INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Au sein de la mission « Action extérieure de l'État » (4,779 Mds €, -3,1%), le programme 105 (1,852 Mds €, -1%) « Action de la France en Europe et dans le monde » est le coeur du budget du ministère des Affaires étrangères. Il porte en effet non seulement l'essentiel des emplois du Quai d'Orsay, mais aussi l'intégralité des moyens du réseau diplomatique français, le troisième dans le monde. Il finance les contributions de la France aux organisations internationales et la participation de notre pays aux opérations de maintien de la paix, dépenses sur lesquelles le ministère a peu de prise, et qui pèsent pour les 2/3 du programme.

L'année 2014 s'inscrit dans un cadrage triennal serré puisque le ministère des affaires étrangères doit « rendre » plus de 600 emplois sur la période. Dans ce contexte, les dotations budgétaires demandées, en légère baisse, à 1,8 milliard d'euros, préservent l'essentiel -à l'exception notable des crédits de coopération de défense- et affichent quelques priorités , parmi lesquelles le renforcement de la sécurité des implantations diplomatiques dans un monde sans cesse plus dangereux. L'équation budgétaire, qui repose en partie sur la cession des immeubles possédés à l'étranger, reste toutefois fragile. Notre commission déplore la baisse des crédits consacrés à la coopération de défense, principalement avec les pays africains (-4%).

Une évolution du réseau diplomatique , en germe depuis plusieurs années, est amorcée cette année avec une réallocation progressive des moyens vers les zones émergentes et l'apparition d'ambassades au format « très allégé » (un diplomate et 4 personnes) dans 13 pays.

I. UN BUDGET EN LÉGÈRE DIMINUTION, QUI PRÉSERVE L'ESSENTIEL MAIS REPOSE SUR DES FONDEMENTS FRAGILES

A. DES CRÉDITS SOUS TENSION, DES MISSIONS GLOBALEMENT PRÉSERVÉES

Le budget du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » s'établit, dans le projet de loi de finances pour 2014, en euros courants :

- à 1 844,64 M€ en autorisations d'engagement, en baisse de 12,14 M€ (-0,75%) par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 ;

- à 1 852,04 M€ en crédits de paiement, en baisse de 13,92 M€
(-0,68%) par rapport à la loi de finances initiale pour 2013.

Les économies résultent d'une baisse des dépenses obligatoires versées aux organisations internationales et, d'autre part, d'économies sur les dépenses « pilotables » (dont celles de la coopération structurelle de de défense, ce que déplore vivement votre commission). Les priorités budgétaires portent en particulier sur les dépenses de sécurisation du réseau diplomatique.

1. Un allégement bienvenu des contributions internationales

Les crédits des contributions internationales et opérations de maintien de la paix , qui représentent une part importante du budget chaque année, baissent de 5,1% (-43 M€). Cette baisse est le résultat de la révision du barème de contribution des Nations unies en décembre dernier qui a permis à la France de voir sa quote-part baisser au titre des contributions à l'ensemble des organisations du système des Nations unies. Certaines contributions ont baissé dès 2013, pour d'autres, l'impact est visible à compter de 2014. Cette baisse en volume, qui s'accompagne d'un effort important pour maintenir les budgets des organisations internationales en croissance zéro en valeur permet d'absorber une légère prévision à la hausse du taux de change (le taux de budgétisation du dollar passe de 1,32 à 1,31). Les contributions européennes sont en revanche en hausse (prise en compte de l'impact complet des retraites à verser aux anciens agents de l'UEO).

2. Une augmentation limitée des autres dépenses obligatoires

La dotation spécifique en 2013 pour l'organisation du Sommet France Afrique (7 M€) n'est pas reconduite. Toutefois, la ligne des loyers budgétaires augmente de 2,3%. Par ailleurs, une enveloppe non reconductible de 4,5 M€ est prévue afin de couvrir les dépenses liées à la tenue du sommet de la Francophonie à Dakar (3 M€) et les dépenses des réunions préparatoires à la COP 21 (1,5 M€).

