ANNEXE II - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

Jeudi 22 novembre 2012

- Ministère de l'économie et des finances : MM. Jean-Jacques Barberis , conseiller chargé du financement des entreprises et Sébastien Raspiller , chef de bureau à la direction générale du trésor.

Mercredi 28 novembre 2012

- OSÉO : MM. François Drouin , président-directeur général et Erik Thomas , chargé des relations institutionnelles ;

- M. Nicolas Dufourcq , chargé d'une mission de préfiguration de la BPI ;

- CGPME : MM. Bernard Cohen Hadad , président de la commission « Financement » et Pascal Labet , directeur des affaires économiques et fiscales et Mme Sandrine Bourgogne , adjointe au secrétaire général ;

- Fédération Bancaire Française (FBF) : Mmes Ariane Obolanski , directrice générale et Séverine de Compreignac , responsable des relations avec le Parlement et M. Olivier Balmont , responsable du financement des entreprises ;

- Fonds Stratégique d'Investissement ( FSI) : M. Jean-Yves Gilet , directeur général.

ANNEXE III - COMPTE-RENDU DES AUDITIONS DEVANT LA COMMISSION

A. AUDITION DE M. JEAN-PIERRE JOUYET, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS (28 NOVEMBRE 2012)

Lors de sa séance du mercredi 28 novembre, la commission des Affaires économiques et la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire ont entendu M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.

M. Daniel Raoul , président de la commission des affaires économiques . - Nous vous entendons ce matin, M. le directeur général, sur la création de la Banque publique d'investissement (BPI), élément important du programme du gouvernement en faveur de la compétitivité des entreprises. Vous nous indiquerez quel sera le rôle des collectivités territoriales dans la holding et dans ses deux filiales, BPI Financement-Innovation et BPI Investissement. Y aura-t-il fusion des opérateurs, notamment du Fonds stratégique d'investissement (FSI) et de CDC entreprises ? Quelles en sont les conséquences humaines ? La Caisse des dépôts et consignations est déjà impliquée dans les investissements via le FSI et CDC Entreprises, et dans le financement, comme actionnaire d'Oséo. Il est essentiel que la création de la BPI ne constitue pas un simple habillage mais apporte une véritable valeur ajoutée. L'organigramme du futur établissement traduira-t-il le regroupement des structures ? Avec quelles conséquences ?

M. Raymond Vall , président de la commission du développement durable . - La création de la BPI est inscrite sur la feuille de route de la transition écologique. Elle jouera un rôle en matière d'aménagement du territoire. Nous attendons vos précisions sur ce qu'elle va être, nous souhaitons savoir comment elle pourra répondre aux attentes des acteurs économiques et du pays.

M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la CDC . - La France doit redynamiser son tissu industriel. La création de la BPI porte cette ambition. L'aide au développement des entreprises, qui est au coeur des missions de la CDC, sera amplifiée. La CDC investit dans les PME depuis les années quatre-vingt dix et a accru ses interventions avec la crise de 2008. Le plan stratégique « Elan 2020 », le FSI créé en 2008, le programme France FSI investissement lancé en 2012, sont ses principaux instruments. La moitié des investissements dans les PME sont dus à la CDC. Elle est un actionnaire historique d'Oséo, à hauteur de 27 %. Elle constitue donc un partenaire naturel pour l'État et investira la moitié de ses fonds propres dans la BPI, dans le respect de ses intérêts patrimoniaux et la protection de l'épargne des Français. Le Parlement exercera un contrôle par le biais de la commission de surveillance de la CDC. Une mission de préfiguration a été confiée à Nicolas Dufourcq.

