D. LE SURCOÛT DE PARTICIPATION DE LA GENDARMERIE AUX OPÉRATIONS EXTÉRIEURES DEVRAIT ÊTRE FINANCÉ PAR UN FONDS INTERMINISTÉRIEL, A L'IMAGE DES ARMÉES

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur n'a pas remis en cause sa participation aux missions de défense et en particulier aux opérations extérieures (OPEX). En tant que force de police à statut militaire capable d'agir dans tout le spectre de la crise, de la guerre à la paix, la gendarmerie est en effet particulièrement adaptée à ce type d'opérations.

Au 1 er juillet 2010, environ 700 gendarmes français étaient déployés sous engagement international, européen ou commandement national. Leurs compétences spécifiques leur permettent d'intervenir en accompagnement des forces ou dans le cadre de la gestion civile des crises.

Parmi ces 700 militaires, environ 200 sont déployés en Afghanistan. Ces gendarmes français sont principalement engagés dans le cadre de la force de gendarmerie européenne, au titre de la mission de formation de la police afghane sous mandat de l'OTAN. Ils sont déployés dans les zones placées sous commandement français en Kapisa et Surobi, et à Mazar-e-Shariff et sont chargés de deux principales missions :

- d'une part, assurer la formation des cadres de la police afghane chargés du maintien de l'ordre, soit l'équivalent de la gendarmerie mobile ou des compagnies républicaines de sécurité ;

- d'autre part, conseiller la police afghane dans son travail quotidien, au sein des districts situés dans la zone placée sous commandement français.

La mission en Afghanistan se situe incontestablement dans le « haut » du spectre de la crise et témoigne de l'appartenance de la gendarmerie à la communauté militaire. Les gendarmes français sont, en effet, particulièrement exposés puisque les commissariats de police figurent aux avant-postes et qu'ils ont pour mission d'accompagner les policiers afghans sur le terrain.

Les gendarmes qui participent à cette mission ont été choisis pour leurs compétences, ils ont suivi un entraînement très poussé et bénéficient du soutien actif des armées. Le fait que ces gendarmes bénéficient de véhicules de l'avant blindé (VAB) mis à la disposition gratuitement par l'armée de terre et dont le blindage est renforcé dans des ateliers de la police nationale est symptomatique à cet égard.

Comme votre rapporteur pour avis a eu l'occasion de le constater, lors d'un déplacement en Afghanistan avec le ministre de l'intérieur, le travail des gendarmes français est unanimement apprécié tant par les autorités afghanes que par les responsables militaires américains 8 ( * ) .

EFFECTIFS DE LA GENDARMERIE EN OPEX EN 2010

(DONNÉES ARRÊTÉES AU 30 JUIN 2010)

Opérations sous mandat de l'ONU

OPERATION

Officiers

Sous-officiers

TOTAL

FINUL (Liban)

1

4

5

MINUSTAH (Haïti)

13

157

173

MONUSCO (RDC)

9

0

9

ONUCI (RCI)

8

3

11

MINURCAT (Tchad)

2

10

12

TOTAL

33

174

210

Opérations sous engagement international hors ONU

OPERATION

Officiers

Sous-officiers

TOTAL

OTAN KFOR (Kosovo)

2

10

12

OTAN FIAS (Afghanistan)

31

142

173

U.E. EUFOR / Althéa (Bosnie)

2

2

4

U.E. EUPM (Bosnie)

0

3

3

U.E. EUPOL (RDC)

0

1

1

U.E. EULEX (Kosovo)

24

115

139

U.E. EUBAM (Territoires Palestiniens)

1

1

2

U.E. EUMM (Georgie)

2

31

33

U.E. EURSS (Guinée Bissau)

1

0

1

U.E. EUPOL (Afghanistan)

4

0

4

TOTAL

67

305

372

Opérations sous commandement national

OPERATION

Officiers

Sous-officiers

TOTAL

Epervier (Tchad)

1

5

6

Licorne (RCI)

7

85

92

Boali (République Centrafricaine)

1

2

3

Héraclès / Porte Sud (Irak)

1

34

35

TOTAL

10

126

136

PRÉSENCE ET RÔLE DE LA GENDARMERIE EN AFGHANISTAN

Au sein de la mission de police EUPOL de l'Union européenne :

La mission police de l'Union européenne EUPOL a été mise en place par l'action commune du 30 mai 2007. Débutant au 15 juin 2007 et d'un mandat initial de 3 ans, EUPOL AFGHANISTAN a pour mission de conseiller les forces de police locales et d'accompagner leurs réformes.

