les recettes du système de retraite entre 2011 et 2018.

Une partie de ce supplément devrait servir à financer les nouvelles mesures votées à l'Assemblée nationale à hauteur de 3,9 milliards d'euros, dont 0,3 milliard au titre du lissage du dispositif « carrières longues » et 3,6 milliards au titre de la suppression différée du départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois enfants.

Le solde permet, à ce stade de la discussion du projet de loi, de diminuer le montant des déficits cumulés entre 2011 et 2018 de 1,5 milliard d'euros.

Au total, le montant des déficits cumulés entre 2011 et 2018, après vote de l'Assemblée nationale et actualisation du schéma financier, serait de 56,7 milliards d'euros 2008 constants ou 62,4 milliards d'euros courants. Ce chiffre correspond quasiment au montant de reprise de dette devant être effectuée par la CADES durant cette période.

Déficits cumulés du système de retraite 2011-2018

(en milliards d'euros)

Schéma financier 1

juin 2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Déficit cumulé

(€ 2008 constants)

-13,8

-25,2

-35,9

-45,9

-53,8

-57,4

-58,2

-58,2

Déficit cumulé

(€ courants)

-13,8

-25,5

-36,7

-47,4

-56,3

-61,0

-63,0

-64,3

Schéma financier 2 septembre 2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Déficit cumulé

(€ 2008 constants)

-12,0

-22,1

-31,8

-41,6

-49,3

-52,7

-53,2

-53,0

Déficit cumulé

(€ courants)

-12,0

-22,3

-32,5

-42,9

-51,5

-55,9

-57,5

-58,5

Schéma financier 2 après vote de l'AN

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Déficit cumulé

(€ 2008 constants)

-12,0

-22,6

-32,8

-43,3

-51,7

-55,7

-56,6

-56,7

Déficit cumulé

(€ courants)

-12,0

-22,8

-33,5

-44,7

-54,0

-59,0

-61,1

-62,4

à comparer avec un montant annoncé de reprise de dette par la CADES de 62 mds entre 2011 et 2018

Source : d'après les chiffres du ministère du travail, de l'emploi, et de la solidarité

b) Les conditions de refinancement, à hauteur de 62 milliards d'euros des déficits de la branche vieillesse entre 2012 et 2018 par la CADES

Le Gouvernement a annoncé le transfert à la CADES des déficits de la branche vieillesse entre 2012 et 2018 afin d'alléger notamment la contrainte financière pesant sur le régime général durant la montée en charge de la réforme.

Compte tenu du schéma de financement présenté dans le cadre de l'examen du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, 62 milliards d'euros de déficit pourraient être transférés entre 2012 et 2018 à la CADES . Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, la reprise progressive des déficits « Vieillesse » à compter de 2012 ne pourrait être faite que par tranche annuelle maximale de 10 milliards d'euros.

Le refinancement des déficits opérés serait rendu possible par l'adossement du Fonds de réserve des retraites (FRR) à la CADES, et par l'affectation à cette dernière des ressources du fonds à compter de 2012 .

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, les 62 milliards de reprise se décomposent ainsi :

- 32 milliards au titre de la valorisation hors soulte des actifs du fonds ;

- 20 milliards d'euros au titre de l'affectation d'une fraction du prélèvement social de 2 %, ressource actuelle du FRR. Cette somme est calculée selon le nouveau tarif de la CADES après allongement de la durée de vie de cette dernière à hauteur de quatre années ;

- 10 milliards d'euros au titre de la « progressivité ». La reprise n'étant opérée que par tranche de 10 milliards d'euros par an, il convient d'appliquer un taux d'actualisation aux sommes transférées chaque année. Par convention, ce taux a été fixé à 2 % par an.

2. La question des « dépenses collatérales »

Le Gouvernement a annoncé le gel de l'effort de l'Etat afin que le financement des retraites de ses fonctionnaires ne pèse pas davantage sur le budget général. Le tableau indique ainsi que l'effort de l'Etat durant la prochaine décennie serait de 15,9 milliard d'euros à compter de 2013, ce chiffre représentant l'augmentation de la contribution de l'Etat au CAS « Pensions » entre 2000 et 2010, augmentation non prise en compte par le COR dans ses simulations (cf. supra ).

Or, la réforme de retraites est loin d'être neutre sur les finances publiques. Plusieurs « dépenses collatérales » peuvent être identifiées.

1. La contribution de l'Etat au CAS « Pensions » augmenterait bien en volume dans les prochaines années en raison d'un effet prix et d'un effet volume sur la masse des prestations à verser.

Contribution de l'Etat au compte d'affectation spéciale « Pensions »

(en milliards d'euros)

2006

2007

2008

2009

2010 (p)

2011 (p)

2012 (p)

2013 (p)

30,8

31,4

33,4

34,3

35,1

36,6

37,8

39,6

Source : d'après la direction du budget

2. Le budget de l'Etat continuerait de financer, via les subventions d'équilibre, un certain nombre de régimes spéciaux dont les charges ne cessent d'augmenter et ne seront pas compensées par l'effet positif des mesures d'âge dans un premier temps. Les subventions d'équilibre ont représenté un coût de 6 milliards d'euros en 2009, et de 6,6 milliards en 2010. En 2011, le coût estimé est de 7,1 milliards d'euros dont 3,1 milliards d'euros pour la SNCF, et 1,2 milliard d'euros pour le régime minier.

3. Le financement des allègements généraux resterait une charge importante pour le budget de l'Etat qui affecte à la sécurité sociale le produit de plusieurs recettes fiscales à ce titre. Entre 2007 et 2010, le coût de la compensation à la sécurité sociale des pertes de cotisations liées à la politique des allègements généraux aurait augmenté de plus de 10 %.

4. Le budget de l'Etat devrait financer le coût supplémentaire lié à la prolongation du versement de l'allocation équivalent retraite (AER) 11 ( * ) aux personnes qui en bénéficient au 31 décembre de cette année, et qui sont concernées par les nouvelles « bornes d'âge ». Cette mesure, adoptée par la commission des affaires sociales du Sénat (article 32 bis B), renchérit, à hauteur de 600 millions d'euros, le coût de cette prestation financée par le Fonds de solidarité, c'est-à-dire le régime de solidarité d'indemnisation du chômage. Or celui-ci est financé par les collectivités publiques, en particulier l'Etat qui, outre une subvention, lui affecte une partie du produit des droits sur les tabacs, et lui verse la contribution de solidarité 12 ( * ) .

5. Les budgets des collectivités locales, notamment les conseils régionaux et généraux, pourraient également être impactés indirectement par la réforme . D'une part, le recul de l'âge de l'ouverture des droits impliquerait, par ricochet, un allongement de la prise en charge de certaines personnes au titre du RSA. D'autre part, responsables des Trains Express Régionaux, les régions subventionnent la SNCF à hauteur de 2,5 milliards d'euros par an pour combler le déficit de son régime de retraite. La SNCF souhaite revoir à la hausse cette subvention compte tenu du déficit plus élevé que prévu de son régime de retraite. Les sommes ne sont pas négligeables puisqu'elles sont comprises entre 2 à 5 millions d'euros par an et par région.

6 . Le recul de l'âge de départ à la retraite va contribuer à augmenter mécaniquement certaines dépenses de protection sociale :

- au titre de l'invalidité , les pensions d'invalidité étant versées deux ans de plus. Le renchérissement de ce coût serait supporté par la CNAM. Il convient toutefois de souligner que la prolongation du versement des pensions d'invalidité pourra diminuer les dépenses au titre du minimum vieillesse, les personnes relevant de ce type de rentes étant souvent éligibles au minimum vieillesse ;

- au titre de l'assurance chômage , le marché du travail ne pouvant s'ajuster parfaitement. Le Gouvernement lui-même reconnaît ces difficultés puisqu'il prévoit un renchérissement des dépenses du Fonds de solidarité vieillesse au titre de la prise en charge des périodes de chômage validées gratuitement, à hauteur de 1,8 milliard d'euros entre 2011 et 2020.

III. QUEL FINANCEMENT DE LA SOLIDARITÉ EN MATIÈRE DE RETRAITE ?

A. SOLIDARITÉ INTER-GÉNÉRATIONNELLE ET SOLIDARITÉ INTRA-GÉNÉRATIONELLE, DES ÉQUILIBRES À NE PAS NÉGLIGER

1. Les objectifs de notre système de retraite par répartition

Le financement des retraites est étroitement lié à la définition de l'équité du système de retraite. Celle-ci revêt deux dimensions : une dimension intra-générationnelle et une dimension inter-générationnelle. La notion d'équité peut être source de confusion car elle peut être aussi bien utilisée pour défendre le statu quo que pour promouvoir une réforme profonde du système.

Dans le cadre d'une justice commutative, l'équité se définit par le principe de contributivité, chacun percevant l'équivalent de ce qu'il a à fournir comme effort. Cette approche s'applique notamment à l'équité intergénérationelle, qui veut que chaque génération bénéficie du même retour sur les cotisations qu'elle a versées.

Dans le cadre d'une justice distributive, l'équité vise à donner à chacun selon ses besoins.

La difficulté réside dans la définition d'un point d'équilibre entre ces deux approches de l'équité. La complexité du système français de retraite, caractérisé par une myriade de régimes de retraite, ne facilite pas le débat. Ceci est d'autant plus vrai que votre rapporteur pour avis remarque la tendance à vouloir, au nom de l'équité, apporter des solutions à des questions qui ne relèvent pas par définition des fonctions du système de retraite , que ce soit les inégalités hommes-femmes, les écarts de salaire ou la compensation de la pénibilité. Si ces débats sont primordiaux et peuvent conduite à établir un lien ces problématiques et les conditions d'ouverture de droits à la retraite, il convient de garder à l'esprit la nécessité de mener des actions structurelles au niveau des conditions d'emploi.

Un régime de retraite a pour vocation première d'accorder aux personnes qu'il couvre un revenu correct, pérenne et en rapport avec les revenus d'activité. Votre rapporteur pour avis se félicite de ce que l'article 1 er A du projet de loi, complété par la commission des affaires sociales du Sénat, rappelle et réaffirme précisément les objectifs assignés à notre régime par répartition :

« La Nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au coeur du pacte social qui unit les générations.

« Tout retraité a droit à une pension en rapport avec les revenus qu'il a tirés de son activité.

« Les assurés doivent pouvoir bénéficier d'un traitement équitable au regard de la retraite, quels que soient leurs activités professionnelles passées et le ou les régimes dont ils relèvent.

« Le système de retraite par répartition poursuit les objectifs de maintien d'un niveau de vie satisfaisant des retraités, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle, de solidarité intra générationnelle et de pérennité financière . »

2. Une dimension solidaire réaffirmée
a) La solidarité inter générationnelle

En assurant la sauvegarde financière du système de retraite par répartition, le présent projet de loi réaffirme la solidarité intergénérationnelle qui est au coeur du pacte social français.

Toutefois, il convient de remarquer que cette solidarité intergénérationnelle se traduit essentiellement par une solidarité des plus jeunes envers les plus âgés. Comme cela l'a été expliqué ci-dessus, la redéfinition des modalités de financement du système par répartition repose essentiellement sur une augmentation des capacités contributives des actifs dont la durée d'assurance est appelée à augmenter. Si votre rapporteur pour avis partage l'idée qu'il convient de préserver autant que possible le niveau des pensions, i l estime qu'il conviendra, à l'avenir, d'engager une réflexion sur l'augmentation de l'effort contributif des retraités aux dépenses de vieillissement de la Nation . En effet, il souligne que le niveau de vie moyen de ces derniers s'est considérablement amélioré depuis les années 1970. Ainsi, si l'on prend en compte les revenus du patrimoine, les placements financiers et immobiliers et les loyers non versés par les retraités propriétaires, leur niveau de vie moyen apparaît même comme légèrement supérieur à celui des actifs. Selon le COR, le taux de pauvreté des personnes de 60 ans et plus dépassait 30 % en 1970. Entre 1996 et 2007, il se maintient aux alentours de 10 %, soit un niveau inférieur à celui de l'ensemble de la population.

Dans cette perspective, certains avantages fiscaux dont ils bénéficient pourraient être révisés, notamment le taux réduit de CSG sur les pensions. Conscient de l'hétérogénéité des situations, votre rapporteur pour avis estime néanmoins nécessaire de s'assurer que l'effort supplémentaire contributif qui pourrait être demandé aux personnes retraitées ne concernera pas, dans un souci de justice distributive, les « petites pensions ». Le taux de la CSG pourrait ainsi n'être relevé que pour les personnes imposées au taux de 6,6 %. Les personnes exonérées de CSG sur leurs pensions ou bénéficiant du taux réduit de 3,8 % ne seraient pas concernées.

b) La solidarité intra-générationnelle
(1) Les mesures du projet de loi

La dimension redistributive du projet de loi est marquée par plusieurs dispositifs qui visent à garantir une certaine solidarité entre les actifs, et à corriger les effets de la seule application du principe de contributivité :

- le dispositif de départ anticipé pour carrières longues est élargi aux personnes ayant commencé à travailler entre dix-sept et dix-huit ans ;

- le nouveau dispositif de départ anticipé pour pénibilité permettra de maintenir l'ouverture des droits à la retraite à 60 ans pour certaines personnes (article 26 du projet de loi) ;

- l'augmentation, par voie réglementaire, de quatre à six trimestres des périodes de chômage non indemnisé, validées gratuitement au titre des droits à la retraite en début de carrière , permettra de mieux prendre en compte les difficultés d'insertion des jeunes sur le marché du travail ;

- l'assimilation des indemnités journalières versées pendant le congé de maternité à des salaires permettra d'améliorer la constitution des droits à la retraite des femmes dont la carrière est interrompue pour cause de maternité (article 30 du projet de loi) ;

- la pérennisation de l'allocation-veuvage , mesure adoptée par l'Assemblée nationale, permettra de mieux prendre en compte les veufs et les veuves de moins de 55 ans ;

- l'affiliation obligatoire des conjoints collaborateurs d'exploitation et aides familiaux au régime complémentaire des exploitants agricoles permettra d'améliorer la couverture retraite de ces personnes (article 28 du projet de loi) ;

- l'exclusion du capital d'exploitation de l'assiette de la reprise sur succession du minimum vieillesse des exploitants agricoles permettra à ces derniers de percevoir le minimum vieillesse sans renoncer à transmettre leur exploitation à leurs héritiers (article 29 du projet de loi). Le coût de cette mesure, résultant de l'augmentation potentielle des bénéficiaires du minimum vieillesse comme de la diminution des montants des récupérations sur succession, n'a pas été évalué ;

- l'élargissement « aux travailleurs handicapés » 13 ( * ) de l'accès à la retraite anticipée pour handicap (article 29 sexies ) . Cette mesure, adoptée par la commission des affaires sociales du Sénat, assouplit les conditions du dispositif actuellement réservé «aux personnes atteintes d'une incapacité permanente au moins égale à 80 % et ayant accompli une durée minimale d'activité. Le coût du dispositif, de l'ordre de 20 millions d'euros par an, serait supporté par les régimes de base ;

- le lissage du versement des allocations de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (article 27 sexies A) permettra d'éviter un effet de seuil, suite au relèvement des bornes d'âge. Le coût cumulé de cette mesure, de l'ordre de 650 millions d'euros d'ici 2020, serait financé par le FCAATA dont les recettes sont en majorité issues d'une contribution de la branche AT-MP.

(2) Les marges d'amélioration

Si votre rapporteur pour avis se félicite des mesures ci-dessus présentées, il souligne que des améliorations pourraient être apportées. Les marges de manoeuvre concernent essentiellement les jeunes qui connaissent non seulement une fragilisation croissante des parcours professionnels, mais entrent de plus en plus tard sur le marché du travail en raison notamment de l'allongement de la durée des études. Dès lors se pose la question de la prise en compte des périodes de stage, ou d'études, pour le calcul des droits à la retraite.

Ainsi, l'article 29 quinquies du projet de loi prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement, avant le 30 juin 2011, « sur les conditions d'introduction dans l'assiette des cotisations sociales, éventuellement sur la base d'un forfait, de la gratification dont font l'objet les stages en entreprise mentionnés à l'article 9 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, et sur les conditions de prise en compte de ces périodes de stage comme périodes assimilées pour la détermination du droit à pension ou rente lorsqu'elles ont donné lieu au versement d'un minimum de cotisations en application de l'article L. 351-2 du code de la sécurité sociale ».

Votre rapporteur pour avis estime que pourrait également être conduite une réflexion sur la prise en compte des périodes d'études.

B. LE FINANCEMENT DE LA SOLIDARITÉ EN MATIÈRE DE RETRAITE

1. Préserver un lien significatif entre cotisations versées et pensions pour mieux financer la solidarité

L'un des objectifs essentiels du principe de contributivité est de garantir que le niveau de vie de la personne à la retraite ne sera pas trop différent de ce qu'il était pendant la vie active. Toutefois, les régimes de retraite prennent aussi en compte, dans le montant des pensions ou dans la durée de cotisation, un certain nombre de situations et d'événements les faisant s'écarter d'un système strictement contributif. Le principe de contributivité n'exclut donc pas celui de la solidarité.

Votre rapporteur pour avis souhaite souligner que le financement des mesures de solidarité, qui sont essentielles, sera d'autant mieux accepté que le lien contributif sera maintenu et visible . A l'heure où notre système de retraite connaît une crise majeure de financement, il importe de respecter un équilibre entre la logique bismarckienne et la logique beveridgienne. Cet équilibre passe notamment par une meilleure répartition des rôles dans le financement des avantages non contributifs. L'augmentation des recettes fiscales prévues dans le cadre du présent projet de loi devrait contribuer à faciliter cet objectif.

2. Continuer de clarifier le financement des prestations non contributives
a) Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) prend en charge certains avantages vieillesse à caractère non contributif

Depuis 1993, le financement des avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale a vocation a être assuré par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), établissement public à caractère administratif. Compte tenu de sa mission, le Fonds est financée à hauteur de 70 % par l'impôt : il bénéficie de 0,85 point de CSG, d'une fraction de la contribution sociale de solidarité des sociétés ainsi que d'une fraction du produit du prélèvement social.

Ses autres recettes résultent des transferts de la CNAF vers le fonds, au titre des majorations de pensions pour enfants à charge.

Recettes du FSV

(en millions d'euros)

2008

2009

2010

2011

CSG

11 621,4

9 191,6

9 348,5

9 608,2

Autres impôts et taxes affectés

1 408,2

931,2

472,6

482,3

Prises en charge par la CNAF

2 385,7

2 882,8

3 595,6

4 380,9

Total

15 415,6

13 005,6

13 416,7

14 4714

Source : d'après la commission des comptes de la sécurité sociale - septembre 2010

Les charges du FSV correspondent :

- d'une part, à des prises en charge de cotisations au titre de périodes validées gratuitement par les régimes de base d'assurance-vieillesse ;

- d'autre part, à des prises en charge de prestations , au titre du minimum vieillesse et des majorations de pension pour enfants et conjoints à charge.

Charges du FSV

(en millions d'euros)

2008

2009

2010

2011

PEC cotisations chômage

7 574,3

8 898,8

9 588,5

9 452,9

Autres PEC de cotisations

368,0

21,9

650,0

1 316,5

PEC du minimum vieillesse

2 782,2

2 821,3

2 948,3

3 088,0

PEC des majorations de pensions

3 976,1

4 118,3

4 230,2

4 380,9

Total

14 437,8

15 926,9

17 480,2

18 298,4

PEC : prise en charge

Source : d'après la commission des comptes de la sécurité sociale - septembre 2010

La clarification du financement des avantages de retraite par la distinction de ce qui relève ou non du champ contributif , c'est-à-dire ce qui doit être financé par les cotisations des assurés, est un processus en cours.

Votre rapporteur pour avis rappelle à ce titre que :

- la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a transféré à la CNAF la prise en charge financière des majorations pour enfants qui relève davantage de la politique de la famille . Cette opération a été accompagnée d'une diminution de la fraction du prélèvement social affectée au FSV, diminution justifiée par la hausse des transferts en provenance de la CNAF au titre du remboursement des prestations afférentes aux majorations ci-dessus indiquées.

- la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a confié au FSV le financement de la validation des périodes d'arrêt maladie, maternité ou d'invalidité . Ces validations étaient auparavant financées par les régimes eux-mêmes.

Votre rapporteur pour avis est favorable à toute mesure de clarification entre dépenses contributives et non contributives. Néanmoins, il considère que cet exercice ne peut être pleinement satisfaisant que si le financement de ces dépenses est également garanti.

Or, la loi de financement pour 2010 n'a pas assorti la nouvelle mission du FSV de ressources supplémentaires, alors que ces nouvelles attributions devraient représenter une charge supplémentaire de 630 millions d'euros en 2010 et 1,26 milliard d'euros en 2011. Cette nouvelle mission n'est pas financée par l'augmentation des transferts de la CNAF. Ces derniers ne peuvent à la fois justifier la diminution du prélèvement social à partir de 2009, et neutraliser l'accroissement de charges lié au transfert du financement de nouvelles validations gratuites de trimestres de retraite.

De même, votre rapporteur pour avis rappelle que lors de la reprise de la dette opérée en 2009, il a été décidé de maintenir le taux de CRDS inchangé, les déficits repris étant refinancés grâce à l'attribution à la CADES d'une partie de la fraction affectée au FSV . « Ces jeux de bonneteau » ne sont pas acceptables.

b) La mission du FSV pourrait être complétée afin de mieux identifier les prestations relevant de la solidarité nationale financée

Si depuis 1993 la mission du FSV a été complétée et clarifiée, il reste des avantages vieillesse non contributifs à la charge des régimes de base :

- le minimum contributif . La CNAV supporte à ce titre un coût annuel de 3,8 milliards d'euros

- la majoration des durées d'assurance pour les mères. Plus difficile à évaluer, le coût du dispositif serait compris entre 4 et 5 milliards d'euros par an ;

- les modalités de calcul des durées d'assurance des personnes travaillant à temps partiel . Aujourd'hui une personne qui travaille à temps partiel et dont le salaire trimestriel est égal ou supérieur à l'équivalent de 200 heures SMIC valide quatre trimestres par an, soit le même nombre de trimestres qu'une personne travaillant à temps complet. Ce mode de calcul comprend donc une dimension redistributive qu'il est toutefois difficile de chiffrer.

Compte tenu de leur objectif, le financement des avantages ci-dessus cités devrait être assuré par l'impôt et non par les cotisations des assurés.

S i la prise en charge financière de ces dispositifs devait être transférée au FSV, votre rapporteur pour avis souhaite que cette opération soit accompagnée d'une augmentation des recettes du fonds à due concurrence. A cet égard, il rappelle que le nouveau bouclage financier relatif à la réforme des retraites permet d'envisager un financement supplémentaire de la part de l'Etat compte tenu du différentiel qu'il pourrait y avoir entre le niveau envisagé de sa participation (15,9 milliards d'euros par an) et le solde après réforme du service des retraites de l'Etat.

CHAPITRE II - LES RÉGIMES DE LA FONCTION PUBLIQUE ET LES RÉGIMES SPÉCIAUX, DES MARGES DE PROGRÈS

Le financement des pensions des fonctionnaires constitue aujourd'hui un enjeu majeur pour les finances publiques . Ces dernières sont en effet prises en charge par le budget de l'Etat pour les pensions des fonctionnaires civils et militaires, et par des caisses de retraite - la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) et l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) -, pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers et les agents non-titulaires.

Selon les données de la direction du budget, transmises à votre commission des finances à l'occasion de sa table-ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites » 14 ( * ) , le montant des pensions versées par les régimes des trois fonctions publiques - fonction publique d'Etat, territoriale et hospitalière - a représenté, en 2008 15 ( * ) , 55 milliards d'euros , soit 22 % du total des prestations vieillesse versées cette année-là (régimes de base et régimes complémentaires).

Le seul régime de retraite de la fonction publique d'Etat comptait, à la fin de l'année 2009, 2,2 millions de pensionnés, soit une dépense de pensions de 43,5 milliards d'euros, dont 34,7 milliards au titre des pensions civiles. Le régime de retraite de la fonction publique d'Etat constitue ainsi le deuxième régime de retraite en France par le nombre de pensionnés et par la masse financière totale versée chaque année.

La réforme des systèmes de retraite de la fonction publique apparaît aujourd'hui doublement nécessaire :

- d'une part, par mesure d'équité car si la réforme de 2003 a permis une amorce de la convergence entre les secteurs public et privé, des spécificités demeurent encore dans la fonction publique ;

- d'autre part, pour des raisons de soutenabilité financière : les projections actualisées du COR font en effet apparaître un besoin de financement pour les régimes de retraite de la fonction publique de près de 20 milliards d'euros en 2015, soit environ la moitié du besoin de financement total des systèmes de retraites (régime général, fonction publique et indépendants). L'augmentation continue de la part financée par l'Etat ne peut, à elle seule, constituer une réponse soutenable pour les finances publiques.

Les mesures proposées par le titre II (mesures d'âge) et le titre III (mesures de rapprochement entre régimes) 16 ( * ) du présent projet de loi apportent des éléments de réponse à ces deux problématiques. Cependant, des marges d'amélioration en vue d'une plus grande équité entre assurés demeurent . En particulier, votre rapporteur pour avis déplore, d'une part, que les catégories dites « actives » de la fonction publique ne fassent pas l'objet d'un réexamen et, d'autre part, que la présente réforme ne doive s'appliquer que de façon différée aux régimes spéciaux de retraite.

I. UNE DOUBLE NÉCESSITÉ DE RÉFORME : POURSUIVRE LA CONVERGENCE DES SYSTÈMES DE RETRAITE ET ASSURER LA SOUTENABILITÉ FINANCIÈRE DES RÉGIMES DE LA FONCTION PUBLIQUE

A. LES RÉFORMES DE 2003 ET 2008 : UN PREMIER PAS VERS LA CONVERGENCE

1. La comparaison des régimes de retraite dans le secteur privé et la fonction publique, un exercice délicat

Comme le soulignent les travaux du COR, la comparaison des régimes de retraite dans le secteur privé et la fonction publique est un exercice complexe.

Dans son premier rapport publié en 2001 17 ( * ) , le COR n'abordait ainsi qu'avec réticence la question de la comparaison de l'effort contributif des différents régimes de retraite. Il soulignait notamment que les taux de cotisation ne sont pas directement comparables, dans la mesure où ils ne s'appliquent pas aux mêmes assiettes de rémunération - les primes accordées dans la fonction publique ne sont que partiellement prises en compte - et ne couvrent pas les mêmes périmètres - certains régimes couvrent, outre le risque vieillesse, le risque d'invalidité et de cessation d'activité.

De manière plus générale, une simple comparaison des règles appliquées dans le secteur privé et la fonction publique ne permet pas une appréciation fine des disparités de situation des assurés. D'autres indicateurs, notamment l'espérance de vie ou le profil de carrière, doivent également être pris en compte.

Aussi le COR conclut-il dans un document de travail de juin 2009 18 ( * ) , consacré aux travaux les plus récents réalisés en France sur les différences de situation au regard de la retraite des salariés du secteur privé et des fonctionnaires : « Compte tenu de la multiplicité des indicateurs mobilisés et de la difficulté à comparer des situations effectivement comparables entre salariés du secteur privé et salariés du secteur public, il est délicat de tirer des conclusions définitives de ces différents travaux . Il en ressort néanmoins que, si des différences de situation existent, elles peuvent apparaître à l'avantage des fonctionnaires. Ces différences ne résulteraient d'ailleurs pas seulement ou nécessairement de différences de règles en matière de retraite, mais pourraient renvoyer à des écarts d'âge d'entrée dans la vie active, de salaire ou d'espérance de vie ».

Ces derniers travaux ne tiennent pas compte des effets de la réforme de 2003.

2. Les principales mesures de convergence adoptées depuis 2003
a) Une convergence partielle et graduelle amorcée par la réforme « Fillon »

La loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, dite loi « Fillon », a procédé à un rapprochement partiel et graduel du régime de retraite de la fonction publique avec celui du secteur privé.

En effet, alors que la réforme de 1993 19 ( * ) avait procédé à l'augmentation du nombre d'années de cotisation nécessaires à l'obtention d'une retraite à taux plein pour les salariés du secteur privé (passage de 150 trimestres cotisés, soit 37,5 annuités, à 160 trimestres cotisés, soit 40 annuités), tel n'avait pas été le cas pour la fonction publique et les régimes spéciaux de retraite.

La réforme de 2003 a ainsi, à titre principal, aligné la durée de cotisation des régimes de retraite de la fonction publique sur celle du régime général de façon progressive dès 2003 (à raison de deux trimestres supplémentaires par an) pour atteindre , comme dans le secteur privé, 40 annuités en 2008 .

A partir de 2009, la convergence étant réalisée, la durée d'assurance augmente progressivement de façon identique dans les deux secteurs, pour atteindre 41 annuités en 2012. A compter de cette date, elle progressera jusqu'à 2020 de telle manière que tout allongement de la durée de retraite induite par une augmentation de l'espérance de vie soit financé par une augmentation de la durée de cotisation, le ratio durée d'assurance / durée de retraite, fixé en 2003, devant demeurer constant jusqu'en 2020.

Il est à noter que le « rattrapage » des régimes spéciaux de retraite n'a, quant à lui, commencé qu'en 2008 ( cf. infra ).

Augmentation de la durée d'assurance requise pour obtenir une retraite à taux plein dans la fonction publique

Année d'ouverture des droits

Durée minimale d'assurance en annuités

Durée minimale d'assurance en trimestres

2003 et années antérieures

37,50

150

2004

38,00

152

2005

38,50

154

2006

39,00

156

2007

39,50

158

2008

40,00

160

2009

40,25

161

2010

40,50

162

2011

40,75

163

2012

41,00

164

Source : direction du budget pour le COR - document n° 3-1 : « Bilan descriptif des principales évolutions et mesures récentes dans la fonction publique et les régimes spéciaux » - juillet 2010

Dans la même logique d'une harmonisation progressive des règles applicables aux systèmes de retraite de la fonction publique et du secteur privé, la loi précitée du 21 août 2003 a, par ailleurs, prévu :

- l'instauration progressive d'une décote pour les régimes de la fonction publique et l'atténuation progressive de celle préexistant dans le régime général, de telle sorte que leurs mécanismes convergent à l'horizon 2020 ( cf . encadré suivant) ;

- la création parallèle d'une surcote destinée à permettre aux fonctionnaires souhaitant obtenir une meilleure retraite, de travailler plus longtemps. Cette surcote est définie en des termes équivalents dans les deux secteurs depuis 2009 ( cf . encadré suivant) ;

- l'indexation de la revalorisation des pensions sur l'évolution de l'indice des prix hors tabac constatée chaque année, comme dans le secteur privé ;

- enfin, la création d'un régime public de retraite additionnelle pour les fonctionnaires, dont les ressources sont constituées de cotisations versées à égalité par les « salariés » et les « employeurs », et dans lequel les droits s'acquièrent sous forme de points en fonction de l'assiette cotisée, composée des primes et indemnités non prises en compte dans l'assiette de calcul de la retraite.

Les coefficients de minoration et de majoration (décote/surcote)
pour le calcul des retraites de la fonction publique


La décote (articles L. 14-I et L. 14-II du code des pensions civiles et militaires de retraite)

Afin de permettre un ajustement des comportements individuels, une montée en charge progressive de la décote s'étalant de 2006 à 2020 a été prévue. Cette montée en charge porte à la fois sur le coefficient de la décote, qui passe de 0,125 % par trimestre manquant en 2006 à 1,25 % en 2015 , et sur le plafonnement de l'effet de la décote, qui passe de 4 trimestres en 2006 à 20 trimestres en 2020 . L'effet de la décote sera donc plafonné en 2020, à 25 %.

La décote est calculée en fonction du nombre de trimestres manquants pour atteindre soit la limite d'âge du grade détenu par le fonctionnaire, soit le nombre de trimestres, permettant d'obtenir le pourcentage maximum de la pension civile ou militaire (156 en 2006, 164 en 2012), suivant ce qui est le plus avantageux pour la personne concernée. Dans ce dispositif, la décote n'est pas appliquée aux pensions liquidées lorsque les agents ont atteint la limite d'âge. La décote n'est pas non plus appliquée aux pensions des fonctionnaires handicapés dont l'incapacité permanente est au moins égale à 80 % ou mis à la retraite pour invalidité ni aux pensions de réversion lorsque le fonctionnaire décède avant la liquidation de sa propre pension.

Les services effectués à temps partiel sont par ailleurs décomptés comme des services à temps plein pour le calcul de la durée d'assurance.

Ce mécanisme de décote est également applicable aux militaires dont la limite d'âge est supérieure ou égale à 55 ans lorsqu'ils sont mis à la retraite à compter de l'âge de 50 ans car ceux-ci effectuent des carrières longues comparables à celles des fonctionnaires civils.

En revanche, pour les militaires dont la limite d'âge est inférieure à 55 ans ou pour les militaires dont la limite d'âge est supérieure ou égale à 55 ans mais qui sont mis à la retraite avant l'âge de 50 ans, un mécanisme particulier est prévu aux alinéas 2 et suivants du II de l'article L. 14 du code des pensions civiles et militaires. La décote représente alors 1,25 % par trimestre manquant et est plafonnée à dix trimestres (soit un effet maximal de 12,5 %).


La surcote (article L. 14-III du code des pensions civiles et militaires de retraite)

Un coefficient de majoration, pour les fonctionnaires civils, accroît le montant de la pension de 0,75 % par trimestre supplémentaire travaillé, après le 1 er janvier 2004 , au-delà de l'âge de 60 ans et de la durée de services nécessaire pour obtenir le pourcentage maximum de la pension (les trois conditions sont cumulables). Ce coefficient est intégralement appliqué depuis l'année 2004, sans dispositions transitoires. Ce mécanisme peut permettre de majorer la pension jusqu'à 15 % dès lors qu'il est, à l'instar de la décote, plafonné à 20 trimestres.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a porté ce coefficient à 1,25 % par trimestre supplémentaire travaillé pour tous les régimes. Une personne atteignant le taux plein à soixante ans mais poursuivant son activité pendant cinq ans peut ainsi voir sa pension majorée de 25 %.

Ce mécanisme de surcote ne concerne que les fonctionnaires civils et non les militaires, eu égard à leurs limites d'âges basses comparées à celles des fonctionnaires civils.

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

b) Les mesures mises en oeuvre dans le cadre du « rendez-vous 2008 »

Les dispositions mises en oeuvre dans le cadre du « rendez-vous 2008 » ont eu, quant à elles, davantage tendance à renforcer l'emploi des seniors que la convergence entre les secteurs publics et privés. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a ainsi :

- ouvert la possibilité aux catégories dites « actives » de travailler au delà de l'âge légal de départ à la retraite , sous réserve de leur aptitude physique ;

- assoupli les règles de cumul emploi/retraite : les fonctionnaires, sous réserve qu'ils aient liquidé leurs pensions de vieillesse personnelles auprès de la totalité des régimes légaux, peuvent cumuler sans aucune restriction leur pension et le revenu d'une activité professionnelle à partir de 60 ans, s'ils ont cotisé la durée nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein ou, à défaut, à partir de 65 ans ;

- durci le dispositif de cessation anticipée d'activité pour « carrières longues » pour l'aligner sur les règles du régime général. Le droit à retraite avant 60 ans des fonctionnaires ayant accompli une carrière longue est désormais soumis à trois conditions cumulatives : une durée totale d'assurance et de périodes reconnues équivalentes tous régimes de base confondus, égale à la durée d'assurance nécessaire pour obtenir une pension à taux plein majorée de 8 trimestres ; une durée d'assurance cotisée à la date d'effet de la pension  qui varie en fonction de l'âge de l'assuré ; un âge précoce de début de carrière (avant 16 ans ou 17 ans) ;

- organisé, enfin, la disparition progressive de l'indemnité temporaire au profit des pensionnés titulaires d'une pension de l'Etat et justifiant d'une résidence effective outre-mer 20 ( * ) . Le décret n° 52-1050 du 10 septembre 1952 prévoit en effet de majorer le montant de la pension civile ou militaire versée aux anciens fonctionnaires de l'Etat ou aux militaires ayant une résidence effective dans certaines collectivités d'outre-mer. Cette majoration est de 35 % à la Réunion et Mayotte, 40 % à Saint-Pierre et Miquelon et 75 % à Wallis et Futuna, en Nouvelle Calédonie et en Polynésie française.

A l'occasion du « Rendez-vous 2008 », les règles de gouvernance de l'IRCANTEC ont également été revues . Deux critères de solvabilité à moyen et long terme ont notamment été instaurés : 1) le paiement des pensions doit être assuré sur une durée de 30 ans par les cotisations futures et les réserves du régime, 2) le régime doit disposer à l'horizon de 20 ans d'un montant de réserves équivalent, au minimum, à une année et demi de prestations évaluées à cette date.

3. Un effet qui commence à être perceptible, mais des spécificités qui demeurent
a) L'âge moyen de départ à la retraite dans la fonction publique a certes augmenté, mais reste inférieur à celui constaté dans le secteur privé

Comme l'a indiqué Philippe Josse, directeur du budget, devant votre commission des finances 21 ( * ) , les effets de la réforme de 2003 restent encore aujourd'hui incertains .

En effet, s'agissant de l'augmentation de la durée d'assurance requise pour bénéficier d'une retraite à taux plein, les paramètres appliqués à la liquidation de la pension sont ceux de l'année d'ouverture des droits, de façon à stabiliser pour chaque assuré les conditions de départ à la retraite. Dès lors, un certain retard s'observe pendant la montée en charge de la réforme . Aussi, en 2008, moins de 50 % des fonctionnaires civils ont-ils été effectivement soumis aux paramètres de 2008.

Ventilation des flux de départs annuels selon la durée cible pour les fonctionnaires civils

Durée de référence

2003

2004

2005

2006

2007

2008

150 trimestres

100 %

65 %

42 %

31 %

23 %

20 %

152 trimestres

-

35 %

18 %

7 %

5 %

4 %

154 trimestres

-

-

40 %

16 %

7 %

5 %

156 trimestres

-

-

-

46 %

20 %

10 %

158 trimestres

-

-

-

-

45 %

20 %

160 trimestres

-

-

-

-

-

41 %

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

Néanmoins, une augmentation de l'âge effectif de liquidation des droits à pension commence à être observée : l'âge moyen de départ en retraite des fonctionnaires a ainsi augmenté, entre 2000 et 2008, de 12 mois dans la fonction publique d'Etat (fonctionnaires civils uniquement).

Celle-ci est due non seulement à un effet de composition - la baisse d'effectifs des catégories dites « actives », puisque les instituteurs, devenus professeurs des écoles, sont désormais considérés comme « sédentaires » -mais aussi au nouveau système de décote et de surcote : 35 % des liquidants ont bénéficié de la surcote en 2008, contre 14 % en 2004.

L'âge moyen de départ à la retraite dans la fonction publique demeure cependant toujours inférieur - de deux ans et 4 mois - à celui observé dans le secteur privé.

Comparaison de l'âge de départ en retraite
dans le secteur public et le secteur privé

Année

Age moyen de liquidation des fonctionnaires civils de l'Etat

Age moyen de liquidation des salariés du régime général

1990

57 ans et 5 mois

62 ans

1995

57 ans et 9 mois

61 ans et 7 mois

2000

57 ans et 8 mois

61 ans et 9 mois

2005

57 ans et 8 mois

61 ans et 2 mois

2008

58 ans et 8 mois

61 ans

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

b) Des spécificités qui demeurent

Par ailleurs, comme le montre le tableau suivant, de nombreuses règles spécifiques à la fonction publique demeurent en ce qui concerne les modes de calcul et les conditions de liquidation des pensions .

Comparatif des règles applicables dans le régime général et la fonction publique avant application du présent projet de loi

Régime général

Fonction publique

Durée minimale de service

-

15 ans

Age d'ouverture des droits

60 ans

60 ans ( 50 ou 55 ans pour les catégories « actives » )

-

Possibilité de départ après 15 ans de service pour les fonctionnaires ayant 3 enfants

Dispositif « carrières longues » similaire

Calcul de la pension

50 % x S* x (durée d'assurance/40 ans**)

+ retraite complémentaire

75 % x traitement indiciaire

x (durée d'assurance/40 ans**)

* S : salaire de référence

Moyenne des salaires des 25 meilleures années

Moyenne des salaires sur les 6 derniers mois

** Durée d'assurance exigée

Convergence depuis 2008 :

Ø 40 ans en 2008

Ø 41 ans en 2012

Ø A compter de 2013, la durée de référence doit évoluer en fonction de l'espérance de vie, de manière à maintenir constant, jusqu'en 2020, le rapport constaté en 2003 entre le « temps de travail » et le « temps de retraite »

Taux de cotisation

Taux de cotisation salarié global :

* Non-cadres :

10,55 % (s* = PSS**)

9 % (PSS < s = 3 PSS)

0,1 % (s > 3 PSS)

* Cadres :

10,58 % (s = PSS)

8,83 % (PSS < s = 8 PSS)

0,1 % (s > 8 PSS)

Taux de cotisation employeur global :

* Non-cadres :

15,6 % (s = PSS)

14,9 % (PSS < s = 3 PSS)

1,6 % (s > 3 PSS)

* Cadres :

15,82 % (s = PSS)

15,72 % (PSS < s = 8 PSS)

1,6 % (s > 8 PSS)

Taux de cotisation salarié :

* Sur le traitement indiciaire : 7,85 %

* Sur les primes : 5 %

Taux de cotisation

employeur

(cotisations fictives) :

* Sur le traitement indiciaire : 62,14 %

* Sur les primes : 5 %

Décote/surcote

Convergence en 2020 : - 5 %/ + 5 % par an dans la limite de 5 ans

Majoration de durée d'assurance pour enfant

2 ans par enfant

- 1 an par enfant (né avant 2004)

- 6 mois par enfant (né après 2004)

Majoration de durée d'assurance pour trois enfants

+ 10 % pour trois enfants

+ 10 % pour trois enfants

+ 5 % par enfant au-delà de trois

Revalorisation

Indice des prix à la consommation

Minimum contributif / garanti

Objectif de 85 % du SMIC net pour une carrière cotisée complète par mois

1067 euros par mois pour 40 annuités

Pensions de réversion

54 % (ou 60 %) sous condition d'âge et de ressources

50 % sans condition d'âge et de ressources

Source : commission des finances, d'après les données de la direction du budge

t

Par mesure d'équité, ces spécificités encore observées aujourd'hui justifient leur réexamen dans le cadre du présent projet de loi. L'ampleur des besoins de financement des régimes de retraites de la fonction publique constitue le second facteur d'urgence à agir .

B. DÈS 2015, UN BESOIN DE FINANCEMENT ÉQUIVALENT À LA MOITIÉ DE CELUI DE L'ENSEMBLE DES SYSTÈMES DE RETRAITES

1. Les dépenses de retraite, une composante dynamique des dépenses de l'Etat
a) Un équilibre apparent qui pèse directement sur le déficit de l'Etat

Avant l'entrée en vigueur de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) 22 ( * ) , les opérations budgétaires relatives aux pensions civiles et militaires de retraite étaient retracées de manière éclatée et peu lisible au sein du budget général de l'Etat. Cette présentation rendait difficiles les comparaisons et rapprochements avec les autres régimes de retraite, ainsi que la mise en évidence des évolutions tendancielles, et notamment des conditions de partage de l'effort contributif entre l'Etat et ses agents.

L'article 21 de la LOLF a ainsi prévu la création d' un compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » destiné à retracer les opérations relatives aux pensions et avantages accessoires.

Un compte d'affectation spéciale, au sens de l'article 21 de la LOLF, ayant vocation à retracer des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées , le CAS « Pensions », retrace ainsi :

- en dépenses : les pensions des fonctionnaires civils et militaires, mais également les transferts démographiques entre régimes et les affiliations rétroactives ;

- en recettes : outre les cotisations salariales et celles de l'Etat employeur , celles des autres employeurs publics, le versement progressif des soultes de France Télécom et de la Poste - celles-ci ont été affectées à un établissement public qui les reverse par fractions au budget de l'Etat -, les validations de services et les rachats d'années d'étude ainsi que les compensations démographiques. Par ailleurs, depuis 2010, un versement de la CNRACL vient neutraliser les effets de la décentralisation de certains personnels ( cf. infra ).

L'ensemble des crédits retracés par le CAS « Pensions » en 2010 a ainsi représenté plus de 51 milliards d'euros en 2010 23 ( * ) , répartis en trois programmes :

- « Pensions civiles et militaires et allocations temporaires d'invalidité » (46,7 milliards d'euros en 2010) ;

- « Ouvriers des établissements industriels de l'Etat » (1,8 milliard d'euros en 2010) ;

- « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » (2,6 milliards d'euros en 2010).

Le premier programme « Pensions civiles et militaires et allocations temporaires d'invalidité », qui correspond au régime de retraite des fonctionnaires d'Etat, est lui-même subdivisé en trois actions : « Fonctionnaires civils relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite » (37,3 milliards d'euros en 2010), « Militaires relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite » (9,2 milliards d'euros en 2010) et « Allocations temporaires d'invalidité » (0,1 milliard d'euros en 2010).

Comme tous les comptes d'affectation spéciale, le CAS « Pensions » doit être géré à l'équilibre. Par construction, chaque année, l'équilibre du CAS est assuré par la contribution employeur à la charge de l'Etat , calculée de manière à ajuster les recettes aux besoins de financement.

Trois taux distincts de contribution de l'Etat-employeur sont ainsi retenus chaque année : un taux « civil », un taux « militaire » et un taux « allocations temporaires d'invalidité » 24 ( * ) . Chacun de ces taux est fixé pour équilibrer financièrement chaque action du programme « Pensions civiles et militaires et allocations temporaires d'invalidité », compte tenu des dépenses de l'action considérée et des autres recettes qui lui sont rattachées. En constante augmentation, ces taux de contribution pour 2010 ont été fixés à 62,14 % pour les personnels civils , 108,63 % pour les personnels militaires et 0,33 % au titre du financement des allocations temporaires d'invalidité.