La BPI sera un nouvel outil pour accompagner les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI), par le biais de financements, d'investissements en fonds propres et de conseil aux entreprises. Un guichet unique sera ouvert dans les régions, lesquelles seront associées à la définition des orientations, dans les conseils régionaux d'orientation, et dans les plateformes communes en cas de financements communs. La BPI sera aussi la banque de la transition énergétique, elle a vocation à accompagner la conversion écologique du système productif en amplifiant les prêts verts bonifiés d'Oséo et les investissements du FSI et de CDC Entreprises dans les éco-industries. Des regroupements seront réalisés par thèmes entre les entités existantes, fusionnées dans la BPI pour plus d'efficacité. Oséo, FSI, CDC entreprises s'organiseront demain autour de trois pôles - financement, investissement, conseil. S'y ajouteront des entités compétentes dans le champ de l'économie sociale et solidaire, ou du soutien aux exportations.

En ce qui concerne ses moyens d'intervention, la BPI sera dotée des actifs du FSI, soit 15 milliards d'euros, et d'Oséo, 25 milliards, auxquels s'ajoutent les 3,6 milliards de capital non libéré du FSI. Elle pourra recourir à l'endettement sur les marchés ou auprès des fonds d'épargne, jusqu'à 10 milliards d'euros grâce au relèvement du plafond du livret A et du livret de développement durable.

Elle sera détenue à parts égales par l'État et la CDC qui seront représentées à parité au conseil d'administration. C'est un point auquel la CDC est très attachée. Le président sera nommé sur proposition de la CDC, le directeur général par décret - une proposition de loi organique vise à soumettre la nomination de ce dernier aux deux commissions des finances, cela me paraît positif.

La gouvernance des filiales est encore en cours de discussion. La CDC souhaite avoir la prééminence sur la filiale BPI-Investissement qui réalisera les interventions en capital, mission dévolue à la Caisse par la loi et coeur de son expertise. Cette entité est aussi celle qui recevra l'essentiel des apports de la CDC en fonds propres. La BPI devra se comporter en investisseur avisé, sous le regard des autorités de la concurrence, notamment européennes. Les régions auront une place centrale : elles seront représentées au conseil d'administration de la BPI-Groupe et présideront le comité national d'orientation ainsi que les comités régionaux d'orientation, éventuellement les comités d'engagement ou les plateformes créées en cas de co-investissements.

Nous serons très vigilants sur les conséquences sociales du regroupement, les transferts d'activité entraînant des transferts de personnel.

L'équilibre entre la CDC et l'État dans la gouvernance de la BPI sera finalisé par un pacte d'actionnaires. Nous souhaitons que certaines décisions du conseil d'administration soient approuvées par les deux partenaires : budget, nomination des dirigeants, investissements majeurs, choix du modèle prudentiel, allocation des ressources entre financement et investissement. L'articulation entre la CDC et la BPI reste à préciser, notamment le degré d'implication de la commission de surveillance de la CDC, émanation du Parlement. Nous serons particulièrement attentifs à la parité actionnariale, qui se reflète dans la composition du conseil d'administration, État et Caisse nommant chacun quatre administrateurs. Ces questions sont traitées à l'article 3 du projet de loi.

Le modèle prudentiel applicable sera bien sûr celui de Bâle III. Nous souhaitons que s'appliquent pour la BPI les contraintes prudentielles actuellement observées par la CDC, spécifiques à l'investissement en capital. Du reste, nous n'avons pas le choix.

La structure de la BPI telle que dessinée dans le projet de loi nous apparaît à même d'atteindre l'objectif d'efficacité tout en évitant les conflits d'intérêts entre investissement et financement.

La BPI a vocation à investir par le biais de co-opérations. Il faudra préciser les modalités de son intervention dans des missions d'intérêt général en complément de l'État. Un rendement minimum des capitaux sera indispensable, afin de préserver les intérêts patrimoniaux de l'État.

Un problème reste à trancher. Il concerne non la structure de la BPI mais la holding, à propos de laquelle les modifications fleurissent actuellement. Le directeur général de la CDC est pressenti pour diriger la BPI. Mais je ne voudrais pas me trouver au centre de conflits d'intérêt.

