Avis n° 109 (2014-2015) de Mme Dominique ESTROSI SASSONE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 18 novembre 2014

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N° 109

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 novembre 2014

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2015 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VII

ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT

Par Mme Dominique ESTROSI SASSONE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Claude Lenoir , président ; Mmes Élisabeth Lamure, Delphine Bataille, MM. Alain Bertrand, Martial Bourquin, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Joël Labbé, Michel Le Scouarnec, Yannick Vaugrenard , vice-présidents ; M. Marc Daunis, Mme Valérie Létard, M. Bruno Sido , secrétaires ; MM. Gérard Bailly, Jean-Pierre Bosino, Henri Cabanel, François Calvet, Roland Courteau, Alain Duran, Mmes Frédérique Espagnac, Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, Mme Annie Guillemot, MM. Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Daniel Laurent, Philippe Leroy, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Anne-Catherine Loisier, MM. Michel Magras, Franck Montaugé, Robert Navarro, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Sophie Primas, MM. Yves Rome, Henri Tandonnet .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 2234, 2260 à 2267 et T.A. 420

Sénat : 107 et 108 à 114 (2014-2015)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le secteur de la construction connaît une crise majeure qui se répercute sur l'ensemble de notre économie. Le quotidien Les Échos, dans son édition du 21 novembre 2014, a ainsi pu titrer : « Construction de logements : un naufrage sans précédent ».

Le nombre de permis de construire a diminué de 12,6 % en 2013 pour atteindre 433 000 permis et la baisse des mises en chantier est évaluée à 4,2 %, soit seulement 332 000 logements mis en chantier.

Au premier semestre 2014, alors même que les conditions de financement sont favorables, la dégradation de la situation s'est poursuivie. Le nombre de mises en vente de logements neufs a diminué de 15,5 % et les ventes ont reculé de 2,3 %. Pour la première fois depuis 1997, le nombre de mises en chantier à la fin de l'année 2014 devrait être inférieur à 300 000.

Cette crise a également des répercussions sur l'emploi. Pour 2013, l'INSEE et la DARES estiment la diminution d'emplois salariés dans ce secteur à 25 000 et constatent la création de 6 100 nouveaux postes d'intérimaires. Toutefois, au premier trimestre 2014, 12 300 emplois intérimaires et 4 300 emplois salariés ont été perdus.

Qu'il s'agisse de l'investissement des particuliers, du nombre de construction de logements neufs, ou encore du nombre d'emplois dans le secteur de la construction, l'ensemble des indicateurs sont en berne : votre rapporteur pour avis ne peut que s'inquiéter devant les prémices d'une année 2015 qui pourrait être une « année noire » pour le secteur.

Pour faire face à cette situation et ainsi respecter l'objectif ambitieux fixé par le président de la République depuis le début du quinquennat de 500 000 logements construits par an d'ici 2017, dont 150 000 logements sociaux, objectif jamais atteint jusqu'alors, le Gouvernement a présenté deux plans de relance : le 24 juin puis le 29 août dernier.

Ces plans font suite à pas moins de trois lois pour le logement et la construction adoptées depuis un peu plus de deux ans :


• la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et du renforcement des obligations de production de logement social ;


• la loi n° 2013-569 du 1 er janvier 2013 habilitant le gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction ;


• la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové dite loi ALUR.

Constatant que les résultats n'étaient toujours pas au rendez-vous malgré cet arsenal législatif, le gouvernement a commencé à « détricoter » certaines dispositions de la loi ALUR accusées de bloquer les constructions et de ralentir les transactions immobilières. Il a ainsi décidé de ne pas appliquer les dispositions relatives à l'encadrement des loyers sauf à titre expérimental à Paris et à Lille et a prévu des mesures d'assouplissement dans le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises actuellement en cours d'examen au Parlement.

Ces plans déclinent des mesures techniques, juridiques et budgétaires, selon quatre axes :

- favoriser l'accession à la propriété notamment par le renforcement du prêt à taux zéro ;

- simplifier les règles de construction et développer l'innovation, en retenant cinquante mesures de simplification permettant de diminuer les coûts de construction et de faciliter la conception des projets ;

- soutenir la construction de logement sociaux et créer une nouvelle offre de logements intermédiaires en zones très tendues, par une application renforcée des règles relatives au minimum de logements sociaux dans les communes, par une mobilisation de l'État afin d'aider les projets immobiliers retardés après les échéances municipales, par la mise en place effective d'un cadre juridique pour le logement intermédiaire, ou encore par l'amélioration du dispositif « Duflot » ;

- renforcer la mobilisation du foncier, par l'identification de cinq projets prioritaires de construction dans chaque région.

Ces plans de relance semblent annoncer un changement dans la politique du logement par rapport à celle menée depuis plus de deux ans.

La majeure partie de ces mesures trouvent leur traduction dans le projet de loi de finances pour 2015. Votre rapporteur pour avis doute cependant qu'elles soient suffisantes pour redynamiser ce secteur et relancer la construction de logements. En effet, au-delà du choc d'offre proposé par le Gouvernement pour répondre à cette crise, votre rapporteur pour avis insiste sur la nécessité de mettre en place un environnement juridique et fiscal, stable et lisible, seul susceptible de redonner confiance aux investisseurs pour qui investir dans un logement représente un engagement important s'inscrivant dans la durée.

S'agissant plus spécifiquement des crédits de la mission « Égalité des territoires et Logement », votre rapporteur pour avis constate que l'augmentation de 75 % des crédits de la mission est le résultat d'une opération purement comptable : la budgétisation des aides au logement. Elle considère en outre que les crédits de deux des programmes de la mission (prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables ; aide à l'accès au logement) ne sont pas sincères. Elle regrette enfin le désengagement de l'État qui diminue une nouvelle fois le montant des aides à la pierre au risque de pénaliser la construction de logements sociaux.

Enfin, votre rapporteur pour avis a souhaité faire le point sur la politique du logement au regard de l'inéluctable vieillissement de notre société.

Lors d'une réunion tenue le mardi 25 novembre 2014, la Commission des affaires économiques, sur la proposition de son rapporteur pour avis, a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Égalité des territoires et logement » du projet de loi de finances pour 2015.

Elle a également adopté, sur proposition de son rapporteur pour avis deux amendements de suppression des articles 52 et 53 rattachés à la mission et émis un avis favorable à l'adoption de l'article 54 également rattaché à la mission.

I. UN BUDGET POUR RELANCER LE LOGEMENT : AU-DELÀ DU CHOC D'OFFRE, LA NÉCESSITÉ DE METTRE EN PLACE UN ENVIRONNEMENT JURIDIQUE ET FISCAL, STABLE ET LISIBLE

Le projet de loi de finances pour 2015 comprend plusieurs mesures fiscales importantes pour le secteur du logement, qui sont la traduction des plans de relance du Gouvernement.

A. LA TRADUCTION DES PLANS DE RELANCE DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2015

1. Des mesures de mobilisation du foncier

• Régime d'imposition des plus-values immobilières

L' article 4 du projet de loi de finances pour 2015 aligne à compter du 1 er septembre 2014 le régime de taxation des plus-values des terrains à bâtir sur le régime des immeubles bâtis.

L'article prévoit également un abattement exceptionnel de 30 % pour la détermination de l'assiette imposable des plus-values résultant de la cession des terrains à bâtir pour les promesses de vente signées entre le 1 er septembre 2014 et le 31 décembre 2015. L'abattement est exclu en cas de cession du terrain à des ascendants, descendants et conjoint, concubin ou partenaire lié par un PACS.

Les députés ont étendu cet abattement exceptionnel aux plus-values réalisées sur des cessions de terrains situés dans des communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants si le cessionnaire s'engage à démolir les constructions existantes puis à reconstruire de nouveaux logements dans les quatre ans . En cas de manquement à cet engagement, le cessionnaire encourt une amende égale à 10% du prix de cession.

L' article 6 bis du projet de loi de finances pour 2015 introduit par les députés en séance publique étend l'exonération de plus-values immobilières , actuellement accordée aux opérateurs sociaux, aux acquéreurs prenant l'engagement de construire, à proportion de la part de logements sociaux réalisés dans le programme .

• Libération du foncier par l'aménagement des droits de mutation à titre gratuit

L' article 6 du projet de loi de finances pour 2015 incite à libérer le foncier et à construire des logements par l'aménagement des droits de mutation à titre gratuit . Les contribuables seront exonérés temporairement des droits de mutation à titre gratuit en cas :

- de donation entre vifs de terrains à bâtir intervenue entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2015, si le donataire s'engage à y construire dans les quatre ans un logement neuf ;

- de donation entre vifs d'immeubles neufs d'habitation jamais occupés, ni utilisés.

Le montant de l'abattement varie en fonction du lien de parenté. Les députés ont ajouté une pénalité complémentaire égale à 15 % de la somme exigible en cas de non-respect des conditions.

2. Des mesures pour favoriser l'amélioration de l'habitat

• Crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE)

L' article 3 du projet de loi de finances pour 2015 réforme le crédit d'impôt développement durable, renommé « crédit d'impôt pour la transition énergétique » avec l'objectif d'accélérer et d'amplifier les travaux de rénovation énergétique des bâtiments.

Le taux du crédit d'impôt est porté à 30% pour toutes les dépenses éligibles réalisées par les ménages, entre le 1 er septembre 2014 et le 31 décembre 2015. Jusqu'à présent, pour les contribuables dont les revenus dépassaient un certain seuil, la réduction était conditionnée à la réalisation de dépenses dans le cadre d'un « bouquet de travaux ». Cette condition est supprimée.

Par ailleurs, de nouveaux équipements seront éligibles : les compteurs individuels pour le chauffage et l'eau chaude sanitaire dans les copropriétés et les bornes de recharges des véhicules électriques. Les députés ont complété cette liste en ajoutant les équipements de protection des parois vitrées ou opaques contre les rayonnements solaires.

• Application du taux réduit de TVA

L' article 7 du projet de loi de finances pour 2015 applique le taux réduit de 5,5 % de la TVA aux opérations d'accession sociale à la propriété réalisées dans les quartiers prioritaires de la ville et dans une bande de 300 mètres autour de ces quartiers. En séance, les députés ont étendu le dispositif aux opérations réalisées jusqu'en 2024 dans les quartiers faisant l'objet d'une convention passée avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).

L' article 7 ter du projet de loi de finances pour 2015, introduit en séance publique par les députés, étend l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % prévue pour des travaux de rénovation et d'amélioration réalisés dans les logements locatifs sociaux existants, à deux hypothèses supplémentaires : l'agrandissement ou la surélévation de bâtiments abritant des logements sociaux pour en produire de nouveaux et la transformation en logements sociaux de logements rachetés par des bailleurs sociaux.