Sur le programme 105, plusieurs dotations de fonctionnement poursuivent leur baisse entamée en 2013 et diminuent de 4 à 5% en 2014 : dépenses de communication (gains liés aux abonnements numériques), crédits de l'État-major (déplacements ministériels et hôtel du ministre), dépenses de protocole (accueil de personnalités, visites de chefs d'État, conférences), crédits de location en France, dépenses d'entretien lourd à l'étranger.

Les autres dépenses de fonctionnement de l'administration centrale sont stabilisées et voient leur enveloppe maintenue, le ministère des affaires étrangères mettant en avant leur caractère incompressible (frais de mission, fonctionnement courant, formation et action sociale, valise diplomatique, entretien et maintenance).

Les dépenses de fonctionnement courant des ambassades sont soumises à un certain nombre de facteurs de coût exogènes (hausse du coût de l'énergie et des services, évolution du taux de change, coût du transport aérien...) et se rigidifient. Les crédits de fonctionnement courant des postes diplomatiques augmenteront en 2014 de +0,4%.

3. Une priorité budgétaire à la sécurité

En 2013 , les crédits dévolus à la sécurisation du réseau avaient déjà été abondés, pour atteindre, dans la loi de finances initiale, 16 millions d'euros. Face à la dégradation du contexte sécuritaire, le ministère des affaires étrangères a obtenu 4,6 M€ de crédits supplémentaires pour la sécurité.

Ce budget complémentaire a permis de mener à bien :

- Des travaux de sécurité passive (3,3 M€) à Bangui, Djeddah, Alger, Annaba, Dakar, Islamabad, Karachi, Le Caire, Kaboul, et dans les postes du Sahel ;

- L'achat de 2 véhicules blindés pour le poste de Tripoli ;

- Des travaux de sécurité active pour le gardiennage des logements à Kaboul afin d'assurer la surveillance constante à l'extérieur du site et la protection des agents à Sanaa en attendant la livraison des logements en espace sécurisé sur le site de l'ambassade ;

- Des travaux pour la protection de la communauté française par l'achat de matériel de communication, l'équipement des points de regroupement, la constitution de stocks alimentaires et l'achat de kits médicaux pour les pays les plus sensibles.

Le budget 2014 marque la poursuite de l'effort budgétaire pour le financement de la sécurité des implantations du réseau diplomatique . Face à un contexte sécuritaire dégradé, la sécurité de nos emprises demeure une préoccupation majeure.

Le nombre d'ambassadeurs qui disposaient d'une protection était de 6 il y a quelques années. Ils sont aujourd'hui une vingtaine.

Au total c'est un budget de 42 millions d'euros sur le programme 105 et de 10 millions d'euros sur le compte d'affectation spéciale 723 (cessions immobilières à l'étranger) qui sera consacré à des dépenses de sécurisation des postes à l'étranger en 2014.

Ces crédits prolongeront l'effort déjà engagé au cours des dernières années pour mettre à niveau les équipements dédiés à la sécurité (sas, détecteurs magnétiques de métaux, systèmes anti-intrusions...) et déployer des moyens techniques modernes de surveillance (alarmes, vidéo surveillance, contrôle d'accès par badge).

Ils permettront notamment de lancer les travaux nécessaires, touchant souvent à la structure des immeubles, afin d'adapter la sécurité des emprises diplomatiques au niveau de la menace, notamment terroriste, alors même que celles-ci ont souvent été conçues pour symboliser l'ouverture de notre pays sur le monde. Ils permettront en particulier d'accélérer le plan de sécurisation dans la région du Maghreb et du Sahel.

Les crédits correspondants permettront notamment de couvrir les dépenses liées à des travaux lourds de sécurisation , par exemple la construction de pièces de repli, le renforcement de la protection du périmètre de l'emprise diplomatique, la mise en place de vidéo protection, de contrôle d'accès, de vitres blindées, et l'appel à des bureaux d'études.

