N° 157

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2013

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2014 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VI

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Par Mme Valérie LÉTARD,

Sénatrice.

(1) Cette commission est composée de : M. Daniel Raoul , président ; MM. Martial Bourquin, Claude Bérit-Débat, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Pierre Hérisson, Joël Labbé, Mme Élisabeth Lamure, M. Gérard Le Cam, Mme Renée Nicoux, M. Robert Tropeano , vice-présidents ; MM. Jean-Jacques Mirassou, Bruno Retailleau, Bruno Sido , secrétaires ; M. Gérard Bailly, Mme Delphine Bataille, MM. Michel Bécot, Alain Bertrand, Mme Bernadette Bourzai, MM. François Calvet, Roland Courteau, Marc Daunis, Claude Dilain, Alain Fauconnier, Didier Guillaume, Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Jean-Claude Lenoir, Philippe Leroy, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Michel Magras, Jean-Claude Merceron, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Mireille Schurch, M. Yannick Vaugrenard .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 1395, 1428 à 1435 et T.A. 239

Sénat : 155 et 156 (annexe n° 22 ) (2013-2014)

AVANT-PROPOS

Madame, Monsieur,

L'actualité législative de l'année 2013 a été marquée, pour ce qui est de la recherche, par l'adoption de la loi du 22 juillet relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Ce texte, que votre rapporteure pour avis a rapporté au nom de votre commission des affaires économiques, contient des éléments intéressants, tels que la mise en place d'un agenda stratégique de la recherche et la tentative d'une meilleure coordination avec les programmes européens. Mais il comporte également d'autres dispositions plus inquiétantes, telles que le remplacement de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES) par un Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES), ou encore la substitution de contrats de sites aux pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES).

Le présent projet de budget pour 2014 traduit une situation d'attente pour le financement public de la recherche dans notre pays. Au titre des éléments positifs, figure la préservation des crédits de la MIRES, dans un contexte budgétaire difficile, ainsi que la pérennisation du crédit d'impôt recherche (CIR) et du dispositif de la Jeune entreprise innovante (JEI).

Mais d'un autre côté, la baisse importante de crédits de l'Agence nationale de la recherche (ANR) interpelle quant à l'avenir du financement sur projet. De plus, certains organismes de recherche se trouvent dans une situation budgétaire extrêmement délicate du fait de la stagnation ou de la baisse de leurs dotations publiques, qui risque fort à terme de fragiliser le financement de certains projets.

La mise en oeuvre de la loi du 22 juillet 2013 précitée n'aura pas de conséquence significative sur la programmation budgétaire 2013-2015 et sur ce projet de loi de finances pour 2014, car elle fera appel à des transferts de moyens 1 ( * ) . En termes de mesures d'application, elle donnera lieu, pour la partie « recherche », à la publication de deux décrets portant, l'un sur le CSR (article 95), l'autre sur le mandataire unique gérant les titres de propriété industrielle acquis pour une invention d'un agent de l'État ou d'une personne publique investie d'une mission de recherche (article 97).

Dans le contexte de « croissance molle » que connaissent aujourd'hui notre pays et, plus globalement, l'ensemble de ses partenaires européens, le soutien à la recherche constitue un élément crucial du redressement de notre économie et de la création des emplois de demain. Source d'une valeur-ajoutée seule capable de redonner de la compétitivité à nos produits, il constitue un instrument d'action essentiel entre les mains des pouvoirs publics.

L'appui aux jeunes chercheurs, notamment, doit constituer l'un des axes majeurs d'une ambitieuse politique de soutien à la recherche. Atteignant un degré d'excellence après de longues études supérieures, ils participent à des programmes stratégiques cruciaux pour l'avenir de notre recherche. Mais la faiblesse de leur rémunération et de leur accompagnement les incite à partir à l'étranger, pour parfois ne jamais en revenir.

Votre rapporteure pour avis regrette globalement que ces problématiques, qui devraient constituer une priorité nationale, ne soient pas suffisamment affichées comme telles dans ce projet de budget. Après avoir analysé dans le présent document les différentes composantes de ce projet de loi de finances, et mis en perspective à la fois ses quelques avancées et ses nombreuses sources d'interrogation, voire d'inquiétude, elle a proposé, à titre personnel, de s'abstenir lors du vote des crédits de la mission.

Au cours de sa réunion du mercredi 20 novembre 2013, la commission des Affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2014.

I. I. L'ANALYSE GÉNÉRALE DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA RECHERCHE

1. Des moyens alloués à la recherche en recul dans un budget de la MIRES en faible progression
a) Un budget MIRES en très légère hausse

Dans un contexte économique tendu, le budget de la recherche et de l'enseignement supérieur est relativement épargné. Il constitue toujours le troisième budget de l'Etat derrière l'enseignement scolaire (64,77 milliards d'euros) et la défense (37,48 milliards).

Hors programmes budgétaires créés pour la mise en oeuvre du nouveau programme d'investissements d'avenir (PIA 2), la MIRES bénéficie, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, de crédits budgétaires d'un montant de 25,761 milliards d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et de 26,048 milliards d'euros de crédits de paiement (CP). Ils sont en recul de 182 millions d'euros en AE (soit -0,70 %), mais progressent de 113 millions d'euros en CP , (soit +0,44 %) par rapport à la loi de finances initiale (LFI) 2013.

Le budget de la MIRES est un budget interministériel , auquel le ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur participe à hauteur de 22,04 milliards d'euros, soit 111,8 millions d'euros de plus (+0,5 %) par rapport à l'année passée.

