C. LES FINANCEMENTS SUR PROJET : DES RESSOURCES PROPRES COMPLÉMENTAIRES CRUCIALES POUR LES OPÉRATEURS PUBLICS DE LA RECHERCHE

1. L'Agence nationale de la recherche : pivot du soutien à des projets à fort effet de levier

L'Agence nationale de la recherche (ANR) se voit attribuer, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, des crédits de paiement d'un montant de 610 millions d'euros, contre 605,1 millions d'euros en 2014. Disposant d'un budget de gestion de l'ordre de 30 millions d'euros permettant de couvrir des dépenses de personnel et de fonctionnement somme toute assez limitées, ce sont un peu plus de 580 millions d'euros qui seront consacrés au budget d'intervention de l'ANR en 2015.

Pour les années 2011, 2012 et 2013, sur la base des ressources comptabilisées aux comptes financiers des sept EPST du programme 172 dont la dotation pour charges de service public est portée par le ministère chargé de la recherche, la part des financements récurrents a légèrement augmenté entre 2011 et 2012, passant de 75,49 % à 76,78 %, puis plus légèrement diminué à 75,74 % en 2013. Au cours de la même période, la part des ressources issues des financements de l'ANR a décru, passant de 5,21 % en 2011 à 4,82 % en 2013, tandis que la part des ressources issues du programme des investissements d'avenir (PIA) est montée en puissance, passant de 0,07 % en 2011 à 2,36 % en 2013. Quant à la part des ressources issues des programmes européens, elle a légèrement progressé (de 2,39 % en 2011 à 2,86 % en 2013). Enfin, la part des ressources issues des financements nationaux sur projets ou sur programmes incitatifs de recherche autres que ceux portés par l'ANR 35 ( * ) a diminué, passant de 7,81 % en 2011 à 6,58 % en 2013.

Un certain nombre d'organismes de recherche ont bénéficié du redéploiement de crédits de l'ANR opéré en 2013. Le CNRS a ainsi vu son budget abondé de près de 25 millions d'euros, ce qui lui a permis d'augmenter les dotations globales déléguées aux unités de recherche de 10 % en début d'année 2013. L'INSERM, pour sa part, a bénéficié en 2013 d'une mesure de périmètre de 7,644 millions d'euros au titre du redéploiement des financements de l'ANR, qui ont été consolidés depuis dans sa subvention pour charges de service public, et reversés en totalité aux unités de recherche à travers soit le soutien de base des laboratoires (fonctionnement courant), soit l'achat d'équipements des unités de recherche.

Toutefois, les organismes de recherche s'inquiètent d'une baisse du budget d'intervention de l'ANR constatée depuis plusieurs années qui conduit à un repli progressif des ressources propres des laboratoires. En effet, à titre d'exemple, le CNRS a reçu, hors investissements d'avenir, au titre des contrats financés par l'ANR, 189 millions d'euros en 2011, 186 millions d'euros en 2012, 181 millions d'euros en 2013 et s'attend à bénéficier de 157 millions d'euros en 2014, ce qui représente une diminution de ce type de financements de 17 % au cours de la période 2011-2014.

Évolution du taux de sélection des appels à projets de l'ANR de 2010 à 2014

2010

2011

2012

2013

2014

Engagements sur appels à projets

629,255 M€

557,036 M€

555,563 M€

432,469 M€

~ 395 M€

Nombre de projets soumis

6 447

6 311

6 829

7 029

~ 4 750

Nombre de projets financés

1 373

1 296

1 301

1 068

~ 950

Taux de projets financés

21,30 %

20,54 %

19,05 %

15,19 %

~ 20 %

Source : Agence nationale de la recherche

En 2014, un processus de sélection des projets en deux étapes a été mis en place pour l'appel à projets générique qui regroupe désormais la plupart des appels à projets antérieurs (thématiques et « blanc »). Les porteurs de projets soumettent d'abord une pré-proposition de cinq pages maximum, puis, à l'issue d'une première phase d'évaluation, seuls les porteurs de projets retenus constituent un dossier complet de 40 pages environ (auparavant, tous les candidats devaient rédiger une proposition complète). Pour cet appel à projets générique, le taux de sélection des pré-propositions s'est élevé à 33 % et le taux de sélection des projets à 27 % : ainsi 8,9 % des pré-propositions ont abouti à un projet sélectionné. Pour les appels à projets qui ont conservé une seule étape d'évaluation, le taux de sélection devrait être de l'ordre de 13 % pour environ 1 500 projets soumis.