3. Des mesures pour favoriser l'accès au logement

• « Dispositif Pinel »

L' article 5 du projet de loi de finances pour 2015 assouplit le dispositif fiscal de soutien à l'investissement locatif intermédiaire dit dispositif « Duflot ».

Le dispositif « Duflot » permet aux personnes, qui construisent ou acquièrent un ou deux logements neufs ou assimilés et s'engagen t à le louer au minimum neuf ans en respectant des conditions de plafonds de loyer et de ressources du locataire, de bénéficier d'une réduction d'impôt de 18 % étalée sur neuf ans.

Dans les départements et collectivités d'outre-mer, le taux de réduction de l'impôt est fixé à 29 % et les plafonds de loyer et de ressources du locataire sont adaptés à la situation locale.

Pour être éligibles à la réduction d'impôt, les logements doivent atteindre un certain niveau de performance énergétique et doivent être situés dans des communes de zones tendues (A et B1, B2 à titre dérogatoire).

En 2013, seulement 35 000 logements ont ainsi été financés pour un coût estimé à 1 150 millions d'euros.

Pour augmenter l'attractivité du dispositif pour les investisseurs et ainsi faciliter la construction de nouveaux logements, le Gouvernement propose des aménagements. Les investisseurs pourront désormais opter pour un engagement de location d'une durée de six ans ou de neuf ans, pouvant être prolongé pour une durée comprise entre trois et six ans en fonction de la durée initiale choisie. En contrepartie, ils bénéficieront d'avantages fiscaux proportionnels : 12 % pour un engagement de six ans, 18 % pour un engagement de neuf ans . Ces nouvelles dispositions s'appliqueront rétroactivement à compter du 1 er septembre 2014.

• Renforcement du PTZ

L'article 41 rattaché à la seconde partie du projet de loi de finances pour 2015 prolonge le prêt à taux zéro jusqu'en 2017 et l'étend à l'achat de logements anciens à réhabiliter en commune située en zone rurale.

Actuellement, sont éligibles au PTZ :

- les opérations de construction ou d'acquisition d'un logement neuf : la construction d'une maison individuelle, avec ou sans acquisition du terrain, l'acquisition d'un logement neuf (appartement ou maison) construit ou vendu en l'état futur d'achèvement et n'ayant jamais fait l'objet d'une occupation, l'acquisition et l'aménagement à usage de logements de locaux non destinés à l'habitation ou leur transformation seule, qui sont assimilés à de la construction neuve ;

- les opérations d'acquisition d'un logement existant avec ou sans travaux. Depuis 2012, ces opérations doivent avoir lieu dans le cadre de la vente du parc social à ses occupants ;

- les acquisitions réalisées dans le cadre d'un contrat de location-accession ou du dispositif de prêt social de location accession (PSLA).

En outre, pour être éligible, les logements neufs doivent respecter une condition de performance énergétique.

Sont bénéficiaires du PTZ les personnes physiques qui n'ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux années qui précèdent l'offre et qui respectent un plafond de ressources déterminé en fonction de la composition du ménage et de la localisation du logement.

Le Gouvernement a souhaité développer le dispositif et propose :

- de prolonger le PTZ jusqu'au 31 décembre 2017 ;

- d'étendre le PTZ à l'achat de logements anciens dans les centres des bourgs ruraux, sous condition de travaux . D'après, Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, 6 000 communes seraient concernées. Lors de l'examen en séance, les députés ont précisé que le logement devrait être situé « dans les communes n'appartenant pas à une agglomération comptant au moins 10 000 habitants, connaissant un niveau de vacance du parc de logements supérieur à la moyenne nationale et comprenant un nombre minimal d'équipements recensés par l'Institut national de la statistique et des études économiques prévu dans des conditions fixées par décret » et que l'acquéreur devrait présenter lors de l'acquisition un programme de travaux d'amélioration.

Par ailleurs, la condition de performance énergétique est supprimée.

Ces dispositions viennent en complément de dispositions entrées en vigueur le 1 er octobre 2014, qui ont relevé dans les zones peu ou moyennement tendues les plafonds de ressources, les quotités de prêts et les plafonds d'opération.

Selon le ministère du logement, l'ensemble de ces nouvelles dispositions devraient augmenter le nombre de bénéficiaires du PTZ pour atteindre 80 000 ménages par an contre 44 000 aujourd'hui.

Votre rapporteur pour avis observe que cet élargissement du PTZ vise à lutter contre la désertification rurale. Il s'agit donc plus d'une politique d'aménagement des territoires que d'une politique d'accès au logement. Constatant que cette disposition n'aura pas de conséquence sur la crise du logement en zones tendues, votre rapporteur pour avis regrette que le dispositif ne soit pas concentré uniquement sur les zones tendues où les besoins en logement sont les plus criants.

• Prolongation de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pour la construction de logements sociaux

En séance publique, les députés ont décidé de prolonger jusqu'en 2018 l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour la construction de logements sociaux (article 42 bis ), traduisant ainsi l'un des engagements pris par l'État dans le cadre de l'Agenda HLM 2015-2018.

Ils ont également décidé de prolonger à partir de 2016 et jusqu'en 2020 l'abattement de 30 % de cette taxe pour les logements sociaux situés dans les quartiers prioritaires . À titre transitoire, la nouvelle géographie prioritaire n'étant pas encore connue, les députés ont prévu que, pourront bénéficier de l'abattement en 2015 ceux qui en avaient bénéficié en 2014 (article 42 ter ).

B. AU-DELÀ DU CHOC D'OFFRE, LA NÉCESSITÉ DE METTRE EN PLACE UN ENVIRONNEMENT JURIDIQUE ET FISCAL STABLE ET LISIBLE

1. Des mesures de bon sens mais qui tardent à se mettre en place


• Les professionnels du secteur, ont indiqué à votre rapporteur pour avis, qu'ils étaient globalement satisfaits des mesures proposées par le Gouvernement, qu'il s'agisse de mesures financières comme de mesures techniques et juridiques mais, qu'ils s'inquiétaient des délais de mise en oeuvre de ces mesures alors que la dégradation économique du secteur se poursuit comme le montrent les chiffres présentés en introduction.

Votre rapporteur pour avis considère que les mesures proposées ne sont pas dénuées d'intérêt mais regrette cependant que le Gouvernement ait mis autant de temps pour réagir aux effets d'une crise qui dure depuis plusieurs années .


• Votre rapporteur pour avis a souhaité compléter les mesures proposées par le Gouvernement en faisant deux propositions concernant l'usufruit locatif.

L'article 13 du code général des impôts prévoit depuis 2013, que la première cession à titre onéreux d'usufruit temporaire est imposable dans la catégorie des revenus fonciers si le cédant est un contribuable soumis à l'impôt sur le revenu, et non sous le régime des plus-values immobilières. Cette disposition, introduite afin de lutter contre les montages abusifs qui visent à convertir des revenus fonciers en plus-values immobilières, affecte par ricochet la prorogation d'usufruits locatifs sociaux. Les nus-propriétaires risquent de ne pas utiliser cette possibilité, qui semble être assimilée à une cession, et de choisir une autre voie de sortie : la vente du bien, la mise en location ou la récupération du bien pour y habiter.

La cession et la prorogation de l'usufruit de logements en faveur d'un organisme HLM ou d'une SEM ne relevant pas de la logique de tels montages abusifs, votre rapporteur pour avis a proposé que la cession de l'usufruit de logements à un organisme HLM ou à une SEM ne relève pas du régime d'imposition des revenus fonciers.

Par ailleurs, pour compléter et diversifier les modes d'intervention des bailleurs sociaux et des investisseurs institutionnels dans le secteur du logement intermédiaire, votre rapporteur pour avis a proposé que l'usufruit locatif soit utilisé pour susciter une offre locative de logements intermédiaires dans les zones tendues.

Le recours à l'usufruit locatif constituerait un mode de financement supplémentaire permettant de mobiliser l'épargne, à la fois celle des particuliers et celle des investisseurs institutionnels, au service du financement de la construction de logements locatifs sociaux et intermédiaires, tout particulièrement dans les zones tendues.

Les investisseurs institutionnels peuvent actuellement bénéficier de la taxe sur la valeur ajoutée au taux réduit de 10 % pour la construction de logements intermédiaires réalisés sous certaines conditions énumérées à l'article 279-0 bis A du CGI (implantation du logement en zone tendue, intégration dans un ensemble immobilier comprenant au moins 25 % de surface de logements sociaux, application d'un plafond de ressources pour la location). Afin d'attirer de nouveaux investisseurs, votre rapporteur pour avis propose d'étendre l'application de ce taux réduit lorsqu'il s'agit de cessions de droits démembrés c'est-à-dire que l'usufruitier est un bailleur social ou un organisme collecteur de la PEEC et que le nu-propriétaire est un investisseur autre, sous réserve que les conditions précitées soient respectées.

Lors de sa réunion du 19 novembre 2014, votre commission pour avis a adopté deux amendements proposés par votre rapporteur pour avis. Toutefois, en séance publique, le Sénat n'a pas suivi votre commission pour avis.

2. Des mesures ponctuelles qui ne s'insèrent pas dans le cadre d'une vision stratégique globale

Comme l'ont unanimement indiqué à votre rapporteur pour avis les représentants des professionnels de l'acte du bâtir entendus, la situation dans le secteur du bâtiment ne pourra réellement s'améliorer que si la confiance revient , ce qui suppose de la part du Gouvernement qu'il inscrive son action dans la durée permettant ainsi la mise en place d'un environnement fiscal et juridique stable et lisible . Or, pour votre rapporteur pour avis, les choix du Gouvernement ne vont pas dans ce sens.


• Votre rapporteur pour avis a ainsi constaté que plusieurs mesures proposées dans le présent projet de loi de finances ne s'inscrivaient pas dans la durée . Tel est le cas :

- de l'abattement exceptionnel de 30 % pour la détermination de l'assiette imposable des plus-values résultant de la cession des terrains à bâtir qui concerne les promesses de vente signées entre le 1 er septembre 2014 et le 31 décembre 2015 ;

- de l'exonération temporaire des droits de mutation à titre gratuit qui s'applique pour les donations entre vifs de terrains à bâtir sous condition de construction de logement, intervenues entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2015 ;

- du crédit d'impôt pour la transition énergétique qui s'applique aux dépenses relatives à un immeuble achevé depuis plus de deux ans, payées entre le 1 er septembre 2014 et le 31 décembre 2015.