En intégrant les programmes 409 et 410 liés à la mise en oeuvre du PIA , les crédits budgétaires attribués à la MIRES dans le cadre du PLF s'établissent à 31,01 milliards d'euros AE, soit +5,15 milliards d'euros par rapport à la LFI 2013, et 31,38 milliards d'euros de CP, soit +5,45 milliards d'euros.

b) Une baisse des moyens consacrés à la recherche

Alors que le budget global de la MIRES augmente, l'enveloppe consacrée à la recherche seule diminue. C'est le cas si l'on s'attache aux crédits mobilisés par le seul ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR) : son volet « recherche » passe ainsi de 7,85 milliards d'euros l'année passée à 7,77 milliards pour 2014, soit une baisse marginale de 0,1% . Il retrouve ainsi le niveau qui était le sien en 2012.

Ce recul est plus marqué si l'on s'attache cette fois à l' ensemble des moyens consacrés à la recherche au sein de la MIRES , qui mobilise d'autres crédits que ceux du MESR. Avec 13,98 milliards d'euros, la dotation allouée à la recherche accuse une baisse de 0,55 % par rapport à l'exercice précédent, tout en restant encore 0,6 % au-dessus de celle de 2012.

PRÉSENTATION DES CRÉDITS « RECHERCHE » DE LA MIRES
PAR PROGRAMME (EN MILLIONS D'EUROS)

Numéro et intitulé du programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2013

Demandées pour 2014

%

Ouverts en LFI pour 2013

Demandés pour 2014

%

150 / Formations supérieures et recherche universitaire (actions recherche : 6 à 12)

3 775,80

3 780,06

0,11%

3 775,80

3 780,06

0,11%

172 / Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

5 158,77

5 061,65

-1,88%

5 158,77

5 061,65

-1,88%

187 / Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

1 281,77

1 277,58

-0,33%

1 281,77

1 277,58

-0,33%

193 / Recherche spatiale

1 413,02

1 431,11

1,28%

1 413,02

1 431,11

1,28%

190 / Recherche dans le domaine de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables

1 416,00

1 387,51

-2,01%

1 378,00

1 397,51

1,42%

192 / Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle (actions recherche : 2 et 3)

643,045

665,821

3,54%

700,018

686,254

-1,97%

191 / Recherche duale (civile et militaire)

192,199

192,869

0,35%

192,199

192,869

0,35%

186 / Recherche culturelle et culture scientifique

115,592

112,591

-2,60%

118,592

114,491

-3,46%

142 / Enseignement supérieur et recherche agricoles (action recherche : 2)

36,037

35,887

-0,42%

36,037

35,887

-0,42%

Total des crédits recherche

14 032,24

13 945,07

-0,62%

14 054,21

13 977,40

-0,55%

Source : projet annuel de performances (PAP) Recherche et enseignement supérieur pour 2013, structure courante

2. Des évolutions variables selon les programmes
a) Les trois programmes de recherche du MESR

À structure constante, le montant alloué aux trois programmes de recherche du MESR (programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », programme 187 « Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources » et programme 193 « Recherche spatiale ») s'établit à 7,771 milliards d'euros en AE et CP ; il est en léger repli de 82 millions d'euros (soit -1,1% ) par rapport à la LFI de 2013.

La principale « coupe » est liée à une révision de la programmation de l'ANR , qui se traduit par une diminution de 81,5 millions d'euros des crédits destinés à l'agence (-11,9 %). Une économie est également réalisée sur les crédits d'intervention du MESR (action 01 du programme 172), qui sont en recul de 2,5 millions d'euros (-1,6 %) et s'établissent, à structure constante, à 149,2 millions d'euros. Les crédits destinés aux organismes de recherche sont en baisse de 26,6 millions d'euros, à 5,89 milliards d'euros (-0,45 %). Enfin, les crédits consacrés aux contributions directes de l'Etat (organisations internationales, projet ITER 2 ( * ) , société civile GENCI 3 ( * ) ) augmentent, toujours à structure constante, de 28,3 millions d'euros (+2,6 %) pour faire face aux engagements de la France à l'égard de l'Agence spatiale européenne (ESA), de l'Organisation européenne pour l'exploitation des satellites météorologiques (EUMETSAT) et du projet ITER.

* Le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » a un caractère central dans le budget du MESR. Doté de plus de 5 milliards d'euros, il est en effet le premier programme, par ordre d'importance, entièrement dédié à la recherche au sein de la MIRES, et voit le CIR lui être rattaché. Par ailleurs, il regroupe des opérateurs et des structures couvrant l'ensemble des disciplines scientifiques et ayant un rôle majeur dans la structuration de la recherche dans notre pays.

Pour 2014, les crédits ouverts au titre de ce programme 172 sont de 5,06 milliards d'euros en CP, en baisse de 1,88 % . Sur les 14 actions qu'il comporte, une seule (l'action 07 « Recherches scientifiques et technologiques en physique, chimie et sciences pour l'ingénieur ») est en hausse (+0,25 %), toutes les autres enregistrant des baisses, dont la grande majorité est néanmoins inférieure à 1 %. Deux exceptions toutefois, l'action 01 « Pilotage et animation », qui enregistre une baisse de 3,27 %, à 146,74 millions d'euros, et surtout l'action 02 « Agence nationale de la recherche », en recul de 11,87 % à 605,15 millions d'euros 4 ( * ) .

* Le programme 187 « Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources » est centré sur la gestion durable des écosystèmes. Doté de 1,277 milliards d'euros en CP ( -0,33% ), affectés exclusivement à des subventions pour charges de service public, il comprend huit actions, dont sept sont en recul, limité il est vrai (inférieur à 0,8%). Une seule d'entre elles connaît une évolution positive : il s'agit de l'action 07 « Grandes infrastructures de recherche », en hausse de 3,87 %.

