LA FRANCOPHONIE

I. LA FRANCOPHONIE : UN ENJEU GÉOPOLITIQUE DÉTERMINANT DANS UN MONDE GLOBALISÉ

A. LA PROCHAINE DIRECTION DE L'ORGANISATION INTERNATIONALE DE LA FRANCOPHONIE : UNE QUESTION HAUTEMENT STRATÉGIQUE

Ce sera en marge des travaux du XV e sommet de la Francophonie, qui se tiendra les 29 et 30 novembre 2014 à Dakar, que sera nommé le ou la prochain(e) secrétaire général(e) de l'Organisation internationale de la Francophonie, qui doit succéder à M. Abdou Diouf qui occupe ces fonctions depuis le 1 er janvier 2003. Les chefs d'État et de gouvernement des 57 pays membres de l'OIF devront choisir une personnalité faisant consensus parmi les cinq candidats qui se sont jusqu'ici publiquement déclarés : quatre candidats africains (Maurice, République du Congo, Burundi et Guinée équatoriale) et une candidate canadienne.

Cette nomination sera déterminante pour la définition des orientations stratégiques qui seront portées par l'OIF, qui rassemble 57 États membres, 20 États observateurs et trois États associés, afin de renforcer la position et l'influence de la Francophonie multilatérale sur les principaux enjeux géopolitiques qui animent la scène internationale. Comme le rappelle l'Observatoire de la langue française de l'OIF dans son rapport de 2010 2 ( * ) , 85 % des locuteurs francophones seront en Afrique à l'horizon 2050. Le continent africain attire désormais les convoitises des grandes puissances et pays émergents de part et d'autre du monde, des États-Unis à la Chine, en passant par le Brésil, l'Inde et la Russie, du fait de son dynamisme démographique qui alimente, par l'arrivée prévue sur le marché du travail africain de 160 millions de jeunes entre 2010 et 2030 3 ( * ) , une croissance économique solide.

Historiquement, le poste de secrétaire général de l'OIF, créé en 1997 à l'issue du sommet de la Francophonie de Hanoï, a toujours été détenu par un Africain, le Sénégalais Abdou Diouf ayant succédé en 2003 à l'Égyptien Boutros Boutros-Ghali. L'administrateur de l'OIF est, depuis 2006, le Québécois Clément Duhaime.

La candidature de Mme Michaëlle Jean, bien qu'ardemment soutenue par le gouvernement canadien et ceux des provinces du Québec et du Nouveau-Brunswick, soulève un certain nombre de critiques de la part de ceux qui estiment que la nomination d'une ancienne gouverneure générale du Canada, représentante de la Reine de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord qui dirige, par ailleurs, le Commonwealth, constituerait un signal troublant pour la Francophonie multilatérale. D'autres, à l'inverse, mettent en avant la capacité de Mme Jean, femme d'État d'origine haïtienne et ancienne détentrice de la nationalité française 4 ( * ) , ayant été gouverneure d'un pays profondément attaché au multilinguisme, à incarner une Francophonie moderne, ouverte sur le monde et qui ne soit plus perçue comme « arc-boutée » sur la rivalité ancienne entre le français et l'anglais sur la scène internationale.

Dans ces conditions, votre rapporteur pour avis souligne l'importance pour la France de peser de tout son poids sur un choix aussi stratégique que la désignation du futur secrétaire général de l'OIF et déterminant pour la capacité de communauté francophone à s'imposer comme un espace géopolitique cohérent au sein d'un monde globalisé. Il appartient à la France de marquer de son empreinte les prochaines orientations stratégiques de l'OIF, à l'heure où notre pays entend renouveler, notamment à travers les interventions recentrées de l'Agence française de développement, son partenariat privilégié avec l'Afrique dans ses dimensions géopolitique, linguistique, éducative, culturelle et économique.

Pour mémoire, votre rapporteur pour avis a toujours milité, au travers de ses précédents rapports pour avis sur les crédits consentis à la Francophonie, pour une plus grande implication de nos départements et collectivités d'outre-mer dans la mise en oeuvre et l'animation de notre politique francophone et de promotion de la langue française au sein d'espaces aussi stratégiques que l'Océan Indien, l'Océan Pacifique et les Caraïbes.


* 2 Observatoire de la langue française, La langue française dans le monde en 2010 , OIF - Éditions Nathan, Paris, 2010.

* 3 Institut de recherche pour le développement, « L'Afrique au grand tournant démographique », in Fiches d'actualité scientifique , n° 369, mars 2011.

* 4 Elle a fait le choix d'y renoncer afin de lever toute ambiguïté sur le plan diplomatique lorsqu'elle s'apprêtait à assumer, en tant que Gouverneure générale du Canada, la responsabilité de commandante-en-chef des forces armées canadiennes (décret du 23 septembre 2005 portant libération des liens d'allégeance à l'égard de la France de Mme Michaëlle Jean).

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