Evolution du taux de cotisation employeur (historique et prévisionnel)

Année

Taux de cotisation

Taux de cotisation employeur implicite (1995-2005)

1995

48,6 %

1996

49,2 %

1997

48,7 %

1998

52,3 %

1999

52,7 %

2000

56,8 %

2001

59,4 %

2002

48,6 %

2003

49,2 %

2004

48,7 %

2005

52,3 %

Taux de cotisation employeur explicite (2006-2010)

Pensions de retraite - civils

Allocation temporaire d'invalidité - civils

Pensions militaires

2006

49,90 %

0,30 %

100,00 %

2007

50,74 %

0,31 %

101,05 %

2008

55,71 %

0,31 %

103,50 %

2009

60,14 %

0,32 %

108,39 %

2010

62,14 %

0,33 %

108,63 %

Prévisions de taux d'équilibre technique (hors compensations démographiques et autres transferts) - part employeur (la part salarié est supposée stable à 7,85 %)

2015

69,2 %

2020

71,2 %

2030

72,8 %

2040

72,6 %

2050

69,1 %

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

b) Une augmentation de la dépense annuelle de près de 4,8 % depuis 1990

Or, les dépenses liées aux pensions civiles et militaires sont particulièrement dynamiques : elles ont presque triplé depuis 1990 , augmentant de 4,8 % par an en moyenne alors que les prix progressaient annuellement de 1,7 %, soit un écart de 3 points. En une année, entre 2008 et 2009, le montant total des pensions versées a augmenté de 1,6 milliard d'euros , passant de 32,966 milliards à 34,577 milliards d'euros 25 ( * ) .

Evolution du montant total des pensions civiles et militaires depuis 1990

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

Comme l'a souligné Philippe Josse 26 ( * ) , cette situation résulte d'abord de « l'effet volume », c'est-à-dire de l'augmentation de 2 % par an du nombre de pensionnés, en raison de l'allongement de l'espérance de vie, de la pyramide des âges dans la fonction publique d'Etat et des changements de comportement induits par la réforme « Fillon ».

Les flux de pensionnés dans la fonction publique d'Etat

Le nombre annuel de départs à la retraite est passé de 40 000 en 1990 à près de 80 000 en 2008, en raison de la pyramide des âges.

Le « pic » de 2003 s'explique par les effets psychologiques de la réforme « Fillon » : de nombreux fonctionnaires ont liquidé leurs droits par anticipation, alors même que la réforme ne devait s'appliquer que très progressivement sans les affecter personnellement.

Une nouvelle baisse des départs à la retraite a été observée en 2009 . Cette diminution n'est pas due à des phénomènes démographiques, mais :

- aux effets psychologiques de la crise - des agents inquiets pour l'avenir professionnel de leur conjoint non fonctionnaire ont décidé de rester en activité plus longtemps ;

- à des hausses catégorielles de rémunération , comme celle de l'indemnité de sujétion spéciale de la police, intégrées dans l'assiette des droits à pension - certains fonctionnaires ont voulu attendre pour liquider leurs droits afin que ces hausses soient prises en compte ;

- à la montée en charge de la réforme « Fillon » .

Source : d'après les données de la direction du budget

A ce phénomène s'ajoute un « effet prix », soit l'évolution du coût moyen des pensions : celui-ci a augmenté de 2,8 % par an. Cette évolution s'explique :

- d'une part, par les règles d'indexation des pensions : avant 2003, elles étaient indexées sur l'évolution du point d'indice et sur sa progression moyenne dans chaque corps ; depuis 2003, elles sont indexées sur l'inflation, comme dans le secteur privé ;

- d'autre part, par l'effet du « glissement vieillesse technicité » (GVT) : les nouveaux retraités ont en moyenne des pensions supérieures à ceux qui sortent du système, autrement dit les retraités qui décèdent.

Si entre 1990 et le début des années 2000, l'« effet prix » a été déterminant, depuis environ huit ans, ce sont les phénomènes démographiques qui prédominent.

c) Un poids croissant dans le budget général de l'Etat

Il résulte du dynamisme des dépenses de pensions une croissance très nette de la part du budget de l'Etat consacrée à la charge des pensions civiles et militaires de retraite : entre 1990 et 2008, celle-ci a augmenté de près de 60 %, passant de 9,3 % du total des dépenses du budget général de l'Etat à 14,6 % en 2008.

Evolution du poids des dépenses de pensions dans le budget général de l'Etat

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

Or ce dynamisme des dépenses liées aux pensions conduit, de fait, à un processus d'éviction de dépenses stratégiques et à l' aggravation de la dette publique .

Ainsi, alors qu'entre 2003 et 2008, 20 % de la progression des dépenses du budget de l'Etat étaient dus à l'accroissement du besoin de financement des pensions des fonctionnaires de l'Etat, en 2010, ce seront 23 % des moyens supplémentaires qui y seront employés. Les dépenses de pensions représentent ainsi, selon le rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique pour 2010, le deuxième facteur de dérive des dépenses de l'Etat .

2. Un besoin de financement de près de 20 milliards d'euros dès 2015
a) Un triple choc pour les régimes de la fonction publique

Selon les résultats des projections actualisées du COR, la situation démographique et financière des régimes de retraites de la fonction publique continuerait à se détériorer sous l'effet, comme pour le régime général, du choc démographique résultant de l'arrivée à l'âge de la retraite de la génération du baby boom , conjugué à l'allongement de l'espérance de vie, mais également du choc relativement important que la fonction publique devra absorber du fait de la décentralisation d'un nombre important de fonctionnaires ; de l'application de la r ègle du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ; de la réforme du statut de certaines entreprises « publiques » , trois phénomène qui ont, pour conséquence, à moyen terme, de diminuer le nombre de cotisants.

S'agissant de l'impact de la décentralisation, un dispositif spécifique a été adopté en loi de finances pour 2010 tendant à neutraliser, chaque année, l'impact financier des transferts sur chacun des régimes « Etat » et « CNRACL » à raison des générations « décentralisées » :

- en premier lieu, l'Etat rembourse les pensions versées par la CNRACL pour les agents ayant effectué une partie de leur carrière pour l'Etat ;

- réciproquement, la CNRACL reverse à l'Etat les cotisations et contributions assises sur les traitements de ces agents qui seraient revenues à l'Etat si les agents n'avaient pas été décentralisés.

Il en résulte néanmoins, à moyen terme, une diminution du nombre de cotisants pour le régime de la fonction publique d'Etat qui ne bénéficie plus de l'affiliation des fonctionnaires recrutés en remplacement des fonctionnaires décentralisés partant à la retraite.

Evolution des ratios démographiques des régimes de la fonction publique

Ratio démographique

2006

2015

2020

2030

2040

2050

Fonctionnaires civils et militaires de l'Etat

1,4

0,9

0 ,8

0,7

0,7

0,7

Fonctionnaires territoriaux et hospitaliers

2,5

1,8

1,5

1,2

1

1

Régime complémentaire des agents non titulaires

1,7

1,2

1

0,7

0,5

0,5

Source : rapport du COR - novembre 2007

b) L'augmentation continue de la part financée par l'Etat ne peut à elle seule constituer une réponse soutenable pour les finances publiques

Selon les projections actualisées du COR, dès 2015, le besoin de financement des retraites des fonctionnaires représentera ainsi près de la moitié du besoin de financement total des systèmes de retraites (régime général, fonction publique et indépendants).

Ventilation des besoins de financement

2008

2015

2020

2050

Besoin annuel de financement

En milliards d'euros

En milliards d'euros

En % du besoin du système (1)

En milliards d'euros

En % du besoin du système

En milliards d'euros

CNAV

A*

- 1,7

- 12,4

32,4

- 16,6

40,8

- 51,8

B*

- 1,7

- 13

33

- 18,8

41,8

- 64,4

C*

- 1,7

- 13,1

32,5

- 19

39

- 65

Fonction publique d'Etat

A*

- 11,2

- 19,6

51,2

-20,5

49

- 24,9

B*

- 11,2

- 19,8

50,2

- 21

46,6

- 25,2

C*

- 11,2

-19,8

49,1

- 21

43

- 25,2

CNRACL

A*

2,5

0,3

-

- 1,1

2,7

- 13,1

B*

2,5

0,3

-

- 1,3

2,9

- 13,6

C*

2,5

0,3

-

- 1,6

3,3

- 13,8

(1) les valeurs sont approximatives car les données comparées ne sont pas issues des mêmes sources. Exercice impossible à faire en 2050, les projections du COR et des différents régimes diffèrent trop.

* A, B, C = scenarii

Source : COR

L'augmentation continue de la part financée par l'Etat - par le biais des « cotisations fictives » réajustées chaque année afin de garantir l'équilibre du régime - ne peut à elle seule constituer une réponse soutenable pour les finances publiques.

3. Le cas particulier de la CNRACL
a) Une caisse de retraite à part entière

A la différence des fonctionnaires de l'Etat, les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers sont affiliés à une caisse de retraite dotée de la personnalité morale, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).

Cette caisse constitue, comme le régime des pensions civiles et militaires de retraite, un régime spécial de sécurité sociale, au sens des articles L. 711-1 et R. 711-1 du code de la sécurité sociale. La CNRACL est un établissement public fonctionnant sous l'autorité et le contrôle d'un conseil d'administration. Elle assure, selon le principe de la répartition, la couverture des risques vieillesse et invalidité pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers nommés dans un emploi permanent à raison d'au moins 28 heures hebdomadaires.

Ses ressources sont constituées pour l'essentiel des cotisations salariales et patronales . Le taux de ces cotisations, salariales comme patronales, est fixé par le décret n° 91-613 du 28 juin 1991. Contrairement au régime de la fonction publique d'Etat, la contribution « employeur » n'est pas déterminée, chaque année, pour équilibrer le régime.

b) Un résultat positif depuis 2003

La CNRACL a enregistré un résultat positif de 320 millions d'euros en 2008 , confirmant l'installation de sa situation financière au-dessus du niveau d'équilibre malgré une progression rapide des dépenses de pension auxquelles elle doit faire face.

Ce retour à l'équilibre depuis 2003 résulte notamment de l'augmentation du taux de la contribution employeur qui est progressivement passé de 26,10 % en 2002 à 27,30 % à compter de 2005, ainsi que de l'abaissement progressif du taux des compensations spécifiques inter-régimes, qui ont été très élevés dans les années passées.

Evolution du résultat net de la CNRACL (1990-2008)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

Ces deux mesures devenaient nécessaires compte tenu de la dégradation de la situation démographique de la CNRACL , même si le régime demeure relativement jeune comparativement aux autres régimes d'assurance vieillesse.

Comme le souligne le rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique pour 2010, le nombre de pensionnés de la CNRACL progresse plus rapidement que celui des cotisants, d'où une diminution constante du rapport démographique. Environ égal à 4 en 1990, le rapport démographique est ainsi passé à 2,2 en 2008 .

c) Un régime déficitaire à compter de 2015

Compte tenu du profil démographique relativement jeune de la CNRACL, les projections actualisées du COR ne laissent entrevoir un déficit de la CNRACL « qu'après 2015 ».

En 2050, son besoin de financement s'élèverait, en revanche, à plus de 13 milliards d'euros. Cette perspective justifie les mesures envisagées dans le cadre de la présente réforme.

Besoins de financement de la CNRACL

2008

2015

2020

2050

Besoin annuel de financement

En milliards d'euros

En milliards d'euros

En % du besoin du système

En milliards d'euros

En % du besoin du système

En milliards d'euros

CNACRL

A*

2,5

0,3

-

- 1,1

2,7

- 13,1

B*

2,5

0,3

-

- 1,3

2,9

- 13,6

C*

2,5

0,3

-

- 1,6

3,3

- 13,8

Source : COR

II. LES MESURES PROPOSÉES : UN NOUVEAU PAS VERS PLUS D'ÉQUITÉ

A. L'APPLICATION DU PRINCIPE GÉNÉRAL DU RELÈVEMENT DES BORNES DE DÉPART À LA RETRAITE

Pour la fonction publique comme pour le secteur privé, les mesures proposées pour faire face au défi du vieillissement de la population et à la dégradation du rapport antre actifs et cotisants, sont prioritairement démographiques .

Votre rapporteur pour avis ne revient pas sur ces mesures présentées dans la première partie du présent rapport. Il précise que tous les agents publics sont concernés (fonctionnaires civils et militaires, catégories « sédentaires » et « actives », titulaires et non-titulaires), à l'exception des personnels infirmiers et paramédicaux optant pour leur intégration dans les nouveaux corps de catégorie A , en application de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

La question de l'impact de la présente réforme sur les régimes spéciaux de retraite sera analysée dans la suite du présent rapport.

B. UN PAS DE PLUS, MAIS PROGRESSIF, VERS LA CONVERGENCE PUBLIC-PRIVÉ

Surtout, dans la continuité des mesures prises dans le cadre de la réforme de 2003, le présent projet de loi propose plusieurs dispositifs tendant à rapprocher les règles applicables dans le secteur privé et le secteur public . Ces dispositions peuvent être regroupées en cinq catégories :

- la réflexion sur la mise en place d'une caisse de retraite des fonctionnaires d'Etat ;

- la convergence des efforts contributifs (taux de cotisation) ;

- les modalités d'attribution des minima de pensions (minimum garanti et minimum contributif) ;

- les droits familiaux (départ anticipé pour les parents de trois enfants, majoration pour conjoint à charge) ;

- les bonifications de durée d'assurance ;

- les difficultés rencontrées par les polypensionnés, notamment les « titulaires sans droit à pension ».

1. Une réflexion sur la mise en place d'une caisse de retraite des fonctionnaires (article 21 A)

A l'initiative de notre collègue député Denis Jacquat, rapporteur, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté un amendement portant article additionnel (article 21 A) tendant à prévoir la remise, avant le 30 septembre 2011, d'un rapport au Parlement relatif à la création d'une Caisse de retraite des fonctionnaires de l'Etat . Ce rapport doit notamment examiner les contraintes organiques encadrant une telle création, les améliorations attendues en termes de transparence du système de retraite et les conditions d'une participation des partenaires sociaux à la gestion de cet établissement public.

Tout en accueillant favorablement l'étude des éventuels avantages qu'entraînerait la création d'une caisse de retraite pour les fonctionnaires d'Etat, votre rapporteur pour avis note cependant que :

1) des progrès importants ont déjà été réalisés en matière de transparence et de rationalisation de la gestion des pensions, notamment grâce à la LOLF et à la Révision générale des politiques publiques (RGPP) ;

Des progrès déjà tangibles en matière de transparence et un premier pas en vue d'une rationalisation de la gestion des pensions

Deux arguments sont le plus souvent avancés pour justifier la création d'une caisse de retraite pour la fonction publique : plus de transparence dans le financement des retraites des fonctionnaires et une économie de frais de gestion. Force est de constater que, de ce point de vue, la LOLF , d'une part, et la révision générale des politiques publiques (RGPP), d'autre part, ont déjà apporté des premiers éléments de réponse .


• La création du CAS « Pensions »

Comme l'ont en effet souligné Philippe Josse, directeur du budget, et Jean-Yves Raude, trésorier payeur général, directeur du service des retraites de l'Etat, devant votre commission des finances 27 ( * ) , la création du CAS « Pensions » depuis la LOLF a constitué un progrès important en termes de lisibilité puisque sont désormais centralisées les recettes et les dépenses de pensions qui étaient jusqu'alors réparties entre les différents budgets ministériels. Il permet en outre de connaître le taux de contribution de l'Etat employeur puisque celui-ci est fixé par décret.

Par ailleurs, le rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé chaque année au projet de loi de finances, recense un nombre assez important de données statistiques.


Le Service des retraites de l'Etat et la réforme de la gestion des pensions

Quant à la rationalisation de la gestion des pensions de l'Etat, plusieurs mesures ont été décidées à la suite des recommandations du conseil de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007 :

- la constitution du compte individuel retraite (CIR) de chaque fonctionnaire, permettant, au delà du droit à l'information sur la retraite, un enregistrement de leurs droits à retraite au fur et à mesure de leur carrière ;

- à l'horizon 2011-2012, le passage à un « processus industrialisé » de liquidation des pensions reposant sur le CIR qui permettra de dégager des gains de productivité importants, à hauteur de 1 200 équivalents temps plein (ETP) pour l'ensemble des administrations concernées ;

- la fusion du service des pensions et des centres régionaux des pensions dans une entité unique.

Sur ce dernier point, le Conseil de modernisation des politiques publiques ne tranchait pas la question de la forme que devait prendre cette entité unique : service à compétence nationale ou caisse de retraite de l'Etat. A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2009 devant le Sénat, le 28 novembre 2008, le Ministre du budget a annoncé la création d'un service à compétence nationale rattaché à la direction générale des finances publiques ( DGFiP) , réunissant le service des pensions et les centres régionaux des pensions recentrés et reconfigurés , ainsi que la constitution d'un comité stratégique animé par la DGFiP, associant les ministères, chargé de mettre en oeuvre les grandes orientations et de veiller à l'effectivité des gains de productivité attendus.

2) la transformation immédiate du service des pensions en caisse de retraite se heurterait au problème de la diversité des statuts des agents ;

3) enfin, les partenaires sociaux ne semblent pas souhaiter siéger au conseil d'administration d'une telle caisse .

En réalité, davantage que la création d'une caisse de retraite pour les fonctionnaires de l'Etat, c'est, à terme, la mise en oeuvre d'une caisse unique pour l'ensemble des fonctionnaires, y compris territoriaux et hospitaliers, qui devrait être recherchée. Outre le gain de lisibilité que l'on serait en droit d'en attendre, ce rapprochement permettrait de palier la diversité des régimes actuels et pourrait conduire, sans aucun doute, à des économies de frais de gestion.

2. Un alignement des taux de cotisation (article 21)
a) Aujourd'hui, des taux de cotisation « faciaux » différents

Les taux de cotisation globaux des salariés du secteur privé , des artisans, des commerçants, des professions libérales et des fonctionnaires des trois fonctions publiques varient considérablement , comme le montre le tableau ci-après.

Cette disparité est encore plus grande lorsque l'on affine leur analyse par catégories professionnelles (cadres / non cadres), par tranche de revenu considérée (en-dessous ou au-dessus du plafond de la sécurité sociale) ou encore en distinguant les taux de cotisation des régimes de base et des régimes complémentaires.

Taux de cotisation « salarié » en 2009

Secteur privé

Régime de base

Régime(s) complémentaire(s)

Total

Non-cadres

(CNAV+ARRCO)

6,65 % (s = PSS)

+ 0,1 %

3,8 %(s = PSS)

+8,9 %(PSS < s = 3 PSS)

10,55 % (s= PSS)

+9 % (PSS < s = 3 PSS)

+0,1 % (s > 3 PSS)

Cadres

(CNAV+ARRCO+AGIRC)

6,65 % (s = PSS)

+ 0,1 %

3,83 %(s = PSS)

+8,73 %(PSS < s = 8 PSS)

10,58 % (s = PSS)

+8,83 % (PSS < s = 8 PSS)

+0,1 % (s > 8 PSS)

Non-titulaires de la fonction publique (CNAV+IRCANTEC)

6,65 % (s = PSS)

+ 0,1 %

2,25 % (s = PSS)

+5,95 %(PSS < s = 8 PSS)

9 % (s = PSS)

+6,05 % (PSS < s = 8 PSS)

+0,1 % (s > 8 PSS)

Artisans

16,65 % (r = PSS)

7 % (r = 4 PSS)

23,65 % (r = PSS)

+7 % (PSS < r = 4 PSS)

Commerçants

16,65 % (r = PSS)

6,5 % (r = 3 PSS)

23,65 % (r = PSS)

+6,5 % (PSS < r = 3 PSS)

Professions libérales

8,6 % (r = 0,85PSS)

+1,6 %(0,85PSS<r=5 PSS)

Variable selon les sections professionnelles

Variable selon les sections professionnelles

Secteur public

Régime intégré

Régime additionnel

Fonction publique d'Etat

7,85 %

5 %

dans la limite de 20 % du traitement brut indiciaire

CNRACL

7,85 %

5 %

dans la limite de 20 % du traitement brut indiciaire

PSS : Plafond de la sécurité sociale ; s : tranche de salaire servant d'assiette aux cotisations ; r : tranche de revenu servant d'assiette aux cotisations.

Source : d'après les données du COR - « Comparaison des taux de cotisation dans les différents régimes » - juin 2009

Parmi l'ensemble de ces taux en vigueur, deux sont couramment retenus dans le débat public : 10,55 % pour les salariés du secteur privé et 7,85 % pour les fonctionnaires, bien que ces deux taux ne recouvrent pas exactement le même périmètre .

De façon précise, ils correspondent respectivement :

- au taux de cotisation au régime de base et aux régimes complémentaires des non-cadres , pour la part plafonnée de leur salaire (tranche du salaire en dessous du plafond de la sécurité sociale) ;

- au taux de cotisation des fonctionnaires des trois fonctions publiques appliqué à leur seul traitement indiciaire , hors primes. Il ne prend pas en compte le taux de cotisation au régime additionnel de la fonction publique, soit 5 % appliqué aux primes dans la limite de 20 % du traitement brut indiciaire.

b) Vers un taux identique

L' article 21 du présent projet de loi propose de porter progressivement le taux de cotisation en vigueur dans la fonction publique (pour la partie correspondant au traitement indiciaire) à 10,55 % , au lieu de 7,85 % aujourd'hui.

Cependant, la fixation du taux de retenue sur pension relevant du domaine réglementaire, l' article 21 du présent projet de loi ne fixe pas directement un taux nominal. En effet, l'article L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose que : « La couverture des charges résultant, pour l'Etat, de la constitution et du service des pensions prévues par le présent code et les lois et règlements en vigueur ainsi que des dispositions du code de la sécurité sociale applicables aux régimes spéciaux d'assurance vieillesse est assurée par : [...] 2° Une cotisation à la charge des agents [...], assise sur les sommes payées à ces agents à titre de traitement ou de solde, à l'exclusion d'indemnités de toute nature, dont le taux est fixé par décret [...] ». L'article 1 er du décret n° 2006-391 du 30 mars 2006 fixe ce taux à 7,85 %. Quant aux fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, l'article 3 du décret n° 2007-173 du 7 février 2007 relatif à la CNRACL renvoie à un autre texte, le décret n° 91-613 du 28 juin 1991, la détermination de cette contribution, également fixée à 7,85 %.

L' article 21 complète ainsi l'article précité L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite en précisant que le taux de retenue sur pension des fonctionnaires d'Etat « prend en considération » les taux de cotisations à la charge des assurés sociaux relevant de la CNAV et des institutions de retraite complémentaires (ARRCO et AGIRC) pour leur partie inférieure au plafond de la sécurité sociale , soit 10,55 %, comme cela a été précisé précédemment.

Interrogé sur le caractère peu normatif de l'expression retenue « prend en considération », le ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique a indiqué à votre rapporteur pour avis qu'il était difficile d'envisager une rédaction plus contraignante. Un lien fixe entre les taux de cotisation des deux secteurs aurait pour conséquence de faire dépendre le taux de retenue sur pension de taux de cotisations fixés par les partenaires sociaux - dans le cadre des régimes complémentaires.

Selon les données du Gouvernement, l'augmentation du taux de cotisation des fonctionnaires, qui interviendra par décret, sera progressive, à hauteur de 0,27 point par an sur dix ans , soit, selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, un surcoût de cotisation de 6 euros par mois, chaque année, pendant 10 ans pour une rémunération de 2 000 euros.

Alignement progressif du taux de cotisation dans la fonction publique (2010-2020)

(en %)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

7,85

8,12

8,39

8,66

8,93

9,20

9,47

9,74

10,01

10,28

10,55

Source : d'après les données de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi

L'impact de cette mesure est évalué à 1,4 milliard d'euros en 2015 , à raison de 730 millions d'euros d'économies pour l'Etat et 650 millions d'euros pour la CNRACL.

Rendement de la mesure

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Rendement total

0,3

0,6

0,9

1,1

1,4

1,8

2,1

2,4

2,7

3

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

c) Un alignement « optique » ?

Votre rapporteur pour avis appelle de ses voeux un rapprochement des règles applicables dans les différents régimes de retraite, et notamment entre le secteur privé et le secteur public. Ce rapprochement est nécessaire pour des raisons, tout à la fois, d'équité, de lisibilité et de simplification.

Cependant, il souhaite attirer l'attention sur les limites des dispositions proposées par l'article 21 du présent projet de loi. Pour simple et lisible qu'il paraisse, l'alignement des taux de cotisation dans le secteur privé et le secteur public n'est que « facial » dans la mesure où il ne s'applique pas à la même base et ne recouvre pas les mêmes périmètres :

- premièrement, le taux de 10,55 % dans le secteur privé correspond au taux de cotisation des non-cadres, alors qu'il s'appliquera à l'ensemble des catégories (A, B, C) dans la fonction publique ;

- deuxièmement, l'assiette de ce taux de cotisation correspond dans le secteur privé au salaire brut du salarié, tandis qu'elle correspondra au seul traitement brut, hors prime, dans la fonction publique. Le taux d'effort sera donc plus important chez les agents recevant peu de primes proportionnellement à leur traitement ;

- enfin, les plafonds d'assiette existants aujourd'hui pour les régimes de base et les régimes complémentaires ne s'appliqueront pas dans la fonction publique.

De façon plus générale, comme l'ont souligné les travaux du COR 28 ( * ) , la nature des cotisations et le périmètre des charges financées par celles-ci sont également très différents dans les deux secteurs, ce qui biaise toute comparaison :

- le taux de cotisation de l'Etat employeur est en réalité fictif, il correspond en fait à une subvention d'équilibre ;

- les régimes de la fonction publique couvrent non seulement le risque vieillesse mais également le risque d'invalidité avant l'âge de soixante ans, ce qui n'est pas le cas des régimes de retraite du secteur privé ;

- enfin, dans la plupart des régimes, les charges vieillesse sont partiellement financées par des recettes complémentaires, notamment par le biais du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Autrement dit, une comparaison simpliste des taux de cotisation - et a fortiori un alignement strict des taux de cotisation - est assez peu pertinente et ne rend pas compte de l'effort contributif réel de chaque assuré .

Pour rendre comparable les taux d'effort, c'est-à-dire le rapport entre le taux de cotisation et le montant de la pension, il serait non seulement nécessaire de corriger les taux de cotisation des différents écarts d'assiette et de périmètre précédemment constatés, mais également de tenir compte des modalités de calcul du montant de la retraite, très différentes d'un régime à l'autre (assiette, taux de remplacement, salaire de référence). Or, aucune étude actualisée n'est disponible aujourd'hui sur ce sujet.

La question n'est finalement pas tant, en la matière, l'alignement strict des règles juridiques, que de savoir comment se traduisent concrètement les inégalités de droit actuelles . L'application de mêmes règles à des populations aux caractéristiques très différentes en termes de catégories socioprofessionnelles ou de profils de carrière, peut d'ailleurs aboutir à des résultats très différents.

En revanche, dans une logique de partage du financement entre cotisations « salariales » et cotisations « employeur », l'augmentation du taux de retenue sur pension des fonctionnaires devrait permettre une moindre augmentation de la cotisation de l'Etat-employeur qui, comme cela a été souligné, augmente mécaniquement chaque année.

Partage du financement entre cotisations « salariales » et cotisations « employeur » dans le secteur privé et dans la fonction publique en 2005

(en %)

Cotisations

« salariales »

Cotisations « Employeur »

Fonction publique d'Etat

12,8

87,2

CNRACL

22,3

77,7

Régime général

44,4

55,6

AGIRC

38,0

62,0

ARRCO

40,0

60,0

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

3. Une étape dans la réforme des droits familiaux

Les droits familiaux et conjugaux sont le deuxième chantier de convergence inter-régimes choisi par le Gouvernement.

Votre rapporteur pour avis approuve les deux mesures proposées dans ce cadre , l'une relative à la fonction publique - la suppression du départ anticipé des fonctionnaires, parents de trois enfants après quinze ans de service -, l'autre au secteur privé - la disparition de la majoration de pension pour conjoint à charge introduite par nos collègues députés. Elles n'exonèrent cependant pas d'une réflexion plus approfondie sur les droits familiaux et conjugaux, encore très divers d'un régime à l'autre.

a) Dans la fonction publique : la suppression du départ anticipé des fonctionnaires parents de trois enfants après quinze ans de service (article 23)
(1) Un dispositif qui présente aujourd'hui certaines limites

Dans les trois fonctions publiques, les mères - et, depuis le 30 décembre 2004, les pères - ayant eu au moins trois enfants , ou ayant un enfant de plus d'un an avec une invalidité de 80 %, peuvent prendre leur retraite, à tout âge, après quinze ans de service (article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite). Ce droit est subordonné à une condition de non-activité de deux mois au moment de la naissance ou de l'adoption de chacun des enfants.

En 2008, 6 446 départs anticipés à la retraite de parents de trois enfants ont été enregistrés dans la fonction publique civile d'Etat , soit 7,9 % des départs à la retraite des fonctionnaires civils ; 3 633 dans la fonction publique territoriale (11,1 % des départs à la retraite) ; 5 902 dans la fonction publique hospitalière (19,8 % des départs à la retraite).

Départs anticipés à la retraite de parents ayant trois enfants

Fonctionnaires civils

Fonctionnaires militaires

Fonctionnaires territoriaux

Fonctionnaires hospitaliers

Nombre de départs

6 446

2 496

3 633

5 902

Part des départs (en %)

7,9 %

20,1 %

11,1 %

19,8 %

Age moyen

53 ans 1 mois

50 ans 10 mois

54,1 ans

50,8 ans

Durée totale

29 ans 7 mois

36 ans 9 mois

23 ans 11 mois

26 ans 7 mois

Services effectifs

26 ans 8 mois

30 ans 1 mois

22 ans 5 mois

24 ans 1 mois

Bonifications

2 ans 11 mois

6 ans 8 mois

1 an 6 mois

2 ans 6 mois

Montant mensuel moyen de la pension

1 646 euros

1 806 euros

1 069,8 euros

1 214,5 euros

Indice de liquidation

534

525

391,9

427,1

Taux de liquidation

58,5 %

71,3 %

47,3 %

52,7

Pensions avec majoration pour enfants

58,5 %

2,5 %

78,3 %

-

Taux de majoration pour enfants

7,9 %

4,9 %

11,4 %

11,1 %

Pensions portées au minimum garanti

18,4 %

46,6 %

62,1 %

35,8 %

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

Ce dispositif est aujourd'hui contesté à plusieurs titres :

1) Son objectif « nataliste » est, tout d'abord, remis en cause : en l'absence de conditions d'âge, cette mesure peut en effet bénéficier aux assurés à un moment où ils ont la charge, totale ou partielle, de leurs enfants, mais également à un moment où ils n'ont plus la charge d'enfants en bas âge. L'âge moyen de départ anticipé en retraite est ainsi de 53 ans et un mois dans la fonction publique d'Etat.

Par ailleurs, créé en 1924, ce dispositif a depuis lors été complété par d'autres mécanismes à vocation « nataliste » : les allocations familiales, le supplément familial de traitement, le temps partiel de droit rémunéré au-delà de la quotité de travail, les majorations de pension pour chacun des parents au titre des trois enfants, les majorations d'assurance pour chacun des enfants.

2) Ce dispositif est, en réalité, aujourd'hui davantage utilisé comme un instrument de reconversion professionnelle dans le cadre du cumul emploi-retraite ou comme un départ en retraite anticipé : or, ce faisant, ce dispositif tend à réduire le taux d'emploi des seniors et le taux d'activité féminin.

Par ailleurs, les fonctionnaires concernés, effectuant des carrières par définition plus courtes, bénéficient de taux de liquidation inférieurs à celui des individus partant en retraite sans ce dispositif. Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, pour les mères de trois enfants parties en retraite en 2008, l'écart de pension entre celles qui ont effectivement bénéficié du dispositif et les autres est ainsi de 20 % dans la fonction publique d'Etat et de 14 % pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.

3) Il est, enfin, contraire au principe d'équité vis-à-vis des assurés relevant de régimes différents - puisqu'un tel dispositif n'existe que dans la fonction publique et certains régimes spéciaux -, ainsi qu'entre assurés d'un même régime . En effet, les conditions de liquidation de la pension applicables étant celles qui prévalaient au moment de l'ouverture des droits, une mère de trois enfants, atteignant 15 ans de service en 2002 et qui poursuit son activité, liquidera à terme sa pension selon la législation en vigueur en 2002. De fait, les agents vérifiant les conditions d'un départ anticipé, avant la réforme de 2003, ne sont pas soumis à l'allongement de la durée d'assurance et à la progression du taux de décote, applicables en fonction de l'année de naissance pour les autres agents. Il s'en suit un important « effet d'aubaine ».

(2) Une phase de transition large

Le I et le II de l' article 23 du présent projet de loi suppriment ainsi, dans la fonction publique civile et militaire, le dispositif de départ anticipé à la retraite pour les parents de trois enfants ayant effectué 15 ans de service et ayant interrompu leur activité à l'occasion de la naissance ou de l'éducation de l'enfant.

En revanche, la possibilité, pour les parents d'un enfant handicapé à 80 %, de partir à la retraite de façon anticipée est conservée.

Le III et le IV de l' article 23 fixent les modalités de la période transitoire avant la disparition de ce droit :


• le III maintient le dispositif pour les fonctionnaires civiles et militaires qui en auront rempli les conditions (trois enfants, 15 ans de services et interruption d'activité) avant le 1 er janvier 2012 ;


• parmi ces personnels qui pourront continuer à partir à la retraite au titre de ce régime, le IV distingue pour l'application des règles de durée d'assurance et de décote et, dans le but de limiter les effets d'aubaine :

- d'une part, les fonctionnaires ayant déposé leur dossier avant le 1 er janvier 2011, sous réserve d'une radiation prenant effet au plus tard le 1 er juillet 2011 : ces derniers se verront appliquer les règles qui prévalaient au moment où ils ont rempli les conditions du départ anticipé. Ainsi une femme qui dépose son dossier avant le 31 décembre 2010 et a rempli les conditions de départ en 2003 partira sans décote. Une femme qui a rempli les conditions de départ en 2008 et dépose son dossier avant le 31 décembre 2010 se verra appliquer une décote. La condition, par ailleurs prévue, d'une radiation au plus tard le 1 er juillet 2011 tend à éviter le dépôt de dossiers avant le 1 er janvier 2011 pour une liquidation beaucoup plus tardive ;

- d'autre part, les fonctionnaires ayant déposé leur dossier après le 1 er janvier 2011 : ces derniers se verront appliquer les règles de liquidation relative à leur génération. Ainsi, par exemple, un fonctionnaire âgé de 51 ans ayant réuni les conditions de départ anticipé en retraite en 2010, qui dépose son dossier après le 1 er janvier 2011, partira selon les règles de durée d'assurance et de taux de décote qui s'appliqueraient au moment où il aurait 60 ans, soit 2019.

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à étendre le bénéfice de la première modalité transitoire, en prévoyant que tous les agents qui ont atteint ou dépassé l'âge d'ouverture des droits à la retraite de leur corps ou cadre d'emploi, ainsi que ceux qui sont à moins de cinq ans de leur âge d'ouverture des droits à la retraite, conservent le bénéfice des règles de calcul de la durée d'assurance et de la décote antérieures à la réforme. Ils bénéficient également des règles de calcul du minimum garanti en vigueur avant la présente réforme.

Le V de l'article 23, introduit à l'initiative de notre collègue député Laurent Hénart, prévoit que les services administratifs compétents informent, avant le 31 décembre 2010, les fonctionnaires civils et militaires ayant accompli quinze années de service et parents de trois enfants avant le 1 er janvier 2012 du changement des règles de départ anticipé en retraite.

Compte tenu de l'extension des modalités transitoires du dispositif, l'économie attendue de cette mesure serait de 400 millions d'euros en 2016 et de 600 millions d'euros en 2018.

Rendement de la mesure avant et après le vote de l'Assemblée nationale

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Rendement avant débat à l'Assemblée nationale

0,1

0,2

0,4

0,6

0,6

0,9

0,9

0,9

0,9

0,9

Coût de l'extension de la période transitoire

-0,2

-0,5

-0,5

-0,6

-0,6

-0,5

-0,3

-0,3

-0,3

-0,1

Rendement après débat à l'Assemblée nationale

-0,1

-0,3

-0,1

0,0

0,0

0,4

0,6

0,6

0,6

0,8

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

b) Dans le secteur privé : la suppression de la majoration de pension pour conjoint à charge (article 24 quater)

A « l'inverse », l' article 24 quater, introduit à l'initiative de notre collègue député Laurent Hénart, rapporteur pour avis de la commission des finances, tend à supprimer la pension pour conjoint à charge créée par la loi du 23 août 1948 portant modification du régime de l'assurance vieillesse et proposée dans le régime général et ses régimes alignés, mais pas dans la fonction publique .

Cette majoration est accordée au titulaire d'une pension si son conjoint a plus de 65 ans et n'est pas titulaire d'une pension, rente ou allocation.

Elle est, par ailleurs, attribuée sous condition de ressources personnelles du conjoint à charge, sans que soient prises en compte les ressources du ménage , ce qui peut entraîner certains biais . En effet, la majoration pour conjoint à charge peut être accordée à un ménage disposant de ressources suffisamment élevées dès lors que le conjoint n'exerce pas d'activité professionnelle alors qu'elle est refusée à des ménages de condition modeste lorsque le conjoint a dû travailler pour améliorer la situation économique de sa famille.

Dans le régime général, son montant maximal est fixé à 610 euros par an et a été gelé à ce niveau depuis 1977. Son coût a été évalué à 60 millions d'euros pour le régime général par la commission des comptes de la sécurité sociale, dans son rapport d'octobre 2010.

L' article 24 quater prévoit ainsi la suppression de ce dispositif à compter du 1 er janvier 2011. Elle est cependant maintenue pour les pensionnés qui en bénéficieront au 31 décembre 2010 et qui continueront d'en remplir les conditions .

c) Une nécessaire réflexion plus approfondie sur les droits familiaux

Comme votre rapporteur pour avis l'a déjà indiqué, il accueille favorablement ces deux dispositifs qui, dans une logique de convergence, suppriment deux dispositifs existants soit dans la seule fonction publique, soit dans le seul régime général et les régimes alignés .

Cependant, ces deux mesures ne résolvent pas la question de la grande diversité des droits familiaux qui prévaut en matière de retraite . Comme le précisait le COR, dans son rapport de décembre 2008 « Retraites : droits familiaux et conjugaux », à l'exception de l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), les droits familiaux dépendent du régime d'affiliation des assurés :

- en règle générale, des majorations de durée d'assurance sont prévues dans les régimes de base, mais pas dans la plupart des régimes complémentaires ;

- les majorations de pensions pour trois enfants et plus existent dans tous les régimes, excepté dans le régime de base des professions libérales et le régime additionnel de la fonction publique, lequel n'accorde aucun droit familial. Les taux de majoration varient cependant largement d'un régime à l'autre ;

- les majorations pour enfant à charge sont, quant à elle, propres à l'ARRCO.

Source : COR, « Retraites : droits familiaux et conjugaux », décembre 2008

Une nouvelle fois, votre rapporteur pour avis conçoit que l'égalité de traitement ne passe nécessairement par l'application de règles identiques. Cependant, la diversité des règles en vigueur nuit à la lisibilité du système et à sa compréhension par les assurés. Elle peut également entraîner des incohérences , comme le soulignait la Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2009 sur la sécurité sociale, s'agissant de la majoration de durée d'assurance (MDA) et de l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) : « dans un contexte qui s'est modifié, [les] ciblages respectifs [de la MDA et de l'AVPF] et leur cohérence semblent désormais problématiques. Chacun de ces dispositifs induit des effets négatifs croissants : désincitation au travail des femmes après soixante ans, surtout pour la MDA, illisibilité sans redéfinition des objectifs poursuivis pour l'AVPF ».

C'est pourquoi une réflexion d'ensemble des droits familiaux, mais également conjugaux - qui prend notamment la forme de versement de pensions de réversion (cf. infra ) - doit être menée , ceci d'autant plus, comme le soulignait le COR dans son rapport précité, que « la France se trouve en la matière confrontée aux développements d'un droit et d'une jurisprudence communautaires qui mettent en oeuvre le principe d'égalité de traitement entre les hommes et les femmes, selon une logique assez profondément étrangère à la conception française traditionnelle ». Le droit communautaire avait notamment été à l'origine de la réforme de la MDA, intervenue dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 29 ( * ) .

4. La convergence du mode d'attribution du minimum  garanti dans la fonction publique et du minimum contributif du régime général (article 24)
a) Un mode d'attribution du minimum garanti plus favorable par rapport à celui du minimum contributif

La loi précitée du 21 août 2003 portant réforme des retraites a posé l'objectif d'un taux de remplacement de 85 % du SMIC net pour un assuré ayant accompli une carrière complète, cotisée au SMIC et à temps plein . Ce principe s'applique aussi bien aux salariés du secteur privé qu'aux fonctionnaires. Cependant, les mécanismes devant permettre de remplir cet objectif - le « minimum contributif » dans le secteur privé et le « minimum garanti » dans le secteur public - diffèrent tant dans leur mode d'attribution que dans leur montant .

(1) Le minimum contributif

L'article L. 351-10 du code de la sécurité sociale dispose ainsi que la pension de vieillesse au taux plein est assortie , le cas échéant, d'une majoration permettant de porter cette prestation, lors de sa liquidation, à un montant minimum tenant compte de la durée d'assurance accomplie par l'assuré dans le régime général, le cas échéant rapportée à la durée d'assurance accomplie tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, lorsque la carrière a été complète.

Il est précisé que ce montant minimum est majoré au titre des seules périodes ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré (durée cotisée et non uniquement validée). Ce complément apporté au minimum contributif « de base » s'intègre dans l'objectif d'un taux de remplacement de 85 % du SMIC net en cas de carrière complète, posé par l'article 26 de la loi précitée portant réforme des retraites, et est proportionnel au nombre de trimestres effectivement travaillés.

La majoration pour enfants, la majoration pour conjoint à charge et la rente des retraites ouvrières et paysannes s'ajoutent à ce montant minimum.

A la suite des critiques émises par la Cour des comptes 30 ( * ) sur le manque de ciblage du minimum contributif, l'article 80 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 en a durci les conditions d'octroi :

- en instaurant, à compter du 1 er janvier 2009, une limite à la majoration au titre des périodes ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré : elle ne s'applique plus que lorsque la durée d'assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré, accomplie tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, est au moins égale à une limite fixée par décret, soit 30 annuités ;

- en mettant sous condition de revenu la majoration de minimum contributif, à compter du 1 er juillet 2010 : celui-ci est versé sous réserve que le montant mensuel total des pensions personnelles de retraite attribuées à l'assuré n'excède pas un montant fixé par décret. Cette mesure se heurte à des difficultés techniques de telle sorte que le décret n'est pas encore paru. Ce montant devrait être fixé à 990 euros par mois.

Si le montant du minimum contributif de base est indexé, comme les pensions vieillesse, sur l'évolution des prix, le montant de la majoration du minimum contributif a fait l'objet de plusieurs revalorisations aux 1 er janvier 2004, 2006 et 2008.

Au 1 er avril 2010, le montant du minimum contributif était de 595,64 euros et de 650,87 pour le minimum majoré.

(2) Le minimum garanti

Comme le souligne le rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2010, l'objectif d'une pension minimale de 85 % du SMIC net pour une carrière complète posé par la loi du 21 aout 2003 « est atteint par essence » pour les fonctionnaires , compte tenu du barème spécifique du minimum garanti. Le montant du minimum garanti à taux plein représente en effet environ 100 % du SMIC net . Par ailleurs, cette estimation renvoie en fait à un cas théorique car la liquidation sur la base de l'indice terminal pour une carrière complète accomplie au sein du grade le moins élevé de la fonction publique aboutit à une pension supérieure au minimum garanti et ce dernier bénéficie de fait à de agents ayant eu une carrière incomplète dans la fonction publique.

Le principe du minimum garanti est simple : lors de la liquidation d'une pension, le service gestionnaire compare le montant de la pension calculée selon les règles de droit commun avec celui issu du calcul du minimum garanti . Le montant le plus favorable est retenu. Si, comme dans le secteur privé, le minimum garanti est réduit en proportion de la durée de cotisation validée, les fonctionnaires bénéficient de ce dispositif dès qu'ils atteignent l'âge d'ouverture des droits, sans condition de taux plein .

Le montant du minimum garanti est calculé en proportion d'un indice de référence , dont la valeur en euros a été constatée au 1 er janvier 2004 puis revalorisée chaque année conformément à l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac. Cet indice de référence, qui était l'indice majoré 216 pour les pensions liquidées en 2003, sera progressivement porté à l'indice majoré 227 pour les pensions liquidées en 2013, conformément aux dispositions de l'article 51 de la loi du 21 août 2003.

En contrepartie, la loi précitée prévoit que le taux plein du minimum garanti sera acquis pour une durée de service plus longue, passant progressivement de 25 à 40 ans entre 2007 et 2013.

Ainsi, au 1 er janvier 2013, le taux de liquidation obtenu après 15 ans de services correspondra à 57,5 % du montant maximum du minimum garanti. Il progressera ensuite de 2,5 points par an entre 15 et 30 ans de services et de 0,5 point par année supplémentaire au-delà et jusqu'à quarante années pour atteindre 100 %.

Minimum garanti et durée d'assurance

Source : COR, « Le minimum garanti dans les régimes de retraite de la fonction publique », juin 2006

Selon les données du rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, sur le flux des départs en retraite de 2008 dans la fonction publique d'Etat, 10,7 % des pensions civiles et 28,6 % des pensions militaires ont été portées au minimum garanti. Dans la fonction publique hospitalière, cette proportion s'est élevée à 27,4 % et à 46,3 % dans la fonction publique territoriale.

Comme le soulignent les travaux du COR  de juin 2006 31 ( * ) , le minimum garanti concerne principalement des agents ayant effectué des carrières courtes, les agents radiés des cadres de la fonction publique pour invalidité et les femmes qui présentent en moyenne des carrières plus courtes et des indices plus faibles (64 % du flux en 2005).

b) La modification des critères d'éligibilité au minimum garanti

Le I de l' article 24 procède à un rapprochement des règles applicables dans le secteur privé et la fonction publique en modifiant l'article L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite afin de subordonner le versement du minimum garanti à plusieurs conditions alternatives :

- disposer de la durée d'assurance nécessaire pour atteindre le taux plein ;

- avoir atteint la limite d'âge qui annule la décote ;

- liquider sa pension pour l'un des motifs suivants : mise à la retraite pour invalidité, départ anticipé pour les parents de trois enfants ou d'un enfant handicapé, infirmité ou maladie incurable du fonctionnaire ou de son conjoint ayant effectué 15 ans de services, retraite anticipée pour les fonctionnaires handicapés, mise à la retraite pour invalidité des militaires.