Toutefois, cette action, qui vise à mettre à disposition de la communauté scientifique nationale les moyens nécessaires pour l'acquisition et la qualification de données sur les ressources et les milieux, n'est dotée que de 49,5 millions d'euros. En outre, elle complète l'action 13 du programme 172 « Grandes infrastructures de recherche », visant au financement direct de ces infrastructures et de leurs alliances 5 ( * ) , et qui elle connaît une baisse de 0,76 %.

* Le programme 193 « Recherche spatiale » a pour objet d'assurer à notre pays et à l'Europe la maîtrise des technologies spatiales. Les systèmes spatiaux - à l'exception des satellites - étant financés par les États, la stratégie retenue par les pouvoirs publics est prééminente dans ce secteur industriel.

Doté de 1,28 milliard d'euros en CP, il progresse de 1,28 % . Sur les sept actions qu'il comporte, seules deux sont en recul très léger : l'action 02 « Développement de la technologie spatiale au service de l'observation de la terre » (-0,04 %) et l'action 06 « Moyens généraux d'appui à la recherche » (-0,27 %).

Toutes les autres actions sont donc en hausse, symbolique il est vrai pour la plupart d'entre elles puisqu'inférieure à 1 %. Exception notable, l'action 07 « Développement des satellites de météorologie », qui progresse de 38,66 %, à 42,57 millions d'euros, suite à la révision du plan financier 2013-2032 d'EUMETSAT.

Ce programme comprend la subvention pour charge de service public versée au Centre national d'études spatial (CNES). S'élevant à 577,1 millions d'euros, elle est en baisse de 1,1 %, ce qui oblige le Centre à une limitation contraignante de ses coûts de fonctionnement.

Il comprend également la contribution française à l'ASE, qui transite par le CNES. Celle-ci est en progression de 1,1 %, à 811,4 millions d'euros. Il est vrai toutefois que la France a accumulé des arriérés de contribution envers l'Agence, qui devraient s'élever à 103,6 millions d'euros fin 2014. Arriérés dont l'apurement a été renvoyé de fin 2015 à fin 2021 lors de la conférence interministérielle de novembre 2012 de l'ESA.

b) Les autres programmes intéressant la recherche et rattachés à la MIRES

Sont rattachés à la MIRES les crédits relatifs aux programmes 142, 192, 186, 190 et 191.

À périmètre constant, le budget alloué à ces programmes dans le cadre du PLF 2014 s'élève à 2,98 milliards d'euros d'AE et 3,01 milliards en CP. L'évolution par rapport à la LFI 2013 est négative en AE (-2,9 %) et en très légère augmentation en CP (+0,32 %).

Le budget 2014 du programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles » s'élève, à structure constante, à 311,3 millions d'euros en AE et en CP ; il est en baisse de -21,3 % en AE par rapport à la LFI de 2013 et en hausse de +0,92 % en CP.

Le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » est budgété, à structure constante pour 2014, à hauteur de 970,8 millions d'euros en AE et 991,9 millions en CP ; il est en augmentation de +2,3 % en AE par rapport à la LFI 2013 et en baisse de 1,4 % en CP.

Les crédits de recherche destinés au soutien et à la diffusion de l'innovation technologique (action 02) et au soutien de la recherche industrielle stratégique (action 03) progressent en AE +3,4 %) mais diminuent en CP (-2 %).

Les crédits destinés au financement de l'activité innovation de Bpifrance Financement (ex OSEO) et aux réseaux régionaux de développement technologique (RDT) diminuent ainsi de 55 millions d'euros (soit -23,3 %) en AE et en CP pour s'établir à 208 millions d'euros.

Les crédits du dispositif « Jeunes entreprises innovantes » (JEI) concernent les PME qui consacrent plus de 15 % de leurs charges à des dépenses de recherche et développement. Elles bénéficient d'exonérations sociales pour les personnels impliqués dans des projets de R&D ; elles bénéficient également d'exonérations fiscales, notamment d'une exonération d'impôt sur les sociétés.

L'article 71 du projet de loi de finances prolonge le statut de JEI aux entreprises créées jusqu'au 31 décembre 2016. Il étend les avantages liés au dispositif JEI aux entreprises créées après le 31 décembre 2013 et jusqu'au 31 décembre 2016, jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de leur création. Par ailleurs, il étend l'exonération de cotisations à la charge de l'employeur aux personnels affectés à des activités d'innovation 6 ( * ) . Enfin, l'exonération de cotisations sociales patronales à taux plein est rétablie pour les sept années suivant celle de la création de l'entreprise, comme prévu par le Pacte national pour la compétitivité, la croissance et l'emploi.

Les crédits affectés au dispositif des JEI font l'objet d'un abondement de 64 millions d'euros (+66,7 %) au PLF 2014 pour tenir compte de l'augmentation du coût de l'exonération liée à la réforme du dispositif (suppression de la dégressivité qui pénalisait les entreprises en croissance, extension du champ de ces exonérations aux personnels affectés à des activités de conception de prototypes et de lignes pilotes de produits). Ces crédits s'établissent à 160 millions d'euros en AE et en CP.

Le Fonds de compétitivité des entreprises (FCE hors Fonds unique interministériel), qui soutient plusieurs dispositifs de recherche et développement (R&D) industrielle (dont des clusters ), est également abondé de 15,6 millions d'euros en AE (+10,3 %) et de 30,4 millions en CP (+20,6 %). Il s'élève ainsi à 166,2 millions d'euros en AE et 177,7 millions en CP. Cette évolution est principalement liée au lancement du programme Nano 2017 de développement du pôle nanoélectronique de Crolles, à Grenoble, seul pôle industriel européen dans le domaine des technologies les plus avancées pour la production des circuits intégrés.

