N° 152

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi de finances pour 2013 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME IV

Fascicule 1

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES : AUDIOVISUEL ET PRESSE

Par M. David ASSOULINE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Marie-Christine Blandin , présidente ; MM. Jean-Étienne Antoinette, David Assouline, Mme Françoise Cartron, M. Ambroise Dupont, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jacques Legendre, Mmes Colette Mélot, Catherine Morin-Desailly, M. Jean-Pierre Plancade , vice-présidents ; Mme Maryvonne Blondin, M. Louis Duvernois, Mme Claudine Lepage, M. Pierre Martin, Mme Sophie Primas , secrétaires ; MM. Serge Andreoni, Maurice Antiste, Dominique Bailly, Pierre Bordier, Mme Corinne Bouchoux, MM. Jean Boyer, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Jacques Chiron, Claude Domeizel, Mme Marie-Annick Duchêne, MM. Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Vincent Eblé, Mmes Jacqueline Farreyrol, Françoise Férat, MM. Gaston Flosse, Bernard Fournier, André Gattolin, Jean-Claude Gaudin, Mmes Dominique Gillot, Sylvie Goy-Chavent, MM. François Grosdidier, Jean-François Humbert, Mmes Bariza Khiari, Françoise Laborde, M. Pierre Laurent, Mme Françoise Laurent-Perrigot, MM. Jean-Pierre Leleux, Michel Le Scouarnec, Jean-Jacques Lozach, Philippe Madrelle, Jacques-Bernard Magner, Mme Danielle Michel, MM. Philippe Nachbar, Daniel Percheron, Marcel Rainaud, Michel Savin, Abdourahamane Soilihi, Alex Türk, Hilarion Vendegou, Maurice Vincent.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 235 , 251 à 258 et T.A. 38

Sénat : 147 et 148 (annexe n° 18 ) (2012-2013)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Dès 2009, votre rapporteur pour avis avait annoncé :

- que la suppression de la publicité sur France Télévisions était irresponsable du point de vue financier et que son budget en serait affecté au premier coup de grisou économique. Le budget 2012 de la mission « Médias » avait été un élément de preuve, même si le précédent Gouvernement avait préféré le creusement du déficit plutôt que d'assumer ses choix. Le budget 2013, qui est un budget de responsabilité, confirme malheureusement ce sentiment ;

- que cette réforme n'aurait aucun impact sur la qualité des programmes . A cet égard, le rapport 1 ( * ) qu'il a produit avec M. Jacques Legendre démontre l'absence d'effet positif de la réforme ;

- que la mise en place trop rapide de l'entreprise unique aurait des effets néfastes sur le groupe . De facto , les fameuses « synergies » n'ont eu d'existence que dans les rapports commandés par le Gouvernement, sans que la Cour des comptes n'ait pu faire état d'un seul effet positif. Ce n'est probablement pas en 2013 que l'on pourra constater les premiers, même si l'actuel Gouvernement est déterminé à tirer bénéfice d'une fusion qu'il n'a pas préconisée ;

- et que la création de taxes afin de financer la réforme était juridiquement hasardeuse , l'outil de financement de France Télévisions étant la redevance (devenue contribution à l'audiovisuel public). Le présent budget qui s'adosse à une contribution revalorisée confirme cette idée.

Votre rapporteur pour avis ne tire aucune satisfaction d'avoir été clairvoyant sur ces points car il ne peut que déplorer que les effets négatifs de la réforme n'aient pas été mieux anticipés.

Le Gouvernement a dû en tenir compte mais s'est saisi du problème en adoptant une attitude responsable.

Le choix du Gouvernement est simple , c'est celui de la réduction du déficit avec, en parallèle à une augmentation de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) une baisse de 42 % de la dotation budgétaire à l'audiovisuel public, qui passe de 603 millions d'euros en 2012 à 434,7 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances (PLF).

Conscient du rôle et de l'importance de notre audiovisuel dans la politique culturelle française, il a en revanche mis l'accent sur sa ressource naturelle qu'est la contribution à l'audiovisuel public . Avec son indexation et la majoration de 2 euros de son montant, prévue à l'article 39, son produit serait de 3 397,7 millions d'euros en 2013, contre 3 290,4 millions d'euros en 2012.

Au total, ce sont donc 3 832,5 millions d'euros qui devraient être consacrés à l'audiovisuel public en 2013 , contre 3 909,7 millions d'euros en 2012, soit une baisse de seulement 2 %, à hauteur de 77,2 millions d'euros.

La question qui se pose donc est celle de savoir si cette diminution de crédits peut être prise en charge sans heurts, ni baisse de la qualité de la programmation de notre service public.