Nous comprenons que la holding doit être considérée comme un établissement de crédit, c'est une très bonne chose. Nous comprenons aussi que l'on souhaite aller vite. Mais il appartient à l'État et la représentation nationale, non aux dirigeants de la Caisse, de choisir la forme de cette holding, en pesant les conséquences de ce choix. C'est aux politiques de dire si le capital de la banque publique doit être ouvert à des banques privées. J'ajoute que, quel que soit le choix, il faudra maintenir un équilibre absolu entre l'État et la CDC dans le tour de table.

M. Antoine Gosset-Grainville, directeur général adjoint de la CDC . - Les discussions se poursuivent avec l'État pour définir le statut de la holding de tête. Doit-elle être une compagnie financière, comme cela était envisagé, ou un établissement de crédit de plein exercice ? Dans le second cas, s'agirait-il d'Oséo ou d'un nouvel établissement avec deux filiales, Oséo et la branche investissement ? Techniquement toutes les solutions sont possibles, mais l'autorité de contrôle prudentiel, qui ne se prononce pas, semble avoir une certaine sympathie pour la solution de l'établissement de crédit. Quant à nous, nous veillerons à ce que l'on ne remette pas en cause, pour régler un point technique, l'équilibre entre l'État et la CDC, ni la détention par la Caisse de 50 % du capital de la BPI.

M. Daniel Raoul , président de la commission des affaires économiques . - Le projet actuel prévoit la création d'une holding détenant deux filiales : BPI financement-innovation et BPI investissements. Mais certains aspects sont politiques, comme la participation des banques privées dans la partie incluant Oséo, à hauteur de 10 %, qui figure dans le schéma initial mais qui reste à trancher.

M. André Vairetto, rapporteur pour avis de la commission du développement durable . - Quelle sera la stratégie globale de la BPI en faveur de la transition énergétique ? En particulier, comment coordonner les différentes initiatives qui fleurissent sur le territoire ? Quel sera le rôle des comités régionaux d'orientation et leur articulation avec le comité national ? Comment ferez-vous pour accompagner les entreprises durant chaque phase de leur développement ?

M. Martial Bourquin , rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques . - Les attentes sont fortes. Mais il existe déjà de nombreux outils de financement. Quelle sera la valeur ajoutée de la BPI ? Pendant la crise, nous avons réuni des cellules dans les préfectures de région, avec la participation notamment d'Oséo, pour décider des aides à apporter aux entreprises. Réactivité, simplicité, proximité... Quels sont les besoins non satisfaits que pourraient couvrir la BPI : peut-être le financement de la trésorerie, les crédits à l'exportation, l'articulation entre l'offre de financement et le développement des entreprises, le soutien aux fonds propres ?

Quelle sera la doctrine d'investissement de la BPI ? Assistera-t-on à une évolution ou à une redéfinition de la politique menée par Oséo ? Quels seront les critères en matière de risque et de rentabilité ?

La compétitivité est une question politique majeure. Quelle sera la place de la BPI dans la structuration des filières, l'aide aux entreprises, la mise en oeuvre du crédit compétitivité récemment annoncé ? Nous appelons de nos voeux une institution totalement nouvelle, qui favorise le développement économique du pays.

M. Jean-Pierre Jouyet . - La BPI rationalisera les dispositifs d'intervention en matière de transition énergétique qui existent : ceux du FSI, qui y consacre 1 milliard d'euros, d'Oséo, avec les prêts verts et en faveur des économies d'énergie, ou de CDC entreprises, avec les prêts destinés aux éco-technologies. CDC Climat et les fonds d'investissement d'avenir dans les PME mènent également des actions en capital et en prêts. Ils seront transférés à la BPI en coordination avec les structures régionales de la CDC.