Les principaux postes concernés par ces travaux en 2014 sont : Nouakchott (1,7 M€), Dakar (2,03 M€), Beyrouth (2,2 M€), N'Djamena (0,4 M€), Brazzaville (1 M€), Alger (0,5 M€), Téhéran (0,65 M€), Jakarta (0,5 M€), Bamako (0,5 M€), Tallinn (0,5 M€), Tunis (0,25 M€) et Bangui (1,5 M€), et, sur les crédits du compte d'affectation spéciale, la Mauritanie (2,8 M€), le Niger (1,5 M€), l'Algérie (0,8 M€), le Burkina Faso (1,4 M€), le Sénégal (0,5 M€), le Tchad (0,5 M€) et la Libye (non chiffré à ce stade).

Un budget de 18,3 M€ sera consacré à la sécurité active . La sécurité des postes diplomatiques et consulaires repose effectivement sur la présence de gardes de sécurité . Issus de la gendarmerie ou de la police nationale, les gardes de sécurité permanents sont au nombre de 439 (soit 293 gendarmes et 146 policiers). Le nombre des ETP, bien que légèrement augmenté en 2013, reste constant et fait donc l'objet de redéploiement tous les ans en fonction de l'évolution de la menace.

Des agents en mission de renfort temporaire (séjour de moins de 3 mois) sont déployés pour faire face aux foyers de crises dans certains pays et assurer la protection rapprochée ou l'accompagnement des personnes (en août 2013, 173 missionnaires étaient déployés dans nos ambassades). À ce titre une enveloppe est prévue pour couvrir les frais de voyage de ces agents (4,68 M€ en hausse de 0,28 M€), en sus de la dotation de 3,7 M€ prévue sur le titre 2, et de vigiles éventuellement recrutés dans le cadre de contrats de prestation de services.

L'INDISPENSABLE RELOCALISATION DE L'AMBASSADE DE FRANCE À TRIPOLI

À la suite de l'attentat du 23 avril et compte tenu du risque durable qui pèse sur la sécurité des agents et de nos implantations, il a été décidé de relocaliser sur un campus unique l'ambassade, la résidence et des logements pour les agents.

Sans attendre la réalisation de cette opération, les effectifs réduits à une dizaine d'agents, encadrés par des renforts de gendarmerie, ont déménagé en juillet 2013 à l'hôtel « Radisson Blu », qui offre un environnement de sécurité jugé adapté. Les autres services de l'État ont été invités à les rejoindre très prochainement.

Plusieurs missions sur place du service de la sécurité diplomatique et de la direction des immeubles ont permis de lancer le programme de l'opération et de choisir, parmi une dizaine de terrains disponibles à la location ou à la vente, un site répondant aux critères pour l'opération projetée : situation dans la ville et voisinage, potentiel de sécurisation, existence d'éléments bâtis pouvant permettre une relocalisation plus rapide.

Le site qui est retenu devra faire l'objet d'importants travaux de sécurité et de réhabilitation. Un minimum de 6 mois de travaux sont prévus à compter de la notification du marché de maîtrise d'oeuvre, l'opération se poursuivant par la suite en site occupé. Il est envisagé d'implanter dans un premier temps 45 postes de travail à la chancellerie et 25 logements pour les agents. L'opération démarre à l'automne pour une relocalisation des agents espérée en mars 2014.

Source : Ministère des affaires étrangères, réponse aux questionnaires budgétaires

4. Une diminution d'effectifs qui s'accompagne d'une augmentation de la masse salariale de 1,8 %

Sur la période triennale 2013-2015, le ministère des affaires étrangères, non prioritaire, verra ses effectifs baisser de 600. Parallèlement, les services des visas verront la création de 75 postes au cours de la période 2013-2015 (dont 28 en 2014).

La diminution des effectifs (-86 emplois sur le programme 105 en 2014, soit -1,1%) ne se traduit pas par une diminution des charges de personnel, au contraire, puisqu'elles sont en augmentation.

Pour ce qui concerne le programme 105, les dépenses de « titre 2 » devraient ainsi passer de 587,6 millions d'euros en 2013 à 608,3 millions d'euros pour l'exercice à venir.

Cette croissance montre bien la difficulté à maîtriser ce poste de dépense, du fait des pressions inflationnistes spécifiques pour les personnels basés hors de France.