Le II et le III de l' article 24 fixent les modalités de transition de cette mesure :

- le II abaisse, de manière transitoire, et uniquement pour l'application du dispositif du minimum garanti, l'âge d'annulation de la décote afin que les agents qui ne remplissent aucune des nouvelles conditions posées par le I, compte tenu de la montée en charge de la durée d'assurance ou de l'âge d'annulation de la décote, puissent néanmoins bénéficier du minimum garanti à compter d'un âge inférieur à l'âge d'annulation de la décote ;

- le III décrit les conditions d'application dans le temps du nouveau dispositif. Il s'appliquera aux pensions liquidées à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. Une exception est cependant prévue pour les fonctionnaires civils et les magistrats qui auraient atteint, avant cette date, l'âge de liquidation qui leur est applicable en l'état actuel du droit.

Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, cette mesure devrait permettre une économie en 2015 d'environ 500 millions d'euros , à hauteur de 140 millions d'euros pour l'Etat et de 350 millions d'euros pour la CNRACL.

Rendement de la mesure

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Rendement total

0

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,8

0,9

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

c) Un calcul du minimum garanti qui demeure non linéaire et un montant toujours plus élevé

Votre rapporteur pour avis accueille favorablement la subordination, comme dans le secteur privé, de l'attribution du minimum garanti à l'obtention d'une pension à taux plein .

Cependant, l'alignement sur le secteur privé n'est pas achevé ; d'autres particularités du minimum garanti mériteraient encore à terme d'être réexaminées :

- d'une part, le montant du minimum garanti est plus élevé - 1 067 euros - que celui du minimum contributif - 650,87 euros pour le minimum majoré au 1 er avril 2010 pour un objectif visé de 85 % du SMIC net soit 897 euros ;

- d'autre part, le calcul du minimum garanti n'est pas linéaire en fonction de la durée de cotisation ce qui peut avoir un caractère désincitatif . En effet, comme le souligne le COR 32 ( * ) : « Alors qu'un barème linéaire conduirait à accorder 2,5 % du minimum garanti pour chaque année de service (soit 100 % pour 40 ans), le dispositif mis en place par la loi de 2003 conduit à accorder un pourcentage plus élevé du minimum garanti pour chacune des premières années de service et, à l'inverse, un pourcentage plus faible pour les dernières années de la carrière (à partir de la 30 ème année dans le dispositif prévu à terme en 2013, il ne sera que de 0,5 %). Ce barème favorise les personnes, généralement polypensionnées, ayant eu une faible durée de cotisation dans un régime de la fonction publique. Il n'incite pas ceux qui ont validé une durée plus longue à prolonger leur activité dans la fonction publique au-delà de l'âge minimum de liquidation, compte tenu de sa faible progressivité . »

5. Un début de remise en cause du système de bonification (articles 24 bis A, 24 bis et 24 ter)

Les articles 24 bis A , 24 bis et 24 ter du présent projet de loi tendent à réexaminer, voire à remettre en cause, certaines bonifications dont bénéficient aujourd'hui certains fonctionnaires. Votre rapporteur pour avis rappelle que ces bonifications ont un impact à deux niveaux : d'une part, le calcul des droits acquis au sein d'un régime et, d'autre part, la mise en oeuvre des coefficients de minoration et de majoration des droits à la retraite en fonction de la durée d'assurance.

La Cour des comptes, dans son rapport public particulier d'avril 2003 sur les pensions des fonctionnaires civils de l'Etat, avait déjà attiré l'attention sur certains de ces dispositifs procurant des avantages en matière de retraite qui lui semblaient disproportionnés par rapport aux contraintes réellement subies par les fonctionnaires concernés .

a) Un réexamen des bonifications prévues à l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite (article 24 bis A)

L' article 24 bis A du présent projet de loi, introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Emile Blessig, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, tend ainsi à prévoir la remise au Parlement, avant le 31 mars 2011, d'un rapport sur les bonifications prévues à l'article L. 12 du codes des pensions civiles et militaires de retraite, soit :

- les bonifications de dépaysement pour les services civils rendus hors d'Europe ( cf. infra );

- les bonifications accordées pour enfants : pour chaque enfant né ou adopté avant le 1 er janvier 2004, sous réserve qu'il ait été élevé pendant neuf ans au moins avant son vingt et unième anniversaire, les fonctionnaires et militaires bénéficient d'une bonification d'un an ;

- les bonifications militaires : elles sont de différents ordres : les bénéfices de campagne dans le cas de services militaires, notamment pour services en mer et outre-mer ; la bonification pour l'exécution d'un service aérien ou sous-marin commandé ; la bonification du cinquième du temps de service accompli ;

- enfin, les bonifications accordées aux professeurs d'enseignement technique au titre du stage professionnel exigé pour avoir le droit de se présenter au concours par lequel ils ont été recrutés.

Ces bonifications permettent d'augmenter de 5 points le pourcentage maximum de liquidation de la pension.

b) La suppression des bonifications accordées à certains professeurs de l'enseignement technique (article 24 bis)

L' article 24 bis , introduit à l'initiative de notre collègue député Michel Heinrich, va plus loin en proposant de supprimer immédiatement l'une des bonifications prévues par l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, précédemment énumérées : les bonifications accordées à certains professeurs de l'enseignement technique . Cette mesure ne s'appliquera pas aux fonctionnaires recrutés avant le 1 er janvier 2011.

Cette bonification, introduite en 1964 dans le code des pensions civiles et militaires de retraite, est égale, dans la limite de cinq années, à la durée de l'activité professionnelle dans l'industrie dont les professeurs de l'enseignement technique ont dû justifier pour se présenter au concours. Ces années demeurent prises en compte dans la pension du régime général, ce qui aboutit à la prise en compte, exorbitante du droit commun, d'une même période de travail dans deux pensions différentes .

Certes, une politique volontariste de promotion de l'enseignement professionnel était alors nécessaire, et le statut des professeurs de l'enseignement technique n'était pas encore aligné sur celui des professeurs certifiés, tant en terme de rémunération (alignement en 1989), que d'horaires (alignement en 2000).

Dans son rapport précité de 2003, la Cour des comptes observe cependant que ce « dispositif daté et devenu injustifié (...) donne lieu à des demandes reconventionnelles visant à étendre cette mesure à l'ensemble des enseignants ayant à faire valoir une expérience professionnelle dans le secteur privé », qui sont de plus en plus nombreux dans l'enseignement général. Ainsi, « le maintien du statu quo paraît difficile ».

c) La modification des règles de surcote (article 24 ter)

L' article 24 ter , adoptée par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue Michel Heinrich, tend quant à lui à exclure du calcul de la surcote, dans les trois fonctions publiques (I et II) et le secteur privé (III), les bonifications de durée de services et les majorations de durée d'assurance, à l'exception de celles accordées au titre des enfants et du handicap .

Sous-amendé par le Gouvernement, cet article supprime également le plafonnement à vingt trimestres du coefficient de majoration, en vigueur dans la fonction publique, mais pas dans le régime général.

d) La pertinence des bonifications pour dépaysement

Votre rapporteur pour avis est favorable à ces différentes mesures relatives aux bonifications et à leur prise en compte dans le calcul de la surcote .

Pour votre rapporteur pour avis, il convient en effet de s'interroger sur le principe même du maintien de certains de ces dispositifs, compte tenu, notamment, des mesures trouvant déjà à s'appliquer durant la période d'activité pour pallier la perte de gain ou le désagrément subis par certains fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions.

Il souhaite, à cette occasion, rappeler les critiques fortes émises par la Cour des comptes en 2003 à l'égard de la bonification pour dépaysement, critiques qui pourront utilement être réexaminées à l'occasion de l'élaboration du rapport prévue par l'article 24 bis A .

Cette bonification, égale en règle générale au tiers de la durée des services civils accomplis hors d'Europe, constitue, rappelait la Cour, un dispositif « défini, dans ses grandes lignes, il y a un siècle et demi, soit à une époque où la France entendait assurer sa présence coloniale et où les moyens de transport et les modes de vie étaient sans rapport avec la situation actuelle » 33 ( * ) . La Cour ajoutait que tous les départements et territoires français d'outre-mer, bien que faisant partie du territoire national, sont considérés comme ouvrant droit à la bonification de dépaysement du seul fait de leur situation géographique « hors d'Europe » et surtout que le bénéfice de cette bonification est ouvert indistinctement à tout fonctionnaire y exerçant, les agents originaires de ces départements et territoires comme les autres.

Avant de remettre en cause le principe de ce dispositif, la Cour des comptes en préconisait un réaménagement complet, qui comprendrait, en particulier, un « ciblage géographique beaucoup plus strict excluant notamment les DOM et les TOM » et un plafonnement du nombre d'années susceptibles d'être acquises au titre de la bonification pour dépaysement.

6. Les « titulaires sans droits à pension » (article 24 quinquies)

L' article 24 quinquies du présent projet de loi, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, tend à répondre pour partie aux difficultés rencontrées par les « titulaires sans droit à pension » .

En effet, lorsqu'à la date de cessation définitive d'activité, le fonctionnaire ou le militaire n'a pas accompli 15 ans de services effectifs, il est affilié rétroactivement au régime général et à l'IRCANTEC dans le cadre d'une procédure de rétablissement comprenant à la fois le transfert des périodes d'assurance et le versement de cotisations rétroactives, part salariale et part employeur.

Comme le souligne le COR dans une étude de 2009 34 ( * ) , les difficultés posées par ce dispositif sont nombreuses :

- le processus est, tout d'abord, complexe : le rattachement au régime général d'un titulaire sans droit peut impliquer jusqu'à quatre acteurs : la dernière administration employeur, la CNRACL, le régime général et l'IRCANTEC ;

- la reconstitution de dossiers complets se traduit par des délais de traitement très longs ;

- le processus suscite, enfin, surtout une incompréhension chez les agents , liée aux appels de cotisations complémentaires de l'IRCANTEC et aux difficultés des titulaires sans droit à obtenir une estimation de leur future pension.

Depuis 2000, le flux annuel moyen des titulaires sans droit est d'environ 30 000 personnes . La carrière réalisée au sein des fonctions publiques par ces agents représente une durée moyenne de quatre ans. Il s'agit pour l'essentiel de fonctionnaires militaires et territoriaux .

En vue de faire le point sur les difficultés engendrées par ces transferts, le Gouvernement s'était engagé à installer un groupe de travail associant des représentants des fédérations syndicales ainsi que ceux des administrations concernées. Ce groupe de travail a été installé le 6 novembre 2008. Ses pré-conclusions, présentées dans les travaux du COR précités, retenaient plusieurs pistes de réforme :

- l'affiliation directe au régime général et à l'IRCANTEC pour certaines populations dont on sait qu'elles ne rempliront pas la condition de durée de stage (les réservistes, les entrées tardives dans la fonction publique) ;

- le transfert des périodes d'affiliation sans transfert de cotisations rétroactives ;

- la réduction de la condition de stage de quinze ans ;

- la suppression des transferts de droits et de cotisation : chaque régime conserve la charge de ses affiliés ;

- le financement par l'employeur des cotisations complémentaires dues par les salariés.

L' article 24 quinquies du présent projet de loi retient la réduction de la condition de stage .

Le I remplace ainsi la durée minimale de stage de 15 ans fixée par l'article L. 4 du code des pensions civiles et militaires de retraite par l'expression « une durée fixée par décret en Conseil d'Etat ». Selon l'exposé des motifs de l'amendement du Gouvernement, la durée minimale de carrière pour bénéficier d'une pension de fonctionnaire sera réduite à deux années par décret à compter du 1 er janvier 2011 .

Dès lors, les transferts de périodes d'assurance entre le régime de la fonction publique, d'une part, et le régime général, d'autre part, seront supprimés pour les périodes supérieures à deux ans et inférieures à quinze ans.

Le II précise que cette disposition ne s'appliquera qu'aux fonctionnaires radiés des cadres à compter du 1 er janvier 2011.

En « sens inverse », le III et le IV précisent, quant à eux, les modalités d'extinction progressive des transferts facultatifs de périodes validées au régime général dans le régime des fonctionnaires, en ce qui concerne les agents contractuels.

Le V ajoute que les bonifications prévues à l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ne peuvent être prises en compte dans le calcul de la durée de cotisation que si le fonctionnaire a effectué quinze ans de service.

Le VI - introduit par un sous-amendement de notre collègue député Michel Heinrich - prévoit que pour les fonctionnaires ayant effectué une durée de stage comprise entre deux et quinze ans, le calcul du minimum garanti pour cette nouvelle catégorie de pensions est effectué selon les mêmes modalités qu'au régime général.

Votre rapporteur pour avis approuve cette mesure qui devrait simplifier la situation des actuels « titulaires sans droit à pension », ainsi que celle des services des régimes concernés.

Selon les informations du secrétariat d'Etat à la fonction publique, cette mesure serait neutre financièrement à la fois d'un point de vue des comptes publics car elle opère des transferts de charges entre le régime général et le budget de l'Etat ; du point de vue de l'Etat également car la suppression des titulaires sans droits à pension entre 2 et 15 ans de service est compensée par la suppression, en sens inverse, des transferts de validation au titre des agents contractuels du régime général vers le régime des fonctionnaires, les flux représentants, chacun, 400 millions d'euros par an.

III. L'EXISTENCE DE MARGES DE PROGRESSION EN VUE D'UNE PLUS GRANDE ÉQUITÉ ENTRE COTISANTS

Les mesures proposées par le présent projet de loi, enrichies par les initiatives de nos collègues députés, permettent de franchir un pas supplémentaire vers la convergence. Cependant, des marges d'amélioration en vue d'une plus grande équité entre assurés demeurent.

En particulier, votre rapporteur pour avis regrette, d'une part, que les « catégories actives » de la fonction publique ne fassent pas l'objet d'un réexamen et, d'autre part, que la présente réforme ne doive s'appliquer que de façon différée aux régimes spéciaux de retraite .

A. DES INÉGALITÉS QUI DEMEURENT ENTRE LA FONCTION PUBLIQUE ET LE SECTEUR PRIVÉ

Outre les limites des dispositifs de convergence proposés par le présent projet de loi, votre rapporteur pour avis note que « trois chantiers » n'ont pas été abordés : la garantie d'un taux minimal de remplacement dans le secteur privé, les modalités d'attribution et de calcul des pensions de réversion et le réexamen des catégories dites « actives ».

1. Un « bouclier retraite » pour les salariés du secteur privé ?

Dans une perspective de convergence public/privé, votre rapporteur pour avis a été sensible à l'idée émise par Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la CNAV 35 ( * ) , devant votre commission des finances, d'instaurer un « bouclier retraite » pour les salariés du secteur privé, c'est-à-dire un taux de remplacement minimal garanti.

En effet, alors que la référence retenue par la CNAV se situe théoriquement, pour une carrière complète, à 50 % du plafond de la sécurité sociale, le taux de remplacement n'atteint en moyenne plus que 43 % du dernier salaire , sous l'effet combiné de l'indexation des pensions sur les prix et de la prise en compte des vingt-cinq meilleures années d'activité pour le calcul du salaire de référence.

Alors que les agents du secteur public savent très en amont quelle part de leur dernier salaire leur pension représentera (75 % de leur traitement indiciaire moyen des six derniers mois), les salariés du secteur privé n'ont en revanche aucun indicateur en ce domaine. La définition d'un niveau de pension minimal, en deçà duquel l'on ne pourrait descendre, serait sans doute de nature à rétablir une certaine équité public/privé.

2. Une refonte des règles de réversion

Si le présent projet de loi aborde la question des droits familiaux, il ne traite en revanche pas des droits conjugaux et notamment des pensions de réversion versées aux conjoints survivants. Ce domaine se caractérise lui aussi par une extrême diversité d'un régime à l'autre, qu'il s'agisse des taux de réversion ou des modalités d'attribution de ces pensions .

a) « Le caractère extrêmement touffu et complexe du cadre juridique de la réversion »

Comme le souligne le COR dans ses travaux de 2008, intitulés « retraites : droits familiaux et conjugaux » 36 ( * ) , les principales divergences entre régimes sont à rechercher à quatre niveaux :

- les taux de réversion qui varient de 50 % (dans la fonction publique) à 60 % (pour les régimes complémentaires ARRCO-AGIRC) ;

- les conditions de ressources qui sont prévues dans le régime général, les régimes alignés, le régime des exploitants agricoles et le régime des professions libérales, mais pas dans la fonction publique ;

- les conditions liées au mariage : si le remariage entraîne la perte de la pension dans la fonction publique, cela n'est pas le cas dans le régime général, les régimes alignés, le régime des exploitants agricoles et le régime des professions libérales ;

- les conditions d'âge : un âge minimal est requis dans la plupart des régimes, à l'exception de la fonction publique et des régimes spéciaux. Les seuils retenus sont cependant très variables d'un régime à l'autre.

Dans son rapport de mai 2007 sur la réversion 37 ( * ) , la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat dénonçait à la fois « le caractère extraordinairement touffu et complexe du cadre juridique de la réversion » et son « caractère profondément incohérent et inéquitable ». Elle préconisait alors une harmonisation, voire une unification progressive des règles en vigueur en la matière. Depuis lors, aucune réforme d'ampleur n'a été menée .

b) Vers une harmonisation des règles de réversion des régimes de fonctionnaires sur celles en vigueur dans le privé

Une convergence public/privé impliquerait d'étendre les règles en vigueur au niveau du régime général et des régimes complémentaires dans les régimes des fonctionnaires. Il convient de distinguer deux conditions :

- la condition d'âge de 55 ans en vigueur tant dans le régime général que dans les régimes complémentaires ;

- la condition de ressources.

Celle-ci est plus problématique puisqu'elle existe pour la pension de base (régime général), alors qu'elle est inexistante pour les régimes complémentaires. Une mise sous condition de ressources de l'ensemble des pensions de réversion dans la fonction publique dépasserait ainsi le simple alignement sur le secteur privé. Dès lors, la scission de la pension de réversion de la fonction publique en deux parts serait nécessaire pour assurer cette convergence .

Enfin, une harmonisation complète public/privé devrait s'accompagner d'un relèvement du taux de réversion du régime des fonctionnaires (50 %) sur ceux du régime général et des complémentaires (54 % et 60 %).

Votre rapporteur pour avis a demandé au ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique une simulation d'une telle réforme en trois temps, soit :

- la mise en place d'une condition d'âge de 55 ans (comme dans le régime général et les régimes complémentaires) ;

- l'introduction d'une condition de ressources sur une partie de la réversion (50 %) ;

- l'augmentation du taux de réversion du régime de la fonction publique de 50 % à 54 % pour la partie de la réversion placée sous condition de ressources (soit le même taux que dans le régime général) et à 60 % pour celle accordée sans conditions de ressources (soit le même taux que pour les régimes complémentaires).

Le rendement de la mesure a été évalué à 200 millions d'euros pour l'Etat en 2015 et à 20 millions d'euros pour la CNRACL .

Economies attendues d'une harmonisation des conditions de versement
des pensions de réversion

(en millions d'euros)

2015

2020

2030

2040

2050

Fonction publique d'Etat

200

440

1 050

1 320

1 560

CNRACL

20

40

50

100

110

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

En termes d'incidence, une telle mesure serait favorable aux veuves de fonctionnaires ayant de faibles ressources (en raison de la hausse du taux de réversion) et réduirait le montant de la réversion pour les veuves ayant des revenus moyens et supérieurs (en raison de la mise sous condition de ressources d'une partie de la réversion).

Pour votre rapporteur pour avis, il s'agit d'une piste de convergence à explorer.

3. Un réexamen des « catégories  actives » de la fonction publique

Certaines professions de la fonction publique sont classées en « catégorie active ». Il s'agit des emplois présentant « un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » (article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite). Les modalités de classement en catégorie active sont fixées :

- par décret en Conseil d'Etat pour les fonctionnaires de l'Etat en application de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- par arrêté interministériel pris après avis du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ou hospitalière.

Pour ces professions, l'âge d'ouverture des droits à la retraite peut être porté à 50 ou 55 ans .

Age d'ouverture des droits et limite d'âge des principaux emplois classés
en « catégorie active »

Emplois

Age d'ouverture des droits

Limite d'âge

Fonction publique d'Etat

Personnels actifs de la police nationale

50 ans si 25 ans de services

55 ans (1)

Personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire

Ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne

50 ans

57 ans

Personnels de la surveillance des douanes

55 ans

60 ans

Instituteurs (2)

Agents d'exploitation des travaux publics de l'Etat

Educateurs de la protection judiciaire de la jeunesse

Personnels paramédicaux des hôpitaux militaires

Contrôleurs des affaires maritimes et syndics des gens de mer (certains emplois)

55 ans

62 ans

Fonction publique territoriale

Agents des réseaux souterrains des égouts

50 ans

60 ans

Sapeurs pompiers professionnels

55 ans

Agents de salubrité

Agents de police municipale

Agents de surveillance de la préfecture de police

Agents d'entretien (certains emplois)

Agents techniques (certains emplois)

Fonction publique hospitalière

Personnels paramédicaux dont l'emploi comporte un contact direct et permanent avec des malades : surveillants, infirmiers, infirmiers spécialisés, aides soignants, agents de services hospitaliers, sages-femmes

55 ans

60 ans

Assistantes sociales dont l'emploi comporte un contact direct et permanent avec des malades

Puéricultrice en fonction dans les services de pédiatrie

Maîtres ouvriers et ouvriers professionnels (certaines fonctions)

Agents d'entretien (certaines fonctions)

Agents de service mortuaire et de désinfection

(1) 57 ans pour les commissaires et les commissaires principaux ; 58 ans pour les commissaires divisionnaires

(2) Corps mis en extinction par décret n° 2003-1262 du 23 décembre 2003.

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexe au projet de loi de finances pour 2010

Votre rapporteur pour avis a bien noté que les « catégories actives » sont concernées par les mesures d'âge prévues par le présent projet de loi . Néanmoins, il en résultera toujours, après réforme, un décalage de cinq à dix ans entre les âges d'ouverture des droits des catégories « actives » et les autres catégories de fonctionnaires.

Or ces avantages résultent principalement de situations historiques. Les conditions de travail de ces professions ont, pour certaines, fortement évolué depuis grâce aux progrès des normes de protection, à l'amélioration des équipements individuels et collectifs ou encore aux modifications de l'organisation du travail. A cet égard, selon les données du ministère du travail, l'espérance de vie des catégories « actives » est identique à celle des autres fonctionnaires .

C'est pourquoi, votre rapporteur pour avis souhaite que le débat sur la pénibilité qui, après la présente réforme, sera prise en compte dans le calcul des droits à la retraite des salariés du secteur privé, soit également l'occasion, du côté de la fonction publique, de procéder à un réexamen complet des actuelles catégories « actives » . Pour chacune d'elle, il conviendrait d'évaluer précisément l'impact sur l'espérance de vie de certains facteurs d'exposition auxquels ces agents peuvent être confrontés pendant leur période d'activité.

Afin de disposer d'un ordre de grandeur global des économies à attendre d'une révision des catégories « actives » de la fonction publique, votre rapporteur pour avis a demandé au ministère du travail de simuler les effets résultant de la fermeture dès 2011 de la possibilité de partir en retraite avant 60 ans en catégorie active . La mesure atteindrait son plein effet en 2015 et représenterait une économie globale de 1,2 milliard d'euros . Un réexamen au cas par cas serait bien évidemment nécessaire et réduirait d'autant les économies à attendre de cette mesure.

Rendement de la fermeture dès 2011 de la possibilité de partir en retraite
avant 60 ans en catégorie active

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

309

595

848

1 050

1 181

1 204

1 220

1 229

1 234

1 236

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

B. LES RÉGIMES SPÉCIAUX DE RETRAITE : L'IMPACT DIFFÉRÉ DE LA RÉFORME (ARTICLE 20)

1. Une mosaïque de régimes spéciaux en déséquilibre démographique et financier

Parmi les régimes de retraite de base 38 ( * ) , ceux communément désignés comme des « régimes spéciaux » couvrent pour l'essentiel les fonctionnaires et les salariés des entreprises publiques et, dans quelques cas, des salariés du secteur privé (marins, clercs et employés de notaires...). Les fonctionnaires de l'Etat, magistrats et militaires relèvent du service des retraites de l'Etat (SRE), et les fonctionnaires des collectivités territoriales et des établissements hospitaliers dépendent de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ; les effets de la réforme des retraites sur ces régimes spécifiques ont été étudiés plus haut.

Les autres principaux régimes spéciaux sont ceux des industries électriques et gazières (CNIEG), de la SNCF, de la RATP, des Mines, des ouvriers de l'État (FSPOEIE), de la Banque de France, de l'Opéra national de Paris et de la Comédie française. Un sort particulier leur est réservé, tant au regard des droits dont bénéficient les affiliés que des modalités de financement.

a) Les régimes de retraite dont l'équilibre financier est assuré par l'Etat

En premier lieu, l'Etat assure l'équilibre d'un ensemble de régimes spéciaux de retraite en déclin démographique, réunis au sein de la mission budgétaire « Régimes sociaux et de retraite » : SNCF, RATP, marins, mineurs, SEITA, Imprimerie nationale, régies ferroviaires d'outre-mer et ORTF.

Pour 2010, les contributions de l'Etat s'élèveront à 5,72 milliards d'euros , soit une progression de 10 % par rapport à 2009 (5,2 milliards d'euros). Ce budget soutient l'équilibre d'un ensemble hétéroclite de régimes sociaux et de retraite dans des proportions allant de 50 % à 100 % du montant des prestations d'assurance vieillesse. Le tableau ci-dessous retrace la part de la subvention de l'Etat dans le budget des principales caisses de retraites.

Part de la subvention de l'Etat dans le budget des principales caisses de retraite
relevant de la mission « Régimes sociaux et de retraite »

(en millions d'euros)

nombre de cotisants/
nombre de pensionnés

Volume de prestation de pensions servies

Subvention de l'Etat

Part de la subvention de l'Etat dans le régime

Retraités de la SEITA

1 083/10 071

160,10

132,38

83%

Régime de retraite des marins

32 900/119 000

1 081,32

792,50

73%

Caisse autonome de la SNCF

155 150/289 871

5 218,70

3 120,60

60%

Caisse autonome de la RATP

44 100/47 120

912,00

526,70

58%

Fonds de retraite des mines

6 430/335 137

1 765,50

971,60

55%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2010

En outre, les régimes de retraite de l'Imprimerie nationale (9 bénéficiaires 39 ( * ) ), des régies ferroviaires d'outre-mer (263 bénéficiaires) et de l'ORTF (350 bénéficiaires) ne comptent plus de cotisants et sont donc totalement subventionnés par l'Etat au titre de la solidarité nationale.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la mission « Régimes sociaux et de retraite » ne comprend pas l'ensemble des crédits de l'Etat affectés au financement des régimes spéciaux de retraite .

Sur ce point, la Cour des comptes a relevé que ces flux manquants, non répertoriés dans le « jaune » budgétaire consacré au « Bilan des relations financières entre l'Etat et la protection sociale », représentent près de 780 millions d'euros en 2010. C'est donc à juste titre que la Cour a recommandé que cette masse « très significative » de crédits soit mieux identifiée et soit, le cas échéant, intégrée à la mission « Régimes sociaux et de retraite » 40 ( * ) .

b) Les autres régimes spéciaux

Par ailleurs, les régimes spéciaux qui ne sont pas financés par le budget de l'Etat bénéficient de transferts au titre de la compensation ou de contributions directes du régime général pour assurer leur équilibre financier. Les montants des ressources externes de certains régimes sont parfois très élevés par rapport à leurs ressources propres (les cotisations). Le rapport annuel de la commission des comptes de la sécurité sociale permet ainsi de prendre la mesure de l'impact financier sur le régime général de l'adossement réalisé en 2005 des retraites des électriciens et gaziers : les transferts issus de la CNAV et de l'AGIRC-ARRCO en faveur de la CNIEG s'élèvent à près de 2,5 milliards d'euros, soit 62 % du montant des prestations vieillesse.

Autres régimes spéciaux (prévisions pour 2011 des branches vieillesse)

(en millions d'euros)

nombre de cotisants et de pensionnés

Volume de prestation de pensions servies

Compensation ou contributions

Part de subvention et transferts dans le régime

Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG)

138 756/162 509

3 975

2 474

(contributions directes CNAV et AGIRC-ARRCO)

62 %

Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN)

43 748/64 561

724

35

(compensation du régime général)

5 %

Caisse d'assurance vieillesse, invalidité et maladie des cultes (CAMIVAC)

14 650/56 832

220

156

(contribution directe de la CNAV)

71 %

Banque de France

12 884/15 375

418

319

(contribution fictive employeur)

76 %

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - septembre 2010

Ces éléments, glanés au hasard des différents rapports budgétaires et financiers de l'Etat et de la sécurité sociale, gagneraient en lisibilité si un document de synthèse retraçant l'intégralité de l'effort public en faveur des régimes spéciaux de retraite pouvait être mis à la disposition de la représentation nationale. De ce point de vue, votre rapporteur pour avis s'étonne qu'une telle démarche n'ait pas été entreprise par le Gouvernement dans le cadre de l'étude d'impact du présent projet de loi, même si - nous le verrons plus loin - celui-ci ne s'applique pas directement aux régimes spéciaux.

2. Un bilan provisoire de la première vague de réformes opérées en 2007 et 2008

De manière générale, l'âge d'ouverture des droits, dans les régimes spéciaux, est variable - de 40 à 60 ans - et diffère selon le métier exercé et l'ancienneté.

Les modifications entrées en vigueur le 1 er avril 2007 dans le régime de la Banque de France et le 1 er juillet 2008 dans six autres régimes spéciaux - SNCF, RATP, Opéra de Paris, Comédie française, Industries électriques et gazières, Clercs et employés de notaires - ont conduit à un rapprochement partiel des droits et à aligner progressivement, avec un décalage dans le temps, les barèmes de décote et de surcote sur ceux applicables dans la fonction publique et au régime général.

Toutefois, la réforme retenue en 2007 et 2008 pour les régimes spéciaux a maintenu le principe d'une spécificité des droits .

Les principaux paramètres de convergence de ces régimes avec ceux de la Fonction publique 41 ( * ) sont les suivants :

- passage de 37,5 à 40 ans (en 2012) puis à 41 ans (en 2016) de la durée d'assurance pour bénéficier d'une retraite à taux plein ;

- indexation des pensions sur les prix (et non plus sur les salaires) à compter de 2009 ;

- introduction d'une décote et d'une surcote ;

- suppression des bonifications (validations gratuites de trimestres) pour les nouveaux recrutements ;

- suppression des « clauses-couperets » c'est-à-dire de la mise à la retraite automatique des agents atteignant leur âge d'ouverture des droits à la retraite.

En revanche, une série de dispositions ont été maintenues , plus favorables que dans les autres régimes de base :

- les âges d'ouverture des droits (par exemple : 50 ans pour les agents de conduite et 55 ans pour les autres agents) ;

- le taux maximum de liquidation de la pension : 75 % pour une carrière complète, pouvant être porté à 80 % avec les bonifications ;

- le traitement de référence pour le calcul de la pension sur les éléments de rémunération des six derniers mois.

En 2009, le Gouvernement avait chiffré l'impact financier de cette réforme sur les comptes des régimes de retraite. Ces estimations mettaient en évidence un gain cumulé de 500 millions d'euros d'ici à 2012, puis des économies annuelles moyennes de 500 millions d'euros par an principalement pour les caisses de la SNCF et de la RATP.

Le principal effet de la réforme tient dans le fait que les agents ne sont plus mis à la retraite d'office à cinquante ou cinquante-cinq ans selon qu'ils sont conducteurs ou sédentaires. En conséquence, le nombre annuel de demandes de liquidation des droits à retraite à la SNCF a diminué à compter de 2008 : il est passé de 7 000 en 2007 à 5 800 en 2008 et à 4 800 en 2009 (au lieu de 7 700 initialement projetés cette année-là). Seulement 40 % des agents en droit de partir à la retraite en 2009 ont fait valoir ce droit. Les économies d'ores et déjà réalisées, de l'ordre de 75 millions d'euros, prennent également en compte une moindre revalorisation des pensions : 0,4 % au lieu de 1,5 % prévu dans le budget initial.

Mais s'il convient d'observer que le recul de l'âge de départ à la retraite des cheminots a représenté une économie en 2009 - et de s'en féliciter -, il apparaît encore hypothétique de présager du comportement des agents à l'avenir et des effets de rattrapage. A titre d'illustration, les perspectives d'évolution de la subvention de l'Etat, calculées par la caisse de retraite de la SNCF, s'inscrivent dans un mouvement de croissance du soutien public jusqu'en 2013, puis une très lente décroissance à partir de 2014 et 2015.

Malgré cet objectif à long et très long terme de la réduction du soutien public, votre rapporteur pour avis constate que le niveau de la contribution de l'Etat pour les retraites de la SNCF dépassera, chaque année, les trois milliards d'euros jusqu'en 2021. La réforme de 2008 ne répond assurément pas au défi du retour à l'équilibre des régimes spéciaux.

Les prévisions 2010-2030 de la caisse de retraite de la SNCF

(en millions d'euros courants)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2021

2030

Nombre de cotisants

155 150

153 680

152 152

150 635

149 129

147 638

140 402

140 402

Nombre de retraités directs

184 148

184 031

183 988

184 022

184 405

184 473

170 158

152 045

Nombre de réversions

105 723

104 242

102 609

100 832

98 948

96 948

82 557

69 553

Rapport démographique pondéré (réversion : 0,5)

65 %

65 %

64 %

64 %

63 %

63 %

66 %

75 %

Montant des cotisations

2 025

1 987,6

1 955

1 949

1 912

1 882

1 825

1 875

Montant des pensions versées

5 019

5 195

5 136

5 159

5 175

5 181

4 826

4 376

Subvention de l'Etat

2 992

3 192,25

3 311,5

3 404,23

3 314

3 350

3 050

2 547

Source : caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF

Enfin, ainsi que notre collègue Bertrand Auban, rapporteur spécial des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » l'a rappelé dans le bilan de la réforme du régime spécial de la SNCF 42 ( * ) , en contrepartie de la réforme des régimes spéciaux, un certain nombre de mesures d'accompagnement ont été accordées : création d'un échelon supplémentaire pour les agents pour tenir compte de leur prolongation d'activité, élargissement de l'assiette du salaire brut liquidable, majorations de traitement liées à la prolongation d'activité, mesures d'accompagnement de fin de carrière et prise en compte de la pénibilité. L'augmentation de la masse salariale des entreprises cotisant aux régimes spéciaux est une conséquence mécanique du maintien dans l'emploi de personnes en fin de carrière dont les indices de rémunération sont logiquement les plus élevés.

3. Un rapprochement des régimes qui ne se poursuivra, au mieux, qu'à partir de 2017 pour atteindre son plein effet en 2023

La question que s'est d'emblée posée votre rapporteur pour avis s'agissant du présent projet de loi est la suivante : comment seront traités les régimes spéciaux dans la réforme des retraites et pourquoi ses effets ne se produiront, au mieux, qu'à partir de 2017 ?

Si la réforme de 2010 s'appliquera à tous les Français , c'est-à-dire aux salariés du privé, du public, s'agissant des régimes spéciaux , la date d'entrée en vigueur sera différée 43 ( * ) pour tenir compte de la montée en charge des réformes de 2007 et 2008.

Cet étalement dans le temps aurait ainsi pour objet principal de ne pas remettre en cause les « accords » conclus en 2008 : ceux-ci prévoient que les mesures de rapprochement des régimes spéciaux vers le régime de la fonction publique, lui-même réformé en 2003, ne seront pleinement effectives qu'en 2016.

Le tableau ci-dessous montre que le calendrier de convergence du régime spécial de la SNCF des catégories « sédentaires » vers la durée de 164 trimestres de cotisation pour obtenir une pension à taux plein sera atteint au second semestre 2016 .

Paramètres de calcul des pensions des agents sédentaires de la SNCF

Source : caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF

De fait, le présent projet de loi ne comporte aucune disposition expresse concernant l'application de la réforme des retraites sur les régimes spéciaux . Stricto sensu , les régimes spéciaux ne sont juridiquement pas concernés 44 ( * ) : ainsi que cela fut le cas en 2007 et 2008 - lors de la réforme des régimes spéciaux - les caractéristiques de ces régimes relèvent de la compétence réglementaire en application de l'article L. 711-1 du code de la sécurité sociale.

Le XI de l'article 20 du présent projet de loi prévoit la remise au Parlement par le Gouvernement, avant le 1 er janvier 2017, d'un rapport sur les mesures de relèvement des âges d'ouverture du droit à pension et des limites d'âge prises, par voie réglementaire, pour les autres régimes spéciaux de retraite.

C'est de cette disposition, dont la valeur est purement déclaratoire, que découle une interprétation a contrario selon laquelle la réforme de 2010 ne commencera à produire ses effets sur les régimes spéciaux qu'à partir de 2017.

C'est à la condition que les textes réglementaires d'application des articles 4 et 20 XI du projet de loi soient publiés, que les incidences suivantes pourraient affecter les assurés des régimes spéciaux :

- une augmentation progressive du nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier du taux maximum de pension ;

- une augmentation progressive de l'âge limite de maintien en service qui passerait à 67 ans ;

- une augmentation progressive de 4 mois par année de l'âge d'ouverture du droit à pension qui passerait de 50 à 52 ans pour les conducteurs et de 55 à 57 ans pour les autres agents relevant du cadre permanent. Avec un début d'application à compter de 2017, la réforme de 2010 ne serait effective pour les régimes spéciaux qu'en 2023 . Aussi, faut-il déplorer cette application différée de la présente réforme aux régimes spéciaux .

Malgré les demandes de votre rapporteur pour avis, il convient de constater que, à ce stade, ni le Gouvernement, ni les caisses de retraites ne sont en mesure de présenter une étude évaluant l'impact sur leurs régimes du présent projet de loi.

CHAPITRE III - POLITIQUE DE L'EMPLOI ET RÉFORME DES RETRAITES

Cette troisième partie se propose d'examiner les titres IV (Pénibilité du parcours professionnel) et V bis (Mesures relatives à l'emploi des seniors), thèmes qui, avec l'emploi des jeunes, traitent du lien entre la présente réforme des retraites et la politique de l'emploi.

I. UNE NOUVELLE VOIE DE DÉPART EN RETRAITE POUR LES MÉTIERS PÉNIBLES

L'objectif de votre rapporteur pour avis, au travers de cette partie relative à la pénibilité (titre IV) , n'est pas d'apprécier la qualité technique du dispositif proposé, ce qui relève des compétences de fond de notre collègue Dominique Leclerc, rapporteur au nom de la commission des affaires sociales. Il est en revanche de s'interroger sur la pertinence de son traitement dans un projet de loi portant réforme des retraites, ainsi que sur ses modalités de financement .

A. LES DIFFICULTÉS POSÉES PAR LA DÉFINITION DE LA NOTION DE « PÉNIBILITÉ »

1. Une notion générique difficile à définir, comme en témoigne l'échec des négociations collectives de 2003

Comme l'ont montré les travaux récents de la MECSS du Sénat sur les retraites 45 ( * ) , la notion de « pénibilité » échappe à une définition générique, dans la mesure où il s'agit d'une « notion protéiforme, variable selon les individus et les environnements et évolutive dans le temps » .

Parmi les trois acceptions de la pénibilité présentées par la MECSS  - 1) une situation de travail qui influe sur l'espérance de vie du travailleur ; 2) des déficiences de santé avec lesquelles vivent certains salariés ; 3) la perception qu'ont les intéressés de la pénibilité de leur travail -, la première est celle qui est le plus en lien avec le système de retraite.

De ce point de vue, trois principaux facteurs de pénibilité sont généralement identifiés comme étant susceptibles d'entraîner des effets irréversibles sur la santé des salariés : l'exposition professionnelle à des agents toxiques cancérigènes ; le travail de nuit et les travaux nécessitant des efforts physiques importants .

En revanche, comme le précise la MECSS, « la science ne permet pas de définir les seuils à partir desquels la soumission à ces facteurs influe sur l'espérance de vie et la qualité de vie des travailleurs . On sait toutefois qu'il existe un continuum , autrement dit que plus l'exposition est forte et longue, plus les risques d'altération de l'état de santé augmentent ».

Ces difficultés expliquent sans doute en partie l'échec des négociations interprofessionnelles sur la pénibilité , sujet retenu par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. L'article 12 de la loi précitée invitait en effet les partenaires sociaux à engager, avant le 22 août 2006, une négociation interprofessionnelle afin de définir la notion et de réfléchir aux moyens de sa prise en compte.

Si les négociations ont permis d' avancer sur les critères de la pénibilité, sur la prévention et sur l'amélioration des conditions de travail , elles ont, en revanche, échoué sur la question de la réparation . L'absence d'accord s'explique essentiellement par une conception divergente de la réparation entre les représentants des employeurs et les syndicats de salariés. Alors que ces derniers défendent une réparation collective de la pénibilité, le patronat plaide pour une réparation individualisée fondée sur un avis médical.

2. Une notion pourtant ancienne

Pourtant, la notion de pénibilité n'est pas nouvelle et sous-tend aujourd'hui un certain nombre de dispositifs :

- les catégories « actives » de la fonction publique : comme cela a été précisé précédemment, il s'agit des emplois présentant « un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles ». Pour ces professions, l'âge d'ouverture des droits à la retraite peut être abaissé à 50 ou 55 ans ;

- « les carrières longues » qui permettent aux agents ayant commencé jeunes leur activité professionnelle de bénéficier de leur retraite avant l'échéance normale. Il s'agit le plus souvent de salariés ayant exercé des métiers pénibles. L'accès à ce dispositif est subordonné à la justification de conditions de durée d'assurance, de durée d'activité cotisée et d'âge de début de carrière ;

- les allocations de cessation anticipée d'activité destinées aux travailleurs de l'amiante âgés de plus de 50 ans , financées par le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) ;

- enfin, les prestations d'invalidité versées avant 60 ans et les pensions de retraite pour inaptitude .

3. La nécessité de s'appuyer sur les travaux d'un comité scientifique

En tout état de cause, votre rapporteur pour avis note que la notion de « pénibilité » est à ce point difficile à définir que l' article 27 septies du présent projet de loi, introduit à l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, propose la création d'un comité scientifique chargé de recenser , avant le 31 décembre 2013, les conditions dans lesquelles l'exposition prolongée aux différents facteurs de risques professionnels a pour conséquence une possibilité d'altération significative de l'état de santé des salariés .

B. UNE PROBLÉMATIQUE QUI NE RELÈVE PAS PRIORITAIREMENT DES SYSTÈMES DE RETRAITE

Tout en reconnaissant que le débat sur la pénibilité soulève des questions importantes, votre rapporteur pour avis s'interroge sur son interaction avec le débat sur l'avenir de notre système de retraites . La problématique de la pénibilité ne relève en effet pas prioritairement des systèmes de retraite, mais davantage des conditions de travail.

L'orientation des mesures proposées par le présent projet de loi, considérablement enrichies par nos collègues députés, en atteste d'ailleurs indirectement : l'accent est mis sur la prévention et la santé au travail ; la prise en compte de la pénibilité dans le calcul des droits à la retraite est partielle ; son financement sera assuré par la branche accidents du travail - maladies professionnelles , par le biais des cotisations employeurs AT-MP.

1. La meilleure façon de lutter contre la pénibilité : la prévention et l'amélioration des conditions de travail

Le présent projet de loi présente, tout d'abord, un grand nombre de dispositions relatives à la traçabilité des expositions aux facteurs de pénibilité , à la prévention de celle-ci, ainsi qu'à l'amélioration des conditions de travail.

Votre rapporteur pour avis est favorable globalement à l'ensemble de ces mesures, la prévention et l'amélioration des conditions de travail constituant un des meilleurs leviers de lutte contre la pénibilité.

a) La traçabilité (article 25)

Dans le but de mettre en oeuvre un suivi médical renforcé des salariés, l' article 25 du présent projet :

- d'une part, consacre au niveau législatif l'existence du « dossier médical de santé au travail » qui contiendra des informations relatives à l'état de santé du travailleur et aux conséquences induites par les expositions auxquelles il a été soumis ;

- d'autre part, crée un document servant de support à l'information (des fiches individuelles) sur les risques professionnels et de pénibilité auxquels les salariés sont exposés. La pénibilité est définie, dans ce cadre, comme des « contraintes physiques marquées, un environnement physique agressif ou des rythmes de travail susceptibles de laisser des traces durables identifiables et irréversibles » . Ce document peut être transmis à la famille du salarié décédé.

b) L'obligation de l'employeur de mener des actions de prévention, l'élargissement du rôle du CHSCT, la mise en place de sanctions (articles 25 bis, 25 ter et 27 sexies)

Au titre de la prévention, l' article 25 bis du présent projet de loi (introduit à l'initiative de notre collègue député Francis Vercamer) élargit les actions de prévention devant être menées par l'employeur pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, à la pénibilité au travail.

L' article 25 ter (introduit à l'initiative de notre collègue député Francis Vercamer) élargit, quant à lui, les missions du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) à l'analyse des facteurs de pénibilité.