Il conviendra de définir des seuils d'intervention pour les échelons régional et national ainsi qu'un système de reporting et d'instruction des dossiers, et de veiller à une corrélation étroite entre les deux niveaux. Un suivi simplifié et coordonné sera organisé. Ainsi les entreprises n'auront plus à s'adresser à des organismes multiples, mais auront des interlocuteurs identifiés selon le type de service : financement, intervention en fonds propres, conseil. Le niveau régional aura vocation aussi à capter des dossiers d'ampleur nationale. Ces actions existent déjà mais sans qu'on le sache : elles seront formalisées et unifiées.

Une autre valeur ajoutée de la BPI sera effectivement de prendre en compte des besoins non satisfaits : trésorerie, accompagnement à l'exportation, besoins en fonds propres des PME et PMI.

La doctrine d'investissement est centrée sur les PME et les PMI. Elle n'exclut pas l'intervention dans les filières de l'automobile, l'aéronautique, les énergies renouvelables, au service de la compétitivité. Mais limitons le nombre de filières éligibles. Pour investir dans le numérique, il faut au préalable que l'État définisse ses orientations et ses priorités.

Enfin l'objectif n'est pas de dégager une rentabilité élevée. Les taux de rendement resteront raisonnables. La BPI intervient en cas de carence des marchés.

M. Yannick Vaugrenard . - Les régions attendent non seulement un comportement offensif de la BPI, pour soutenir le développement des PME et l'innovation, mais aussi une intervention défensive. Dans ma région, en raison de la crise, des entreprises concurrentielles et performantes se sont retrouvées avec un carnet de commandes vide et sont devenues, temporairement, des « canards boiteux ». Nous les avons aidées grâce à des prêts à remboursement différé.

Les régions souhaitent être impliquées dans l'octroi des prêts et dans la publicité autour de ces dispositifs car souvent les entreprises en ignorent l'existence. Les guichets uniques comme les plateformes constituent une bonne initiative, mais ils devraient être placés sous la responsabilité des régions, ou être copilotés par les régions et la BPI. Vous avez parlé d'associer les régions : cela me paraît insuffisant, car elles ont fait leurs preuves dans le soutien aux entreprises. Pourriez-vous être plus précis sur cette organisation ?

M. Daniel Raoul , président de la commission des affaires économiques . - C'est une question clef.

M. Alain Chatillon . - Qui dirigera la SA-BPI groupe ? L'expérience prouve que les sociétés détenues à parité ne fonctionnent pas. Il faut un opérateur principal. Je souhaite que la CDC joue ce rôle, peut être avec une participation de 51 %. Il appartient à l'État d'administrer, de contrôler, non de se substituer aux opérateurs.

Autre point, la présence des banques privées : ayant connaissance des dossiers, elles se précipiteront sur l'aubaine et récupéreront des clients. J'en ai fait l'expérience pendant trente ans à l'Institut régional de développement industriel.

Enfin, dans quels délais la BPI sera-t-elle opérationnelle ? On nous avait annoncé une installation rapide... Les entreprises ne pourront pas attendre bien longtemps, tandis que les collectivités font face à des besoins de financement de l'ordre de 15 à 20 milliards d'euros.

Enfin, parmi les secteurs stratégiques, n'oublions pas l'agroalimentaire, qui contribue pour 12 milliards d'euros aux exportations et qui irrigue les territoires ruraux.

M. Didier Guillaume . - Les collectivités locales n'ont qu'à se louer des relations qu'elles entretiennent avec la CDC ou Oséo, avec lequel j'ai signé une convention pour l'aide aux entreprises dans la Drôme. Il est important d'aborder ces questions locales au niveau local, même si l'interlocuteur est un organisme national.

La création de la BPI figurait dans les 60 engagements du candidat François Hollande. Car il y a un manque. Un entrepreneur qui n'a besoin de rien est accueilli à bras ouverts par sa banque. Mais tout se complique s'il a besoin d'aide... La puissance publique devait s'emparer de ce dossier. L'enjeu est politique ! En cette période de crise, les collectivités comme les entreprises ont des difficultés de financement. Qu'est-ce qu'un canard boiteux ? C'est un canard qui, quand il sera guéri, marchera sur ses deux pattes...