Enfin, le Fonds unique interministériel (FUI), qui finance les pôles de compétitivité afin de soutenir des projets collaboratifs innovants bénéficie pour 2014, deuxième année de la phase 3 de la politique des pôles, d'un financement de 113,0 millions d'euros en AE et de 122,6 millions en CP, ce qui traduit une diminution de 1,6 millions d'euros en AE (-1,4 %) et de 52,5 millions en CP (-30 %).

Le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » est budgété, à périmètre constant, à hauteur de 1,39 milliard d'euros en AE et 1,4 milliard en CP. Cela correspond à une baisse de 1,9% en AE (-27,7 millions d'euros) et en hausse de + 1,5 % en CP (+20,3 millions).

Les subventions pour charge de service public destinées aux opérateurs du programme sont orientées à la baisse, passant de 1,02 milliard d'euros en LFI 2013 à 990,2 millions, en AE comme en CP.

Ce programme supporte la principale diminution d'emplois au sein de la MIRES (-116 postes), répartie sur ses trois opérateurs : -68 équivalents temps plein (ETP) pour l'IFP-Energies nouvelles (IFP-EN), -30 pour l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR) et -18 pour l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Le programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique » connaît, au titre du PLF 2014 et à structure constante, une augmentation de ses crédits de 0,6 million d'euros en AE et une baisse de 0,5 million (-0,42 %) en CP.

Le programme 191 « Recherche duale (civile et militaire) » bénéficie pour 2014 d'une très légère augmentation de ses crédits par rapport à ceux inscrits en LFI 2013 : +0,67 millions d'euros en AE et CP (+0,35%), portant son budget 2014 à 192,9 millions.

3. De grands organismes de recherche connaissant une situation critique en termes de financement
a) Une diminution structurelle des dotations publiques

La contraction de l'enveloppe « recherche » de la MIRES se retrouve, logiquement, dans les subventions allouées aux grands organismes. Ceux qu'a pu auditionner ou questionner votre rapporteure pour avis lui ont fait part de la situation « limite » dans laquelle ils se trouvaient. Leur dotation d'Etat est en recul : -0,2 % pour l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), -0,4 % pour le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), -0,64 % pour l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA), -1,1 % pour le CNES...

Le problème est que ces baisses, certes limitées, se rajoutent à d'autres baisses des années précédentes pour constituer finalement des coupes sensibles dans leur budget. L'IFP-EN, par exemple, a vu ainsi sa dotation reculer de 34 % depuis une dizaine d'années. En ce qui le concerne, l'IFSTTAR craint même de se retrouver en cessation de paiement si cette tendance se poursuivait.

Or, la situation de ces organismes risque de s'aggraver, du fait des mises en réserve demandées à l'ensemble des opérateurs de l'État, au nom de la maitrise des finances publiques. D'une part, ces taux ont augmenté cette année : stables pour la masse salariale, à 0,5 %, ils passent de 6 à 7 % pour les autres dépenses. Si leur réduction de moitié avait été finalement décidée l'année passée, l'arbitrage n'a pas encore été rendu pour cet exercice. Aussi plusieurs organismes (IFP-EN, IFSTTAR, INERIS et IRSN) ont-ils demandé conjointement au Gouvernement de prendre des résolutions en ce sens. Sachant qu'ils ne seront pas à l'abri d'un gel supplémentaire en cours d'exercice, comme cela est arrivé à l'IFSTTAR en 2013, ce qui les mettrait alors dans une situation budgétaire plus que délicate.

b) Une adaptation nécessaire passant par l'accroissement des financements alternatifs

Comment les organismes gèrent-ils ce retrait des dotations d'Etat ? Ceux qui le peuvent s'adaptent et tentent de diversifier leurs moyens de financement. Soit en augmentant leurs ressources propres : dividendes versés par les filiales, prestations réalisées auprès des industriels, redevances issues de la valorisation de la recherche ... Les ressources propres de l'IFP-EN ont ainsi presque doublé en dix ans, représentant plus de 50 % de son budget.

L'autre solution est de se tourner vers les appels à projet , qu'ils soient issus du PIA, dont une nouvelle tranche a été annoncée par le Premier ministre à l'automne, ou de l'Europe. C'est ce que fait l'INRIA, qui cette année voit encore ce type de ressources augmenter, de 2,7 %.

Ces solutions sont à encourager, car il est certain que la tendance sera au désengagement progressif de l'État dans le financement de ces structures. Cependant, elle a ses limites, et ces organismes sont contraints aujourd'hui de réaliser de nouvelles économies . Ce peut être sur le budget de fonctionnement, en se « serrant la ceinture » un peu plus. Ce peut être sur les emplois, ce qui remet en cause la transmission du savoir au sein de la structure.

Ce peut être enfin, dans le pire des cas, sur les capacités d'intervention : plusieurs organismes (IFP-EN, INRIA ...) ont ainsi indiqué avoir arrêté ou suspendu, au moins en partie, certains programmes de recherche. Dans une économie où la connaissance et l'innovation seront, demain plus que jamais, la source de toute valeur ajoutée, on mesure les conséquences désastreuses d'une telle évolution pour notre pays.

4. D'autres sources de financement public pour la recherche

Les crédits d'État, retracés chaque année au sein de la loi de finances, ne sont pas les seules sources de financement public profitant à la recherche. S'y ajoutent en effet d'importantes enveloppes de crédits provenant des différents niveaux de collectivités, de l'Union européenne et du PIA.

a) Les collectivités territoriales : le poids affirmé des régions

Le budget que les collectivités territoriales déclarent affecter aux opérations de recherche et de transfert de technologie (R&T) est estimé à 1,2 milliard d'euros en 2012, dont 806 millions pour les seuls conseils régionaux de France métropolitaine. Le budget R&T des conseils généraux s'élève quant à lui à 196 millions d'euros, soit 16,5 % du budget R&T de l'ensemble des collectivités territoriales du territoire métropolitain. Enfin, en 2012, les communes et leurs groupements ont apporté 171 millions d'euros à des activités de R&T, soit 14,5 % du budget métropolitain.