Contrepartie de cette nouvelle responsabilité, l' article 27 sexies (introduit à l'initiative du Gouvernement) prévoit la mise en place d'une pénalité de 1 % de la masse salariale, applicable aux entreprises de plus de 50 salariés lorsqu'elles ne sont pas couvertes par un accord ou un plan d'action relatif à la prévention de la pénibilité.

c) La redéfinition des services de santé au travail et leur gouvernance (articles 25 quater à 25 duodecies, 26 ter, 26 quater et 27 bis A)

Quant aux articles 25 quater à 25 duodecies, 26 ter, 26 quater et 27 bis A , ils redéfinissent le champ de compétence et la gouvernance des services de santé au travail :

- l' article 25 quater (introduit à l'initiative du Gouvernement) redéfinit ainsi les missions des services de santé au travail et précise que ces missions sont assurées par une équipe pluridisciplinaire de santé au travail, composée au moins de médecins du travail, d'intervenants en prévention des risques professionnels, d'infirmiers et, le cas échéant, d'assistants des services de santé au travail. L' article 27 bis A (introduit à l'initiative de notre collègue député Francis Vercamer) confirme la mission des services de santé dans le code du travail ;

- l' article 25 quinquies (introduit à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) précise que les services de santé au travail peuvent engager « une démarche qualité », selon des modalités fixées par décret. Votre rapporteur pour avis s'interroge sur le nécessité de préciser cet élément au niveau législatif ;

- l' article 25 sexies (introduit à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) organise une gouvernance paritaire des services de santé au travail interentreprises. L' article 25 septies (également introduit à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) prévoit notamment que le service de santé au travail interentreprises élabore, au sein d'une commission de projet, un projet de service pluriannuel qui définit les priorités d'action du service. Ce projet s'inscrit dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens conclu entre le service, les autorités administratives et les organismes de sécurité sociale ;

- l' article 25 octies (introduit à l'initiative de notre collègue Denis Jacquat) ouvre la possibilité à un accord de branche étendu de déterminer des modalités particulières d'organisation et de choix du service de santé au travail pour certaines professions (artistes et techniciens intermittents du spectacle, mannequins). De même, l' article 25 duodecies (également introduit à l'initiative de notre collègue Denis Jacquat) renvoie à un décret le soin de fixer les règles applicables en matière d'organisation, de choix et de financement des services de santé au travail, ainsi que de surveillance de l'état de santé au travail, d'un certain nombre de travailleurs (salariés temporaires, stagiaires de la formation professionnelle, travailleurs des associations intermédiaires) ;

- l' article 25 nonies (introduit à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) prévoit, quant à lui, que toute convention intervenant directement, ou par personne interposée, entre le service de santé au travail et son président, son directeur général, l'un de ses directeurs généraux délégués ou l'un de ses administrateurs doit être soumise à l'autorisation préalable du conseil d'administration ;

- l' article 25 decies (introduit à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) ouvre la possibilité pour un interne de la spécialité d'être recruté par un service de santé au travail à titre temporaire ;

- l' article 25 undecies (également introduit à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) consacre enfin l'existence et le rôle du directeur du service de santé au travail interentreprises qui « organise, sous l'autorité du président, les actions définies par le conseil d'administration » . Le directeur est garant de l'indépendance du médecin du travail.

Les articles 26 ter et 26 quater (introduits à l'initiative de notre collègue député Guy Lefrand) prévoient, quant à eux, la remise de deux rapports au Parlement : une étude comparative des systèmes de santé au travail dans le monde et un état des lieux des pratiques de certification en Europe des activités de suivi de la santé au travail.

d) L'aménagement des conditions de travail (articles 27 bis et 27 ter A)

Les articles 27 bis et 27 ter A (introduits à l'initiative de notre collègue député Pierre Méhaignerie et sous-amendé, pour le second, par le Gouvernement) portent, quant à eux, sur l'aménagement des conditions de travail. Si l' article 27 bis propose qu'un salarié puisse utiliser son compte-épargne-temps pour cesser de manière progressive son activité, l' article 27 ter A prévoit l'aménagement des conditions de travail des salariés occupés à des travaux pénibles.

Il crée, à titre expérimental, un dispositif destiné à constituer un cadre pour la conclusion, par les branches professionnelles, d'accords collectifs d'allégements ou de compensation de la charge de travail des salariés occupés à des travaux pénibles :

- l'allégement de la charge de travail pourrait prendre la forme d'un passage à temps partiel ou de l'exercice d'une mission de tutorat ;

- la compensation de la charge de travail pourrait, elle, prendre la forme d'un versement de primes ou d'une attribution de journées supplémentaires de repos ou de congés.

A l'initiative du Gouvernement, a été ajoutée la précision selon laquelle ce fond de soutien à la pénibilité est en partie financé par une dotation de l'Etat et une dotation de la branche AT-MP . Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, les dotations prévisionnelles de ce fonds ne sont pas encore déterminées.

2. Une prise en compte partielle dans le calcul des droits à la retraite

S'agissant du volet « compensation » du dispositif de pénibilité, les articles 26, 26 bis , 27 quater et 27 quinquies précisent le mécanisme de prise en compte de l'exposition à des risques professionnels dans la détermination des droits à la retraite, ainsi que le champ des bénéficiaires potentiels.

a) La prise en compte d'une incapacité constatée à l'exclusion des incapacités à venir et de celles résultant des troubles psychosociaux (article 26)

L' article 26 ouvre une nouvelle voie de départ en retraite anticipée au taux plein pour les métiers pénibles.

Sont concernées les personnes justifiant d'un taux d'incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret. Selon le Gouvernement, ce taux devrait s'élever à 20 % , sous réserve toutefois que cette incapacité résulte soit d'une maladie professionnelle, soit d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle.

A son initiative, l'Assemblée nationale a élargi ce dispositif aux incapacités inférieures à ce taux (20 %), mais au moins égales à un autre taux fixé par décret (soit 10 % selon le Gouvernement). Le bénéfice de la retraite anticipée pour pénibilité est alors subordonné au fait :

- que  l'assuré ait été exposé, pendant un nombre d'années déterminé par décret, à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels ;

- et qu'il puisse être établi que l'incapacité permanente dont est atteint l'assuré soit directement liée à l'exposition à ces facteurs de risques professionnels .

Dans ce cas, une commission pluridisciplinaire dont l'avis s'impose à l'organisme débiteur de la pension de retraite est chargée de valider les modes de preuve apportés par l'assuré et d'apprécier l'effectivité du lien entre l'incapacité permanente et l'exposition aux facteurs de risques professionnels. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de cette commission, ainsi que les éléments du dossier au vu desquels elle rend son avis, sont fixés par décret.

Les personnes concernées par le dispositif bénéficieront à la fois de l'abaissement de l'âge d'ouverture du droit à la retraite et de l'obtention du taux plein quelle que soit la durée d'assurance effectivement accomplie.

Votre rapporteur pour avis note ici le caractère nécessairement étroit du champ d'appréciation de la pénibilité : seule la pénibilité physique et constatée au moment de la retraite est prise en compte . En sont exclus, d'une part, les troubles psychosociaux qui demandent le plus souvent une prise en charge immédiate et, d'autre part, l'incapacité à venir qui certes résulte de l'exposition à des facteurs de pénibilité pendant la durée d'activité, mais ne se déclare qu'après l'ouverture des droits à la retraite.

b) Un champ de bénéficiaires potentiels réduit (articles 26 bis, 27 quater et 27 quinquies)

Quant au champ des bénéficiaires, il est également réduit puisque sont concernés les seuls salariés du secteur privé et les non-salariés agricoles , les articles 27 quater et 27 quinquies (introduits par le Gouvernement) ayant en effet étendu le bénéfice de ce dispositif à cette deuxième catégorie d'actifs.

En revanche, en sont exclus :

- d'une part, les non-salariés : l' article 26 bis prévoit la remise d'un rapport au Parlement sur les modalités selon lesquelles le dispositif prévu peut être adapté pour s'appliquer aux travailleurs non-salariés. En effet, le régime de sécurité sociale des non-salariés ne disposant pas de branche accidents du travail - maladies professionnelles, l'application immédiate du départ anticipé en retraite pour pénibilité est difficile à envisager ;

- d'autre part, les fonctionnaires : le dispositif des « catégories actives » est considéré comme le « pendant » du départ en retraite pour pénibilité.

3. Un bilan en 2012

L' article 27 ter prévoit la remise au Parlement, avant le 1 er janvier 2012, d'un rapport établissant un bilan de l'application de l'ensemble de ces dispositions. Ce rapport devra tirer les conséquences de ce bilan en établissant des propositions pour adapter, le cas échéant, ces dispositions, notamment en matière de prévention, de compensation et de réparation de la pénibilité.

Pour votre rapporteur pour avis, ce rapport devra également être l'occasion de préciser l'articulation de ce nouveau départ en retraite pour pénibilité avec certains dispositifs existant aujourd'hui et renvoyant indirectement à la notion de pénibilité (« catégories actives », « carrières longues », pensions d'invalidité, pensions pour inaptitude au travail).

C. UN FINANCEMENT PAR LA BRANCHE AT-MP

Le départ anticipé à la retraite pour pénibilité  ne sera pas financé par la branche vieillesse, mais par la branche accidents du travail - maladies professionnelles . Le Gouvernement justifie ce choix au motif que « la pénibilité étant liée aux conditions de travail, le financement de ce dispositif sera assuré par une contribution de la branche AT-MP à la branche vieillesse qui couvrira à due concurrence les dépenses supplémentaires générées par les départs à la retraite à raison de la pénibilité » 46 ( * ) . Ces éléments confortent votre rapporteur pour avis dans l'idée selon lequel la prise en charge de la pénibilité ne relève pas prioritaire des systèmes de retraite .

Ainsi le financement de ce dispositif sera assuré à deux niveaux :

- au niveau de la branche vieillesse, le I de l'article 27 prévoit que la branche AT-MP verse une contribution à la branche vieillesse afin de couvrir les dépenses supplémentaires engendrées par le dispositif de départ en retraite anticipé pour pénibilité.

Selon les informations du ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique, le dispositif envisagé ne prévoit pas de modalités particulières de calcul de cette contribution annuelle de la branche AT-MP. Il appartiendra à la CNAV de déterminer, à l'euro, près le surcoût résultant de la possibilité de départ à la retraite à 60 ans à taux plein par rapport au montant de pension calculée à l'âge légal de départ à la retraite. Le montant de cette contribution sera fixée, chaque année, en loi de financement de la sécurité sociale.

- au niveau de la branche AT-MP , le II de l 'article 27 précise que le montant de la contribution précitée « est pris en compte » dans les éléments de calcul des cotisations employeurs accidents du travail - maladies professionnelles. La détermination du taux de contribution devrait être calculée annuellement en fonction du nombre total de personnes entrées dans le dispositif. Cette cotisation mutualisée pourra néanmoins être modulée par secteur d'activité.

Le calcul actuel des taux de cotisation de la branche AT-MP et l'articulation envisagée avec la nouvelle contribution pour « Pénibilité »

Actuellement, le taux net de cotisation AT/MP applicable à un établissement est constitué du taux brut auquel sont ajoutées trois majorations. Le taux brut de cotisation représente le rapport, pour les trois dernières années de référence, entre les prestations servies en réparation d'accidents ou de maladies imputables à l'établissement et les salaires.

Selon la taille de l'entreprise, ce taux brut est :

- celui calculé pour l'ensemble du secteur d'activité dont relève l'établissement : c'est le taux collectif pour les entreprises de moins de 10 salariés [moins de 20 avec la réforme de la tarification] : le taux dépend alors exclusivement du « code risque » retenu pour le classement de l'établissement ;

- celui calculé à partir du report des dépenses au compte de l'employeur : c'est le taux réel pour les entreprises de 200 salariés et plus [150 avec la réforme] ;

- pour les entreprises dont les effectifs sont situés entre 10 et 199 salariés, la tarification est dite mixte, le calcul se faisant en partie selon le taux collectif et en partie selon le taux réel, la part de ce dernier augmentant avec les effectifs.

Au taux brut sont ajoutées trois majorations , identiques pour toutes les entreprises, pour tenir compte :

- des accidents de trajet (M1) ;

- des charges générales, des dépenses de prévention et de rééducation professionnelle et de la dotation à l'assurance maladie au titre de la sous déclaration (M2) ;

- de la compensation entre régimes des dépenses (de maladies professionnelles) qu'il n'est pas possible d'affecter à un employeur, inscrites à un « compte spécial », ainsi que des versements au profit du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) et du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) (M3).

Le calcul du taux brut de chaque établissement, qui correspond à sa sinistralité propre ou à celle du secteur d'activité auquel il est rattaché, ne va pas être modifié avec la présente réforme.

En revanche, l'impact de la contribution au titre de la pénibilité va se traduire par une modification des éléments de calcul des cotisations AT/MP, autrement dit les majorations et une modulation possible de ces éléments par secteur d'activité.

Il est proposé d'instaurer une 4 ème majoration pour couvrir le montant de cette contribution. Cette majoration serait additive au taux brut au même titre que les majorations M1 et M3.

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Au final, ce dispositif « pénibilité » élargi pourrait concerner 30 000 personnes et coûterait 300 millions d'euros par an .

Pour votre rapporteur pour avis, ce mode de financement est « logique », la pénibilité relevant davantage des conditions de travail et de la santé au travail.

II. FAVORISER L'EMBAUCHE DES SENIORS

A. UN CONSTAT RÉCURRENT : LE FAIBLE TAUX D'EMPLOI DES SENIORS EN FRANCE

L' article 32 du présent projet de loi vise, quant à lui, à créer une aide à l'embauche des demandeurs d'emploi de 55 ans et plus, en contrat à durée indéterminée (CDI) ou en contrat à durée déterminée (CDD) de plus de six mois. Ce dispositif résulte d'un constat récurrent : le faible taux d'emploi des seniors en France.

Or ce taux, pour les personnes âgées de 55 à 64 ans, est considéré comme un indicateur privilégié du niveau d'insertion dans le marché du travail. Il s'avère également déterminant dans un objectif de maîtrise des dépenses de retraites. A cet égard, l'objectif de l'Union européenne (UE) inscrit dans la stratégie de Lisbonne est d'atteindre un taux d'emploi de 50 % à l'horizon de 2010. En 2009, le taux d'emploi moyen en France des travailleurs âgés de 55 à 64 ans s'établissait à seulement 38,9 % contre 46 % dans l'Union européenne, très loin derrière la Suède, le Royaume-Uni et l'Allemagne.

Proportion, en comparaison internationale,
de personnes de 55-64 ans en emploi en 2009

(en %)

Source : OCDE et Eurostat

Dans le détail toutefois, en raison de la fixation de l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans jusqu'à présent, la différence est grande en France entre le taux d'emploi des 55-59 ans qui se situait à 58,4 % en 2009 et celui des 60-64 ans qui était de seulement 17 %.

La mesure prévue s'inscrit dans le plan de retour à l'emploi des seniors mis en oeuvre par le Gouvernement depuis le 26 juin 2008 : il s'agit ainsi de renforcer les dispositifs existants pour mettre fin à la « culture des préretraites massives » et des dispenses de recherche d'emploi mises en oeuvre à partir du début des années 1980.

Evolution du nombre de bénéficiaires de cessations anticipées d'activité
entre 1968 et 2009

Source : tableau de bord trimestriel « Activité des seniors et politiques d'emploi » de la DARES

Plusieurs dispositifs de prolongation d'activité des seniors sont d'ores et déjà appliqués afin d'inciter les entreprises et les branches à conclure des accords pour garder leurs seniors ou en recruter, d'inciter ceux-ci à prolonger leur activité au-delà de 60 ans et de favoriser leur retour vers l'emploi :

- l'assouplissement des conditions de cumul d'une pension de retraite avec un revenu d'activité 47 ( * ) (200 000 bénéficiaires) ;

- les accords de branches et d'entreprises signés avant le 1 er janvier 2010 pour recruter ou maintenir des seniors dans l'emploi (plus de 80 accords de branches et 33 900 accords d'entreprises ont été négociés, soit 2/3 des salariés couverts) ;

- le tutorat, l'accès à la formation et l'anticipation de l'évolution de carrière.

Le Gouvernement considère que la mise en oeuvre de ce plan a bénéficié, depuis 2007, à 300 000 seniors 48 ( * ) . Néanmoins, avec l'allongement de la durée de cotisation, l'enjeu véritable de l'emploi des seniors se déplace sur le segment des actifs de plus de 60 ans.

B. L'ENJEU FINANCIER DE L'EMPLOI DES SENIORS

L'amélioration du nombre de personnes âgées en emploi emporte un double effet sur le financement des retraites, mais aussi celui de l'assurance chômage. Dans un contexte de report de l'âge d'ouverture des droits et de perception d'une pension à taux plein, il représente :

- d'une part, une moindre dépense pour les branches vieillesse ou pour l'indemnisation du chômage ;

- d'autre part, un surcroît de cotisations au bénéfice du régime par répartition.

A la demande de votre rapporteur pour avis, le secrétariat d'Etat chargé de l'emploi a procédé à une estimation des gains de cotisations issus d'une amélioration du taux d'emploi des seniors : il serait de l'ordre de 100 millions d'euros pour chaque tranche de 10 000 seniors supplémentaires en emploi .

Calcul du gain en cotisation lié à l'emploi des seniors

1) Hypothèse :

On estime un salaire annuel moyen de 38 602 euros en 2009

2) Calculs :

Avec un taux de cotisation de 16,65 % (taux sous plafond) à la CNAV, le gain de cotisations pour 10 000 seniors en plus est de 64 millions d'euros.

Avec un taux de cotisation de 9,5 % (taux sous plafond) à l'ARRCO - cas d'un non-cadre - le gain de cotisations pour 10 000 seniors en plus est de 37 millions d'euros (incluant l'AGFF).

3) Résultat :

Le gain de cotisation total (CNAV+ ARRCO+AGFF) s'élève à 101 millions d'euros pour 10 000 seniors supplémentaires en activité.

Source : secrétariat d'Etat chargé de l'emploi.

C. LA CRÉATION D'UNE AIDE À L'EMBAUCHE DES SENIORS

L' article 32 du présent projet de loi vise à créer une aide à l'embauche des demandeurs d'emploi de 55 ans et plus

Aux termes du projet de loi, l'aide serait réservée aux employeurs remplissant les trois conditions suivantes :

- entrer dans le champ de la réduction générale de cotisations patronales de sécurité sociale, dite « allégement Fillon » ;

- embaucher des demandeurs d'emploi de 55 ans ou plus sous réserve qu'ils soient inscrits préalablement sur la liste des demandeurs d'emploi (sans condition de durée d'inscription) ;

- recruter en CDI ou CDD d'au moins six mois (sans condition de durée de travail).

L'aide serait versée pendant une durée fixée par décret ( a priori 12 mois, selon le Gouvernement) et son montant correspondrait à une fraction du salaire brut mensuel, dans la limite du plafond de la sécurité sociale, quel que soit le niveau du salaire. L'étude d'impact annexée au présent projet de loi évoque un taux de 14 % du salaire brut.

Son versement ne serait pas automatique, mais effectué sur demande de l'employeur auprès de Pôle Emploi avec lequel l'Etat devra conclure une convention. Son coût est évalué à 55 millions d'euros en année pleine , l'étude d'impact prenant pour hypothèse un retour à l'emploi de 75 000 demandeurs d'emploi de plus de 55 ans, dont 35 000 vers un emploi stable.

Votre rapporteur pour avis s'interroge sur l'impact de cette aide car le recul de l'âge légal de départ à la retraite entraînera d'importants dysfonctionnements sur le marché du travail.

Le Gouvernement lui-même reconnaît ces difficultés puisqu'il prévoit un renchérissement des dépenses du Fonds de solidarité vieillesse au titre de la prise en charge des périodes de chômage validées, à hauteur de 1,8 milliard d'euros entre 2011 et 2020. Il est à craindre que les seniors soient prioritairement concernés.

C'est pourquoi le rapport prévu par l'Assemblée nationale, qui devra être remis avant le 31 décembre 2012, et établir un bilan détaillé de la mise en oeuvre de cette aide apparaît comme une voie utile à l'évaluation du dispositif. En tout état de cause, cette mesure ne saurait répondre, à elle seule, à l'ampleur de l'enjeu du retour à l'emploi des seniors .

III. LES JEUNES GÉNÉRATIONS SONT-ELLES SUFFISAMMENT PRISES EN COMPTE ?

Votre rapporteur pour avis a bien noté les deux principales mesures relatives aux jeunes générations :

- l'une, introduite dans le présent projet de loi : l'engagement d'une réflexion sur l'introduction dans l'assiette des cotisations vieillesse des gratifications versées dans le cadre de stages (article 29 quinquies ) ;

- l'autre, proposée par le Gouvernement, par voie réglementaire : le relèvement de quatre à six trimestres des périodes de chômage non indemnisées validées gratuitement au titre des droits à la retraite en début de carrière .

Il accueille favorablement ces deux initiatives .

Cependant, il regrette que la question des jeunes générations qui entrent aujourd'hui sur le marché du travail ne soit pas davantage au centre du débat sur la présente réforme des retraites, alors qu'elles sont concernées en premier lieu. Les discussions tendent en effet davantage à se focaliser sur l'application des mesures d'âge aux générations proches du départ à la retraite.

Or, pour votre rapporteur pour avis, il convient de prendre conscience de deux évolutions majeures observées sur le marché du travail qui ont un impact direct sur le système de retraite des jeunes générations : d'une part, l'entrée de plus en plus tardive dans la vie active et, d'autre part, la fragilisation des parcours professionnels, en raison du chômage. Ces deux tendances influent très largement sur la date d'obtention d'une pension à taux plein.

Ainsi, selon une étude récente de la DREES 49 ( * ) , la hausse des études combinées aux difficultés d'insertion sur le marché du travail s'est traduite par une baisse des durées cumulées d'emploi avant 30 ans de 2,6 années entre les générations 1934-1943 et 1964-1973 (3 ans pour les hommes et 2,3 ans pour les femmes).

Durées d'emploi et d'études à 30 ans pour des générations successives

Source : DREES, « Les droits à la retraite des jeunes générations », Dossiers Solidarités et santé n° 10 - 2009

Par ailleurs, la durée de cotisations, qui sera portée à 41 ans en 2012, ne pourra plus indéfiniment être augmentée.

C'est pourquoi, comme votre rapporteur pour avis l'a indiqué dans la première partie du présent rapport, il conviendrait à terme de réfléchir à un mode de prise en compte des années d'études .

Ce constat le conduit également à un quatrième thème de réflexion, le renforcement des dispositifs d'épargne retraite. Face aux incertitudes laissées aux générations à venir, il semble nécessaire de permettre à chacun de compléter sa future pension en fonction de ses revenus et de ses décisions d'épargne.

CHAPITRE IV - DES MESURES VISANT À DYNAMISER L'ÉPARGNE RETRAITE

I. L'ÉPARGNE RETRAITE : UNE OFFRE VARIÉE À L'ESSOR MODESTE

A. UN PAYSAGE DE L'ÉPARGNE RETRAITE COMPLET MAIS COMPLEXE

L'épargne retraite, telle que définie par notre collègue Philippe Marini dans sa proposition de loi de 2008 50 ( * ) , « permet de disposer, à partir d'un âge déterminé, de revenus provenant d'une épargne constituée individuellement ou collectivement pour faire face à des besoins viagers, à titre privé ou lors de l'activité professionnelle, à partir de versements des participants sur une base obligatoire ou volontaire. » . Elle vient donc compléter le régime de retraite obligatoire, régime de base et régime de retraite complémentaire.

Elle comprend les contrats souscrits, soit par un particulier à titre individuel ou professionnel, soit par l'entreprise , pour l'ensemble ou une partie de ses salariés.

Les contrats de retraite conclus par un particulier regroupent, d'une part, les plans d'épargne retraite populaire (Perp) 51 ( * ) , souscrits à titre personnel et d'autre part, les contrats de retraite dits Madelin 52 ( * ) , conclus dans un contexte professionnel. S'ajoutent à cette catégorie les produits assimilés aux produits souscrits dans un cadre personnel, tels que Préfon, Cgos...

Quant aux contrats d'assurance retraite d'entreprise, il convient de souligner qu'ils présentent un large spectre de caractéristiques tant sur le plan de l'adhésion ( obligatoire ou non), des cotisations et des prestations (définies ou non), des taux de cotisation (uniformes ou non), de l'abondement de l'employeur ou du salarié (autorisé ou non), de la sortie (en rente ou en capital) et enfin, de la fiscalité (selon qu'elle est allégée à la souscription ou à la sortie).

Ces contrats sont notamment ceux relevant du régime de « l'article 83 » du code général des impôts (CGI) 53 ( * ) dont l'adhésion est obligatoire pour les salariés appartenant à la catégorie couverte. Leurs cotisations sont définies à un taux uniforme alors que les contrats relevant de « l'article 39 » du CGI sont à prestations définies. Ces deux types de contrats souscrits par l'entreprise sont, dans les deux tiers des cas, destinés à une catégorie de salariés.

Les contrats en sursalaire de « l'article 82 » , qui sont également des contrats de groupe, complètent cette liste. Cependant, contrairement aux contrats à cotisations définies de « l'article 83 » du CGI, leur adhésion est facultative.

Quant aux plans d'épargne retraite entreprise ( PERE ), ils constituent un contrat hybride entre un contrat à cotisations définies de l'article 83 et un Perp . Défini pour une catégorie de salarié avec un taux uniforme de cotisation, il admet, à l'instar du Perp, les versements volontaires du salarié.

Afin de compléter ce panorama des produits d'épargne retraite, il convient de mentionner le plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO) 54 ( * ) , qui est un dispositif relevant de l'épargne salariale et dont la mise en place est facultative. L'entreprise est seulement assujettie à l'obligation de négociation d'ouverture d'un tel plan si son effectif est supérieur à cinquante salariés, seuil de déclenchement de la participation.

Très apprécié des salariés , le PERCO présente une fiscalité attrayante. De surcroît, il offre la possibilité de sortir tant en rente qu'en capital. Il répond aussi aux besoins des employés en permettant des versements facultatifs ainsi que l'abondement de l'employeur.

En conclusion, l'ensemble de ces produits d'épargne retraite, dont le tableau ci-après retrace les caractéristiques principales, ont pour objet la constitution d'un capital en vue du départ à la retraite. Si l'horizon de placement vise le long terme, celui-ci est cependant géré différemment selon la logique assurantielle ou celle des sociétés de gestion. La première tend à un investissement en produit de taux plus stable alors que la seconde est plus orientée vers le placement en actions.

Cette remarque a conduit votre rapporteur pour avis à proposer de modifier le texte adopté par l'Assemblée nationale afin de permettre l'accès le plus large possible aux différents produits .

Caractéristiques de l'épargne supplémentaires

Versements

Sortie en capital

Imposition sur les cotisations

Imposition sur les prestations

Dispositifs de retraite supplémentaire souscrits dans un cadre personnel ou assimilé

Contrats à cotisations définies

Perp

Périodicité au choix et montants libres

Oui 55 ( * )

Cotisations déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu (régime des rentes viagères à titre gratuit)

Produit destiné aux fonctionnaires PREFON

La cotisation est exclusivement salariale et n'est pas constituée par un pourcentage fixe du salaire ; l'affilié choisit librement l'une des classes de cotisations proposées

Non

Cotisations déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu

Produit destiné aux élus locaux FONPEL

La cotisation est constituée par un pourcentage fixe du salaire ; l'affilié choisit librement le pourcentage

Non

Cotisations non déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est partiellement soumise à l'impôt sur le revenu

Produit destiné aux élus locaux CAREL

La cotisation est constituée par un pourcentage fixe du salaire ; l'affilié choisit librement le pourcentage

Non

Cotisations non déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est partiellement soumise à l'impôt sur le revenu

Produit destiné aux fonctionnaires COREM

Montants libres

Non

Cotisations déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu

Produit destiné aux fonctionnaires hospitaliers CRH

La cotisation est exclusivement salariale et n'est pas constituée par un pourcentage fixe du salaire ; l'affilié choisit librement l'une des classes de cotisations proposées

Non

Cotisations déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu

RMC (retraite mutualiste du combattant)

Montant versé dans le respect du minimum contractuel

Non

Cotisations intégralement déductibles du revenu déclaré

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu

Dispositifs de retraite supplémentaire souscrits dans un cadre professionnel

Contrats à cotisations définies

Professions indépendantes (contrats souscrits à titre individuel)

Régimes de la loi n° 94-126 Madelin

Obligation annuelle de cotisation ; choix du montant de cotisation minimale à la souscription qui peut varier chaque année dans un rapport de 1 à 10

Non

Les cotisations ou primes versées à titre facultatif sont déductibles du BIC ou BNC avant impôt

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu (régime des rentes viagères à titre gratuit)

Régimes de la loi n° 97-1051 Exploitants agricoles

Montant compris entre une cotisation minimale et un plafond égal à 15 fois cette cotisation minimale

Non

Les cotisations ou primes versées à titre facultatif sont déductibles du bénéfice imposable

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu (régime des rentes viagères à titre gratuit)

Salariés (contrats souscrits à titre collectif)

PERCO (dispositif d'épargne salariale)

Limités à 25 % de la rémunération du salarié

L'abondement de l'entreprise ne doit pas dépasser 5.149 €/an

Oui

Les sommes versées par les salariés sont imposées sur le revenu contrairement à l'abondement de l'employeur

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu (régime des rentes viagères à titre gratuit)

Plan d'épargne retraite entreprise (PERE)

Versement calculé en pourcentage du salaire ; abondements libres du salarié possibles

Oui

Les cotisations ou primes versées à titre facultatif sont déductibles de l'impôt sur le revenu dans les mêmes conditions que pour le Perp

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu (régime des rentes viagères à titre gratuit)

Contrats de type art. 82 du CGI

Versement calculé en pourcentage du salaire

Oui

Les cotisations sont imposables au titre de l'impôt sur le revenu du salarié

La rente viagère n'est pas soumise à l'impôt sur le revenu mais est soumise à l'impôt sur les plus-values

Contrats de type art. 83 du CGI

Versement calculé en pourcentage du salaire et versé en partie par l'entreprise et en partie par le salarié

Non

Les cotisations ne sont pas imposables au titre de l'impôt sur le revenu du salarié

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu

Contrats à prestations définies

Contrats de type art. 39 du CGI

Versements effectués uniquement par l'entreprise

Non

Cotisations déductibles de l'impôt sur les sociétés de l'entreprise

La rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu (régimes des pensions)

Source : D'après les données de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES)

B. UN ESSOR MODESTE

Force est de constater que si la propension des français à épargner est importante, elle ne bénéficie que dans de très modestes proportions à l'épargne retraite.

Le taux d'épargne des français en 2009 est de 16 % , soit un taux supérieur à la moyenne de la zone euro qui s'élève à 15 %. Ces chiffres révèlent non seulement une aversion à l'endettement, mais également une tendance naturelle à anticiper les défis de demain, aux nombres desquels figure la retraite.

Cependant, il n'y avait que 3 millions de français ayant souscrit à titre individuel un produit d'épargne retraite en 2008 . 56 ( * ) Si on ajoute les souscripteurs de contrats « Madelin » qui s'élèvent approximativement à 1,3 million, le nombre de personnes ayant fait une démarche individuelle de complément de retraite demeure modeste.

S'agissant du cadre collectif , l'entreprise semble constituer un environnement particulièrement propice à l'essor de l'épargne retraite, ainsi que tend à l'illustrer le graphique ci-après.

Évolution des encours d'épargne retraite de type assurantielle

Source : FFSA

Fin 2008, près de 3,5 millions de personnes avaient adhéré à un contrat à cotisations définies de type « article 83 ». On dénombre plus de 1,5 million 57 ( * ) de Français couverts par une retraite « chapeau » (ou « article 39 » du CGI) contre 225 000 personnes ayant adhéré à un contrat du régime de l'article 82 du CGI et 92 000 personnes couvertes par un PERE. Enfin, 444 000 adhérents d'un PERCO ont effectué des versements en 2008.

L'encours des contrats d'assurance retraite gérés par les sociétés d'assurance s'élèvait à environ 112,5 milliards d'euros 58 ( * ) en 2009 pour un montant de cotisations de 12 milliards d'euros et des prestations versées à hauteur de 6 milliards d'euros. Un tiers de cet encours représentait des contrats de particuliers, dont le Perp pour un montant de 5,28 milliards d'euros.

L'entreprise semble donc constituer le principal vecteur de préparation à la retraite. A titre d'illustration, l'encours des contrats d'assurance retraite d'entreprise relevant des articles 39, 82 et 83 du CGI ainsi que le PERE s'élèvait à plus de 76 milliards d'euros en 2009 59 ( * ) . Les contrats de type « article 83 » et « article 39 » représentent plus de la moitié des provisions mathématiques des contrats d'assurance retraite d'entreprise ou individuelle, comme en témoigne le graphique ci-après. Les premiers recueillent 42 milliards d'euros contre 31 milliards d'euros pour les seconds.

Répartition des provisions mathématiques des contrats d'assurance retraite

Source : FFSA

Votre rapporteur pour avis relève que ces dispositifs de retraite supplémentaire de type articles 39, 82, 83 et PERE , concernent essentiellement les entreprises de 200 salariés et plus 60 ( * ) . Les secteurs d'activité les plus équipés sont ceux de l'agriculture, de l'industrie, de la production et de la construction. A l'inverse, le secteur de la restauration ou des « Services collectifs, sociaux et personnels » semblent moins ouverts à l'épargne retraite supplémentaire.

Les dispositifs assurantiels d'épargne retraite souscrits par les salariés dans un cadre professionnel sont en général catégoriels et destinés plus spécifiquement aux cadres, comme l'indique le graphique ci-dessous.

Salariés concernés par les retraites supplémentaires

Source : FFSA

Afin de compléter cette analyse, il convient d'ajouter à cette offre d'épargne retraite de type assurantiel le PERCO, plan ouvert à tous , qui, en dépit d'un encours modeste de 3,45 milliards d'euros au 30 juin 2010, connaît un essor certain. Ce dernier est en progression de 48 % par rapport à l'an dernier. Plus de 112 200 entreprises proposent ce produit. 630 000 salariés ont déjà effectué des versements en 2010. L'âge moyen de l'adhérent est de 47,5 ans.

Evolution de l'encours du PERCO

Source : AFG

Si sa diffusion n'a pas encore atteint son pic, le PERCO occupe une place significative dans les intentions des entreprises relatives à la mise en place d'un dispositif d'épargne retraite . Selon une enquête 61 ( * ) , il devance même les contrats à cotisations définies (« article 83 ») et recueille 43 % de réponses favorables contre 35 % pour ces derniers. Bien que mis en oeuvre dans 19 % des entreprises de l'industrie hors secteur agroalimentaire couvertes par l'étude, il est en tête des produits en termes d'intention de création.

Encours
en millions d'euros

Cotisation annuelle moyenne par adhérent (en euros)

Nombre de personnes couvertes en milliers

Nombre de bénéficiaires d'une rente viagère
(en milliers)

Montant individuel moyen de la rente annuelle
(en euros)

Dispositifs d'épargne retraite souscrits dans un cadre personnel ou assimilé

670

3 036

802

1 547

Perp

4 091

507

2 049

16

2 825

Produits destinés aux fonctionnaires ou aux élus locaux (PREFON, COREM, CRH, FONPEL, CAREL)

15 878

1 056

791

403

1 452

RMC (retraite mutualiste du combattant)

6 346

1 716

67

346

1 572

Autres

2 126

341

129

37

1 869

Dispositifs d'épargne retraite souscrits dans un cadre professionnel

2 648

Professions indépendantes (à titre individuel)

1 852

1 320

115

1 767

Régimes de la loi n° 94-126 Madelin

16 194

2 078

1 068

92

1 788

Régimes de la loi n° 97-1051 Exploitants agricoles

2 740

897

252

23

1 684

Salariés (à titre collectif)

2 849

PERCO (dispositif d'épargne salariale)

1 859

1 872

444

Non renseigné

Non renseigné

PERE

108

472

92

Non significatif

Contrats de type art. 82 du CGI

2 864

Non significatif

225 (estimation)

Non renseigné

1 437

Contrats de type art. 83 du CGI

42 023

774

3 500 (estimation)

Non renseigné

2 053

Contrats de type art. 39 du CGI

31 545

Non significatif

Non significatif

Non renseigné

5 146

Caractéristiques de l'épargne retraite en 2008

Source : D'après les données de la DREES

Les données 2009 ne sont pas, à ce jour, disponibles

A titre liminaire au présent examen des articles du texte, votre rapporteur pour avis se félicite de l'initiative de l'Assemblée nationale d'avoir introduit un titre relatif à l'épargne retraite dans le présent projet de loi.

C'est pourquoi, il a souhaité poursuivre cette démarche de soutien à l'épargne retraite en précisant les modalités d'application de certaines dispositions du texte. Il a également visé à « restaurer » un certain équilibre entre les deux branches de l'épargne retraite que sont les produits de type assurantiel d'une part, et ceux de l'épargne salariale, d'autre part.

En effet, il juge essentiel que le dispositif législatif propose l'offre de contrats d'épargne retraite la plus diversifiée possible aux épargnants afin de leur permettre d'arbitrer de manière optimale entre les différents produits existants.

En revanche, votre rapporteur pour avis appelle de ses voeux, dans un très proche avenir, une réflexion globale portant sur l'articulation cohérente des différents produits d'épargne retraite et corrélativement sur leur fiscalité, en soulignant que cette dernière ne devrait, en aucun cas, constituer l'unique objectif de la souscription de tels produits.

Nonobstant la précédente remarque, votre rapporteur pour avis a néanmoins souhaité approfondir la démarche de l'Assemblée nationale en termes d' orientation des flux liquides vers une épargne bloquée destinée à la retraite, tant dans le domaine de l'épargne salariale que de celui de l'assurance. Il a ainsi proposé l'alimentation par défaut du PERCO à partir de l'intéressement ainsi que la transformation volontaire de tout ou partie d'un contrat d'assurance sur la vie en produit d'épargne retraite.

Enfin, votre rapporteur pour avis tient à souligner que les modalités fiscales de certaines des dispositions adoptées par la commission des finances devront être examinées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 , en gardant à l'esprit qu'elles ne doivent pas aggraver la situation des finances publiques et/ou être mises en oeuvre dans le cadre du redéploiement de dépenses fiscales .

II. LES MESURES ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE DYNAMISATION DES FLUX ET UN ASSOUPLISSEMENT DE LA GESTION DES PRODUITS

L'Assemblée nationale a introduit un Titre V ter relatif à l'épargne retraite , comprenant neuf articles additionnels visant à dynamiser l'épargne retraite, en élargissant ses sources d'alimentation , d'une part, et en assouplissant certaines de ses contraintes, d'autre part.

La commission des affaires sociales du Sénat a adopté huit amendements, à l'initiative de son rapporteur, pour la plupart de nature essentiellement rédactionnelle.

A. UNE VOLONTÉ DE DYNAMISER L'ÉPARGNE RETRAITE

La première série de mesures vise à renforcer le développement de l'épargne retraite collective, soit en élargissant les sources d'alimentation aux flux de la participation ou de ceux issus des jours de congés non utilisés, soit en introduisant une obligation de mise en place ou de négociation , selon le cas, de dispositifs d'épargne retraite.

1. L'alimentation du PERCO par les jours de congés non utilisés (article 32 bis)

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances, a modifié l'article L. 3334-8 du code du travail afin de permettre, en l'absence d'un compte d'épargne temps (CET), l'affectation des sommes correspondant aux jours de congés non pris sur un PERCO . Cette disposition est cependant limitée à cinq jours afin d'en atténuer l'impact sur la trésorerie de l'entreprise.

Ce nouvel article, modifié par un amendement rédactionnel de la commission des affaires sociales du Sénat, tend à soutenir l'essor du PERCO dont le succès s'explique tant par ses caractéristiques que par sa fiscalité. Créé par la loi de 2003 portant réforme des retraites 62 ( * ) , il est mis en oeuvre de manière facultative, à l'initiative de l'entreprise ou par accord collectif. L'entreprise est néanmoins tenue de négocier l'ouverture d'un tel plan, lorsqu'elle a mis en place un plan d'épargne d'entreprise (PEE) depuis plus de trois ans 63 ( * ) .

Les versements sont libres, ponctuels ou périodiques , contrairement à certains contrats tels que ceux relevant de l'article 83 du CGI. Le profil de risque est défini en rapport avec l'horizon de départ en retraite ou le projet personnel, selon les voeux de l'adhérent. L'abondement de l'employeur est autorisé .

Le PERCO ne constitue pas un produit « tunnel » car, contrairement au Perp, la sortie en rente n'est pas obligatoire. La prestation peut être versée sous forme de capital. Les cas de déblocages anticipés sont également nombreux. Outre l'acquisition de la résidence principale ou sa remise en état à la suite d'une catastrophe naturelle, est autorisée une sortie pour expiration des droits à l'assurance chômage, surendettement, invalidité ou décès du bénéficiaire.

Sa fiscalité est également particulièrement avantageuse pour l'adhérent puisque l'abondement ainsi que l'épargne restituée à la sortie sous forme de capital ne sont pas imposables . S'agissant de la sortie en rente, elle bénéficie d'un régime fiscal allégé 64 ( * ) . En revanche, la sortie de l'épargne en rente ou en capital est soumise aux prélèvements sociaux d'un montant global de 12,1 % en 2010. Quant à l'abondement versé sur le plan, il est exonéré de charges sociales, mais soumis à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

En dépit de caractéristiques attrayantes et d'une croissance constante du nombre des salariés bénéficiaires (+ 31 % par rapport au 30 juin 2009) ainsi que du montant de ces encours (+ 48 % sur la même période), ce dernier ne représente que 3,45 milliards d'euros au 30 juin 2010 contre un peu plus de 112,5 milliards d'euros pour l'ensemble des produits d'assurance de retraite. Le flux d'alimentation du PERCO s'élève à 667 millions d'euros, fin juin 2010.

En conséquence, votre rapporteur pour avis se déclare favorable à l'élargissement des flux d'alimentation du PERCO provenant de l'équivalent des jours de réduction du temps de travail (RTT), en l'absence de CET, prévu par le présent article.

En effet, le PERCO peut recevoir les versements 65 ( * ) issus de l'épargne personnelle, de l'intéressement, de la participation aux résultats de l'entreprise, de l'abondement par l'employeur, ou d'un compte épargne-temps . Or, toutes les entreprises ne disposent pas d'un tel compte.

Il semble donc équitable qu'un salarié ne souhaitant pas utiliser la totalité de ses jours de congés, au titre de la réduction de temps de travail, puisse transférer leur équivalent sur un PERCO.

Cette mesure est de nature à inciter le salarié à se constituer un supplément de retraite, car selon l'association française de la gestion financière (AFG), on observe aujourd'hui que la principale source d'alimentation du PERCO est l'abondement de l'employeur à hauteur de 42 %. Les versements volontaires ne représentent que 18 % à l'instar des sommes issues de l'intéressement. Les sommes issues de la participation versées sur le PERCO représentent, quant à elles, 22 % de l'ensemble.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner que le présent article fonctionne sur la base du volontariat , à l'instar de l'ensemble des sources d'alimentation du PERCO 66 ( * ) .

Poursuivant la démarche de l'Assemblée nationale, votre commission des finances a, à l'initiative de votre rapporteur pour avis, adopté un amendement sur cet article afin d'étendre le présent dispositif au PERE , aux contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations obligatoires ( article 83 du CGI ) ou en l'absence de tels dispositifs, au Perp . Cet amendement est présenté dans le A du III ci-après.

2. L'extension du nombre de jours transférables du compte d'épargne temps vers le PERCO ou le PERE (article 32 ter A)

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique, à l'initiative de notre collègue député Louis Giscard d'Estaing, un amendement portant article additionnel tendant à augmenter le plafond du nombre de jours de congés du CET pouvant être affecté sur le PERCO ou un dispositif d'épargne retraite de type PERE ou contrats à cotisations définies (article 83 du CGI). La commission des affaires sociales du Sénat a adopté cet article sans modification.

Votre rapporteur pour avis rappelle que les jours accumulés sur un compte épargne temps constituent une voie d'alimentation d'un plan d'épargne retraite pertinent, à plusieurs égards. Non seulement, ils permettent aux salariés de mieux préparer sa retraite, sans effort d'épargne supplémentaire , mais ils conduisent également les entreprises à réduire leur passif social.

La loi de 2008 sur la réforme du temps de travail 67 ( * ) prévoit déjà qu'un salarié peut transférer dix jours par an de son CET vers son PERCO ou son PERE, en exonération d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales 68 ( * ) .

Précisions sur les modalités d'affectation du CET vers un PERCO
apportées par la circulaire ACOSS n° 2007-048 du 6 mars 2007

Les sommes transférées d'un CET vers un PERCO ne sont pas prises en compte pour l'appréciation de la limite maximale annuelle de versements volontaires (25 % de la rémunération annuelle brute ou, le cas échéant, du revenu professionnel de l'année précédente).

L'imposition fiscale des sommes transférées peut, sur demande expresse et irrévocable de leur bénéficiaire, être répartie par parts égales sur l'année au cours de laquelle le contribuable en a disposé et sur les trois années suivantes. Ces dispositions sont applicables aux droits affectés à compter du 1 er janvier 2006.

En matière sociale, les sommes issues d'un CET, correspondant aux droits acquis par les salariés et utilisées pour alimenter un PERCO, doivent donner lieu, lors de la sortie du CET, à l'ensemble des charges sociales (sauf CSG/CRDS déjà précomptées sur les sommes issues de l'épargne salariale avant leur affectation au CET).

Les droits détenus dans un CET devront donc, avant leur transfert vers un PERCO, être assujettis à l'ensemble des charges sociales.

Seules les sommes provenant d'un CET, correspondant à un abondement - en temps ou en argent - de l'employeur au CET et transférées sur un ou plusieurs PERCO peuvent bénéficier des exonérations de cotisations (dans la limite du plafond de 16 % du plafond annuel de sécurité sociale soit 5 539 euros pour 2010). Les CSG et CRDS restent dues. Ce régime dérogatoire ne vaut que si l'entreprise est en mesure de justifier que ce transfert correspond au seul montant de l'abondement de l'employeur au CET.

Source : Association française de gestion financière (AFG)

Votre rapporteur pour avis approuve l'augmentation de dix à vingt du plafond des jours transférables sur un PERCO.

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 32 ter A.

3. L'alimentation du PERCO par la participation (article 32 ter)

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté deux amendements identiques portant article additionnel, à l'initiative de son rapporteur et de la commission des finances, visant à permettre que le flux de la participation alimente par défaut le PERCO à hauteur de 50 % , sauf décision contraire du salarié . Ce dernier garde la possibilité de verser sa participation sur son PERE ou de la percevoir directement.