Comptant 246 personnels internationaux, la gendarmerie nationale participe depuis le début à cette mission et y déploie 3 officiers et 3 sous-officiers dont :

- 1 officier de liaison entre la force OTAN et EUPOL ;

- 1 officier conseiller auprès du ministère de l'intérieur afghan ;

- 1 officier conseiller en matière de formation des forces de police afghane ;

- 3 sous-officiers conseillers en matière de police judiciaire.

Au sein de la mission FIAS de l'OTAN :

En accompagnement de forces françaises présentes sur cette mission, la gendarmerie déploie 1 officiers et 9 sous-officiers dont :

- 1 officier supérieur commandant de prévôté et conseiller gendarmerie du REPFRANCE ;

- 2 sous-officiers qui arment la brigade prévôtale de Kaboul ;

- 2 sous-officiers qui arment la brigade prévôtale de Nijrab ;

- 2 sous-officiers qui arment la brigade prévôtale de Surobi ;

- 2 sous-officiers techniciens d'identification criminelle au sein d'une « Weapon Intelligence Team » (WIT), qui a pour mission d'enquêter sur les engins explosifs improvisés explosés ;

- 1 sous-officier inséré au  « Theater Exploitation Laboratory » qui a pour mission d'exploiter les éléments recueillis par la WIT et d'alimenter une base de données de théâtre ;

Mission de formation de la police afghane :

Sous mandat OTAN, la gendarmerie nationale participe à la formation de la police afghane en déployant 167 gendarmes, dont 127 dans le cadre de la Force de gendarmerie européenne

La mission comprend deux volets : un volet formation des officiers et des sous-officiers de l' « Afghan National Civil Order Police » (ANCOP), au sein d'une école de formation des cadres à Mazar-e-Sharif et un volet « tutorat et accompagnement » de l'« Afghan Uniform Police » (AUP) dans son travail quotidien, au coeur des districts situés dans la zone du théâtre sous commandement français.

Le coût des OPEX est intégré dans le budget de la gendarmerie depuis 2004. A ce titre, la gendarmerie nationale bénéficie depuis 2007 d'un financement de 15 millions d'euros par an , dont 11 millions d'euros pour les dépenses de personnel et 4 millions pour les dépenses de fonctionnement.

Or, ce montant est structurellement insuffisant. Chaque année, le surcoût constaté des OPEX pour la gendarmerie est de l'ordre de 10 à 15 millions d'euros , comme l'illustre le tableau suivant :

Coût des OPEX entre 2003 et 2010

Masse salariale

(titre 2)

Fonctionnement courant et transport

(titre 3 FC)

Alimentation

(titre 3 FC)

Investissement

(titre 3 HFC et 5)

Total

2003

18,9

3,8

1,4

0,9

25

2004

23

3,6

1,5

0,5

28,4

2005

20

3,4

1,3

0,3

25,2

2006

19,7

2,9

1,5

0,1

24,2

2007

17,9

2,2

1,3

0,1

21,4

2008

16,2

2,2

1,2

0

19,6

2009

18,8

2,9

1

10,3 9 ( * )

22,8

Source : direction générale de la gendarmerie nationale

En 2010, les dépenses de personnel relatives aux OPEX devraient être de 26 millions d'euros, pour une dotation de 11 millions d'euros, et les dépenses de fonctionnement hors dépenses de personnel de 17 millions d'euros, pour une dotation de 4 millions d'euros. Au total, le surcoût devrait donc être de l'ordre de 27,9 millions d'euros en 2010 . A elle seule, l'opération en Afghanistan représente un budget de 20 millions d'euros.

Or, faute de financements suffisants, ces surcoûts sont pris en charge sur le budget de fonctionnement de la gendarmerie, par des redéploiements de crédits.

Il paraît donc indispensable, dans un souci de sincérité budgétaire, mais aussi d'efficacité de la dépense publique, de mieux évaluer le coût prévisible de ces OPEX et, en cas de dépassement, de les financer entièrement par la réserve interministérielle, à l'image des armées.


* 8 Voir le compte rendu de ce déplacement devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat le 19 mai 2010

* 9 Pour la seule mission en Afghanistan

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