Le Gouvernement a fait participer tout le monde à l'effort de redressement des finances publiques en faisant attention à ne pas déstabiliser les entités de l'audiovisuel public dont des baisses de crédits sensibles pourraient fragiliser les missions ou l'existence. Ainsi :

- ARTE-France, dans une période de relance éditoriale, voit ses crédits stagner en euros courants ;

- le groupe Radio France, en dépit des charges d'investissement qu'il supporte, devra lui aussi composer avec une dotation reconduite au même niveau ;

- l'Institut national de l'audiovisuel (INA), qui connaît une baisse des ressources propres, devrait pouvoir continuer à exercer ses missions avec une dotation stable ;

- le fonds d'expression radiophonique locale, qui assure une mission fondamentale pour la diversité de notre paysage radiophonique, voit ses montants stagner une année de plus ;

- enfin l'audiovisuel extérieur de la France bénéficie d'une très légère hausse des crédits, dans un contexte où l'entreprise a été profondément bouleversée, et où l'exercice 2013 relèvera de toute façon de l'équilibrisme budgétaire.

Mais c'est bien France Télévisions, le plus gros contributeur au redressement des finances publiques, qui paie le prix de la réforme de 2009 . Le groupe subit ainsi une baisse de 3,2 % des crédits par rapport à 2012, soit 80 millions d'euros.

Avec une baisse de recettes publicitaires évaluée à 67 millions d'euros, l'effort à produire pour 2013 serait ainsi une diminution de 5 % des dépenses.

Votre rapporteur pour avis estime que France Télévisions est probablement le groupe de l'audiovisuel public le plus capable de diminuer ses dépenses, notamment en raison de son volume d'activités et de financement. Il n'en reste pas moins qu'une telle baisse entraînera à n'en pas douter un très fort déséquilibre du budget 2013 et une démotivation subséquente des personnels.

L'ambition de votre rapporteur pour avis est donc de lisser l'effort budgétaire de France Télévisions sur plusieurs années via un coup de pouce sur la redevance (+ 2 euros sur le territoire métropolitain, + 1 euro en outre-mer), qui permettrait d'augmenter la dotation de 50 millions d'euros et de réduire l'effort à accomplir de 80 à 30 millions d'euros d'économies .

C'est la raison pour laquelle il a proposé un amendement de cette nature à la commission, qui l'a adopté très largement.

Il reste que, dans l'année qui vient et avant le prochain débat budgétaire, des discussions et des décisions pour un financement stable et pérenne de l'audiovisuel public devront inévitablement être engagées.

En ce qui concerne les crédits consacrés à la presse , le soutien public en faveur du secteur se maintient à un niveau relativement stable avoisinant le milliard d'euros si l'on tient compte des aides fiscales indirectes. Les aides publiques directes hors abonnements à l'AFP, d'un montant de 396 millions d'euros, diminuent par rapport à leur niveau de 2012 en raison d'ajustements budgétaires nécessaires dans un contexte contraint et de l'extinction d'un certain nombre de dispositifs. Pour autant, les aides au pluralisme, bénéficiant aux journaux d'opinion à faibles ressources publicitaires, sont rigoureusement préservées.

Votre rapporteur pour avis invite les représentants de l'État et de l'ensemble des familles de presse à se concerter sur une réforme des aides à la presse, en étudiant les modalités d'un ciblage en faveur de la presse d'information politique et générale. Qu'il s'agisse de l'aide au transport postal ou du taux de TVA super-réduit de 2,1 %, ces avantages bénéficient de façon disproportionnée à un nombre important de publications consacrées au divertissement et aux loisirs. N'ayons pas peur de remettre le système tout entier à plat et de conditionner le soutien public à la réalisation de missions d'intérêt général.

Poursuivons inlassablement notre intervention auprès des institutions européennes pour réclamer une fiscalité neutre quelque soit le support de diffusion : les rédactions bi- ou multimédias se généralisent, plusieurs titres célèbres ont basculé vers le tout numérique. Dans ces conditions, l'application d'un taux de TVA de 19,6 % aux services de presse en ligne est devenue un non-sens économique et philosophique . Cette question, primordiale pour l'essor de la presse en ligne et la conversion de nombreux titres au numérique, doit faire l'objet de négociations appuyées auprès de la Commission européenne et de nos partenaires européens, mettant en avant l'intérêt général qu'il y aurait à achever la neutralité fiscale pour l'ensemble des biens et services culturels en Europe.

Il nous faudra également poser la question de l'opportunité, au regard de l'indépendance des médias, de verser des liquidités aussi importantes à la presse. Il convient de garder à l'esprit que la fiscalité modulée en fonction des contenus, d'application neutre, peut constituer un mode d'intervention peut-être plus compatible avec le respect de l'indépendance de la presse, car elle ne contraint pas l'État à opérer une sélection subjective, en préférant certains titres à d'autres au sein d'une même famille.

Enfin, ce qui concerne la distribution de la presse , la réforme adoptée à l'initiative du Sénat l'été dernier porte ses fruits : le Conseil supérieur des messageries de presse et l'Autorité de régulation de la distribution de la presse ont travaillé main dans la main pour répondre au plus urgent. Des décisions fondamentales ont été prises pour préserver les équilibres coopératifs du système, notamment le délai de préavis de retrait d'un titre d'une coopérative ou la péréquation inter coopératives.


* 1 Rapport n° 572 (2011-2012) sur le bilan de l'application de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009, relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, par MM. David Assouline et Jacques Legendre, sénateurs, au nom de la commission pour le contrôle de l'application des lois.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page