Article 24 (art. L. 311-7, L. 311-8 et L. 311-11 du code de justice militaire) - Suppression du caractère automatique de la perte de grade pour le militaire faisant l'objet d'une condamnation pénale et suppression de la substitution de la peine d'emprisonnement à une peine d'amende

Cet article a deux objets.

D'une part, cet article modifie la rédaction de l'article L. 311-7 du code de justice militaire afin d' aligner la situation des militaires sur celle des autres agents de la fonction publique en ce qui concerne les conséquences des condamnations pénales sur leur situation administrative .

Actuellement, en application des articles L. 311-7 à L. 311-9 du code de justice militaire, la condamnation d'un militaire pour crime et pour certains délits à des peines d'emprisonnement avec ou sans sursis égales ou supérieures à trois mois entraîne de plein droit la perte du grade et donc la radiation des cadres de l'armée.

Le caractère automatique de cette sanction apparaît discutable au regard de l'article 4 du protocole additionnel, sinon à l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le militaire peut en effet être frappé d'une perte de grade sans avoir pu faire valoir des observations sur cette mesure et en violation de la règle non bis in idem.

Cette automaticité semble également contraire au principe de nécessité des peines énoncé à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 que le Conseil constitutionnel a déclaré applicable aux sanctions infligées par des autorités administratives.

Cet article supprime donc le caractère automatique de cette sanction. Ainsi, seule une condamnation à une peine d'interdiction des droits civiques ou une interdiction d'exercer un emploi public entraînera la perte du grade. En effet, le juge aura toujours la possibilité de prononcer la déchéance des droits civiques, civils et de famille lorsqu'il estimera que la condamnation pénale est incompatible avec la fonction militaire. Il pourra également prononcer une peine d'interdiction d'exercer une fonction publique. En outre, l'autorité militaire conservera la possibilité d'engager une procédure disciplinaire.

Par ailleurs, reprenant la disposition figurant à l'article L. 311-8, la nouvelle rédaction de l'article L. 311-7 issue de cet article précise que, lorsque ces militaires sont commissionnés, toute condamnation entraînera la révocation. En conséquence, l'article L. 311-8 serait abrogé.

L'article L. 4132-10 du code de la défense précise ce qu'il faut entendre par l'expression « militaires commissionnés ».

D'après cet article « le militaire commissionné est admis par contrat à servir dans une armée ou une formation rattachée dans un grade d'officier ou de sous-officier en vue d'exercer des fonctions déterminées à caractère scientifique, technique ou pédagogique correspondant aux diplômes qu'il détient ou à son expérience professionnelle » .

Il s'agit donc de personnes disposant de compétences particulières, à caractère scientifique, technique ou pédagogique, qui sont recrutés par contrat pour servir dans une armée et qui se voient accorder un grade militaire dans le cadre de la fonction exercée. Il peut s'agir, par exemple, du chef d'orchestre de la garde républicaine de la gendarmerie nationale.

A la différence des autres militaires, ces personnes ne sont pas propriétaires de leur grade. Toute condamnation pénale entraînera donc, comme aujourd'hui, leur révocation.

D'autre part, cet article prévoit d'abroger l'article L. 311-11 du code de justice militaire afin de supprimer la possibilité pour la juridiction de substituer une peine d'emprisonnement à une peine d'amende pour les militaires.

En application de l'article L. 311-11 du code de justice militaire, lorsqu'une peine d'amende est prononcée pour une infraction de droit commun contre des militaires ou assimilés n'ayant pas le rang d'officier, le tribunal peut décider, par une disposition spéciale, de substituer à cette peine un emprisonnement de six jours à six mois pour un délit et de deux à quinze jours pour une contravention, le condamné conservant la faculté de payer l'amende au lieu de subir l'emprisonnement.

Cette disposition n'est pas prévue par le code pénal. En effet, le code pénal ne prévoit plus de peine d'emprisonnement en matière contraventionnelle et en matière délictuelle il prévoit un mécanisme de substitution à l'emprisonnement (jours-amende, sanction réparation, travail d'intérêt général).

L'article 144 de la proposition de loi relative à la simplification et à l'amélioration de la qualité de la loi prévoit d'ailleurs de modifier la rédaction du premier alinéa de l'article L. 311-1, de la manière suivante : « Lorsque la peine d'amende est prononcée pour une infraction de droit commun contre des militaires ou assimilés n'ayant pas rang d'officier, le tribunal peut décider, par une disposition spéciale, de substituer à cette peine un emprisonnement de six mois au plus pour un délit, le condamné conservant la faculté de payer l'amende au lieu de subir l'emprisonnement. » .

Cet article va plus loin en prévoyant de supprimer la substitution prévue à l'article L. 311-1 qui paraît désuète et qui, d'après le ministère de la justice, semble d'ailleurs n'avoir jamais été mise en oeuvre par une juridiction.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 24 sous réserve d'une légère modification rédactionnelle.

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