II. DES MESURES D'ÉQUITÉ IMPORTANTES MALGRÉ UN CADRE BUDGÉTAIRE CONTRAINT

Comme l'ensemble des missions du budget de l'Etat, les crédits dédiés au monde combattant s'inscrivent dans l'ambitieuse trajectoire de redressement des finances publiques définie par la nouvelle programmation pluriannuelle 2011-2013.

Après la première programmation triennale 2009-2011 qui faisait apparaître une baisse de près de 10 % en valeur des crédits sur la période, l'enveloppe budgétaire de la mission s'inscrit dans une évolution comparable, en baisse de 9,3 % , sur les années 2011 à 2013.

Programmation pluriannuelle des crédits de la mission de 2011 à 2013
(à périmètre constant 2010)

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

Autorisations d'engagement

3,31

3,21

3,11

Crédits de paiement

3,32

3,21

3,11

Évolution

- 3,26 %

- 3,3 %

- 3,1 %

Source : projet annuel de performance et projet de loi de programmation
des finances publiques pour les années 2011 à 2013

La réduction globale des crédits, loin de marquer le désengagement de l'Etat à l'égard du montant combattant, résulte pour l'essentiel de la déflation démographique naturelle : elle se traduit pour 2011, on l'a vu, par une baisse de près de 85 millions de l'enveloppe consacrée à la dette viagère du fait de la décroissance progressive des ayants droit.

S'y ajoute un effort particulier de réduction des dépenses de fonctionnement au travers de deux réformes structurantes, décidées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et dont l'une concerne directement les anciens combattants :

- la réorganisation de la direction du service national (DSN), recentrée sur la mission « Journée défense et citoyenneté » 20 ( * ) ;

- l'achèvement, d'ici à la fin de l'année, de la modernisation de l'administration au service des anciens combattants et la consécration du rôle-pivot de l'Onac.

Seule évolution contraire pour 2011, la progression conjoncturelle des crédits , par ailleurs relativement peu prévisibles, consacrés aux différents dispositifs d'indemnisation retracés au sein du programme 158, sans toutefois remettre en cause la trajectoire générale de maîtrise des dépenses.

En l'état, votre commission considère qu'il s'agit là d'un budget responsable qui préserve l'essentiel en témoignant de la constance des politiques de reconnaissance et de réparation à destination du monde combattant.

Bien plus, et malgré ce cadre budgétaire contraint, certaines mesures d'équité seront mises en oeuvre en 2011 : décristallisation intégrale des pensions civiles et militaires de retraite, poursuite des campagnes d'indemnisation en faveur des orphelins et des victimes de spoliation de la Seconde Guerre mondiale, ouverture de l'indemnisation des victimes des essais nucléaires ou adaptation de la carte du combattant aux soldats combattant en opérations extérieures ; à l'inverse, la satisfaction de certaines revendications, plus ou moins légitimes, est repoussée - attribution de la carte au-delà du 2 juillet 1962 - ou jugée, par certains, trop restrictive - bénéfice de la campagne double pour la « troisième génération du feu ».

A. DÉCRISTALLISATION DES PENSIONS : UNE AVANCÉE HISTORIQUE

1. Une décristallisation progressive...

D'abord appliqué aux ressortissants du Vietnam, du Cambodge et du Laos 21 ( * ) , le principe d'une « cristallisation » des pensions servies aux anciens combattants a par la suite été étendu aux ressortissants des anciennes colonies de l'Empire français à mesure de leur accession à l'indépendance : étant exclues des mesures de revalorisation « de droit commun » prévues à l'article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ces prestations ont dès lors été calculées sur la base d'une valeur du point et de l'indice inférieure à celle applicable aux fonctionnaires de nationalité française.

Si certains mécanismes de revalorisation réglementaire ainsi qu'un régime dérogatoire pour les anciens combattants algériens 22 ( * ) avaient partiellement assoupli la règle, il a fallu attendre 2002 puis 2007 pour qu'un véritable processus de « décristallisation » s'amorce :

- une « décristallisation relative » d'abord des « prestations du feu » - pensions militaires d'invalidité et leur réversion et retraite du combattant - sur la base d'une parité de pouvoir d'achat, en fonction du pays de résidence, entre ces prestations et celles versées aux ressortissants français 23 ( * ) ; cette première étape tirait les conséquences de l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat en novembre 2001, sur la requête d'un ancien combattant sénégalais 24 ( * ) , selon lequel la différence de traitement opérée entre titulaires de droits équivalents à raison de leur seule nationalité était incompatible avec l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme et son premier protocole. Le coût de cette revalorisation aura été de 88,4 millions d'euros au titre des arrérages (1999-2003) et de 18,2 millions de surcoût en 2004 ;

- une « décristallisation totale » ensuite, sur la base d'une parité en euros entre les prestations servies en France et hors de France, mais circonscrite là encore aux seules « prestations du feu » , à l'exclusion donc des pensions civiles et militaires de retraite 25 ( * ) , cette nouvelle étape faisant suite à l'émotion suscitée par le film Indigènes de Rachid Bouchareb (2006). La mesure, qui a pris effet au 1 er janvier 2007, concernait, au 31 décembre 2008, 58 305 bénéficiaires de la retraite du combattant et 19 169 invalides pensionnés et leurs veuves, pour un coût d'environ 104,2 millions d'euros (76,1 millions au titre des pensions militaires d'invalidité et 28 millions au titre de la retraite du combattant), dont 87 millions directement imputables à cette décristallisation.

Depuis lors, les mesures de décristallisation ont fait l'objet d'une reconduction automatique d'un budget sur l'autre : elles bénéficiaient, en 2009, à un peu plus de 68 000 pensionnés, pour un coût total de l'ordre de 79 millions d'euros 26 ( * ) .


* 20 Qui se substitue, au 1 er janvier 2011, à la « Journée d'appel de préparation à la défense ».

* 21 Par l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959.

* 22 Prévu par l'article 26 de la loi n° 81-734 du 3 août 1981 de finances rectificative pour 1981.

* 23 Par l'article 68 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative.

* 24 CE Ass., 30 novembre 2001, Diop.

* 25 Par l'article 100 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 26 Il s'agit d'une approximation, les données relatives aux ressortissants de certains pays n'étant pas encore disponibles.

Page mise à jour le

Partager cette page