La réduction sensible du taux de sélection pratiqué par l'ANR comporte un aspect aléatoire, connu de tous, pour la viabilité d'un certain nombre de projets pourtant prometteurs et qui présente un haut niveau d'excellence scientifique. Dans ces conditions, les organismes de recherche réexaminent leur politique de levée de ressources propres et entendent privilégier les contrats européens et les contrats directement conclus avec les entreprises. La baisse du taux de sélection de l'ANR présente également un risque de désintérêt de la part des entreprises pour la recherche collaborative.

Le décret n° 2014-365 du 24 mars 2014 modifiant le décret n° 2006-963 du 1 er août 2006 portant organisation et fonctionnement de l'Agence nationale de la recherche a considérablement renforcé le positionnement de l'agence au coeur de la coopération européenne et internationale. Il lui appartient désormais de rationaliser ses interventions dans le cadre de la construction et de l'intégration de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche (EEESR), notamment en se coordonnant plus fortement avec les autres agences européennes de la recherche avec lesquelles elle ne collaboraient jusqu'ici qu'au travers de quelques accords bilatéraux. La part de son budget consacrée à ces activités de coopération devrait ainsi augmenter d'une vingtaine de millions d'euros en 2011-2012 à près de 60 millions d'euros en 2015.

Votre rapporteure pour avis tient à rappeler la distinction qui doit être opérée entre les appels à projets annuels organisés par l'ANR et les appels à projets financés par le grand emprunt dans le cadre du PIA, pour lequel l'ANR intervient en tant que prestataire de service pour leur mise en oeuvre. Les premiers visent à soutenir des opportunités permettant de redonner de la souplesse à des équipes de recherche qui cherchent à créer une dynamique sur des explorations de court et moyen termes. Les seconds se concentrent sur le soutien aux initiatives structurantes pour le système d'enseignement supérieur et de recherche de la France à moyen et long termes.

Votre rapporteure pour avis estime , à cet égard, indispensable que l'ANR exerce au travers de ses appels à projets annuels une force d'impulsion plus forte dans la promotion de la recherche partenariale entre les universités, les organismes de recherche et les entreprises . En effet, la dépense privée de R&D est encore trop faible en France pour que nous puissions nous situer dans la moyenne de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière de ratio de la dépense consacrée à la recherche par rapport au produit intérieur brut. La France privilégie traditionnellement les crédits de structure (en particulier, la masse salariale des chercheurs, les équipements...) et n'accorde encore qu'une part relativement faible de financements compétitifs par rapport à d'autres pays de l'OCDE, qui se situent entre 40 % et 60 % de financements sur projet.

Par ailleurs, contrairement à une idée reçue, la précarité générée par les appels à projets de l'ANR est limitée. Ces appels à projets ne sont à l'évidence pas la première source de CDD embauchés dans le cadre de projets de recherche. En effet, l'ANR limite à 30 % le nombre de post-doctorants employés en CDD sur l'ensemble des personnels financés par un appel à projets. En revanche, elle n'applique pas de limitation au nombre de thèses pouvant être rémunérées par des financements sur projet, compte tenu de l'encadrement dans le temps de la formation doctorale et de la nécessité pour les doctorants de pouvoir solliciter différents types de financement.