• Pour votre rapporteur pour avis, les incohérences du Gouvernement nuisent également au retour de la confiance . Ainsi, en prévoyant dans le présent projet de loi de finances un abattement exceptionnel sur les plus-values de cessions sur les terrains à bâtir, le Gouvernement a pris le contre-pied de la position qu'il avait retenue ces deux dernières années au cours desquelles il avait tenté de supprimer de tels abattements.

De même, quelques semaines après l'annonce en août du plan de relance, le Gouvernement a indiqué que le projet de loi de finances rectificative pour 2014 comporterait une mesure renforçant la taxation sur les résidences secondaires, contredisant ainsi la promesse de pause fiscale annoncée par le président de la République, M. François Hollande.

Votre rapporteur pour avis partage l'analyse de notre collègue député M. Olivier Carré, selon qui « cette taxe « week-end » n'est pas susceptible de fluidifier le marché. En effet une hausse de 20 % de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, qui pourrait s'élever dans certains cas à une centaine d'euros, n'incitera en rien à louer ces biens. Il s'agit seulement d'une taxe supplémentaire sur des logements déjà très fiscalisés ».

Enfin, dernier exemple : alors que le crédit d'impôt pour la transition énergétique est renforcé et que le Gouvernement s'engage pour une transition énergétique pour la croissance verte, celui-ci ne donne pas à l'Agence nationale pour l'habitat (Anah) chargée de mettre en oeuvre le programme « Habiter mieux » des moyens à la hauteur de ses missions.

Anah : des crédits qui ne sont pas à la hauteur des enjeux

Plusieurs missions sont confiées à l'Anah : la lutte contre la précarité énergétique ; la lutte contre l'habitat indigne et dégradé ; le traitement des copropriétés fragiles ou en difficulté ; l'adaptation des logements à la perte d'autonomie et l'amélioration des structures d'hébergement.

Or, pour mettre en oeuvre ces missions, l'Anah ne bénéficie pas de moyens à la hauteur des enjeux.

Ressources de l'agence hors opérations d'ordre budgétaire et hors aides propres des collectivités territoriales (en euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire

En effet, la principale ressource de l'agence provient de la vente aux enchères des quotas carbone, dont le montant est incertain comme l'a souligné la Cour des comptes en novembre 2013, en estimant qu'il s'agissait d'une « source potentielle d'instabilité financière pour l'agence, lorsque, comme en 2013, les cours de marché connaissent de fortes variations rendant très incertaines les prévisions de recettes inscrites au budget . » La sous-évaluation des recettes qui en a résulté a eu des conséquences préjudiciables conduisant l'agence faute de moyens et devant la multiplication des demandes d'aide dans le cadre du programme « Habiter mieux » à limiter l'attribution des aides aux ménages très modestes.

Le 7 octobre dernier, compte tenu du caractère incertain et fragile de cette ressource, le conseil d'administration de l'agence a autorisé une augmentation des engagements de l'agence de 45 millions d'euros. L'article 15 du projet de loi de finances prévoit d'augmenter les ressources issues de la taxe sur les logements vacants de 21 millions à 51 millions d'euros. En outre, Action Logement devrait contribuer au financement de l'Anah à hauteur de 50 millions d'euros.

Votre rapporteur pour avis considère que la fragilité des ressources de l'Anah fragilise les territoires sur les modalités de leur engagement dans des politiques pluriannuelles de résorption de l'habitat indigne, de lutte contre la précarité énergétique, de développement des loyers maîtrisés (particulièrement en zone tendue et dans les « secteurs déficitaires SRU ») ou encore d'adaptation du logement au handicap et au vieillissement. Elle regrette que le gouvernement ne soit pas en mesure de trouver une solution pérenne permettant d'assurer le financement de l'agence, et considère qu'une remise à plat des ressources de l'agence et de ses missions est inévitable.


• Enfin, pour votre rapporteur pour avis, les annonces du Gouvernement non suivies d'effet décrédibilisent son action et plus généralement celle des élus. Ainsi, on ne peut comprendre le retard pris par le Gouvernement dans la mise en oeuvre des mesures de simplification pourtant annoncées en juin dernier. Sur les cinquante mesures annoncées, seules dix ont été mises en oeuvre. Les professionnels entendus par votre rapporteur pour avis ont ainsi donné l'exemple de l'augmentation du délai de validité des permis de construire qui bien qu'annoncé en août dernier par le Premier ministre n'est toujours pas entrée en vigueur.

S'agissant de la libération du foncier d'État , le Gouvernement avait annoncé sa volonté de montrer l'exemple en cédant son patrimoine dans des conditions financières attractives. Or, votre rapporteur pour avis remarque que la Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier (Cnauf) dont la création était prévue par l'article 3 de la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, n'a été mise en place qu'en juillet dernier.

Votre rapporteur pour avis constate sur cette question qu'en réalité peu de terrains sont disponibles et que des opérateurs, tel Réseau ferré de France, sont, comme a pu en témoigner notre collègue Martial Bourquin lors de l'audition de la ministre du logement devant la commission des affaires économiques, peu enclins à brader leurs terrains, dès lors qu'ils doivent faire face par ailleurs à un budget contraint.

Enfin, votre rapporteur pour avis invite le Gouvernement à la prudence dans ses annonces , certaines d'entre elles pouvant avoir des effets désastreux sur la situation économique. Tel fut le cas de l'annonce en juillet dernier de la réforme du crédit d'impôt sur les dépenses énergétiques sans autre précision qui a conduit à une baisse très importante de l'activité des artisans, les particuliers ayant décidé de repousser la réalisation de leurs travaux dans l'attente des nouvelles mesures.

II. UNE TRÈS FORTE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE LA MISSION « ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT » EN RAISON DES CHANGEMENTS DE PÉRIMÈTRE

Pour le projet de loi de finances pour 2015, le périmètre de la mission « Égalite des territoires et logement » a été modifié, le programme 147 « Politique de la ville » étant désormais rattaché à la mission « Politique des territoires », en raison de la création du Commissariat général à l'égalité des territoires.

Les crédits de la mission « Égalité des territoires et logement » sont en très forte augmentation en 2015 , de 75 % en autorisations d'engagement (13,6 milliards d'euros) et de 76 % en crédits de paiement (13,4 milliards d'euros).

ÉVOLUTION EN 2015 DES CRÉDITS DE LA MISSION
« ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT »
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programme

LFI pour 2014

PLF 2015

Evolution

LFI pour 2014

PLF 2015

Evolution

177

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 315, 8

1 375, 4

4,53%

1 315,8

1 375, 4

4,53%

109

Aide à l'accès au logement

5 104,7

10 985, 1

115,19%

5 104,7

10 985,1

115,19%

135

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

576, 1

522, 3

-9,34%

401

288, 7

-28,01%

337

Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires

804

777, 1

-3,34%

804

777, 1

-3,34%

total

7 800, 8

13 660, 1

75,11%

7 625, 8

13 426, 5

76,07%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015.

Votre rapporteur pour avis dénonce une augmentation des crédits de la mission en trompe l'oeil. En effet, cette forte augmentation résulte de la prise en charge par le budget de l'État du financement des aides personnelles au logement en lieu et place de la branche famille de la sécurité sociale.

Cette évolution se traduit de façon différenciée selon les crédits des programmes de la mission :

- augmentation des crédits du programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » ;

- doublement des crédits du programme 109 « Aides à l'accès au logement » ;

- diminution des crédits des programmes 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et 337 « Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires ».

A. MALGRÉ UNE AUGMENTATION DE 4,5 %, LES CRÉDITS DU PROGRAMME 177 « PRÉVENTION DE L'EXCLUSION ET INSERTION DES PERSONNES VULNÉRABLES » DEMEURENT INSUFFISANTS

Le programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » regroupe les crédits de la politique d'hébergement et d'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées, soit 4,3% des crédits de la mission.

Les crédits sont en augmentation de 4,5 % tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement soit 1,3 milliards d'euros. Toutefois cette augmentation masque une évolution différente des crédits au sein des actions : les crédits de l'action « Prévention de l'exclusion » et de l'action « Hébergement et logement adapté » augmentent respectivement de 5,1 % et de 4,6 % tandis que ceux affectés à l'action « Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale » diminuent fortement de 7,3 %.

Évolution des crédits du programme
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2014

PLF 2015

Evolution

LFI 2014

PLF 2015

Evolution

Prévention de l'exclusion

56,2

59,1

5,18%

56,2

59,1

5,18%

Hébergement et logement adapté

1 242,4

1 300,4

4,67%

1 242,4

1 300,4

4,67%

Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale

17,1

15,8

-7,31%

17,1

15,8

-7,31%

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 315,8

1 375,4

4,53%

1 315,8

1 375,4

4,53%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015.

1. L'augmentation des crédits de l'action « Prévention de l'exclusion »

Les crédits de l'action « Prévention de l'exclusion » , qui représente 4,3 % des crédits du programme augmentent de 5,1 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

L'action finance des actions :

- de prévention des situations de rupture pour des personnes sans domicile fixe âgée ou en situation de handicap ;

- d'accès aux droits, d'information, d'aide à l'insertion et de prévention de l'exclusion, en direction notamment des gens du voyage.

La réforme de la gestion des aires dédiées aux gens du voyage entrera en vigueur en 2015. L'aide qui était jusque-là forfaitaire sera désormais fonction du nombre de places et de leur taux d'occupation afin, selon le gouvernement, « d'inciter les collectivités à rendre leurs aires plus attractives ».

2. La sous-budgétisation des crédits de l'action « Hébergement et logement adapté »

L'action « Hébergement et logement adapté » représente l'essentiel des crédits de ce programme (94,5 %).

Ces crédits, en augmentation de 4,6 % par rapport à 2014 , financent quatre types d'interventions : la veille sociale, l'hébergement d'urgence, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale et le logement adapté.

a) La veille sociale

Au titre de la veille sociale , sont financés les services d'accueil et d'orientation (SIAO) chargés de coordonner l'action des structures contribuant à l'accueil, l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans domicile fixe, le numéro vert « 115 », les SAMU sociaux et les accueils de jour.

En 2015, 89,11 millions sont prévus pour le financement de la veille sociale. Ces crédits connaissent une hausse de 3% à périmètre constant 1 ( * ) . Ces crédits permettront notamment « de poursuivre la consolidation des SIAO en 2015, outils fondamentaux de coordination et d'observation sur les territoires, ainsi que la convergence vers une organisation commune à l'ensemble des départements, sous forme d'un SIAO unique intégrant le 115 ». Au 31 décembre 2013, on dénombrait 1 499 059 demandes d'hébergement ou de logement intermédiaire. 942 776 demandes ont été traitées par les SIAO (63 %), 442 014 ont reçu une réponse positive (47 %).

b) Le dispositif d'hébergement d'urgence et les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS)

1 012 millions sont consacrés au dispositif d'hébergement d'urgence et aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS).


