IV. LE BATAILLON DES MARINS-POMPIERS DE MARSEILLE : UNE PLACE ORIGINALE AU SEIN DU DISPOSITIF DE SÉCURITÉ CIVILE

L'une des deux formations militaires des services territoriaux d'incendie et de secours avec la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, le bataillon des marins-pompiers de Marseille est né, comme celle-ci, d'une catastrophe et de la volonté des pouvoirs publics de renforcer et de réorganiser le service d'incendie et de secours.

À la suite du feu qui a ravagé, le 28 octobre 1938, le grand magasin des Nouvelles Galeries sur la Canebière, le Président du Conseil, Édouard Daladier, crée, par un décret-loi du 29 juillet 1939, le bataillon des marins-pompiers de Marseille (BMPM).

A. LA SINGULARITÉ DU BATAILLON ET SES CONSÉQUENCES

Le BMPM occupe une place originale dans le dispositif de sécurité civile.

1. Des militaires placés, pour emploi, sous une autorité civile

Le BMPM est une unité de la Marine nationale à compétence territoriale placée, pour emploi, sous l'autorité du maire de Marseille et, organiquement, sous l'autorité de l'officier général, commandant l'arrondissement maritime Méditerranée.

Au cours des dernières décennies et au fil du développement de l'agglomération marseillaise, sa compétence territoriale et opérationnelle s'est progressivement élargie. Son statut a été adapté à cette nouvelle donne.

À l'initiative de notre collègue, Jean-Claude Gaudin, la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004 confère au bataillon les prérogatives d'un SDIS, « formation de la marine nationale à compétence territoriale particulière investie, à titre permanent, d'une mission de sécurité civile » 20 ( * ) .

a) Les effectifs du BMPM : une très grande disponibilité opérationnelle

Le total des effectifs est de 2 400 dont :

- 2 285 militaires ;

- 99 civils ;

- 37 réservistes opérationnels effectuant, en moyenne, 32 jours d'activité par an ;

dont 93 officiers, 42 médecins et infirmiers militaires, 1 949 marins-pompiers, 230 équipages de la flotte, 15 médecins civils, 16 personnels de la défense nationale.

Le temps de travail de ces personnels est de 2 600 heures par an et leur temps de disponibilité est de 3 020 heures annuelles. Soumis à un statut militaire, les marins-pompiers ne perçoivent pas de majorations au titre d'heures supplémentaires.

Le commandant du bataillon, le vice-amiral Jean-Michel L'Hénaff, a souligné la capacité de montée en puissance très rapide du personnel qui, au-delà de ces caractéristiques de service, traduit sa passion pour son métier.

b) Un dispositif de formation optimisé

Le dispositif de formation s'inscrit dans une logique de mutualisation.

La formation initiale et continue des marins-pompiers est assurée par l'EMPM (école des marins-pompiers de la marine) qui forme aussi les marins-pompiers des bases navales et aéronavales de la marine nationale.

Trois centres spécialisés complètent cette structure :

- le CETIS (centre d'entraînement aux techniques d'incendie et de survie) qui, en termes d'activité, est le deuxième centre mondial après celui de New-York ;

- le CMFTIS (centre municipal de formation aux techniques de premiers secours) qui forme aussi le personnel municipal ;

- l'EPTCES (école de perfectionnement aux techniques de conduite des engins de secours).

Afin d'optimiser les coûts de formation, le BMPM s'inscrit dans un système de prestations croisées avec l'ENSOSP et la BSPP.

Par ailleurs, il entretient une activité soutenue à l'international en accueillant des stagiaires étrangers et en exportant son expertise dans le cadre de missions de formation et d'audit.

Crédit photo : Bataillon de marins-pompiers de Marseille - MT Christian Valverde

2. Les missions d'un SDIS

La compétence du BMPM résulte des articles L. 2513-3 et R. 2513-5 du code général des collectivités territoriales.

Le bataillon est chargé des secours contre les incendies, périls et accidents de toute nature menaçant la sécurité publique :

- sous la direction et d'après les ordres du maire sur le territoire de la commune et dans les ports de Marseille ;

- dans les bassins et les installations du Port autonome de Marseille situés hors de la commune,

- sur les pistes, le tarmac et dans les installations techniques et les bâtiments nécessaires au fonctionnement de l'aérodrome de Marseille-Provence-Marignane, ainsi que sur les plans d'eau inclus dans la zone voisine de l'aéroport,

sous la direction de l'autorité de police compétente.

a) Un territoire limité, la prise en charge de risques de toutes natures

Le bataillon est confronté à l'ensemble des risques qui menacent un site urbanisé, industriel et naturel d'une superficie de 237,9 km 2 dont 120,3 km 2 en zone urbaine. La population du périmètre est de 867 000 habitants.