Le pourcentage du préciput versé par l'ANR à l'établissement hébergeur des équipes soutenues s'établit à 11 %, soit 5,5 millions d'euros en 2014 dans le cas du CNRS. De l'avis de l'ensemble des organismes de recherche, ce taux couvre très mal les charges encourues dans les unités elles-mêmes (maintenance des équipements, fluides, ménage, etc., non imputables aux projets ANR) et les charges indirectes de support (gestion financière, contractuelle, de ressources humaines, environnement social des personnel temporaires...). Il convient de noter que ce préciput s'ajoute à un prélèvement de 4 % sur le montant du financement accordé à un projet au titre des frais de gestion reversé à l'établissement gestionnaire. Dans ces conditions, la subvention de l'État supporte de facto une part des coûts induits des contrats de recherche, évaluée à 20 millions d'euros en 2014 pour le CNRS. Cette situation sur les contrats financés par l'ANR concourt à annuler toute marge de manoeuvre sur la subvention alors qu'elle forme la partie arbitrable par la direction de l'organisme.

Dans ces circonstances, le CNRS appelle à une amélioration de la prise en compte des coûts induits par les contrats, via une majoration de la part des coûts indirects éligibles au sein des contrats financés par l'ANR, qui se limite, à l'heure actuelle, à 4 %. Il plaide pour un alignement de ce pourcentage sur le taux d' « overheads » des contrats européens qui atteint jusqu'à 25 %. L'INRIA souligne, pour sa part, que les frais de gestion représentent de 35 % à 40 % des coûts directs de ses projets.

Un certain nombre d'organismes de recherche pratiquent d'ores et déjà la présentation de leurs projets en coûts complets dans le cadre de financements européens. Ils sont donc prêts à mettre en oeuvre cette méthodologie de coûts complets pour les projets financés par l'ANR afin de justifier plus précisément leurs frais de gestion et leurs coûts indirects.

Le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a lancé une concertation avec les organismes de recherche et les universités en vue d'opérer une augmentation progressive du préciput de l'ANR sur les cinq à six prochaines années, tout en veillant à ce que cette mesure ne grève pas d'autant l'enveloppe de l'agence disponible pour le financement de projets de recherche. Un premier palier devrait être franchi prochainement à 18 %, puis à 21 %, aussi bien pour les appels à projets de l'ANR que ceux du PIA. En effet, le PIA pratique un préciput de 8 %, ce qui semble insuffisant pour des projets de recherche de moyen et long terme, pouvant s'étendre sur dix ans, qui entraînent des charges fixes extrêmement lourdes pour les structures qui les portent.

2. L'indispensable renforcement de la capacité de nos laboratoires à solliciter des financements sur projet européens

Les appels à projets européens empruntent principalement deux canaux :

- les bourses « ERC » attribuées par le Conseil européen de la recherche (« European Research Council ») : les principaux organismes de recherche français enregistrent généralement d'excellentes performances dans le cadre de ces appels d'offre qui financent essentiellement des projets portés par un seul chercheur. Dans leurs domaines d'excellence respectifs, le CNRS, l'INSERM et l'INRIA font ainsi partie des premières institutions européennes en termes d'accueil de lauréats de bourses ERC au sein de leurs structures de recherche et de projets ERC gérés. À titre d'exemple, l'INRIA a enregistré un taux de succès de 22 % au programme « Idées » de l'ERC, contre une moyenne européenne de 10 %, et 5 % des personnels permanents de l'institut bénéficient d'un financement de l'ERC ;

- les appels à projets financés dans le cadre du programme-cadre de recherche et développement technologique (PCRDT) en faveur de la recherche collaborative dans les domaines des technologies clés et des défis sociétaux : ces appels à projets exigent la constitution de consortia complexes associant plusieurs équipes de recherche issues de différentes structures publiques ou privées dans plusieurs pays européens. L'ingénierie pour le montage de tels projets pose des difficultés certaines aux équipes de recherche françaises.