Cet article a été amendé en séance publique à l'initiative de Cécile Dumoulin, Arnaud Robinet, Bernard Perrut, Yannick Paternotte et plusieurs de nos collègues députés afin de restreindre le champ d'application de cette mesure aux entreprises ayant effectivement mis en place un PERCO.

En outre, un amendement de Jean-Pierre Decool et plusieurs de nos collègues députés, a été adopté visant à prévoir que les modalités d'information du salarié relatives à cette affectation sont déterminées par décret .

Enfin, la commission des affaires sociales du Sénat a, d'une part, simplifié la rédaction du présent article, et d'autre part, précisé que les sommes versées par les entreprises au-delà de leurs obligations légales au titre de la participation n'entrent pas dans le champ d'application de la disposition .

Votre rapporteur pour avis approuve cet article , tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, et amendé par la commission des affaires sociales. Tout d'abord, il se félicite que les salariés d'une même entreprise puissent sans effort d'épargne supplémentaire se constituer un complément de retraite , quel que soit leur niveau de salaire.

De surcroit, l'affectation automatique d'une partie de la participation sur le PERCO devrait permettre de favoriser son essor, sans coût additionnel pour l'entreprise. Votre rapporteur pour avis rappelle, ainsi qu'il l'a souligné dans le cadre de l'examen de l'article 32 bis, que la source majeure d'alimentation du PERCO est l'abondement de l'employeur, à hauteur de 42 % contre 22 % pour la participation. Cinq années après sa création, l'encours du PERCO représente moins de 3,5 milliards d'euros.

Votre rapporteur pour avis juge également pertinentes les deux limitations restreignant la portée de ce « fléchage » par défaut , c'est-à-dire la proportion de 50 % et l'existence d'un PERCO.

La première restriction vise à ne pas écarter totalement le PEE, plan d'épargne salariale d'une durée de blocage de cinq années, du circuit de financement alimenté par la participation .

La seconde limite, qui exclut du champ d'application du présent article les entreprises n'ayant pas ouvert un PERCO , a pour objet de ne pas contraindre les petites structures sans PERCO à instituer un tel plan afin de recueillir la moitié du flux de la participation par défaut.

Votre rapporteur pour avis tient à rappeler que la mise en place d'un PERCO est facultative. Les entreprises de plus de cinquante salariés pour lesquelles la participation est obligatoire doivent mettre en place un PEE sur lequel ces sommes sont versées. En revanche, s'agissant du PERCO, ces entreprises ne sont soumises qu'à une obligation de négocier l'institution d'un tel plan et non de l'ouvrir. Le plan n'est pas mis en oeuvre si les négociations échouent.

Votre rapporteur pour avis s'est en outre interrogé sur la pertinence d'étendre une telle disposition aux contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies (article 83 du CGI). Or, après un examen approfondi, il n'a pas souhaité proposer une telle mesure, en raison de la nature même des dispositifs en question.

La participation comme l'intéressement alimentent exclusivement les dispositifs d'épargne salariale , le PEE et le PERCO. Le choix du salarié est de surcroît totalement libre. Il peut percevoir directement les sommes issues de l'intéressement et de la participation ou les verser sur le PEE ou sur un PERCO.

En revanche, les contrats à cotisations définies de « l'article 83 », sont quant à eux alimentés par des cotisations obligatoires , versées par l'employeur et les salariés. Ils sont généralement réservés à une catégorie de salariés (pour un peu moins des deux tiers en moyenne), contrairement à la participation et à l'intéressement, ouverts à tous.

La gouvernance est également différente . Les fonds des PERCO sont tous dotés d'un conseil de surveillance composé à 50 % au moins de représentants des salariés. Les contrats à cotisations définies n'en sont pas pourvus.

Enfin, il convient de souligner qu'une affectation par défaut de la moitié de la participation sur un PERCO semble présenter plus d'avantages d'un point de vue macroéconomique et microéconomique que sur un contrat dit  « article 83 » . Le salarié qui n'a pas expressément exercé son choix d'affectation voit ses fonds bloqués pour sa retraite dans un outil plus souple que les contrats à cotisations définies. Il peut en sortir de manière exceptionnelle, par exemple, pour acheter sa résidence principale, ce qui n'est pas possible dans le cas d'un contrat relevant de « l'article 83 ». Sa sortie ne s'effectue pas uniquement en rente, mais il peut demander à ce que lui soit versé un capital.

S'agissant des aspects macroéconomiques, force est de constater que l'épargne salariale est investie aux deux tiers en actions , alors que les produits d'assurance tels que les contrats à cotisations définies sont généralement plus orientés vers des produits en taux.

En conséquence, maintenir le lien naturel entre participation et dispositif d'épargne salariale , d'une part, et favoriser par voie de conséquence un investissement un peu plus orienté vers les fonds en action , d'autre part, justifient de ne prévoir ce « fléchage » de la participation qu' en faveur du PERCO , à l'exclusion des produits d'assurance.

C'est pourquoi, votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 32 ter .

4. L'obligation de négociation de branche pour la mise en place d'un PERCO, PERE ou GERP (article 32 quater)

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté un article additionnel à l'initiative de son rapporteur pour avis, de la commission des finances, Laurent Hénart, et de Yannick Paternotte, afin d'imposer au I, l'ouverture de négociations de branche, en vue de la mise en place de PERCO de branche au plus tard le 31 décembre 2012 . A défaut d'initiative patronale dans ce sens, une organisation de salariés représentative peut demander que soit engagée une telle négociation, dans les quinze jours du délai précité.

Le I a été complété en séance publique, après l'adoption d'un amendement de Cécile Dumoulin, Arnaud Robinet et Yannick Paternotte, afin d' étendre l'obligation de négociation au PERE ainsi qu'au groupement d'épargne populaire ( Gerp ).

Le II de l'article précise que sont exclues du champ d'application de l'article L. 3334-5 du code du travail, les entreprises ayant adhéré à un PERCO Interentreprises (PERCOI), conclu en vertu de l'article L. 2241-8 du code précité relatif aux conventions de branche.

La commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement de nature rédactionnelle.

Tout d'abord, votre rapporteur pour avis approuve l'initiative de l'Assemblée nationale. En effet, le I vient compléter le droit existant prévu à l'article L. 2241-8 . Ce dernier dispose que les organisations liées par une convention de branche doivent se réunir une fois tous les cinq ans afin d'engager une négociation sur la création d'un dispositif d'épargne salariale interentreprises lorsqu'il n'existe aucun accord de ce genre à ce niveau.

Aux termes du nouvel article 32 quater , le rythme quinquennal ainsi fixé devra donc jouer à compter du 31 décembre 2012 , en l'absence de plan d'épargne salariale de branche. Cette mesure devrait, en conséquence, favoriser l'essor des PERCO.

Ensuite, votre rapporteur pour avis se déclare favorable à l'extension de la disposition aux PERE et aux Gerp.

Complétant l'initiative de l'Assemblée nationale, votre commission des finances a , à l'initiative de votre rapporteur pour avis, adopté deux amendements afin notamment d'inclure dans le champ d'application du présent article, les contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies relevant du régime de l'article 83 du cgi.
Ces amendements sont présentés dans le A du III ci-après .

Enfin, en ce qui concerne le II du présent article, votre rapporteur pour avis relève que la « déliaison » entre PEE et PERCOI dérogeant ainsi à l'article L. 3334-5 du code précité vise à favoriser l'adhésion des entreprises à un PERCOI. En effet, conformément à cet article, une entreprise ne peut mettre en place un PERCO ou un PERCOI que si les salariés ont la possibilité d'opter pour un PEE ou un PEI. Dorénavant, grâce à la dérogation posée par le II du présent article, les entreprises adhérant à un PERCO interentreprises de branche, dans le cadre de l'article L. 2241-8, pourront le faire sans mettre en place un PEE.

5. L'obligation d'institution d'un dispositif d'épargne retraite en cas de mise en oeuvre d'un régime de retraite dit « chapeau » (article 32 quinquies)

Si l'offre de dispositif de contrats de retraite supplémentaire est large, elle n'est pour autant pas générale . C'est pourquoi la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté deux amendements, à l'initiative de son rapporteur et de la commission des finances, visant à prévoir qu'un dispositif de retraite réservé à une catégorie de salariés ne peut être mis en place dans l'entreprise que s'il existe un dispositif ouvert à tous .

Cette disposition a été restreinte en séance publique , à l'initiative de notre collègue député Laurent Hénart, aux seules retraites dites de « l'article 39 » , ou régimes à prestations définies, dans lesquels l'entreprise s'engage à verser un pourcentage du salaire.

Votre rapporteur pour avis s'est interrogé sur la pertinence de cette restriction. Il rappelle que la notion de retraite « chapeau » ne correspond pas à un seul régime et une seule catégorie professionnelle.

En premier lieu, ce dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies peut être de caractère « additif » ou « différentiel » . Le régime additionnel permet de percevoir un revenu de remplacement égal à un pourcentage du salaire en fin de carrière. En revanche, le régime différentiel tend à garantir un complément de revenu calculé pour que l'ensemble des pensions de retraite perçues par les salariés atteigne un niveau prédéterminé du salaire en fin de carrière.

En second lieu, il convient de relever que l'ensemble des retraites « chapeaux » mises en oeuvre dans approximativement 11 000 entreprises ne sont pas uniquement de nature catégorielle . 28 % des « articles 39 » proposés sont ouverts à l'ensemble des salariés. 69 ( * ) Quant aux dispositifs uniquement destinés à certaines catégories, seuls 12 % d'entre eux ne concernent que les cadres dirigeants.

Le champ d'application du présent article a été à nouveau délimité par la commission des affaires sociales du Sénat , qui en a exclu les entreprises dont les régimes « chapeaux » n'accueillent plus de nouveaux adhérents. En effet, cette situation ne répond pas à l'objectif du présent article, dans la mesure où le régime est fermé. En outre, cette fermeture du régime aux nouvelles adhésions est généralement justifiée pour des raisons d'équilibre financier ou démographique. Il est probable que, si l'entreprise ne peut accepter de nouveaux adhérents, elle ne pourra donc pas proposer un autre plan d'épargne retraite à l'ensemble des salariés.

Nonobstant les précédentes remarques, votre rapporteur pour avis approuve les dispositions du présent article telles qu'adoptées par l'Assemblée nationale et la commission des affaires sociales du Sénat . Sans imposer le même régime pour tous, cet article vise à instaurer une équité entre salariés en termes d'accès aux dispositifs d'épargne retraite. Une logique similaire a été mise en oeuvre dans le cadre de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail, en prévoyant que l'attribution de stock-options aux mandataires sociaux soit conditionnée à l'attribution de stock-options ou d'actions gratuites à tous les salariés, ou à l'existence d'un accord d'intéressement ou de participation dérogatoire, par nature ouvert à tous les salariés.

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 32 quinquies .

B. LA PRISE EN COMPTE DE L'INTÉRÊT DE L'ÉPARGNANT

Favoriser l'épargne retraite, c'est tout d'abord répondre aux besoins de l'épargnant. C'est pourquoi, l'Assemblée nationale a adopté quatre mesures relatives à la gestion des produits, aux articles 32 ter B, 32 sexies , 32 septies et 32 octies .

1. La gestion de l'épargne retraite au mieux des intérêts de l'épargnant (articles 32 ter B et 32 sexies)
a) L'encadrement de la gestion pilotée du PERCO (article 32 ter B)

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement portant article additionnel tendant à compléter l'article L. 3334-11 du code du travail afin de prévoir la mise en place d'une convention de gestion pour un PERCO . Celle-ci précise les modalités de réduction des risques de fluctuation de l'épargne à l'approche de la retraite. La rédaction de cet article a été ensuite simplifiée par la commission des affaires sociales du Sénat.

Votre rapporteur pour avis salue cette initiative d'encadrement de la gestion des PERCO. Elle vise à renforcer la protection des salariés en des temps d'incertitude financière particulièrement accrue. En effet, cette mesure offre une alternative à la gestion dite « libre » qui permet au salarié de choisir le montant et la fréquence de ses versements sur une sélection d'OPCVM proposés.

Il tient toutefois à souligner que le principe d'une gestion encadrée et « ciblée et orientée» existe déjà . En effet, le salarié peut opter dans le cadre d'une gestion programmée à horizon dite « pilotée » , pour un profil de risque en rapport avec la perspective de son départ en retraite ou l'horizon de son projet personnel. Tout en permettant au salarié de répartir librement ses versements sur une sélection d'OPCVM proposés, il revient néanmoins à la société de gestion de décider des supports de placement suivant l'âge du salarié et selon son horizon de placement, tel qu'il a été indiqué lors de la souscription.

Selon l'AFG, près de la moitié des salariés adhérents à un PERCO ont choisi la gestion pilotée .

Le salarié bénéficie alors de l'expertise des professionnels de la finance et de la retraite en matière de gestion afin d'obtenir des rendements futurs en corrélation avec l'horizon de placement, tout en limitant au fur et à mesure la prise de risque. Plus l'horizon de placement est éloigné dans le temps, plus importante est la fraction investie sur des supports de type actions , a contrario , plus l'horizon de placement sera court, moins la part consacrée aux investissements les plus risqués sera importante.

Il apparaît que les encours du PERCO sont investis en moyenne à 38 % en actions, 30 % en obligataire et 32 % en monétaire . Cette répartition est conforme au profil de risque des salariés adhérents dont l'âge moyen est entre 46 et 47 ans.

Techniques de gestion programmée à horizons dite pilotée

Le pilotage de la gestion dite programmée peut être mis en oeuvre par quatre techniques financières.

1 ère technique de pilotage - La solution dite « Arbitrages »

Une grille d'allocation est déterminée périodiquement pour chaque bénéficiaire, à partir d'une gamme de plusieurs fonds de sensibilités différentes regroupant par exemple un fonds à prédominance d'actions, un fonds à prédominance obligataire et un fonds monétaire. Cette allocation est modifiée (par exemple tous les trois mois) par arbitrages des avoirs entre les fonds.

Avantages : Ces arbitrages permettent de manière régulière d'optimiser le couple rendement-risque pour chaque bénéficiaire.

Inconvénients : Peu significatifs.

2 ème technique de pilotage - La solution dite « Accumulation » ou système « Noria »

Les investissements portent sur des supports à volatilité et risque décroissants par périodes successives. L'ensemble du portefeuille est transféré à l'issue de chaque période dans un autre fonds dont le benchmark est adapté à la durée restant à courir.

Avantages : C'est la méthode la plus fréquemment utilisée par les assureurs.

Inconvénients : Les changements de profil sont automatiques. En cas de baisse prononcée des marchés actions les premières années, l'épargne du salarié ne pourra profiter pleinement d'une reprise sur plus long terme. Avec le recul, il apparaît sur long terme que les rentabilités dégagées par ce système avaient été inférieures aux attentes.

3 ème technique de pilotage - La solution dite « Génération »

Elle porte sur un seul fonds à horizon déterminé pour une génération ou tranche d'âge et son benchmark évolue en fonction de l'horizon résiduel de placement. Chaque génération ou classe d'âge a « son » fonds.

Avantages : C'est une méthode qui a fait ses preuves dans le cadre de la gestion de la Participation.

Inconvénients : Cette méthode est coûteuse administrativement car elle nécessite la création de nombreux fonds dont les encours seraient très faibles au démarrage. Cette solution implique la création de fonds différents des PEE avec des possibilités de confusion pour les salariés.

4 ème technique de pilotage - La solution dite « Millefeuilles »

Les investissements portent sur des supports à volatilité et risque décroissants par périodes successives. Le changement de profil ne concerne que les cotisations à venir. Les avoirs constitués sont maintenus sur les supports d'origine. Ainsi, un salarié ayant un horizon de placement de vingt-cinq ans au minimum verra les cinq premières années de son épargne investie sur un support actions, cette fraction d'épargne constituée restant sur ce support action pendant vingt ans.

Avantages : Les porteurs peuvent ainsi profiter d'une reprise du marché des actions qui se produirait en fin de période après de fortes baisses ou des périodes de stagnation. C'est une méthode qui permet à long terme de diminuer les risques d'évolution défavorables des marchés les plus risqués.

Inconvénients : La protection contre la volatilité est étroitement dépendante des cadences de versements. C'est une formule à déconseiller si les premiers versements sont prépondérants et s'ils ne sont pas réguliers car la structure du portefeuille serait déséquilibrée.

Il convient également de prévoir un système permettant de déceler les arrêts de versements des salariés ou l'apparition d'un déséquilibre de leur capital afin de sécuriser leur épargne le plus possible, en vue du départ à la retraite. En outre, l'épargne accumulée doit être sécurisée sur un support sans risque monétaire au moins un an avant le départ à la retraite.

Source : AFG

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 32 ter B.

b) La communication de l'estimation du montant de la rente viagère (article 32 sexies)

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement portant article additionnel, à l'initiative de Yanick Paternotte et plusieurs de nos collègues députés, tendant à renforcer le dispositif d'information annuelle pour les contrats d'épargne retraite, en introduisant une information spécifique sur les rentes .

Cet article, modifié de manière rédactionnelle par la commission des affaires sociales du Sénat, dispose que « l'entreprise d'assurance ou de capitalisation fournit, dans cette communication, une estimation du montant de la rente viagère qui serait versée » à l'assuré au titre d'un contrat d'assurance retraite. Il rappelle que l'entreprise doit préciser la capacité de transfert du contrat auprès d'un autre gestionnaire.

Votre rapporteur pour avis approuve l'ajout de l'Assemblée nationale, constatant la préférence des Français pour la sortie en capital plutôt qu'en rente. En effet, l'un des problèmes majeurs de la commercialisation des produits de retraite en rente réside dans la difficulté de convaincre l'épargnant d'investir des sommes sans pouvoir indiquer de façon certaine le montant de la rente qu'il percevra.

En dehors de tout aspect fiscal, sa réhabilitation tend à passer par l'accroissement de la transparence et de la communication sur le montant éventuel de la rente, conformément à la mesure ainsi votée à l'Assemblée nationale.

Afin d'assurer une entière efficacité aux dispositions du présent article, votre commission des finances a , à l'initiative de son rapporteur pour avis, adopté un amendement visant à prévoir un décret d'application. Cet amendement est présenté dans le C du III ci-après.

2. L'assouplissement des régimes du Perp et des contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies de « l'article 83 » (articles 32 septies et 32 octies)

Deux mesures ont pour objet d'atténuer l'impact de l'effet « tunnel » du mécanisme de rente viagère , peu apprécié des français.

a) La sortie partielle en capital d'un contrat Perp (article 32 septies)

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement, à l'initiative de Yannick Patternotte et plusieurs de nos collègues députés, visant à permettre le dénouement en capital d'un Perp , à compter de l'âge de la retraite. Cette sortie est limitée à hauteur de 20 % de la valeur de rachat du contrat, au lieu et place d'une rente viagère.

Le présent article a été adopté sans modification par la commission des affaires sociales du Sénat.

Votre rapporteur pour avis tient à rappeler que le Perp, créé par la loi portant réforme des retraites du 21 août 2003, est un contrat d'assurance accessible à tous, souscrit de façon individuelle et facultative . Cette épargne est servie sous forme de rente viagère.

En dépit d'un début réussi en 2004, qui lui a permis d'atteindre très rapidement les 2 millions d'affiliés, il voit ses souscriptions diminuer , depuis lors, d'année en année. Seuls 62 000 plans ont été souscrits en 2009 (29 000 au 30 juin 2010), portant à 2,1 millions le nombre de Perp ouverts fin 2009. Si les encours du Perp s'élèvent à 5,28 milliards d'euros en 2009 et 5,66 milliards d'euros au 30 juin 2010, ce montant ne représente que 2 500 euros en moyenne par plan.

Produit « tunnel » ne permettant la sortie qu'en rente, le Perp est jugé comme contraignant , en dépit d'un assouplissement en 2006, afin de permettre une sortie en capital pour l'acquisition, en primo accession, d'une résidence principale. Votre rapporteur pour avis relève que cette sortie en rente peut être jugée comme un des obstacles majeurs à sa commercialisation.

Le présent article tend donc à apporter une certaine souplesse au dispositif en vigueur, sans remettre en cause le caractère profond de produit d'assurance retraite , bloqué jusqu'à la cessation d'activité avec une sortie en rente.

C'est pourquoi, la commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 32 septies .

b) Les versements facultatifs sur les contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies de « l'article 83 » (article 32 octies)

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement portant article additionnel, à l'initiative d'Arnaud Robinet, tendant à ouvrir la possibilité aux adhérents de contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies relevant de l'article 83 du CGI de procéder à des versements individuels.

Puis la commission des affaires sociales du Sénat en a modifié la rédaction afin d'en simplifier le dispositif.

Votre rapporteur pour avis observe que les contrats d'assurance retraite relevant du régime de l'article 83 du CGI sont à cotisations définies. Ils se présentent sous la forme d'une assurance de groupe qui s'impose à la totalité du personnel de l'entreprise ou à une catégorie donnée .

En effet, si la mise en oeuvre de ce contrat est facultative pour l'entreprise, les salariés appartenant à la catégorie visée sont obligatoirement souscripteurs, en cas d'institution de ce plan. Un taux uniforme de cotisation pour tous les salariés appartenant à ladite catégorie, est alors défini.

La sortie s'effectue sous forme d'une rente viagère , lors du départ en retraite, que le salarié soit présent ou non dans l'entreprise à cette date. Néanmoins, si le salarié quitte l'entreprise avant la retraite, les cotisations cessent d'être dues. L'épargne retraite constituée sur le compte individuel continue d'être valorisée chaque année jusqu'au départ à la retraite.

Votre rapporteur pour avis approuve l'adoption d'une mesure visant à assouplir le régime des contrats de « l'article 83 » L'élargissement de la source d'alimentation de ce type de plan d'épargne s'inscrit dans la volonté de favoriser l'essor de l'épargne retraite comme complément de ressources.

Ce contrat concerne entre 1,5 et 2,5 millions de personnes pour un stock de 42 milliards d'euros, soit près du tiers de l'encours total des contrats d'assurance retraite, fin 2009.

Les dispositions du présent article devraient favoriser les efforts individuels en vue de se constituer une retraite suffisante. En effet, si la définition des cotisations des salariés à un taux uniforme permet une certaine maîtrise du financement du plan, elle est néanmoins contraignante pour le salarié, en ne lui permettant pas de verser des cotisations supplémentaires afin d'augmenter le niveau de sa rente. Si le taux de cotisation est fixé de manière identique, le niveau de la rente ne l'est pas. Il dépend de la durée de cotisation et des rendements financiers.

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 32 octies .

III. LES MESURES PROPOSÉES PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES : UN ENRICHISSEMENT DE L'OFFRE DES PRODUITS D'ÉPARGNE RETRAITE CONFORME AUX BESOINS DES ÉPARGNANTS

Si votre rapporteur pour avis approuve les mesures adoptées par l'Assemblée nationale, il a néanmoins voulu poursuivre l'action ainsi engagée en :

- étendant certaines des mesures à d'autres produits que l'épargne salariale, tels que les contrats d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies, les PERE et les Perp ;

- élargissant les sources d'alimentation de l'épargne retraite ;

- prévoyant des mesures d'assouplissement complémentaires .

De surcroît, il a souhaité évoquer la question de la lisibilité des dispositifs d'épargne retraite.

A. L'ÉLARGISSEMENT DU CHAMP D'APPLICATION

Soucieux de garantir l'accès le plus large au plus grand nombre de salariés, votre rapporteur pour avis a proposé d'amender l'article 32 bis .

1. L'alimentation du PERE, des contrats de « l'article 83 » ou des Perp par les jours de congés non utilisés (article 32 bis)

La commission des finances, à l'initiative de votre rapporteur pour avis, a adopté un amendement à l'article 32 bis relatif au PERCO, afin d'en étendre la portée à d'autres produits de retraite de nature assurancielle . Il s'agit du PERE, des contrats de retraite d'entreprise à cotisations définies relevant de l'article 83 du CGI et du Perp, en l'absence de l'un de ces produits ou du PERCO.

Votre rapporteur pour avis relève que dans le cadre de l'entreprise, le taux d'équipement des entreprises en retraites supplémentaires de type « articles 83 », « 82 », « 39 » ou PERE ne s'élève qu'à 27 % 70 ( * ) .

S'il est favorable à l'alimentation d'un PERCO par les jours de congés au titre de la réduction du temps de travail (RTT) non utilisés, il lui semble nécessaire d'en étendre le bénéfice aux autres plans d'épargne retraite de nature assurancielle. Il juge essentiel que puisse exister au sein de l'entreprise une offre alternative de produits de retraite collectifs, obéissant à deux logiques différentes , celle de l'épargne salariale incarnée par le PERCO et celle assurantielle dont les contrats de « l'article 83 » constituent le fleuron. Ces offres doivent coexister, sans concurrence, dans la mesure où chacune peut répondre à des besoins différents de l'épargnant salarié.

C'est pourquoi votre commission des finances a adopté un amendement visant, en conséquence, en l'absence d'un compte d'épargne temps, à donner au salarié le choix de l'affectation des sommes provenant des jours de RTT non utilisés . Ces sommes peuvent abonder, non seulement un plan d'épargne salariale comme le PERCO, mais également un produit d'assurance comme le PERE ou un contrat d'épargne retraite d'entreprise à cotisations définies ( « article 83) ou même un produit à souscription individuelle comme le Perp, en l'absence de l'un des plans précités.

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 32 bis ainsi modifié.

2. L'extension de l'obligation de négociation de branche aux contrats d'assurance retraite d'entreprise dit de « l'article 83 » (article 32 quater)

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté un amendement portant article additionnel visant à d'imposer l'ouverture de négociations de branche, en vue de la mise en place au plus tard le 31 décembre 2012, soit d'un PERCO, soit d'un PERE, soit d'un groupement d'épargne populaire, de branche .

Approuvant les dispositions de l'article 32 quater , votre rapporteur pour avis souhaite néanmoins en étendre le champ d'application. En effet, il juge nécessaire de permettre l'accès le plus large, non seulement à l'offre relevant de l'épargne salariale (PERCO) mais également aux produits d'épargne retraite de type assurantiel.

Votre commission des finances a, en conséquence, adopté un amendement tendant à compléter le présent article afin d'y inclure les contrats d'entreprise de retraite à cotisations définies relevant de l'article 83 du code général des impôts.

Elle a également voté un amendement de coordination , afin de modifier l'article L. 2241-8 du code précité, le I de l'article 32 quater ne pouvant être codifié dans une sous-section dédiée uniquement à l'épargne salariale. Cet amendement de conséquence tend donc à inscrire la date butoir d'engagement des négociations de branche en vue de la mise en place d'un PERCO dans l'article même qui prévoit cette obligation.

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 32 quater ainsi modifié .

B. L'ÉLARGISSEMENT DES SOURCES D'ALIMENTATION

Votre rapporteur pour avis a proposé deux voies de dynamisation des flux de l'épargne retraite : l'épargne salariale d'une part, et l'assurance sur la vie , d'autre part.

1. L'alimentation par défaut du PERCO par le flux de l'intéressement à hauteur de 25 % (article additionnel après l'article 32 ter)

L'intéressement est un dispositif facultatif qui permet aux employeurs de verser aux salariés des sommes calculées en fonction des performances ou des résultats de l'activité. Ces dernières sont immédiatement disponibles pour le salarié et sont exonérées, dans certaines limites, de cotisations sociales.

Toutefois, le salarié peut affecter tout ou partie de sa prime d'intéressement sur un plan d'épargne salariale , si un tel plan a été mis en place dans son entreprise.

Or, à la différence de la participation désormais systématiquement adossée au moins à un PEE, l'intéressement n'est pas obligatoirement complété par un plan d'épargne . En conséquence, de nombreux accords d'intéressement ne permettent pas à ce jour aux salariés bénéficiaires de se constituer une épargne de moyen terme, dans un PEE ou de plus long terme, dans un PERCO.

A l'initiative de votre rapporteur pour avis, la commission des finances a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 32 ter, visant à pallier cet inconvénient en prévoyant l'affectation par défaut du quart de la prime d'intéressement sur le PERCO, s'il existe dans l'entreprise .

Il s'inscrit dans la démarche suivie par nos collègues députés, dans le cadre de l'adoption de l'article 32 ter qui a prévu une affectation par défaut de la moitié de la participation sur le PERCO.

S'agissant de la portée de la mesure, votre rapporteur pour avis relève que les dispositifs d'intéressement concernent près de 5 millions de salariés pour un montant total annuel brut distribué de l'ordre de 7 milliards d'euros 71 ( * ) . Or, près d'un tiers seulement de l'intéressement est aujourd'hui investi dans un plan d'épargne salariale . Le PEE est très largement privilégié par rapport au PERCO. Le flux moyen annuel issu de l'intéressement et versé dans les PERCO s'élève à environ 100 millions d'euros, ces trois dernières années.

Selon l'Association française de gestion financière (AFG), plus de 1,5 million de salariés, sur les 5 millions de bénéficiaires de l'intéressement, perçoivent aujourd'hui intégralement leur prime sans l'avoir expressément demandé et ne constituent donc pas d'épargne. Il apparaît donc pertinent d'orienter vers le PERCO un quart de la prime d'intéressement, dans la mesure où le salarié n'a pas indiqué de destination des sommes particulière.

Cette affectation « par défaut » respecte donc la liberté du salarié de percevoir directement tout ou partie de son intéressement ou de décider d'épargner selon les possibilités offertes dans son entreprise.

Votre commission des finances vous propose d'adopter le présent article additionnel après l'article 32 ter .

2. La transformation de l'assurance vie en épargne retraite (article additionnel après l'article 32 octies)

Votre rapporteur pour avis a souhaité compléter les mesures adoptées par l'Assemblée nationale afin de renforcer l'alimentation et la souscription de produits d'épargne retraite.

Si le poids des retraites facultatives a doublé de 2004 à 2008, en passant de 3 à 6 milliards d'euros, celui des retraites servies par les régimes obligatoires est passé de 199 milliards à 245 milliards d'euros 72 ( * ) . Accroître la part des retraites facultatives, sans remettre en cause le régime par répartition est donc possible

Il est souhaitable de poursuivre les travaux de l'Assemblée nationale en utilisant, toutefois, une autre voie de préparation à la retraite que les dispositifs d'entreprise, en permettant la transformation des contrats d'assurance sur la vie en produit d'épargne retraite. On constate que l 'encours des produits d'assurance retraite représente moins de 10 % des provisions vie de l'assurance sur la vie (112,5 milliards d'euros 73 ( * ) ).

Plus de 14 millions de souscripteurs de contrats d'assurance sur la vie peuvent être potentiellement intéressés par cette transformation.

L'enjeu est de taille car les provisions mathématiques de ces contrats s'élèvent en 2009, à environ 1 312,5 milliards d'euros. Dans l'hypothèse d'une progression de 5 % par an, selon la FFSA, elles devraient atteindre 2 000 milliards d'euros en 2020. Il s'agit donc d'orienter une partie de cette épargne liquide vers l'épargne longue bloquée jusqu'à la retraite .

A l'initiative de votre rapporteur pour avis, la commission des finances a ainsi adopté un amendement portant article additionnel après l'article 32 octies tendant à orienter une partie du stock d'assurance vie vers l'épargne retraite.

Aux termes du présent article additionnel, la transformation de l'encours d'assurance sur la vie en épargne destinée à la préparation financière de la retraite repose sur une décision du souscripteur , qui intervient au moment où il dispose à la fois d'une épargne ainsi que d'une visibilité sur son montant de retraite future. Le dispositif proposé prévoit que ce choix s'opère, soit à partir de l'âge de cinquante-cinq ans, soit après une durée de détention de huit années .

Tout ou partie du contrat d'assurance sur la vie est alors transformé en un produit d'épargne retraite relevant du Titre V de la loi « Fillon » . Outre le choix du blocage, l'assuré opte ainsi pour une sortie en rente et non en capital, à l'exception, d'une part, des quatre cas visés à l'article L. 132-23 du code des assurances 74 ( * ) et, d'autre part, des tempéraments éventuels en cours d'examen dans le cadre de la présente loi, c'est-à-dire notamment le déblocage anticipé en cas de décès du conjoint ou de surendettement.

Rappel du traitement fiscal du dénouement d'un contrat d'assurance vie

L'assuré qui souhaite percevoir une partie ou la totalité de son capital, est imposé à l'impôt sur le revenu sur les produits du contrat.

A défaut d'imposition sur le revenu, le contribuable peut opter pour le prélèvement libératoire forfaitaire à hauteur de :

- 35 % lorsque le retrait est effectué pendant les quatre premières années ;

- 15 % lorsque le retrait est opéré entre la cinquième et la huitième année ;

- 7,5 % à partir de huit ans.

Pour les contrats de plus de huit ans, l'assuré bénéficie d'un abattement de 4 600 euros pour les célibataires et de 9 200 euros par couple. En deçà de ces montants de produits obtenus par le rachat de tout ou partie du capital, la sortie du contrat s'opère sans fiscalité. A cette imposition s'ajoutent les prélèvements sociaux à hauteur de 12,1 %, depuis le 1 er janvier 2009.

Source : FFSA

De surcroît, le texte du présent article additionnel précise que la phase de constitution des droits ne peut être inférieure à une durée de cinq années .

Enfin, soucieux de ne pas aggraver le déséquilibre des finances publiques mais de participer à leur rétablissement, votre rapporteur pour avis tient à préciser que les modalités fiscales de ce dispositif seront examinées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 prévoyant un redéploiement des dépenses fiscales.

Il rappelle que ce choix offert aux quatorze millions d'assurés est pertinent tant du point de vue microéconomique que macroéconomique . Il vise à participer à la préparation financière de la retraite ainsi qu'au financement de l'économie, via la constitution d'une épargne longue. En outre, une telle mesure tend à réhabiliter la rente, « mal-aimée » des Français .

Cette disposition ne remet pas en cause le régime par répartition en lui substituant une capitalisation forcée . Les encours de l'assurance vie existent. Ils sont déjà investis. Leur attribuer un horizon plus lointain afin de répondre à un besoin de complément de revenus à la retraite, en dehors du cadre de l'entreprise, est cohérent avec l'élargissement de l'offre de produits aux épargnants.

Votre commission des finances vous propose d'adopter le présent article additionnel après l'article 32 octies .

C. L'ASSOUPLISSEMENT DES RÈGLES

1. La simplification des règles de gouvernance du Perp (article additionnel après l'article 32 septies)

Le Perp est un contrat d'assurance retraite de groupe souscrit par un groupement d'épargne retraite populaire ( GERP ) en vue de l'adhésion individuelle de ses membres. Ce dernier est une association à but non lucratif dont l'objet est la représentation des intérêts des participants d'un ou de plusieurs Perp.

Sa gouvernance est particulièrement complexe puisque s'ajoutent aux organes habituels de gestion et de contrôle des adhérents du niveau associatif (le conseil d'administration et l'assemblée générale) deux structures supplémentaires : le comité de surveillance et l'assemblée des participants.

Ces quatre niveaux de gouvernance des Perp peuvent être sources de coût, sans nécessairement apporter d'avantages substantiels aux assurés. Ils peuvent être de nature à pénaliser le développement de ce contrat qui, en dépit d'un lancement réussi en 2004, se développe plus lentement désormais.

En termes de flux, le nombre de plans souscrits depuis 2004 diminue régulièrement. Les adhésions ne se comptent aujourd'hui que par dizaine de milliers. A fin juin 2010, 29 000 nouveaux plans d'épargne retraite populaire ont été souscrits auprès des sociétés d'assurances contre 84 000 en 2008 et 130 000 en 2007.

S'agissant du stock de Perp, il s'élève à près de 2,1 millions au 30 juin 2010, soit une progression de 2 % sur un an. Cette hausse est à apprécier à l'aune de l'essor du PERCO, qui bien que ne concernant au 30 juin 2010 que 630 000 salariés ayant effectué un versement, voit son nombre croître de 31 % par rapport à 2009.

C'est pourquoi la commission des finances a adopté, à l'initiative de votre rapporteur pour avis, un amendement portant article additionnel après l'article 32 septies afin d'introduire une certaine souplesse dans le mode de gouvernance décrit ci-dessus, en permettant au conseil d'administration de l'association d'exercer les fonctions du comité de surveillance d'un plan, dans des conditions fixées par décret.

Votre commission des finances vous propose d'adopter le présent article additionnel après l'article 32 septies .

2. L'élargissement des possibilités de sortie des produits en rente (article additionnel après l'article 32 septies)

Votre rapporteur pour avis a proposé que soient élargis les cas de rachat des contrats d'assurance retraite en phase de constitution à deux situations relevant des accidents de la vie.

En effet, aux termes de l'article L. 132-23 du code des assurances, ces contrats ne comportent pas de possibilité de rachat. Ce sont des produits dits « tunnels » dont la sortie ne s'effectue qu'en rente. L'article L. 132-23 prévoit toutefois quatre exceptions :

- l'expiration des droits de l'assuré aux allocations chômage ;

- le fait de ne pas être titulaire d'un contrat de travail ou d'un mandat social depuis deux ans au moins à compter du non-renouvellement de son mandat social ou de sa révocation ;

- la cessation d'activité non salariée de l'assuré à la suite d'un jugement de liquidation judiciaire ;

- l'invalidité de l'assuré.

Votre rapporteur pour avis a jugé nécessaire de compléter cette liste par deux cas supplémentaires qui ne relèvent pas du contrôle de l'assuré : le décès du conjoint ou le surendettement. La commission des finances a donc adopté, à son initiative, un amendement en ce sens portant article additionnel après l'article 32 septies.

Votre commission des finances vous propose d'adopter le présent article additionnel après l'article 32 septies .

3. Les modalités de mise en oeuvre de l'obligation d'estimation de la rente (article 32 sexies)

S'agissant de la communication de l'estimation de la rente, visée à l'article 32 sexies , votre rapporteur pour avis souhaite que cette obligation soit encadrée par un décret, afin d'en préciser les modalités d'application.

A son initiative, la commission des finances a adopté un amendement en ce sens. Cette communication doit conduire à une information réelle et exploitable par l'épargnant. Il conviendra, notamment, de prendre en compte la nature des supports d'investissements, unités de compte ou fonds en euros.

Votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 32 sexies ainsi modifié.

D. LE RENFORCEMENT DE LA LISIBILITÉ DES PRODUITS D'ÉPARGNE RETRAITE

Votre rapporteur pour avis salue l'initiative de la commission des affaires sociales du Sénat qui a inséré , dans un article additionnel avant l'article 32 bis (article 32 bis C (nouveau)) , la définition de l'épargne retraite , telle que formulée dans le rapport d'information précité de Philippe Marini.

Force est de constater que si l'offre des produits d'épargne retraite est éclectique, elle demeure essentiellement complexe et difficilement compréhensible de la part des salariés. Les références aux articles du code général des impôts tels que les articles 39, 82 ou 83 ne permettent pas de renseigner les salariés, désireux de se constituer un complément de retraite.

De nombreux produits existent, tant sur le plan professionnel qu'individuel, accompagnés de leur fiscalité avantageuse à l'entrée ou à la sortie du produit et d'une gestion de type assurantielle ou financière. Chaque épargnant en fonction de sa situation, haut ou bas salaire, peut avoir accès à ces produits. Pour autant, l'épargne retraite ne connaît pas le succès qu'elle devrait avoir, au regard de la propension des français à épargner .

Votre rapporteur pour avis appelle de ses voeux une communication claire sur l'offre des produits d'épargne retraite , tant de la part du Gouvernement que des entreprises. Il apparaît que celle-ci pourrait être harmonisée. L'épargne retraite participe à la politique sociale de l'entreprise. Favoriser la diffusion d'une information relative aux différentes caractéristiques des produits d'épargne retraite s'inscrit dans la politique de valorisation de l'entreprise.

Il s'est particulièrement intéressé à quatre pistes de réflexion qu'il souhaite voir mises en oeuvre prochainement par l'autorité règlementaire .

La première consiste en la remise à chaque salarié d'un guide de l'épargne salariale et de l'épargne retraite afin d'éclairer le salarié sur les différents produits accessibles dans l'entreprise, à l'instar de l'actuel livret d'épargne salariale.

En effet, aux termes de l'article L. 444-5 du code du travail, « Tout salarié d'une entreprise proposant un des dispositifs prévus aux articles L. 441-1, L. 442-10, L. 443-1, L. 443-1-1 ou L. 443-1-2 reçoit, lors de la conclusion de son contrat de travail, un livret d'épargne salariale présentant l'ensemble de ces dispositifs ».

Si un tel livret couvrait l'ensemble des dispositifs d'épargne retraite, le salarié disposerait alors d'un outil de déchiffrage des différents régimes juridiques afin d'arbitrer de manière optimale entre les produits.

La deuxième voie d'amélioration pourrait résider dans la communication du relevé de situation individuelle prévu par la loi « Fillon » de 2003 aux salariés de moins de 35 ans .

En effet, ce relevé fournit un certain nombre d'éléments sur les différents régimes de retraite obligatoires telle que la liste de l'ensemble des régimes dans lequel le salarié a acquis les droits à la retraite. Il est aujourd'hui adressé automatiquement, selon un calendrier d'envoi progressif, aux assurés âgés de 35 ans, 40 ans, 45 ans et 50 ans en 2010. A terme, chaque assuré recevra un relevé de situation tous les cinq ans.

Votre rapporteur pour avis souhaite que soit renforcée la campagne menée en termes d'information des droits acquis au titre des régimes obligatoires auprès des jeunes salariés de moins de 35 ans. Une telle information doit permettre d'anticiper le niveau de retraite attendu afin de le compléter éventuellement par des produits d'épargne retraite adéquats.

S'agissant du troisième axe , le renforcement de la lisibilité des systèmes supplémentaires de retraite, celui-ci traite de la terminologie des produits.

Force est de constater que les dénominations actuelles ne permettent pas une compréhension de l'offre. Qui peut comprendre qu'un contrat dit de « l'article 83 » signifie un contrat d'assurance retraite d'entreprise à cotisations définies, alors que celui de « l'article 39 » vise des prestations définies ? Comment imaginer que le Perp n'a de populaire que le nom alors qu'il est destiné aux personnes fortement fiscalisées en raison de l'avantage fiscal octroyé à la souscription ? Comment inciter les Français à souscrire des produits « tunnels » quand le terme même de rente viagère rappelle inconsciemment la fin de vie ! Sur ce dernier point, la Fédération des associations indépendantes de défense des épargnants pour la retraite (FAIDER) a proposé une dénomination plus facilement commercialisable : le « revenu à vie ».

En conséquence, votre rapporteur pour avis appelle de ses voeux une « remise à plat » de l'ensemble des régimes supplémentaires de retraite, tant du point de vue fiscal que juridique , accompagnée d'une réflexion sur la terminologie employée.

Ces travaux pourraient conduire à la codification de l'épargne retraite telle que préconisée par Philippe Marini dans son rapport précité 75 ( * ) .

CONCLUSION

Au total, la réforme présentée constitue pour tous ceux qui sont attachés à la sauvegarde du régime par répartition une étape indispensable car dictée par l'urgence .

A ce titre, votre commission des finances a donné un avis favorable à l'adoption des articles des titres II (dispositions applicables à l'ensemble des régimes, mesures d'âge), III (mesures de convergence), IV (pénibilité du parcours professionnel), V (mesures de solidarité), V bis (emploi des seniors) et V ter (épargne retraite), sous réserve de l'adoption de ses amendements.

Toutefois, aussi nécessaire soit elle, cette réforme ne permet pas de garantir la soutenabilité financière à long terme de notre système . Elle met fortement à contribution le budget de l'Etat et repose sur le pari par trop optimiste d'une amélioration franche et solide de l'environnement économique.

Le temps nous est compté. Réfléchissons rapidement à une réforme de fond de notre système qui, dans sa configuration actuelle, aura des difficultés à relever le défi démographique à compter de 2020.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. TABLE RONDE DU MERCREDI 28 AVRIL 2010

A. AUDITION DE MME DANIÈLE KARNIEWICZ, PRÉSIDENTE DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE (CNAV)

Réunie le mercredi 28 avril 2010 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a tout d'abord procédé à l'audition de Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV).

Après avoir rappelé que la réforme des retraites sera vraisemblablement étudiée par le Parlement à l'automne prochain, M. Jean Arthuis , président, a indiqué que le financement du système de retraites intéresse la commission des finances au premier plan car il modifie profondément l'équilibre des finances publiques. Selon les données publiées par le Conseil d'orientation des retraites (COR) le 14 avril 2010, le système des retraites, dans son ensemble, devra faire face à un besoin de financement annuel compris entre 40 et 48 milliards d'euros en 2020 et entre 71 et 115 milliards d'euros en 2050.

La réforme du système de retraite doit être replacée dans la problématique plus large du financement de la protection sociale et des différentes politiques publiques menées par l'Etat. Face aux déficits de la branche maladie et au défi de la prise en charge de la dépendance, définir la part des ressources nationales à consacrer au financement des retraites, et plus largement aux dépenses liées au vieillissement, représente un enjeu important. La portée d'une réforme purement « paramétrique » du système de retraite (modification de l'âge de départ à la retraite, de la durée de cotisation, du montant de cotisation ou du niveau de pensions) doit être appréciée au vu de l'ampleur des besoins de financement de la branche vieillesse. Si la résorption totale des besoins de financement est recherchée, la réforme devra nécessairement conduire à s'interroger sur une réforme globale du mode de financement de la protection sociale. Se pose également la question du rôle du Fonds de réserve des retraites (FRR). Le FRR ne sera en effet vraisemblablement pas en mesure d'accomplir la tâche pour laquelle il a été créé, à savoir dégager des réserves financières suffisantes jusqu'en 2020 pour lisser jusqu'en 2040 l'évolution des taux de cotisation aux régimes éligibles au fonds. L'idée d'une utilisation anticipée du fonds a été avancée.

Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance-vieillesse (CNAV), a tout d'abord rappelé l'importance du choc démographique que représente le départ à la retraite des générations du baby-boom d'après guerre . Actuellement, les départs annuels à la retraite s'élèvent à plus de 700.000 par an contre 400.000 il y a quelques années. Ce choc durable se traduira dans la dégradation du ratio actifs/retraités estimé à 1,21 actif pour un retraité en 2050 contre 1,82 en 2006. Cette situation a été aggravée par la crise financière qui a soustrait au régime général d'importantes recettes et, par conséquent, rend nécessaire la définition d'un nouveau schéma de financement sept ans plus tôt que prévu. S'agissant des différents scenarios adoptés par le Conseil d'orientation des retraites (COR) pour actualiser les besoins de financement du système, il convient de noter d'une part que la première hypothèse de travail, fondée notamment sur un taux de chômage à long terme de 4,5 %, est optimiste, et d'autre part que les prévisions à horizon 2050 ne sont pas fiables.

Elle a également rappelé les principaux apports des réformes précédentes, en observant que la réforme de 1993 a permis de contenir le déficit du système de retraite pendant dix ans en accroissant substantiellement les ressources par l'augmentation du taux de la contribution sociale généralisée (CSG), et en modifiant le niveau des pensions. En 2003, la durée de cotisation a été allongée de manière à accroître les ressources du système.

M. Jean Arthuis , président, s'est demandé dans quelle mesure le succès du dispositif adopté en faveur des carrières longues n'a pas remis en cause les objectifs financiers de la réforme de 2003.

Mme Danièle Karniewicz a reconnu que le coût de la mesure a été particulièrement élevé ces dernières années atteignant 2,4 milliards d'euros en 2008, ce chiffre devant néanmoins diminuer en 2010 pour s'établir à 1,6 milliard d'euros. Elle a estimé qu'il aurait été préférable de raisonner en termes de pénibilité et non de carrière longue.

Elle a attiré l'attention sur le déficit cumulé actuel du système de retraites qui requiert des solutions rapides et différentes de celles appelées à permettre la prise en charge du financement futur des pensions. Ce déficit appelle un élargissement du financement de la protection sociale, qui devrait, selon elle, être poursuivi en distinguant davantage les risques financés sur une base contributive et ceux financés sur le fondement de la solidarité nationale. Il convient d'une part, d'éviter d'asseoir exclusivement l'effort sur les salaires et d'autre part, de réfléchir à des bases nouvelles d'imposition comme par exemple une TVA sociale affectée.

En réponse à M. Jean Arthuis , président, qui s'interrogeait sur les risques de délocalisation de l'activité en cas de prélèvement supplémentaire, Mme Danièle Karniewicz a précisé qu'il est impératif de trouver de nouvelles ressources car le niveau de pension des salariés du secteur privé ne peut pas être revu à la baisse. A cet égard, il serait opportun de définir un « bouclier retraites » afin de garantir à l'ensemble des actifs un revenu minimum et de restaurer un climat de confiance.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale, a remarqué que selon de nombreux observateurs, le niveau de vie des retraités français est un des plus élevés en Europe.

Mme Danièle Karniewicz a indiqué que de nombreux pays européens ont pris des mesures défavorables aux retraités. Elle a souligné qu'agir sur ce paramètre dans le cadre de la future réforme représente un risque pour le pacte social français. Si le niveau de vie moyen des retraités français peut paraître satisfaisant d'un point de vue statistique, il convient de noter que celui-ci ne s'apprécie pas à l'aune des seules pensions versées par les régimes obligatoires, et qu'une moyenne masque d'importantes disparités. A cet égard, la question des petites retraites ne doit pas être éludée. Les taux de remplacement varient fortement en fonction du niveau de cotisation et du parcours professionnel. Un taux qui serait inférieur à 50 % ne serait pas acceptable.

M. Philippe Marini , rapporteur général, a souhaité avoir des précisions sur le « bouclier retraites ».

Mme Danièle Karniewicz a indiqué que les principes du minimum contributif ou des pensions de réversion peuvent inspirer différentes solutions. Toutefois, le coût du bouclier peut varier sensiblement en fonction du seuil retenu, ce qui nécessite des simulations qui pourraient être demandées par le Parlement.

M. Philippe Marini , rapporteur général, s'est interrogé sur les possibilités de calculer un salaire de référence. Mme Danièle Karniewicz a estimé que si cet exercice est relativement aisé pour les salariés du secteur privé, il est plus compliqué pour les fonctionnaires. Elle a insisté sur la nécessité de dégager un consensus sur l'organisme payeur et de mutualiser les règles de fonctionnement du « bouclier retraites » entre l'ensemble des régimes. Elle a également jugé essentiel que cette réforme puisse redonner confiance aux jeunes actifs, ce qui nécessite une transparence totale sur l'ensemble des modifications engagées.

En réponse à M. Jean-Jacques Jégou qui s'interrogeait sur le calendrier de la réforme, elle a indiqué qu'il est indispensable de prendre des décisions dès cette année car les changements structurels ne produisent leurs effets que de manière progressive.

Réagissant à la remarque de M. Jean Arthuis , président, concernant le traitement de la pénibilité du travail dans le cadre de la réforme, elle a observé qu'a priori la problématique de la pénibilité est liée à celle des conditions de travail. Sa prise en compte financière ne peut être fondée que sur la solidarité nationale. Une réflexion pourrait être engagée sur le périmètre de l'allocation pour adulte handicapé.

Après avoir fait remarquer que l'urgence financière actuelle résulte en partie de la crise économique et financière, Mme Nicole Bricq s'est interrogé sur un possible amalgame entre la nécessité de traiter le déficit actuel et l'obligation de garantir le financement futur du système de retraite.

Mme Danièle Karniewicz a confirmé que le déficit actuel du régime général nécessite de nouvelles ressources, et qu'à cet égard un impôt de consommation pourrait être envisagé car cet catégorie de prélèvement repose sur une assiette large et est d'un rendement élevé.

M. François Trucy a jugé alarmants les chiffres présentés par le COR et s'est étonné de cette situation alors même que la France possède un des meilleurs taux de fécondité d'Europe. Il s'est interrogé sur l'opportunité de modifier la durée de cotisation et a souhaité avoir des précisions sur l'âge de départ des femmes à la retraite.

Après avoir confirmé que l'âge de départ à la retraite des femmes est en moyenne plus élevé que celui des hommes, Mme Danièle Karniewicz a expliqué que modifier le nombre d'annuités n'est pas opportun : d'une part, ce n'est pas rentable à court terme car les générations actuelles qui partent à la retraite ont validé de longues durées de cotisation ; d'autre part, cela pénalisera les jeunes actifs qui entrent de plus en plus tardivement sur le marché du travail. Les générations nées après 1974 connaissent en moyenne un déficit de cotisation de sept trimestres avant l'âge de 30 ans par rapport à leurs aînés. Elle a en revanche insisté sur la nécessité de mieux prendre en compte les parcours professionnels des actifs et de comptabiliser notamment les périodes de stages.

Après avoir demandé quelles sont les principales évolutions des systèmes étrangers, M. Gérard Longuet s'est interrogé sur les limites du système de retraite par répartition et a regretté que la durée des études ne soit pas prise en compte alors même qu'elle permet un accès à des emplois mieux rémunérés assortis de cotisations sociales plus élevées.

Mme Danièle Karniewicz a souligné que le système de retraite par répartition n'a pas vocation à gommer les inégalités issues de parcours professionnels différents. A ce titre, les écarts de salaire en entreprises, notamment entre hommes et femmes, ne relèvent pas de la problématique des retraites. S'agissant des réformes opérées à l'étranger, elle a mis en garde contre le faux attrait de l'épargne retraite qui ne peut être qu'un complément du système de retraite mais non son fondement. Elle a souligné que certains pays comme l'Allemagne ont davantage de capacités à se projeter dans l'avenir et à adopter des mesures préservant l'apparition d'un déficit. L'Allemagne a ainsi décidé de repousser l'âge de départ à la retraite de 65 ans à 67 ans. Elle a enfin expliqué que si l'exemple de la Suède est souvent cité compte tenu de la réforme systémique réalisée avec l'adoption d'un régime par comptes notionnels, il n'est pas possible d'envisager une telle évolution du système français car elle demande du temps et des réserves financières. A titre d'exemple, la réforme de 1993 commence à peine à produire ses effets, dix-sept ans plus tard.

En réponse à M. Philippe Marini , rapporteur général, qui s'interrogeait sur le rôle du fonds de réserve des retraites, elle a confirmé que le FRR ne pourra pas remplir la mission pour laquelle il a été créé, ce qui rend indispensable une réforme permettant de pallier cet état de fait. Une utilisation anticipée du fonds peut être envisagée ; toutefois il convient au préalable de prendre les mesures qui permettront un financement pérenne du système de retraites. L'utilisation du FRR ne peut pas être assimilée à une dispense de réforme.

S'agissant des exonérations de charges sociales qui sont en partie compensée par l'Etat, il convient d'être particulièrement prudent car une remise en cause de cette politique pourrait avoir un impact négatif sur la situation de l'emploi. Néanmoins, les allègements généraux créent un problème de financement de la protection sociale et favorisent un écrasement des grilles salariales ainsi que la création de « trappe à bas salaire ».

M. Philippe Marini , rapporteur général, a estimé qu'il convient de cibler davantage les exonérations de charges sur les bas salaires.

M. Jean Arthuis , président, a souligné la nécessité de privilégier la transparence et la lisibilité dans la conduite de la réforme des retraites.

M. Jean-Jacques Jégou a insisté sur la nécessité d'adopter non seulement des mesures en faveur du financement futur du système de retraites, mais aussi des dispositions de nature à traiter le déficit cumulé du régime général et du FSV qui, à la fin 2009, était estimé aux alentours de 28 milliards d'euros.

B. AUDITION DE M. RAOUL BRIET, PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SURVEILLANCE ET MM. YVES CHEVALIER ET ANTOINE DE SALINS, MEMBRES DU DIRECTOIRE DU FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES (FRR)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Raoul Briet, président du conseil de surveillance et MM. Yves Chevalier et Antoine de Salins, membres du directoire du Fonds de réserve pour les retraites (FRR).

Avant d'aborder la problématique du « Rendez-vous 2010 » sur les retraites et le rôle du FRR, M. Raoul Briet , président du conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites, a présenté la stratégie d'investissement du Fonds mise en oeuvre depuis juin 2004. Il a rappelé que les trois premières années de gestion ont permis d'enregistrer des résultats positifs avant que les crises financière de 2007 puis économique de 2008 ne provoquent une chute de la valeur des actifs. Le rebond de 2009 a cependant permis au FRR d'absorber une partie de l'impact des crises. Le montant des actifs s'établit aujourd'hui à 34,5 milliards d'euros (30,3 milliards d'abondements et 4,2 milliards de valeur créée). Nonobstant les fortes fluctuations enregistrées par les actifs du Fonds, il a insisté sur la performance réalisée qui fait apparaître un taux annualisé de création de valeur de 3,1 % au 31 mars 2010, net de tous frais de gestion et financiers.

Dès l'origine, le FRR a défini une stratégie de placement à long terme dans la mesure où aucun décaissement ne devrait intervenir avant 2020. En dépit du contexte actuel de crise très dure, il a été décidé de maintenir le même cap, tout en procédant, en raison de la chute des marchés en actions, à des ajustements à la baisse des actifs fondés sur la performance. Ainsi, la répartition du portefeuille a évolué, entre 2006 et 2009, avec une réduction de 60 % à 45 % de la part des titres en actions, une augmentation de 30 % à 45 % de la part des placements obligataires et le maintien de 10 % d'actifs de diversification (dont 5 % dans l'immobilier et 5 % en matières premières).

Les résultats ainsi obtenus confortent la politique d'investissement du Fonds qui vise à optimiser le rendement des investissements tout en permettant la préservation entre 2020 et 2040 de la valeur réelle des abondements reçus depuis la création du Fonds. Il s'agira, dans une optique de clarification du passif, de rendre possibles des décaissements linéaires permettant, a minima, de restituer l'ensemble des abondements perçus augmentés de l'inflation. Dans ce cadre, le portefeuille de référence est piloté en respectant une répartition des titres acquis prévoyant environ 55 % d'actifs de performance et 45 % d'actifs de « taux ». Le conseil de surveillance définit des bandes de fluctuations autour de ces chiffres, l'allocation effective étant arrêtée par le directoire après avis du comité stratégique d'investissement du conseil. La mise en oeuvre de la politique d'investissement repose sur plusieurs principes :

- une diversification dans la répartition sectorielle des actions ainsi que dans leur répartition géographique avec toutefois une surpondération des placements en France et dans la zone euro. A cet égard, M. Raoul Briet a précisé, en réponse à M. Jean Arthuis , président , que les actifs exposés du fait de la crise sont de l'ordre de 800 à 900 millions d'euros, dont 200 millions d'euros d'encours « subprime », 300 millions d'euros en actions sur le marché grecque, ainsi que des investissements au Portugal et en Espagne  ;

- le recours à des mandats de gestion externes, au nombre d'une quarantaine, portant sur des objectifs précis ;

- une gestion à faible coût qui représente 20 points de base à rapporter aux 34,6 milliards d'euros d'actifs du Fonds.

Abordant la mission du FRR dans le contexte de la réforme des retraites, M. Raoul Briet a souligné que l'aggravation sensible des besoins de financement de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAV) d'ici 2020, telle que décrite dans les nouvelles projections du Conseil d'orientation des retraites, résulte essentiellement de la révision des hypothèses économiques établies en 2003. Celles-ci se sont révélées d'emblée trop optimistes puis ont été démenties dans les faits par la crise. Il en résulte un tarissement du financement du Fonds dans la mesure où celui-ci devait bénéficier des excédents du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), eux-mêmes chiffrés sur la base d'une hypothèse de réduction du taux de chômage à 4,5 % dès 2005. Outre les aléas économiques et l'excès d'optimisme des prévisions, il a souligné que l'arrivée à l'âge de la retraite des générations du « Babyboom » produit un choc démographique qui explique, pour une large part, l'aggravation de 1,5 à 2 milliards d'euros par an des besoins de financement de la CNAV entre 2020 et 2040, quels que soient les scénarios.

M. Raoul Briet a annoncé qu'à l'horizon 2020, les actifs du FRR devraient s'établir à 87 milliards d'euros courants sur la base d'une hypothèse de rendement du portefeuille de 6,3 %. Il a estimé que le Fonds reste dans une perspective à long terme un élément de réponse appréciable et un outil pertinent pour couvrir une partie significative du besoin de financement additionnel, même s'il ne doit pas être considéré comme une solution au problème global de financement des retraites. A cet égard, il a appelé à un débat sur la place du Fonds dans la réforme des retraites.

En effet, le FRR doit contribuer à financer les retraites futures à compter de 2020 pour les seuls régimes relevant du secteur privé (CNAV et régime social des indépendants). Sur ce point, il a souligné que l'élargissement à d'autres régimes du bénéfice des ressources du Fonds n'est pas prévu dans l'état actuel du droit. Par ailleurs, si le « Rendez-vous 2010 » fixe des objectifs dont les effets s'appliqueront au-delà de 2020, il conviendra de définir le rôle précis assigné au FRR et sa participation au financement des retraites. Dans cette éventualité, M. Raoul Briet a insisté sur le fait que si le FRR est un levier utile pour accompagner et compléter temporairement le financement des retraites, il ne peut à lui seul dispenser les pouvoirs publics d'une réforme structurelle. C'est pourquoi, il a estimé que pour conserver au FRR toute sa pertinence politique et financière, son utilisation doit être lisible et prévisible à long terme afin d'adapter en conséquence sa politique de placement financier. Il apparaît nécessaire de déterminer de manière précise et ferme le calendrier des décaissements qui seront demandés au FRR à compter de 2020.

En réponse à M. Jean Arthuis , président , M. Raoul Briet a précisé que les règles d'utilisation des fonds conditionnent l'efficacité du FRR dans la mesure où celui-ci a été conçu comme un instrument transitoire et non permanent, son existence n'étant prévue que jusqu'à épuisement des actifs.

En réponse à Mme Nicole Bricq qui s'est interrogée, d'une part, sur la légitimité d'un éventuel report, de 2020 à 2030, du terme du mandat de gestion confié au FRR, d'autre part, sur la tentation formulée par certains parlementaires de la majorité d'utiliser les fonds avant l'échéance de 2020, M. Raoul Briet a tout d'abord indiqué que toute modification de la date de décaissement des fonds prévue à partir de 2020 doit faire l'objet d'une intervention du législateur. Ensuite, il a considéré qu'une utilisation précipitée et opportuniste des fonds présenterait un risque d'épuisement du portefeuille sur une faible période, ce qui serait contreproductif eu égard à la mission de « lissage » à long terme du financement des retraites confiée au FRR.

En réponse à M. Jean Arthuis , président , qui s'est interrogé sur la prise en compte des actifs du FRR dans le déficit maastrichtien, M. Raoul Briet a indiqué que le résultat comptable annuel du Fonds n'impacte pas en diminution la dette publique française et qu'en tout état de cause la comptabilisation au titre du déficit public ou maastrichtien des abondements versés au FRR ne serait pas pertinente.

M. Jean-Jacques Jégou a confirmé que tout débat sur l'utilisation du Fonds avant 2020 nécessite une loi et mis en garde contre la tentation d'utiliser les ressources du FRR pour apurer dès à présent les quelque 30 milliards d'euros de dettes non reprises par la CADES (à fin 2009), qui pourrait conduire le Gouvernement et les partenaires sociaux à s'exonérer de réformes structurelles.

M. Raoul Briet a considéré que le schéma d'utilisation du FRR doit être clarifié dans la mesure où ses actifs n'ont pas vocation à financer des dettes passées qui concernent en outre également les autres branches, maladie et famille, et qui excèderaient largement ses moyens. Il a rappelé que toute utilisation anticipée du Fonds entrerait en contradiction avec l'objectif de consolidation à long terme du financement des retraites.

M. Philippe Marini , rapporteur général , s'est interrogé sur le risque que fait peser le marché sur la performance du Fonds et a relevé que son utilité se limite aux seules périodes où ses placements produisent un rendement supérieur au coût de l'emprunt, dans la mesure où son abondement annuel n'est permis qu'au prix d'un accroissement du déficit de l'Etat.

M. Raoul Briet a admis que la stratégie de gestion des actifs du FRR doit produire un rendement supérieur au coût de la ressource publique pour qu'il soit considéré comme un outil légitime et efficace. C'est pourquoi, avec l'accord des partenaires sociaux, le Fonds complète ses placements en taux par des investissements en actions. Cette stratégie doit permettre d'atteindre un taux de performance de 6,3 % à l'horizon 2020, à condition que les crises ne se succèdent pas d'ici là.

M. Antoine de Salins, membre du directoire , a expliqué que le placement en actions à long terme présente une espérance de rendement supérieur aux valeurs obligataires dans la mesure où l'investisseur bénéficie d'une prime de risque. Dans la mesure où le FRR n'a pas de contrainte de liquidité avant 2020, la stratégie du Fonds demeure pertinente tant que les marchés en actions ne perdent pas 100 à 200 points de base tous les cinq ans.

En réponse à M. Philippe Marini , rapporteur général , qui s'est inquiété de l'impact de la crise de la dette souveraine de certains Etats tels que la Grèce et, tout récemment, l'Espagne sur la capacité d'adaptation de la stratégie du Fonds, M. Antoine de Salins a précisé que trois milliards d'encours en actions et obligations, soit 10 % du portefeuille du FRR, concernent les pays membres du « Club méditerranée » (Grèce, Italie, Espagne et Portugal), mais aussi la Grande-Bretagne et l'Irlande.

Sans remettre en cause la politique d'investissement du Fonds, M. Jean Arthuis , président , s'est demandé s'il ne serait pas pertinent de renforcer les investissements en France, qui ne représentent que 20 % du portefeuille en actions du FRR, afin d'orienter la ressource vers le financement de l'économie nationale.

M. Raoul Briet a rappelé que la logique patrimoniale du Fonds nécessite une diversification des actifs, y compris sur le plan géographique, et précisé que la part relative des sommes investies sur des valeurs françaises est en tout état de cause surpondérée car elles représentent 12 % du portefeuille global du FRR au lieu de 4 % si aucune priorité en faveur des titres français n'avait été retenue.

En réponse à M. Philippe Dallier qui s'est inquiété de la crise de confiance des français dans la pérennité du régime de retraite que ne manquerait pas de susciter un retournement des marchés à la veille des décaissements prévus à partir de 2020, M. Raoul Briet a admis qu'il est politiquement difficile de justifier qu'un aléa économique pèse sur le financement des retraites mais a toutefois indiqué que la structure du Fonds sera de moins en moins exposée aux risques à mesure que l'échéance se rapprochera.

C. AUDITION DE M. BENOÎT COEURÉ, DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT, ÉCONOMISTE EN CHEF, ET DE M. NICOLAS CARNOT, SOUS-DIRECTEUR DES POLITIQUES SOCIALES ET DE L'EMPLOI, À LA DIRECTION GÉNÉRALE DU TRÉSOR (DGT) DU MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI

La commission a enfin procédé à l'audition de M. Benoît Coeuré, directeur général adjoint, économiste en chef, et de M. Nicolas Carnot, sous-directeur des politiques sociales et de l'emploi, à la direction générale du Trésor (DGT) du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

M. Benoît Coeuré, directeur général adjoint, économiste en chef du Trésor , a, tout d'abord, présenté le cadrage macroéconomique retenu par le Conseil d'orientation des retraites (COR) pour l'actualisation de ses projections sur les besoins de financement des systèmes de retraite. Ce cadrage est un exercice indispensable - pour déterminer les prévisions de recettes des régimes de retraites à l'horizon 2030-2050 -, mais complexe compte tenu des incertitudes qui pèsent sur les prévisions de croissance à long terme dans le contexte de crise économique.

Les effets de la crise sur la croissance potentielle et la croissance réelle peuvent en effet transiter par trois canaux différents : le ralentissement des investissements, la modification de la productivité globale des facteurs de production et donc de la productivité du travail à long terme, et enfin l'augmentation du chômage structurel.

En réponse à M. Philippe Marini , rapporteur général , M. Benoît Coeuré a précisé que l'hypothèse de croissance potentielle retenue dans les projections du COR pour la période 2009-2013, soit 1,7 % par an, est également celle qui sous-tend le programme de stabilité 2010-2013 présenté par la France à la Commission européenne.

Les trois scenarios macroéconomiques envisagés par le COR combinent deux facteurs : d'une part, la productivité du travail à long terme et, d'autre part, le taux de chômage structurel.

S'agissant du premier facteur, deux hypothèses sont retenues : un taux annuel de progression de la productivité du travail à long terme de 1,8 % dans le meilleur des scenarios contre 1,5 % dans le scenario le plus défavorable. Ces projections sont à comparer à la dégradation tendancielle des gains de productivité constatée depuis le début des années 1980. En particulier, il est à noter que sur la période 2001-2007, soit avant la crise, l'augmentation de la productivité du travail a été de 1,5 % par an en moyenne, ce qui tend à montrer que même le taux le plus défavorable retenu par le COR est relativement optimiste compte tenu de la crise économique de 2008 et de son impact durable sur la croissance.

M. Benoît Coeuré a précisé que ces hypothèses tiennent compte de la « tertiarisation » de l'économie française. En effet, le développement du secteur des services a pour conséquence le ralentissement de la progression tendancielle de la productivité du travail.

En ce qui concerne le second facteur, le COR retient également deux hypothèses : un taux de chômage de long terme de 4,5 % à l'horizon 2030-2050 dans le cadrage macroéconomique le plus favorable, contre 7 % dans le pire des scenarios.

En réponse à M. Philippe Marini , rapporteur général , M. Benoît Coeuré a relativisé le caractère optimiste de l'hypothèse de chômage la plus haute, indiquant que, dans ce scenario, est envisagée une stabilisation du chômage structurel à 7 % jusqu'en 2050 en dépit d'un retour de la croissance sur longue période.

Il a rappelé qu'un débat avait eu lieu au sein du COR sur les hypothèses macroéconomiques, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) souhaitant notamment retenir des taux de progression de la productivité du travail plus faibles.

Pour répondre à M. Jean-Jacques Jégou qui s'est interrogé sur le différentiel de productivité du travail dans le secteur industriel et le secteur tertiaire, M. Nicolas Carnot a indiqué qu'il y a cinq à dix ans, l'évolution tendancielle de la productivité du travail dans le secteur secondaire était compris entre 3 % et 3,5 % par an contre une fourchette comprise entre 0 % et 1 % dans le domaine des services. L'ordre de grandeur devrait être le même aujourd'hui.

Pour conclure le débat sur la désindustrialisation et l'impact de la crise économique sur l'outil industriel français, ouvert par M. Edmond Hervé, M. Aymeri de Montesquiou et M. Jean Arthuis , président, M. Benoît Coeuré a indiqué que plusieurs politiques publiques contribuent au maintien d'une industrie manufacturière en France, notamment le crédit d'impôt recherche et la réforme de la taxe professionnelle. Si, comme l'a souligné M. Jean Arthuis , président, le crédit d'impôt recherche peut faire l'objet d'abus qui doivent être corrigés, l'administration fiscale manque cependant aujourd'hui de recul sur le fonctionnement de ce dispositif.

Abordant la question du coût du vieillissement, M. Benoît Coeuré a indiqué que s'agissant des dépenses de retraite, leur dynamique s'explique par des flux de retraités plus nombreux - en raison de l'arrivée de la génération du baby boom à l'âge de la retraite -, ainsi que par l'allongement de l'espérance de vie. L'écart entre l'espérance de vie à soixante ans et l'âge moyen de liquidation des droits à la retraite est ainsi passé de 15 à 23 ans entre 1970 et 2008. L'augmentation du nombre de retraités et l'allongement de la durée de perception des retraites expliquent ainsi une croissance des pensions plus rapide que le produit intérieur brut (PIB).

En réponse à M. Yann Gaillard , il a précisé qu'il n'existe aucune corrélation entre l'évolution de l'espérance de vie, d'une part, et l'évolution de l'âge moyen de liquidation, d'autre part, qui dépend des paramètres pris en compte pour le calcul des droits à la retraite.

En ce qui concerne les dépenses de santé, elles sont également historiquement plus dynamiques que le PIB, même si l'écart de croissance annuelle entre, d'une part, la consommation de soins et, d'autre part, la richesse nationale s'est réduit depuis 1993 : alors qu'il était de 3 points en moyenne sur la période 1961-1993, il a été de 0,5 point en moyenne sur la période 1994-2008. Cette tendance s'explique par les différentes réformes mises en oeuvre dans le domaine de l'assurance maladie.

Il a enfin attiré l'attention sur le ratio de dépendance démographique, c'est-à-dire le rapport entre, d'une part, le nombre de personnes inactives âgées de moins de 20 ans et de plus de 60 ans et, d'autre part, le nombre de personnes actives âgées de 20 à 60 ans. A long terme, la hausse de ce ratio entraîne un « conflit de répartition » entre les actifs et les inactifs pour le partage des gains de productivité. Afin de faire face à ce défi, il convient de stimuler la croissance potentielle, à savoir augmenter les gains de productivité (grâce au progrès technique et aux réforme structurelles) et baisser le chômage structurel (en favorisant l'emploi des jeunes et des seniors). Il convient également de saisir les opportunités du vieillissement et notamment les gisements de croissance et d'emplois qu'il peut offrir dans certains secteurs (industrie médicale, services à la personne, tourisme). Ces emplois correspondront cependant moins à des créations nettes qu'à des transferts d'un secteur à un autre.

M. Benoît Coeuré a indiqué, confirmant les propos de Mme Nicole Bricq , que le taux d'activité des femmes est une donnée importante à prendre en considération dans les moyens devant permettre d'accroître la croissance potentielle, même si le taux d'activité des femmes en France est déjà parmi les plus élevés.

Il a ensuite présenté les travaux du sous-groupe « Vieillissement » du Comité de politique économique qui comparent, au sein de l'Union européenne, les conséquences du vieillissement de la population sur les dépenses de retraites, de santé, de dépendance, de chômage et d'éducation. Ces travaux montrent que le vieillissement de la population devrait avoir un impact moins important en France que dans le reste de l'Union européenne : le vieillissement de la population devrait entraîner des besoins sociaux supplémentaires de l'ordre de 2,7 points de PIB entre 2007 et 2060 en France contre plus de 4,5 points de PIB en moyenne dans l'Union européenne. Cependant, cette donnée doit être analysée au regard de deux éléments :

- d'une part, le poids actuel des dépenses liées au vieillissement est plus élevé en France que dans le reste de l'Union européenne ;

- d'autre part, une part importante de ces dépenses n'est dès aujourd'hui pas financée. Les « pressions » à la hausse des dépenses liées au vieillissement viennent à la fois des retraites (+1 point de PIB), des dépenses de santé (+1,2 point de PIB) et de la dépendance (+0,8 point), sans que des gains massifs ne puissent être espérés de la diminution du chômage (-0,3 point).

Pour conclure sur le coût lié au vieillissement de la population, M. Benoît Coeuré a insisté sur la forte sensibilité du besoin de financement en la matière aux hypothèses macroéconomiques retenues. Une augmentation de 1,5 an de l'espérance de vie au delà de l'hypothèse retenue pour cette variable accroîtrait ainsi de 25 % le besoin de financement.

Sur la question du lien entre le vieillissement de la population et la soutenabilité des finances publiques, il a indiqué que deux problèmes se cumulent :

- d'une part, un problème de court terme qui provient de la situation actuelle des finances publiques de la France : le déficit structurel de 2009 est trop creusé pour envisager une stabilisation la dette ;

- d'autre part, un problème de long terme dû au dynamisme futur des dépenses liées au vieillissement de la population : les dépenses de retraites, de santé et de dépendance devraient progresser plus rapidement que les ressources d'ici à 2050.

Poursuivant son analyse, il a indiqué que la soutenabilité peut s'apprécier par l'estimation de l'ajustement structurel qu'un pays doit réaliser aujourd'hui de manière pérenne pour stabiliser sa trajectoire de dette à long terme compte tenu du dynamisme des dépenses liées au vieillissement. Cet ajustement correspond à l'indicateur « S2 » utilisé par la Commission européenne dans son évaluation de la soutenabilité des finances publiques des Etats-membres. Cet indicateur, encore appelé « écart de soutenabilité », correspond à la somme de deux termes : d'une part, la position budgétaire initiale qui correspond à l'écart du solde primaire structurel actuel à celui stabilisant la dette et, d'autre part, le coût de long terme du vieillissement qui correspond au coût actualisé des dépenses liées au vieillissement sur le long terme. Or l'ajustement structurel inscrit dans le programme de stabilité de la France ne suffit pas à restaurer entièrement la soutenabilité des finances publiques de la France à cause du coût de long terme du vieillissement. Pour y parvenir, la réforme des retraites devra avoir un impact équivalent à 1,6 point de PIB, ce qui n'est pas irréaliste au regard de l'effet de la réforme des retraites de 2003. Celle-ci a eu un impact équivalent à 1,5 point de PIB (1 point de PIB par effets directs et 0,5 point de PIB de façon indirecte par son effet sur la croissance potentielle).

En réponse à Mme Nicole Bricq , il a indiqué que le 2 juin prochain, la France transmettra à la Commission européenne les conclusions de la deuxième conférence sur les déficits publics qui se tiendra le 20 mai. En revanche, il sera trop tôt pour que la France communique des données sur la réforme des retraites. Dans le domaine de la sécurité sociale, la Commission européenne sera néanmoins très attentive aux mesures concrètes que la France entend mettre en oeuvre pour assurer le respect d'un objectif national des dépenses d'assurance maladie inférieur à 3 %.

Mme Nicole Bricq s'est interrogé sur le fait qu'à aucun moment, au cours de la présentation qui venait d'être faite, n'a été abordée la question des recettes des régimes de retraites.

Un débat s'est enfin engagé sur le coût du dispositif dit « des longues carrières » introduit par la réforme des retraites de 2003.

II. TABLE RONDE DU MERCREDI 2 JUIN 2010

A. AUDITION DE M. JEAN BERTHON, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION DES ASSOCIATIONS INDÉPENDANTES DE DÉFENSE DES ÉPARGNANTS POUR LA RETRAITE (FAIDER), MME LAURE DELAHOUSSE, DIRECTEUR GESTION SPÉCIALISÉE ET ÉPARGNE RETRAITE DE L'ASSOCIATION FRANÇAISE DE LA GESTION FINANCIÈRE (AFG), MM. PIERRE BOLLON, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DE L'AFG, ET PIERRE SCHERECK, DIRECTEUR ÉPARGNE ENTREPRISE D'AMUNDI

Réunie le mercredi 2 juin 2010 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean Berthon, président de la fédération des associations indépendantes de défense des épargnants pour la retraite (FAIDER), Mme Laure Delahousse, directeur gestion spécialisée et épargne retraite de l'association française de la gestion financière (AFG), MM. Pierre Bollon, délégué général de l'AFG, et Pierre Schereck, directeur Epargne Entreprise d'Amundi, sur le rendez-vous 2010 pour les retraites.

M. Jean Arthuis , président . - La réforme des retraites constitue un sujet majeur du calendrier législatif de cet automne.

Le 28 avril dernier, nous avons consacré un premier atelier au cadrage macroéconomique de cette réforme. Puis, le 12 mai, à l'invitation de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (MECSS), nous avons entendu M. Raphaël Hadas-Lebel, président du Conseil d'orientation des retraites (COR), dont le dernier rapport a chiffré le besoin de financement annuel du système de retraite entre 40 et 48 milliards d'euros en 2020, et entre 71 et 115 milliards d'euros en 2050.

Le choc démographique, conjugué à l'effet de la crise économique, exige de nouvelles rentrées financières pour garantir la « soutenabilité » de notre système de retraite par répartition qui est loin d'être unifié : au régime général, c'est-à-dire la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), s'ajoutent en effet 21 régimes vieillesse de base dont quinze correspondent à des régimes spéciaux ou assimilés.

Au-delà du débat public particulièrement passionné autour de l'âge légal de départ à la retraite, la commission des finances a souhaité être éclairée, lors de ce second atelier, sur trois sujets qui concernent les finances de l'État et la solidarité intragénérationnelle , avec l'objectif de définir chaque fois un « principe de contributivité » équilibré.

Notre intérêt va d'abord au régime de retraite des fonctionnaires de l'État, dont le financement est garanti mécaniquement par le budget de l'État au sein du compte d'affectation spéciale « Pensions » : l'alignement public-privé est certes un « serpent de mer », mais nous devons veiller à ce que le taux d'effort, c'est-à-dire le montant des cotisations, et le taux de rendement, autrement dit le montant des pensions, soient similaires entre les différentes catégories d'actifs.

Ensuite, sur les régimes spéciaux, dont l'équilibre financier est assuré par une subvention d'équilibre versée par l'État, la commission des finances souhaite connaître le bilan de la réforme de 2007, et s'interroge sur la nécessité de les faire encore évoluer à l'occasion du rendez-vous de 2010 sur les retraites.

Enfin, nous nous interrogeons sur la place de l'épargne-retraite, que la commission des finances souhaite voir confortée parallèlement à la sauvegarde de notre système par répartition. La réforme du système de répartition doit certes garantir le financement de base des retraites et les mécanismes de solidarité, en particulier le financement des petites pensions et la prise en charge des périodes non travaillées, mais les pouvoirs publics doivent aussi donner à chacun la faculté de compléter sa future pension, au-delà des régimes de base et complémentaire obligatoires, en fonction de ses revenus et de ses décisions d'épargne.

Nous entendrons donc successivement, sur l'épargne-retraite, M. Jean Berthon, président de la fédération des associations indépendantes de défense des épargnants pour la retraite (FAIDER), et Mme Laure Delahousse, directeur gestion spécialisée et épargne retraite de l'association française de la gestion financière ; sur la fonction publique, M. Philippe Josse, directeur du Budget, et M. Jean-Yves Raude, trésorier payeur général, directeur du service des retraites de l'État ; sur les régimes spéciaux, M. Frédéric Buffin, directeur de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF, Mme Nathalie Droulez, directeur par intérim de la caisse de retraite du personnel de la RATP, M. Serge Gayraud, directeur délégué du service des ressources humaines de la SNCF, et M. Paul Peny, directeur général adjoint chargé de l'innovation sociale à la RATP.

M. Jean Berthon, président de la fédération des associations indépendantes de défense des épargnants pour la retraite (FAIDER) . - Au nom de la Faider, je vous remercie de votre invitation : c'est l'une des premières fois que s'exprime, dans cette enceinte, la position des épargnants futurs retraités.

Nous estimons qu'il est vain d'espérer maintenir le taux de remplacement actuel par le seul mécanisme de la répartition. Les prévisions démontrent qu'à l'horizon 2030-2050, le système de retraite par répartition, même agrémenté de mesures techniques, « paramétriques », ne saurait suffire à maintenir les pensions à leur niveau actuel, quand bien même on taxerait davantage les revenus de l'épargne, qui sont déjà la variable d'ajustement des besoins financiers de l'État. Une taxation accrue aurait pour effet de compromettre la confiance des épargnants, qu'il ne faut pas mettre en péril. Il convient de stabiliser cette taxation. Aussi nous semble-t-il indispensable d'inciter davantage à l'épargne-retraite, pour qu'un système de retraite par capitalisation complète notre système par répartition.

Entre les différents dispositifs d'épargne retraite, la rente viagère nous semble mériter une attention particulière. Elle n'a pas bonne presse, parce qu'elle est injustement assimilée à une spoliation - comme si le capital avait disparu à l'extinction de la rente, ce qui est faux - et parce que l'opinion conçoit difficilement le calcul actuariel sur lequel la rente repose. Ce calcul correspond très exactement au remboursement du capital initial, distribué sur les années restant à vivre calculées en fonction de l'espérance moyenne de vie. Le retraité reçoit ainsi sur cette durée des arrérages annuels ou mensuels qui correspondent au remboursement du capital et à sa rémunération sous la forme d'un intérêt.

Pour encourager la rente viagère et la rendre plus attractive, nous proposons d'abord de la renommer « revenu à vie », puisque ce revenu est versé toute la vie et qu'il est le seul à garantir contre le « risque longévité », s'il est permis de qualifier ainsi la chance de vivre plus longtemps.

En fait, les calculs démontrent qu'il est devenu indispensable de mobiliser l'assurance-vie pour assurer un complément de retraite. D'après les calculs des caisses de retraite (CNAV, Agirc, Arrco), à supposer que les prestations puissent être maintenues à l'identique, le taux de remplacement diminuerait de 10 % pour les cadres moyens hommes d'ici 2030 et de 5 % pour les cadres femmes. Pour assurer un taux de remplacement équivalent à celui d'aujourd'hui pour les presque quatre millions de cadres, et compte tenu du salaire moyen, les caisses devraient disposer de 17 milliards d'euros supplémentaires par an.

Pour combler ce besoin annuel de 17 milliards d'euros, il faudrait mobiliser un capital de 400 à 450 milliards d'euros valeur 2009. Or, l'encours des produits d'épargne spécifiquement consacrés à la retraite est encore très faible : 5 milliards pour le Perp et 3 milliards pour le Perco créé par la loi Fillon. Quelle que soit la volonté de diffuser ces produits, l'écart à combler est trop important.

Reste, donc, à mobiliser l'assurance vie, qui représente un encours de 1 300 milliards d'euros, dont 125 milliards sont d'ores et déjà consacrés à l'épargne-retraite. Il resterait à mobiliser 300 milliards d'euros supplémentaires - valeur 2009 -pour combler le déficit prévisible des caisses. Or, 30 % à 50 % des titulaires de contrats d'assurance-vie déclarent y souscrire pour préparer leur retraite : il y aurait ainsi 400 à 600 milliards d'euros déjà investis en assurance-vie, qui pourraient être consacrés au « revenu à vie ».

Nous proposons d'encourager la sortie de l'assurance-vie en rente, en « revenu à vie », et non en capital, lors de la liquidation de la retraite, dans des proportions à déterminer par la loi. Un capital peut cependant être utile au moment de prendre sa retraite pour rembourser le solde d'un emprunt ou faire face à des dépenses exceptionnelles : c'est pourquoi nous proposons également un aménagement du Perp, pour rendre possible la sortie en capital jusqu'à 20 % de l'épargne acquise.

Nous proposons aussi que l'employeur puisse abonder le Perp, comme c'est déjà possible pour le Perco : M. le rapporteur général s'est également prononcé pour cette faculté, qui est l'une des clés du succès du Perco.

Le Perp bénéficie en outre d'un avantage fiscal à l'entrée, ce qui est peu attractif pour les jeunes et les salariés modestes, tandis que la rente future est taxée au taux plein. Pour les inciter davantage à préparer leur retraite, nous proposons que l'État leur verse un « chèque retraite crédit d'impôt » directement sur un Perp, d'un montant équivalent à l'avantage fiscal consenti aux épargnants imposables lors des premières années de souscription au Perp. Cette épargne serait alors véritablement populaire, à l'exemple de la Riester-Rente allemande, autrement dit les primes d'encouragement à l'épargne-pension.

Nous proposons encore, au nom de l'équité, un toilettage fiscal et social. Il conviendrait ainsi, selon nous, de mettre fin à la double imposition, à la « double peine » qui frappe l'épargne ainsi investie, puisque la rente est assujettie à des prélèvements sociaux, qui ont déjà pesé sur le capital lors de la souscription.

Nous proposons également d'aménager la fiscalité de l'assurance-vie - qui est moins une niche fiscale que, comme l'a dit le rapporteur général de l'Assemblé nationale, un « produit à fiscalité particulière » - de telle façon que l'exonération de taxation forfaitaire à 7,5 %, dont bénéficient les sorties en capital effectuées par les assurés placés en retraite anticipée, soit étendue à toute personne liquidant ses droits à la retraite : ce serait inciter davantage les épargnants à conserver leur contrat d'assurance vie jusqu'à leur retraite.

Enfin, nous proposons d'exonérer d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux la sortie partielle d'assurance-vie en rente, ce qui reviendrait à l'aligner sur la fiscalité du Perp, ceci dans des plafonds à définir dans la loi et en limitant l'avantage aux détenteurs de contrats souscrits plus de dix ans avant la retraite, pour éviter les effets d'aubaine. Cela permettrait d'assurer par ce complément de revenu un taux de remplacement, qui, sans être le taux actuel, correspondrait à un niveau global à déterminer.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie. Il est vrai que l'épargne que nos concitoyens consacrent à leur retraite est encore très limitée et que nous devons les sensibiliser à l'épargne-retraite.

Mme Laure Delahousse, directeur gestion spécialisée et épargne retraite de l'association française de la gestion financière. - L'AFG qui regroupe les sociétés de gestion de l'épargne salariale s'intéresse naturellement à l'épargne-retraite. Si le Perco, issu de la loi de 2003, connaît un progrès rapide - avec une hausse de 63 % de l'encours géré en 2009 - et concerne désormais plus de 111 500 entreprises, son encours géré n'atteint que 3 milliards, à rapporter aux 85 milliards de l'épargne salariale. Les marges de progression sont donc très importantes, d'autant que le Perco est bien accepté par les entreprises et par les salariés.

Pour inciter à l'épargne-retraite, la fiscalité pourrait d'abord avantager l'épargne longue par rapport à l'épargne courte. Or, le récent forfait social, par exemple, s'applique indifféremment aux différentes formes d'épargne, sans tenir compte de la durée d'immobilisation, ce qui est regrettable. Nous proposons donc de mieux régler la fiscalité sur la durée de l'épargne, en exonérant par exemple de forfait social les sommes versées sur un Perco.

Ensuite, pour encourager les jeunes à épargner plus tôt pour leur retraite, nous suggérons, comme la FAIDER, que l'Etat verse une sorte de « prime retraite jeune », à l'exemple de ce qui se pratique en Allemagne et dans des conditions à définir. Une prime de 300 euros annuels versée aux 25-35 ans coûterait 300 millions, et pourrait être financée en soumettant l'épargne salariale immédiate aux prélèvements sociaux : cette épargne y échappe alors qu'elle s'apparente à une consommation salariale, et l'exonération, à notre sens, devrait concerner seulement l'épargne longue.

Notre troisième proposition, consiste à affecter par défaut au Perco la participation versée par l'entreprise aux salariés, sauf si le salarié décide de l'affecter au plan d'épargne entreprise (PEE) ou de la percevoir en argent. Ce fléchage de la participation n'aurait aucun coût fiscal et elle quadruplerait l'encours du Perco, qui pourrait ainsi atteindre 50 milliards en dix ans. Quant au salarié qui n'aurait rien perdu de ses revenus disponibles immédiatement, il disposerait, après trente ans, d'un capital d'environ 90 000 euros, qui pourrait lui assurer un complément de revenu, sous forme de rente, de 280 euros mensuels.

M. Jean Arthuis , président . - Pouvez-vous préciser les modalités de calcul ?

Mme Laure Delahousse . - J'en laisse volontiers le soin à M. Berthon, qui est rompu au calcul actuariel.

M. Jean Berthon . - On rapporte le capital au nombre d'années restant statistiquement à vivre pour fixer le montant des arrérages annuels, augmenté éventuellement d'un taux d'intérêt. Aujourd'hui, le taux d'intérêt de la rente est nul.

Mme Laure Delahousse . - A la sortie du Perco, on a le choix entre un capital et une rente. Cette liberté est une clé du succès du Perco - même si la sortie en rente est à nos yeux préférable -, tout comme la possibilité de sortie anticipée est déterminante pour les jeunes, qui peuvent vouloir sortir plus tôt pour l'acquisition de la résidence principale. L'achat d'une résidence principale participe de la préparation de la retraite ; c'est donc cohérent avec l'objet du Perco.

Nous proposons également d'affecter par défaut au Perco l'intéressement distribué aux salariés : cette affectation dynamiserait le Perco, sans rien coûter à l'État ni restreindre les revenus disponibles des salariés.

Nous proposons de porter à vingt jours, au lieu de dix, le plafond de jours épargnés sur un compte épargne temps que les salariés peuvent transférer sur leur Perco. Nous suggérons encore que les dispositifs d'épargne-retraite ne soient pas réservés à certaines catégories de salariés, comme les cadres, mais soient proposés à tous, et, en contrepartie, d'autoriser les dirigeants d'entreprises, les mandataires sociaux, à ouvrir un Perco, ce qui n'est pas possible aujourd'hui quand l'entreprise a plus de 150 salariés.

M. Jean Arthuis , président . - Les rémunérations complémentaires se sont multipliées ces dernières années, avec pour effet, souvent recherché, d'échapper aux prélèvements sociaux et d'optimiser sa fiscalité. Il faut y prendre garde.