Le redressement de notre pays passera certes par les grandes entreprises. A Florange, il s'agit d'honorer la parole publique, bafouée à Gandrange. Mais les élus et les entreprises attendent aussi que la BPI investisse dans la réindustrialisation et l'innovation plutôt que dans la finance.

La création de la BPI ne doit pas signifier les pleins pouvoirs donnés aux régions dans le traitement des dossiers. Il faut trouver le bon équilibre entre la force de l'action publique, le savoir-faire des régions et l'expertise au plus près des petites entreprises.

M. Michel Teston . - Le FSI, qui sera intégré à BPI Investissement, détient de nombreuses participations dans des groupes français. Vous avez indiqué que la BPI pourrait sortir du capital de certains d'entre eux, au motif qu'ils n'ont plus besoin de capitaux publics. Confirmez-vous cette information ? Il est important que le Parlement soit associé à cette réflexion.

M. Marc Daunis . - Ma question concerne l'articulation avec le « terrain ». Les régions ne constituent pas le seul acteur de proximité. Sur les 68 milliards d'investissement réalisés par les collectivités territoriales, qui réalisent 70 % de l'investissement public, 39 milliards relèvent d'initiatives communales. Faute de pouvoir représenter tous les échelons, pourquoi la fédération des entreprises publiques locales (EPL) n'aurait-elle pas un siège au conseil d'administration de la BPI, compte tenu de l'importance du secteur de l'économie mixte ?

La BPI sera un acteur de l'économie sociale et solidaire. La volonté du gouvernement est claire. France Active, les ADI recevront des fonds. Comment cette préoccupation sera-t-elle inscrite dans la loi ? Aurez-vous recours à des instruments comme les certificats mutualistes ou les titres associatifs participatifs par exemple ?

M. Jean-Pierre Jouyet . - On m'a reproché l'emploi de l'expression « canards boiteux ». Je n'en suis pas l'auteur. Je n'ai fait que reprendre l'expression utilisée par plusieurs présidents de région lors de la réunion de l'Association des régions de France...

Dans les moments difficiles, la Caisse sait faire ! Elle a l'habitude de trouver des solutions défensives, temporaires. Lorsque la construction navale plonge, qui intervient sinon la CDC ? De même, quand on a des difficultés avec le 1 % logement, ce n'est pas le budget de l'État qu'on sollicite, mais la CDC et les fonds d'épargne. C'est nous encore qui allons soutenir la politique du logement : nous avons l'expertise pour cela. A Florange, si un projet intéressant émerge, permettant de tenir la parole publique, la BPI, ou le FSI dans la phase intermédiaire, sera là. La BPI n'a pas vocation à soutenir des activités financières mais productives, elle sera au service de la réindustrialisation dans les territoires.

La question de l'articulation avec les régions est politique. Nous ferons aussi bien, mais dans un cadre plus simple, que ce que nous faisons aujourd'hui en coopération avec les conseils régionaux, les conseils généraux et les communautés d'agglomération. Il est vrai que le son de cloche n'est pas le même d'un niveau de collectivité à l'autre. Je n'y peux rien ! Je vous ai donné mon opinion : pour ma part, j'agirai en fonction des arbitrages du Premier ministre et du président de la République. Et je suis favorable à la présence de représentants des EPL au comité d'orientation de la BPI.

Le premier conseil d'administration devrait se tenir au cours de la deuxième quinzaine du mois de janvier, après la promulgation de la loi. Les opérations d'apports prennent du temps : il faut obtenir des autorisations de Bruxelles, consulter les représentants du personnel d'Oséo et de la CDC, ainsi que les commissaires aux apports. Tout cela devrait nous mener au second trimestre 2013. Mais il n'y aura pas de rupture : la CDC, le FSI et Oséo vont continuer à travailler. La mission que remplit avec une grande efficacité Nicolas Dufourcq visera aussi à éviter la rupture de continuité.