Les collectivités territoriales sont particulièrement impliquées dans des opérations immobilières qui représentent plus du tiers des budgets R&T, principalement dans le cadre du volet recherche-enseignement supérieur et transfert de technologie des contrats de projets État-régions (CPER).

Les opérations visant à améliorer l'accès des entreprises aux moyens humains et techniques pour le développement d'une recherche technologique absorbent plus du quart des budgets, et les conseils régionaux y privilégient, à plus de 50 %, le soutien au partenariat entre recherche publique et recherche des entreprises.

L'engagement financier est moindre, en revanche, pour ce qui concerne le renforcement des équipements scientifiques des laboratoires des universités et des organismes de recherche (8 %) ou le soutien aux projets de recherche (15 %).

b) L'Union européenne : une opportunité mal utilisée par notre pays
(1) Le mauvais « taux de retour » du 7ème programme-cadre européen de recherche et développement

Le 7 ème programme cadre européen de R&D (7 ème PCRD, ou FP7) est le principal instrument communautaire de financement de la recherche et de l'innovation en Europe pour la période 2007-2013 . Il s'est inscrit dans la continuité des précédents PCRD, dont le premier a été lancé en 1984.

D'un budget nettement supérieur aux précédents (+63 % par rapport au 6ème PCRD) et fonctionnant principalement par un système d'appels à propositions, le 7 ème PCRD finance notamment, sous forme de subventions, des projets de R&D portés par des consortia européens . Le 7 ème programme cadre est accessible aussi bien aux centres de recherche et universités, qu'aux PME, sociétés multinationales ou simples indépendants. Les PME peuvent ainsi recevoir des subventions pouvant atteindre 75 % de leurs frais de recherche sur des projets européens innovants.

La France reçoit exactement 3,9 milliards d'euros , soit 11,4 % des contributions financières distribuées par la Commission au titre du 7 ème PCRD. Elle est en 3 ème position derrière l'Allemagne (qui reçoit 5,4 milliards d'euros, soit 16,1 % du total) et le Royaume-Uni (qui reçoit 5,2 milliards d'euros, soit 15,2 %).

Toutefois, par rapport au 6 ème PCRD, la participation de la communauté française de recherche et d'innovation aux appels à projets européens a diminué de manière significative . Les financements obtenus sont ainsi passés de 13 % à 11,4 %. Cette tendance à la baisse, particulièrement marquée en 2011 et 2012, s'est poursuivie en 2013 pour ce qui concerne les projets concomitants avec le PIA, qui bénéficie donc d'un réel effet d'éviction à son profit.

Ces performances sont nettement insuffisantes au regard des capacités de recherche de la France et compte tenu de sa contribution au budget de l'Union européenne. Les acteurs français répondent moins aux appels comparativement à leurs partenaires européens et se situent ainsi au cinquième rang seulement des déposants.

La complexité de l'accès aux financements du PCRD, la concurrence avec les dispositifs de financement nationaux captant les forces des équipes de recherche - notamment du PIA - ainsi que la saturation de ces dernières, sont les hypothèses avancées par le ministère en charge de la recherche pour expliquer la relative désaffection des équipes françaises au 7 ème PCRD.

Moins réactive, la France est cependant efficace : elle bénéficie d'un taux de succès moyen de 24 % pour les projets déposés par ses équipes, soit l'un des meilleurs parmi ceux des grands participants. Une baisse notable a toutefois été identifiée dans certains domaines tels que les technologies de l'information et de la communication ou les domaines des nanosciences, nanotechnologies, matériaux et nouvelles technologies de production.

(2) Les espoirs suscités par le nouveau programme « Horizon 2020 »

Le nouveau PCRD, « Horizon 2020 », qui démarrera dans quelques mois pour la période 2014-2020 , correspond à un changement de démarche qui pourrait bénéficier à notre pays . Il regroupe pour la première fois les programmes de recherche et d'innovation européens en un seul programme cadre, rationalise les financements en faveur de la croissance, simplifie l'accès à ces derniers et les recentre sur trois priorités correspondant pleinement aux attentes des acteurs français : « excellence scientifique », « primauté industrielle » et « défis sociétaux ».

En amont, la France a défendu, dans le cadre des négociations d'« Horizon 2020 », les priorités scientifiques des acteurs français et des règles de participation leur étant favorables, et cherché à mieux articuler les programmations nationales et européennes.

Elle a par ailleurs mis en cohérence la future stratégie nationale de recherche avec ce programme. L'Agenda stratégique pour la recherche, le transfert et l'innovation « France Europe 2020 », rendu public par la ministre Geneviève Fioraso en mai 2013, refonde ainsi le dispositif de coordination et d'orientation de la recherche afin d'optimiser le couplage avec les programmes européens et annonce un recentrage des missions de l'ANR en vue de mieux accéder aux financements de l'Union.

La France a également développé des mesures d'incitation à participer au programme cadre, à travers une contractualisation avec les grands acteurs de la recherche. Elle a mis en place un dispositif d'accompagnement plus performant, à travers un nouveau réseau de points de contact nationaux (PCN). Enfin, elle a porté un plan de communication national et régional afin de promouvoir le nouveau programme.

c) Le programme des investissements d'avenir
(1) La première tranche de mise en oeuvre du PIA

Faisant suite à la remise, en novembre 2009, du rapport de la commission coprésidée par MM. Alain Juppé et Michel Rocard, le PIA, dont les crédits ont été ouverts par la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, comporte une enveloppe totale de 35 milliards d'euros destinée à financer l'économie de la connaissance comme moyen de sortie de crise. 28,3 milliards d'euros ont à ce jour été engagés dans des projets identifiés, tandis que 5,2 milliards ont été effectivement décaissés.