• Le nombre de places en hôtel et en hébergement d'urgence a fortement augmenté ces quatre dernières années, comme le montre le tableau ci-dessous.

Évolution entre 2010 et 2013 du nombre de places
en CHU, en hôtel et en CHRS

2010

2011

2012

2013

Évolution 2012/2013

CHU

18 593

19 766

22 091

28 692

+ 29,8 %

Hôtels

13 948

16 235

20 727

25 496

+ 23 %

CHRS

39 525

39 346

39 142

39 145

+ 0,00 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015.


• S'agissant de l'hébergement d'urgence , les crédits augmentent de nouveau très fortement cette année ( 21 % contre 17 % l'an dernier) et atteignent 389 millions.

Ces crédits permettent le financement des nuitées d'hôtel . Au 31 décembre 2013, le nombre de places en hôtel avait augmenté de 23 % par rapport à 2012 en raison :

- d'une part, de l'augmentation du nombre de familles avec des enfants en bas âge ;

- et, d'autre part, de l'augmentation de personnes présentant une « situation administrative particulièrement complexe » (demandeurs de titre de séjour en cours, déboutés de la demande d'asile ou de demande de titre de séjour).

En raison de l'insuffisance des places dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) et du principe d'accueil inconditionnel, les demandeurs d'asile sont accueillis dans les structures d'accueil et d'hébergement généralistes. Les demandeurs d'asile peuvent ainsi être pris en charge : à l'arrivée sur le territoire dans l'attente d'une prise en charge par le dispositif spécialisé, pendant l'instruction du dossier si les capacités d'accueil spécialisées sont insuffisantes, à la sortie du dispositif, en cas de rejet de la demande.

Selon un rapport 2 ( * ) sur l'hébergement et la prise en charge financière des demandeurs d'asile de l'inspection générale des finances, de l'inspection générale des affaires sociales et de l'inspection générale de l'administration, les déboutés du droit d'asile occuperaient environ 20 % des places d'hébergement d'urgence généraliste , pouvant même atteindre dans certains cas 60 %, et ce au détriment, il faut en convenir, d'une population fragile, en situation de précarité créant de fait une inégalité pour les plus démunis. D'après les réponses au questionnaire budgétaire, le coût de la prise en charge par le dispositif d'hébergement généraliste est estimé à une cinquantaine de millions d'euros.

Des partenariats entre le SIAO et les plateformes d'accueil des demandeurs d'asile se sont développés pour faciliter le passage entre dispositif généraliste et dispositif spécialisé lorsque la personne a obtenu une autorisation provisoire de séjour ou que sa demande a été rejetée.

Le Gouvernement dans la détermination du montant des crédits a anticipé les effets de la réforme du droit d'asile dont il espère qu'elle diminuera les tensions sur le dispositif généraliste. Le projet de loi réformant l'asile, déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale, le 23 juillet dernier prévoit plusieurs mesures tendant à :

- instituer une nouvelle procédure d'examen plus rapide des demandes ;

- mettre en place un dispositif d'hébergement « contraignant » permettant que le demandeur d'asile soit affecté dans une autre région que celle où il se présente ;

- généraliser le modèle du centre d'accueil de demandeurs d'asile ;

- prévoir la possibilité d'ordonner à une personne dont la demande d'asile a été définitivement rejetée de quitter la place qu'elle occupe dans un centre d'hébergement.

Votre rapporteur pour avis, considère, comme notre collègue Philippe Dallier, rapporteur spécial de la Commission des finances, que cette réforme permettra seulement de libérer plus rapidement des places dans les CADA et augmentera le nombre de déboutés présents dans les hébergements d'urgence généraliste.

Votre rapporteur pour avis invite le Gouvernement à adopter une position claire à l'égard des déboutés du droit d'asile , car, comme le soulignaient les auteurs du rapport précité des trois inspections générales, c'est cette absence de choix - éloignement ou régularisation - qui conduit « inéluctablement à une dérive rapide de l'hébergement d'urgence généraliste ».

En prenant en compte « l'impact attendu de la réforme du droit d'asile » qui n'a pas encore été examinée par l'Assemblée nationale et dont Mme Sylvia Pinel, ministre du logement a elle-même reconnu devant la commission élargie de l'Assemblée nationale le 29 octobre dernier que son effet « sur le volume de demandeurs d'asile [était], à ce jour, impossible à quantifier », votre rapporteur pour avis estime que le Gouvernement a nécessairement sous-évalué les crédits nécessaires à l'hébergement d'urgence .


• S'agissant des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), les crédits sont stables et atteignent 623 millions pour 2015.

Ces crédits sont destinés :

- au financement des places d'hébergement d'urgence au sein de ces structures (56,2 millions) ;

- au financement des places d'insertion et de stabilisation (549,2 millions) ;

- au financement d'autres activités et notamment des mesures d'accompagnement favorisant la sortie vers le logement dans des délais satisfaisants (17,6 millions).

En 2013, le nombre de CHRS s'est stabilisé pour atteindre 39 145 places répartis dans 875 centres sur l'ensemble du territoire.

c) Les dispositifs développant des modes de logement adapté

199,4 millions sont consacrés aux dispositifs développant des modes de logement adapté , destinés aux personnes qui ne sont pas assez autonomes pour occuper un logement ordinaire et qui ont besoin d'une solution alternative à l'hébergement.

En 2013, seules 7 575 places ont été effectivement créées par rapport à l'objectif de 15 500 places de logement accompagné (14 500 en intermédiation locative et 1 000 en pensions de famille).

Quatre dispositifs sont financés :

- l' aide aux organismes qui hébergent temporairement des personnes défavorisées ne pouvant être hébergées en CHRS ;

- les maisons relais et les pensions de famille . Fin 2013, on dénombrait 12 702 places, soit une augmentation de 9,2 % par rapport à 2012. Les crédits sont stables afin de pérenniser le nombre de places ouvertes ;

- l' intermédiation locative . Le dispositif permet que des associations et des organismes de logement social louent des logements dans le parc privé qu'ils sous-louent ensuite à des ménages défavorisés à tarif social. Constatant que 5 300 places avaient été créées au lieu des 6 500 attendues, et que les opérateurs préféraient les maisons-relais, le gouvernement a revu à la baisse le montant des crédits ;

- les résidences sociales et l'aide à la gestion locative sociale. Au 31 décembre 2013, on dénombrait 97 425 places. Selon les réponses au questionnaire budgétaire, la moitié de ces places est issue de la transformation de foyers de travailleurs migrants et l'autre moitié de la transformation de foyers de jeunes travailleurs et de création de résidences sociales.

À compter de 2015, le dispositif d'accompagnement vers et dans le logement qui vise à permettre une meilleure prise en charge des personnes dans l'accès au logement et ainsi éviter un passage en hébergement, n'est plus financé par le présent programme mais entièrement par le Fond national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL).

Ce fonds finance des actions d'accompagnement des personnes considérées comme prioritaires et auxquelles un logement doit être attribué au titre du DALO mais aussi des personnes éprouvant des difficultés particulières pour accéder à un logement ou pour s'y maintenir.

Le fonds bénéficie d'une ressource unique dont le montant est irrégulier : le produit de liquidation des astreintes prononcées contre l'État dans le cadre du DALO. Interrogé par votre rapporteur pour avis sur la suppression du financement de ce dispositif d'accompagnement par le présent programme, le Gouvernement a indiqué que les astreintes devraient continuer d'augmenter, ce qui compensera l'arrêt du financement par le budget de l'État.

3. La baisse des crédits de l'action « Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale »

L'action « Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale » représente 1,2 % des crédits de ce programme. Ces crédits sont en baisse de 7,31 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Cette action permet en particulier le financement d'une quarantaine d'association « têtes de réseaux » qui interviennent dans le domaine de la lutte contre les exclusions et le maintien du lien social. Elle finance par ailleurs des actions d'animation, d'expérimentation, d'évaluation d'impact des politiques publiques menées et d'élaboration des outils de gouvernance.

B. UNE TRÈS FORTE AUGMENTATION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 109 « AIDES À L'ACCÈS AU LOGEMENT » QUI NE TRADUIT AUCUNE VOLONTÉ POLITIQUE

Ce programme regroupe les crédits dédiés au financement des aides à la personne, à l'information relative au logement, au financement de la garantie des risques locatifs et à la mise en oeuvre du DALO.

Les crédits du programme sont en très forte augmentation de 115 % pour des raisons purement comptables et qui ne traduisent en rien un choix politique. En effet, l'augmentation des crédits résultent, d'une part, de la budgétisation des aides personnelles au logement actuellement financées par la branche famille de la sécurité sociale et, d'autre part, des conséquences de la crise économique .

Évolution en 2015 des crédits du programme (en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2014

PLF 2015

Evolution

LFI 2014

PLF 2015

Evolution

Aides personnelles

5 087, 6

10 967, 8

115,58%

5 087, 6

10 967, 8

115,58%

Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté

8, 09

8

-1,17%

8, 0

8

-1,17%

Sécurisation des risques locatifs (libellé modifié)

9

9, 3

3,33%

9

9, 3

3,33%

Aide à l'accès au logement

5 104, 7

10 985, 1

115,19%

5 104, 7

10 985, 1

115,19%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015.

a) L'action « Aides personnelles »

L'action « Aides personnelles », qui représente 99,8 % des crédits de ce programme, finance la contribution de l'État au financement des aides personnalisées au logement (APL) et des allocations logement à caractère social (ALS).

À partir de 2015, l'État a décidé de budgétiser les aides au logement, ce qui explique que les crédits s'élèvent à 10 967 millions d'euros, en augmentation de 5,9 millions (+115,5 %). En réalité à périmètre constant , les crédits en autorisations d'engagement et en crédits de paiement augmentent seulement de 3,1 %, soit une augmentation de 157 millions.

La contribution de l'État au FNAL prend la forme d'une subvention d'équilibre. Pour 2015, le montant de cette contribution tient compte :

- du transfert à l'État de la charge du financement de la part des aides au logement actuellement financées par la sécurité sociale, prévu par l'article 28 du projet de loi de finances ;

- du transfert à la sécurité sociale de la part de la recette du prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement actuellement affectés au FNAL, prévu par l'article 28 du projet de loi de finances ;

- de la perte de recettes de cotisations employeurs résultant de la mise en oeuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

En 2013, 13 milliards d'euros ont été versés à 5,1 millions de bénéficiaires de l'APL et de l'ALS. Entre 2012 et 2013, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 1,8 % pour les bénéficiaires de l'APL et de 1,3 % pour les bénéficiaires de l'ALS, le montant global des prestations pour ces deux allocations a quant à lui augmenté de 4,25 %.