M. Michel Teston, pour respecter les parités actionnariales, nous sommes obligés de procéder à des apports. Il y aura des cessions de la CDC à l'État et nous devrons également céder quelques-unes des participations du FSI. En outre, il y a toujours une certaine rotation d'actifs : certains investissements privés ne sont pas stratégiques, d'autres peuvent le devenir ... Nous sommes dans l'obligation d'avoir une politique intelligente, afin que les capitaux mis à la disposition de la BPI soient les plus élevés possibles.

M. Antoine Gosset-Grainville . - Le schéma actionnarial 50-50 n'est pas le plus facile à gérer. Cependant l'État et la CDC ont déjà l'expérience du copilotage : le meilleur exemple en est le FSI, certes à 51-49, mais au sein duquel il n'y a eu entre l'État et la CDC, depuis trois ans, aucun désaccord, alors que plus de soixante dossiers d'investissement ont été traités.

Le schéma sur lequel nous avons travaillé avec l'État garantit la prééminence de la CDC sur la branche investissement. Il est vrai que la CDC assume traditionnellement la position de tiers de confiance vis-à-vis des entreprises. Elle est perçue depuis longtemps comme un investisseur responsable, très engagé, proche de ceux qu'elle accompagne : nous souhaitons préserver cet acquis. Il s'agit aussi de montrer à Bruxelles que la doctrine d'investissement de la BPI sera bien celle que la CDC applique depuis toujours, un investissement avisé de long terme. La Commission européenne « achète » cette doctrine, qui lui semble conforme aux règles communautaires sur les aides d'État. La prééminence de la CDC dans la gouvernance de la filiale d'investissement se traduira par un administrateur de plus pour la CDC que pour l'État. Vous le voyez, nous gérons de façon pragmatique une répartition actionnariale à 50-50 et cela nous prémunit contre les risques de blocage.

M. Michel Magras . - A l'Assemblée nationale, le ministre des outre-mer a annoncé une déclinaison particulière des activités de la BPI dans nos territoires. Pourrions-nous avoir des précisions à ce sujet ? Des crédits spécifiques sont-ils prévus ?

M. Hervé Maurey . - Vous ne pratiquez pas la langue de bois, je vous en félicite. Et vous avez parlé du numérique, qui me tient particulièrement à coeur. La BPI a en effet un rôle essentiel à jouer dans ce domaine.

Un des grands avantages de la BPI est la fusion d'une multitude de structures, j'y vois un gage d'efficacité. Pourquoi l'Agence des participations de l'État n'a-t-elle pas été incluse dans ce regroupement ? Cela favoriserait une gestion plus dynamique et stratégique des participations de l'État.

M. Claude Bérit-Débat . - Je voudrais parler de l'articulation entre les régions et le terrain. Les régions jouent certes un rôle éminent dans le développement économique ; mais pour les investissements, les communautés d'agglomération et de communes sont au premier rang, elles sont les plus proches des investisseurs. Comment comptez-vous faire pour être proches du terrain et répondre pertinemment et rapidement à la demande des entreprises ?

M. Marcel Deneux . - Je me méfie des banques publiques, qui se sont tristement illustrées dans le passé : c'est parmi elles que se sont produits les plus grands krachs bancaires des trente dernières années. La BPI sera soumise aux mêmes règles prudentielles que les autres banques et devra bien les respecter. Quelle peut être sa marge de manoeuvre avec ses 40 à 50 milliards de capacité d'intervention, qui ne sont rien au regard des 1 600 milliards d'euros de financement des entreprises ? Tout au plus pourra-t-elle orienter les filières et jouer un rôle d'aiguillon. Les entreprises n'attendent pas après vous... Choisissez bien les filières ! Comment allez-vous établir des connexions avec les banques coopératives qui représentent plus de 60 % du PNB et qui sont de véritables républiques autonomes régionales ?

Enfin, quel sera le taux des prêts de la BPI ? Avec une rémunération du livret A à 2,25 %, vous pourrez difficilement faire moins de 4 %.