La France a été le troisième pays bénéficiaire du 7 e PCRDT, bien qu'elle enregistre une diminution sensible de la participation de ses équipes de recherche aux appels à projets européens, par rapport au 6 e PCRDT. En effet, les financements obtenus par les participants français sont passés de 13 % pour le 6 e PCRDT à 11,4 % pour le 7 e PCRDT, cette tendance à la baisse étant particulièrement marquée dans la seconde partie du PCRDT (pour la période 2011-2013). Le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche considère que ces performances sont insuffisantes au regard des capacités de recherche de notre pays tout autant que de la contribution de la France au budget de l'Union européenne, de l'ordre de 16,4 % pour la période 2007-2013. Il est à noter que la France contribue désormais au budget communautaire à hauteur de près de 18 %. Un différentiel de 7 % pour le taux de retour de notre pays sur ce budget correspondrait à une perte de 700 millions à 800 millions d'euros en matière de recherche, soit plus que le budget d'intervention de l'ANR et presque 10 % du budget national en faveur de la recherche.

Il s'avère que les acteurs français de la recherche répondent moins aux appels à projets communautaires, comparativement à leurs partenaires européens, et se situent ainsi au cinquième rang seulement des déposants. Cependant, la France se hisse au troisième rang des pays bénéficiaires, avec un taux de succès moyen de 24 % pour les projets déposés par les équipes françaises, soit l'un des meilleurs taux parmi ceux des grands participants et sensiblement supérieur au taux de succès moyen au 7 e PCRDT, estimé à 20 %. Cette situation appelle une analyse partagée : les difficultés et les lourdeurs à constituer des équipes sont souvent évoquées à un moment où les chercheurs se plaignent de trop de bureaucratie.

Fort heureusement, l'ERC est relativement épargné de la « fureur bureaucratique » de la Commission européenne. En revanche, les organismes de recherche regrettent vivement que les efforts de simplification administrative promis par la Commission européenne n'aient pas véritablement produit d'effets concluants sur la complexité du montage des projets candidats au PCRDT. Pour rappel, le CNRS avait été particulièrement « épinglé » par les audits conduits par les autorités bruxelloises pour la gestion de ses projets financés dans le cadre du 6 e PCRDT. Or, le CNRS avait souligné l'incohérence qu'il y avait à privilégier la capacité de « reporting » administratif d'une équipe de recherche sur l'évaluation de l'excellence scientifique de ses activités. L'audit des projets du PCRDT est ainsi très mal perçu au sein de la communauté française de recherche qui redoute l'immixtion d'armada d'auditeurs dans la revue des agendas personnels. Dans ces conditions, les chercheurs français semblent peu enclins à s'aventurer dans la coordination de projets européens d'envergure.

Face à ce constat, votre rapporteure pour avis juge incontournable l'émergence de nouveaux profils de chercheurs expérimentés, appelés à développer et consolider des compétences en matière de coordination scientifique et administrative de projet. Ce type de profil mériterait d'être mieux valorisé dans le déroulement des carrières scientifiques au sein des organismes de recherche et des universités . En effet, alors que les bénéficiaires de bourses ERC perçoivent des primes d'excellence scientifique, les coordonnateurs de projets dans le cadre du PCRDT ne sont pas rétribués pour leurs efforts de conception et d'animation et leur mission pèse donc sur le financement des frais de structure du projet collectif.

Votre rapporteure pour avis se félicite, toutefois, de la mise en place par les organismes de recherche de stratégies proactives dans la recherche de financements européens, destinées à accompagner leurs équipes de la veille jusqu'au terme des projets subventionnés. L'INRIA a ainsi constitué en son sein, en 2006, une direction scientifique chargée des partenariats européens disposant de cinq permanents, qui lui a permis d'impliquer fortement ses chercheurs dans le montage du KIC EIT ICT Labs (« Knowledge and Innovation Communities - European Institute of Innovation and Technology - Information and Communication Technologies »). L'INSERM a, pour sa part, créé une cellule ERC et une cellule Europe chargées de diffuser les informations nécessaires à la préparation des dossiers de candidature, au choix stratégique des panels de dépôt et à la mise en place de contrats européens des nouveaux lauréats.

Le CNRS, particulièrement offensif en la matière, a mis en place un dispositif qui mobilise près de 100 ETPT (hors ressources internes des laboratoires, difficiles à évaluer) à tous les niveaux de l'établissement, dont une dizaine d'ETPT au sein de la direction « Europe de la recherche et coopération internationale » et du réseau de correspondants pour l'Europe de la direction générale déléguée aux ressources, des chargés d'affaires européennes auprès des dix instituts de l'établissement, 75 ETPT au sein des services « Partenariats et valorisation » des délégations régionales et 8 ETPT d'ingénieurs de projet européen 36 ( * ) .