Évolution du nombre de bénéficiaires des aides au logement (en milliers)

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Évolution 2012/2013

ALF

1 234

1 255

1 244

1 263

1 351

1 356

1 335

1 332

1 323

1 317

-0,45 %

APL

2 586

2 567

2 482

2 496

2 620

2 619

2 621

2 681

2 724

2 773

+1,8 %

ALS

2 234

2 252

2 198

2 216

2 345

2 364

2 353

2 388

2 374

2 405

+1,3 %

Total

6 054

6 074

5 924

5 975

6 316

6 339

6 309

6 401

6 421

6 496

+1,1 %

Source : Estimation à partir des statistiques annuelles au 31 décembre de la CNAF et de la CCMSA. Nombres arrondis au millier de bénéficiaires. La répartition par parc est estimée pour la CCMSA.

Évolution du montant total des prestations versées (en milliards d'euros)

2004

2005

2006

2007

2008

2008

2010

2011

2012

2013

Evolution

ALF

3,148

3,478

3,605

3,675

3,908

4,074

4,155

4,213

4,240

4,369

+3 %

APL

6,266

6,172

6,235

6,203

6,574

6,720

6,868

7,144

7,415

7,767

+4,7 %

ALS

4,171

4,154

4,302

4,363

4,715

4,821

4,905

5,000

5,075

5,254

+3,52 %

Total

13,585

13,804

14,142

14,241

15,197

15,615

15,928

16,357

16,730

17,390

+3,9 %

Source : Éléments statistiques et comptables (y compris 13 ème balance) émanant des caisses des régimes général et agricole. Comptabilité en décaissements. Chiffres arrondis au million le plus proche.

Le Gouvernement prévoit que les dépenses d'aides au logement devraient continuer d'augmenter en 2015 en raison de la persistance de la paupérisation des ménages, et ce malgré l'hypothèse d'une stabilisation du nombre de chômeurs qui n'est pas acquise.

Toutefois, dans ses estimations de dépenses, le Gouvernement a pris en compte deux économies :

- d'une part, une économie de 7 millions d'euros pour l'État résultant d'une réforme de l'APL accession prévue à l'article 52 du projet de loi de finances. Cette réforme a toutefois été reportée d'une année par les députés (voir article 52 rattaché) ;

- d'autre part, une économie de 65 millions d'euros résultant de l'indexation sur l'inflation de l'abattement forfaitaire sur les revenus pris en compte dans le calcul des aides.

Au cours des deux dernières années, la présente action a bénéficié de dotations complémentaires lors des lois de finances rectificatives (259,4 millions en 2012 et 268,25 millions en 2013). L'année 2014 ne déroge pas à la règle puisque le projet de loi de finances rectificative pour 2014 prévoit une ouverture de crédits de 69,8 millions en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au titre des besoins de financement des aides personnelles au logement. Au regard de ces précédents, votre rapporteur pour avis se demande si les montants retenus pour 2015 bien que revus à la hausse seront suffisants .

Plus généralement, si votre rapporteur pour avis reconnaît que l'octroi des aides au logement est indispensable pour nombre de nos concitoyens sans lesquelles ils ne pourraient avoir accès au logement dans des conditions décentes, elle s'interroge sur la soutenabilité pour le budget de l'État à court terme du versement de ces aides , devant l'augmentation continue du nombre de bénéficiaires et du montant de ces prestations .

Votre rapporteur pour avis souhaite donc qu'une réflexion soit rapidement menée sur les modalités d'attribution de ces aides, réflexion qui devra intégrer les conclusions d'une étude 3 ( * ) de l'INSEE de novembre 2014 sur l'impact des aides au logement sur le secteur locatif privé, montrant l'existence d'un effet inflationniste de ces aides sur les loyers.

Enfin, outre la contribution de l'Etat, le FNAL bénéficiera d'une contribution de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), à hauteur de 300 millions au lieu des 150 millions prévus initialement . Votre rapporteur pour avis constate qu'Action Logement est de plus en plus souvent sollicité pour financer des dépenses éloignées de sa mission d'investisseur dans la construction de logements sociaux, intermédiaires et en accession à la propriété, telles que la participation au financement du FNAL ou de l'ANAH. C'est pourquoi votre rapporteur pour avis invite le gouvernement à trouver d'autres moyens de financement pour ces organismes et proposera de supprimer l'augmentation de la contribution d'Action Logement (voir article 53 rattaché).

b) Les actions « Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté » et « Sécurisation des risques locatifs »


• L'action « Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté » représente 0,1 % des crédits du programme.

Cette action finance en particulier l'Agence nationale pour l'information sur le logement (Anil) et 79 agences départementales d'information sur le logement (Adil) qui jouent un rôle fondamental dans l'accès au droit au logement des personnes et des familles les plus modestes.

En 2013, 843 000 consultations ont été dispensées par les Adil. Environ 62 % des consultations concernaient la location, 10 % l'accession et 6 % le financement des travaux d'amélioration de la performance énergétique dans les logements existants.


• L'action « Sécurisation des risques locatifs » anciennement « Garantie de risques locatifs (GRL) » représente 0,1 % des crédits du programme.

Cette action finance la part de l'État dans le financement de la « GRL 2 ». L'État n'intervient pas directement auprès des compagnies d'assurance mais rembourse l'année suivante à l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL) par l'intermédiaire du fonds « GURL » (garantie universelle du risque locatif).

La dotation est en légère augmentation , le Gouvernement tablant sur une diffusion progressive de la garantie au sein du parc locatif privé.

La garantie universelle des loyers (GUL), introduite dans la loi Alur, aura vocation à remplacer la GRL. Le Premier ministre a annoncé en août dernier que la GUL serait recentrée sur les jeunes salariés et les personnes en situation précaire. Votre rapporteur pour avis constate qu'à la suite des annonces du Premier ministre la GUL semble avoir déjà perdu une partie de son caractère « universelle » et suivra attentivement la mise en oeuvre de cette disposition.

C. BAISSE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 135 « URBANISME, TERRITOIRES ET AMÉLIORATION DE L'HABITAT »

Sont regroupés dans le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat », les crédits relatifs au logement et à la construction et ceux relatifs à l'urbanisme et à l'aménagement.

Comme l'an dernier, les crédits diminuent fortement, de près de 9 % en AE et de plus de 28 % en CP, afin de contribuer à l'effort de redressement des comptes publics.

Évolution en 2015 des crédits du programme 135
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2014

PLF 2015

Evolution

LFI 2014

PLF 2015

Evolution

Construction locative et amélioration du parc

451, 6

405

-10,33%

276, 8

171, 4

-38,08 %

Soutien à l'accession à la propriété

4, 1

3, 8

-5,00%

4, 1

3, 8

-5,00 %

Lutte contre l'habitat indigne

6, 5

4, 8

-26,18%

6, 5

4, 8

-26,18 %

Réglementation, politique technique et qualité de la construction

51, 2

48, 8

-4,64%

51, 1

48, 8

-4,54 %

Soutien

17

14, 8

-12,59%

17

14, 8

-12,59 %

Urbanisme et aménagement

45, 6

44, 9

-1,65%

45, 4

44, 9

-1,21 %

Grand Paris

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

576, 1

522, 3

-9,34%

401, 09

288, 7

-28,01 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015.

1. L'action « Construction locative et amélioration du parc »

L'action « Construction locative et amélioration du parc » qui rassemble 77,5 % des crédits de ce programme, financent les actions de développement et d'amélioration du parc locatif social en métropole hors opérations de rénovation urbaine et, les investissements nécessaires à l'accueil des gens du voyage.

Les crédits de cette action diminuent de 10,33 % en autorisations d'engagement et de 38,08 % en crédits de paiement .


• Les crédits consacrés aux aides financières au développement et à l'amélioration du parc locatif social dites « aides à la pierre » sont en baisse. Les crédits de paiement diminuent de 105 millions d'euros par rapport à 2014, pour s'établir à 160 millions d'euros. Les autorisations d'engagement diminuent de 47 millions et atteignent 400 millions d'euros . Le Gouvernement souligne que la baisse des crédits de paiement sera cependant compensée comme l'an dernier par le fonds de concours issus du fonds géré par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) , à hauteur de 216 millions d'euros.

Votre rapporteur pour avis a souhaité illustrer cette baisse des aides à la pierre par un exemple concret : le cas de la métropole Nice Côte d'Azur.

Un exemple concret de la baisse des aides à la pierre :
le cas de la métropole Nice Côte d'Azur

Pour 2013, la métropole bénéficiait de 9 894 000 € d'aide à la pierre, l'État versant 7 038 000 € et Action Logement 2 856 000 €, pour un objectif de 1 020 logements à produire, soit un ratio au logement de 9 700 €.

Pour 2014, la métropole bénéficiait de 10 220 000 € d'aide à la pierre, l'État versant 7 420 000 € et Action Logement 2 800 000 €, pour un objectif de 1 400 logements à produire, soit un ratio au logement de 7 300 €, soit une baisse de 24,7 %.

Pour 2015, l'enveloppe globale devrait diminuer de 11 %, les PLUS ne bénéficieront pas de subventions de l'État et l'enveloppe d'Action Logement pour surcoût foncier (règle du 1 € pour 1 € - Action Logement/État) devrait être abandonnée. En conclusion, une baisse du ratio au logement d'au moins 30 % est attendue, soit environ 5 000 € par logement.

Votre rapporteur pour avis dénonce le choix du Gouvernement de diminuer les aides à la pierre alors même que les collectivités territoriales ne sont pas en capacité de compenser cette baisse en raison de la diminution importante de leurs dotations, qui les oblige en particulier à réduire leurs investissements dans le logement social.

Il en est de même pour les organismes HLM qui mobilisent pour compenser cette baisse des aides à la pierre de plus en plus de fonds propres au risque d'être fragilisés à un moment crucial où leurs efforts doivent porter sur la production et la construction.


• Les crédits subventionnent des opérations de construction et d'acquisition financées par des prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI), des prêts locatifs à usage social (PLUS) et des prêts locatifs à usage social construction-démolition (PLUS -CD).

En 2013, ont été financés 117 065 logements sociaux (hors zone Anru) ainsi répartis : 29 734 PLAI (+ 27% par rapport à 2012),  54 788 PLUS (+ 12,4 % par rapport à 2012) et  32 543 PLS.

Pour 2015, l'objectif gouvernemental de production de 150 000 logements sociaux doit se traduire par la construction de 135 000 logements sociaux en métropole, 8 000 au titre de la reconstitution de l'offre Anru et 7 000 dans les départements d'outre-mer. La production de logements sociaux se décomposerait en 34 000 logements financés par des PLAI, 66 000 par des PLUS et 35 000 par des prêts locatifs sociaux.