(a) Un dispositif bénéficiant majoritairement au secteur de la recherche, de l'enseignement supérieur et de la formation

Avec près de 22 milliards d'euros , soit 62,5 % du total des crédits ouverts dans le cadre du « grand emprunt », l'enseignement supérieur, la recherche et la formation constituent la première priorité du PIA. Ces fonds doivent permettre de renforcer notablement les sites d'excellence portant des projets ambitieux dans tous les domaines de la recherche et de l'innovation.

Trois ans après le lancement du programme d'investissements d'avenir, on comptabilise 3 400 projets déposés, 100 appels à projets lancés et 7 guichets ouverts. 1 222 projets ont été sélectionnés et plus de 2 300 entreprises ont été soutenues par le PIA.

Dans le domaine de l'enseignement supérieur, de la recherche et de la formation 1 684 projets ont été déposés . Les 620 sélectionnés ont été contractualisés à près de 88% . Les montants engagés en 2012 et début 2013 dans ce domaine concernent les initiatives d'excellence en formation innovante (IDEFI), les consortiums de valorisation thématiques (CVT), les pôles de recherche hospitalo-universitaires en cancérologie (PHUC), les projets d'infrastructures nationales en biologie et santé (deuxième vague), les sociétés d'accélération de transfert de technologie (SATT) et les derniers instituts de recherche technologique (IRT) sélectionnés.

(b) Une phase de conventionnement des projets labellisés arrivant à son terme et faisant une grande place à l'ANR

Après que les années 2010 et 2011 ont été consacrées au lancement des deux vagues d'appels à projets du premier PIA, puis à la sélection des projets, l'année 2012 et le premier semestre 2013 ont été principalement centrés sur le conventionnement des projets labellisés.

Au premier trimestre 2012, les montants contractualisés s'élevaient à 6,3 milliards d'euros. La contractualisation s'est nettement accélérée en 2012, atteignant 17,3 milliards au quatrième trimestre, puis 19,8 milliards au premier trimestre 2013.

Cette importante augmentation s'explique par plusieurs raisons.

Sous la supervision des différents comités de pilotage des actions inscrites au PIA, le conventionnement a été conduit par les opérateurs en charge de la mise en oeuvre du programme sur le périmètre de la MIRES. En premier lieu par l'ANR, pour ce qui est des actions relevant du MESR, avec pour objectif d'en accélérer le rythme.

La durée de cette phase de contractualisation avec les porteurs s'explique par le grand nombre et la complexité des projets. L'ANR, en particulier, a dû faire face à une charge de travail importante. Toutefois la mise en place de préfinancements, en particulier pour les LABEX et IDEX, a permis un démarrage rapide des projets lauréats.

À l'été 2013, la quasi-totalité des conventions liées à la mise en oeuvre des actions les plus emblématiques de la sphère « enseignement supérieur et recherche », à savoir les conventions IDEX, LABEX et EQUIPEX, ont été signées . Toutefois, des difficultés politiques et/ou juridiques se sont parfois fait jour pour les objets les plus structurants : pour les instituts hospitalo-universitaires (IHU), la création de fondations de coopération scientifique a mécaniquement allongé les délais, tandis que le montage juridique des IRT et des SATT a nécessité également des travaux d'ingénierie parfois complexes.

Le suivi de la mise en oeuvre des projets labellisés est aujourd'hui assuré par le MESR, le CGI et les opérateurs impliqués, au premier rang desquels l'ANR.

(c) Une réorientation du programme à la demande du Premier ministre

Le 21 janvier dernier, le Premier ministre a annoncé le redéploiement de 2,2 milliards d'euro s du PIA. Sur cette somme globale, 1,5 milliard est mobilisé par la réaffectation d'enveloppes partiellement consommées vers de nouvelles priorités, tandis que 700 millions d'euros sont réorientés au sein d'enveloppes existantes selon un ciblage et des modalités d'actions nouvelles.

Les actions ayant vocation à être redéployées ont été identifiées par un travail interministériel, qui a notamment tenu compte des nouvelles priorités définies dans le Pacte pour la compétitivité, la croissance et l'emploi présenté par le Gouvernement en novembre 2012. Les modalités précises de ces nouvelles actions et réorientations sont en cours de définition. Elles donnent lieu, conformément aux procédures du PIA depuis la loi de finances rectificative de 2010, à la rédaction de conventions et d'avenants qui seront transmis pour information au Parlement.

Parmi les nouvelles actions prioritaires , figurent notamment les prêts à l'industrialisation de projets issus des pôles de compétitivité, pour 100 millions d'euros. Ces pôles, qui entrent dans une nouvelle phase de développement, devront désormais mieux intégrer l'objectif de mise sur le marché et de diffusion des produits ou services innovants issus de leur activité, en cohérence avec le Pacte national pour la compétitivité, la croissance et l'emploi. Pour ce faire, le PIA permettra à ces projets d'obtenir des prêts de 1 à 3 millions d'euros, bonifiés à hauteur de 200 points de base, sur une maturité de 7 ans.