Les universités semblent moins bien armées que les organismes de recherche dans l'ingénierie de projets européens, les services universitaires de coopération européenne et internationale en matière de recherche demeurant encore embryonnaires dans la plupart des établissements. À cet égard, votre rapporteure pour avis plaide pour la constitution, au sein des nouvelles communautés d'universités et établissements (COMUE), de cellules « Europe » d'une masse positive qui permette aux établissements regroupés de mutualiser leurs moyens en matière d'ingénierie de projet et de gagner en visibilité dans le cadre des appels à projets européens . Il est impératif d'inscrire le montage de projets candidats aux financements européens comme un objectif stratégique porté par la COMUE au sein de son contrat de site signé avec l'État.

L'ANR a également inséré dans son plan d'action le soutien à la constitution de consortia associant des structures de recherche françaises en vue de l'obtention de financements européens.

Les organismes de recherche et les universités peuvent également compter sur le réseau des points de contact nationaux (PCN) destinés à informer les participants potentiels sur les opportunités offertes par le PCRDT et leur apporter conseil dans la préparation de leurs propositions. Le réseau est composé, pour chaque ligne d'action du PCRDT, d'un consortium réunissant des représentants des différentes institutions de recherche et d'innovation. La coordination générale est assurée par la mission Europe et international pour la recherche, l'innovation et l'enseignement supérieur (MEIRIES). Cette mission est remplie par trois ETP au sein du département des affaires européennes et internationales de la direction générale de la recherche et de l'innovation du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le ministère dispose, en outre, d'une enveloppe de 300 000 euros annuels répartis entre les différents consortia de PCN, afin de les aider à remplir leur mission. La mise en ligne du portail www.horizon2020.gouv.fr devrait également faciliter l'accompagnement des porteurs de projets français, candidats aux financements communautaires.

3. Le programme des investissements d'avenir : un apport déterminant pour la structuration de notre recherche sur le long terme

Le second programme des investissements d'avenir (PIA 2) en matière d'enseignement supérieur et de recherche a démarré au début du mois d'octobre 2014 avec le lancement de l'appel à projet « idex/i-site » doté de trois milliards d'euros en dotation non consommable. Le taux de sélection des projets est estimé à 4,5 %, ce qui limiterait le nombre de projets bénéficiaires à trois ou quatre idex et trois ou quatre i-sites. Le lancement de l'appel à projets « equipex » du PIA 2 est, lui, prévu pour le courant de l'année 2015.

Le Commissariat général à l'investissement (CGI) souligne que, sur ces deux types d'appels à projets, le premier PIA avait plutôt été marqué par l'abondance de candidats de très bonne qualité, qui n'avaient pu être retenus en raison du montant limité des financements disponibles (notamment dans le cas des equipex, pour lesquels plusieurs dizaines de projets considérés comme excellents par le jury n'ont pas été financés) ou des caractéristiques spécifiques des cahiers des charges (notamment dans le cas des idex, dont le cahier des charges obligeait à une puissance scientifique très élevée excluant certains projets, tels que ceux des universités de Lorraine et de Bourgogne-Franche-Comté, ce qui avait conduit le jury à demander à l'État de trouver les moyens de les soutenir).

Les deux appels à projets du PIA 2 ont ainsi été précisément pensés afin de dégager la possibilité de financer ces candidatures excellentes qui avaient émergé lors du PIA 1. Le CGI n'envisage donc aucun essoufflement des candidatures dans le cadre du PIA 2 et souligne que les premières indications en provenance de la communauté universitaire et scientifique donnent à penser que ces appels à projets sont très attendus.