Votre rapporteur pour avis s'interroge sur le maintien d'objectifs identiques à ceux de l'an dernier alors qu'ils ne seront vraisemblablement pas atteints, comme ce fut le cas en 2013 (117 065 logements) et propose de retenir des objectifs certes moindres mais susceptibles d'être remplis.

En 2015, en raison des baisses des aides à la pierre, le Gouvernement a choisi de porter son effort sur les PLAI. Comme l'indique le projet annuel de performance, les crédits seront destinés à financer à 98,5 % des PLAI et la surcharge foncière. Aucun crédit ne sera affecté à des logements financés par des PLUS . Le montant affecté à la surcharge financière , qui doit permettre de compenser le coût du foncier dans les zones les plus tendues, diminue de 9,3 % . Votre rapporteur pour avis souligne que si les PLAI sont nécessaires, les PLUS le sont également.


• Le fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux est alimenté par la majoration des prélèvements sur les budgets des communes qui n'ont pas atteint le taux de logement social sur leur territoire.

En 2014, 1 141 communes dont 59 situées dans les départements d'outre-mer n'ont pas atteint leur objectif de mixité sociale. 761 communes étaient soumises à un taux de 25 % de logements sociaux et 380 communes à un taux de 20 % de logements sociaux.

Sur les 51,5 millions prélevés en 2014, 40,4 millions (+65 %) sont reversés aux bénéficiaires suivants :

- 16,3 millions aux établissements publics de coopération intercommunale délégataires des aides à la pierre ;

- 17 millions aux établissements publics fonciers d'État ;

- 4,8 millions aux établissements publics fonciers locaux ;

- 2,3 millions aux fonds régionaux d'aménagement urbain et fonds régional d'aménagement foncier et urbain.

Le fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux bénéficiera de 11,1 millions (+73 %) issus de ce prélèvement.

En septembre dernier, lors du congrès de l'Union sociale pour l'habitat, Manuel VALLS, Premier ministre a confirmé que les obligations prévues par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, et renforcées par la loi Alur seraient respectées. Ainsi, dès le 1 er janvier 2015, la multiplication par cinq des pénalités devrait être appliquée aux communes qui ne respectent pas leurs obligations. Votre rapporteur pour avis souhaite rappeler que les communes dans certains territoires sont confrontées à des contraintes multiples qu'on ne peut ignorer : baisse de la ressource financière, absence de disponibilité foncière, Plan Prévention des Risques (PPR) et contraintes réglementaires diverses et variées, incapacité de l'appareil productif à poursuivre un tel mouvement.

La multiplication par deux à trois des « objectifs SRU » triennaux reviendrait dans certains territoires à ne plus produire que du logement locatif social et à construire bien plus que ces dernières années toutes productions confondues (promotion publique et privée).


• En outre, cette action finance à hauteur de 5 millions d'autorisations d'engagement et de 11,4 millions de crédits de paiement, des subventions aux collectivités territoriales pour la réalisation ou la réhabilitation d'aires d'accueil des gens du voyage . Fin 2013, 74 % des places prescrites par les schémas départementaux pour l'accueil des gens du voyage avaient été financées.

2. Les autres actions

• L'action « Soutien à l'accession à la propriété »

Les crédits de cette action qui recouvrent les crédits relatifs à la politique de soutien de l'État à l'accession sociale à la propriété et notamment les frais de commission versées à la société de gestion du fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété diminuent de 5 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

• L'action « Lutte contre l'habitat indigne »

Les crédits de cette action diminuent de 26,18 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ils financent : les diagnostics et contrôles après travaux (0,8 millions), les travaux d'office en cas de carence du propriétaire (3 millions), l'hébergement ou le relogement des occupants en cas de défaillance des propriétaires (0,5 millions)

La loi Alur a mis en place la possibilité pour le préfet, le maire ou le président d'un EPCI de prononcer des astreintes à l'encontre du propriétaire qui n'aurait pas exécuté dans le délai prescrit les mesures et travaux visant à remédier à l'insalubrité du logement. Ce système doit permettre d'obliger le propriétaire à réaliser les travaux sans attendre que l'État ou la collectivité territoriale ne se substituent à lui. Or, faute de publication du décret d'application, ce dispositif n'est toujours pas en vigueur.

Votre rapporteur pour avis regrette que le Gouvernement ait ici encore anticipé les conséquences de la mise en oeuvre de cette nouvelle procédure en diminuant les crédits destinés aux travaux d'office en cas de carence du propriétaire de 4,09 millions à 3 millions.

• L'action « Réglementation, politique technique et qualité de la construction »

Les crédits de cette action diminuent de 4,64 % en autorisations d'engagement et de 4,54 % en crédits de paiement

Les crédits de cette action financent en particulier :

- le contentieux de l'habitat (mise en oeuvre du droit au logement opposable, recours de bénéficiaires de l'APL), pour 34,5 millions en autorisations d'engagement et en crédits de paiement ;

- le contentieux de l'urbanisme (contentieux liés aux refus de permis de construire) ;

- les observatoires du logement pour 4,8 millions en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Répondant à une question sur les effets des règles relatives au désamiantage sur les opérations de rénovation sur site occupé , Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, lors de son audition par la commission le 19 novembre dernier, a indiqué que l'amiante engendrait un surcoût dans les travaux de réhabilitation, évalué à 2,3 milliards d'euros rien que pour le logement social. Elle a ajouté que cette situation nécessitait un plan interministériel sur les actions d'information, de formation, de recensement, d'animation interprofessionnelle à mettre en place par l'État et que des recherches étaient menées pour recourir à des procédés moins coûteux.

Sensibilisée à cette question, la Caisse des dépôts et consignations a annoncé la mise en place d'un prêt amiante. Pour financer les travaux liés à la résolution du problème de l'amiante, les bailleurs pourront bénéficier d'un prêt au taux de 0,5 %, pour un montant maximum de 10 000 € par logement.

• L'action « Soutien »

Les crédits de cette action diminuent de 12,59 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ils financent la mise en oeuvre des politiques d'aménagement, de l'urbanisme et du logement, et en particulier, les dotations relatives au Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, en partie la Délégation interministérielle pour l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées et les commissions de médiation pour la mise en oeuvre du DALO.

• L'action « Urbanisme et aménagement »

Les crédits de cette action diminuent de 1,65 % en autorisations d'engagement et de 1,21 % en crédits de paiement. Ils financent les agences d'urbanisme, les réseaux professionnels intervenant dans les secteurs de l'urbanisme et les architectes-conseils et paysagistes-conseils missionnés sur les projets les plus importants et les plus complexes.

D. BAISSE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 337 « CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DU LOGEMENT ET DE L'ÉGALITÉ DES TERRITOIRES »

Ce programme regroupe les crédits dédiés au financement de la masse salariale du ministère du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Ces crédits diminuent de 3 %

L'action « Urbanisme, aménagement, logement et habitat » regroupe les personnels mettant en oeuvre les programmes « Aide à l'accès au logement » et « Urbanismes, territoires et amélioration de l'habitat », qui sont en majorité affectés dans les services déconcentrés.

Le projet annuel de performance précise que la fin de la mise à disposition des services de l'État auprès de certaines collectivités territoriales, à compter du 1 er juillet 2015 permettra de poursuivre les suppressions d'emplois.

E. LES DÉPENSES FISCALES RESTENT ESSENTIELLES POUR LA MISE EN oeUVRE DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT

La dépense fiscale associée à la mission « Égalité des territoires et Logement » est aussi importante que les crédits qui sont alloués à celle-ci. Elle est estimée par le Gouvernement à 12 539 millions d'euros pour 2015 en baisse de 6 %.

Ces dépenses sont réparties entre 52 mesures parmi lesquelles : les taux réduits de TVA et les réductions d'impôt pour l'investissement locatif.

Dépenses fiscales principales sur impôts d'État (en millions d'euros)

Programme

2014

2015

Evolution

177

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

45

45

0 %

109

Aide à l'accès au logement

99

101

+2 %

135

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

13 204

12 393

-6 %

337

Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires

-

-

--

total

13348

12539

-6 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015.

Environ un tiers des dépenses fiscales sont dues à la TVA réduite sur les travaux de logements de plus de deux ans.

En outre, les dépenses fiscales dédiées au logement comprennent :

- les avantages fiscaux liés au développement et à l'amélioration du parc locatif social ;

- le prêt à taux zéro pour les primo-accédants ;

- l'éco-prêt à taux zéro ;

- les dispositifs en faveur de l'investissement locatif. Certains dispositifs d'investissement locatif comme le dispositif « Robien » ou « Scellier » bien qu'éteints, ont encore des conséquences fiscales, qui ont cependant vocation à diminuer.

III. LA NÉCESSAIRE ADAPTATION DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT AU VIEILLISSEMENT DE LA SOCIÉTÉ

A. LE CONSTAT DU VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION FRANÇAISE

Au 1 er janvier 2014, 18 % de la population française a plus de 65 ans et 9% plus de 75 ans.

Ce vieillissement de la population a vocation à se poursuivre dans les prochaines décennies. En 2060, 32,1 % de la population aura plus de 60 ans et 16,2 % aura plus de 75 ans. Entre 2007 et 2060, le nombre de français âgés de plus de 75 ans devrait avoir doublé, et le nombre des plus de 85 ans pourrait être multiplié par quatre.

Projection de population par grand groupe d'âge en 2060 (en %)

Population

au 1 er janvier

(en millions)

Moins de

20 ans

20 ans à

59 ans

60 ans à

74 ans

75 ans

ou plus

2015

64,5

24,2

51,0

15,5

9,3

2020

66,0

23,9

49,6

17,0

9,4

2025

67,3

23,5

48,4

17,2

10,9

2030

68,5

23,0

47,5

17,1

12,3

2035

69,7

22,6

46,7

17,1

13,6

2040

70,7

22,4

46,6

16,3

14,7

2050

72,3

22,3

45,9

15,9

16,0

2060

73,6

22,1

45,8

15,9

16,2

Champ : France métropolitaine.

Source : Insee, projections de population 2007-2060.

Lorsqu'on les interroge, une grande majorité de Français souhaitent rester à son domicile le plus longtemps possible. On constate d'ailleurs une entrée de plus en plus tardive dans les structures d'hébergement de personnes âgées et les personnes sont accueillies dans les établissements pour personnes dépendantes vers 85 ans en moyenne.