Les marins-pompiers doivent tout d'abord gérer ceux d'une grande agglomération : 47 immeubles de grande hauteur, 7 068 établissements recevant du public, des sites industriels, 19 tunnels, des voies ferrées et autoroutières, 59 parkings. Deux millions de passagers transitent chaque année par le port.

La situation géographique particulière de Marseille y ajoute les accidents en mer, ceux qui peuvent survenir dans des reliefs escarpés et rocheux, les feux de navire, les feux de forêt et les conséquences de la « transhumance » estivale.

b) Une organisation adaptée

Constitué comme un SDIS, le bataillon est organisé en deux zones
-groupements nord et sud-, 16 centres d'incendie et de secours. Une 17 ème caserne est en cours de construction afin d'adapter la couverture opérationnelle à l'évolution de la population et de l'urbanisation.

Le bataillon comprend sept sections opérationnelles spécialisées dont un détachement d'intervention héliportée, une section risques technologiques, une section dépollution spécialisée dans la lutte contre les pollutions par hydrocarbures en milieu maritime ou fluvial, sur les eaux intérieures et contre les inondations, une unité médicale d'intervention en milieu maritime (UMIMM), qui intervient en mer ou sur le littoral et trois sections respectivement consacrées à la recherche et au sauvetage en milieu urbain, aux sauvetages en milieu périlleux, et techniques. L'intégration à une de ces sections est complémentaire de l'affectation opérationnelle.

Par convention avec l'APHM (assistance publique des hôpitaux de Marseille), le BMPM intervient dans l'organisation de l'aide médicale d'urgence. Son service de santé et de secours médical (SSSM) remplit les missions d'un SMUR (service médical d'urgence) qui doit faire face aux problèmes nés de la rationalisation de l'organisation des soins en France, aux difficultés des gardes médicales, à l'insuffisance des permanences des pharmacies, aux carences ambulancières, à la fermeture des urgences après 23 heures. Par ailleurs, il contribue à la régulation médicale des appels au 15 (urgences médicales) par la présence permanente d'un médecin du bataillon, assisté d'un marin-pompier, au centre du SAMU des Bouches-du-Rhône.

• Le centre opérationnel

Le COSSIM (centre opérationnel des services de secours et d'incendie de Marseille), équivalent des CODIS, reçoit 1.000 appels chaque jour, qui donnent lieu à plus de 300 interventions quotidiennes, un départ toutes les cinq minutes. Chaque appel est traité en 1 mn 28 s. en moyenne et 10 mn 21 s. s'écoulent entre la présentation de l'appel à l'opérateur et l'arrivée du premier véhicule de secours sur les lieux dans Marseille 21 ( * ) .

Le commandant du bataillon observe qu'aujourd'hui, qu'ils soient ouvrables ou non, tous les jours de la semaine sont identiques en termes d'intervention, ce qui a conduit à adapter le service à cette nouvelle donne.

Le BMPM obéit à l'évolution générale constatée dans l'ensemble des SDIS : 82 % de son activité sont constitués par le secours à personne et le risque incendie -6 %- est en diminution.

En 2012, le bataillon a effectué 110 566 interventions.

c) Une intégration dans la cité

Le BMPM est aussi investi d'une responsabilité sociale. Il assure la prise en charge du SAMU social. Il s'implique également dans la lutte contre les violences urbaines par un travail de terrain conduit avec le réseau associatif, très puissant à Marseille, notamment dans les activités offertes aux jeunes.

Les cadets des marins-pompiers

Créée par délibération du conseil municipal de Marseille le 12 décembre 2011, cette structure s'inscrit dans une démarche de cohésion sociale et de civisme par l'apprentissage des collégiens de 14 à 16 ans aux gestes de premier secours.

Ceux-ci sont sélectionnés par un jury réunissant représentants du BMPM et des établissements scolaires.

L'année d'engagement s'achève par la participation de la promotion au défilé du 14 juillet.

D'après les éléments recueillis par votre rapporteur, cette initiative s'avère être un succès par l'engagement des cadets dont le taux d'absentéisme aux différentes activités est très faible.

3. Un partage de responsabilité perfectible avec le SDIS 13

La compétence territoriale du BMPM est assise -rappelons-le- sur le décret du 25 mars 2007 ; le SDIS 13 est compétent sur le reste de la circonscription départementale.

D'après les renseignements recueillis par votre rapporteur pour avis lors de sa visite au bataillon, la répartition actuelle des compétences entre les deux services pourrait être affinée pour mieux assurer la sécurité du port et des zones industrielles.

De même, des synergies devraient être recherchées entre les deux centres opérationnels.

Reste que, au quotidien, les relations entre le BMPM et le SDIS 13 s'inscrivent au dire de ses interlocuteurs, dans un cadre harmonieux.


* 20 cf. décret n° 2007-449 du 25 mars 2007 relatif aux missions et à l'organisation du bataillon de marins-pompiers de Marseille.

* 21 Cf rapport d'activité du BMPM 2012.

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