S'agissant plus spécifiquement des initiatives d'excellence en formations innovantes (idefi) financées dans le cadre du premier PIA, votre rapporteure pour avis souhaite insister sur la nécessité de favoriser leur essaimage et d'en faire des leviers de transformation de l'enseignement supérieur, en particulier en capitalisant sur les expériences réalisées par les 36 idefi et en encourageant l'innovation en formation et en pédagogie dans le cadre de la politique contractuelle de site.

Les idefi ont enregistré des premiers succès particulièrement prometteurs. Les porteurs de projets s'illustrent par leur fort dynamisme dans le déploiement de leurs actions, la diversité des dispositifs pédagogiques innovants, au nombre de 259, des taux de réussite (87 %) et de satisfaction très élevés, des premiers essaimages sur le territoire, au nombre de huit, des cofinancements solides (quatre millions d'euros de « chiffre d'affaires » et sept millions d'euros de cofinancements) et un nombre d'étudiants suffisamment significatif (22 000) pour faire des idefi des démonstrateurs crédibles.

Contrairement à un certain nombre d'idées reçues, le PIA n'a jamais tenu de discours visant à privilégier la recherche technologique et la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale. Il est dérisoire, du reste, de vouloir diviser la recherche en fonction de ses finalités. L'histoire regorge d'exemples démontrant que des recherches fondamentales sans autre objet que d'élargir le champ des connaissances ont débouché, par la suite, sur la conception d'applications permettant le développement économique (les lasers, par exemple).

En tout état de cause, le PIA soutient tout autant le développement de l'excellence scientifique que l'ouverture aux applications économiques et industrielles potentielles :

- l'appel à projets « idex » (initiative d'excellence), doté dans le cadre du premier PIA de près de dix milliards d'euros, de même que les appels à projets « labex » (laboratoires d'excellence), « equipex » et « santé-biotechs » entendent accompagner la constitution d'universités de recherche de premier rang mondial et améliorer nos positions au sein des grands classements internationaux (tels que le classement de Shanghai) qui accordent une très large place aux performances en recherche de pointe. Un grand nombre d'idex permettent de concilier les exigences d'excellence scientifique et de conversion des résultats de la recherche en création de valeur ;

- certains appels à projets du premier PIA ont été spécifiquement conçus pour la valorisation et le transfert : sociétés d'accélération du transfert de technologie (SATT), instituts de recherche technologie (IRT)...

Le PIA est un programme national fondé sur l'excellence. Il n'a pas pour objectif de mettre en oeuvre une procédure de rattrapage afin d'assurer le rééquilibrage territorial dans la répartition des moyens de la recherche. Néanmoins, le CGI considère que la carte des projets financés montre que l'ensemble des régions sont parvenues à valoriser leurs points forts dans le cadre du premier PIA. Si le PIA 2 ne remet pas en cause le principe de non-régionalisation dans l'attribution de ses financements, les dossiers seront examinés en tenant compte de la nécessité de soutenir des projets qui n'auraient pas été sélectionnés dans le cadre des idex du premier PIA compte tenu de l'exigence d'un champ d'excellence scientifique très large mais qui représentent une belle opportunité de promouvoir l'excellence thématique plus restreinte d'un territoire. Le PIA 2 n'adopte donc pas d'approche d'équilibre territorial, pas plus que le premier PIA, mais, en élargissant l'espace des excellences, il pourrait permettre de mobiliser plus fortement les forces territoriales, notamment à Pau et en Auvergne. Toutefois, vu le nombre de candidatures annoncées, le processus de sélection fera assurément beaucoup de déçus.

En outre, le PIA participe de la structure du paysage universitaire autour de regroupements puissants puisque les projets doivent faire la preuve de la mise en commun de compétences substantielles attestant de la volonté des établissements de fonder une université moderne à visibilité internationale : des universités de recherche de premier rang mondial pour les idex, des universités à forte identité thématique en lien solide avec l'économie pour les i-sites.


* 35 Comme les financements attribués par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) ou encore par la Banque publique d'investissement (BPI).

* 36 Métier lancé par le CNRS au cours du 6 e PCRDT pour soutenir les chercheurs chargés de la coordination de grands projets européens ambitieux.

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