C. LA DÉCENTRALISATION DES ENSEIGNEMENTS ARTISTIQUES EN ATTENTE D'UNE NOUVELLE IMPULSION

L'action 3 du programme 224 , relatif au soutien aux établissements d'enseignement spécialisé, regroupe les crédits destinés, via des transferts aux collectivités territoriales, aux 40 conservatoires à rayonnement régional (CRR) aux 102 conservatoires à rayonnement départemental (CRD) et aux 290 conservatoires à rayonnement intercommunal ou communal. Ces établissements représentaient 315 000 élèves en 2009/2010 . Les subventions sont reconduites à hauteur de plus de 29 millions d'euros .

Votre rapporteur souhaite ici faire mention des récents travaux menés par notre collègue Catherine Morin-Desailly, présentés en commission le 18 octobre dernier . Sans revenir sur la loi de 2004 qui a été détaillée dans les précédents avis budgétaires, il souhaite souligner les principaux dysfonctionnements mis en évidence dans le rapport 15 ( * ) de 2008, adopté par votre commission : les carences de l'État, qui a insuffisamment accompagné la réforme et a fait preuve d'un déficit de méthodologie à l'égard des élus, et les craintes financières exprimées par les régions compte tenu de la situation difficile des finances locales et d'une appréhension d'un différentiel de coût trop élevé de la mise en place des CEPI. Le transfert des crédits de l'État n'a donc toujours pas eu lieu.

La proposition de loi 16 ( * ) , déposée en juillet 2009, par Mme Morin-Desailly fixe les objectifs suivants :

- réaffirmer la mission prioritaire des établissements d'enseignement artistique : la formation des amateurs et le développement de leurs pratiques ;

- clarifier la vocation pré-professionnalisante du cycle d'enseignement professionnel initial (CEPI) ;

- créer une commission régionale des enseignements artistiques, nécessaire lieu de concertation et de dialogue entre les différents niveaux de collectivités territoriales ainsi qu'avec l'État ;

- compléter le rôle des régions, d'une part en leur reconnaissant un rôle de « chef de file » au sein de cette commission et, d'autre part, en leur confiant l'établissement d'un schéma régional des cycles d'enseignement professionnel dans les domaines de la musique, de la danse et de l'art dramatique ;

- compléter le rôle de l'État en prévoyant qu'il coordonne, au plan régional ou interrégional, l'organisation des examens du diplôme national.

Enfin, le texte prévoit un transfert des crédits aux régions.

Pour mesurer l'impact des expérimentations conduites dans certaines régions depuis trois ans et afin de juger de l'opportunité de demander l'inscription de la proposition de loi précitée, l'auteure de la proposition de loi a organisé un nouveau cycle d'auditions des différents acteurs concernés. Les constats sont les suivants :

- l'État a réactivé le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel et a mis en place, en son sein, un groupe de travail consacré au sujet ;

- les départements ont joué le jeu de la décentralisation, puisqu'ils ont mis en place les schémas départementaux des enseignements artistiques ;

- les communes et leurs groupements ont continué à assumer la lourde charge des conservatoires et écoles ;

- certaines régions ont mis en oeuvre la réforme : ainsi, Poitou-Charentes, le Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes se sont fortement impliquées, dans l'esprit de la loi. Elles ont organisé un réseau efficace d'établissements pour mettre en oeuvre le CEPI. Mais elles demeurent des exceptions ;

- la mise en place des CEPI n'entraîne pas de surcoût ou un surcoût faible , par rapport aux diplômes délivrés auparavant. Ainsi, dans la région Nord-Pas-de-Calais, le coût du CEPI musique classique est évalué à environ 7 780 euros par élève, soit un surcoût de 8 800 euros au total pour 170 élèves. En Poitou-Charentes, pour 163 élèves (dont 88 % étudiant la musique), le coût moyen d'un élève est estimé équivalent à celui des cursus antérieurs, soit 6 000 euros en moyenne (ce coût pouvant varier de 5 700 à 8 000 euros selon les établissements et les spécialités). En fait, lorsque de réels surcoûts sont observés, c'est lorsque de nouvelles missions sont développées.

Les expérimentations menées montrent les effets positifs de la réforme lorsqu'elle a eu lieu :

- elle évite les risques d'une inégalité de l'offre d'enseignements artistiques sur un territoire : les villes sont en effet tentées de pratiquer des discriminations tarifaires, dans la mesure où elles portent presque seules les établissements ;

- une instance régionale de dialogue, coordinatrice et organisatrice, est nécessaire ;

- les régions pilotes ont inscrit le CEPI dans le Plan régional de développement des formations ( PRDF ). Ceci est cohérent puisqu'il s'agit d'un cycle d'orientation et d'une préprofessionnalisation.

Votre rapporteur forme le voeu d'un déblocage prochain de ce dossier, compte tenu des effets bénéfiques attendus notamment en matière de démocratisation de l'offre culturelle.


* 15 Rapport d'information n° 458 juillet 2008 (2007-2008) de Mme Catherine Morin-Desailly « Décentralisation des enseignements artistiques : des préconisations pour orchestrer la sortie de crise ».

* 16 Proposition de loi n° 588 rectifié (2009-2010) relative à la décentralisation des enseignements artistiques.

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