(d) Le transfert et la gouvernance, principaux « points noirs » d'un bilan encore délicat à dresser

Trois ans après le début du programme, et même si l'évaluation du PIA est prévue dans la loi de finances rectificative du 9 mars 2010, il reste encore difficile d'en dresser un bilan autre que technique, faute d'un recul réellement suffisant. Le Gouvernement, tout comme le CGI, renvoient respectivement à 2015 et 2017 7 ( * ) pour une première appréciation critique de ce dispositif, soulignant qu'une partie de ses crédits a été justement réservée à l'évaluation des résultats.

Toutefois, le rapport annuel relatif à la mise en oeuvre du PIA est une source d'informations et d'analyses importante pour dès à présent pressentir les grandes tendances de mise en oeuvre du programme, notamment dans son volet « enseignement supérieur, recherche et formation ».

D'une façon générale, le rapport met en avant les avancées appréciables dans la mise en oeuvre du PIA. « Qu'il s'agisse des Idex dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, des IRT en lien avec les pôles de compétitivité, des SATT pour la valorisation de la recherche, de nombreuses structures sont déjà opérationnelles », souligne ainsi le rapport.

« Si cette transformation du paysage universitaire et cette structuration de la recherche technologique autour de pôles d'excellence de rang mondial figurent parmi les effets les plus visibles du PIA, elles ne doivent pas faire oublier les multiples projets innovants également financés qui ambitionnent de constituer des relais de croissance innovants », fait observer le rapport.

Au-delà de ces remarques « impressionnistes », le rapport, tout en indiquant bien à son tour « qu'il ne sera possible de mesurer précisément l'impact du PIA d'un point de vue socio-économique qu'à moyen ou long terme », fait état d'un premier diagnostic territorial réalisé à la demande du Premier ministre et annexé au rapport.

Celui-ci met clairement en exergue « l'effet structurant du PIA sur les activités d'excellence ». Le programme a incité « les acteurs à se regrouper et à travailler ensemble. Il a également favorisé le renforcement des évolutions territoriales à l'oeuvre (cohérence des pôles urbains) et les effets de réseau (développement des coopérations interrégionales) ».

C'est en matière de valorisation de la recherche que les effets sont encore les plus limités. Les nouveaux outils mis en place pour favoriser le passage de la recherche à l'entreprise ne sont pas encore tous opérationnels, les attentes à cet égard étant fortes dans les SATT et les IRT. « Il reste en effet des difficultés à surmonter pour améliorer le transfert de l'innovation vers l'entreprise », pointe le rapport, ce qu'il attribue « en grande partie aux différences de culture entre recherche publique et recherche privée, différences qui nuisent au développement de la coopération ».

Pour optimiser l' impact du PIA sur les territoires , le rapport fait état de la nécessité « d'aller vers une gouvernance unifiée des politiques menées en faveur de l'innovation et vers une meilleure coordination des interventions publiques », notamment par « un meilleur pilotage de l'innovation (passant) par une consolidation du couple État-Région ».

(2) La deuxième tranche d'investissements au titre du PIA

Le Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, a présenté le 9 juillet dernier un plan dénommé « Investir pour la France », dans le cadre duquel il a annoncé la mise en oeuvre d'un nouveau PIA. Conformément au souhait du Président de la République, ce dernier repose notamment sur les priorités de la transition écologique et énergétique, de la mobilité, de l'innovation, de la compétitivité industrielle, du numérique, de la santé et, naturellement, de la recherche.

(a) Une dotation à nouveau particulièrement importante pour la recherche et l'enseignement supérieur

Conformément aux annonces qui avaient été faites par le Premier ministre au mois de juillet, le projet de loi de finances prévoit en ce sens l' ouverture de 12 milliards d'euros de crédits . Ils permettront principalement d'accompagner les projets exemplaires et dûment sélectionnés, afin de renforcer le potentiel de croissance de notre économie, de créer des emplois et d'assurer la transition énergétique et écologique.

Cette enveloppe de 12 milliards d'euros, toujours dans la lignée des orientations données par le Premier ministre en juillet, se répartit de la façon suivante : 3,65 milliards d'euros pour la recherche et les universités , qui constituent le premier poste de dépenses ; 2,3 pour la transition énergétique, la rénovation thermique et la ville de demain ; 1,7 pour l'innovation dans une industrie durable ; 1,5 pour l'excellence technologique des industries de défense ; 1,3 pour l'aéronautique et l'espace ; 0,6 pour l'économie numérique ; 0,4 pour la santé ; 0,55 pour la jeunesse, la formation et la modernisation de l'État.

RÉPARTITION DES INVESTISSEMENTS DU DEUXIÈME PIA PAR SECTEUR

(EN MILLIARDS D'EUROS)

(b) Une gouvernance censée garantir l'efficacité de la dépense

L'efficacité de ce programme passant par une sélectivité rigoureuse des projets qui y seront éligibles, l' article 42 du projet de loi de finances prévoit un mode de gouvernance extrêmement strict : priorité donnée aux projets innovants, recours au réseau des opérateurs publics, organisation d'appels à projets comme mode de sélection, analyse indépendante des dossiers, recherche du co-investissement avec effet de levier sur l'investissement privé et celui d'autres collectivités publiques, optimisation du retour sur investissement pour l'État et la collectivité ...

L'objectif de cette deuxième tranche d'investissements d'avenir est de favoriser le rapprochement d'acteurs (grands groupes et PME, acteurs de la recherche, collectivités locales) en vue de faire émerger de nouvelles technologies et de nouveaux pôles d'excellence universitaires à visibilité internationale, d'accompagner des projets concourant à la mise en oeuvre de la transition écologique et énergétique, ou d'accélérer le déploiement de projets industriels structurants.

La qualité de la procédure de sélection des projets sera garantie par le Commissariat général à l'investissement (CGI). Ainsi, l'article 42 du projet de loi de finances soumet les 12 milliards d'euros du PIA 2 à la gouvernance spécifique qui avait été conçue dans le cadre du premier PIA, à l'aune du retour d'expérience de ses trois premières années de fonctionnement.