Dans leur rapport sur l'adaptation du logement et l'autonomie des personnes âgées, la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) et l'Anah soulignent que « le logement constitue la clef de la vie quotidienne des personnes âgées et donc un levier d'action pour la préservation de leur autonomie. (...) Si le logement n'est plus adapté (...), il peut tout aussi bien être un facteur aggravant de fragilité, devenir générateur d'exclusion et annoncer un type particulier de dépendance. »

D'après ce rapport, seulement 6 % du parc de logement serait adapté aux personnes âgées de plus de 65 ans. Selon une étude du Conseil d'analyse stratégique 4 ( * ) , 2 millions de ménages auraient besoin d'adapter leur logement et 830 000 pourraient bénéficier des aides de l'Anah.

Votre rapporteur pour avis note que la France doit faire des progrès. Selon la mission interministérielle sur l'adaptation de la société française au vieillissement de sa population 5 ( * ) , « notre pays peine à se doter d'une véritable stratégie globale définie, pilotée et voulue par l'Etat contrairement à 3 autres pays européens, le Royaume-Uni, la Suède et le Danemark ».

B. DÉVELOPPEMENT DES STRUCTURES D'HÉBERGEMENT

Deux grands types de structures accueillent les personnes âgées : les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) qui assurent une prise en charge globale de la personne et les établissements hébergeant des personnes âgées, également appelés logements-foyers , qui offrent aux personnes âgées un domicile avec des services facultatifs.

D'après une étude de la DREES de février 2014 6 ( * ) , on comptait au 31 décembre 2011, 10 481  hébergements pour personnes âgées, dont 7 752 établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) et 2 233 logement-foyers. Ces établissements disposent de 719 810 places, 592 900 pour les EHPAD et 108 340 pour les logements-foyers.

Le ministère du logement apporte un soutien financier à toutes les structures sociales et médico-sociales, médicalisées ou non dès lors qu'elles constituent un domicile pour les personnes. Ainsi, 10 247 logements ont été financés en 2013 en EHPA et en EHPAD. La plupart de ces opérations sont financées avec des prêts locatifs sociaux (PLS), qui présente l'avantage de permettre aux résidents de bénéficier de l'aide personnalisée au logement. En 2012, environ 606 millions d'euros d'aides personnelles au logement ont été versées aux résidents de plus de 60 ans en foyer.

L'Assemblée nationale a adopté le 17 septembre dernier le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, qui comporte un volet sur le logement des personnes âgées. S'agissant des logements-foyers , le projet de loi :

- précise le cadre juridique de ces logements désormais appelés « résidence autonomie » . Ces résidences autonomie auront pour mission de prévenir la perte d'autonomie et devront proposer à leurs résidents des prestations minimales qui selon le projet de loi « concourent à la prévention de la perte d'autonomie ». Un forfait autonomie sera mis en oeuvre par ces établissements pour financer les actions de prévention ;

- prévoit l'intégration de ces logements dans le répertoire des logements des bailleurs sociaux, afin d'améliorer la connaissance du parc locatif social ;

- met en cohérence les dispositions applicables aux relations contractuelles entre l'établissement d'hébergement de personnes âgées et le résident, contenues dans le code de l'action sociale et des familles et le code de la construction et de l'habitation.

Le rapport annexé au projet de loi prévoit en outre un plan d'aide à l'investissement à destination des logements-foyers pour personnes âgées autonomes mis en oeuvre par la CNAV.

Enfin, le projet de loi prévoit également :

- la prise en compte du vieillissement par les programmes locaux de l'habitat, afin de favoriser une meilleure programmation de l'offre de logement adapté ;

- la modification des dispositions applicables aux résidences services soumises au régime de la copropriété, quant à la définition des prestations non individualisables pour lesquelles la personne paye indépendamment ou non de sa consommation effective et quant au choix de l'exploitant de la résidence.

C. DES MESURES POUR FAVORISER LE MAINTIEN À DOMICILE

Le maintien à domicile des personnes âgées, souhaité par nombre de nos concitoyens, nécessite souvent que le logement fasse l'objet de travaux d'adaptation ou d'accessibilité. Ces travaux peu couteux en termes d'investissement permettraient en retour de faire des économies sur les dépenses de santé ou sur le recours à des aides à domicile et auraient également des conséquences positives sur l'activité du secteur de l'artisanat.

Pour le parc privé , l'Anah est un interlocuteur privilégié pour les aides à la réalisation des travaux d'amélioration. L'agence finance les travaux mais aussi l'accompagnement social, technique et financier. En 2013, 9 184 logements (contre 6 508 en 2012) ont bénéficié de 28,7 millions d'euros (contre 20,2 millions en 2012) de subventions pour la réalisation de travaux d'adaptation à la perte d'autonomie, soit une subvention moyenne de 3 121 euros par logement. Ce sont ainsi 41 % de logements en plus qui ont bénéficié d'une subvention. En outre, des partenariats entre l'Anah et les acteurs locaux permettent de repérer les ménages qui se trouvent dans une situation de dépendance.

La Fédération française du bâtiment a indiqué, à votre rapporteur pour avis, que la question de la rapidité dans la mise en oeuvre des travaux nécessaires à l'autonomie de la personne était centrale, ce qui supposait de réfléchir sur les modalités de montage des dossiers et sur la mise en place d'un dispositif de préfinancement. Votre rapporteur pour avis se félicite donc que le conseil d'administration de l'Anah du 19 mars 2014 ait permis d'appliquer depuis le 1 er juin 2014 et jusqu'au 31 décembre 2015 le régime des avances aux travaux d'autonomie pour les propriétaires occupants.

La mission interministérielle sur l'adaptation de la société française au vieillissement de sa population proposait également de mettre en place un guichet unique , d'instaurer un diagnostic Habitat-Mobilité, de développer un système d'avance des frais ou encore de créer un label certifiant les artisans formés spécifiquement à l'adaptation des logements. Sur ce dernier point, la CAPEB, entendue par votre rapporteur pour avis, a indiqué avoir mis en place un label Handibat délivré aux artisans ayant suivi une formation aux questions de l'accessibilité des logements.

En outre, depuis le 1 er janvier 2005 et jusqu'au 31 décembre 2014, le contribuable occupant peut bénéficier d'un crédit d'impôt pour les dépenses d'installation ou de remplacement d'équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées acquittées au titre de la résidence principale en application de l'article 200 quater A du code général des impôts. Les députés ont adopté un amendement dans le présent projet de loi de finances afin de prolonger ce dispositif jusqu'en 2017, en précisant toutefois que seuls pouvaient bénéficier de la mesure les contribuables propriétaires, locataires ou occupants à titre gratuit d'un logement situé en France, affecté à leur habitation principale (article 44 octies ). Le rapport de M. Luc BROUSSY précité proposait en revanche que ce crédit d'impôt soit transférable aux descendants lorsqu'ils ont financé les travaux.


• S'agissant du parc social , les organismes HLM sont mobilisés sur cette question et développent des stratégies globales d'adaptation de leur parc.

L'USH réfléchit à une offre de logements autonomes se distinguant d'un logement classique mais aussi des logements-foyers et des EHPAD et qui permettrait le maintien à domicile de la personne.

Les organismes HLM peuvent d'ores et déjà bénéficier d'un dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés bâties pour la réalisation de travaux d'accessibilité ou d'adaptation des logements pour des personnes en situation de handicap en application de l'article 1391 du code général des impôts. Ce dispositif est de plus en plus souvent utilisé par les bailleurs.

Afin de faciliter l'accès au parc social, la loi Alur prévoit que les dépenses engagées par le ménage pour l'hébergement du conjoint dans un EHPAD sont prises en compte pour apprécier les conditions d'attribution du demandeur au regard de ses ressources.

Par ailleurs, la loi du 25 mars 2009 permet à tout locataire du parc HLM de sous-louer une partie de son logement à une personne de moins de trente ans. Toutefois, cette mesure d'encouragement de la mixité générationnelle demeure peu mise en oeuvre.

Votre rapporteur pour avis souhaite également mettre en avant le projet mené par la Caisse des dépôts et consignation de viager mutualisé , consistant dans la mise en place d'un fonds, financé exclusivement par la Caisse des Dépôts et d'autres investisseurs institutionnels, qui acquerrait les appartements de particuliers, âgés de 70 ans, propriétaires de leur bien.


• Sur le plan budgétaire, l'étude d'impact du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement prévoit que 84 millions d'euros seront consacrés au volet adaptation de la société au vieillissement. Ces crédits seraient ainsi répartis :

- 40 millions d'euros versés par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) à l'Anah pour que cette dernière puisse financer la mise en place d'un plan pour l'adaptation de 80 000 logements privés sur la période 2014-2017  (dépenses sur deux ans) ;

- 40 millions d'euros pour financer un plan d'aide à l'investissement en faveur des résidences autonomie (dépenses sur deux ans) ;

- 4 millions d'euros pour le fonds de garantie du micro-crédit (dépenses sur trois ans) ; ce dispositif permettra que les personnes qui ont difficilement accès au crédit et dont le reste à charge demeurerait excessif puissent procéder à des travaux d'adaptation.

Votre rapporteur pour avis sera très attentive à ces mesures lors de l'examen par le Sénat du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 52 - Réforme du dispositif des APL accession

Commentaire : cet article a pour objet de réformer le dispositif de l'APL accession.

I. Le dispositif

Depuis 2004, le dispositif de l'APL accession (APL et ALS) est moins utilisé, le nombre de bénéficiaires de ce dispositif étant passé de 350 000 en 2004 à 208 000 en 2013. Alors que 694 millions d'euros y étaient consacrés en 2004, seuls 387 millions d'euros y sont dédiés en 2013.

Montant des prestations versées au titre des aides personnelles au logement depuis 2004 (en milliards d'euros)

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

APL accession

0,594

0,496

0,433

0,363

0,352

0,323

0,296

0,297

0,295

0,290

ALS accession

0,100

0,087

0,096

0,094

0,088

0,094

0,093

0,092

0,093

0,097

ALF accession

0,308

0,563

0,577

0,559

0,580

0,587

0,559

0,552

0,539

0,526

Total accession

1,002

1,146

1,106

1,016

1,020

1,004

0,948

0,941

0,927

0,913

Source : Eléments statistiques et comptables (y compris 13e balance) émanant des caisses des régimes général, agricole et spéciaux. Comptabilité en décaissements. Chiffres arrondis au million le plus proche.