Les crédits de rémunération augmentent ainsi à structure courante de 1,8% en conséquence :

- d'une augmentation des crédits de 1,7% (939,3 M€) qui s'explique par les rémunérations à l'étranger : la perte au change-prix des personnels expatriés (13 M€) et la perte au change des personnels de droit local (3 M€) constatée en 2012 est intégrée en base dans le projet de loi de finances ;

- d'une augmentation des pensions de 2,5% (+4,3 M€, soit 173 M€ en 2014).

Les crédits de rémunération au niveau global, incluant tout le ministère, s'établiront ainsi à 1 172,4 M€. Ils incluent notamment :

- à la baisse, une économie de 9,8 M€ au titre des réductions d'emplois de 2014 et de l'effet en année pleine du schéma d'emplois de 2013 ;

- à la hausse, une enveloppe de mesures catégorielles de 3,5 M€. Ces crédits seront principalement consacrés à la revalorisation indiciaire des agents de catégorie C et aux mesures consacrées aux personnels de droit local. Les autres dépenses concerneront la poursuite des mesures déjà engagées notamment en faveur des volontaires internationaux ainsi que diverses revalorisations en administration centrale ;

- à la hausse, le maintien de la norme d'évolution de la masse salariale des agents de droit local à 3,5% par an (+3 M€), afin de mieux prendre en compte l'évolution du coût de la vie, les mesures d'amélioration de la protection sociale et l'évolution des législations locales ;

- à la hausse, des crédits supplémentaires (+1,7 M€) pour les missions de renfort temporaire dans les postes les plus exposés.

Comme le fait remarquer la Cour des comptes 1 ( * ) , un agent de droit local (ADL) représente en moyenne 15% du coût unitaire d'un expatrié titulaire en 2011. Les ADL restent encore bien souvent cantonnés à des postes d'exécution, leur montée en puissance sur des postes à plus forte valeur ajoutée restant dans les faits limitée, contrairement à la pratique de certains de nos partenaires comme les Britanniques. Les diplômés ne représentent ainsi que 4% du total, et sont dans deux cas sur trois attachés de presse ou interprètes.

LES AGENTS DE DROIT LOCAL DANS LE RÉSEAU DIPLOMATIQUE

Les 5 187 agents de droit local (ADL) employés par les 176 postes diplomatiques et consulaires en mai 2013 (dernières données disponibles) sont répartis en 4 953 agents permanents et 234 agents vacataires et exercent leurs fonctions dans les domaines suivants :

- Fonctions de soutien (conducteurs automobiles, agents de service, agents d'accueil, agents de secrétariat, interprètes, personnels de résidence) : 2 401 (48,48%) ;

- Fonctions consulaires : 1 159 ADL (23,40%) dont 41% sont des agents/visas, 21% sont des agents/français de l'étranger (AFE), 38% occupant des fonctions consulaires multiples ;

- Agents des services communs de gestion (comptables, gestionnaires, employés administratifs) : 403 ADL (8,28%)

- Presse et communication (attachés de presse, webmestres, traducteurs/ interprètes) : 299 ADL (6,04%) ;

- Services de coopération et d'action culturelle et des Services scientifiques (gestionnaires, assistants, chargés de mission) : 275 ADL (5,55%).

- Fonctions de protection et de sécurité : 192 ADL/gardiens (3.88%).

- Services des Immeubles et de la logistique : 212 ADL (4,28%) dont 94 techniciens de maintenance, 93 ouvriers, 23 intendants et 2 chargés de mission.

- Santé : 5 ADL (médecins, infirmières) dans des Centres médicaux sociaux en Afrique.

Les ADL à forte qualification (diplômés de l'enseignement supérieur) représentent 4,64% du volume global des effectifs . Ils exercent des fonctions d'attaché de presse (33,91%), de traducteur/interprète (45,65%), de chargé de mission (14,35%), de webmestre, d'informaticien (3,91%) et d'infirmier/médecin (2,17%).

Source : Ministère des affaires étrangères, réponse aux questionnaires budgétaires


* 1 Référé n° 65294, février 2013

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