Mme Laure Delahousse . - Les contrôles sont stricts et la frontière nous paraît étanche entre le salaire et les mécanismes de participation et d'intéressement, tout comme entre l'épargne-retraite et le salaire.

Nous proposons encore de mieux informer les Français sur l'épargne-retraite. Depuis la loi de 2003, les salariés de plus de trente-cinq ans reçoivent régulièrement un relevé individuel de situation qui les informe sur leurs droits acquis ; nous suggérons d'y adjoindre des informations sur les dispositifs d'épargne-retraite.

Enfin, nous proposons que le Gouvernement s'inspire du Perco pour créer un dispositif individuel d'épargne retraite, qui ne serait pas abondé par l'entreprise. Nous pensons qu'il faut bien distinguer les outils collectifs et les outils individuels de l'épargne-retraite, les règles et les avantages ne pouvant pas être identiques, et c'est pourquoi nous ne sommes pas favorables à la possibilité que l'entreprise abonde elle-même le Perp.

M. Jean Arthuis , président . - Il faudrait donc garder au Perco son caractère collectif ?

Mme Laure Delahousse. - On pourrait imaginer un produit individuel comparable.

M. Jean Arthuis , président . - Merci de ces propositions marquées du souci de ne pas créer des niches fiscales. Tendre vers une fiscalité simple sur des produits dont la qualité intrinsèque serait à elle seule attractive serait formidable.

M. Jean-Jacques Jégou . - Notre dispositif d'épargne-retraite est formé de mécanismes assurantiels. A l'exception du Perco, jugez-vous les informations suffisamment lisibles et compréhensibles ?

La fiscalité de l'épargne est-elle adaptée au développement de l'épargne longue, et quels enseignements tirez-vous des expériences étrangères ? Peut-on imaginer un bench-marking européen ?

Le Perp n'a séduit que deux millions de personnes en cinq ans car c'est un « produit tunnel ». Or les Français apprécient peu la rente. Peut-on réhabiliter l'idée saine de la sortie en rente ? Enfin, comment expliquez-vous le maintien des souscriptions malgré la crise ?

M. Edmond Hervé . - Quelle est votre capacité décisionnelle sur la gestion vos capitaux ?

M. Jean-Paul Alduy . - Est-il légitime de comparer le Perco et la Préfon ?

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Issu de la loi Fillon comme le Perp, le Perco a bien décollé. Nous pourrons avoir à assurer la neutralité des différents régimes car le Perco est assujetti à plus de charges que d'autres. Les professionnels demandent naturellement une exemption ; nous pourrions être au contraire tentés d'étendre les prélèvements.

M. Jean Berthon. - L'information, d'abord, est le point 9 de nos propositions. Nous souhaitons qu'on forme et qu'on informe mieux les Français sur la rente.

M. Jean Arthuis , président . - Cela suppose une fiscalité simple.

M. Jean Berthon. - Tout le monde vous rejoindra là-dessus car la neutralité fiscale évite les distorsions de concurrence. Je partage à cet égard la philosophie de l'AFG. Nous avons souhaité, même si ce n'est pas politiquement correct, une atténuation de la pression fiscale, compensée par des aménagements. Il est anormal que des ménages aisés disposent pour leur épargne courte de plusieurs livrets exonérés : alors qu'il conviendrait de favoriser l'épargne longue, l'on privilégie de manière extraordinaire l'épargne courte. Or une adaptation de la fiscalité dégagerait des ressources supplémentaires.

En effet, la rente n'a pas bonne presse. C'est pourquoi nous proposons de l'appeler « revenu à vie ». C'est plus porteur en termes de marketing et c'est plus clair. On pourrait en outre se doter d'une petite marge de manoeuvre sur le Perp, avec un retrait en capital de 15 % à 20% au moment de la retraite. Il faut, pour renforcer la rente, délivrer une bonne information et exercer le métier avec équité. La FAIDER demande notamment aux assureurs une répartition plus équitable des bénéfices entre les contrats d'assurance-vie. Les assureurs ont tendance à gérer les gains en fonction des types de contrat qu'ils souhaitent promouvoir commercialement.

La capacité décisionnelle concernant la gestion des capitaux est dans les mains de l'assureur qui gère les actifs des contrats en euros, mais, pour les contrats de groupe de l'article 114 du code des assurances, les associations souscriptrices, qui sont gérées indépendamment des assureurs, jouent un rôle essentiel parce qu'elles peuvent dénoncer le contrat avec l'assureur.

La Préfon est un système assurantiel qui n'a rien à voir avec le Perco : elle est basée sur la capitalisation collective, de manière analogue à des systèmes d'épargne-retraite.

J'ignore si le Perco est plus ou moins chargé que d'autres systèmes de retraite ; il faut analyser la fiscalité du Perp.

Mme Laure Delahousse. - C'est assez analogue.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Si je compare la fiscalité qui frappe les produits d'épargne du point de vue de l'employeur, je constate que tous ces dispositifs sont exonérés de charges patronales, qu'ils acquittent tous le forfait social de 4 % - ce qui est une bonne chose -, mais que seul l'abondement du Perco acquitte la contribution de 8,2 % pour les versements supérieurs à 2 300 euros. Pourquoi ne pas y assujettir tout le monde ? Peut-être pourrait-on ainsi élargir l'assiette des prélèvements sociaux ? De même si, du point du salarié, l'on examine la fiscalité qui frappe l'intéressement, la participation, les versements volontaires, le plan d'épargne entreprise, le Perco et le statut fiscal des plus-values réalisées dans le cadre d'un outil collectif, on constate que tous ces régimes sont exonérés de cotisations sociales, tous acquittent la CSG et la CRDS après abattement de 3%, mais que seules les plus-values des plans d'épargne entreprise et des Perco paient les 12,1% de prélèvements sociaux. Pourquoi ne pas assujettir aussi l'intéressement et la participation dans un esprit de neutralité fiscale ?

M. Pierre Bollon, délégué général de l'association française de la gestion financière (AFG) . - Je comprends votre point de vue sur la neutralité fiscale, mais nous suggérons une gradation selon la durée de l'épargne, avec un forfait social qui pourrait être plus élevé sur ce qui est perçu immédiatement : en ce cas, l'augmentation ne toucherait pas le Perco.

M. Jean Arthuis , président . - Evitons les arguments fiscaux ! Les produits doivent posséder une qualité intrinsèque.

M. Pierre Bollon. - Ce serait bien dans un monde parfait. Cependant, quand on épargne, on renonce à la liquidité pendant vingt ans. Dès lors, la fiscalité doit pousser vers l'épargne longue. C'est ainsi qu'on pourrait augmenter le forfait social, sauf pour le Perco.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Seule la contribution de l'employeur au Perco subit la contribution de 8,2 %.

M. Pierre Bollon . - Cela reste théorique car le plafond de 2 300 euros est rarement dépassé.

Mme Laure Delahousse . - On a chiffré le produit de cette taxe entre 1 et 2 millions d'euros seulement.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - On pourrait abaisser le plafond pour tous les régimes. Il y a un réglage à réaliser pour éviter les effets pervers.

M. Pierre Schereck, directeur Epargne Entreprise d'Amundi . - La taxe de 8,2 % est perçue comme un signal de l'État à ne pas dépasser les 2 300 euros.

M. Jean Arthuis , président . - Le salarié acquitte la CSG et la CRDS, mais à quoi correspond l'abattement de 3 % sur les versements au Perco ?

M. Pierre Schereck. - Cet abattement s'applique aux flux à l'entrée : pour des raisons historiques, la CSG et la la CRDS s'appliquent sur 97 % de l'assiette.

M. Jean Arthuis , président . - M. Jégou avait posé une question sur la Préfon.

Mme Laure Delahousse . - La Préfon n'a plus d'avantage fiscal spécifique et est assimilable à un Perp pour les fonctionnaires.

M. Jean Berthon. - Les hospitaliers, quant à eux, bénéficient d'un abondement sur un régime analogue au Perp. Le Perco, lui, est un régime tout à fait intéressant dans les entreprises d'une certaine taille. D'où l'intérêt qu'il y aurait à mettre en place un Perco individuel. Les PME de taille moyenne ne sont en effet pas intéressées par des systèmes collectifs.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Nous avons récemment autorisé, à l'initiative de Serge Dassault, des Perco inter-entreprises.

Mme Laure Delahousse. - Cette formule se développe.

M. Pierre Schereck. - Le développement se situe dans les petites entreprises. L'on compte 115 000 Perco dans les entreprises.

M. Jean-Jacques Jégou . - C'est donc bien qu'il y a des petites entreprises concernées.

M. Pierre Bollon. - C'est plus difficile avec les entreprises de taille moyenne.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation et de nous avoir apporté un éclairage précieux. Merci aussi de nous aider à uniformiser les règles fiscales et à alléger le poids de la dépense fiscale.

B. AUDITION DE MM. PHILIPPE JOSSE, DIRECTEUR DU BUDGET ET JEAN-YVES RAUDE, TRÉSORIER PAYEUR GÉNÉRAL, DIRECTEUR DU SERVICE DES RETRAITES DE L'ÉTAT

La commission a ensuite procédé à l'audition de MM. Philippe Josse, directeur du budget, et Jean-Yves Raude, trésorier payeur général, directeur du service des retraites de l'Etat, sur le rendez-vous 2010 pour les retraites.

M. Jean Arthuis , président . - Monsieur le directeur du Budget, au moment où s'engage la réflexion de fond sur l'équilibre des dépenses publiques, nous avons souhaité vous entendre sur les pratiques en vigueur au sein de l'Etat en matière de retraites.

M. Philippe Josse, directeur du Budget . - La question des retraites de la fonction publique est d'une actualité brûlante ; vous comprendrez que je m'en tienne à des éléments factuels. Vous connaissez les chiffres : les retraites représentent 240 milliards d'euros, soit le quart des dépenses publiques. Le bloc privé pèse 145 milliards ; les 61 milliards des retraites du public se décomposent en 55 milliards de pensions des régimes obligatoires de base et 6 milliards pour l'Ircantec et la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP). On distingue trois régimes de base : celui de la fonction publique de l'État mobilise 40 milliards, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) pèse 12 milliards, le solde recouvrant le Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État (FSPOEIE).

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Comment retrouve-t-on les 240 milliards ?

M. Philippe Josse . - C'est l'addition du tout, public et privé.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Vous assimilez donc l'Agirc et l'Arrco à des dépenses publiques ?

M. Philippe Josse . - C'est le cas au sens des règles européennes car ce sont des régimes complémentaires obligatoires.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - On assimile des régimes privés à de la dépense publique.

M. Jean-Yves Raude, directeur du Service des retraites de l'Etat . - Les retraites des fonctionnaires civils et militaires représentent, pour 2,2 millions de pensionnés fin 2009, une dépense de 43,5 milliards d'euros, dont 34,7 milliards pour les pensions civiles. Le budget de l'Etat porte entièrement ce régime dans un compte d'affectation spéciale « Pensions » créé par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), en première lecture au Sénat, et dont est responsable le service des retraites de l'Etat, qui vient d'être réformé.

M. Jean Arthuis , président . - Avez-vous rassemblé tout le monde ?

M. Jean-Yves Raude . - Nous assurons la maîtrise d'ouvrage des systèmes d'information de toutes les pensions, ainsi que l'animation-métier des centres régionaux des pensions.

M. Jean Arthuis , président . - Et les services des pensions comme ceux de La Baule ?

M. Jean-Yves Raude . - Ce sont les services des pensions ministériels.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Pourquoi garder tous ces services ?

M. Jean-Yves Raude . - C'est la réforme que nous menons actuellement. Les services ministériels reconstituent aujourd'hui les carrières et le service des retraites de l'Etat liquide les pensions. Nous travaillons à un rapprochement : nous voulons que le service des retraites de l'Etat puisse récupérer directement toutes les informations permettant la liquidation des retraites.

M. Jean Arthuis , président . - M. Auban suit ce dossier.

M. Bertrand Auban . - Avec Thierry Foucaud.

M. Jean-Yves Raude . - Il faut compléter un million de comptes, mais le travail sera terminé d'ici 2012. Le système d'information des comptes individuels de retraite permettra alors de liquider celles-ci.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Que deviendront les services ministériels ?

M. Jean-Yves Raude . - Ils seront affectés à d'autres tâches. Il y a donc des gains significatifs d'emplois à la clef. La dépense des retraites évolue en fonction de la démographie et augmente de 3,6 à 5 % l'an, de sorte que le volume des pensions s'est accru de 25 % en dix ans. Cela s'applique essentiellement aux pensions civiles.

M. Jean Arthuis , président . - Et les ayants cause ?

M. Jean-Yves Raude . - Il s'agit des pensions de réversion. S'agissant des nouvelles pensions, le nombre de départs à la retraite a été deux fois plus élevé en 2008 qu'en 1990, avec une augmentation de 4 % par an sur cette période. Après un pic en 2003, on a enregistré une baisse des départs à la retraite après la réforme « Fillon », puis une remontée régulière, interrompue par un retournement en 2009 en raison de la crise économique.

M. Jean-Jacques Jégou . - N'est-ce pas la fin du baby-boom des années 1945-1949 ?

M. Jean-Yves Raude .- Ce n'est pas un phénomène démographique. A notre avis, l'effet crise se conjugue avec la montée en charge du dispositif de décote-surcote introduit par la réforme « Fillon ».

M. Jean Arthuis , président . - Les ayants cause militaires sont presque aussi nombreux que les ayants droit mais ils ne progressent pas chez les civils. Est-ce lié à la féminisation de la fonction publique ?

M. Jean-Yves Raude . - Tout à fait !

M. Philippe Marini , rapporteur général . - La féminisation fait faire des économies !

M. Jean-Jacques Jégou . - Féminisons l'armée !

M. Jean-Yves Raude . - L'espérance de vie s'allongeant, la durée moyenne de perception des retraites progresse.

M. Jean Arthuis , président . - Y a-t-il une différence d'espérance de vie entre les fonctionnaires et les retraités du secteur privé ?

M. Jean-Yves Raude . - Il faut distinguer par catégories.

M. Gérard Longuet . - Les enseignants vivent plus vieux !

M. Jean-Yves Raude . - En effet, et c'est ce qui explique la longévité moyenne plus élevée de l'ensemble des fonctionnaires, compte tenu de la proportion d'enseignants.

Depuis 2003, les pensions sont revalorisées en fonction de l'inflation, comme c'est le cas dans le secteur privé ; celles des nouveaux retraités progressent ainsi en moyenne de 1,4 % l'an.

Le régime des fonctionnaires est un régime par répartition. La retraite additionnelle de la fonction publique, régime complémentaire obligatoire, monte en charge ; ce système par points prend en compte le régime indemnitaire dans un plafond de 20 % du traitement brut. Le départ possible intervient à soixante ans pour les catégories dites « sédentaires », soit les trois quarts des fonctionnaires civils, et à cinquante ou cinquante-cinq ans pour la plupart des autres, les catégories dites actives. Le calcul de la pension dépend de la durée de service et des bonifications ; il s'opère sur la base de l'indice des six derniers mois, avec l'éventuelle décote et des majorations pour enfants. Le minimum garanti concerne 10 % des nouveaux retraités civils. Enfin, le dispositif dit « carrières longues » a connu un tassement en 2009, après un pic en 2008.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Qui part à cinquante ans ?

M. Bertrand Auban . - Les cheminots, les roulants...

M. Jean-Yves Raude . - La police, les administrations pénitentiaires, ainsi que les contrôleurs de la circulation aérienne.

M. Jean Arthuis , président . - Lorsqu'un fonctionnaire part à la retraite avec quinze ans de service et trois enfants, la pension est à quel niveau ?

M. Jean-Yves Raude . - Elle est proportionnelle à la durée de cotisation, avec l'application d'une décote.

Depuis le décret du 26 août 2009, le service des retraites de l'Etat est devenu un service à compétence nationale intégré de fait à la Direction générale des finances publiques (DGFIP). J'ai déjà évoqué la constitution des comptes individuels de retraite et j'ai signalé notre rôle d'animation de certains services déconcentrés. Il y a aujourd'hui vingt-neuf centres régionaux, dont cinq pour l'outre-mer. Les services métropolitains seront ramenés à onze, deux d'entre eux se voyant adjoindre une plate-forme d'appel pour traiter les courriels et les coups de téléphone, cela à la fin de l'année, avec une montée en charge en 2011.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Ce processus assez rapide entraînera-t-il un reclassement des agents concernés ?

M. Jean-Yves Raude . - Cela se fera à l'intérieur des services de la DGFIP, avec une garantie de maintien à résidence des agents. La surface des services locaux le permet. Nous renforcerons ainsi les services d'accueil, tout en dégageant quelques gains de productivité.

Nous sommes le service responsable des programmes 741 (pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité) et 743 (pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions), qui représentent respectivement 46,7 milliards et 2,6 milliards d'euros en 2010.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Les pensions « décristallisées » figureront-elles là-dedans ?

M. Jean-Yves Raude . - Oui.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Cela provoquera une croissance significative : on parle de 600 millions d'euros.

M. Jean-Yves Raude . - La Cour des comptes a évoqué un flux de 150 millions d'euros.

M. Philippe Josse . - Une rétroactivité sur quatre ans représente 600 millions d'euros. Le Gouvernement et le Parlement décideront avant le 1 er janvier 2011.

M. Jean-Yves Raude . - Nous sommes en relation constante avec les autres régimes à travers le groupement d'intérêt public (GIP) Info retraites qui a répondu à 300 000 courriers et à 40 000 appels téléphoniques, avec un taux de satisfaction, signalons-le, de 90 %.

S'agissant de la faisabilité technique de certaines réformes, nous avons envisagé plusieurs hypothèses de travail : tout est possible techniquement. Le passage de soixante à soixante-cinq ans demande une adaptation du système d'information, qui est en cours d'expertise. Il en est de même pour le changement de base du calcul des droits ; on connaît bien entendu l'ensemble de la carrière des fonctionnaires et les indices figurant dans le système de paye, on peut les récupérer immédiatement pour deux à trois ans - remonter plus loin suppose une montée en charge progressive. S'il fallait intégrer les primes dans le calcul des pensions, les choses seraient facilitées par la déclaration automatisée des données sociales unifiée (DADS-U). Quant à la réversion, la gestion sera plus lourde pour la mise sous condition de ressources que pour la mise sous condition d'âge.

M. Philippe Josse, directeur du Budget . - Je vais à présent vous présenter l'état du compte d'affectation spéciale « Pensions ». Les dépenses ont presque triplé depuis 1990, augmentant de 4,8 % par an en moyenne alors que les prix progressaient annuellement de 1,7 %, soit un écart de 3 points. Or l'évolution du budget de l'État est soumise à la règle dite du « zéro volume » depuis une dizaine d'années. C'est dire que la dynamique des dépenses liées aux pensions mord sur la dynamique des autres dépenses de l'État.

Cette situation résulte d'abord de « l'effet volume », c'est-à-dire de l'augmentation de 2 % par an du nombre de pensionnés, à cause de l'allongement de la vie, de la pyramide des âges dans la fonction publique d'Etat et des changements de comportement induits par la réforme « Fillon ». Quant au coût moyen des pensions, il a augmenté de 2,8 % par an. C'est dû d'abord aux règles d'indexation des pensions : avant 2003, elles étaient indexées sur l'évolution du point d'indice et sur la progression moyenne dans chaque corps ; depuis 2003, elles sont indexées sur l'inflation, comme dans le secteur privé. Il faut aussi tenir compte du « glissement vieillesse technicité » (GVT) qui existe également pour les pensionnés : les nouveaux retraités ont en moyenne des pensions supérieures à ceux qui sortent du système, c'est-à-dire ceux qui décèdent. De 1990 au début des années 2000, c'est l'augmentation du coût moyen qui a été déterminant ; depuis environ huit ans, c'est la démographie.

Le compte d'affectation spéciale « Pensions », imposé par la LOLF, a été créé le 1 er janvier 2006. Il a rendu plus lisible l'information sur les dépenses et les recettes, et fait apparaître le taux de contribution de l'employeur : auparavant, les dépenses de pensions étaient réparties entre les différents budgets ministériels. Toutefois la comptabilité reste complexe. Les dépenses comprennent non seulement les pensions, mais aussi les transferts démographiques entre régimes et les affiliations rétroactives. Les recettes comportent, outre les cotisations salariales et celles de l'État employeur, celles des autres employeurs publics, ainsi que le versement progressif des soultes de France Télécom et de la Poste - celles-ci ont été affectées à un établissement public qui les reverse par fractions au budget de l'État.

M. Jean Arthuis , président . - Est-ce bien conforme aux règles comptables européennes ?

M. Philippe Josse . - Eurostat est parfaitement au courant de ces versements, qui prendront fin en 2012.

M. Jean Arthuis , président . - Le taux de cotisations salariales dans la fonction publique d'Etat est de 7,85 %. Pouvez-vous nous rappeler celui du régime général ?

M. Philippe Jarraud, chef du bureau des retraites et des régimes spéciaux à la direction du budget . - Il est de 10,55 % au-dessous du plafond de la sécurité sociale. L'assiette n'est pas la même : le taux s'applique dans la fonction publique au traitement de base, dans le régime général à l'ensemble de la rémunération.

M. Philippe Josse . - Corrélativement, les droits à pension des fonctionnaires sont calculés en fonction de leur traitement de base, ceux des retraités du régime général sur la part de leur rémunération inférieure au plafond de la sécurité sociale pour le régime de base, et sur l'ensemble pour le régime complémentaire. Je vous ferai parvenir une étude de l'Insee qui compare les avantages des deux systèmes.

Entre 2008 et 2009, le montant total des pensions a augmenté de 1,6 milliard d'euros, passant de 32,966 milliards à 34,577 milliards d'euros. Il faut tenir compte de l'extension en année pleine de l'effet des décès et des départs en retraite : les fonctionnaires de l'Éducation nationale, très nombreux, liquident généralement leurs droits à la rentrée de septembre. En outre, le niveau des pensions est indexé sur l'inflation, dont le taux est arrêté le 1 er avril. Nous parvenons à prévoir assez précisément l'évolution du nombre de pensionnés, mais le système reste très complexe.

Le nombre annuel de départs à la retraite est passé de 40 000 en 1990 à près de 80 000 en 2008, en raison de la pyramide des âges. Le pic de 2003 s'explique par les effets psychologiques de la réforme « Fillon » : de nombreux fonctionnaires ont liquidé leurs droits par anticipation, alors même que la réforme ne devait s'appliquer que très progressivement sans les affecter personnellement. Une nouvelle baisse des départs à la retraite a été observée en 2009. Cette diminution n'est pas due à la démographie, mais aux effets psychologiques de la crise - des agents inquiets pour l'avenir professionnel de leur conjoint non fonctionnaire ont décidé de rester en activité plus longtemps -, à des hausses catégorielles de rémunération, comme celle de l'indemnité de sujétion spéciale de la police, intégrées dans l'assiette des droits à pension - certains fonctionnaires ont voulu attendre pour liquider leurs droits afin que ces hausses soient prises en compte - et à la réforme « Fillon ». Se poursuivra-t-elle, ou assisterons-nous au contraire à un rattrapage ? Il est impossible de le dire.

J'en viens aux engagements financiers de l'Etat au titre des retraites. Nous publions dans l'annexe de la loi de règlement les passifs futurs liés à ces engagements.

M. Jean Arthuis , président . - Il faudrait aller plus loin et les inscrire au titre des dépenses...

M. Philippe Josse . - Cette présentation respecte strictement la norme comptable internationale IAS 19. La baisse, cette année, de 2 % à 1,63 % du taux d'actualisation augmente la valeur des engagements.

D'après une étude du COR, le déficit technique du compte d'affectation spéciale devrait fortement augmenter au cours des quarante prochaines années.

Les effets de la réforme de 2003 restent incertains. Mais on constate déjà une augmentation de l'âge effectif de liquidation des droits à pension, due non seulement à un effet de composition - la baisse d'effectif des catégories dites « actives », puisque les instituteurs, devenus professeurs des écoles, sont désormais considérés comme « sédentaires » - mais aussi au nouveau système de décote et de surcote, qui a montré son efficacité : 35 % des liquidants ont bénéficié de la surcote en 2008, contre 14 % en 2004. La mesure compensatoire pour les carrières longues a coûté cher, mais ses effets s'amenuisent.

Il est trop tôt pour évaluer le régime de retraite additionnelle, créé en 2004, et qui, pour l'heure, ne sert de pensions que sous forme de capital, car les cotisants n'ont pas acquis le nombre de points nécessaires pour se voir servir une rente.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie pour cet exposé très clair et très précis. Quelles mesures préconisez-vous pour réduire le déficit de l'Etat, hormis des hausses d'impôt ?

M. Philippe Josse . - Il m'est difficile de répondre à cette question.

M. Jean-Jacques Jégou . - Le taux d'effort est-il le même dans les secteurs public et privé ? Sinon, faut-il modifier le montant des cotisations, le taux de remplacement ou encore le salaire de référence des fonctionnaires ?

M. Philippe Josse . - Là encore, le sujet est complexe. Les fonctionnaires ont un avantage incontestable : leurs pensions sont calculées en fonction de leur traitement des six derniers mois et non selon les 25 meilleures années. Mais, en contrepartie, leurs droits sont assis sur leur seul traitement indiciaire, à l'exclusion des primes qui sont très variables d'un corps à l'autre. Dans le régime additionnel, les primes ne sont prises en compte que dans la limite de 20 % du traitement de base. Le taux de cotisation est plus bas dans la fonction publique : 7,85 % contre 10,55 %. Le versement des pensions de réversion n'est pas soumis à des conditions de ressources, comme dans le régime général. Les majorations pour enfants diffèrent également. L'Insee, dans son étude, conclut que le régime de la fonction publique est plus favorable.

M. Jean Arthuis , président . - Le calcul des droits en fonction des six derniers mois n'encourage-t-il pas les promotions tardives ?

M. Philippe Josse . - Ce n'est plus vrai : les rémunérations des fonctionnaires ne progressent guère en fin de carrière.

M. Jean Arthuis , président . - Pouvez-vous nous éclairer sur le régime de retraite des militaires, en particulier des officiers généraux ?

M. Philippe Josse, directeur du Budget . - Le déséquilibre y est dû à la démographie militaire : les militaires sont aujourd'hui moins nombreux que pendant la guerre d'Algérie, d'autant que les armées se sont professionnalisées. Voilà pourquoi nous avons beaucoup plus de militaires retraités qu'en activité.

C. AUDITION DE M. FRÉDÉRIC BUFFIN, DIRECTEUR DE LA CAISSE DE PRÉVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF, MME NATHALIE DROULEZ, DIRECTEUR PAR INTÉRIM DE LA CAISSE DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA RATP, MM. SERGE GAYRAUD, DIRECTEUR DÉLÉGUÉ DU SERVICE DES RESSOURCES HUMAINES DE LA SNCF, ET PAUL PENY, DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT CHARGÉ DE L'INNOVATION SOCIALE À LA RATP

Enfin, la commission a procédé à l'audition de M. Frédéric Buffin, directeur de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF, Mme Nathalie Droulez, directeur par intérim de la caisse de retraite du personnel de la RATP, MM. Serge Gayraud, directeur délégué du service des ressources humaines de la SNCF, et Paul Peny, directeur général adjoint chargé de l'innovation sociale à la RATP.

M. Jean Arthuis , président. - Nous abordons à présent le sujet des régimes spéciaux.

M. Frédéric Buffin, directeur de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF . - Je ne suis pas moi-même issu de la SNCF et je ne parle qu'en tant que directeur de la caisse de retraite du personnel. Il serait illusoire, à mon sens, de vouloir dresser dès aujourd'hui le bilan de la réforme des régimes spéciaux : les réformes Balladur de 1993 et Fillon de 2003 n'avaient pas produit leurs effets deux ans après leur entrée en vigueur. Mais celle de 2008 a déjà eu pour résultat de faire mieux connaître les règles des régimes spéciaux aux administrations. La collaboration étroite entre ces dernières et la caisse a permis d'appliquer sans retard la réforme, notamment  la décote, qui entrera en vigueur le 30 juin de cette année. En revanche, le Conseil d'Etat considère que le règlement de la caisse ressemble encore trop à un règlement d'entreprise et n'est pas conforme aux canons de la légistique. Par ailleurs, le calcul des pensions prend toujours en compte des éléments de rémunération liés à la carrière de l'agent ou à sa situation familiale, de sorte qu'il n'est pas possible de simplifier les règles de gestion sur la seule base des cotisations déclarées par l'entreprise.

Le principal effet de la réforme est que la SNCF ne met plus systématiquement ses agents à la retraite d'office à cinquante ou cinquante-cinq ans. En conséquence, le nombre annuel de demandes de liquidation des droits à retraite diminue : il est passé de 7 000 en 2007 à 5 800 en 2008 et à 4 800 en 2009. Les économies ainsi réalisées sont supérieures de 100 millions d'euros aux prévisions. Mais nul ne sait quel sera à l'avenir le comportement des agents.

M. Jean Arthuis , président. - Je lis qu'il y a aujourd'hui 300 000 pensionnés de la SNCF.

M. Frédéric Buffin . - En effet : 190 000 pensionnés de droit direct et 110 000 titulaires d'une pension de réversion.

M. Jean Arthuis , président . - Les cotisants sont 161 500, le montant des prestations servies s'élève à 5,2 milliards d'euros et celui de la subvention de l'Etat à 3,12 milliards, soit 60 % du total.

M. Frédéric Buffin . - Cela résulte de la directive européenne de 1969 sur les transports. Depuis le début de l'année, l'âge moyen de départ en retraite recule pour atteindre cinquante-six ans. Les salariés entendent ainsi profiter des avantages acquis lors de la négociation, comme la création d'un dixième échelon, l'élargissement de l'assiette de liquidation aux mesures d'accompagnement des fins de carrière et aux avantages familiaux, ainsi que la prise en compte de la pénibilité.

M. Jean Arthuis , président. - L'État n'a donc rien gagné !

M. Frédéric Buffin . - Je m'inscris en faux contre ce type d'affirmation, comme je l'ai indiqué à Dominique Leclerc , rapporteur de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (MECSS). Au plan technique, nous avons fait des économies. Il faut dissocier la situation de la caisse de retraite, devenue autonome, des effets de la réforme sur l'entreprise. Certes, le fait que la SNCF garde plus longtemps ses employés âgés et qu'elle ait dû leur accorder divers avantages lui coûte de l'argent. Mais je suis hostile à la consolidation des résultats de l'entreprise et de la caisse car, depuis 2007, celle-ci est un établissement autonome.

M. Jean Arthuis , président. - Vous voulez dire que les économies réalisées par la caisse se sont traduites par des charges supplémentaires pour l'entreprise ?

M. Serge Gayraud, directeur délégué du service des ressources humaines de la SNCF . - Il faut distinguer les mesures d'accompagnement des fins de carrière des conséquences démographiques inévitables de la réforme. Nul n'ignore qu'un employé de plus de cinquante-cinq ans est mieux payé qu'un jeune de vingt-deux ans !

M. Jean Arthuis , président . - La SNCF a-t-elle réduit ses recrutements ?

M. Serge Gayraud . - Bien entendu.

M. Jean Arthuis , président . - Quelle est la rémunération moyenne d'un agent en début et en fin de carrière ?

M. Serge Gayraud . - Elle passe de 1 200 euros à 2 000 ou 2 500 euros net environ.

M. Jean-Paul Alduy . - Mais il faut tenir compte des primes !

M. Frédéric Buffin . - La caisse constate chaque année une diminution du nombre de ses affiliés. Nous avions évalué les économies tirées de la réforme à 200 millions d'euros par an sur vingt-cinq ans, mais, au vu des deux premières années, elles pourraient être de 300 millions d'euros par an. Cela résulte de la baisse tendancielle des pensions, due à la décote, de la faiblesse des progressions de carrière et de l'augmentation des cotisations. Pour ce qui concerne la SNCF proprement dite, il est vrai que les salariés qui restent plus longtemps dans l'entreprise lui coûtent plus cher.

M. Jean Arthuis , président. - Avez-vous établi les résultats consolidés de la réforme ?

M. Serge Gayraud . - Il est encore trop tôt. En 2009, les mesures d'accompagnement ont coûté 125 millions d'euros, et l'évolution démographique 50 millions d'euros. Mais d'après nos hypothèses sur le comportement des agents et l'évolution des salaires, le coût lié à la démographie pourrait, à terme, excéder 150 millions d'euros par an.

M. Jean Arthuis , président. - Pouvez-vous nous rappeler les principales caractéristiques du contrat de travail et du régime de retraite à la SNCF ?

M. Serge Gayraud . - L'âge d'ouverture des droits est resté fixé à cinquante-cinq ans et à cinquante ans pour les conducteurs. Mais la durée de cotisation pour bénéficier du taux plein augmentera progressivement à cent soixante-quatre trimestres. La part liquidable équivaut à environ 90 % de la rémunération. Les pensions de réversion sont égales à la moitié des pensions de droit direct.

M. Frédéric Buffin . - Ajoutons que le taux de remplacement est assez faible - 66 % - car les cheminots partis tôt à la retraite n'ont pas cotisé assez longtemps pour bénéficier d'une pension à taux plein. La pension annuelle moyenne de droit direct est de 24 500 euros, la pension de réversion moyenne étant de 9 500 euros, soit moins que dans d'autres fonctions publiques.

M. Jean Arthuis , président . - Pour résumer, la réforme de 2008 avait pour objectif d'aligner les régimes spéciaux de la SNCF et de la RATP sur les règles valables dans le reste de la fonction publique : passage progressif de 37,5 à 40, puis 41 annuités de cotisation, décote et surcote éventuelles, indexation des pensions sur les prix, suppression des bonifications en vigueur pour les salariés embauchés après le 1 er janvier 2009 et libre choix du moment de départ à la retraite sans « clause couperet » à cinquante ou cinquante-cinq ans.

M. Frédéric Buffin . - Le plus important est le véritable « changement culturel » introduit dans l'entreprise : les salariés doivent désormais demander la liquidation de leurs droits alors qu'avant ils étaient mis d'office à la retraite. La réforme de 2008 ne fut pas une réformette ! Il ne faut pas sous-estimer l'ampleur des modifications apportées au régime spécial. Ses effets devront être appréciés à long terme.

M. Jean Arthuis , président . - Le régime spécial de la SNCF s'est-il rapproché du régime général ?

M. Frédéric Buffin . - Hormis quelques spécificités, ses règles ont été alignées sur celles de la fonction publique. Toute modification de ces dernières affectera le régime de la SNCF de manière toutefois différée pour tenir compte du calendrier particulier mis en place en 2008.

M. Jean Arthuis , président . - Quel est le taux des cotisations salariales ?

M. Frédéric Buffin - Il est de 7,85 %.

Mme Nathalie Droulez, directeur par intérim de la caisse de retraite du personnel de la RATP . - A la RATP il est de 12 %, car il est prévu d'adosser ce régime spécial sur le régime général.

M. Serge Gayraud . - L'adossement n'a jamais été envisagé pour la SNCF, contrairement à la RATP et aux industries électriques et gazières.

M. Jean Arthuis , président. - Faut-il le mettre à l'ordre du jour ?

M. Frédéric Buffin . - Le régime général et l'Etat n'y sont guère favorables en raison de la masse financière qu'il faudrait dégager pour cela. Celle-ci est évaluée à 15 milliards d'euros pour assurer la neutralité de l'opération.

M. Jean Arthuis , président. - La SNCF devrait donc verser cette somme au régime général sous forme de soulte ?

M. Frédéric Buffin . - En effet.

Mme Nathalie Droulez . - A la RATP l'adossement, prévu dans les textes depuis 2007, n'a pas encore été mis en place. Les négociations, alors soumises à un avis favorable de la commission européenne, n'ont pas été rouvertes avec la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) depuis la création de la caisse.

M. Jean Arthuis , président. - Pourquoi ce blocage ?

Mme Nathalie Droulez . - Nous attendons de nos autorités de tutelle l'autorisation de procéder à de nouveaux calculs avec la CNAV.

M. Jean Arthuis , président. - Si la SNCF devenait une société anonyme, ne faudrait-il pas adosser son régime de retraite au régime général ?

M. Serge Gayraud . - Je ne suis pas sûr que cet adossement s'impose juridiquement.

M. Jean Arthuis , président. - Quel serait le montant de la soulte versée par la RATP ?

Mme Nathalie Droulez . - En 2004, elle avait été évaluée à 700 millions d'euros, mais entretemps est intervenue la réforme de 2008 et les paramètres ont donc changé.

M. Jean Arthuis , président. - Revenons à la question des taux de cotisations. Quels sont-ils à la SNCF ?

M. Frédéric Buffin - Le taux des cotisations salariales est de 7, 85 %. Le taux des cotisations patronales se décompose en un taux T1 et un taux T2. Le taux T1 est déterminé chaque année afin de couvrir, déduction faite du produit des cotisations salariales, les montants qui seraient dus si les salariés relevaient du régime général : il est cette année de 22,56 %. Le taux T2 est destiné à financer les avantages liés au régime spécial : il s'élève à 12,73 %. La SNCF contribue donc davantage en tant qu'employeur que dans l'hypothèse où ses salariés relèveraient du régime général.

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Je reviens à la soulte : la même règle doit s'appliquer à France Télécom, à la Poste et à la SNCF ! Pourquoi cette différence de traitement ?

M. Jean Arthuis , président . - Cela impliquerait de dégager 15 milliards d'euros. Peut-être pourrait-on transférer la dette à Réseaux ferrés de France ...

M. Philippe Marini , rapporteur général . - Ou peut-être faut-il renoncer au changement de statut...

M. Serge Gayraud . - Le régime de la SNCF souffre d'un déficit structurel lié à la démographie : il y avait 500 000 cheminots en 1945, on n'en compte plus que 150 000.

M. Jean Arthuis , président . - A la RATP, on compte 44 200 cotisants pour 44 000 pensionnés ; le montant des prestations servies s'élève à 912 millions d'euros, celui de la subvention de l'État à 526 millions d'euros, soit 58 %. J'ajoute qu'une dette de 600 ou 700 millions d'euros devra un jour être payée sous forme de soulte.

Mme Nathalie Droulez . - Ce montant devra sans doute être revu à la hausse. Comme à la SNCF, la réforme du régime spécial de la RATP est, avant tout, d'ordre culturel : les salariés n'ont plus affaire pour leur retraite à un service interne, mais à une caisse autonome. Au titre des négociations tripartites menées entre 2007 et 2008, il a été décidé que les mesures d'accompagnement se prolongeraient davantage qu'à la SNCF : jusqu'au 30 juin 2012, les affiliés qui avaient prévu de liquider leurs droits avant cette date se verront verser une compensation par l'entreprise. La réforme n'aura donc pas d'incidence sur les prestations versées avant 2014.

L'âge de départ à la retraite est resté fixé à soixante ans. Mais il existait, d'une part, une bonification de cinq ans, d'autre part, des mesures liées à certains tableaux de retraite comme l'abaissement de deux ans de l'âge de départ pour cinq ans travaillés dans le tableau B. Un agent ayant relevé du tableau B pendant toute sa carrière pouvait ainsi partir à cinquante ans, à condition d'avoir accompli vingt-cinq années de services effectifs. La réforme de 2008 n'a pas modifié cette règle : seule la bonification a disparu.

M. Jean Arthuis , président . - On peut donc toujours partir à cinquante ans !

Mme Nathalie Droulez . - Oui, mais il faudra tenir compte de la décote éventuelle, qui diminuera le montant de la pension. Le taux de remplacement n'a guère varié depuis la réforme : il est resté aux alentours de 70 %. Mais les salariés ont compris que les règles changeraient à compter du 1 er juillet 2012.

M. Jean Arthuis , président . - Monsieur Peny, nous avons vu le procès injuste qui est fait à la SNCF : qu'en est-il à la RATP ?

M. Paul Peny, directeur général adjoint chargé de l'innovation sociale à la RATP . - Les deux régimes sont équivalents, à ceci près que chacune des entreprises a pris des mesures transitoires particulières pour appliquer la réforme de 2008. Quand nous serons en vitesse de croisière, en 2014-2015, nous pourrons parler d'une pleine convergence avec le régime général. Quant à la bonification, elle ne concerne plus les agents recrutés après 2009.

M. Jean Arthuis , président . - Voilà qui est clair. Cependant, nous n'excluons pas de modifier encore les dispositions relatives à la retraite dans la fonction publique, et dans les régimes spéciaux en particulier.

M. Paul Peny . - De fait, la convergence est là et toute mesure concernant la fonction publique a vocation à s'appliquer de façon différée à la RATP.

M. Jean Arthuis , président . - Quand le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique disait qu'il ne toucherait pas aux régimes spéciaux, il entendait peut-être dire que la réforme y avait déjà été conduite à son terme...

M. Paul Peny . - C'est le cas. Les différences subsidiaires tiennent au calendrier et aux mesures transitoires.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie.

EXAMEN DU RAPPORT POUR AVIS

Réunie le mercredi 29 septembre 2010 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis, sur le projet de loi n° 713 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme des retraites.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - « La prévision est un art difficile, surtout lorsqu'elle concerne l'avenir », écrivait Marc Twain. Il est pourtant un domaine où l'avenir semble écrit et où rien ne paraît pouvoir infléchir la tendance des prochaines années : nous vieillissons. Contrepartie de l'augmentation de l'espérance de vie, ce vieillissement est source de tensions pour notre système de retraite, durablement fragilisé par la crise. Les besoins de financement actuels seraient à peine couverts par le produit de l'impôt sur les sociétés !

La réforme des retraites, comme les mesures de gestion de la dette sociale, est dictée par l'urgence, ce qui conduit à reporter toute réforme systémique. Il ne faut cependant pas perdre de vue les échéances de long terme, car la présente réforme est loin d'être une panacée. Un nouveau débat sur les retraites et leur financement sera nécessaire avant 2020.

J'évoquerai d'abord l'équilibre financier de la réforme. A titre liminaire, je rappelle que le projet de loi respecte la nouvelle doctrine selon laquelle les dispositions fiscales et financières ne peuvent être adoptées que dans le cadre d'une loi de finances ou une loi de financement. Les nouvelles recettes affectées au financement des retraites seront donc examinées dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2011.

Le projet du Gouvernement vise à couvrir les besoins du système de retraite, évalués en fonction d'un des trois scénarios économiques établis par le conseil d'orientation des retraites (COR), plutôt optimiste selon moi. Quatre paramètres permettent d'agir sur le financement du régime par répartition : l'âge de départ à la retraite, la durée de cotisation, le taux de cotisation et le niveau de pension. La préservation du pouvoir d'achat des ménages étant une ligne directrice de l'action gouvernementale, ce dernier levier a été écarté.

Le Gouvernement a d'abord choisi de mobiliser les capacités contributives des actifs. La réforme 2003 a stabilisé le ratio entre durée de cotisation et durée de retraite par une règle de partage des gains d'espérance de vie constatés : deux tiers des gains doivent être consacrés à l'augmentation de la durée d'assurance. A l'horizon 2020, la durée de cotisation devrait être de 41,5 ans contre 40,5 aujourd'hui. S'agissant des mesures d'âge, la présente réforme repose, d'une part, sur le recul progressif de l'âge d'ouverture des droits de 60 à 62 ans pour les assurés nés à compter du 1 er janvier 1956, à raison de quatre mois par an en six ans, d'autre part, sur le recul de l'âge d'annulation de la décote de 65 à 67 ans. Ces deux mesures s'appliquent à l'ensemble de la population active, sauf régimes spéciaux. Elles permettraient de financer 24 % du besoin annuel de financement du système de retraite en 2015 et 44 % de celui-ci en 2018. Je m'étonne cependant des différences entre les projections du COR et celles qui sont propres à chaque régime. Le rendement brut des mesures d'âge se trouve néanmoins réduit par l'extension de la période transitoire relative à la suppression du départ anticipé des fonctionnaires parents de trois enfants décidée à l'Assemblée nationale, et par l'élargissement du dispositif de carrières longues, principale mesure de solidarité de cette réforme avec l'augmentation des périodes de chômage non indemnisé validées gratuitement au titre des droits ouverts en début de carrière, et la compensation de l'interruption de carrière liée à la maternité. Quant à la prise en compte de la pénibilité, elle devrait être financièrement neutre pour le système de retraite puisque financée par la branche accidents du travail-maladies professionnelles.

L'augmentation de l'effort contributif des fonctionnaires se traduit, quant à lui, par le relèvement du taux de cotisation des agents publics, la révision des modalités d'attribution du minimum garanti et la suppression du dispositif de départ anticipé des parents de trois enfants ayant quinze années de service. Au total, les mesures de convergence public-privé devraient couvrir 4,8 % des besoins de financement en 2015 et 9 % en 2018.

Le Gouvernement a enfin réaffirmé l'objectif fixé en 2003 d'un basculement de cotisations, dès que possible, entre le régime d'assurance chômage et la branche vieillesse. Dans le cadre du scenario retenu, le taux de chômage s'établirait à 7,7 % en 2015 et 5,7 % en 2020. Le basculement des excédents de l'Unedic débuterait progressivement à raison de 400 millions d'euros en 2015, 1 milliard en 2018 et 1,4 milliard d'euros en 2020. Compte tenu de l'expérience passée, ce pari me semble risqué. Je rappelle en outre que l'Unedic bénéficie d'une autonomie de gestion qui pourrait empêcher que cet engagement se concrétise.

Le deuxième volet de la réforme consiste à augmenter les recettes fiscales affectées au financement des retraites. Compte tenu de l'ampleur des besoins de financement, le Gouvernement a choisi, outre l'augmentation de certains impôts, d'y affecter une partie du produit de la révision des niches fiscales et sociales. Le système de retraite devrait bénéficier de 3,7 milliards d'euros supplémentaires en 2011, provenant pour 54 % de l'annualisation du calcul des allègements généraux. J'avais moi-même proposé cet amendement lors du dernier PLFSS, mais le ministre du budget m'avait alors répondu que la mesure était complexe et susceptible d'entraîner la suppression de 85 000 emplois. Il semble que les choses aient changé... Il conviendrait d'avoir un débat approfondi à ce sujet lors de l'examen du PLFSS.