Nombre de bénéficiaires des aides personnelles au logement
depuis 2004 (en milliers)

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

APL accession

282

246

206

184

190

172

155

152

150

141

ALS accession

68

66

62

65

74

74

70

69

68

67

ALF accession

330

323

311

316

352

338

319

316

306

286

Total accession

680

635

579

565

616

584

544

537

524

494

Source : Statistiques annuelles de la CNAF et de la CCMSA. Répartition par parc estimée pour la CCMSA

Le Gouvernement propose de modifier le dispositif des APL accession en prévoyant que l'aide personnalisée au logement (APL) et l'allocation de logement social (ALS) seront désormais attribuées uniquement lorsque les ressources du ménage diminuent de plus de 30 % par rapport à leur niveau lors de la signature du prêt ou du contrat de location-accession. Le dispositif jouerait comme une assurance « contre les accidents de la vie ». Le Gouvernement considère qu'il en résultera une économie de 7 millions pour l'État en 2015.

À l'issue d'un large débat en séance publique, les députés ont adopté, avec l'avis favorable du Gouvernement, deux amendements identiques de M. Michel PIRON (UDI) et plusieurs de ses collègues et de M. Marcel ROGEMONT (SRC) et plusieurs de ses collègues afin de retarder d'une année l'entrée en vigueur de la réforme, M. François BROTTES, président de la commission des affaires économiques s'étant engagé à créer rapidement un groupe de travail sur les aides au logement.

II. La position de votre commission

Les professionnels du secteur de la construction ont été unanimes pour considérer que la suppression du dispositif de l'APL-accession était un signal négatif envoyé aux Français et qu'elle aurait des conséquences sur le nombre de construction. L'Union des maisons françaises estime ainsi entre 15 et 20 000 le nombre d'opérations qui pourraient ne pas être réalisées. La CAPEB estime que 30 % des primo-accédants seraient privés de cette aide.

D'un point de vue strictement budgétaire, cette réforme n'a aucun sens. En effet, le dispositif APL « Accession » (APL et ALS) coûte 387 millions d'euros par an à l'État, alors qu'en comparaison les prestations d'aides aux locataires représentent 12,1 milliards d'euros. Selon le Gouvernement, l'économie pour l'État devait être de 7 millions d'euros, 19 millions pour l'ensemble des administrations en 2015, et atteindre en 2017 environ 150 millions d'euros. Les économies ainsi réalisées seront donc faibles alors même que cette réforme aura sans aucun doute un impact significatif sur la solvabilité de nombreux ménages modestes souhaitant accéder à la propriété.

En outre, votre rapporteur pour avis estime que l'économie attendue par l'État pourrait être réduite en raison de la situation de certains ménages qui ne pouvant trouver les moyens de solvabiliser leur projet, renonceront à devenir propriétaire et percevront l'APL locative dont le montant est supérieur à l'APL-accession.

Enfin, votre rapporteur pour avis déplore cette nouvelle mesure de pénalisation des familles, qui remet en cause la possibilité qu'offraient les APL accession de pouvoir traiter à égalité deux familles modestes faisant des choix différents - l'une de devenir propriétaire, l'autre de rester locataire.

Pour ces raisons, votre commission pour avis a adopté, à l'initiative de votre rapporteur pour avis, un amendement de suppression du présent article.

Article 53 - Participation des employeurs à l'effort de construction au financement du Fonds national d'aide au logement

Commentaire : cet article augmente le montant du prélèvement exceptionnel sur la participation des employeurs à l'effort de construction au bénéfice du Fonds national d'aide au logement (FNAL).

I. Le dispositif

Le FNAL assure le financement :

- de l'aide personnalisée au logement (APL) ;

- de l'allocation de logement à caractère social (ALS) ;

- de la prime de déménagement ;

- des dépenses de gestion relatives aux trois prestations précitées ;

- des dépenses du Conseil national de l'habitat.

Pour assurer ces missions, le FNAL bénéficie des ressources prévues à l'article L. 351-7 du code de la construction et de l'habitation, actuellement constituées :

- des dotations de l'État qui assure l'équilibre du fonds ;

- du produit des cotisations employeurs prévu à l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale ;

- des contributions des régimes de prestations familiales équivalents aux montants des prestations qui auraient été versées par eux au titre de l'allocation de logement familiale et de la prime de déménagement ;

- de la part du produit des prélèvements de solidarité mentionnés à l'article 1600-0 S du code général des impôts.

En outre, le FNAL perçoit depuis 2013, une contribution exceptionnelle prélevée sur la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) .

Alors que la participation d'Action Logement devait s'élever à 300 millions d'euros en 2014 et à 150 millions d'euros en 2015, le présent article maintient cette participation à 300 millions d'euros pour 2015.

Désormais les ressources du FNAL seront les suivantes :

- le produit des cotisations employeurs prévu à l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale ;

- une contribution exceptionnelle de la PEEC à hauteur de 300 millions d'euros en 2015 ;

- une contribution de l'État qui tient compte de la baisse des cotisations employeurs en raison du pacte de responsabilité et de solidarité et de la budgétisation des aides.

II. La position de votre commission

Les représentants de l'Union des entreprises et des salariés pour le logement-Action logement ont indiqué à votre rapporteur pour avis que les discussions se poursuivaient avec l'État sur leur participation financière aux politiques publiques.

Décomposition des financements demandés à Action Logement par le Gouvernement au bénéfice des politiques publiques
(en millions d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

ANRU

900

850

850

850

700

500

FNAL

300

300

100

ANAH

50

50

50

TOTAL

1 200

1 200

1 000

900

700

500

Source : Action Logement

Ils ont rappelé que leur vocation première était d'être un fond d'investissement destiné à la construction de logements et non le financeur de politiques éloignées de leur coeur de métier.

Comme cela a été indiqué précédemment, votre rapporteur pour avis appelle à un réexamen des ressources et des missions de l'ANAH ainsi qu'à une réflexion sur les aides au logement.

Pour ces raisons, votre commission pour avis a adopté à l'initiative de votre rapporteur pour avis, un amendement de suppression du présent article.

Article 54 - Contribution financière au développement de l'offre de logements sociaux

Commentaire : cet article a pour objet de modifier le montant des ressources affectées au fonds qui contribue au développement et à l'amélioration de logements locatifs sociaux.

I. Le dispositif

La Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) gère un fonds qui contribue au développement et à l'amélioration de logements locatifs sociaux.

Ce fonds est alimenté par :

-  la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que des terrains à bâtir (120 millions d'euros) ;

- et par une fraction de la cotisation additionnelle versée par les bailleurs sociaux (70 millions d'euros/an).

L'article 54 prévoit que le fonds sera désormais alimenté par une fraction de la taxe de cotisation et de la taxe de cotisation additionnelle versées par les bailleurs sociaux à hauteur de 120 millions d'euros par an pour les années 2015 à 2017.

Dans le même temps, l'article 15 du projet de loi de finances diminue fortement le montant de la taxe sur les plus-values affecté au fonds de 120 millions à 45 millions, montant estimé plus proche du rendement réel de la taxe.

Ainsi, alors que les ressources affectées au fonds atteignaient 190 millions d'euros, elles atteindraient désormais 165 millions, soit une baisse de 15 %.

II. La position de votre commission

Les représentants de l'Union sociale pour l'habitat ont fait part à votre rapporteur pour avis de leur opposition à cette mesure considérant qu'elle revenait à un prélèvement sur les résultats financiers des organismes de logement social, en contradiction avec l'engagement de l'État de garantir dans le temps la suppression du prélèvement sur le potentiel financier, réaffirmé dans le préambule de l'Agenda HLM 2015-2018 signé le 25 septembre dernier.

Lors de son audition devant votre commission, Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, a justifié cette mesure par le souhait d'associer davantage les bailleurs sociaux au financement et à la mise en oeuvre de la politique du logement social.

Votre commission pour avis est favorable à l'adoption de cet article sans modification.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mercredi 5 novembre 2014

- Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) : Mme Sabine Basili , vice-présidente, MM. Sébastien Sauvaget , chargé de mission du pôle économique, et Dominique Proux , directeur des relations institutionnelles ;

- Agence nationale de l'habitat (ANAH) : Mme Blanche Guillemot , directrice générale, et M. Jacques Berger , directeur adjoint en charge de la direction administrative et financière ;

- Fédération française du bâtiment (FFB) : M. Bernard Coloos , directeur des affaires économiques et Benoît Vanstavel , responsable des relations avec le Parlement ;

Jeudi 13 novembre 2014

- Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) : MM. François Payelle , président, et Jean-Michel Mangeot , délégué général ;

- Union sociale pour l'habitat (USH) : M. Frédéric Paul , délégué général, Mme Marianne Louis , secrétaire générale, et M. Dominique Hoorens , directeur des études économiques et financières ;

- Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) : Mme Catherine Aubey-Berthelot , directrice générale, et M. Jean-Michel Fietier , secrétaire général ;

Mercredi 19 novembre 2014

- Union des entreprises et des salariés pour le logement - Action logement : MM. Jean-Baptiste Dolci , vice-président du conseil de surveillance, et Eric Thuillez , directeur général ;

Jeudi 20 novembre 2014

- Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) : M. Lionel Peynet , secrétaire général ;

- Cabinet de Mme Sylvia Pinel : Mme Emilie Piette , directrice de cabinet, MM. Thierry Laget , directeur adjoint du cabinet, Noam Leandri , conseiller budgétaire et social, Aurélien Tache , conseiller technique hébergement, et Maximilien Mézard , chef adjoint de cabinet, conseiller parlementaire.


* 1 Le projet annuel de performance indique le transfert vers le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » de 890000 euros destinés à l'accueil de jour des femmes victimes de violence

* 2 Rapport sur l'hébergement et la prise en charge financière des demandeurs d'asile établi par l'inspection générale des finances, l'inspection générale des affaires sociales et l'inspection générale de l'administration, avril 2013, page 13

* 3 L'étude, comparant les loyers de la zone II et ceux de la zone III (la zone I regroupe Paris et les villes nouvelles d'Ile-de-France, la zone II regroupe toutes les agglomérations comprenant plus de 100 000 habitants, les franges de l'Ile-de-France, des agglomérations plus petites avec un marché immobilier tendu, la zone III correspond au reste du territoire), montre que les loyers de la zone II sont plus élevés de 5,3 % toutes choses égales par ailleurs. L'étude précise également que les aides « plus importantes dans la zone II n'auraient eu aucun effet sur la qualité des logements locatifs privés, telle qu'elle peut être mesurée dans les enquêtes ».

* 4 L'adaptation du parc de logements au vieillissement et à la dépendance, Conseil d'analyse stratégique, octobre 2011

* 5 Rapport de M. Luc BROUSSY au nom de la mission interministérielle sur l'adaptation de la société française au vieillissement de sa population remis en janvier 2013 à Michèle DELAUNAY alors ministre déléguée aux personnes âgées et à l'Autonomie, page 29

* 6 L'offre en établissements d'hébergement pour personnes âgées en 2011, DREES, Études et résultats n° 877, février 2014

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