Au titre des ajustements , la durée maximale prévue pour les conventions conclues entre l'État et les organismes gestionnaires des fonds des deux programmes d'investissements d'avenir passe de 10 à 15 ans. Cet allongement permet que les crédits portés par ce deuxième PIA, qui viendront abonder des actions reposant sur des conventions déjà conclues au titre du premier, soient couverts. En outre, et afin d'assurer une meilleure information du Parlement sur la mise en oeuvre du programme, cet article adapte le périmètre des annexes au projet de loi de finances concernant les investissements d'avenir et la période pendant laquelle le rapport relatif à la mise en oeuvre des investissements d'avenir sera présenté.

(c) L'ouverture de deux nouveaux programmes dans la MIRES

Deux nouveaux programmes sont introduits dans la MIRES, dans le cadre du PLF 2014, au titre de la mise en oeuvre de la nouvelle vague d'investissements d'avenir.

? Le programme 409 « Écosystèmes d'excellence » vise à prolonger un certain nombre d'actions engagées dans le cadre du premier PIA dans le domaine de la recherche et de l'enseignement supérieur (IDEX, LABEX, volet espace, volet santé). Il complète par ailleurs le PIA précédent par l'introduction de deux volets destinés respectivement aux technologies clés génériques et au calcul intensif.

D'un montant total de 4,115 milliards d'euros , les crédits de ce programme 409 sont répartis en six actions mises en oeuvre par l'ANR, le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et le CNES. Ces actions se déclinent de la façon suivante :

- « Equipements d'excellence » (EQUIPEX)

Cette action s'inscrit dans le prolongement de l'action EQUIPEX du précédent PIA. Elle contribue au financement d'acquisitions et, plus ponctuellement, de fonctionnement d'équipements de pointe. Elle est dotée d'un budget de 365 millions d'euros, dont 165 millions de dotations non consomptibles 8 ( * ) , dont les intérêts doivent participer notamment à la couverture des coûts de fonctionnements inhérents aux projets dotés.

- « Initiatives d'excellence » (IDEX)

Prolongeant la première génération d'IDEX, cette action tend à promouvoir le développement de projets universitaires à rayonnement international fortement intégrés dans leur écosystème territorial. Elle est dotée d'un budget de 3,1 milliard d'euros en dotations non consomptibles.

- « Technologies-clés génériques »

Cette action-cible est vouée au développement de technologies transversales, notamment au regard des critères d'éligibilité à un financement européen dans le cadre du programme « Horizon 2020 ». Un budget de 150 millions d'euros y est alloué sous la forme d'une enveloppe de dotation consomptible ;

- « Espace - lanceurs - satellites »

S'inscrivant dans le prolongement du volet « espace » du précédent PIA, cette action contribue au financement de deux projets dans le domaine des lanceurs et des satellites de télécommunication. Elle est dotée de 50 millions d'euros correspondant en totalité à une enveloppe de dotation consomptible.

- « Recherche hospitalo-universitaire en santé »

Cette action est orientée vers des projets portés par des structures de recherche hospitalo-universitaires ayant un fort potentiel de transfert rapide vers l'industrie ou la société. Elle est dotée de 400 millions d'euros, dont 100 destinés à des apports en fonds propres dans le capital des entreprises créées dans le cadre des projets soutenus et/ou dans celui des structures porteuses, et 50 destinés à des avances remboursables/

- « Calcul intensif »

Cette action tend à permettre la mise en oeuvre de supercalculateurs offrant des performances au meilleur niveau mondial à l'horizon 2016, avec de potentielles applications civiles et militaires. Les bénéficiaires en seront des entreprises informatiques partenaires du CEA et déjà présentes sur des projets de recherche partenariale. Elle est dotée d'une enveloppe de dotation consomptible de 50 millions d'euros.

? Le programme 410 « Recherche dans le domaine de l'aéronautique » est destiné pour sa part à soutenir la recherche aéronautique. Plus précisément, le programme vise à favoriser l'émergence de technologies dites de rupture permettant de continuer à réduire l'impact environnemental de l'aviation. L'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA) disposera, dans ce cadre, d'une enveloppe de 1,22 milliard d'euros , dont la majeure partie (1,07 milliard) sera mobilisée sous la forme d'avances remboursables versées aux industriels, au titre des projets sélectionnés.


* 1 Les dotations de l'AERES seront transférées au HCERES, les moyens alloués au Haut conseil de la science et de la technologie (HCST) seront transférés au Conseil supérieur de la recherche (CSR) et ceux destinés au Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT) s'ajouteront à ceux déjà dévolus au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER).

* 2 International thermonuclear experimental reactor.

* 3 Grand équipement national de calcul intensif.

* 4 Voir les développements qui y sont consacrés infra.

* 5 Aviesan (Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé), AllEnvi (Alliance nationale de recherche pour l'environnement), Allistene (Alliance des sciences et technologies du numérique) et Ancre (Alliance nationale de coordination de la recherche pour l'énergie) et Athena (Alliance nationale des humanités, sciences humaines et sciences sociales).

* 6 Personnels affectés à des opérations de conception de prototypes ou d'installations pilotes de nouveaux produits.

* 7 Investissements d'avenir : un bilan difficile à établir, un coup de pouce à l'innovation, article de Sandrine Cassini dans Le Monde du 10 juillet 2013.

* 8 Une dotation consomptible est une dotation dont le capital peut être consommé par les bénéficiaires, alors qu'une dotation non-consomptible est une dotation dont seuls les revenus du capital peuvent être consommés par les bénéficiaires.

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