Il faut noter en outre le renforcement de la taxation sur les stock-options et les « retraites chapeaux », deux niches sociales particulièrement mal perçues par nos concitoyens. Toutefois le rendement de ces deux mesures ne s'élèvera qu'à 180 millions d'euros en 2011. Les revenus du capital sont également mis à contribution pour un montant supérieur à un milliard d'euros en 2011, dont plus de la moitié provient de la suppression du crédit d'impôt sur les dividendes.

Selon les informations du Gouvernement, le système de retraite serait à l'équilibre en 2018. Je souhaiterai nuancer cette affirmation. Ma première réserve concerne la fragilité de l'équilibre financier si celui-ci est atteint. A partir de 2020, les besoins de financement devraient sensiblement augmenter : selon les hypothèses du COR, ils s'élèveraient en 2030 à 70,3 milliards d'euros, soit une progression de 56,2 % par rapport à 2020, contre 39,3 % entre 2010 et 2020. Le retour à l'équilibre ne signifie pas, par ailleurs, que tous les régimes de retraite seront excédentaires : le principal régime de base, le régime général, devrait encore enregistrer hors transferts un déficit de près de 4,4 milliards d'euros en 2018. Les excédents des uns compenseront-ils les déficits des autres ? Le nouveau bouclage financier, communiqué hier à 15 heures, fait apparaître la possibilité d'un transfert de l'Etat au profit de la CNAV, via le Fonds de solidarité vieillesse qui se verrait confier la charge de certaines prestations non contributives aujourd'hui assurées par le régime général, comme le minimum contributif. Ce transfert serait financé par le budget de l'Etat. D'autres transferts inter-régimes pourraient être décidés. Lors de son audition devant la commission des affaires sociales, Eric Woerth a expliqué qu'il ne serait pas choquant que le régime général bénéficie de transferts en provenance des régimes complémentaires. Mais comme pour l'UNEDIC, je rappelle que l'AGIRC et l'ARRCO sont gérés par les partenaires sociaux...

Ma deuxième réserve concerne la probabilité du retour à l'équilibre. Le Gouvernement est optimiste dans ses prévisions sur le taux de chômage, qui fluctue depuis 1985 autour de 9 % - le maximum et le minimum ayant été atteints en 1997 et en 2008 avec respectivement 10,8 % et 7,4 % - alors que le ministère espère le voir baisser à 7,7 % en 2015, à 5,7 % en 2020 puis à 4,25 % à partir de 2024. Cette diminution permettrait une augmentation des cotisations, une diminution des charges du FSV et le basculement des cotisations chômage. Mais le taux de chômage structurel est évalué en France à 8 % ! Je ne vois pas ce qui pourrait provoquer une telle amélioration. Les crises financières ne sont d'ailleurs pas des crises « ordinaires » après lesquelles le Produit intérieur brut (PIB) rattrape son niveau potentiel d'avant la crise. Selon mes calculs, compte tenu des hypothèses de croissance annoncées, le taux de chômage pourrait au mieux diminuer de 1,4 point en 10 ans pour atteindre 8 % en 2020.

Ma troisième réserve concerne la dette du système de retraite et le niveau des déficits entre 2011 et 2018. Le projet du Gouvernement prévoit l'adossement du Fonds de réserve des retraites à la Caisse d'amortissement de la dette sociale à compter de 2012 : 62 milliards d'euros de déficits devraient être repris à ce titre entre 2012 et 2018.

Jusqu'à hier après-midi, le schéma financier de la réforme laissait apparaître une dépense cumulée non financée d'environ 6,2 milliards d'euros : d'une part, selon les prévisions initiales du Gouvernement, le déficit cumulé après réforme devait être en 2018 de 64,3 milliards d'euros, soit 2,3 milliards d'euros de plus que la prévision de reprise ; d'autre part, les mesures adoptées à l'Assemblée nationale représentent un coût cumulé de 3,9 milliards d'euros entre 2011 et 2018, dont 0,3 milliard d'euros pour le lissage du dispositif des « carrières longues » et 3,6 milliards d'eurospour la suppression différée du départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois enfants.

Fort heureusement, mes craintes sont apaisées. L'amélioration des perspectives macro-économiques conduit à revoir à la baisse le besoin de financement avant réforme de 1,4 milliard d'euros entre 2011 et 2018, et autorise à « doubler la mise » sur l'UNEDIC : 6 milliards d'euros seraient basculés d'ici à 2018 au lieu de 2,8 milliards d'euros. Les mesures introduites par les députés devraient donc être financées, et le déficit cumulé en 2018 atteindre 62,4 milliards d'euros, soit un montant proche de l'évaluation de la reprise.

Je m'interroge enfin sur la contribution de l'Etat, et plus largement des finances publiques, à la réforme des retraites. Le Gouvernement a annoncé le gel de l'effort de l'Etat afin que le financement des retraites de ses fonctionnaires ne pèse pas davantage sur le budget général. L'effort de l'Etat durant la prochaine décennie serait de 15,6 milliards d'euros, ce chiffre représentant l'augmentation de sa contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions» entre 2000 et 2010, non prise en compte par le COR dans ses simulations. Or la réforme de retraites est loin d'être neutre sur les finances publiques. J'ai identifié plusieurs dépenses connexes. La contribution de l'Etat au compte d'affectation spéciale « Pensions » augmentera bien en volume dans les prochaines années en raison d'un effet prix et d'un effet volume sur la masse des prestations à verser. Le budget de l'Etat continuera de financer, via les subventions d'équilibre, certains régimes spéciaux dont les charges ne cessent d'augmenter et ne seront pas compensées par les mesures d'âge à court terme. Pour rappel, les subventions d'équilibre ont représenté plus de 6 milliards d'euros en 2010. En outre, le financement des allègements généraux représente une charge croissante : entre 2007 et 2010, le coût de la compensation à la sécurité sociale des pertes de cotisations liées à cette politique aurait augmenté de plus de 10 %. Les collectivités locales, notamment les conseils régionaux et généraux, pourraient également faire les frais de cette réforme : le recul de l'âge de l'ouverture des droits allongera la prise en charge de certaines personnes au titre du Revenu de solidarité active (RSA), et les régions, responsables des Trains express régionaux (TER) et qui subventionnent à ce titre la SNCF à hauteur de 2,5 milliards d'euros par an, se sont vu demander un supplément pour combler le déficit plus élevé que prévu du régime des cheminots ; les sommes en jeu - entre 2 à 5 millions d'euros par an et par région, entre 44 et 100 millions d'euros au total - ne sont pas négligeables. Enfin, le recul de l'âge de départ à la retraite augmentera mécaniquement les dépenses au titre de l'invalidité, les pensions d'invalidité étant versées deux ans de plus. Il en va de même des dépenses d'assurance-chômage, le marché du travail ne pouvant s'ajuster parfaitement.

J'en viens à la question de l'impact de la réforme sur la fonction publique et les régimes spéciaux de retraite. L'enjeu financier est considérable : comme l'a rappelé, devant nous, le directeur du budget, le montant des pensions versées par les régimes des trois fonctions publiques a représenté en 2008 55 milliards d'euros, soit 22 % du total des prestations vieillesse versées cette même année.

La réforme des systèmes de retraite de la fonction publique apparaît aujourd'hui doublement nécessaire. Elle répond d'abord à un impératif d'équité : si la réforme de 2003 a permis d'amorcer la convergence entre les secteurs public et privé en alignant les durées de cotisations des deux régimes et en instaurant un système de décote et de surcote, des spécificités demeurent. Elle s'impose ensuite pour des raisons de soutenabilité financière : les projections actualisées du COR font apparaître un besoin de financement pour les régimes de retraite de la fonction publique de près de 20 milliards d'euros en 2015, soit environ la moitié du besoin de financement total des systèmes de retraites.

M. Jean Arthuis , président . - En fonction de quels taux de cotisations ces projections sont-elles établies ?

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - En fonction du taux de cotisation employeur de 2000.

M. Jean Arthuis , président . - Le taux de cotisations patronales est-il identique à celui du secteur privé ?

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Il est beaucoup plus élevé. Je rappelle que l'équilibre du régime de retraite des fonctionnaires n'est qu'apparent et pèse directement sur le déficit public, puisque la contribution de l'Etat-employeur est calculée «fictivement » chaque année pour équilibrer le compte d'affectation spéciale « Pensions ». Entre 1990 et 2008, la part du budget de l'Etat consacrée à la charge des pensions a augmenté de près de 60 %, passant de 9,3 % du total des dépenses du budget général à 14,6 % en 2008. Cette situation n'est pas soutenable.

Les mesures proposées par le présent projet de loi vont dans le bon sens, mais des marges d'amélioration demeurent. Je regrette, par exemple, que les « catégories actives » de la fonction publique ne soient pas redéfinies et que la présente réforme ne s'applique que de façon différée aux régimes spéciaux. Comme pour le secteur privé, les mesures proposées dans la fonction publique sont d'abord démographiques ; tous les agents publics sont concernés, à l'exception des régimes spéciaux. Surtout, dans la continuité de la réforme de 2003, le projet rapproche les règles applicables dans les secteurs privé et public.

Ces mesures présentent néanmoins des limites. Le Gouvernement souhaite porter sur dix ans le taux de retenue sur pension des fonctionnaires de 7,85 % à 10,55 %, soit le taux de cotisation au régime de base et aux régimes complémentaires des non-cadres, pour la tranche de leur salaire en dessous du plafond de la sécurité sociale. J'appelle bien évidemment de mes voeux un rapprochement entre le public et le privé, mais pour simple et lisible qu'il paraisse, l'alignement des taux de cotisation risque de n'être qu'« optique» dans la mesure où il ne s'applique pas à la même base : l'assiette de ce taux correspond dans le secteur privé au salaire brut du salarié, tandis qu'elle correspondra au seul traitement brut, hors prime, dans la fonction publique. Les plafonds d'assiette pour les régimes de base et les régimes complémentaires ne s'appliqueront pas dans la fonction publique. Plus généralement, la nature des cotisations et le périmètre des charges financées par celles-ci sont très différents : les régimes de la fonction publique couvrent également le risque d'invalidité avant l'âge de soixante ans.

Les régimes publics et privés convergent aussi en ce qui concerne les droits familiaux. Cependant, la suppression dans le secteur public du départ anticipé des fonctionnaires parents de trois enfants après quinze ans de service, et celle de la majoration de pension pour conjoint à charge dans le secteur privé, n'exonèrent pas d'une réflexion plus approfondie sur les droits familiaux et conjugaux, encore très divers d'un régime à l'autre.

S'agissant enfin des minima de pensions, il est proposé de subordonner, comme dans le secteur privé, le versement du minimum garanti à deux conditions alternatives : disposer de la durée d'assurance nécessaire pour percevoir une retraite à taux plein, ou avoir atteint la limite d'âge. Mais d'autres particularités du minimum garanti mériteraient à terme d'être réexaminées. D'une part, son montant dans la fonction publique est plus élevé - 1 067 euros - que celui du minimum contributif dans le secteur privé - 650,87 euros pour le minimum contributif majoré. D'autre part, le dispositif mis en place par la réforme de 2003 conduit à accorder un pourcentage plus élevé du minimum garanti pour chacune des premières années de service et, à l'inverse, un pourcentage plus faible pour les dernières années. Il n'incite donc pas ceux qui ont validé une durée plus longue à prolonger leur activité dans la fonction publique au-delà de l'âge minimum de liquidation.

Il est encore possible de faire progresser l'équité entre cotisants. Trois chantiers pourraient être ouverts : la garantie d'un taux minimal de remplacement dans le secteur privé, les modalités d'attribution des pensions de réversion - celles-ci sont versées sans conditions d'âge ni de ressources dans la fonction publique - et le réexamen des catégories « actives » de la fonction publique. Pour les « catégories actives », l'âge d'ouverture des droits peut être abaissé à 50 ou 55 ans. Or ces avantages résultent principalement de situations historiques : depuis, les conditions de travail ont évolué. C'est pourquoi je souhaiterais que le débat sur la pénibilité, restreint aux salariés du secteur privé, soit étendu à la fonction publique via un réexamen des catégories « actives ». S'il était mis fin dès 2011 à la possibilité de partir en retraite avant 60 ans, le gain serait d'environ 1,2 milliard d'euros en 2015 !

Enfin je déplore que la présente réforme ne s'applique que de façon différée aux régimes spéciaux de retraite, comme l'a rappelé Bertrand Auban.

Penchons-nous à présent sur les liens entre la présente réforme et la politique de l'emploi. S'agissant de la pénibilité, il ne me revient pas d'apprécier la qualité technique du dispositif proposé, mais je m'interroge sur son lien avec la réforme de retraites. Le problème de la pénibilité relève plutôt des conditions de travail, comme l'attestent indirectement les mesures proposées par le Gouvernement : l'accent est mis sur la prévention et la santé au travail, et la prise en compte de la pénibilité n'est que partielle, puisque seule la pénibilité physique constatée au moment de la retraite est prise en compte. En sont exclus les troubles psychosociaux qui demandent une prise en charge immédiate, et l'incapacité à venir qui résulte de l'exposition à des facteurs de pénibilité pendant la durée d'activité, mais se déclare après l'ouverture des droits à la retraite. Le financement de ces mesures sera assuré non par la branche vieillesse, mais par la branche accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP) par le biais d'une hausse des cotisations employeurs, qui pourront cependant être modulées par secteur d'activité.

Il faut également se préoccuper de l'emploi des seniors : les mesures d'âge proposées représentent un véritable défi car elles imposent de maintenir en activité des personnes âgées de plus de 60 ans alors même que la France se caractérise par un faible taux d'emploi des plus âgés. Il existe déjà des incitations à la poursuite d'activité, qui ont bénéficié selon le Gouvernement à 300 000 personnes : c'est à voir...

Le présent projet de loi tend à créer une aide à l'embauche spécifique. Le coût de cette mesure, de 55 millions d'euros, serait contrebalancé par la hausse des cotisations résultant du maintien dans l'emploi des plus de 60 ans : ces gains seraient de l'ordre de 100 millions d'euros pour chaque tranche de 10 000 seniors supplémentaires en activité. Je reste dubitatif quant à l'impact de cette mesure. Le recul de l'âge légal de départ à la retraite entraînera des dysfonctionnements sur le marché du travail : le Gouvernement le reconnaît lui-même puisqu'il prévoit une augmentation des dépenses du FSV au titre de la prise en charge des périodes de chômage validées, à hauteur de 1,8 milliard d'euros entre 2011 et 2020. La mesure proposée n'est pas à la hauteur des enjeux.

Quel sort réservons-nous enfin aux jeunes générations qui entrent aujourd'hui sur le marché du travail ? Aujourd'hui le débat se focalise sur l'application des mesures d'âge aux générations qui sont proches du départ à la retraite. Or l'augmentation de l'effort contributif demandé aux jeunes actifs n'est pas compensée par des perspectives rassurantes sur leur futur niveau de pension. Certes, le Gouvernement a proposé de porter par voie réglementaire de quatre à six trimestres les périodes de chômage non indemnisées validées gratuitement au titre des droits à la retraite en début de carrière : j'y suis favorable. Mais il est important de prendre conscience de deux évolutions majeures qui ont un impact sur le système de retraite: d'une part l'entrée de plus en plus tardive dans la vie active, d'autre part la fragilisation des parcours professionnels. Ces deux évolutions pèsent sur la durée d'assurance et le taux de remplacement futur des jeunes générations.

Ce constat m'amène à mon quatrième point, le renforcement de l'épargne retraite. Pour parer aux incertitudes que nous laissons aux générations à venir, il est nécessaire de permettre à chacun de compléter sa future pension en fonction de ses revenus et de ses décisions d'épargne. Je proposerai des amendements inspirés par la volonté d'élargir l'accès à l'épargne retraite à un plus grand nombre de nos concitoyens, et de respecter un certain équilibre entre les produits qui peuvent être proposés afin que chacun puisse épargner en fonction d'un projet déterminé.

La présente réforme constitue pour tous ceux qui sont attachés à la sauvegarde du régime de retraites par répartition une étape indispensable car dictée par l'urgence. Toutefois elle n'en garantit pas la soutenabilité financière à long terme : il s'agit d'une « rustine » destinée à tenir jusqu'à la fin de la prochaine décennie, à supposer que l'on mette à contribution le budget de l'Etat et que l'on gagne un pari risqué sur l'amélioration de l'environnement économique. Mettons à profit les prochaines années pour réfléchir à une réforme de fond de notre système qui, dans sa configuration actuelle, aura du mal à relever le défi démographique à compter de 2020. En conclusion, je vous propose de donner un avis favorable aux titres II, III, IV, V, V bis et V ter, sous réserve de l'adoption des amendements que je vous soumettrai dans un instant.

M. Jean Arthuis , président . - Vos propos ne contribuent guère à l'apaisement des esprits, mais la commission des finances n'a jamais voulu se raconter d'histoires !

Le calcul du solde prend en compte le déficit du régime général, le déficit des régimes spéciaux financé par l'État et, pour l'État employeur, la différence entre les pensions versées et les cotisations prélevées sur les salaires.

M. Serge Dassault . - Avec de plus en plus de retraités et de moins en moins de cotisants, le système de retraites par répartition ne marche plus ; l'épargne retraite, si ! A combien s'élève le déficit de la branche vieillesse ?

M. Jean Arthuis , président . - Le déficit cumulé 2012-2018, soit 62 milliards d'euros, sera transféré à la CADES. Il s'agit en réalité d'un emprunt...

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Le financement de cette reprise de dette est une véritable usine à gaz.

M. Jean Arthuis , président . - On a transféré 130 milliards d'euros à la CADES depuis 1996 ; elle en a remboursé environ 45 milliards d'euros. Moins accommodante que le Sénat, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, saisie pour avis, vient de refuser l'allongement de quatre ans de la durée de vie de la Caisse, quitte à augmenter la CRDS.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Les commissions des affaires sociales et des lois de l'Assemblée nationale viennent de prendre des positions bien plus strictes que les nôtres. Pour ma part, je comptais exprimer mes réserves lors du PLFSS...

M. Jean Arthuis , président . - Le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale n'ouvre que des possibilités ; nous ne sommes pas obligés de voter les dispositions du PLFSS ! M. Jégou avait déposé, lors du dernier PLFSS, un amendement tendant à augmenter la CRDS.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je le redirai en séance publique : je suis pour une augmentation de 0,26 point de la CRDS. Si nous refusons l'allongement de quatre ans, il faudrait doubler la cotisation !

M. Serge Dassault . - Le système ne marche pas : en transférant cette somme à la CADES, on ne fait que déplacer le problème !

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - J'ai bien dit que cette réforme, faite dans l'urgence, était une rustine, et que la vraie réforme des retraites restait à faire.

M. Serge Dassault . - Le passage à 62 ans n'est pas suffisant, le retour à 60 ans serait dramatique !

M. Jean Arthuis , président . - Mes enfants répètent volontiers qu'ils ne toucheront pas de retraite !

M. Serge Dassault . - Comment payer, quand l'État est en faillite ? Suivons l'exemple américain. Les recettes d'intéressement et de participation pourraient financer le système de retraite. Cela ne coûterait rien à l'État.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Mes amendements sur le plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO) vont dans ce sens.

M. Serge Dassault . - Les femmes qui élèvent seules un enfant sont les grandes oubliées de la réforme. Je déposerai un amendement sur ce sujet.

M. Jean Arthuis , président . - Gare à l'article 40 !

M. Yann Gaillard . - Qu'un parlementaire aussi prestigieux que M. Dassault exprime ses réserves, c'est une chose ; c'en est une autre quand le rapport pour avis de la commission des finances se montre très sévère à l'égard de la réforme.

M. Jean Arthuis , président . - M. Jégou vous a présenté objectivement les projections financières.

M. Yann Gaillard . - Ces chiffres figurent-ils dans le rapport de la commission saisie au fond ? Admettez que politiquement, cela pose un problème.

M. Jean Arthuis , président . - Le rapport de M. Leclerc n'est pas terminé. Sachant que le texte vient en discussion en séance publique la semaine prochaine, il fallait vous présenter cet éclairage dès aujourd'hui.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je vous ai présenté les tout derniers chiffres, issus du Gouvernement lui-même.

M. Jean Arthuis , président . - Il faut sortir de l'illusionnisme collectif qui a prévalu jusqu'ici.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Le Gouvernement ne nous a communiqué ces chiffres qu'hier soir. La commission des finances doit en faire état. Le rapport ne dira que la triste réalité. Je suis modéré !

M. Jean Arthuis , président . - Les discours convenus, les « tout va très bien » sont anxiogènes pour nos concitoyens qui savent qu'il n'en est rien ! Il faut parler clairement pour faire émerger des réponses crédibles et redonner espoir et confiance.

M. François Trucy . - Je remercie le rapporteur et ses collaborateurs pour leur travail. Les chiffres sont brutaux. Je partage les inquiétudes de M. Gaillard. Retrouvera-t-on cette analyse dans le rapport de la commission des affaires sociales ?

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je l'espère !

M. François Trucy . - Il est important que les deux rapports concordent.

Permettez-moi une question politique : à titre personnel, voterez-vous cette réforme ?

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Sincèrement, je ne pense pas voter pour, mais je crois que l'on ne peut pas voter contre. Je m'abstiendrai vraisemblablement. On ne dit pas toute la vérité aux Français, on ne fait pas tout ce qu'il faut. La réforme est une rustine, mais une rustine indispensable ! Voter contre, c'est accepter de ne rien faire.

M. François Trucy . - Est-ce la réponse du groupe centriste ?

M. Jean Arthuis , président . - Ce texte n'est pas une vraie réforme, mais un colmatage partiel. Il restera 60 milliards à trouver, sachant que les données macroéconomiques sont optimistes... Le groupe centriste appelle de ses voeux une réforme systémique, qui mette les Français à égalité devant la retraite : extinction des régimes spéciaux, mise à égalité du public et du privé, création de comptes individuels de contribution sur lesquels seraient versées les cotisations de l'employeur et du salarié - soit un système de retraite par points. Je regrette que l'on n'enclenche pas ce processus dès aujourd'hui. La SNCF conserve son régime préférentiel, et c'est la collectivité nationale qui paye !

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement de M. Leclerc proposant d'engager une réflexion sur la mise en place d'un système de retraite par points n'a pas été adopté. Selon les chiffres du Gouvernement, le retour à l'équilibre est prévu en 2018, mais ces estimations reposent sur des prévisions très optimistes, notamment un taux de chômage de 4,5% en 2020...

M. Jean Arthuis , président . - Le groupe centriste s'interdit de déposer des amendements démagogiques qui creuseraient le déficit et assurera le financement de ses propositions par des hausses de CSG ou de CRDS. Cessons de nous raconter des histoires !

M. Adrien Gouteyron . - Je me réjouis que la position du groupe centriste ait ainsi été précisée.

Les chiffres sont incontestables, mais il ne faudrait pas que le rapport de notre commission nourrisse l'opposition à la réforme. Or l'un des arguments utilisés pour affaiblir la démarche du Gouvernement aux yeux des Français est précisément de dire que la réforme ne règle rien ! Le terme de « rustine » me paraît excessif ; je vous enjoins de ne pas l'employer dans le rapport ou à la tribune. Nous savons que cette réforme ne règle pas tout, mais il faut impérativement faire ce pas. Le rapport de la commission des finances ne doit pas le rendre plus difficile !

On entend souvent qu'en retardant le départ à la retraite, on prive les jeunes de places. C'est un argument fallacieux, mais qui porte dans l'opinion publique : il faut expliquer pourquoi ce raisonnement ne tient pas !

M. Jean Arthuis , président . - C'est vrai. Le sujet est celui de la compétitivité du travail en France...

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - En effet, cet argument n'est pas prouvé : c'est le contraire qui est vrai ! Ce débat est purement franco-français. Nous n'en serions pas là si nous avions une politique de l'emploi dynamique.

M. Serge Dassault . - À entendre l'opposition, il faudrait ne rien faire du tout !

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je suis effondré devant l'absence de propositions du parti socialiste. Comment peut-on ainsi cacher la réalité aux Français ?

M. Jean Arthuis , président . - Le parti socialiste et les syndicats sont dans le déni de réalité.

M. François Trucy . - La brutalité du constat est suffisamment éclairante pour ne pas en rajouter dans la sémantique. Le terme de « rustine » est superflu.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je le retire.

M. Jean Arthuis , président . - Nous constatons une étatisation du système de retraite par répartition, qui est de plus en plus financé par l'impôt.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - La commission des finances dira que ce texte n'est pas une réforme structurelle, mais que les mesures proposées sont indispensables et urgentes.

M. Jean Arthuis , président . - Il n'a fallu que quelques secondes pour passer de 65 à 60 ans, mais lorsqu'il s'agit de passer de 60 à 62 ans, on fait défiler des centaines de milliers de personnes ! Dans quel pays vivons-nous ? Il faudrait aller beaucoup plus loin !

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je dis souvent aux ministres que la meilleure façon de soutenir le Gouvernement est de l'aider à faire ce qu'il n'ose pas faire !

M. Adrien Gouteyron . - Portons déjà au moins l'âge de départ à 62 ans. Le Premier Ministre lui-même a reconnu que la réforme ne réglait pas définitivement tous les problèmes.

M. Jean Arthuis , président . - Nous disons qu'il faut aller au-delà des 62 ans ! Les insupportables conservatismes qui défendent les régimes spéciaux nous conduisent dans le mur !

M. François Trucy . - Au terme de « rustine », je préfère celui de « prothèse ».

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Si ce terme convient aux commissaires de la majorité, d'accord !

M. Jean Arthuis , président . - Ce débat a été fort intéressant. Les amendements de M. Jégou en loi de finances vont toujours dans le sens de l'équilibre des finances publiques : c'est d'ailleurs lui qui avait proposé de fiscaliser les indemnités journalières des accidents du travail !

Examen des amendements

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Je me félicite que l'Assemblée nationale ait introduit une partie relative à l'épargne retraite dans ce texte. J'ai souhaité en préciser les modalités d'application et restaurer un certain équilibre entre les deux branches de l'épargne retraite que sont les produits de type assurantiel et ceux de l'épargne salariale. Les contrats d'épargne retraite proposés aux épargnants doivent être aussi diversifiés que possible. Il faudra toutefois mener une réflexion globale sur l'articulation des différents produits d'épargne retraite et sur leur fiscalité.

J'ai souhaité approfondir la démarche de l'Assemblée nationale en termes d'orientation des flux liquides vers une épargne bloquée destinée à la retraite. J'ai ainsi proposé l'alimentation par défaut du PERCO à partir de l'intéressement ainsi que la transformation volontaire de tout ou partie d'un contrat d'assurance sur la vie.

Enfin, les modalités fiscales de certains amendements devront être déterminées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, sachant que ces mesures ne doivent pas aggraver la situation des finances publiques.

Les amendements portent sur les articles après l'article 32.

Article 32 bis

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n°1 étend la possibilité de verser l'équivalent des jours de réduction de temps de travail non utilisés sur un PERCO aux autres produits d'épargne retraite assurantiels : plans d'épargne retraite entreprise (PERE), contrats de retraite d'entreprise à cotisations définies et plans d'épargne retraite populaire (PERP). Le salarié doit avoir le choix entre les différents dispositifs proposés.

L'amendement n°1 est adopté.

Article additionnel après l'article 32 ter

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n° 2 prévoit l'affectation automatique mais non obligatoire par défaut du quart de la prime d'intéressement sur le PERCO. Il s'agit de soutenir l'essor de l'épargne salariale. Le PERCO, dont les encours demeurent modestes, est un produit apprécié, à la fiscalité intéressante, qui correspond aux besoins des salariés.

La liberté du salarié est respectée puisqu'il s'agit d'une option « par défaut ». Aujourd'hui, 1,5 million des 5 millions de salariés qui bénéficient de l'intéressement perçoivent une prime sans en avoir exprimé le souhait.

M. Serge Dassault . - Il faudrait étendre cet amendement aux réserves de participation, pour inciter les salariés à l'épargne retraite.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - Mon amendement va déjà loin ; aller au-delà hypothèquerait son adoption...

M. Jean Arthuis , président . - M. Dassault pourra déposer un sous-amendement.

L'amendement n°2 est adopté.

Article 32 quater

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n°3 étend l'obligation d'engager des négociations de branche au plus tard le 31 décembre 2012 aux contrats d'entreprise de retraite supplémentaire à cotisations définies dits « article 83 ». L'objectif est de favoriser l'ensemble des dispositifs d'épargne retraite, qu'ils relèvent de l'épargne salariale ou de la gestion assurantielle. Aux négociateurs de retenir le produit le plus adapté.

L'amendement n°3 est adopté.

L'amendement de coordination n°4 est adopté.

Article 32 sexies

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n°5 renvoie au décret le soin d'encadrer la communication d'une estimation de la rente viagère versée au titre des contrats liés à la cessation d'activité professionnelle.

L'amendement n°5 est adopté.

Articles additionnels après l'article 32 septies

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n° 6 prévoit la sortie des produits d'assurance retraite en phase de constitution en cas de décès du conjoint ou de surendettement, dûment reconnu, de l'adhérent.

L'amendement n°6 est adopté.

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n°7 simplifie le mode de gouvernance des PERP en autorisant le conseil d'administration à exercer les fonctions du comité de surveillance.

L'amendement n°7 est adopté.

Article additionnel après l'article 32 octies

M. Jean-Jacques Jégou , rapporteur pour avis . - L'amendement n°8 oriente une partie du stock d'assurance-vie vers l'épargne retraite. Les dispositifs d'épargne retraite de nature assurantielle représentent moins de 10 % du stock de l'assurance-vie.

Sur la base du volontariat, l'assuré pourrait bloquer son contrat jusqu'au moment du départ en retraite. La sortie serait réalisée en rente. Il n'est pas question de substituer un régime par capitalisation sans offrir aux assurés une option supplémentaire.

Afin d'éviter tout effet d'aubaine, la mesure n'entrerait en vigueur que cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi ; il faudra attendre au moins cinq ans pour percevoir la rente. Les modalités de fiscalisation seront débattues dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011.

L'amendement n°8 est adopté.

M. Serge Dassault . - Il faudrait également un amendement en faveur des femmes qui élèvent seules un enfant...

M. Jean Arthuis , président . - Vous pourrez déposer un tel amendement à titre personnel. Pour ma part, j'en aurai aussi un : j'ai découvert que les fonctionnaires partaient en retraite en début de mois, car ils percevaient alors le salaire du mois entier !

La commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption des articles des titres II (dispositions applicables à l'ensemble des régimes, mesures d'âge), III (mesures de convergence), IV (pénibilité du parcours professionnel), V (mesures de solidarité) et V bis (emploi des seniors) et V ter (épargne retraite), sous réserve de l'adoption de ses amendements.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

ARTICLE  32 BIS

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

«  En l'absence de compte épargne-temps dans l'entreprise, le salarié peut verser à son choix, sur le plan d'épargne pour la retraite collectif, sur le plan d'épargne retraite d'entreprise, sur un contrat souscrit dans le cadre de régimes de retraite supplémentaire, auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale ou, en l'absence de ces dispositifs, sur le plan d'épargne retraite populaire de son choix, dans la limite de cinq jours par an, les sommes correspondant à des jours de repos non pris. Le congé annuel ne peut être affecté dans ces conditions que pour sa durée excédant vingt-quatre jours ouvrables.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 32 TER

Après l'article 32 ter insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 3315-2 du même code est ainsi modifié :

1° Les mots : « plan d'épargne d'entreprise » sont remplacés par les mots : « plan d'épargne salariale »,

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le bénéficiaire ne demande pas la perception de la prime d'intéressement ou qu'il n'a formulé aucune demande explicite d'affectation de cette prime à un plan d'épargne salariale, sa prime est affectée par défaut pour un quart au plan d'épargne pour la retraite collectif prévu au chapitre IV du titre III, lorsqu'il existe dans l'entreprise et dans les conditions prévues par le règlement ou par l'accord instituant le plan ; les trois quarts de la prime sont directement payés au bénéficiaire. »

II. - L'article L. 3315-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le bénéficiaire ne demande pas la perception de la prime d'intéressement ou qu'il n'a formulé aucune demande explicite d'affectation de cette prime à un plan d'épargne salariale, sa prime est affectée par défaut pour un quart au plan d'épargne pour la retraite collectif prévu au chapitre IV du titre III, lorsqu'il existe dans l'entreprise et dans les conditions prévues par le règlement ou par l'accord instituant ce plan ; les trois quarts de la prime sont directement payés au bénéficiaire. »

ARTICLE 32 QUATER

Alinéa 1

Après les mots :

d'épargne retraite populaire

insérer les mots :

ou de régimes de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L.911-1 du code de la sécurité sociale,

ARTICLE 32 QUATER

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

III- L'article L. 2241-8 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Des négociations de branche en vue de la mise en place de plans d'épargne pour la retraite collectifs de branche sont engagées au plus tard le 31 décembre 2012.

« A défaut d'initiative de la partie patronale au plus tard le 31 décembre 2012, la négociation s'engage dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation syndicale représentative. »

ARTICLE  32 SEXIES

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 32 SEPTIES

Après l'article 32 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa de l'article L.132-23 du même code, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« - décès du conjoint ;

« - situation de surendettement de l'adhérent définie à l'article L. 331-2 du code de la consommation. »

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 32 SEPTIES

Après l'article 32 septies , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du II de l'article L. 144-2 du même code est ainsi rédigé :

« Le conseil d'administration de l'association peut valablement exerce les compétences du comité de surveillance d'un plan, dans des conditions fixées par décret. »

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 32 OCTIES

Après l'article 32 octies , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le souscripteur ou l'adhérent d'un contrat mentionné au I de l'article 125-0 A du code général des impôts peut, soit à partir de son cinquantième anniversaire, soit après une durée de détention de huit ans, transformer ce contrat en un contrat d'assurance relevant du titre V de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, dont la phase de constitution des droits a une durée d'au moins cinq ans.


* 1 Les articles font l'objet d'un commentaire global, sauf ceux du titre V ter sur l'épargne retraite, qui concentrent la totalité des huit amendements adoptés par votre commission des finances et sont analysés en détail.

* 2 Selon les chiffres du projet de loi de finances pour 2011. Produits nets.

* 3 Communiqué publié à l'issue de la réunion de travail au Fort de Brégançon.

* 4 Consensus Forecasts, août 2010.

* 5 Lettre n° 319 de l'OFCE, « Quel pilotage pour les comptes sociaux ? » - 4 juin 2010.

* 6 En euros constants 2008.

* 7 Cf. Avis n° 694 (2009-2010) relatif à la gestion de la dette sociale de Jean-Jacques Jégou.

* 8 Philippe Marini, Les Echos, 3 mars 2010.

* 9 Néanmoins, à compter de 2010, un transfert entre la CNRACL et la fonction publique d'Etat sera établi afin de neutraliser les effets de la décentralisation sur les recettes et les charges des régimes. Il neutralisera également l'impact de la décentralisation sur les transferts de compensation.

* 10 Compte rendu des commissions, semaine du 13 septembre.

* 11 Ce dispositif, qui devait disparaître à la fin de l'année 2008, a été prolongé par décret en 2009 et 2010. Il a été financé en 2010 grâce aux crédits du plan de relance. A ce jour, aucune mesure de prolongation de la mesure n'a été décidée pour 2011. Il ne devrait donc plus y avoir d'entrées dans le dispositif.

* 12 Cette contribution est prélevée à la source par les employeurs des fonctionnaires et agents publics relevant de l'Etat, des collectivités locales, des établissements hospitaliers et autres organismes précisés par les articles L. 5424-1, L. 5424-2 et R. 5424-1  (ancien article L. 351-12) du Code du Travail. Elle s'élève à 1 % de leur rémunération.

* 13 La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) est une procédure administrative permettant de prendre en compte qualitativement l'incapacité.

* 14 Audition de Philippe Josse, directeur du budget, et Jean-Yves Raude, trésorier payeur général, directeur du service des retraites de l'Etat, à l'occasion de la table ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites », le 2 juin 2010, reproduite en annexe au présent rapport.

* 15 Seuls les chiffres de 2008 de l'ensemble des régimes obligatoires de base et complémentaires sont disponibles.

* 16 L'article 22 du titre III (dispositif « carrières longues ») est examiné dans le cadre de la première partie du présent rapport.

* 17 Conseil d'orientation des retraites, « Retraites : renouveler le contrat social entre les générations », décembre 2001.

* 18 Conseil d'orientation des retraites, « Situation des assurés au regard de la retraite : éléments de comparaison entre salariés des secteurs public et privé », juin 2009.

* 19 Loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale.

* 20 La disposition introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 (article 96 de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009) ayant été considérée comme « cavalier social » par le Conseil constitutionnel, le mécanisme a été réintroduit, à l'initiative de la commission des finances du Sénat, en loi de finances rectificative pour 2008 (article 137 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008).

* 21 Audition de Philippe Josse, directeur du budget, à l'occasion de la table ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites », le 2 juin 2010, reproduite en annexe au présent rapport.

* 22 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 23 Comme indiqué précédemment, ce chiffre ne recouvre pas uniquement les dépenses de pension ; sont également compris les transferts démographiques et les affiliations rétroactives.

* 24 La mise en place de taux de contribution employeur différenciés s'explique par les conditions spécifiques de liquidation des retraites servies aux personnels militaires qui conduisent à un coût sensiblement différent de celui des personnels civils.

* 25 Chiffrages transmis à votre commission des finances par la direction du budget à l'occasion de sa table ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites », le 2 juin 2010.

* 26 Audition de Philippe Josse, directeur du budget, à l'occasion de la table ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites », le 2 juin 2010, reproduite en annexe au présent rapport.

* 27 Audition de Philippe Josse, directeur du budget, et Jean-Yves Raude, trésorier payeur général, directeur du service des retraites de l'Etat, à l'occasion de la table ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites », le 2 juin 2010, reproduite en annexe au présent rapport.

* 28 COR, « Comparaison des taux de cotisation dans les différents régimes », juin 2009.

* 29 La Cour de cassation a jugé, par un arrêt du 19 février 2009, que ce dispositif n'était pas compatible avec l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme qui proscrit les discriminations fondées sur le sexe.

* 30 Cour des comptes, rapport sur la sécurité sociale - septembre 2008.

* 31 COR, « Le minimum garanti dans les régimes de retraite de la fonction publique » - juin 2006.

* 32 Source : COR, « Le minimum garanti dans les régimes de retraite de la fonction publique », juin 2006

* 33 Cour des comptes, rapport public particulier sur les pensions des fonctionnaires civils de l'Etat - avril 2003.

* 34 COR, « La problématique des « titulaires sans droit à pension » dans les régimes de retraite de la fonction publique - février 2009.

* 35 Audition de Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) à l'occasion de la table ronde « Rendez-vous 2010 pour les retraites », le 28 avril 2010, reproduite en annexe au présent rapport.

* 36 COR, « Retraites : droits familiaux et conjugaux » - décembre 2008.

* 37 Rapport n° 314 (2006-2007) de Claude Domeizel et Dominique Leclerc, « Transparence, équité, solidarité : les trois objectifs d'une réforme de la réversion ».

* 38 Vingt-et-un régimes de base sont regroupés au sein du GIP Info Retraite : régime général (salariés du privé non agricole - CNAV), MSA salariés (salariés agricoles), MSA non-salariés (non-salariés agricoles), régimes des fonctionnaires civils et militaires, FSPOEIE (ouvriers des établissements industriels de l'État), CNRACL (collectivités locales), régimes des mines, CNIEG (industries électriques et gazières), SNCF, RATP, ENIM (marins), CRPCEN (clercs et employés de notaires), CAVIMAC (cultes), Banque de France, Opéra de Paris, Comédie française, RSI (artisans et commerçants), CNAVPL (professions libérales), CIPAV (architectes et autres professions libérales), CNBF (avocats), Port autonome de Strasbourg. A ces vingt et un régimes s'ajoutent un certain nombre de régimes regroupant un nombre limité d'assurés - dont de nombreux régimes « fermés » et des régimes « locaux » (Alsace-Lorraine notamment).

* 39 L'imprimerie nationale est une société anonyme, à capitaux publics, depuis le 1 er janvier 1994. Parmi environ 550 salariés, moins de 20 d'entre eux sont actuellement fonctionnaires.

* 40 Ne sont donc pas retracées dans les documents budgétaires les subventions versées notamment aux caisses de retraite de l'Opéra de Paris et de la Comédie française qui regroupent 2 151 cotisants pour 2006 pensionnés.

* 41 L'objet de la réforme de 2008 des régimes spéciaux était d'introduire des dispositions analogues à celles adoptées pour les régimes de la fonction publique en 2003 avec, sauf exception, un décalage de calendrier de 4 ans et demi (la réforme est entrée en vigueur au 1 er juillet 2008, alors que celle de la fonction publique était entrée en vigueur le 1 er janvier 2004).

* 42 Rapport d'information n° 732 (2009-2010).

* 43 Le document d'orientation du Gouvernement publié le 16 mai dernier a précisé que « en ce qui concerne les régimes spéciaux, ces évolutions s'appliqueront dans le respect du calendrier de mise en oeuvre de la réforme de 2007 ».

* 44 Néanmoins, certaines dispositions prévues dans le projet de loi pourront s'appliquer, lorsque la loi portant réforme des retraites sera promulguée. Il s'agit notamment des dispositions prévues notamment dans le titre 1 er du projet de loi « Dispositions générales » :

- l'entretien d'information à partir de 45 ans puis tous les cinq ans ;

- la participation au répertoire de gestion des carrières unique ;

- la mensualisation de la pension à la demande des assurés.

* 45 Rapport d'information n° 461 (2009-2010), « Retraites 2010 : régler l'urgence, refonder l'avenir ».

* 46 Etude d'impact annexée au présent projet de loi.

* 47 Depuis le 1 er janvier 2009, le cumul emploi-retraite est autorisé dès 60 ans, lorsque les assurés ont eu une carrière complète leur permettant de prétendre à une pension à taux plein, et sans restriction au-delà de 65 ans. Le plafond imposé au cumul entre le salaire et la pension (1,6 Smic) et le délai de carence de 6 mois, applicable lorsque l'activité est effectuée auprès du dernier employeur, sont supprimés.

* 48 Depuis 2007, le taux d'emploi des seniors a augmenté de plus de 5 points (pour les 55-59 ans) et atteint désormais 60 %, se situant désormais dans la moyenne européenne. Pour mémoire, il était de 46,9 % en 1990, 48,2 % en 2000 et 55,3 % en 2007.

* 49 DREES, « Les droits à la retraite des jeunes générations », Dossiers Solidarités et santé n° 10 - 2009.

* 50 Proposition de loi n° 321 (2007-2008), pour le développement de l'épargne retraite, déposée le 7 mai 2008.

* 51 Cf. ci-après, commentaire de l'article 32 septies et de l'article additionnel après l'article 32 septies sur le régime du Perp.

* 52 Cf. contrat de retraite pour les travailleurs non salariés non agricoles dit « Madelin » In Loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle et contrat de retraite complémentaire pour les exploitants agricoles dits « Madelin agricole » In loi du n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.

* 53 Cf. ci-après, commentaire de l'article 32 octies .

* 54 Cf. ci-après, commentaire de l'article 32 bis sur le régime juridique du PERCO.

* 55 Cas limité à l'accession à la propriété à l'âge de la retraite, à condition de ne pas avoir été propriétaire dans les deux ans qui ont précédé.

* 56 Source : DREES

* 57 Si la FFSA évalue le nombre de personnes bénéficiant d'une rente au titre de l'article 39 entre 1,5 million et 2,5 millions, la DREES tient à souligner que l'évaluation du nombre de personnes couvertes pour ces contrats n'a pas de sens en soi car ces derniers ne sont pas individualisables lors de la phase de constitution.

* 58 Hors indemnités de fin de carrière.

* 59 Idem.

* 60 Source : Enquête de 2010 de l'Institut d'études CSA.

* 61 Cf. enquête du cabinet Mercer de 2008 In Magazine de l'Afpen Direction retraite n°2 Septembre-octobre 2009.

* 62 Cf. loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Le PERCO remplace l'ancien Plan d'épargne salariale volontaire (PPESV).

* 63 Cf. article L. 3334-1 du code du travail.

* 64 La part imposée varie selon un abattement dépendant de l'âge de liquidation de la rente :


• liquidation entre 50 et 59 ans : abattement de 50 %


• liquidation entre 60 et 69 ans : abattement de 60 %


• liquidation au-delà de 70 ans : abattement de 70 %

* 65 L'ensemble de ces versements volontaires est cependant limité. En effet, leur montant cumulé sur les différents plans d'épargne salariale ne doit pas excéder 25 % de la rémunération annuelle brute ou du revenu professionnel imposé à l'impôt au titre de l'année précédente.

* 66 Les versements de l'employeur ou du salarié sont facultatifs contrairement aux produits d'assurance retraite catégoriels à versements obligatoires.

* 67 Cf. article 26 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, codifiée au troisième alinéa de l'article L. 3153-3 du code du travail.

* 68 Il convient toutefois de relever que les droits issus du CET, correspondant à un abondement de l'employeur sur ce compte et qui sont affectés au PERCO, sont exonérés d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales dans la limite du plafond d'abondement et soumis à la contribution de 8,2 % au-delà de 2 300 euros.

* 69 Source : FFSA.

* 70 Source : Enquête de l'Institut d'études CSA.

* 71 La prime moyenne annuelle attribuée à un salarié bénéficiaire représente 1 500 euros et le montant moyen annuel de l'abondement versé par l'employeur sur un PERCO, en complément du versement fait par un salarié, est de 500 euros.

Source : Dares 2007

* 72 Source : Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES).

* 73 Cet encours ne comprend pas les indemnités de fin de carrière.

* 74 L'article 132-23 du code des assurances prévoit une faculté de rachat pour les contrats d'assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle uniquement en cas d'invalidité, de liquidation judiciaire de fin de droit à chômage ou de deux années sans mandat pour un mandataire social.

* 75 Rapport d'information de Philippe Marini, n° 486 (2005-2006) du 21 septembre 2006 L'épargne retraite en France trois ans après la « loi Fillon » : quel complément aux régimes de retraite par répartition ?

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