A qui le conseil rendra-t-il compte de sa gestion chaque année ?

M. Jacques Cornano . - L'objectif gouvernemental de réindustrialisation me semble en accord avec la politique de prêts aux PME. La capacité d'engagement de 40 milliards sous forme de prêts suffira-t-elle à faire face aux besoins d'emprunt d'environ 200 milliards des PME ?

M. Daniel Dubois . - La BPI va contribuer à la lisibilité des structures d'aides à l'investissement. A priori , elle aura un statut bancaire, et les accords de Bâle III devraient s'appliquer. Où est le curseur entre sécurité et efficacité ?

Mme Bernadette Bourzai . - Je me suis prise à rêver, lorsque je vous ai entendu prononcer le mot « parité ». Hélas, il s'agissait de parité actionnariale... Il n'y a pas une seule femme à la Banque centrale européenne : qu'en sera-t-il à la BPI ?

M. Jean-Pierre Jouyet . - M. Marc Daunis, le principal intervenant de l'économie sociale et solidaire est la CDC : nous avons conclu des accords innovants avec les associations que vous avez citées. Le gouvernement a affiché son ambition en faveur de l'économie sociale et solidaire : 500 millions d'euros lui seront dévolus. Nous apporterons l'expertise de la CDC à la BPI.

La spécificité de l'outre-mer sera prise en compte, mais il est trop tôt pour vous donner des chiffres. M. Hervé Maurey, nous attendons que le gouvernement définisse en février ses orientations en faveur du numérique.

Je veux dire à M. Claude Bérit-Débat que je souhaite l'implication la plus forte des élus. Sur le terrain, nous devons préserver la sécurité et une certaine flexibilité. La BPI doit être une banque de proximité sachant concilier des approches défensives et offensives. Elus, CDC, Oséo doivent travailler ensemble en mettant en place un guichet unique.

Ce n'est pas parce qu'une banque est publique qu'elle est imprudente. D'une part, nous avons retenu les leçons du passé et l'investissement et le financement seront bien séparés. D'autre part, le modèle prudentiel de la BPI sera beaucoup plus rigoureux que ceux en vigueur avant la crise, et il s'appliquera de manière différenciée aux prêts et aux interventions en capital. Depuis sa création en 1816 sous la Restauration, jamais la CDC n'a été prise en défaut. Elle a toujours été le meilleur tiers de confiance du pays. Compte tenu de la nature de ses ressources, elle pourra pratiquer des prêts à taux plus faibles que ceux indiqués par M. Marcel Deneux. Nous dépendons, notamment sur les fonds d'épargne, des accords que nous avons avec le Trésor. Nous aurons en tout cas un effet de levier important. De nombreuses entreprises viennent nous voir parce que nous investissons, nous cofinançons, nous savons mobiliser l'argent privé. C'est en cela que la BPI sera intéressante. En outre, les garanties auront un effet d'amplification sur le financement de l'économie.

Mme Bernadette Bourzai, je suis très favorable à la parité, non seulement dans la gouvernance et les comités d'orientation, mais également au conseil d'administration de la BPI. Qu'une femme présidente de région soit membre du conseil d'administration m'irait parfaitement !

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques . - Vous avez peut-être des noms en tête ?

M. Antoine Gosset-Grainville . - La constitution de la BPI amène la CDC et l'État, et en l'occurrence l'APE, à mettre en commun une partie significative de leurs actifs. Le transfert est substantiel. Je redis que la BPI sera soumise à Bâle III, et même à Bâle III renforcé pour l'investissement plus risqué dans les PME et ETI.

M. Jean-Pierre Jouyet . - Un dernier mot, pour préciser que le conseil et l'équipe gouvernante de la BPI rendront compte annuellement de leurs activités devant le Parlement.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques . - Nous aurons un riche débat lors de l'examen du projet de loi créant la BPI. Que de sujets à aborder ! Nous vous remercions.

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